Différences entre les versions de « Vivre en tout-doux-cratie à Picasoftland »

De April MediaWiki
Aller à la navigationAller à la recherche
Ligne 84 : Ligne 84 :
 
<b>Quentin Duchemin : </b>On va détailler un peu plus tout ça.
 
<b>Quentin Duchemin : </b>On va détailler un peu plus tout ça.
  
==12' 37==
+
==12'37==
  
<b>Rémi Uro: </b>En ayant observé quelques organisations, c'estclassique de se rendre compte du problème de la verticalité, de vouloir passer à une structure sans pouvoir, centralisée, horizontale, et cette espèce de - je vais détailler - mythe de l'horizontalité qui résoudrait tout. En réalité, il crée d'autres problèmes, il recrée des structures de pouvoir informel, et dans la refonte de nos statuts, on a essayé de se positionner contre ça.
+
<b>Quentin Duchemin : </b>En ayant observé quelques organisations, j'ai l'impression que c'est classique de se rendre compte du problème de la verticalité, de vouloir passer à une structure sans pouvoir centralisé, horizontale, et cette espèce, que je vais détailler, de mythe de l'horizontalité qui résoudrait tout. En réalité, cela crée d'autres problèmes, cela recrée des structures de pouvoir informel et, dans la refonte de nos statuts, on a essayé de se positionner contre ça.
  
En particulier, je me base rétrospectivement sur une brochure que vous pouvez lire aujourd'hui sur infokiosques <ref>[https://infokiosques.net/ Infokiosques]</ref>: "La tyrannie de l'absence de structure" <ref>[https://www.sanstransition.org/wp-content/uploads/Tyrannie-de-labsence-de-structure.pdf La tyrannie de l'absence de structure, texte intégral, PDF]</ref>, écrite en 1970 par Joreen Freeman, une activiste du mouvement de libération des femmes étasunien. Ça détaille très bien qu'en réalité, une structure de groupe qui se dit informelle et se veut horizontale, et bien ça veut  dire qu'il y a forcément des normes implicites au sein de ce groupe et du coup, ces normes, sur lesquelles reposent les décisions, sont connues de peu de personnes. Elles sont connues, finalement, des personnes qui vont le plus discuter entre elles. Il y a beaucoup de personnes dans ce mode d'organisation qui ont l'impression que des choses se passent sans elles, mais sans forcément réussir à identifier pourquoi.
+
Je me base en particulier, rétrospectivement, sur une brochure que vous pouvez lire aujourd'hui sur infokiosques, <em>La tyrannie de l'absence de structure</em> <ref>[https://www.sanstransition.org/wp-content/uploads/Tyrannie-de-labsence-de-structure.pdf <em>La tyrannie de l'absence de structure</em>, texte intégral, PDF]</ref>, écrite en 1970 par Joreen Freeman, une activiste du mouvement de libération des femmes étasunien. Ça détaille très bien qu'en réalité, dans une structure de groupe qui se dit informelle et qui se veut horizontale, il y a forcément des normes implicites au sein de ce groupe et, du coup, ces normes, sur lesquelles reposent les décisions, sont connues de peu de personnes. Elles sont connues, finalement, des personnes qui vont le plus discuter entre elles. En fait, dans ce mode d'organisation, beaucoup de personnes ont l'impression que des choses se passent sans elles, mais sans forcément réussir à identifier pourquoi.
  
En fait, du coup, il y a deux choses créées par l'absence de structure. D'abord la formation d'une élite informelle : c'est souvent un groupe d'amis qui se connaissent très bien, qui étaient peut-être là à l'origine de l'asso, qui fonctionnent sur des canaux de communication qui peuvent être informels aussi, un petit peu parallèles aux canaux classiques, qui vont discuter entre eux par téléphone, en se voyant autour d'un bar, d'un café, etc. Et donc, finalement, ils vont agir, certes de manière décentralisée et sans pouvoir explicite, mais sans le consentement, forcément, des autres membres et surtout, ces membres n'ont pas forcément la connaissance de ce qui se passe dans l'asso. Et donc de la même manière qu'on avait avant le bureau qui décide, on a là une sorte de bureau informel qui, assez souvent, émerge.
+
Du coup, l'absence de structure créée deux choses.<br/>
 +
D'abord la formation d'une élite informelle : c'est souvent un groupe d'amis qui se connaissent très bien, qui étaient peut-être là à l'origine de l'asso, qui fonctionnent sur des canaux de communication qui peuvent être informels aussi, un petit peu parallèles aux canaux classiques, qui vont discuter entre eux par téléphone, en se voyant autour dans un bar autour d'un café, etc. Ils vont finalement agir, certes de manière décentralisée et sans pouvoir explicite, mais sans le consentement, forcément, des autres membres et surtout, ces membres n'ont pas forcément la connaissance de ce qui se passe dans l'asso. Donc de la même manière qu'on avait, avant, le bureau qui décide, on a là une sorte de bureau informel qui, assez souvent, émerge.
  
Donc, la thèse de Joreen Freeman est que la formation de ces élites est inévitable. Mais pire encore, le fait qu'il y ait une élite informelle qui continue de propager le mythe de l'absence de structure, rend très difficile de mettre des bâtons dans les roues de ces structures de pouvoir, puisqu'elles sont censées ne pas exister. Et on sait très bien que les structures de pouvoir qui sont implicites et qui se distinguent sont les plus difficiles à remettre en question.
+
La thèse de Joreen Freeman est que la formation de ces élites est inévitable. Mais pire encore ! Le fait qu'il y ait une élite informelle qui continue de propager le mythe de l'absence de structure rend très difficile de mettre des bâtons dans les roues de ces structures de pouvoir, puisqu'elles sont censées ne pas exister. Et on sait très bien que les structures de pouvoir qui sont implicites et qui se distinguent sont les plus difficiles à remettre en question.
 +
Donc, premier problème, formation d'une élite informelle.
  
Donc premier problème, la formation d'une élite informelle. Deuxième problème, l'absence de structures, qui crée souvent un système de stars qui répond à un besoin de société qu'on voit un peu partout, y compris dans les groupes militants. Besoin d'écouter un groupe cohérent, d'avoir une personne qui va porter les propos du groupe ou de la structure, mais pas d'avoir un ensemble de personnes avec leur individualité propre qui va constituer le groupe.  
+
Deuxième problème. L'absence de structure crée souvent un système de star qui répond à un besoin de société qu'on voit un peu partout, y compris dans les groupes militants : écouter un bouc cohérent, avoir une personne qui va porter les propos du groupe ou de la structure, mais pas avoir un ensemble de personnes, avec leur individualité propre, qui va constituer le groupe.  
  
Il y a beaucoup de structures qui se battent contre ça. Je ne sais pas si vous avez un petit peu suivi chez Framasoft, mais ??? se bat contre le fait de ne pas être considéré comme le directeur de Framasoft, qui prend toutes les décisions et est le référent ultime. ??? va ??? le fait d'être considéré comme le directeur de PeerTube. Mais voilà, beaucoup de gens ont besoin de la création de ces stars. Donc, dans un groupe qui est sans structure et sans porte-parole, en tout cas désigné pour telle ou telle chose à un moment donné, eh bien des porte-paroles émergent. Mais de la même manière que les élites informelles, qui peuvent être difficilement remises en question du fait qu'elles n'ont pas été désignées. Donc, ce sont des pouvoirs qui se prennent, mais qui sont difficilement révocables et qui vont finir par créer des frustrations et du désengagement de la part des membres.
+
Il y a beaucoup de structures qui se battent contre ça. Je ne sais pas si vous avez un petit peu suivi chez Framasoft, mais Pyg [Pierre-Yves Gosset] se bat contre le fait de ne pas être considéré comme le directeur de Framasoft, qui prend toutes les décisions et est le référent ultime. Pouhiou se bat contre le fait d'être considéré comme le directeur de PeerTube. Mais beaucoup de gens ont besoin de la création de ces stars.
  
Effectivement, ça crée des sortes de tensions internes, en général, dans les groupes horizontaux, et notamment militants, parce que personne n'est dupe. D'un côté, on a les élites, mais qui n'ont pas forcément de mauvaises intentions, qui ne se rendent parfois même pas compte que ce sont des élites et qui vont se cacher derrière le drapeau anti-élite et absence de structure : regardez, on est horizontal, on n'a pas de chef, etc. Mais elles existent. Bon, ça crée un certain nombre de tensions.
+
Donc, dans un groupe qui est sans structure et sans porte-parole, en tout cas désigné pour telle ou telle chose à un moment donné, eh bien des porte-paroles émergent qui, de la même manière que les élites informelles, peuvent être difficilement remis en question du fait qu'ils n'ont pas été désignés. Donc, ce sont des pouvoirs qui se prennent, mais qui sont difficilement révocables et qui vont finir par créer des frustrations et du désengagement de la part des membres.
  
L'autrice de <em>La tyrannie de l'absence de structure</em> propose sept principes pour essayer de créer une structure qui soit démocratique, donc pas vertical, mais qui évite les écueils de l'absence de structure. Ces principes sont détaillés là.  
+
Ça crée effectivement, en général, des sortes de tensions internes, dans les groupes horizontaux, notamment militants, parce que personne n'est dupe. D'un côté on a les élites, mais qui n'ont pas forcément de mauvaises intentions, qui ne se rendent parfois même pas compte qu'elles sont des élites, qui vont se cacher derrière le drapeau anti-élite et absence de structure : « regardez, on est horizontal, on n'a pas de chef, etc. », mais elles existent, donc ça crée un certain nombre de tensions.
  
Le premier, c'est la délégation démocratique d'un pouvoir qui est limité, pour des tâches qui sont délimitées, et à des personnes compétentes. Donc, typiquement pour nous, on va en parler, ça pourrait être le fait de donner à des personnes l'accès administrateur-système à des machines. Mais ces personnes sont responsables devant tous les autres membres et leur pouvoir peut être révoqué à n'importe quel moment.
+
L'autrice de <em>La tyrannie de l'absence de structure</em> propose sept principes pour essayer de créer une structure qui soit démocratique, donc pas verticale, mais qui évite les écueils de l'absence de structure. Ces principes sont détaillés là.
 +
 
 +
Le premier, c'est la délégation démocratique d'un pouvoir qui est limité, pour des tâches qui sont délimitées, à des personnes compétentes. Typiquement pour nous, on va en parler, ça pourrait être le fait de donner à des personnes l'accès administrateur-système à des machines, mais ces personnes sont responsables devant tous les autres membres et leur pouvoir peut être révoqué à n'importe quel moment.
 
   
 
   
Troisième chose : le pouvoir doit être dispersé entre un grand nombre de personnes afin d'éviter les monopoles. C'est quand même le but de l'horizontalité à la base. Quatrième chose : si ces personnes ont du pouvoir, il doit y avoir une rotation qui s'opère, pas trop souvent pour qu'elles puissent avoir le temps de se former, mais pas trop longuement, pour éviter les monopoles.
+
Troisième chose : le pouvoir doit être dispersé entre un grand nombre de personnes afin d'éviter les monopoles. C'est quand même le but de l'horizontalité à la base.
 +
 
 +
Quatrième chose : si ces personnes ont du pouvoir, il doit y avoir une rotation qui s'opère assez souvent mais pas trop souvent pour qu'elles puissent avoir le temps de se former, mais pas trop longuement pour éviter les monopoles.
  
Cinquième chose, c'est de donner le pouvoir par compétences et non par sympathie. Et donc de favoriser aussi une formation préalable de ces personnes plutôt qu'un apprentissage sur le tas. Qu'est ce que nécessite le fait de pouvoir former les gens ces jours-là, préalablement ? C'est d'avoir l'information. Et c'est ça en fait le cœur de ce qu'on va présenter après avec la tout-doux-cratie : c'est que l'information doit être diffusée au plus grand nombre. Et on se rend bien compte que ça aussi, c'est un problème en général dans les structures militantes, associatives, etc. : on ne sait pas où trouver l'information. Les gens se sentent illégitimes du fait de ne pas avoir accès à cette information et ne pas pouvoir l'utiliser. Donc, diffuser l'information à tout le monde, à l'extérieur et à l'intérieur, avec cette idée que l'information, finalement, c'est le pouvoir.
+
Cinquième chose, c'est de donner le pouvoir par compétences et non par sympathie, donc de favoriser aussi une formation préalable de ces personnes plutôt qu'un apprentissage sur le tas. Qu'est ce que nécessite le fait de pouvoir former les gens préalablement ? C'est d'avoir l'information. Et c'est ça en fait le cœur de ce qu'on va présenter après avec la tout-doux-cratie : c'est que l'information doit être diffusée au plus grand nombre. Et on se rend bien compte que ça aussi c'est un problème en général dans les structures militantes, associatives, etc. : on ne sait pas où trouver l'information. Beaucoup de gens se sentent illégitimes du fait de ne pas avoir accès à cette information et de pouvoir l'utiliser. Donc diffuser l'information à tout le monde, à l'extérieur et à l'intérieur, avec cette idée que l'information, finalement, c'est le pouvoir.
  
Et enfin un accès égalitaire, pour toutes et tous, aux ressources, sachant que les compétences et les connaissances sont considérées comme des ressources.  
+
Et enfin, un accès égalitaire aux ressources pour toutes et tous, sachant que les compétences et les connaissances sont considérées comme des ressources.  
  
Et donc ces sept principes, dans des parts différentes, sont globalement au cœur de ce qu'on a essayé de faire avec la tout-doux-cratie.
+
Donc ces sept principes, dans des parts différentes, sont globalement au cœur de ce qu'on a essayé de faire avec la tout-doux-cratie.
 
   
 
   
Parmi les principes fondateurs du système qu'on a essayé de faire en s'inspirant de tout ça, ce sont des réflexions qu'on a eu de façon beaucoup moins structurées pendant ce temps. Mais du coup, on voit qu'on s'en est beaucoup inspiré et le voir a posteriori permet de mieux comprendre les raisonnements qu'on a pu avoir.
+
<b>Rémi Uro : </b>On a essayé de faire système avec des principes fondateurs en s'inspirant de tout ça. Pour la petite histoire on a lu tout ça à posteriori, ce sont des réflexions qu'on a eu de façon beaucoup moins structurées pendant ce Picacamp dont on parlait tout à l'heure. Du coup, on voit qu'on s'en est beaucoup inspiré et voir à posteriori permet de mieux comprendre les raisonnements qu'on a pu avoir.
  
 
==Les principes fondateurs de la tout-doux-cratie==
 
==Les principes fondateurs de la tout-doux-cratie==

Version du 19 novembre 2022 à 14:25


Titre : Vivre en tout-doux-cratie à Picasoftland

Intervenant : Rémi Uro et Quentin Duchemin

Lieu : JDLL [Journées du logiciel libre de Lyon] 2022

Date : Samedi 2 avril 2022

Durée : 54 min 46

Vidéo

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir. Logo JDLL ?

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Résumé

Chez Picasoft, chacun·e fait ce qu'iel veut, mais tout en douceur...

Pour faciliter les actions des personnes motivées tout en favorisant la recherche de compromis, l'association Picasoft prend ses décisions par Tout-Doux-Cratie. Présentation du concept et retour d'expérience sur son utilisation et ses limites.

Transcription

Quentin Duchemin : Comme vous pouvez le voir, on va parler de tout-doux-cratie à Picasoftland.

L'idée de la conférence est de présenter un mode de gouvernance qu'on a mis en place à Picasoft, on va expliquer ce que ça fait. C'est une réflexion qui peut être intéressante pour toutes les structures sur la manière d'organiser les règles de fonctionnement de ces structures.

Rémi Uro: Pour commencer, un peu de contexte. Picasoft est un chaton [1]. C'est clair pour tout le monde ? OK, parfait, je ne fais pas de rappel là-dessus. Nous sommes un chaton qui existe depuis 2017, on a une trentaine de membres, on a 11 services ouverts [2] — un Mattermost, des pads — le tout sur trois serveurs. C'est une association composée principalement d'étudiants et d'étudiantes, de profs et d'anciens et anciennes de l'UTC, l'Université de technologie de Compiègne.

On a vocation à viser la communauté de l'UTC, mais aussi, plus largement, un peu tout le monde.

On a trois grands axes : l'hébergement, la sensibilisation, l'information.

L'hébergement c'est proposer les services dont je parlais tout à l'heure avec tout l'aspect technique pour maintenir ces serveurs, parce que ça ne tourne pas par magie. L'aspect sensibilisation, c'est organiser des conférences, des ateliers, des émissions de radio aussi et parler des sujets qui nous tiennent à cœur, comme la décentralisation, le Libre en général. Et aussi, puisqu'on a la chance d'être dans une université et d'avoir des profs qui sont bons en pédagogie, tout un axe formation pour essayer de former non seulement les étudiants et étudiantes mais aussi le grand public aux outils qu'on utilise, donc pour s'auto-héberger, pour apprendre à se servir de son ordinateur. Dans cet axe-là, on organise au sein des activités pédagogiques inter-semestres en effet, à l'UTC à la fin de chaque semestre, il y a deux semaines consacrées à des cours un petit peu différents des cours habituels. Chaque semestre, on a entre 20 et 40 étudiants et étudiants, juste une semaine, et on va parler de comment utiliser Linux, comment prendre en main des méthodes de gestion de versions GNU/Linux, etc., et aussi axé sur la liberté et les alternatives aux GAFAM. Et on participe aussi à ??? et Librecours : vous pourrez aller voir la conférence de Stéphane Crozat, on en parlera un peu plus tard plus en détail.

Quentin Duchemin : Quelques chiffres rapides pour se rendre compte que nous sommes quand même relativement modestes. On a quelques utilisateurs : sur notre Mattermost, 8000 utilisateurs et utilisatrices, un petit million de messages Et notre instance PeerTube où on accueille des associations comme l'association Scénarii, où on a un peu plus d'une centaine de vidéos. Le service de téléversement de fichiers où on a quelques milliers de fichiers. Ça reste relativement local à Compiègne, et c'est le but des CHATONS. Pour donner une idée, nous sommes globalement une trentaine de membres dans l'association : on définira plus tard la notion de membres, car ce n'est la notion de membre telle qu'on l'entend habituellement, des membres actifs qui vont aller faire des trucs techniques ou de la communication en permanence.

L'association Picasoft a été créée en 2017, asso 1901. Dès sa création nous nous sommes structurés de manière assez traditionnelle, avec un bureau qui est globalement l'organe décisionnaire, avec une présidence, de la trésorerie et puis éventuellement quelques autres rôles : responsable communication, vice-président, vice-présidente, etc., et un fonctionnement avec une assemblée générale où on réunit l'ensemble des membres tous les six mois. On présente les bilans moraux, les bilans financiers, et puis on les vote, on considère que c'est OK, on élit un nouveau bureau et c'est reparti pour un tour, puisque à l'UTC, les choses fonctionnent beaucoup par semestre. Donc une organisation somme toute assez classique.

À un moment donné, comme le niveau technique devenait important car on avait de plus en plus d'utilisateurs et d'utilisatrices, on s'est dit que la question de la sécurité rentrait en ligne de mire, puisque on a quand même des données qui peuvent être sensibles, celles des gens, des associations, des entreprises qui utilisent nos services pour discuter. Il y a toute cette question de réussir à faire en sorte que nos serveurs soient suffisamment sécurisés pour qu'on ne puisse pas rentrer dedans, que les membres ne puissent pas rentrer dans l'association et puis faire n'importe quoi. Donc, il y avait un peu cette idée à l'époque qu'il faut que la confiance que nous accordent les utilisateurs soit fondée, donc on va créer ce rôle de responsable technique qui va avoir pour but de bien cadrer les accès à l'infrastructure. Dans les statuts, le responsable technique a toutes les prérogatives autour de la distribution des accès, etc.

Rémi Uro: Mais aussi essayer de réfléchir à comment on va faire tourner les services. Sans entrer dans les détails techniques, avant on avait un fonctionnement un peu bordélique où chacun faisait son truc. Avec l'arrivée du responsable technique, il y a eu plus une structuration de comment on gère et on a essayé vraiment de bien encadrer tout ça.

Quentin Duchemin : Et puis voilà. Ça a super bien marché, franchement c'est nickel, on vous conseille la même chose.

Rémi Uro: En vrai, il y a eu des petits problèmes avec cette organisation-là.

Nous pouvons vous raconter une petite histoire qui nous est arrivée. Un membre du bureau qui était responsable technique - ça aurait pu être n'importe quel autre membre du bureau, le problème aurait été le même - donc ce responsable technique avait une vision, un peu comme disait Quentin. Il voulait vraiment cadrer les choses pour augmenter la confiance des utilisateurs et utilisatrices, et ça passait notamment par faire une architecture d'administration du système qui soit très bien encadrée, mais du coup très complexe, donc beaucoup plus difficile, pour des nouveaux et nouvelles membres, à prendre en main les outils, pour pouvoir monter en compétences dessus. Et ça allait un petit peu en contradiction avec la vision de certains autres membres qui préféraient avoir un truc ouvert : tu rentres dans l'association et, en deux heures, tu es autonome et tu peux monter de nouveaux services. Donc ça a posé des petites questions.

Et ce qui a vraiment déclenché un blocage, c'est que cette personne a refusé de donner des accès à un membre, alors que le reste de l'asso était pour que cette personne ait des accès. Donc ça a fait des histoires, ça a clashé en AG, je vous passe les détails. Mais, du coup, s'est posée cette question-là : d'un côté ce responsable technique — mais ça aurait pu être le responsable financier qui refuse de payer des trucs — donc un membre du bureau qui prend des décisions unilatérales et qui empêche le bon fonctionnement de l'asso au sens auquel l'entendent la plupart des membres.

Quentin Duchemin : Là vient aussi un problème statutaire, puisqu'on avait inscrit dans nos statuts que le responsable technique était le seul capable de donner les accès à l'infrastructure, c'est-à-dire de pouvoir se connecter au serveur et de faire des choses. Donc s'il refusait de le faire, soit on ne respectait pas nos statuts, soit on se soumettait simplement à ça, donc là on voyait bien que cela posait des problèmes. On a commencé à voir émerger un truc qu'on n'avait pas vu avant : le problème d'une organisation un peu bureaucratique et très verticale, qu'on avait souhaitée à la base pour pouvoir sécuriser les données des utilisateurs et augmenter leur confiance, et finalement qui a fait exploser le fonctionnement interne de l'asso.

Rémi Uro: Ce n'est pas ce qu'on avait souhaité et surtout, on a été pris par défaut par ce qu'on voyait autour et on ne s'était pas plus posé la question que ça.

Donc on a remarqué des problèmes, notamment la centralisation du pouvoir, qui va ralentir les initiatives des membres parce que si je veux faire un truc il me faut l'aval du bureau ; un manque de transparence parce que le bureau peut aussi faire des trucs dans son coin sans prévenir les autres. Ça amène de potentiels blocages, ça amène un désengagement des membres qui ne se sentent pas forcément écoutés et qui ne voient pas forcément ce qui se passe.

Donc, il y a un problème. Qu'est-ce qu'on a fait ? On en a parlé, on a organisé un ???, on s'est retrouvés tous ensemble chez Quentin à boire des bières.

Quentin Duchemin : On n'a pas bu des bières, il était 14 heures, peut-être après !

Rémi Uro: On a passé une grosse après-midi à discuter : qu'est ce qu'on fait ? Comment est-ce qu'on essaye de régler ce problème ?

En particulier, un des thèmes qui était un peu au centre de cette discussion, c'était entre le bazar et la cathédrale. Je ne sais pas si ce terme-là vous dit quelque chose. [3] est un essai d'Eric Raymond qui est paru en 1997. C'est la personne qui a utilisé, je crois, pour la première fois, le terme open source, qu'on n'aime pas trop, mais passons ! On est purement dans le développement logiciel. Il oppose la manière un peu bazar de faire, c'est-à-dire qu'il y a une multitude de développeurs et de développeuses qui vont collaborer, de manière pas forcément cadrée par une personne, donc il y a une grande adaptabilité, une grande flexibilité, avec l'idée que derrière va émerger un ordre spontané et que tout va bien se passer, c'est génial et, de l'autre côté, la vision un peu cathédrale de la chose, avec une ou plusieurs personnes dépositaires du pouvoir de décision, un petit groupe de développeurs et développeuses qui sont chargés du développement du code ; les gens, à l'extérieur, peuvent donner leur avis, mais bon !, on s'en fout un peu, il y a quand même un organe décisionnaire. Ces deux modes d'organisation ne nous paraissaient pas fonctionnels, pour les raisons qu'on va détailler après.

Quentin Duchemin : Au même moment, on avait aussi d'autres soucis dans l'asso, notamment la question de changer de banque et un autre point de blocage qui était une dissension entre les membres sur la portée politique de l'asso. Certains membres voyaient l'asso comme entièrement technique, là pour proposer une alternative et donner des services, point. Et d'autres étaient plus pour faire de la propagande un peu plus profonde et un peu plus politique. On se posait plein de questions et on s'est rendu compte que le problème c'était le mode de décision. On a donc décidé de changer de mode de décision et qu'il allait en découler la résolution de tous les problèmes.

On a aboli le concept de bureau, on a aboli le concept de cotisation. Avant, les membres devaient cotiser un euro par semaine, je crois, c'était trop. On a aboli ça. On a donné un pouvoir égal à tous les membres, le tout sur la base de la bienveillance, la gentillesse et le laisser-faire.

Rémi Uro: Voilà, c'est notre présentation !

Quentin Duchemin : On va détailler un peu plus tout ça.

12'37

Quentin Duchemin : En ayant observé quelques organisations, j'ai l'impression que c'est classique de se rendre compte du problème de la verticalité, de vouloir passer à une structure sans pouvoir centralisé, horizontale, et cette espèce, que je vais détailler, de mythe de l'horizontalité qui résoudrait tout. En réalité, cela crée d'autres problèmes, cela recrée des structures de pouvoir informel et, dans la refonte de nos statuts, on a essayé de se positionner contre ça.

Je me base en particulier, rétrospectivement, sur une brochure que vous pouvez lire aujourd'hui sur infokiosques, La tyrannie de l'absence de structure [4], écrite en 1970 par Joreen Freeman, une activiste du mouvement de libération des femmes étasunien. Ça détaille très bien qu'en réalité, dans une structure de groupe qui se dit informelle et qui se veut horizontale, il y a forcément des normes implicites au sein de ce groupe et, du coup, ces normes, sur lesquelles reposent les décisions, sont connues de peu de personnes. Elles sont connues, finalement, des personnes qui vont le plus discuter entre elles. En fait, dans ce mode d'organisation, beaucoup de personnes ont l'impression que des choses se passent sans elles, mais sans forcément réussir à identifier pourquoi.

Du coup, l'absence de structure créée deux choses.
D'abord la formation d'une élite informelle : c'est souvent un groupe d'amis qui se connaissent très bien, qui étaient peut-être là à l'origine de l'asso, qui fonctionnent sur des canaux de communication qui peuvent être informels aussi, un petit peu parallèles aux canaux classiques, qui vont discuter entre eux par téléphone, en se voyant autour dans un bar autour d'un café, etc. Ils vont finalement agir, certes de manière décentralisée et sans pouvoir explicite, mais sans le consentement, forcément, des autres membres et surtout, ces membres n'ont pas forcément la connaissance de ce qui se passe dans l'asso. Donc de la même manière qu'on avait, avant, le bureau qui décide, on a là une sorte de bureau informel qui, assez souvent, émerge.

La thèse de Joreen Freeman est que la formation de ces élites est inévitable. Mais pire encore ! Le fait qu'il y ait une élite informelle qui continue de propager le mythe de l'absence de structure rend très difficile de mettre des bâtons dans les roues de ces structures de pouvoir, puisqu'elles sont censées ne pas exister. Et on sait très bien que les structures de pouvoir qui sont implicites et qui se distinguent sont les plus difficiles à remettre en question. Donc, premier problème, formation d'une élite informelle.

Deuxième problème. L'absence de structure crée souvent un système de star qui répond à un besoin de société qu'on voit un peu partout, y compris dans les groupes militants : écouter un bouc cohérent, avoir une personne qui va porter les propos du groupe ou de la structure, mais pas avoir un ensemble de personnes, avec leur individualité propre, qui va constituer le groupe.

Il y a beaucoup de structures qui se battent contre ça. Je ne sais pas si vous avez un petit peu suivi chez Framasoft, mais Pyg [Pierre-Yves Gosset] se bat contre le fait de ne pas être considéré comme le directeur de Framasoft, qui prend toutes les décisions et est le référent ultime. Pouhiou se bat contre le fait d'être considéré comme le directeur de PeerTube. Mais beaucoup de gens ont besoin de la création de ces stars.

Donc, dans un groupe qui est sans structure et sans porte-parole, en tout cas désigné pour telle ou telle chose à un moment donné, eh bien des porte-paroles émergent qui, de la même manière que les élites informelles, peuvent être difficilement remis en question du fait qu'ils n'ont pas été désignés. Donc, ce sont des pouvoirs qui se prennent, mais qui sont difficilement révocables et qui vont finir par créer des frustrations et du désengagement de la part des membres.

Ça crée effectivement, en général, des sortes de tensions internes, dans les groupes horizontaux, notamment militants, parce que personne n'est dupe. D'un côté on a les élites, mais qui n'ont pas forcément de mauvaises intentions, qui ne se rendent parfois même pas compte qu'elles sont des élites, qui vont se cacher derrière le drapeau anti-élite et absence de structure : « regardez, on est horizontal, on n'a pas de chef, etc. », mais elles existent, donc ça crée un certain nombre de tensions.

L'autrice de La tyrannie de l'absence de structure propose sept principes pour essayer de créer une structure qui soit démocratique, donc pas verticale, mais qui évite les écueils de l'absence de structure. Ces principes sont détaillés là.

Le premier, c'est la délégation démocratique d'un pouvoir qui est limité, pour des tâches qui sont délimitées, à des personnes compétentes. Typiquement pour nous, on va en parler, ça pourrait être le fait de donner à des personnes l'accès administrateur-système à des machines, mais ces personnes sont responsables devant tous les autres membres et leur pouvoir peut être révoqué à n'importe quel moment.

Troisième chose : le pouvoir doit être dispersé entre un grand nombre de personnes afin d'éviter les monopoles. C'est quand même le but de l'horizontalité à la base.

Quatrième chose : si ces personnes ont du pouvoir, il doit y avoir une rotation qui s'opère assez souvent mais pas trop souvent pour qu'elles puissent avoir le temps de se former, mais pas trop longuement pour éviter les monopoles.

Cinquième chose, c'est de donner le pouvoir par compétences et non par sympathie, donc de favoriser aussi une formation préalable de ces personnes plutôt qu'un apprentissage sur le tas. Qu'est ce que nécessite le fait de pouvoir former les gens préalablement ? C'est d'avoir l'information. Et c'est ça en fait le cœur de ce qu'on va présenter après avec la tout-doux-cratie : c'est que l'information doit être diffusée au plus grand nombre. Et on se rend bien compte que ça aussi c'est un problème en général dans les structures militantes, associatives, etc. : on ne sait pas où trouver l'information. Beaucoup de gens se sentent illégitimes du fait de ne pas avoir accès à cette information et de pouvoir l'utiliser. Donc diffuser l'information à tout le monde, à l'extérieur et à l'intérieur, avec cette idée que l'information, finalement, c'est le pouvoir.

Et enfin, un accès égalitaire aux ressources pour toutes et tous, sachant que les compétences et les connaissances sont considérées comme des ressources.

Donc ces sept principes, dans des parts différentes, sont globalement au cœur de ce qu'on a essayé de faire avec la tout-doux-cratie.

Rémi Uro : On a essayé de faire système avec des principes fondateurs en s'inspirant de tout ça. Pour la petite histoire on a lu tout ça à posteriori, ce sont des réflexions qu'on a eu de façon beaucoup moins structurées pendant ce Picacamp dont on parlait tout à l'heure. Du coup, on voit qu'on s'en est beaucoup inspiré et voir à posteriori permet de mieux comprendre les raisonnements qu'on a pu avoir.

Les principes fondateurs de la tout-doux-cratie

Les principes fondateurs de ce qu'on appelle la tout-doux-cratie, un mélange entre « to do », à faire, et « tout doux », la douceur, c'est faire et laisser faire, permettre à chacune et chacun d'agir, se préoccuper des opinions des autres, ce qui implique, comme disait Quentin, d'informer et de s'informer. Parce que si on s'en fout de ce qui se passe autour, ça n'aide pas. Donc il faut aussi s'informer. Et rechercher le consensus dans le compromis et la bienveillance. Ça implique quelques obligations : s'informer, informer les autres et aussi donner son avis. Parmi les choses qu'on a définies pour être membre, il ne faut pas forcément agir, par contre il faut participer, c'est-à-dire donner son avis, discuter. Actuellement, sur les 30 membres qu'on a, il y en a une dizaine qui fait vraiment des trucs, qui s'occupe des machines, mais il y en a une trentaine qui vont discuter à chaque fois sur les sujets. Et ça, c'est ce qui me semble le plus important dans dans ce système-là.

Voilà : si vous voulez devenir membre de Picasoft, vous avez juste à en faire la demande, et vous êtes membre de Picasoft. Et vos seules obligations, ce sera effectivement d'aller chercher l'information sur un canal qui est donné - il y a toute une structure qui fait qu'on sait où aller chercher l'information - et donner votre avis quand il vous est demandé.

Voyons concrètement comment ça se passe : on est sur ???, on a découpé l'espace en différents canaux. On a un canal « asso » dans lequel on discute, et à côté on a un canal « tout-doux-cratie » dans lequel on vote sur différents types d'actions. Les deux types d'actions qu'on a définis sont les actions ordinaires : des choses réversibles, qui n'engagent pas la responsabilité de l'asso, qui ne coûtent pas cher, les actions vraiment ordinaires. Chaque membre peut se lancer à condition de prévenir l'asso. Et il y a la possibilité d'un verrou non bloquant, c'est-à-dire que n'importe quel membre peut dire « Pause, ça je ne suis pas sûr, venez on en parle ». Ça ne bloque pas l'action mais ça veut dire « OK, on en parle », et pendant un certain temps, on va voir si on continue l'action ou pas. Et si plus de 50% des membres proposent d'arrêter l'action, et bien on arrête.

L'idée, c'était, avec ce fonctionnement-là, d'essayer de renverser le fonctionnement du veto qui pose énormément de problèmes dans beaucoup de structures militantes, où finalement, le véto, c'est du pouvoir et parfois on a tendance à abuser de ce pouvoir, surtout quand les règles du jeu le permettent. Et donc, si moi je dis « j'aimerais bien lancer une émission de radio sur tel thème » et que quelqu'un me dit « bah non, moi je trouve que ça n'est pas trop dans les objectifs de l'asso », le problème c'est que ça va être à moi, qui déjà avait la bonne volonté de vouloir lancer quelque chose au nom de l'asso, de prouver, d'aller chercher la confirmation d'au moins la moitié des membres. Ça rajoute une charge mentale compliquée, de l'énergie en plus, juste pour pouvoir mener une action qui pourtant s'inscrit dans la logique de l'association.

Et cette espèce de renversement - alors qu'on a discuté avant, on a essayé de faire émerger un consensus, on a informé avant - qui consiste en dire, finalement c'est la personne qui n'est pas d'accord qui va avoir un travail supplémentaire, la charge de montrer qu'en fait ça ne correspond pas aux objectifs de l'association, et donc de ramener 50% de gens qui sont contre. C'est un peu la logique qui est derrière, on pourra revenir après, si vous voulez.

Et l'autre type d'action, c'est l'action extraordinaire : des actions irréversibles, chères, sensibles, qui engagent la responsabilité de l'asso, des choses qu'on n'a pas l'habitude de faire et où on veut une validation de l'asso avant. Pareil : chaque membre peut proposer, par contre il y a un vote bloquant a priori, c'est-à-dire que l'action ne peut être menée qu'à partir de dix jours après, ou alors si 50% de membres se proposent pour faire l'action avant. Pour ces actions-là, la charge de justifier est plus à la personne qui veut l'avancer. Puisqu'effectivement il s'agit de choses extraordinaires, il ne s'agit pas de fluidifier plus que d'habitude, il s'agit de quelque chose qu'on ne fait pas d'habitude, de demander si l'asso est d'accord. Et si au bout de dix jours la plupart de l'asso ne dit pas « non, on n'est pas d'accord », alors c'est que l'asso est d'accord.

Notez bien que ça a une implication forte, et on en reparlera après : si jamais, moi, demain, je lance une action extraordinaire et que je récolte juste cinq vieux votes pour, mais que personne ne se prononce contre, au bout de dix jours, je mène l'action, quand bien même c'est une action qui engagerait l'image de l'association. Bon, ça, on verra un peu après.

Comme on disait tout à l'heure, il n'y a plus de bureau. Par contre, pour des raisons légales, on a besoin de représentation administrative et financière, et on a choisi aussi de garder une personne en charge de la technique. En charge ne veut pas dire que c'est la personne qui gère, mais qu'elle va organiser la gestion. Typiquement la personne représentante au niveau administratif va organiser la rédaction du bilan et l'organisation des AG. Ça ne veut pas dire qu'elle va le faire mais qu'elle va se bouger, à un moment, et dire qu'il faut faire ça, et qui veut le faire ?

C'est aussi la personne qui va lever la main quand on dit « président-présidente », la personne qui doit aller en prison, par exemple. Ces personnes n'ont aucun pouvoir de décision, mais des prérogatives. En fait ces personnes doivent exécuter, c'est-à-dire que si le conseil, donc les membres, prennent une décision, parce qu'il faut bien que quelqu'un, à un moment, donne les accès aux machines, donne les mots de passe, la personne a été mandatée pour le faire, elle en a le pouvoir et elle obéit. Elle est au service de l'ensemble des membres, dont elle-même fait partie. Par contre, depuis qu'elle peut aller en prison, elle a le droit de démissionner avant. Elle a le droit de dire : « OK, moi je ne suis pas d'accord avec ça, je pose ma démission, on fera l'action après l'élection d'un nouveau bureau, parce que moi, je ne veux pas prendre la responsabilité ». Mais du coup, ces personnes n'ont pas plus de pouvoir bloquant que quelqu'un d'autre, sinon ce droit de retrait. Finalement, c'est simple : on ne va pas engager la responsabilité pénale de gens, comme ça, sur un coup de tête.

Comme on a dit tout à l'heure, est membre qui en fait la demande. Vous arrivez, vous dites je veux être membre de Picasoft, OK, pas de souci, tu es membre de Picasoft. Au bout de dix jours, tu auras droit de vote. On a mis un délai de dix jours pour pouvoir voter parce que ça évite d'avoir 20 personnes qui se pointent à une AG, qui disent « hé, on est tous membres de Picasoft et on prend le pouvoir ».

Ce délai-là est aussi réductible par une action extraordinaire. Donc, dans 90% des cas, quand un nouveau membre arrive, la première chose qu'on fait, c'est mettre un message pour dire « action extraordinaire : on propose d'annuler le délai de 10 jours pour pouvoir voter », et la personne devient membre une fois que les gens ont voté. Du coup, ça permet d'éviter que les gens aient besoin de se sentir légitimes pour rejoindre l'asso. La seule légitimité pour rejoindre l'asso, c'est de dire que vous voulez rejoindre l'asso.

On va donner quelques exemples, pour mettre des choses derrière ces actions. On se laisse un quart d'heure maximum sur les exemples pour avoir le temps des questions.

Quelques exemples d'actions ordinaires ou extraordinaires : activer le live sur Peer Tube. C'est un bouton à cliquer, ça n'est pas grave. Ça peut juste faire chier quelqu'un pour X raison, ou parce qu'on n'avait pas pensé au fait que ça prend de la bande passante, on pourra le virer après. C'est une action ordinaire, ça ne coûte rien. Je préviens que je le fais, et tant que personne n'exprime son opposition et qu'on en discute, ça se fait. Pareil si ça rentre en collision avec une autre instance.

Des actions extraordinaires, ça peut être de modifier le règlement intérieur, on fait une modif qui peut avoir un impact sur l'asso. On ne veux pas que ça puisse être fait comme ça, en claquant des doigts. Ou alors on a défini, dans le réglement intérieur d'ailleurs, une limite de 50 euros : on ne peut pas dépasser plus de 50 euros pour une opération ordinaire. Si on dépasse 50 euros, c'est une action extraordinaire. Par exemple, adhérer à une autre asso à hauteur de 60 euros, ça va passer par une action extraordinaire, parce que c'est quand même une somme considérée comme étant suffisamment importante.

Voyons maintenant quelques, non pas controverses, mais en tout cas, des choses qui ont posé des questions et mis à l'épreuve le fonctionnement de la tout-doux-cratie. C'est sûr, on est tous entre potes, on monte des services, c'est super sympa, tout le monde est super d'accord. Évidemment, le système marche bien, mais un autre système aurait fonctionné aussi. Donc quelques exemples.

Par exemple en juin dernier, on a reçu une demande assez étrange venant du Ministère de l'intérieur d'un pays étranger nous demandant des données en lien avec le partage de fichier. On a reçu un mail disant « Ce truc-là, on a besoin de savoir qui l'a envoyé et qui a cliqué dessus ». C'était un peu chelou comme demande, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais du coup ça a mené à des discussions sensibles, surtout qu'ils nous ont envoyé un argumentaire à côté un peu chelou aussi. Pour mettre dans le contexte, on parlait de trucs du style menaces de mort, des gens qui auraient utilisé nos services pour menacer la vie d'autres personnes. Quelque chose d'assez sensible qu'on n'avait jamais eu à gérer.

Et donc on se trouve face à ça, et on se dit merde qu'est ce qu'on fait : est-ce qu'on file les données, parce que la demande semble légitime ? Est-ce qu'on ne file pas parce que ça n'est pas notre rôle et ils n'ont qu'à voir avec la police française ? Mais ça prend plus de temps et, potentiellement, ça met dans la merde les personnes qui sont menacées ? Du coup, discussions un peu sensibles avec des données sensibles, parce qu'il y a des données personnelles, parce qu'il y a l'argumentaire du Ministère de l'intérieur qui n'est pas super agréable à lire non plus. On n'avait pas forcément envie de balancer tout ça à la gueule de l'asso et on n'avait pas envie que tout ça reste dans les archives de l'asso, avec tous les détails.

Donc ce qui a été fait, c'est qu'un petit groupe s'est composé pour discuter de ces questions-là. Il a proposé à l'asso de se mandater pour gérer ces questions et prendre une décision. L'asso a juste eu à dire OK, on accepte que les gens qui veulent gérer gère, qu'ils prennent une décision, et que l'asso n'ait pas à prendre des décisions sur des choses qu'elle ne connaît pas et qu'elle n'a pas envie de savoir. On va déléguer tout ce travail-là à un petit groupe.

Au début, les discussions étaient un peu compliquées. C'était très difficile de s'informer, de prendre connaissance de l'ensemble du dossier, de toutes les implications, etc. Et donc il y avait des gens qui trouvaient que c'était une bonne idée de filer les données, d'autres qui trouvaient que c'était une mauvaise idée. Si on avait commencé directement par une action extraordinaire en mode « on file les données », on aurait eu du mal à faire émerger un consensus. Et comme l'idée aussi de la tout-doux-cratie, c'est d'essayer de favoriser la discussion et la recherche du consensus plutôt que finalement le vote et le vote contre.

Juste un petit aparté : en tout-doux-cratie, le vote contre, c'est vraiment considéré comme quelque chose qui se fait en dernière instance. C'est pas le vote contre comme on le voit habituellement, c'est vraiment comme une intention de veto, c'est vraiment hors de question et, au final, dans toutes les décisions qui ont été prises en tout-doux-cratie, aucune n'a été rejetée, parce que le fait de mettre au vote quelque chose, ça se fait à la fin, une fois qu'on a réussi à faire émerger le consensus et que tout le monde a été suffisamment informé. Donc, en général, on n'a tout simplement personne qui va vouloir organiser un contre-vote du fait des règles du jeu qu'on a mis en place, et donc la solution qui a été trouvée a été de mandater les gens qui étaient prêts à s'investir et en qui on avait confiance pour prendre une décision. Et finalement, la décision a été de ne pas filer les données, parce qu'il fallait passer par les autorités françaises et qu'on n'avait pas à prendre cette responsabilité.

Un autre exemple qui nous a beaucoup fait réfléchir, très récemment. Un membre voulait se présenter au concours de la Reine du muguet. C'est un concours de beauté bien sexiste, organisée par la ville de Compiègne. Nul à chier, objectivement. Les seules conditions pour se présenter c'était...

Public : D'être une femme de moins de 23 ans ?

Non, justement, être une femme n'était pas précisé, c'était ça l'astuce. Avoir moins de 23 ans, être célibataire et ne jamais avoir tourné dans un porno.

Bonne ambiance, bonne idée du niveau du truc... Donc un membre voulait se présenter pour aller troller et voir la tête des gens de la mairie en voyant arriver un membre du sexe masculin dans sa petite robe. Mais il devait être proposé à ce concours-là par une organisation, soit une asso, soit une entreprise. Il a donc demandé à Picasoft l'investiture pour se présenter au concours. Et concrètement tout le monde dans l'asso était ultra chaud pour que ça se passe. Mais par contre c'est franchement pas logique, Picasoft ??? Du coup, on a pas mal discuté : chaud, oui, mais Picasoft n'a rien à voir avec ça. En plus, ça peut potentiellement détériorer un peu nos contacts avec la mairie, même si on n'en a pas des masses. C'était pas évident comme décision. Ce qui s'est passé, c'est que, au bout de dix jours, personne n'avait voté contre, quelques gens avaient voté pour. Concrètement, on avait sept votes pour, sept votes blancs et une quinzaine de personnes qui ne s'étaient pas exprimées. Mais il y avait eu une grosse discussion.

Beaucoup de gens ont dit : voilà, c'est une des limites de la tout-doux-cratie, on est sur un truc un peu sensible. Les gens ne s'expriment pas. La force du verrou bloquant pour une action extraordinaire, c'est dix jours : au bout de dix jours, le truc est accepté, ça engage quelque part l'image de l'association. Est-ce un dysfonctionnement de la tout-doux-cratie ? Alors ce qui a été fait pour essayer de démêler un peu ce qui s'est passé, c'est d'aller demander aux personnes qui n'avaient pas voté pourquoi elles n'avaient pas voté. Parce qu'elles n'étaient pas au courant ? Parce qu'elles n'étaient pas sûres ? Parce qu'elles étaient contre mais n'osaient pas s'exprimer publiquement ? Et ce qui est ressorti de la plupart des membres, c'est que les personnes n'étaient pas totalement sûres que ça corresponde aux objectifs de l'asso et voulaient voir où allaient mener les discussions, mais en attendant, elles étaient dans une sorte de suspension de jugement : elles ne voulaient pas bloquer l'action, mais ne voulaient pas pour autant la valider non plus. Moi, je trouve que c'est plutôt un exemple de bon fonctionnement de la tout-doux-cratie, au sens où c'est un consensus mou qui a émergé, certes, mais qui n'était pas juste de l'indifférence, car les gens avaient fait le choix de ne pas voter et donc il n'y avait pas réellement de votes contre.

Surtout qu'il y a eu beaucoup de discussions avant et pendant les dix jours, et à la fin des dix jours la discussion était encore en suspens, dans le sens où « ouais, on a tous envie, mais on ne sait pas trop... ». Au final, certaines personnes se sont dit que c'était un dysfonctionnement de la tout-doux-cratie, mais nous, au regard des objectifs des statuts qu'on a refait, on s'est dit que c'était plus une fonctionnalité qu'un bug que ça se passe comme ça, au sens où nous, on a posé d'emblée - et ça, c'est questionnable, on pourra peut-être discuter après - préférer la fluidité au blocage, préférer prendre un petit risque que ne pas permettre certaines actions parce qu'on n'est pas totalement sûr. Là, si jamais on dit « OK pour l'action extraordinaire et si au bout de dix jours on n'a pas réuni 50% pour, on annule l'action » : on serait bien embêté parce qu'on n'aurait jamais eu les 50% pour.

Oui, mais tu vois, on aurait peut-être eu pas mal de blancs. Donc, au final, pourquoi est-ce qu'on n'aurait pas mené cette action alors que personne n'était fondamentalement pour ? Du coup, c'est une position assez forte et qu'on peut discuter, mais dont on trouve qu'elle fonctionne bien.

Ce qui s'est passé à la fin, c'est que le membre en question, voyant qu'il n'y n'avait pas de consensus, même si techniquement l'asso était pour, d'après les statuts la demande était acceptée, il voyait bien que tout le monde n'était pas chaud : il a décidé lui-même de ne pas faire. Parce que ça rentre aussi dans la recherche de consensus, dans la bienveillance et la gentillesse. Du coup, c'était juste normal de ne pas le faire, voyant qu'il n'y avait pas de consensus fort. Même s'il aurait pu théoriquement le faire, ça n'est pas passé parce que ça n'avait pas de raison de passer, parce qu'il y avait eu des discussions, etc.

Au final, une des choses qu'on veut défendre aujourd'hui, on en reparlera un tout petit peu sur la slide qui vient après, c'est qu'en général les gens sont quand même de bonne volonté. Si les règles du jeu sont là pour favoriser l'émergence du débat et structurer les discussions et favoriser une consensus, et bien, on va rarement se retrouver avec des situations où il faut absolument un cadre extrêmement clair. Cette annulation n'était pas prévu par les statuts, mais il l'a fait tout simplement parce que c'était du bon sens et qu'on a l'habitude de fonctionner comme ça.

Quelques limites

Pour terminer, quelques limites parce que ça marche bien, mais on n'a pas inventé le système parfait, ça serait trop beau. Une première limite, ce sont les membres fantômes. Vu qu'être membre ne coûte littéralement rien, on a des fantômes, des gens qui sont dans le canal, qui sont considérés comme membres mais qui ne participent plus, parce qu'ils ont oublié de changer leur adresse, parce qu'ils sont partis en vacances, etc. Et ça amène des moments difficiles : dans tous les cas, tant que personne n'est contre, les actions sont quand même validées, mais ça ralentit à mort parce qu'on est quand même obligé d'attendre 10 jours alors que tout le monde est d'accord. Se pose la question de comment faire pour éviter ça ? Ce qu'on a décidé de faire depuis 2 semestres, c'est qu'à la fin du semestre, on regarde qui n'a pas voté depuis longtemps, et on lui envoie un message « Est-ce que tu es encore là ou pas ? Si tu ne réponds pas pendant X temps, on te vire du canal. Si tu veux revenir, n'hésite pas à la dire ». Ça permet de refluidifier et d'éviter de se retrouver dans la situation où tous les membres actifs sont d'accord, mais il y a tellement de membres fantômes qu'on est obligés d'attendre 10 jours à chaque fois, et c'est chiant.

Une autre limite dont on a déjà parlé, c'est la difficulté de s'opposer. Quand on vote contre, c'est engageant, c'est conflictuel. Une fois qu'une action est lancée, voter contre, c'est quelque chose de fort, qui peut être mal vu par la personne en face si on n'a pas bien discuté avant. Ça implique d'organiser un contre-vote, c'est en ce sens que c'est engageant. On essaye de toujours en discuter en amont, on ne s'est jamais retrouvé dans cette situation-là, ou en tout cas on n'est pas au courant de gens qui auraient aimé voter contre et qui ne l'ont pas fait pour ces raisons-là. Mais c'est quelque chose qui pouvait arriver. C'est pour ça que c'est important d'en discuter en amont.

Un dernier cas-limite qu'on pourrait imaginer, c'est effectivement la possibilité de gros putsch : vingt personnes qui arrivent dans l'asso, qui font la demande pour devenir membres, qui attendent les dix jours réglementaires. Comme elles sont en majorité, on ne peut pas vraiment faire d'action extraordinaire pour les exclure, c'est un peu compliqué. Et au bout de 10 jours, hop elles convoquent une assemblée générale extraordinaire, et elles dissolvent l'asso. Donc ça, c'est un vrai truc qui pourrait arriver : si vous ne nous aimez pas trop, vous pouvez monter ça, pas de problème.

Du coup, on pourrait imaginer que nous allons chercher plein d'autres membres, on essaye de les faire venir, et puis ensuite de faire tout un combat... Voilà, vous imaginez que c'est une situation qui est peu probable, mais qu'on a finalement fait le choix d'accepter. C'est dire que oui, elle peut se produire. C'est un peu ce que je voulais dire tout à l'heure, sans bien réussir à l'exprimer : si on essaye de faire des statuts pour empêcher ça, on va se retrouver avec des statuts qui sont extrêmement rigoureux, on va recréer quelque chose de vertical, on va se retrouver avec des blocages et des verrous. Et du coup, nous, finalement, notre pari, c'est de se dire que d'avoir ce système où on informe tout le monde, où les gens s'informent, où on discute, où on recherche le consensus, etc., ça permet de restaurer une confiance entre les membres. Plutôt que, comme on a tendance à faire traditionnellement quand on a peur que ce genre de choses arrive, de supprimer la confiance et de la remplacer par un ensemble de règles qui garantissent que ça ne peut pas arriver. Et je pense à des systèmes, même si c'est un peu hors sujet, comme la blockchain où on est dans cette idée qu'on ne fait confiance à personne et on va garantir cryptographiquement que personne ne peut arnaquer personne, etc. Et du coup, on se retrouve avec des trucs qui sont un petit peu compliqués en matière de gouvernance, d'action collective et d'une identité ???.

Il nous reste un quart d'heure, si vous voulez discuter un petit peu sur une question.

Question du public peu audibles : merci, c'était excellent. Je voudrais juste revenir sur les questions de diffusion de l'info. Autre question : est-ce que vous avez parfois des micro-décisions à prendre, qui sont infra-ordinaires ?

Réponse : Sur les actions ordinaires basiques, tout ce que ça implique c'est de prévenir l'asso, tu n'attends pas de validation.

Ça rejoint ta première question : comment les gens vont-ils être au courant de ça, parce qu'on ne va pas être sur tous les canaux et lire absolument tout. C'est pour ça qu'on a ce canal « tout-doux-cratie », dédié aux actions ordinaires et extraordinaires, où on mentionne l'ensemble des membres qui vont recevoir un mail, qui est en général une synthèse de « je souhaite faire ça » ou « j'ai fait ça ». Dans ce mail tu as des liens qui mettent du contexte pour pouvoir t'informer. Si, à ce moment-là, tu veux creuser le sujet, tu peux aller sur les canaux dédiés et regarder. Si jamais tu sens que ça n'est pas vraiment de ta compétence technique, tu essaies de faire confiance à d'autres gens. Peut-être que tu vas voter comme eux, ou alors tu t'abstiens, mais en t'abstenant tu ne bloques pas le processus, parce que même les actions extraordinaires seront validées au bout de dix jours. Et si tu n'es pas compétent, tu ne vas pas bloquer, et l'action va se faire au bout de dix jours, ce qu'on suppose être le délai raisonnable pour que les gens aient le temps de s'informer si nécessaire.

Tous les messages sont de cette forme : un talk qui envoie des mails à tout le monde, et les gens qui veulent participer à la discussion passent sur le canal « asso » pour les discussions. Mais toutes les décisions où les gens ont besoin d'être au courant passent par là, les gens reçoivent des mails, des notifications.

[??? 46:30 Blague du public inaudible, mais qui fait bien rire]

Effectivement, on a un très bon wiki, wiki.picasoft.net, où, du côté technique ou ailleurs, on a essayé de vraiment faire en sorte que n'importe qui puisse rejoindre l'asso, se former sur comment former à l'aide du wiki et comment trouver les informations. Tous nos fonctionnements en termes de communication, d'organisation d'événements ou de techniques sont détaillés la-dessus, c'est une ressource importante pour nous. Sur Mattermost, c'est impossible.

Question du public inaudible sur les délais et notamment les 10 jours.

Réponse : on n'était pas loin de jeter un dé et de voir ce qui sort. On a considéré que dix jours c'était ni trop ni pas assez, mais c'est vrai que c'est discutable. Ce délai des 10 jours, c'est pour les actions extraordinaires, et elles vont pouvoir attendre parce qu'elles sont extraordinaires. Ou alors, si c'est vraiment urgent, tu peux envoyer des mails à tout le monde disant que c'est urgent.

Question du public inaudible concernant la circulation de l'information dans une association et une autre sur la gestion des membres et le mailenvoyé pour dire « coucou, vous êtes encore là ? ».

Réponse : C'est possible. Est-ce que ça serait souhaitable, dans le sens où on est une trentaine, on se connaît, contrairement à ???, qui est quand même un peu plus grosse et où tout le monde ne se connaît pas. On est une trentaine, on se connaît, on est une association, des gens qui s'associent pour faire des choses ensemble. Je pense qu'il est plus important de garder du lien et de prendre le temps d'envoyer un mail pour prendre des nouvelles des gens. Je pense que c'est plus adapté, en tout cas à une petite structure, de garder les choses simples et manuelles, plutôt que d'avoir un truc plus ??? On a beaucoup réfléchi sur ces points-là : on a réfléchi à comment la prise de confiance était faite, comment gérer les choses. Et en fait on s'est dit que c'était plus simple de ne pas s'embêter.

En deux mots aussi, ce qu'on a trouvé : c'est vrai, mettre à disposition des outils comme ça, c'est quand même assez complexe à développer, on n'a pas automatisé, donc les membres peuvent se mettre en vacances. On a ce mode vacances où en fait eux-mêmes choisissent de disparaître, leur vote n'est plus comptabilisé et ensuite ils peuvent se réactiver, revenir, et nous, ça nous paraissait être le compromis le plus simple. Et donc pour l'entrée des nouveaux membres, on a choisi de faire en sorte qu'elle soit complètement libre et pas cooptée, c'était aussi un choix qui a structuré les statuts et la manière d'avoir ces dix jours de délai, etc. Et pour l'instant, on a constaté que ça marchait pas trop mal et que, justement, les gens se sentaient légitimes du fait qu'on leur dise : venez, informez-vous et votez, c'est la seule chose que vous avez à faire. Vous êtes les bienvenus chez nous.

Question du public, inaudible, sur la circulation de l'information en dehors des membres de l'association.

Réponse : On n'est pas très bon là-dessus parce que, par essence, on propose des services où on ne traque pas les gens et où on ne peut pas les contacter. En fait, bien souvent, on sait pas qui sont nos utilisateurs et utilisatrices. Donc, il y a ce Mattermost qui est public, que les gens peuvent rejoindre, on peut trouver nos coordonnées sur les sites, etc. Et on reçoit régulièrement des questions auxquelles on répond. Mais il est vrai qu'on a pas de moyens : on a un blog, mais on n'a pas d'espace de discussion avec l'ensemble de nos utilisateurs et utilisatrices où on peut faire circuler cette information.

On a le canal "général" sur Mattermost, avec 600 personnes. Et du coup, on fait attention quand on fait des mises à jour parce ça risque de casser. On sait qu'on n'est pas très, très bon sur ces questions.

Question inaudible sur la bienveillance.

Réponse : C'est une question complexe, je pense que je n'aurai pas de réponse tout à fait satisfaisante. Mais je crois que les règles du jeu structurent beaucoup les comportements des joueurs et des joueuses, ce qui fait que, quand les membres arrivent, ils sont supposés avoir lu les statuts et pris connaissance de comment la tout-doux-cratie fonctionne. De manière générale, le climat actuel est bienveillant, et les discussions se font d'une manière qui n'est pas conflictuelle. Et donc j'ai l'impression que - c'est un peu bateau comme réponse -, mais en arrivant là-dedans, tu as moins de chance d'avoir de la conflictualité comme tu aurais dans des fils Twitter ou je ne sais pas trop quoi, où les règles du jeu t'encouragent à réagir de manière très manichéenne, etc.

On va rester là-dessus, et parfois juste dire « je suis désolé, je sais que mon message peut te paraître violent, mais il n'est vraiment pas violent et je ne le pense pas comme ça », ça permet de calmer un peu.

On va peut-être conclure ? Si tu as une question rapide ?

Question inaudible : l'attribution des droits sur les serveurs est-elle une action ordinaire ou extraordinaire ?

Réponse : une action extraordinaire.

Merci beaucoup. On peut continuer la discussion au stand Picasoft, au 2e étage.