https://wiki.april.org/index.php?title=Sp%C3%A9cial:Nouvelles_pages&feed=atom&hidebots=1&hideredirs=1&limit=50&offset=&namespace=0&username=&tagfilter=&size-mode=max&size=0April MediaWiki - Nouvelles pages [fr]2024-03-28T10:10:47ZDe April MediaWikiMediaWiki 1.35.13https://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_diffus%C3%A9e_mardi_26_mars_2024_sur_radio_Cause_CommuneÉmission Libre à vous ! diffusée mardi 26 mars 2024 sur radio Cause Commune2024-03-25T16:23:29Z<p>Morandim : </p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Émission <em>Libre à vous !</em> diffusée mardi 26 mars 2024 sur radio Cause Commune<br />
<br />
'''Intervenant·e·s :''' Lorette Costy - Laurent Costy - Florence Chabanois - Pierre Beyssac - Luk Étienne Gonnu - Julie Chaumard à la régie<br />
<br />
'''Lieu :''' Radio Cause Commune<br />
<br />
'''Date :''' 26 mars 2024<br />
<br />
'''Durée :''' 1 h 30 min<br />
<br />
'''[https://media.april.org/audio/radio-cause-commune/libre-a-vous/backups/output-2024-03-26-15h29.mp3 Podcast PROVISOIRE]'''<br />
<br />
'''[https://www.libreavous.org/204-au-cafe-libre-une-cool-ag-l-humanite-c-est-surfait Page de présentation de l'émission]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' Déjà prévue<br />
<br />
'''NB :''' <em>Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
==Transcription==<br />
<b>Voix off : </b><em>Libre à vous !</em>, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Bonjour à toutes. Bonjour à tous dans <em>Libre à vous !</em>. C’est le moment que vous avez choisi pour vous offrir une heure trente d’informations et d’échanges sur les libertés informatiques et également de la musique libre.<br/><br />
Nous vous convions, ce mardi, Au café libre, pour débattre autour de l’actualité du logiciel libre et des libertés informatiques. C’est le sujet principal de l’émission du jour. Également au programme « Une cool AG, besoin d’adhésions et JDLÉ », une chronique de Laurent et lorette Costy. Et, en fin, une nouvelle pituite de Luk, « l’humanité c’esr surfait »<br />
<br />
Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de <em>Libre à vous !</em>, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.<br />
<br />
Je suis Étienne Gonnu, chargé de mission affaires publiques pour l’April.<br />
<br />
Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.<br />
<br />
Nous sommes mardi 26 mars, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.<br />
<br />
À la réalisation de l’émission Julie Chaumard. Salut Julie.<br />
<br />
<b> Julie Chaumard : </b>Bonjour. Bonjour à tous.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous vous souhaitons une excellente écoute.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
==Chronique « À cœur vaillant, la voie est libre », la chronique de Laurent et Lorette Costy, sur le thème : « Une cool AG, besoin d’adhésions et JDLÉ »==<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>« À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy. Comprendre Internet et ses techniques pour mieux l’utiliser, en particulier avec des logiciels libres et services respectueux des utilisatrices et utilisateurs pour son propre bien être en particulier et celui de la société en général. Laurent Costy est administrateur de l’April et fait cette chronique avec sa fille Lorette.<br/><br />
Au programme aujourd’hui « Une cool AG, besoin d’adhésions et JDLÉ ».<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Hello Lorette ! C’était l’AG de l’April pas plus tard qu’il y a pas longtemps. Il faut que je te raconte. C’était vrrrééémont chouette. Et il faut aussi que je te dise que tu nous as manqué.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Oh, c’est gentil ! Vas-y, raconte ! Vous avez refait le monde ? Vous avez voté ? Vous avez bilanté ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Bah, si tu veux savoir, tu n’avais qu’à venir !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Oui, mais en fait, ça m’intéresse pas !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Bon, eh bien je te raconte quand même ! D’abord, le matin de l’AG, on avait organisé des conférences éclairs. Je dis « on », mais c’est une manière de parler. Ce sont surtout les autres.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Oh, je viens de retrouver mes paroles d’introduction à l’AG de l’année dernière. Je m’auto-cite, Lorette un an de moins : « L’avantage pour toi, Papa, c’est que quand tu as réussi à t’incruster sur la liste CA, tu peux usurper, avec des chroniques pour <em>Libre à vous !</em> pendant que les autres compensent tes manques et donnent l’impression que la liste est efficace. »<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Ma flemmardise ne serait pas récente ?<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Non, je ne pense pas ! Sinon, j’ai vu le programme des confs éclairs ! Il y avait plein de trucs qui avaient l’air sympa : en tout et pour tout, 16 conférences de six minutes, sur une diversité de sujets tous plus alléchants les uns que les autres.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>J’avais justement prévu de raconter chaque conférence ici, tellement c’était bien, mais six minutes X 16 nous ferait une chronique de 96 minutes, un peu plus que l’émission complète, c’est quelque peu excessif ! On serait obligé, de surcroît, de supprimer toutes les pages de publicité qui n’existent pas, pour tout caser.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Ce serait bien dommage, mais il faut raison garder et, d’abord, les gens n’avaient qu’à être là ! Ça ne se fait pas de rater un moment pareil ! L’ensemble des supports, sous licence libre, de ces confs sont accessibles sur le Wiki de l’April. On vous met le lien sur la page de la chronique.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Bien dit, je n’aurais pas fait mieux ! Sinon, l’après-midi, dans la continuité de l’accueil chaleureux que nous a réservé Polytech Sorbonne à Jussieu – qui, en passant, adhère à l’April, faites pareil ! et on les remercie à la fois pour l’accueil et l’adhésion –, l’AG a été ouverte par une conférence de Mathilde Saliou qui est journaliste à Next et a écrit le livre <em>Technoféminisme. Comment le numérique aggrave les inégalités</em>. Elle a parlé de diversité de genre et d’inclusivité dans le numérique. C’était très éclairant, surtout pour un homme comme moi engoncé dans son auto-centralité !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Intéressant ! Et après, vous avez déroulé les points statutaires ? En tout cas, j’ai lu le rapport d’activité – moi, perso, je trouve qu’il manque un petit rapport moral en amont mais bon, je chipote – et il est juste remarquable, tant sur le fond que sur la forme.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Sur la forme, c’est juste un truc de fou : c’est François Poulain, notre trésorier préféré, expert en yourte, qui produit ça. Et, comme tu le disais l’année dernière lors de l’ouverture de l’AG, je te cite, Lorette, un an de moins : « C’est avec LateX qu’il fait ça, mais ça se prononce « lateC ». C’est comme la place « Breuil » à Strasbourg. Ça s’écrit « Broglie » mais ça se prononce « Breuil ». Sauf, bien sûr, pour les habitants qui snobent cette sophistication et prononce « Broglie Platz ». Parenthèses extrêmes orientales fermées.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>C’est vraiment pratique, quand on est à la bourre de pomper les textes des chroniques précédentes !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>En plus, elles sont en Creative Commons By SA, on n’a pas besoin de demander à l’auteur !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Pratique !<br/><br />
Et sinon, sur le fond, si j’ai bien compris, c’est ce qu’on appelle un travail collaboratif à contribution bénévole et à appui lourd des salarié·es. C’est tout foufou tout ce que fait l’April avec ses moyens limités. Je crois bien que je vais adhérer.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Mais voilà une excellente idée ! D’autant qu’après, il y a eu le rapport financier. Et là, c’était un peu moins jovial. Ça fait deux années de suite qu’on affiche un déficit. Le CA pourrait se mobiliser pour une campagne d’adhésions, mais ça risque quand même d’alourdir encore la charge sur les épaules de mes camarades élu·es et sur les salarié·es. Non, le mieux, c’est que toutes les personnes qui nous écoutent adhèrent ou doublent leur cotisation après cette chronique. [Petit silence]. Tu crois que je suis lourd en insistant comme ça sur les adhésions ?<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Attends, laisse-moi chercher. « Lourdeur, nom féminin », je cite : « Impression de pesanteur pénible » et aussi « Manque de finesse, de vivacité, de délicatesse. Lourdeur d’esprit ». Ah ouais, tu es relou !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Alors justement, après l’AG, une soirée sympa était prévue en rejoignant Césure, le lieu des savoirs inattendus. Eh bien, figure-toi que cette soirée était très sympa, justement. Sauf qu’il y a un truc je n’ai absolument pas compris. Tout le monde parlait de tarentule, ça m’a fait penser à ça : « Ma tarentule elle est malade, ma tarentule elle est blessée, ma tarentule elle marche pas quess qu’elle a ma tarentule ? – Montre moi ta tarentule. – La voila ma tarentule – Ta tarentule elle est foutue ! – Elle est foutue ma tarentule ? – Elle est bousillée ta tarentule. – Ttarentule temps de la réparer ? – Non, mais tatrentule amener plus tôt. – Beuheuhahaha ! ». Mais à priori, ça n’avait rien à voir, je n’ai pas vu d’araignées.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Tu nas pas confondu avec « spatule » pour une soirée cuisine ? Bon et le lendemain, pas grasse mat, tu avais April Camp à la FPH, la Fondation pour le Progrès Humain. Quel bilan, en trois exemplaires, tires-tu de ce moment dominical qui t’a permis d’éviter la messe ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Trop bien. J’adore éviter la messe, surtout quand je n’y vais jamais, mais j’aurais eu une excuse pour ne pas y aller si j’avais dû m’y rendre. Et surtout, j’adore la FPH. D’ailleurs, je remercie Vincent Calame pour son accueil à chaque fois discret et qui frise l’adorabilité. Et aussi, je m’esbaudis toujours de savoir qu’il y a des toilettes sèches jusqu’au 3e étage de la Fondation pour économiser l’eau. Moi je dis « Respect ».<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Certes, c’est la classe, mais n’est-on pas un peu loin de notre quota de mots et de vocabulaire du monde libriste, là ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Attends, je regarde le serveur de stats : avec l’expression « monde libriste » que tu viens de prononcer, on est à 0,42 %. Effectivement, ce n’est pas bézef. Mais justement, on a eu une discussion extrêmement intéressante pendant l’April Camp : paradoxe du logiciel libre émancipateur – posé par Pablo Rauzy la veille lors des confs éclairs – et logiciels <em>open source</em>.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>La position de l’April est claire là-dessus. Page 42 du site, on vous mettra le lien : « Le mouvement du logiciel libre est avant tout éthique et philosophique, basé sur le partage de la connaissance et l’entraide, là où le mouvement <em>open source</em> met en avant les logiciels libres pour leurs avantages pratiques. En outre, le terme <em>open source</em>a souvent été utilisé dans un sens erroné pour qualifier des logiciels ne répondant pas aux critères de l’Open Source Initiative. Le terme « logiciel libre » étant donc plus précis et renforçant l’importance des libertés, il est utilisé par l’April. »<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui, moi aussi, bien sûr, je connaissais cette page et son contenu par cœur. Ce qui est intéressant, c’est que ça a permis de clarifier les esprits, car ce n’est pas toujours simple à appréhender, pas pour moi, bien sûr ! Par exemple, si la définition du logiciel libre était plutôt claire dans les esprits, celle de l’<em>open source</em> renvoyait parfois du positif et parfois du négatif par rapport au libre.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Il faut dire qu’il y a à boire et à manger, non ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Carrément ! Et je distinguerais deux grandes catégories : il y a d’abord l’<em>open source</em> d’inspiration libriste et il y a aussi l’<em>open source</em> d’aspiration libriste. Pour l’<em>open source</em> d’inspiration, ce sont des gens qui cherchent des voies pour améliorer notre société mais qui, lorsqu’ils attachent une licence libre au départ à leur logiciel, la modifient et viennent contredire au moins une des quatre libertés du logiciel libre.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Donc, si on simplifie, ils sont plutôt dans la catégorie « bons chasseurs », dans le monde du « il y a des bons chasseurs et des mauvais chasseurs ».<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Carrément ! Et dans la catégorie <em>open source</em> d’aspiration, on pourrait presque distinguer encore des catégories : une catégorie Microsoft-Google-Dyson, par exemple, qui aspire tout et une catégorie plus subtile OpenTruc-Womanizer qui contribuerait à minima.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Bref, si je comprends bien, en tant que libriste et si on regarde aussi avec le prisme progrès social, il ne faut pas oublier que l’<em>open source</em> et Le Libre sont proches et utilisent des licences majoritairement similaires.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Parfaitement résumé ! Bon, j’accélère et je te passe le déjeuner avec la très bonne omelette commune initiée par mon camarade du CA, Loïc Dayot, ainsi que la séquence des réflexions autour du numérique acceptable parce que là, présentement, il faut qu’on révise pour la Journée du Libre Éducatif ! On passe en fin de matinée.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>C’est vrai ! C’est vendredi 29 mars, dans trois jours ! Ce sont surtout les enseignants et les enseignantes présentes qui devraient réviser, parce qu’on leur prépare une sacrée surprise !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Tiens, on va aussi profiter duJDLÉ pour tenter une expérience. Comme on respecte les données de nos p·auditeurs et p·auditrices et que ce n’est pas simple d’évaluer l’auditoire en FM, on a du mal à savoir si les gens écoutent <em>Libre à vous1</em> et la chronique. Or, là, on va pouvoir tenter une mesure d’audience à l’ancienne. Admire la subtilité du stratagème…<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Je sais, je sais. Moi, moi, moi. On va dire un mot que les fidèles de la chronique reconnaîtront, un mot spécial. Là, comme ils auront écouté la chronique aujourd’hui, ils sauront qu’il faut répondre un truc, genre taper des pieds ou frapper dans les mains, comme ça, on saura qui écoute !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je pensais à un questionnaire à l’entrée mais bon, même si ton stratagème est un peu moins subtil que le mien, on va prendre le tien. Et, du coup, on choisit quoi comme mot ?<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Sans hésitation aucune, je pense à prendre « ecballium », le concombre d’âne ! Et quand les gens entendront ce mot, ils devront applaudir et siffler pour celles et ceux qui savent le faire, siffler, pas applaudir !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Ça ne va pas être évident à placer dans une journée consacrée aux communs numériques dans l’éducation, mais on a bien réussi à le placer dans la chronique, donc, il n’y a pas de raison !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Par contre, il faut se donner une grille d’évaluation, c’est obligatoire dans notre société maintenant, sinon, ça ne fait pas sérieux. Donc, si moins de deux personnes réagissent dans la salle, alors, il faudra se rendre à l’évidence. Tel Matt Damon, on est un peu seul sur Mars. Entre deux et quatre, succès moyen. Plus de quatre et jusqu’à 1000 : succès satisfaisant et agréable.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Top là, ça me va ! Et je t’offre un verre pour fêter ça. Un Whisky-grenadine. En attendant vendredi, je te fais la bise au silicium de d’hab’, ma puce.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Kakou ! Kakou ! Je vais pouvoir faire des châteaux de sable avec tout ce silicium. Bisous, À vendredi !<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous sommes de retour en direct dans <em>Libre à vous !</em>, 'émission qui vous raconte les libertés informatiques.<br/><br />
Nous venons d’entendre « À cœur vaillant la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy. Laurent Lorette interviendront donc vendredi 29 mars dans le cadre de la Journée du Libre Éducatif.<br/><br />
Nous allons à présent faire une petite pause musicale.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Après la pause musicale nous vous donnons rendez-vous Au café libre, pour parler de l’actualité autour du logiciel libre.<br/><br />
Avant cela, nous allons écouter <em>Cold Burn</em> par Lemon Knife. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>Cold Burn</em> par Lemon Knife<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous venons d’écouter <em>Cold Burn</em> par Lemon Knife, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Passons maintenant à notre sujet suivant.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Au café libre (actualités chaudes, ton relax) : débat autour de l’actualité du logiciel libre et des libertés informatiques 16’ 50==<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous vous souhaitons la bienvenue Au café libre où on vient papoter sur l’actualité du logiciel libre, dans un moment convivial. Un temps de débat avec notre équipe de libristes de choc, issus d’une rigoureuse sélection pour discuter avec elles et eux et débattre des sujets d’actualités autour du Libre et des libertés informatiques.<br/><br />
Aujourd’hui, avec moi autour de la table, Florence Chabanois, fondatrice de La Place Des Grenouilles, membre core de Tech. Rocks et de Duchess France, et Pierre Beyssac, informaticien libriste de longue date, fondateur d’eriomem.net, un service de stockage de fichiers.<br/><br />
Bonjour à vous deux et merci de vous être joints à moi pour ce temps d’échange.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Bonjour Étienne. Bonjour à toutes et tous.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Bonjour tout le monde.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je dois que dire je suis ravi d’animer ce Au café libre, j’ai dû reporter deux fois, pour différentes raisons, mon animation de ce nouveau format, donc je suis vraiment ravi de partager ce moment avec vous. N’hésitez pas à participer à notre conversation au 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l’émission sur le site causecommune.fm, bouton « chat ».<br />
<br />
===Canonical fête ses 20 ans===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Pour se mettre en appétit, je vous propose de commencer par une nouvelle positive : Canonical fête ses 20 ans. Canonical est sans doute peu connue, mais le logiciel que cette entreprise a développé et maintient l’est sans doute beaucoup plus, il s’agit d’Ubuntu, une distribution du système d’exploitation GNU/Linux. Gee, l’un de nos chroniqueurs, lui a consacré sa dernière chronique, la semaine dernière dans <em>Libre à vous !</em> 203. Il s’est montré critique, parce que rien n’est jamais parfait, que c’est une entreprise qui développe derrière et, parfois, Ubuntu peut être un peu moqué, on va en parler, en tout cas dit il disait que l’écosystème du Libre serait très différent sans l’apport de Canonical et d’Ubuntu. On souhaite donc un bel anniversaire à Canonical et longue vie.<br/><br />
Qu’est-ce que cela vous inspire quand vous pensez à Canonical ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>J’ai une petite anecdote. Ce week-end j’étais à Liège. J’ai un ordinateur avec Mint, qui est un Linux dérivé d’Ubuntu. Quand j’ouvre l’ordinateur, le logo s’affiche et, en général, je n’ai jamais aucune réaction. Et là, pour la première fois de ma vie – ça ne fait pas non plus des années que j’utilise Mint –, un truc complètement inattendu : j’étais dans un bar, une jeune femme, à côté de moi, m’a dit « vous utilisez Mint ! ». J’étais sur les fesses ! En fait, il y a un groupe d’utilisateurs Linux à Liège, qui en fait la promotion, qui s’appelle le Liege Linux Team, lilit.be. Ça montre que les choses avancent parce que c’est la première fois que des gens, que je ne connais, remarquent un usage de Linux. Donc, vraiment, les choses ont beaucoup avancé. Je m’en sers parce que c’est facile à utiliser sur un ordi portable et c’est plus facile à installer que Windows. Quand on achète une licence Windows c’est une galère sans nom à installer, il vaut mieux acheter ce truc-là sur un ordinateur neuf, donc ça pousse, en plus, à acheter des ordinateurs neufs, mais Ubuntu et Mint c’est super.<br/><br />
On peut effectivement dire qu’il y a des soucis par rapport à l’aspect commercial, bien entendu, on est en droit de se poser des questions, mais, globalement, ça a énormément fait pour la facilité d’usage de Linux et son expansion.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Juste pour préciser les critiques, je me suis un peu embrouillé là-dessus : parfois certaines personnes peuvent reprocher certaines approches commerciales vis-à-vis d’Ubuntu, la présence ou la facilité d’installation de logiciels, mais c’est une question d’approche, ça reste du strict logiciel libre et Ubuntu est un super système, une très bonne entrée en matière au logiciel libre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Et dérivé de Debian, il faut aussi le dire, qui est totalement libre.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Florence.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Déjà ça m’intéresse, ça fait longtemps que j’ai commencé l’informatique. J’étais sur Mandrake, c’était ça mon premier OS non Windows, on va dire. Je n’ai pas gardé très longtemps Mandrake, c’est effectivement Ubuntu qui l’a emporté assez vite. Typiquement, j’avais des espèces de poubelles d’ordinateurs portables qui ramaient pas mal, que j’achetais déjà d’occasion à l’époque, et clairement, il n’y avait qu’Ubuntu qui marchait dessus.<br/><br />
C’est vrai qu’en relisant l’article et en voyant la pochette, j’ai voyagé 20 ans en arrière où je collectionnais plein de CD, je les installais partout, donc grande émotion ! Je n’ai pas la partie critique sur Ubuntu parce que, clairement, c’est ça qui m’a ouvert la porte concernant Linux. Je n’aurais jamais pu ou même eu envie de démarrer sur du Gentoo ou des choses comme ça, c’est quand même ce qui l’a popularisé.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Il me semble qu’une force reconnue d’Ubuntu c’est de rendre accessible aussi à des personnes qui n’ont pas l’habitude de l’informatique, à une époque où le logiciel libre était peut-être moins performant, j’utilise le terme, soit en termes d’ergonomie, parce que ça prend du temps de développer ça, aussi, et Ubuntu était quand même plus facile d’accès pour des personnes qui n’avaient pas ce recul. C’est mon sentiment pour l’époque, je ne suis pas du tout informaticien.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Oui. Je peux le dire. J’ai aussi un côté béotien au sens où, parfois, j’ai envie juste que ça marche et quand on vient de Windows, on n’est pas trop dépaysé par les interfaces Ubuntu. Les interfaces graphiques, même hors Ubuntu, ont globalement énormément progressé depuis 20 ans.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je suis sur une Debian et je ne suis pas du tout perdu.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Même les fonctions de réglage du système, quand on veut régler les sorties écran, les haut-parleurs, les choses comme ça, ce n’est pas la même chose que Windows, mais on n’est pas dépaysé quand on vient d’un autre système, c’est bien.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Et puis, comme pour tout, c’est une question d’usage et de pratique.<br/><br />
Si vous ne connaissez pas Ubuntu, si vous n’êtes pas encore sur un système d’exploitation libre, on vous recommande soit d’utiliser Ubuntu, Debian, Mint, ce qui vous plaît. Essayez. L’avantage c’est qu’on peut passer de l’un à l’autre, on peut aller voir des groupes d’utilisateurs de logiciels libres dans beaucoup de villes de France, on peut les retrouver sur l’agendadulibre.org, pour être aidé et accompagné aussi dans l’installation d’un nouvel outil, d’un nouveau système d’exploitation, parce que ce n’est jamais si simple que ça, même si ça l’est beaucoup plus qu’avant, et parfois on peut vouloir être aidé. En tout cas merci à Ubuntu, merci Canonical.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Peut-être un petit mot, un dernier mot : avec le logiciel libre il n’y a pas de problème de licence à payer, on peut prendre une clé USB maintenant, on peut installer ce qu’on appelle une image live, on peut essayer sans avoir à installer. C’est une énorme force, on peut vraiment passer sa vie à tester des systèmes pour voir s’il y en a un qu’on préfère aux autres.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Bien sûr. Et c’est aussi une bonne raison pour aller dans des événements libres. Il y a souvent des stands, etc., il suffit de regarder qui sont les personnes présentes qui peuvent proposer des démonstrations de leur système d’exploitation ; c’est une manière de voir si l’ergonomie convient, si ça répond aux besoins d’usage, etc. Ces systèmes de clé USB sont effectivement un bon exemple.<br/><br />
À nouveau, joyeux anniversaire à Canonical et longue vie à Ubuntu.<br/><br />
Je propose de passer notre sujet suivant.<br />
<br />
[Clochette]<br />
<br />
===Le temps de parole des femmes===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>J’avais vu Fred utiliser cette clochette, je suis ravi de pouvoir l’utiliser à mon tour.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>N’est-ce pas la clochette de Bookynette ?<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je ne connais pas son histoire, je sais qu’elle est jaune April.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Clochette libre partagée.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Pour ce sujet suivant, je vous propose, puisqu’on est au mois de mars, mois de mars, bien sûr, c’est l’arrivée du printemps, mais c’est aussi une autre date très importante, le 8 mars, à savoir la Journée internationale des droits des femmes.<br/><br />
Florence nous a signalé un récent rapport de l’Arcom qui pointait que si la place des femmes augmente dans les médias, leur temps de parole, lui, est plutôt à la baisse : 34 % en 2023 contre 36 % en 2022, donc légère baisse, mais aussi et surtout une disproportion quand même très importante. Pourquoi en parle-t-on Au café libre ? Bien sûr, le sujet est important, mais aussi parce qu’il existe un outil dont tu souhaitais parler, un logiciel libre sous licence donc sous licence MIT, qui permet de mesurer ce temps de parole.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>C’est un logiciel qui s’appelle InaSpeechSegmenter. C’est l’outil que l’Arcom utilise chaque année, en réalité, pour mesurer le temps de parole sur les différents médias, que ce soit audiovisuel ou radio, qui a permis de donner à voir qu’on avait un petit peu baissé sur la partie temps de parole, quand bien même le nombre de femmes avait progressé. Il permet de voir aussi la répartition en fonction des secteurs d’activité. On voit typiquement que, sur la politique, c’est le sujet sur lequel, pour la sixième année de suite, les femmes ont le moins de temps de parole, avec 32 % d’invitées.<br/><br />
Ça prend n’importe quel fichier audio en entrée : si vous enregistrez vos meetings, vos réunions, c’est une pratique que je vois de plus en plus pour que les personnes puissent regarder plus tard à partir du moment où l’encodeur c’est du FFmpeg. En entrée, vous passez ça sur ce logiciel qui est en Python et ça ressort des statistiques, donc super pratique pour avoir des données factuelles sur le temps de parole.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>J’ai une petite question : ça identifie la voix, si c’est une voix de femme ou d’homme ?<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Absolument.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Donc, pour les gens qui ont des voix atypiques, ça peut quand même se tromper.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Oui. Comme pour tout outil, ce sont des tendances. Déjà, on ne parle que des hommes et des femmes, on ne parle pas de tout ce qui est transgenre, non-binaire. On va vraiment avoir un aperçu grosse maille des tendances. Cela dit, les écarts sont suffisamment criants pour que ça fasse le travail.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ça donne déjà une idée. Il vaut mieux avoir un chiffre approximatif que pas du tout.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Clairement.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Vous parlez d’encodage FFmpeg, je pense que tout le monde n’est pas forcément familier du terme et après j’aurais une question.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Je ne vais pas trop rentrer dans les détails, c’est un encodeur, à la limite testez. Prenez-le, en ligne de commande, vous passez en paramètre… je sens que je me noie dans les données techniques.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je peux en donner peut-être deux/trois.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>En gros, on peut dire que l’encodage c’est passer dans un certain format, les formats de vidéo ou d’audio.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Oui absolument, il y a MP4, MP3, je ne sais pas si ça passe, mais ça doit passer c’est du FFmpeg.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Si, ça passe, en audio, en vidéo, ça décode et ça encode à nouveau.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Je ne sais pas quel format n’est pas en FFmpeg, en réalité aujourd’hui.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Il doit y en avoir, peut-être des formats propriétaires, justement. Comme c’est un outil libre et que ça exploite un maximum de formats, je crois que tout ce qui est à peu près libre est dedans.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>On a tendance à essayer en vrai.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>En fait, c’est utilisé pratiquement par tous les sites de vidéos quand on <em>uploade</em> une vidéo sur un sur un site quelconque, à priori même chez Google, YouTube ou autre, il doit y avoir du FFmpeg derrière et aussi sur des logiciels type Peertube, ça permet de convertir les résolutions, les formats, de couper des morceaux, c’est extraordinaire. Je crois qu’un des auteurs c’est Fabrice Bellard, un Français, gourou du Libre et derrière il y a sûrement des gens de VideoLAN. Il y a une forte influence française derrière.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>VideoLAN développe le logiciel que, je pense, quasiment tout le monde connaît qui est VLC, ce logiciel de lecteur média, avec son petit cône orange, un logiciel libre effectivement extrêmement connu, extrêmement utilisé. On les avait reçus dans <em>Libre à vous !</em> il y a quelque temps, vous cherchez en utilisant le moteur de recherche du site.<br/><br />
Tu as mentionné PeerTube. Je précise qu’exceptionnellement, comme lors du dernier Au café libre, nous sommes effectivement en ce moment sur Peertube, il y a sans doute un encodage du son.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Bonjour PeerTube.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je comprends du logiciel, tel que tu le décris, que c’est pour traiter une grande masse de données, en fait ça va aspirer beaucoup de données, ou est-ce aussi un logiciel qu’on peut utiliser, tu as dit réunion, mais dans une réunion, dans un meeting politique, une petite réunion ? C’est un logiciel qu’on peut utiliser ? Du coup, humainement, peut-être qu’on pourrait repréciser homme, femme.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Complètement. Là, par exemple, l’enregistrement de Peertube, il y aura, de toute façon, un fichier, on peut extraire le fichier avant de le téléverser sur la plateforme. Du coup, en lançant le script Python qui est développé par l’Inria, ça permettra après d’avoir la statistique : aurai-je parlé un tiers du temps vu que nous sommes trois ? Je ne sais pas, on verra. En tout cas, ça permet de s’affranchir de tout ce qui est biais, d’avoir des données concrètes, moi j’aime bien.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Effectivement, la question du temps de parole des femmes et de l’équilibre des temps de parole n’est pas une question de logiciel libre, c’est une question qui concerne tout le monde. Par contre, c’est intéressant : on voit omment des outils peuvent venir répondre et qu’il nous faut aussi ces métriques. Dans <em>Libre à vous !</em>, nous sommes assez attentifs, nous essayons de faire un effort actif pour avoir une participation de femmes aussi proche possible que celle des hommes, vu qu’on s’inscrit dans un système qui est inégalitaire de fait, on fait au mieux pour ça. On mesure, on ne peut pas avancer à l’aveugle et c’est pour cela que c’est important d’avoir ce genre d’outil. Donc, si on est dans des collectifs qui veulent avoir cette vigilance, est-ce que c’est un outil qu’on peut assez facilement récupérer et installer pour son usage ?<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Oui, complètement. En même temps que je t’entends parler, l’outil que j’aime bien c’est Jitsi Meet si on parle de visioconférence : on a les statistiques en temps réel du temps de parole de chaque participant et participante. Du coup, c’est un super outil d’auto-modération en temps réel, plutôt qu’attendre d’avoir terminé la réunion, regarder après coup « on est bien, on n’est pas bien » ; ça permet de voir de façon criante où on en est.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est génial comme système ! Ça permet de voir où on en est.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je précise que Jitsi est un logiciel libre de visioconférence. Je ne connaissais pas cette fonction très intéressante.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Elle est top. Elle marche très bien.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Utilisez-là. N’hésitez pas à vous appuyer sur les outils libres qui existent, il y a des logiciels libres qui peuvent répondre à ces enjeux et ce genre d’outil permet de répondre à cette question importante de la mesure du temps de parole.<br/><br />
Je vous propose d’avancer dans nos sujets.<br />
<br />
[Clochette]<br />
<br />
===Mathilde Saliou : « La neutralité sur Wikipédia ? La question du <em>deadname</em> des personnes trans relance le débat »===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>On ne change pas complètement de thématique.<br/><br />
Dans la chronique précédente a été évoquée Mathilde Saliou qui est intervenue à l’AG de l’April, récemment, pour proposer une conférence « Comment rendre le numérique plus inclusif ». Elle a récemment publié un article, le 14 mars sur Next : « La neutralité sur Wikipédia ? La question du <em>deadname</em> des personnes trans relance le débat », c’est le titre de l’article. Les <em>deadnames</em>, moribonds en français, ce sont les prénoms des personnes trans, qui leur ont été assignés à leur naissance, donc avant leur transition, un prénom qu’ils ou elles ont décidé d’abandonner pour en choisir un qui correspond mieux à leur identité de genre.<br/><br />
Il y a beaucoup de débats au sein de Wikipédia notamment autour cette question : faut-il mentionner ce nom dans les articles Wikipédia ?<br/><br />
Je trouve ce débat très intéressant pour beaucoup de raisons, c’est un débat compliqué, qui pose des questions vraiment fondamentales sur la façon dont fonctionne Wikipédia et je trouve que c’est quand même le rôle, la fonction sociale et politique de Wikipédia, qui est un des plus importants projets de la culture libre, je pense qu’on peut dire un des projets humains les plus importants de ces dernières années. Ce qui ressort de l’article de Mathilde Saliou c’est : qu’est-ce que la neutralité ? Est-ce qu’une telle encyclopédie doit assumer de prendre en compte les évolutions de la société, de son impact qui est, je trouve, intrinsèquement politique concernant l’objet politique qu’est Wikipédia.<br/><br />
Je ne sais pas ce que c’est que ce débat vous inspire. Florence.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Dans les arguments de Wikipédia, c’est justement qu’ils voulaient être neutres et ne pas rentrer dans des problématiques militantes.<br/><br />
Je pense que c’est facile d’avoir cette posture quand est déjà parmi les dominants. Ce que j’ai trouvé assez intéressant c’est que, dans la démarche, ils parlent un peu de leur prise de décision : comment ils décident, ensemble, d’une façon de faire par rapport à une autre ? Du coup, il y a une espèce de questionnaire, un sondage, qui a tourné sur cela, pour que, au moins les personnes concernées puissent s’exprimer. Il y a une problématique de vie privée, le fait que les personnes trans, en tout cas celles qui avaient été interrogées, ne souhaitaient pas faire apparaître leur <em>deadname</em> parce que c’est rattaché à trop de souffrance et qu’on devrait respecter ça, sachant que les règles de la fondation c’est « ne pas nuire aux personnes dont on dresse les autobiographies ». Du coup, une des personnes, par rapport à cette façon de prendre les avis et de prendre des décisions à travers des sondages, disait que sur ce sondage il y avait énormément d’avis polarisés. Il y a eu deux fois, seulement, où c’était très polarisé, c’était sur ce sondage et sur l’écriture inclusive.<br/><br />
En tout cas, ce que je remarque en tant que femme, pour le coup, c’est que sur des sujets où la majorité des contributeurs sont des contributeurs hommes e les sondages qui « posent problème », entre guillemets, c’est quand ça concerne des minorités de gens. C’est là où on voit qu’on a plus de mal à changer nos habitudes, notre statu quo, et à prendre en compte les problématiques d’une partie de la population dans laquelle on se reconnaît pas.<br/><br />
Après, je ne suis pas une personne trans. Pour moi, à partir du moment où ça génère de la souffrance, il n’y a pas de débat. Je crois qu’une des décisions c’était de dire que si la personne n’avait pas encore transitionné et qu’elle avait déjà une page Wikipédia, on gardait, on faisait mention du <em>deadname</em> quelque part, pas forcément mis en avant.<br/><br />
C’est vrai que cette question n’est pas évidente. Ma préconisation serait quand même de se mettre à la place des personnes qui sont concernées.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je précise. Je crois qu’un des aspects de la décision, je ne suis pas non plus ce qui se passe dans le détail, ça reste ouvert, on peut donc aller regarder, jeter un œil. Effectivement, si la personne était connue et avait une fiche Wikipédia avant, il y a un intérêt quelque part. L’exemple pris par Mathilde Saliou, c’était les sœurs Wachowski qui ont produit notamment des films très connus comme <em>Matrix</em> en tant qu’homme et elles ont transitionné par la suite. La question ne paraît pas forcément plus tranchée, mais des éléments matériels permettent peut-être de justifier la présence de ce nom, sous quel nom a été publié une œuvre, en tout cas, ça fait partie des éléments.<br/><br />
Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Merci pour vous vos retours. J’ai essayé de regarder un petit peu le sujet. J’ai vu passer cette actu et le sujet est effectivement extrêmement complexe, je n’ai pas eu le temps de creuser autant que vous. peut-être<br />
Le sujet des bios sur Wikipédia est déjà un sujet très sensible parce qu’on veut éviter que les personnes citées dans les bios mettent n’importe quoi, fassent leur auto-promo.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Précisons que dans les règles de Wikipédia, on ne peut pas participer à l’écriture de sa propre biographie, ce n’est pas de l’autobiographie.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>On marche sur des œufs parce que, évidemment, il ne s’agit pas de faire son propre panégyrique, c’est déjà un souci. Après, il y a le côté histoire, il y a une sorte de côté mémoire de Wikipédia qu’on ne souhaite pas forcément vouloir altérer et il y a effectivement une demande très forte dans la communauté trans sur le <em>deadname</em>, si ça s’appelle <em>deadname</em> ce n’est pas pour rien, ça évoque le fait qu’on veut faire disparaître son ancienne identité et c’est aussi à entendre, pour éviter les abus d’un site qui est extrêmement visible et influent. En matière de Libre, je crois que Wikipédia est effectivement le site internet le plus visible, en tout cas en audience, en France, il n’y a pas de site libre plus visible que Wikipédia, même tous les autres qui ont une importance majeure, au niveau législation, en termes de défense des intérêts de la culture libre.<br/><br />
Je ne sais pas, je suis perplexe parce que je ne vois pas quelle peut être la meilleure solution. Tant mieux si la communauté Wikipédia arrive à trouver une solution. Peut-être qu’on pourrait imaginer que suivant les pages et suivant les personnes concernées, on cite, ou pas, le <em>deadname</em>. J’imagine qu’il n’y a pas forcément, non plus, une homogénéité totale des personnes trans en la matière. Comme c’est un sujet très délicat pour tout le monde, j’avoue que je n’ai pas d’avis très tranché.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je pense que ce qu’il faut aussi accepter que ce n’est pas à nous d’avoir des réponses, d’autant qu’aucun de nous, ici, n’est concerné par cette question. Ce qui est important, à mon sens, c’est aussi la réponse du Libre de manière générale, ce n’est pas tant forcément dans les solutions retenues, c’est comment on atteint ces solutions.<br/><br />
Je vous invite à réécouter l’émission 21 qui date déjà de 2019, mais ça n’a pas changé. On avait reçu les personnes qui gèrent Wikipédia et qui expliquent aussi comment fonctionnent les prises de décision, la création d’articles, qui peut contribuer, comme on contribue. En fait, quand on met des bases transparentes et à peu près claires clair sur la façon de prendre des décisions, c’est aussi cela qui rend les décisions acceptables et les décisions peuvent évoluer, on peut changer. Tout en acceptant un biais que tu as très bien mentionné : les contributeurs – je n’ai pas le chiffre en tête, je l’ai vu passer, je l’ai je ne l’ai pas noté, j’aurais dû –, sont principalement des hommes, c’est le fruit d’une société patriarcale dans laquelle nous sommes, ce sont plutôt les hommes qui sont éduqués à utiliser l’informatique, qui sont à l’aise avec, etc., donc ça a aussi des impacts sur qui contribue et comment on atteint les décisions. C’est clair que c’est d’une complexité énorme. Je trouve intéressant aussi cette question de Wikipédia : qu’est-ce que la neutralité ? Est-ce que ça doit être une encyclopédie factuelle et c’est quoi le factuel, ça reste politique ? Ou est-ce qu’il faut que Wikipédia ait aussi un rôle de participation à l’émancipation quelque part, donc être vecteur de progrès social ? Mais comment faire ? C’est vrai que ce sont des questions complexes.<br/><br />
On avance ou juste un dernier mot.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Pour moi sur la neutralité, dans la mesure où on choisit, ou pas, de mettre une information.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Un mot aussi sur l’égalité des temps de parole : Wikipédia cherche à rééquilibrer, il y a aussi un problème sur Wikipédia au niveau des bios, il y a plus de bio d’hommes célèbres que de femmes célèbres et Wikipédia cherche…<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Wikimedia, pas Wikipédia. Je l’avais mis dans mes notes et, justement, avant d’avancer on va en parler, je vais laisser Florence en parler, je pense que tu parles des Sans pagEs<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Pas forcément.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je pense qu’on peut évoquer Les sans pagEs, on l’a déjà évoqué dans l’émission, mais là je pense que c’est intéressant aussi.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>À ma connaissance, justement, en fait ils ne sont pas contre, il y a pas eu d’efforts.<br />
Les sans pagEs est une association qui va rédiger des biographies sur les femmes pour augmenter la visibilité et les contributions des femmes dans la vie, dans la société. Il y a vraiment des écritures, réécritures entre clans. Du coup, ce n’est pas si évident de réécrire plusieurs fois les mêmes articles. Est-ce que c’est légitime, est-ce que ça ne l’est pas ? Est-ce que, quand on est femme de quelqu’un, là on aura le droit d’avoir sa propre page Wikipédia ? Alors que, sinon, il faut apporter plus de preuves et là, les biais sexistes de la société n’épargnent pas les contributeurs et les décideurs donc ???[40 min 12] de Wikipédia.<br/><br />
Je vous invite vraiment à rejoindre l’association, c’est complètement ouvert, il y a des ateliers régulièrement, d’une demi-journée il me semble, justement pour apprendre à contribuer sur Wikipédia. On apprend déjà plein de choses sur des histoires qui sont méconnues et, d’un point de vue technique, je ne sais pas si c’est un frein, mais c’est possible que cela en soit un. Après, je pense que les femmes – je suis vraiment d’un gros cynisme aujourd’hui – ont moins de temps personnel. En réalité, elles passent deux fois plus de temps sur les tâches ménagères, elles s’occupent aussi de leurs proches, du coup, forcément, c’est moins de temps pour contribuer sur autre chose.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>N’est-ce pas cela qu’on appellerait un problème systémique ?<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Il y a plein de facteurs.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>À fortiori, Wikipédia ayant cherché à se protéger avec des procédures assez complexes, c’est très chronophage, ce n’est pas comme il y a 20 ans, il ne suffit d’aller modifier une page et ça passe. On peut se faire retoquer, d’ailleurs il y a même des gens qui passent leur vie à écrémer Wikipédia de ce qu’ils estiment ne pas être de valeur encyclopédique. L’été dernier, des associations de Linuxiens ont vu leurs pages potentiellement disparaître et quelqu’un voulait dégager toute une série de pages sur le logiciel libre. C’est donc très difficile d’avoir des bios nouvelles sur Wikipédia, il y en a même pas mal qui sont détruites au fil du temps.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Tout à fait. C’est pour cela que trouve aussi intéressant l’objet des Sans pagEs On peut aussi s’organiser aussi pour contribuer à Wikipédia. Est-ce que ça doit venir de Wikipédia ou est-ce que d’autres associations peuvent se regrouper, s’organiser pour contribuer à Wikipédia ? Je ne vois pas un problème de passer par cela et j’invite aussi tout le monde à aller contribuer à Wikipédia, c’est ouvert, il faut le rappeler, notamment aux femmes, si elles ont effectivement le temps, mais ça peut faciliter de passer par des organisations et des associations comme Les sans pagEs qu’on vous invite chaudement à soutenir et à rejoindre si vous le pouvez.<br/><br />
Avant d’avancer je pense qu’on va on va s’offrir une petite pause musicale.<br/><br />
Nous allons écouter <em>Stormdans</em> par Ceili Mos. On se retrouve juste après dans Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>Stormdans</em> par Ceili Mos<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous venons d’écouter <em>Stormdans</em> par Ceili Mos, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
==Deuxième partie 46’ 18==<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous voilà de retour Au café libre.<br/><br />
Je suis Étienne Gonnu de l’April et nous discutons des actualités du Libre avec Florence et Pierre.<br/><br />
N’hésitez pas à participer à notre conversation 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l’émission sur le site causecommune.fm bouton « chat », et vous pouvez aussi nous suivre exceptionnellement, via la chaîne Peertube ; je pense que vous pouvez trouver le lien sur le site causecommune. fm.<br />
<br />
===Des entreprises françaises saisissent le Conseil d’État contre l’hébergement de données de santé chez Microsoft, pourtant approuvé par la CNIL===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Le sujet suivant, que je vous propose d’aborder, concerne l’audience devant le conseil d’État contre la délibération de la CNIL pour autoriser l’hébergement chez Microsoft pour le Health Data Hub, sujet long dans le titre, qu’on avait déjà évoqué, notamment dans Au café libre du 20 février, la délibération de la CNIL qui autorise donc l’hébergement chez Microsoft pour ce Health Data Hub, une plateforme destinée à centraliser des données de santé pour faire de la recherche dessus.<br/><br />
Pourquoi évoquer à nouveau ce sujet ? Parce qu’un un groupement d’entreprises et d’associations ont saisi le conseil d’État contre ce projet dit EMC2. L’audience a eu lieu la semaine dernière, on attend le délibéré qui, je pense, devrait arriver dans les jours à venir.<br/><br />
Alors pas forcément revenir dans les grandes longueurs sur ce débat qui a déjà eu lieu, ni Florence ni Pierre avaient participé, donc, si vous avez des choses à dire sur ce sujet, avant même l’audience devant le conseil d’État sur cette délibération de la CNIL, sentez-vous, bien sûr, libres de le faire. Je trouve déjà intéressant de rappeler que le recours juridique reste une modalité d’action face à des choses qu’on va considérer comme étant problématiques.<br/><br />
Je ne sais pas si vous savez des choses à dire, déjà sur ce projet et sur cette audience dont on attend le résultat assez impatiemment.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>De ce que j’ai vu, c’est un sujet assez technique au niveau de l’audience. J’ai vu l’avis de la CNIL qui était mi-figue mi-raisin, c’est-à-dire que c’était assez bizarre : la CNIL n’était pas vraiment pour, mais elle disait qu’elle ne pouvait pas être vraiment contre non plus.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Elle regrettait, c’est peut-être discutable, mais elle trouvait que le projet n’était pas une bonne idée, c’est mon interprétation, mais elle manquait de base légale, en fait, pour vraiment le refuser entièrement. Après, tout cela est très politique aussi.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’était aussi un peu humiliant pour l’écosystème français, parce que la CNIL a dit, en gros, « mettre ça chez Microsoft ce n’est pas top, mais on n’a pas l’équivalent, il y a pas de remplacement ». Il y a eu une grosse discussion là-dessus. En fait, c’est toujours le même sujet : les gros fournisseurs de <em>cloud</em>, type Microsoft, apportent des facilités. Être souverain, c’est un effort, c’est-à-dire que oui, si on ne veut pas prendre la solution qui semble la plus simple, on va devoir faire un effort. On n’est jamais souverain complètement gratuitement, ça prend un effort de travail, d’argent, de temps à y passer, ça dépend. On peut aussi se retrouver coincé sur des plateformes, comme on le voit, on en parlera peut-être plutôt à la fin, avec les affaires de licence Broadcom ou d’autres cas, comme on l’a vu aussi avec Oracle. Ça a l’air facile, mais, à un moment, quand le fournisseur dit « écoutez je multiplie mes tarifs par dix », on peut pleurer après. C’est la question de la souveraineté. Accessoirement, il y a eu un document interne, qui a été libéré par l’association de Xavier Berne, qui a été évoquée dans une émission précédente, à laquelle participe Xavier Berne.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Ma Dada.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Qui a obtenu, sur la demande d’un journaliste, Émile Marzolf, le document de comparaison des différentes solutions, qui a été largement anonymisé pour éviter que des réponses de nature « confidentiel business » soient exposées. Manque de pot, il suffisait d’enlever les pavés noirs dans le document pour voir les critères du document initial. Tout le monde s’est rué dessus pour voir un petit peu quels étaient les critères qui avaient été pris en compte et les réponses des fournisseurs.<br/><br />
J’ai vu passer ça ce matin, c’est tout frais, les sociétés concernées, qui s’estiment lésées par la décision, veulent monter jusqu’au niveau européen, elles suivent donc les différents niveaux de procédure en justice pour arriver jusqu’au niveau européen, pour défendre notre souveraineté.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Florence.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Que dire de plus ! Il y a ce côté « on n’a pas trouvé mieux », du coup on laisse ces données de santé pendant trois ans qu’ ! Aujourd’hui, on a quand même régulièrement des fuites de données sur beaucoup d’organismes d’État, donc je ne sais pas, les données sont peut-être libres maintenant !<br/><br />
En tout cas, je trouve bien de savoir que des recours sont possibles pour peu qu’on se donne vraiment les moyens.<br/><br />
Ce que j’ai bien aimé aussi, que je n’avais pas forcément en tête, c’est qu’à la base c’était Microsoft qui était utilisé sans avoir fait d’appel d’offres, ce qu’on est censé faire. Du coup, on voit clairement le côté pied dans la porte. Je n’ai pas vu la partie caviardée, du coup, à quel point les différentes solutions d’hébergement des données ont vraiment été mises en balance, mais là ça va quand même être un giga-hub de données sensibles. Je pense qu’on devrait montrer l’exemple et respecter la confiance de nos concitoyens et concitoyennes pour vraiment proposer une solution qui tienne la route.<br/><br />
Maintenant, je ne sais pas si ça va marcher, je ne sais pas non plus quelle est l’urgence de ce projet.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>De ce que j’ai compris, c’est du stockage de données à destination recherche, pour faire de la recherche sur de grandes quantités de données, anonymisées normalement, pour pouvoir faire de la recherche épidémiologie, tout un tas de choses, avoir une sorte d’entrepôt de données, comme on disait autrefois, pour permettre des activités de recherche, pour faire avancer la science, tout simplement.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je trouve que cette temporalité, cette idée d’urgence fait peut-être aussi partie, un petit peu, des germes du mal de ce projet. Il y a une commande politique : il fallait cette grande plateforme, etc., qui permettrait de faire des super trucs, un truc très centralisé. Donc déjà, aussi, dans l’infrastructure, dans les choix infrastructurels, des choses étaient posées. En fait, dans la manière dont la commande politique et dans l’urgence dans laquelle cette commande politique a été faite – y avait-il urgence à avoir une plateforme ?, c’est peut-être encore un autre sujet complètement lié – faisait que fondamentalement, dans la manière dont ça a été commandé, peut-être, effectivement, qu’il n’y avait que Microsoft vraiment en mesure. Ça veut dire qu’ils n’ont pas intégré la question de comment faire sur des bases à peu près souveraines, idéalement sur du Libre, mais, au moins déjà, sur des choses qui ne soient pas dépendantes d’un droit moins-disant sur les données personnelles. C’est aussi intégré, et je pense que tu l’as très bien dit, « on est dépendant des politiques tarifaires, etc. ». Il y a eu un rapport parlementaire, publié en janvier, qui parle d’un « piège Microsoft » dans lequel on pourrait tomber exactement pour ces raisons-là. C’est-à-dire qu’on crée de l’adhérence et des choix, des décisions commerciales sont prises par l’entreprise éditrice, dans ce cas-là Microsoft, soit basculer sur du <em>cloud</em> exclusivement, soit d’augmenter ses prix, donc comment fait-on ?<br/><br />
Il faut donc arrêter d’être passif. C’est de l’investissement, c’est la décision politique un peu de long terme, un peu de réflexion. Pour nous c’est ce qu’on appelle de nos vœux une priorité au logiciel libre, mais au moins déjà, arrêter d’être passif vis-à-vis de ces situations.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Il n’y a pas que ça. Il y a aussi les ??? [54 min 25] qui fait que quand on sort les données et qu’on veut changer de provider, ça coûte très cher pour le coup, cela aussi c’est un <em>lock-in</em> auquel on se soumet en confiant nos données à Microsoft.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b><em>Lock-in</em>, expression anglaise pour dire enfermement, on est coincé dans…<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je ne sais pas à quel stade on en est au niveau législatif, c’est peut-être, d’ailleurs, dans la loi SREN, il y a une disposition pour interdire les facturations des transferts de données sortantes.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>C’est effectivement en projet.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je crois que Google l’a déjà mis en œuvre d’ailleurs, ils ont déjà annulé, ils ont fait une annonce il y a quelques mois.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Peux-tu repréciser ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>En fait, ce que disait Florence, quand tu veux transférer tes données parce que tu veux changer de fournisseur, le transfert des données étant évidemment payant en entrée comme en sortie, tu vas payer pour faire sortir tes données, si tu n’en as pas de copie ailleurs. Ça a été considéré comme une forme d’entrave à la concurrence, pas au sens littéral mais quasi littéral. La loi SREN, qui est en train d’être finalisée, a une disposition là-dessus pour interdire ce genre de facturation, pour, justement, éviter, en tout cas réduire l’effet de verrouillage des fournisseurs.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>OK. À suivre donc.<br />
<br />
[Clochette]<br />
<br />
===La Commission européenne prise en flag de non-respect de ses propres règles===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>On va passer au sujet suivant qui est, en fait, la stricte continuité, on ne change pas tant que ça, il y a un dénominateur commun : la Commission européenne a été prise en flag de non-respect de ses propres règles, du fait de son usage des services de Microsoft 365. Plus précisément, le EDPS, le <em>European Data Protection Supervisor</em>, qui est en charge de s’assurer du respect du règlement général sur les données par les institutions européennes, a donné à la Commission européenne, jusqu’au 9 décembre, pour suspendre tous les flux de données vers Microsoft, y compris de ses sociétés affiliées et de ses sous-traitants non européens, résultant de l’utilisation de Microsoft 365.<br/><br />
Que dire de la Commission qui, en plus, se veut quand même assez exemplaire puis très insistante sur le fait d’une juste application du RGPD. Même au niveau de la Commission européenne on est dans ces situations, qui est, je pense un héritage, un passif assez lourd de <em>lock-in</em>, d’adhérence vis-à-vis de Microsoft.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est difficile de sortir de la drogue !<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>En fait, on pourrait dresser exactement le même constat que celui qu’on a fait sur les questions vis-à-vis du Health Data Hub. En France, on a une situation très similaire au ministère du Travail qui a une dérogation par rapport à ce qu’on appelle la directive <em>cloud</em> au centre pour continuer d’utiliser des solutions Microsoft, parce que, faute d’alternatives, c’est toujours cette question de l’alternative mais cette alternative ne va pas non plus venir nulle part !<br/><br />
L’April a fait une demande CADA, une demande d’accès aux documents administratifs, ce qu’aide notamment à faire le site madada qu’a fondé Xavier Berne. On l’a fait pour avoir des infos sur les groupes de travaux. Il y a visiblement des groupes de travaux, en tout cas il y a des études ou des échanges menés au sein des différents ministères, avec notamment la DINUM la Direction interministérielle du numérique, avec l’ANSSI qui est l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, avec visiblement la Direction du numérique du ministère du Travail qui doivent réfléchir, au moins avoir une vision sur les alternatives qui existent et c’est ce qui permettrait de justifier, finalement, de continuer à utiliser Microsoft. On essaie de faire un peu de lumière là-dessus pour savoir si des études sérieuses sont menées et dans quel ordre, dans quelle mesure ces études sont menées.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Petite précision sur la Commission. Concernant Microsoft, j’étais assez étonnée. Après que la France ait accepté de confier ses données de santé à Microsoft, du coup ça fait comme un désaveu. En lisant dans les petites lignes, je ne sais pas ce que vous en avez pensé, ma compréhension c’est surtout que ça peut facilement – facilement, façon de parler –, mais se corriger et que c’était surtout sur des sujets de forme, que ce n’était pas tant Microsoft, en soi, qui posait problème, mais le fait que ce n’ait pas été cadré : quelles données personnelles étaient confiées à Microsoft, comment c’était géré en termes de règles de sécurité, etc. Du coup, je suis assez curieuse de la suite pour voir si c’était histoire de montrer que, quand même, il y avait une attention à ça et que ça va être assez vite régularisé. Ou si l’intention c’était vraiment de dire c’est parce que Microsoft est américain, c’est hébergé aux États-Unis et ça pose problème. Donc quand même à suivre.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Il y a des débats. En France, il y a ce qu’on appelle SecNumCloud, une sorte de certification, qui semble dire qu’on peut utiliser Microsoft mais avec des conditions très strictes d’hébergement, etc., en plus ça peut faire ??? [59 min 07], donc, à voir comment, effectivement, ça se traduira au niveau européen.<br/><br />
Je rappelle l’EDPS, que j’ai mentionné, cette entité censée être indépendante par rapport à la Commission, je pense que je ne l’ai redit et c’est effectivement important. À voir avec quel sérieux ça va être pris. Je pense qu’il y avait un peu des deux : il y avait une partie parce que ça partait aux États-Unis et effectivement ce que tu disais, ce cadrage, j’avais à peu près aussi cette lecture.<br/><br />
Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>SecNumCloud est un peu plus qu’un label marketing, c’est un label marketing parce que c’est un argument de vente, mais c’est aussi une obligation d’audit et de certification des systèmes au niveau sécurité et, en fait, à peu près n’importe quelle entreprise, même américaine, peut répondre à cette obligation. Avoir la certification coûte très cher, donc, évidemment, il faut avoir une certaine masse critique pour que ça ait un intérêt pour ses clients. Un petit hébergeur n’aura pas les moyens de respecter cette obligation. Donc, là encore, ça favorise plutôt les GAFAM, pour eux ce sont trois cacahuètes à dépenser. Ça peut donc être contre-productif, ça peut ne pas forcément avoir l’effet souhaité.<br/><br />
Par ailleurs, de ce que j’ai compris, il y a eu quand même des engagements du projet EMC2 qui ont été cités dans les différents débats. À terme, peut-être pas 2024 mais 2025, 6, 7, on ne sait pas trop, pour réimporter ça sur du <em>cloud</em> plus souverain.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Entendu. Je vais me corriger. Fred me fait remarquer une erreur de ma part : Xavier Berne n’a pas fondé Ma Dada, il a été embauché pour y travailler, ce n’est pas la même chose.<br/><br />
On a parlé du projet EMC2 et du Health Data Hub, je veux quand même citer le travail d’une association qui s’appelle InterHop, qui avait beaucoup milité au tout début de ce projet Health Data Hub pour faire valoir une autre approche, basée notamment sur du logiciel libre. D’ailleurs, il me semble qu’ils proposent des services pour les professionnels de santé avec des logiciels libres, je tenais aussi à saluer leur travail, je mettrai la référence sur notre site.<br/><br />
Je vous propose d’avancer si vous voulez bien.<br />
<br />
[Clochette]<br />
<br />
===Techsoup : instrument d’influence des Big Tech américaines===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nouveau sujet même si Microsoft sera toujours dans les parages. Une tribune de l’April alerte sur Techsoup, un instrument d’influence des Big Tech américains.<br/><br />
À nouveau un sujet quand même un peu assez complexe, mais je pense qu’on peut quand même l’évoquer.<br/><br />
Pour résumer, Techsoup se présente comme un réseau international, sans but lucratif, d’organisations non-gouvernementales, qui fournit un soutien technique et des outils technologiques à d’autres ONG ; sur le papier c’est très bien. Par contre, quand on commence à regarder la liste des partenaires et les fonctionnements, parmi les partenaires je peux citer Microsoft, Amazon ou encore Cisco. Ce côté de vitrine permet peut-être aussi de l’optimisation fiscale, on peut le penser, en tout cas des questions se posent. Le problème étant que cette puissante machine Techsoup contribue en France, à travers le programme Solidatech sur lequel elle s’appuie, Solidatech est français, à consolider la place d’un numérique dominant, avec un code source fermé, donc à rendre une souveraineté, qu’on a déjà mentionnée, impossible en France au niveau des associations, ne serait-ce qu’en proposant aux associations bénéficiaires des licences pour des logiciels privateurs à des prix cassés et cela consolide donc la situation de dépendance aux GAFAM – Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft – et souvent au détriment des usagers de ces associations, notamment en ce qui concerne les données personnelles. Pour donner un chiffre, Solidatech occupe une place très importante en France, ils ont notamment 40 000 organisations bénéficiaires en décembre 2023.<br/><br />
Solidatech propose un catalogue de logiciels au bénéfice d’associations à des prix battant toute concurrence et propose notamment des licences Microsoft et d’autres, et c’est cela qui nous pose problème.<br/><br />
Je vous invite donc à découvrir cette tribune. L’April a des propositions qui visent à avoir plus de transparence et <em>in fine</em>, à inscrire une véritable priorité au logiciel libre et d’accompagnement pour les associations qui ont des vrais besoins informatiques et dont le souci principal ce ne sont les outils qu’elles utilisent, mais il y a quand même des enjeux qui vont les traverser, notamment celle des données personnelles de leurs usagers.<br/><br />
Je ne sais pas si c’est une tribune dans laquelle vous avez eu le temps de vous plonger, un sujet que vous avez pu un peu étudier. Déjà, que vous évoque cette question ?<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Je me sens toujours tiraillée sur ça. Visiblement, ce n’est pas le cas de Microsoft, mais il y a pas mal de licences gratuites pour les associations, notamment, il me semble, la suite Google, Slack aussi. Je ne connaissais pas Soliddatech. Déjà cette vision du moins bien, on va dire, parce que c’est gratuit et que ça ne traite pas de données personnelles. Souvent – enfin, je ne sais pas, je ne vais pas me mouiller –, en tout cas on va dire que ce ne sont pas les mêmes fonctionnalités, ça peut créer un fossé entre les deux.<br/><br />
En même temps, je trouve effectivement super malin de faire ces propositions financières, parce que, clairement, en termes de domination du marché, on couvre tout : les entreprises, les associations, les écoles. Du coup, je me demande ce que ça génère, derrière, en termes d’achat, si on donne une valeur marchande pour que ce soit à peu près honnête, peut-être pour valoriser les données personnelles qui circulent et de proposer des alternatives libres, de les rendre visibles, ça peut aider. En même temps, c’est vrai que ça ne me paraît pas suffisant, je me dis qu’il faudrait surtout plus de subventions pour le Libre, pour l’aider ou le rendre obligatoire dans les administrations.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Pour rebondir, pour clarifier. Tu as tu as évoqué des propositions. Le but n’est pas d’empêcher les associations de fonctionner, il y a effectivement différents niveaux.<br/><br />
Solidatech, par exemple, bénéficie d’un agrément d’utilité sociale, ce qui donne des bénéfices notamment en termes d’avantages fiscaux, ce sont donc des leviers et ce genre d’outil, comme Solidatech, devient un levier pour pousser vers une certaine informatique, alors qu’on pourrait imaginer des manières d’en faire, au contraire, des leviers pour bénéficier, pour pousser une informatique libre au bénéfice de tout le monde, avoir plus de transparence sur les tarifs. C’est moins cher, mais que représente, finalement, cette part de coût restant sur les licences ? Après, c’est gratuit à un moment x, une fois qu’on est captif – on en revient aux questions de ce piège Microsoft –, dans quelques années qu’en sera-t-il ? Et afficher des solutions libres, on peut dire « OK, vous avez des besoins, là tout de suite. Vous êtes sur Microsoft. On ne va pas vous obliger à passer du jour au lendemain à changer », Microsoft ou autre, mais il y a des solutions libres, alternatives, encore faut-il le savoir, parce qu’on n’a pas toujours le temps d’aller regarder ce qui existe d’autre.<br/><br />
Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est ce que j’allais dire. Je n’ai pas regardé les détails de l’initiative Techsoup, mais, de ce que je comprends, il n’y a pas de solutions libres proposée dedans, c’est uniquement du GAFAM. C’est le système « première dose gratuite » !<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je ne maîtrise pas assez le sujet, notamment sur Techsoup, pour te répondre par l’affirmative, mais oui.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>On pourrait peut-être déjà diluer un peu la chose en mettant une offre libre là-dedans. Si le truc a été monté dans un but commercial, ça s’assemble. Tel que tu le présentes ça semble effectivement avoir été monté dans un but d’entrisme commercial, ce sont les méthodes classiques pour diffuser de la technologie et augmenter son adoption, on sait comment ça marche et il faut trouver des fournisseurs, au moins des plateformes plus indépendantes. À côté, qu’on propose au moins des solutions libres, c’est la moindre des choses ! Après peut-être même que des solutions libres, s’il faut en arriver là. D’ailleurs, c’est le cas de certaines initiatives. Il y a effectivement souvent un cloisonnement entre les deux. De mon point de vue personnel, les GAFAM ne seraient pas là ou plus là s’il n’y avait pas de Libre : MacOS tourne sur du Libre, Microsoft Azure c’est essentiellement du Libre sinon c’est invendable, Google tourne sur du Libre, Facebook tourne sur du Libre, Amazon tourne sur du Libre.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Android y est basé. En fait, il n’y a pas d’informatique moderne sans le logiciel libre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Après, on peut essayer de monétiser des solutions par là-dessus, on peut réintroduire un effet de <em>lock-in</em> au niveau supérieur, c’est toujours la même problématique, décaler d’un cran en fait.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>J’aimerais bien avoir votre avis, votre regard. Je vais citer Laurent Costy, dont on a écouté la chronique en début d’émission, qui a été le principal rédacteur de cette tribune. Par ses expériences professionnelles et ses engagements militants il a une très bonne lecture des enjeux au niveau des associations. Il a notamment conduit le groupe Libre Association au sein de l’April, pour promouvoir les logiciels libres auprès des associations. Je vais en profiter pour citer également Framasoft qui, bien sûr, fait un travail phénoménal en proposant des outils à travers différents collectifs, notamment le Collectif CHATONS, mais également un projet Emancip'Asso, bref, fermeture de la parenthèse. Une des recommandations que Laurent a envisagées, que je trouve intéressante, c’est de flécher une partie des amendes européennes qui sanctionnent ce qu’on appelle les Big Tech, les GAFAM, vers des structures qui, au contraire, vont réellement contribuer au bien commun.<br/><br />
Effectivement les GAFAM ont d’énormes moyens de capacité de financer des outils pour que ce soient, quelque part, des outils très alléchants et très performants sur certains besoins, au détriment d’autres choses. En fait, il faut aussi investir dans les communs informationnels, financièrement, par de la ressource humaine, etc. Peut-être que ce fléchage serait une manière de rééquilibrer un petit peu les choses. On en revient à la question des sous, de l’investissement.<br/><br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Carrément !<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>On avance.<br />
<br />
[Clochette]<br />
<br />
===Projet de loi SREN===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Autre sujet qu’on avait déjà évoqué, mais il y a une actualité chaude dessus, que Pierre avait commencé à évoquer, je parle du projet de loi SREN, sécuriser et réguler l’espace numérique. On a parlé de ce projet de loi dans l’émission 189, en octobre dernier, avec la Quadrature du Net, Mozilla et Act Up-Paris, un échange très intéressant que je vous recommande d’écouter si ce sujet vous intéresse.<br/><br />
Pour rappel, ce projet de loi était très vaste, couvrait beaucoup de choses, mais il prévoyait notamment la création d’un filtrage contre les arnaques en ligne, qui a failli être une obligation de censure portée sur les épaules des navigateurs web ainsi que l’obligation de la mise en place d’un système de vérification d’âge pour les sites pornographiques.<br/><br />
Le gouvernement s’est fait taper sur les doigts assez vertement par la Commission européenne pour avoir marché sur les plates-bandes du droit européen. Ce projet de loi passe aujourd’hui en commission mixte paritaire pour aboutir à une version finale du texte, en principe respectueuse du droit européen. On verra dans quelle mesure ils ont revu leur copie. Ça passe aujourd’hui en commission mixte paritaire, je pense qu’on verra assez rapidement les résultats de tout ça.<br/><br />
On a déjà débattu, mais si vous souhaitez en dire un mot.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Deux mots. Il y a encore des problèmes dans ce projet de loi. La commission mixte paritaire aujourd’hui est à huis-clos !<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>C’est le gros problème des commissions mixtes paritaires.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est toujours le cas. De ce que j’ai compris, ce sont sept députés et sept sénateurs, c’est donc vraiment un petit comité, et, une fois que ça sort de la commission mixte paritaire, ça va être voté en bloc par le Sénat et l’Assemblée, c’est-à-dire que ce n’est plus le moment de discuter. En gros, on ne peut pas voter contre, on ne peut pas amender, donc c’est « tu prends tel quel sinon tu vas te faire engueuler ! »<br/><br />
On sait pas trop ce qu’il va y avoir dedans au final, il y a quand même énormément de dispositions très problématiques qui vont subsister sur la vérification généralisée d’âge en ligne, potentiellement sur tous les réseaux sociaux, pour protéger les mineurs, mais ça veut dire que pour vérifier l’âge, il faut le demander également aux majeurs. On ne peut pas connaître l’âge de quelqu’un en ne demandant qu’à ceux qui sont en mesure d’être interdits, donc ça pose beaucoup de problèmes. Le rapporteur Paul Midy, par coïncidence totale, a publié hier une tribune dans laquelle il repart sur son cheval de bataille d’interdire l’anonymat en ligne. Un truc qui a déjà été retoqué en octobre/novembre, le débat a déjà eu lieu au Parlement. Apparemment, il essaie de lancer un rideau de fumée pour qu’on ne parle pas des sujets, parce que le sujet n’est plus à l’ordre du jour, ça a été complètement enlevé de cette loi, mais ça évite de parler des sujets plus embêtants qui eux, subsistent dans cette loi, qui sont tout à fait liés à l’anonymat en ligne. Il y a donc un jeu médiatique là-dessus, disons pour détourner l’attention, qui est assez intéressant à observer et un peu ennuyeux.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Florence, ça t’inspire des choses ?<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>J’attends la suite, on va voir. C’est évidemment un bras de fer, clairement c’est une danse, c’est toujours la même chose. Contrôler, contrôler, contrôler, sous couvert de sécurité et de protection, mais après qu’est-ce qu’on en fait ? Comme l’a dit Pierre, les données ne se trient pas comme ça. On collecte tout le monde. Quand on voudra contrôler certaines choses qui ne seront pas OK, on ne peut pas prédire aujourd’hui ce qui sera fait des données qui sont collectées, ce sera trop tard ; une fois que les données sont parties, elles sont parties.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Je pense que ce projet de loi, comme tant d’autres malheureusement, est un bon exemple d’une approche très solutionnisme : utiliser les outils technologiques pour répondre à des problèmes politiques complexes. C’était le cas de l’accès, par exemple, des mineurs aux sites pornographiques. Je pense que c’est très bien de vouloir se poser la question de comment faire en sorte que des gamins n’acceptent pas des contenus qui ne sont pas adaptés à leur âge, mais, justement, jeter comme ça des outils, des solutions en disant « la technique va s’en occuper », je pense que c’est un petit peu prendre le problème par le mauvais bout, sur une problématique qui, par ailleurs, peut être complexe.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est une mauvaise politique parce qu’on vend du rêve. On pose la question aux gens, on leur demande s’ils veulent qu’on évite que les mineurs accèdent à la pornographie, mais, évidemment, on ne leur explique pas les implications sur la vie tout le monde. Donc oui, littéralement on vend du rêve.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Il nous reste au maximum six/sept minutes. Vous aviez chacun évoqué un sujet, je pense que la sortie de scaphandre 1.0 était plutôt un bonus, je ne sais pas à quel point c’est un sujet que tu aimerais mentionner rapidement. Tu as parlé de Redis qui change de licence et de Broadcom. Tu pourrais parler des problématiques liées à des licences de logiciels. J’avais encore noté deux sujets, je ne sais pas s’il y en a un qui a votre préférence : d’un côté on a Elon Musk, encore lui, qui lance la bagarre des IA en promettant une intelligence artificielle en accès libre, ça aussi ça pose des questions. Et puis, en soi le sujet n’est pas intéressant, mais ça a fait beaucoup de bruit et ça pose quand même des questions, c’est la tribune de l’ancienne ministre Najat Vallaud-Belkacem : rationner Internet à trois gigaoctets par semaine. Est-ce qu’un de ces deux sujets vous attire plus que l’autre ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Les deux m’attirent, choisissez.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>On va éviter Elon Musk, je pense qu’on parle trop de lui.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>On peut effectivement ne pas faire de pub supplémentaire à Elon Musk, on en dormira sans doute mieux<br />
<br />
===Tribune de Najat Vallaud-Belkacem qui propose de « rationner Internet » en limitant le nombre de gigas à utiliser quotidiennement===<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Parlons un petit peu de cette tribune qui a fait couler beaucoup d’encre. En soi, je trouve que la proposition paraît d’une banalité assez confondante quand on suit ces sujets : rationner me paraît sur-simplifier les problématiques.<br/><br />
Comment vous avez vu cette tribune qui a bien tourné sur les plateaux, mais ce n’est pas n’importe qui, une ancienne ministre, cadre du parti socialiste, je pense qu’elle a effectivement des entrées pour faire parler d’elle ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Elle jouait sur du velours parce que c’est la corde sensible côté médiatique, il suffit de taper sur le numérique pour être directement invité à la télévision. Elle a fait plusieurs émissions, il y a eu plusieurs reprises à la radio. Najat Vallaud-Belkacem s’est placée en lanceuse d’alerte, mais c’est un débat récurrent depuis dix ans. Il y a des rapports sénatoriaux, des rapports parlementaires divers, des réflexions scientifiques là-dessus qui paraissent littéralement trois fois par an, ça n’arrête pas. Des spécialistes s’en occupent. Là, elle a un petit peu tout mélangé, tout un tas de sujets, le sexisme, le harcèlement, la pollution, avec une mesure simple qu’elle voudrait voir appliquer, je pense qu’elle sait que c’est pas du tout applicable. Il y a eu un gros buzz. Je pense que c’est une bonne communicante. Par coïncidence, on a appris aujourd’hui qu’elle était sur la <em>short list</em> pour être nommée directrice de Sciences Po, il y a peut-être un rapport entre les deux, elle a voulu se remettre un petit peu sur le devant de la scène. Il y a beaucoup de choses à dire là-dessus, mais je pense qu’il faut recadrer le débat pour essayer de faire un petit peu la part des choses et avoir des approches plus circonstanciée sur les problèmes qui existent.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Florence.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Moi aussi, j’ai trouvé la proposition incongrue, on va dire. Après, j’avoue que j’ai tellement entendu d’échos un peu brutaux et violents à son encontre que c’est un peu brouillé. Sachant, j’en parlais tout à l’heure, le peu de femmes politiques qu’on entend, il y a énormément de bêtises qui sont dites par des hommes politiques, on ne leur dit absolument rien alors que c’est juste dramatique, même si on parle de la Covid, qui a réellement généré des morts. C’est pour cela que je ne suis jamais très à l’aise d’attaquer les personnes. Par contre sur le contenu, ce n’était pas terrible.<br/><br />
Du coup, si je me mets du côté positif, j’ai quand même trouvé la démarche intéressante. Je suis quand même dans ce « délire-là », entre guillemets, je pense qu’on peut consommer moins et le fait de mesurer c’est quelque chose qui peut aider. Aujourd’hui, on a ce sentiment d’infinité de tout et le numérique donne une abstraction très grande à tout ce qu’on consomme, alors que rien n’est gratuit, et ce n’est parce qu’on ne le voit pas que, derrière, il n’y a pas des <em>datacenters</em>, des câbles qui polluent les océans, donc rien n’est gratuit. Ce côté « ayons conscience que ce qu’on regarde sur Netflix, par exemple, ou France Télévisions génère comme pollution », je trouve que c’est intéressant. Ça m’a fait me poser la question « combien je consomme, en ce moment, en gigas ? ». Personnellement, je n’en ai aucune idée, parce que tout est à portée de mon pouce. Même pour nos enfants, tout ce qui est haut débit, bas débit, est devenu très abstrait. Aujourd’hui, les limites planétaires ne sont quand même pas si infinies que ça, en ça je trouve que la question était plutôt intéressante, même si les solutions sont un peu hasardeuses, dans la mesure où c’est la production qui concentre la majorité de la pollution sur les considérations écologiques. Mais, finalement, tout se rejoint : si on consomme moins, on produit moins, etc.<br/><br />
Ma réponse est un peu en biais, parce que j’ai entendu trop de choses.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je ne suis pas contre l’idée de sobriété quand elle est utile, c’est-à-dire qu’on sache quel est l’impact de nos actions de sobriété. Ça peut être une question de moindre pollution et ça peut être des questions personnelles : ne pas se noyer dans des interactions inutiles sur des réseaux sociaux.<br/><br />
Je pense qu’il faut essayer de comprendre. Je pense qu’on place trop souvent sous l’aspect environnemental des choses qui n’ont pas à l’être, qui sont beaucoup plus anodines, et ça fait oublier les autres enjeux. Sur les histoires de harcèlement, qu’on réduise nos usages d’Internet, pourquoi pas, pour avoir un usage raisonnable. Je pense que ça doit être une démarche personnelle.<br/><br />
Quand ça a vraiment un impact environnemental, si c’est prouvé, on peut discuter. Si l’intérêt environnemental de réduire notre consommation est prouvé, d’accord, faisons-le. Pour moi, c’est beaucoup plus subtil que l’image qui en est donnée dans des tribunes comme celle-là. C’est vraiment ça qui a été mis en avant. Ce n’est pas cela qui a été mis en avant par l’autrice d’ailleurs, c’est ça qui est intéressant, mais c’est une des choses qui ont beaucoup aidé la tribune à buzzer et je pense que ce n’est pas le problème principal à soulever en fait.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Tu veux dire la partie harcèlement ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>non, la partie pollution. Beaucoup de gens ont repris le truc en disant « elle a raison, il faut réduire la pollution, etc. ». J’ai eu l’occasion de l’expliquer par ailleurs, j’ai beaucoup réfléchi à ces sujets. Il y a un résultat de l’Arcep par exemple, l’Autorité de régulation des postes et télécommunications, qui s’occupe notamment de l’impact du numérique et qui a fait remarquer que notre box consomme la même quantité de courant, à 95 % près, qu’elle soit totalement inutilisée ou qu’elle soit utilisée à 100 %. En fait, l’impact du volume de données est extrêmement faible.<br/><br />
Après, ça n’empêche pas de réfléchir à nos usages, on sait qu’il vaut plutôt ne pas changer le matériel pour un oui ou pour un non, ne pas jeter des téléphones encore parfaitement utilisables ou des PC, on sait que ça a un gros impact. Réduire la quantité de données qu’on consomme, c’est beaucoup moins évident, parce que pratiquement tout ce qui fonctionne sur Internet ce sont des équipements qui consomment la même chose, à peu de choses près, qu’on ne s’en serve pas ou qu’on s’en serve à fond, avec un bémol quand même, c’est que tout ce qui est gros calcul, typiquement IA ou éventuellement compression vidéo, il a un certain nombre de choses qui consomment du temps de calcul plus que du réseau et là, on peut effectivement avoir un peu d’impact.<br/><br />
Ce sont des sujets très complexes d’ingénierie et je trouve que c’est trop simplifié dans l’exposition médiatique qui en est faite. On se retrouve à faire des actions de type Digital CleanUp Day où on va nettoyer nos boîtes aux lettres de courriels ou détruire des fichiers, ce qui est un peu à côté de la plaque. Quand on voit les quantités de données économisées et qu’on sait ce qu’on peut stocker sur un disque qui consomme l’équivalent d’une ampoule électrique, on voit qu’on fait beaucoup d’efforts pour des impacts extrêmement réduits.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Le temps file, je ne sais pas si tu voulais réagir encore ou si c’était bon de ton côté.<br />
<br />
<b>Florence Chabanois : </b>Je pense qu’on peut en parler pendant une semaine. Il y a effectivement des ordres de grandeur à prendre en compte.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je peux en parler des heures comme vous pouvez le constater.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Le droit à la connexion est aussi un droit extrêmement important dans la société, que ce soit socialement ou même dans nos relations avec les administrations, on a besoin de ces connexions, donc ce n’est pas anodin non plus de vouloir le limiter sans réflexion assez sérieuse.<br/><br />
En tout cas fin de notre Café libre. Grand merci à Florence Chabanois, Grenouilles, membre core de Tech. Rocks et de Duchess France, et à Pierre Beyssac, informaticien libriste de longue date, fondateur d’eriomem.net, un service de stockage de fichiers. Merci beaucoup à vous deux.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b> J’ai arrêté l’activité de stockage, je précise.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>On corrigera dans les annonces.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Merci beaucoup.<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Merci à vous deux. Je vous souhaite une belle fin de journée et on va passer notre dernier sujet sans pause musicale.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Chronique « la pituite de Luk » – « L’humanité, c’est surfait »==<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous allons poursuivre avec une nouvelle pituite de Luk, une chronique rafraîchissante au bon goût exemplaire qui éveille l’esprit et développe la libido.<br/><br />
Aujourd’hui, Luk nous explique que « L’humanité, c’est surfait ».<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Luk : </b>Le mois dernier, j’ai parlé de la façon dont les bombasses sont en train de se faire grand remplacer par des IA génératives. Je vais continuer dans cette veine-là, parce qu’il y a de la matière. Ma conclusion était que la nature même de la bombasse, lisse et inaccessible, porte déjà une bonne part d’artificialité. Ce n’est donc pas si étonnant qu’on puisse préférer une bombasse virtuelle à une faite de silicone et d’os.<br />
<br />
On pourrait croire que les IA génératives disruptent notre réalité par tous les orifices, mais ça fait longtemps que la tendance est en marche. Les Japonais ont une grosse longueur d’avance en la matière. La déshumanisation des relations y est un business établit. On peut, par exemple, louer des amis ou de la famille, suivre des artistes musicaux virtuels, ou faire sa vie avec une fiancée virtuelle elle aussi. Enfin, sa vie… Il faut pour s’en assurer bien lire les CGU du service.<br/><br />
En 2019, un certain Akihiko Kondo, qui rentre dans la catégorie des « fictoromantiques », avait annoncé son mariage avec un produit dérivé d’une chanteuse virtuelle nommée Hastume Miku. La femme d’Akihiko était commercialisée sous forme d’un hologramme dans une petite boîte connectée. Il est désormais veuf, en quelque sorte, puisque son FAI, Fournisseur d’Amour Inconditionnel, a coupé les serveurs auxquels la boiboite était connectée. Mais s’il surmonte son chagrin, il pourra retenter sa chance avec les nouveaux services qui pullulent en Chine notamment. Le phénomène semble y connaître un succès fulgurant chez les hommes comme chez les femmes. Les adeptes de ces applications vantent une relation où l’autre est toujours disponible, toujours tourné vers soi et avec qui on peut avoir des discussions qu’on n’arrive à avoir avec d’autres. Tout cela fleure bon le narcissisme forcené et peut-être que tout ce qu’on lit sur la Chine et ses enfants rois, générés par la célèbre politique du lardon unique, fait effectivement la différence. Mais, ce n’est certainement pas un monopole asiatique que de se mirer à l’infini dans ces miroirs amplificateurs de vanité que nous offrent toutes ces applis.<br />
<br />
Le code qui fait tourner l’humanité est foncièrement bugué. Le narcissisme le plus débridé génère une récursivité infinie. Dès lors qu’elle est publique, la gratification narcissique et son shoot de dopamine alimentent une boucle de renforcement. Les concepteurs de réseaux sociaux ont sciemment exploité cette faille pour rendre leurs services addictifs. Allez, je fais une prédiction facile : dans peu de temps, on pourra s’abonner à des IA répliquant des gens célèbres qui coacheront leurs utilisateurs.<br />
<br />
Une chose est certaine, c’est que ces relations virtuelles alimentées par des IA vont littéralement atomiser ce qui restait de vie privée à leurs utilisateurs et, par ricochet, à leurs proches. Le fichage extensif des réseaux sociaux que nous connaissons sera probablement considéré comme grossier et primitif face à ce que pourra faire un de ces confidents virtuels à qui on dit tout ce qu’on ne peut pas dire à ses proches.<br />
<br />
Pour ceux qui ont encore l’ambition de nouer une relation qui ne soit pas illusoire, les choses se compliquent. Des études montrent que dans le monde occidental, un fossé s’est creusé entre les hommes et les femmes de moins de 30 ans. Les jeunes femmes sont plus souvent progressistes, les jeunes hommes plus souvent conservateurs que par le passé. Les deux ont bien du mal à se rejoindre.<br />
Considérant les liens malsains qui relient les incels et l’extrême droite, on peut anticiper que ce hiatus ne débouche sur rien de bon pour les jeunes femmes. Et puis Boxing-Macron a parlé de réarmement démographique. Les utérus sont désormais des ressources stratégiques qu’il faudra mobiliser quoi qu’il en coûte. Merci à la jeune génération de déverser leur progéniture dans nos casernes.<br />
J’ai pas mal dérivé depuis le point de départ qu’étaient les bombasses. C’est donc le moment de ressortir Taylor Swift dont j’avais parlé la dernière fois. Elle a, aux US, un succès phénoménal, elle est milliardaire, certes, mais elle a aussi une influence considérable sur la population. Des sondages estiment qu’elle pourrait même faire basculer l’élection présidentielle du côté du vieillard sénile actuellement en poste au détriment du vieillard sénile et fou qui veut revenir.<br />
<br />
Dans ce pays, le droit à l’avortement a été remis en cause. On y envoie désormais des femmes en prison pour 40 et quelques années grâce, notamment, aux données rachetées au GAFAM. Une bombasse comme Taylor Swift, qui démontre tant d’autonomie et d’influence, déplaît. C’est donc assez naturellement, qu’elle fait l’objet de détournements pornographiques massifs, encore une fois grâce aux IA génératives. Tellement massifs que même le réseau du délinquant financier toxicomane d’extrême droite le plus célèbre du monde a décidé de bloquer les recherches relatives à Taylor Swift. Pour la protéger sans doute, mais, incidemment, la voilà donc partiellement invisibilisée sur Twitter.<br />
Même si notre époque ressemble à un entonnoir nous concentrant vers diverses catastrophes, la violence et l’asservissement ont toujours été une des façons de fonctionner privilégiées d’Homo sapiens. Le respect mutuel et l’écoute n’est qu’une stratégie évolutionniste parmi d’autres et sans doute pas celle qui a le vent en poupe actuellement.<br />
<br />
Alors peut-être qu’une illusion bien faite et qui ne serait pas contrôlée par autrui, avec une fiancée virtuelle qui resterait à la cuisine, une bombasse qui se contente du luxe modéré d’un studio de célibataire, ou un amant qui ferait oublier que, même entourés, nous sommes foncièrement seuls, est finalement un moindre mal. Parce que l’humain, c’est très surfait !<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>De retour en direct dans <em<Libre à vous !</em>, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques.<br/><br />
C’était la pituite de Luk.<br />
<br />
Nous approchons de la fin de l’émission. Nous allons terminer par quelques annonces.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre==<br />
<br />
<b>Étienne Gonnu : </b>Initiée et coordonnée par l’April, l’initiative Libre en Fête revient pour la 23e année consécutive. Pour accompagner l’arrivée du printemps, des événements de découverte du logiciel libre et de la culture libre sont proposés par plusieurs organisations partout en France autour du 20 mars. L’édition 2024 du Libre en Fête a lieu du samedi 9 mars au dimanche 7 avril. Tous les événements à retrouver sur agendadulibre.org.<br />
<br />
Sinon, que faites-vous vendredi 29 mars ? Si vous êtes en région parisienne, n’hésitez pas à passer nous voir au local de l’April, dans le 14e arrondissement de Paris, pour un temps convivial de rencontre. Tout le monde est bienvenu, membre ou pas, à partir de 19 heures.<br />
<br />
Le 29 mars, toujours en région parisienne, c’est la Journée du Libre Éducatif, avec notamment une chronique en direct de Laurent et lorette Costy à 11 heures 45. Événement, je le précise réservé, aux enseignants, enseignantes et agents de la région académique Île-de-France. Si c’est votre cas, n’hésitez pas à y passer, et si vous avez bien écouté la chronique de Laurent et Lorette, pensez à applaudir à l’évocation du terme « ecballium », ça leur fera plaisir.<br />
<br />
Je vous invite à consulter le site de l’Agenda du Libre, agendadulibre.org, pour trouver des émissions en lien avec le logiciel libre ou la culture libre près de chez vous.<br />
Notre émission se termine.<br />
<br />
Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission : Laurent et lorette Costy, Florence Chabanois, Pierre Beyssac, l’incroyable Luk.<br/><br />
Aux manettes de la régie aujourd’hui, Julie Chaumard.<br/><br />
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, Julien Osman, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.<br/><br />
Merci aussi aux personnes qui découpent les podcasts complets des émissions en podcasts individuels par sujet : Quentin Gibeaux, bénévole à l’April, et mon collègue Frédéric Couchet.<br />
<br />
Vous retrouverez sur notre site web, libreavous.org, toutes les références utiles, ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm. N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu, mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondrons en direct ou lors d’une prochaine émission.<br/><br />
Toutes vos remarques et questions sont les bienvenues à l’adresse contact@libreavous.org. Si vous préférez nous parler, vous pouvez nous laisser un message sur le répondeur de la radio, pour réagir à l’un des sujets de l’émission, pour partager un témoignage, vos idées, vos suggestions, vos encouragements ou pour nous poser une question. Le numéro du répondeur est le 09 72 51 55 46.<br />
<br />
Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission.<br />
<br />
Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et à faire également connaître la radio Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
La prochaine émission aura lieu en direct mardi 2 avril à 15 heures 30. Notre sujet principal portera sur les évolutions majeures dans la gouvernance des logiciels libres.<br />
<br />
Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 2 avril et d’ici là, portez-vous bien.<br />
<br />
<b>Générique de fin d’émission : </b><em>Wesh Tone</em> par Realaze.</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Ing%C3%A9rences_%C3%A9trang%C3%A8res,_op%C3%A9rations_de_d%C3%A9stabilisation_:_comment_regagner_la_bataille_sur_les_r%C3%A9seaux_sociauxIngérences étrangères, opérations de déstabilisation : comment regagner la bataille sur les réseaux sociaux2024-03-24T13:02:06Z<p>Morandim : </p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Ingérences étrangères, opérations de déstabilisation : comment regagner la bataille sur les réseaux sociaux<br />
<br />
'''Intervenant·e·s :''' Laurent Cordonier - Thomas Huchon - Camille Grenier - Romain Pigenel - Delphine Sabattier<br />
<br />
'''Lieu :''' Podcast <em>Politiques Numériques</em>, alias POL/N<br />
<br />
'''Date :''' 15 mars 2024<br />
<br />
'''Durée :''' 51 min<br />
<br />
'''[https://audio.ausha.co/p0lkKS8OggE7.mp3 Podcast]'''<br />
<br />
'''[https://podcast.ausha.co/politiques-numeriques/ingerences-etrangeres-operations-de-destabilisation-comment-regagner-la-bataille-sur-les-reseaux-sociaux Présentation du podcast]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' À prévoir<br />
<br />
'''NB :''' <em>Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
==Description==<br />
<br />
Quelle est la réelle efficacité des campagnes d'influence des opinions sur les réseaux sociaux ? Quels sont les objectifs visés dans les cas d'ingérences étrangères ? Et nos armes, à nous, face aux manipulations politiques ?<br />
<br />
==Transcription==<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Bonjour à tous. Vous écoutez <em>Politiques numériques</em> alias POL/N. Je suis Delphine Sabattier. Aujourd’hui, le débat avec quatre pointures. On va parler ensemble des risques d’ingérence étrangère à la veille d’échéances électorales ou comment les pires stratèges politiques s’emparent des nouveaux outils de communication pour influencer les opinions et mettre à mal notre esprit critique.<br/><br />
En studio, Laurent Cordonier. Bonjour Laurent.<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Docteur en sciences sociales, directeur de la recherche de la Fondation Descartes, auteur de multiples rapports et papiers scientifiques, je vais en citer juste quelques-uns : le rapport « Comment les Français s’informent-ils sur Internet ? Analyse des comportements d’information et de désinformation en ligne », c’était pour la Fondation Descartes et puis on va citer, évidemment, ce rapport que vous avez écrit avec Gérald Bronner, commandité par le président de la République, « Les lumières à l’ère numérique ».<br/><br />
Avec vous Thomas Huchon, journaliste d’investigation. Bonjour Thomas.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Cher confrère, auteur, réalisateur. Pareil, je ne vais pas tout citer, mais j’avais envie de citer quand même <em>Comment Trump a manipulé l’Amérique</em> ou encore <em>Conspi Hunter – Comment nous avons piégé les complotistes</em>. Vous êtes également consultant, enseignant, spécialiste du Web, des infox et des théories du complot.<br/><br />
Autour de la table également Camille Grenier, Directeur des opérations du Forum sur L’Information et la Démocratie. Bonjour Camille.<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Vous collaborez avec de nombreux gouvernements signataires du partenariat pour l’information et la démocratie, un accord intergouvernemental qui a été initié par Reporters sans frontières et qui publie un nouveau rapport « Pour un contrôle démocratique de l’intelligence artificielle » ; ça fera partie, évidemment, de notre conversation.<br/><br />
Et enfin Romain Pigenel. Bonjour Romain.<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Directeur du développement des publics et de la communication à Universcience, institution publique qui réunit la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte. Vous êtes également enseignant en communication politique digitale à Science Po Paris, ancien directeur-adjoint du service d’information du gouvernement en charge du numérique et conseiller du président de la République à l’époque de François Hollande.<br />
<br />
Bonjour à tout le monde. Est-ce que, selon vous, nous sommes à un moment vraiment crucial, aujourd’hui, pour notre démocratie face, justement, à ces stratèges politiques qui utilisent les outils du numérique pas toujours à des fins très transparentes ? Thomas.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Je crois que tout va bien. On vit dans une période hyper apaisée, les informations de qualité circulent vraiment de manière très pondérée ! Non, ça va pas du tout, on est dans un moment de panique totale. Je crois que tous les manques, en termes de régulation, qu’on a pu observer depuis une dizaine d’années dans l’espace numérique et dans l’espace informationnel, vont être encore plus amplifiés par l’apparition de l’intelligence artificielle et la possibilité de fabriquer des contenus, de générer des contenus sans qu’ils soient vrais, mais en ayant l’air de plus en plus vrais.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Là, tu parles au futur, n’est-ce pas déjà un peu le présent.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Si, c’est déjà le présent. Un journaliste de France 24 s’est fait usurper son identité en <em>deepfake</em> la semaine dernière, on a une campagne de Trump qui a lancé ses premiers visuels, fabriqués par IA, où monsieur Trump est soutenu par des dizaines d’Afro-américains qui ont l’air de le trouver absolument génial alors qu’il n’en est probablement rien, on est quand même assez loin de la réalité là-dessus. Je crois, en fait, que nous sommes confrontés à un problème qu’on n’a pas voulu régler depuis dix ans qui est la nouvelle forme de la circulation de l’information, qui n’est pas régulée. En fait, le problème, ce sont plus les réseaux sociaux que l’IA.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Comment ça, ce n’est pas régulé ?<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Il n’y a absolument aucune forme de régulation concrète sur la circulation de l’information en ligne aujourd’hui, en tout cas pas du tout suffisamment. Les plateformes ne respectent pas ce qu’elles devraient respecter, on continue à les considérer comme ???<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Parce que du côté des médias, du côté de l’information contrôlée par les médias officiels, il y a cette régulation.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Je n’utiliserais pas le terme de « médias officiels ».<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>C’est vrai, je dois faire attention, je parle avec un spécialiste de la théorie des complots.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Si on imagine l’idée de médias officiels, on peut parler de l’ORTF, on peut parler des médias russes, on peut parler de la Corée du Nord, je n’ai aucun problème, mais en France il y a des médias professionnels et des désinformateurs professionnels, mais il n’y pas de médias officiels, ça n’existe pas, sinon il y aurait des médias officieux et là ça nous poserait un autre type de problème.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Laurent.<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>Peut-être, pour nuancer un peu le tableau, je suis d’accord dans les grandes lignes, mais il faut pas oublier non plus qu’en France, quand nos concitoyens s’informent sur Internet, ils s’informent avant tout par le biais des médias traditionnels et de façon extrêmement massive. C’est ce que j’ai pu montrer dans l’étude que vous avez citée « Comment les Français s’informent-ils sur Internet » où on voit que les grands médias traditionnels, en France, restent la source numéro une d’information des Français. Après, on va dire que la difficulté ce sont les réseaux sociaux parce que, là, on est on ne sait pas très bien à quoi leurs utilisateurs sont confrontés en termes de contenu informationnel puisque c’est très difficile à étudier simplement. Chacun a un mur personnalisé sur lequel apparaissent des posts qui lui sont propres, on ne peut pas faire des mesures d’audience comme on le ferait sur d’autres médias. Sur les réseaux sociaux, on a bien l’impression, en effet, que la part d’information de mauvaise qualité, trompeuse, voire manipulée, est plus importante que dans le reste de l’environnement informationnel, évidemment, donc mécaniquement, le fait de s’y trouver, d’y circuler pour s’informer, ou non d’ailleurs, mais d’y être exposé à des formes de manipulation d’informations, augmente le risque d’être induit en erreur. C’est ce qu’on observe, par exemple, dans d’autres études que j’ai pu faire sur l’information et la santé ou l’information et le climat.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Ça augmente le risque d’avoir de fausses informations, d’être confronté à la désinformation, mais est-ce que ça n’augmente pas, aussi, la possibilité d’être davantage informé, d’entendre plus de points de vue ?<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>En tout cas, ce n’est tellement ce qu’on mesure. Quand je mesure, par exemple, la connaissance sur des questions de santé ou la connaissance sur des questions climatiques, j’observe que les personnes qui s’informent avant tout sur les réseaux sociaux ont de plus faibles niveaux de connaissance sur ces sujets, seront donc plus sensibles à des informations fausses qui circulent sur ces réseaux. Par contre, vous avez raison de souligner le fait que rien n’est mécanique. Ce n’est pas parce qu’on est exposé à une information fausse qu’on va y croire. De même que ce n’est pas non plus parce qu’on est exposé à une information vraie qu’on va y croire. Il y a des facteurs individuels, des facteurs sociaux aussi qui protègent ou qui rendent, au contraire, davantage sensibles à des informations fausses ou trompeuses.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Romain.<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Je vais aussi un peu nuancer. Thomas a raison ; c’est vrai qu’il y a une espèce d’accélération qui fait qu’on a l’impression, ce n’est pas qu’une impression, que les problèmes se multiplient dans tous les sens. Je crois qu’il y a deux choses : il y a d’abord une révolution qui a, en réalité, plus de 20 ans quasiment 30 ans, qui a été l’arrivée d’Internet, même avant les réseaux sociaux, et qui a fracassé ce qui était avant le monopole de l’accès à l’information. La dérégulation est donc ancienne et pas que mauvaise. Ça me frappe toujours de voir comment, pour reprendre un anglicisme horrible, en dix ans on est passé d’un narratif à un autre : dans les années 2000, le discours ambiant c’était « Internet c’est formidable, ça donne la parole à tout le monde », c’était l’époque des blogs, c’était aussi toutes les utopies avec la démocratie participative qui allait être permise par ces nouveaux moyens ; il y a aussi eu toute cette idée qui n’était pas totalement fausse, pas totalement vraie non plus, que le Printemps arabe avait été permis par internet. Il y a eu tout ce discours-là qui était mirifique et puis, depuis quelques années, et je crois que le point de bascule c’est Cambridge Analytica, on a basculé, de mon point de vue, dans un discours qui est n’est pas beaucoup plus exact mais qui est radicalement inverse, où, finalement, tout est la faute à Internet, les réseaux sociaux sont catastrophiques, etc. Ce qui n’est pas faux, mais qui n’est pas complètement vrai non plus.<br/><br />
Deux choses en réaction.<br/><br />
La propagande politique a toujours existé et, comme dans toute course à l’armement, elle s’empare des nouveaux outils. Je ne suis pas certain que les stratégies d’influence à l’ancienne, par exemple de lobbies industriels ou autres, qui pouvaient payer des élus ou essaye de faire de l’infiltration dans les médias, étaient beaucoup moins efficaces que les techniques actuelles. Je pense que c’est un jeu du chat et de la souris. Il y a, je ne dirais pas un camp du bien et du mal puisque ce n’est évidemment pas ça, mais il y a des gens qui essayent de faire de l’information sérieuse, il y a des propagandistes de tous ordres, ça va depuis la communication politique jusqu’à la propagande, et ils s’emparent des nouveaux moyens.<br/><br />
Il y a aussi un autre sujet qui m’intéresse et je pense qu’il va être à creuser qui est en deux temps : c’est d’abord quelle est l’efficacité tout cela ? Je dis cela aussi en tant que communicant d’abord politique et, aujourd’hui, dans le domaine scientifique et culturel, ça se saurait si la com’ fonctionnait tout le temps à 100 %. Évidemment qu’il faut combattre les dérives, surtout quand elles prennent la forme de stratégies d’État pour déstabiliser des démocraties, mais ce n’est pas aussi simple de dire « on va arroser de vidéos et ça va transformer l’opinion, ça va faire basculer une élection ». D’ailleurs, quand on regarde la littérature, qui est complexe parce que, en fait, c’est à la connexion des sciences d’information, de la sociologie, des sciences politiques, c’est compliqué d’arriver à établir le poids précis d’une campagne numérique ou d’une campagne de communication en général. Vous connaissez sans doute Hugo Mercier, un chercheur en sciences cognitives, qui a sorti, je crois il y a un peu plus d’un an, un petit ouvrage formidable qui s’appelle </em>Pas né de la dernière pluie</em>. C’est un grand chercheur en sciences cognitives, mais il a fait un peu une revue de littérature, de bonne vulgarisation, sur tout ce qui démontre que, au fond, on n’est pas si dupe ou si crédule qu’on pourrait le croire. C’est assez orienté puisque la thèse d’Hugo Mercier c’est d’aller à contre-sens du courant dominant, mais c’est intéressant de voir, et il le rappelle avec beaucoup de choses qu’on oublie parfois, que ce n’est pas parce qu’il y a une propagande qu’elle fonctionne forcément. Après, évidemment, ce n’est pas parce qu’elle ne fonctionne pas ou qu’elle ne fonctionne pas totalement qu’il ne faut rien faire.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Toutes ces fractures qu’on voit aujourd’hui dans la société, est-ce qu’on peut quand même les attribuer aux réseaux sociaux ou est-ce que c’est juste le reflet, finalement, de la réalité, de la colère populaire, peut-être, je ne sais pas, de la déchéance des démocraties ? Thomas<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>C’est sûr que la démocratie, qui est, par essence, un modèle frustrant, génère un peu ce sentiment-là. Je crois que là où nos systèmes d’information, nos systèmes de régulation, l’existence d’une presse professionnelle avec tous les défauts qu’elle peut avoir, permettait de limiter ces impacts-là, eh bien ces impacts sont en permanence multipliés, amplifiés, par les réseaux sociaux et par la nouvelle circulation de l’information. Le vrai problème ce n’est pas tant que circulent des choses vraies ou fausses sur les réseaux sociaux, c’est qu’en fait on ne partage plus rien. Comme on est chacun enfermé dans une réalité dans laquelle on voit des choses qui correspondent à ce qu’on croit déjà un peu, c’est donc vachement difficile de se rendre compte qu’on est en train d’être manipulé. On est en train d’être radicalisé contre nous-mêmes et la radicalisation c’est un escalier, on ne sent jamais les premières marches, on se rend pas compte qu’on est en train d’être radicalisé. Le problème ce n’est pas tant qu’il n’y ait plus de vérité, ça n’a jamais existé, je partage totalement ce que dit Romain et ce que dit Laurent là-dessus, mais je crois que le problème c’est qu’on ne partage plus les faits.<br/><br />
Pour moi, le point de bascule ce n’est pas tant Cambridge Analytica, même si ce truc-là est énorme, j’ai enquêté là-dessus et, à l’époque, personne ne voulait entendre parler de cette histoire.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>D’ailleurs, on ne peut pas formellement dire que Cambridge Analytica a fait élire Donald Trump.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Ah si, on peut le dire clairement.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>J’ai lu des études qui contredisent ce point de vue.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Je sais bien, mais je ne crois pas du tout à ces études-là.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Thomas, vous en êtes convaincu.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Je veux dire que c’est le 21 janvier 2017 que ça bascule, c’est ce jour-là, quand la porte-parole non pas du candidat Trump mais de la Maison-Blanche vient expliquer qu’il existe des faits alternatifs. C’est ce jour-là que le monde bascule.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Je voulais donner la parole aussi à Camille. Vous publiez, j’en ai parlé, un nouveau rapport sur le contrôle démocratique et l’intelligence artificielle. Est-ce qu’il vous semble qu’on est à un point de bascule avec un nouvel outil qu’on a du mal à maîtriser, finalement ?<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Ce qu’on voit, et ça a déjà été dit il y a 10/20 ans, c’est la disruption de la distribution de l’information. Là, on est arrivé à la disruption de la production de l’information-même : on sait plus de quelle façon est produite, nécessairement, l’information. Après, il y a les enjeux de circulation, d’amplification, ça a été dit. Il suffit de prendre le métro pour voir que nous sommes tous dans des espaces informationnels. Nous sommes dans un espace commun qui est une rame de métro, mais nous sommes tous dans notre petite bulle : des personnes achètent des chaussures, d’autres regardent des recettes sur Instagram et tout le monde est dans sa bulle. C’est vraiment, je pense, un manque de commun aujourd’hui.<br/><br />
Le rapport qu’on a publié avant celui sur l’IA c’était justement sur le pluralisme et la curation algorithmique et comment on peut mettre en place des solutions techniques ou de régulation pour assurer un peu plus de pluralisme et d’accès à l’information fiable.<br/><br />
Sur l’IA, c’est vrai qu’on voit, aujourd’hui, que ce sont des entreprises privées, encore une fois, qui lancent leurs produits et puis on verra ce qui se passe. Il faut remettre certains garde-fous en place. Nous avons publié notre rapport qui était le fruit de six mois de réflexion d’un groupe de travail avec contribution de 150 experts à travers le monde, on l’a publié la semaine dernière depuis cinq villes à travers le monde.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>C’était fin février puisque nous serons diffusés un petit peu plus tard.<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>On décline toute une série de recommandations à la fois sur la construction de ces modèles et de ces systèmes d’IA, leur déploiement, les cadres de régulation qu’il faut mettre en place, notamment sur la transparence puisque, aujourd’hui, on ne sait pas vraiment comment ces systèmes d’IA sont entraînés et l’impact que ça peut avoir sur l’intégrité de l’information derrière. Et ce n’est pas seulement l’IA générative, c’est aussi toute la curation qui est faite et l’analyse des données personnelles qui est faite. On en revient aux différents espaces qui ne sont plus tant des espaces communs mais des espaces hyper personnalisés.<br/><br />
Je regardais aussi les premiers symptômes qu’on a sur des <em>deep fakes</em>. C’est vrai qu’on est quand même, cette année, dans l’année des élections, il y a plus de deux milliards de personnes.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Quatre !<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Quatre ! Ça dépend des chiffres, j’ai du mal à trouver le bon chiffre. Quatre, oui c’est la moitié de la population. C’est vrai que 2024 est une année quand même assez cruciale pour la démocratie. En Europe, on est déjà rentré dans la campagne, mais aussi à travers le monde : l’Indonésie, par exemple, un pays ultra peuplé a ses élections. On voit, finalement, que les <em>deep fakes</em> ce n’est pas seulement sur les réseaux sociaux. Il y a les premiers cas de <em>phoning</em> où une IA prend la voix d’un président ou d’un candidat pour dire « non, n’allez pas voter à telle échéance, le plus important, c’est en novembre ». <br/><br />
Il y a donc les réseaux sociaux, mais il y a aussi, quand même, la production de l’information qui est, aujourd’hui, tout à fait changée par ces nouveaux systèmes,<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Dans les recommandations que vous faites, je me suis arrêtée sur le mot « authenticité d’un contenu ». Comment fait-on, aujourd’hui, pour vérifier l’authenticité d’un contenu ?<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>C’est un grand sujet, c’est assez marrant parce qu’on a commencé à publier notre rapport et c’est vrai que la technologie avance extrêmement vite. Il y a cette idée du <em>watermarking</em> qui fait qu’on pourrait identifier et obliger, finalement, les producteurs de contenu à ce que ce soit tout à fait transparent avec les personnes qui sont exposées à ce type de contenu.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>C’est-à-dire apposer un filigrane qui permette de montrer que ce contenu a été généré par une intelligence artificielle.<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Et puis il y a d’autres d’autres possibilités. Quand on est exposé à une information, il y a toute la discussion autour du <em>fact checking</em> mais qui, en général, a quand même assez moins de portée que le contenu initial. On a fait une recommandation, notamment dans le cadre des élections : si une personne est exposée à un contenu qu’on pourrait qualifier de désinformation, comment s’assure-t-on que les mêmes utilisateurs sont aussi exposés au <em>fact checking</em> et au fait que cette information était fausse ?<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Laurent Cordonier, vous allez participer, vous me l’avez confié, à une commission d’enquête sur les politiques publiques face aux opérations d’influence étrangère. Donc, en France, on a conscience, aujourd’hui, des risques en pleine période électorale européenne ?<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>La conscience est en train de se créer en France. Il y a eu un peu de retard au démarrage de la part des autorités et aussi, il faut le dire, des services de renseignement qui, par rapport aux États-Unis par exemple, ont été un peu plus lents à réagir sur ces questions, notamment d’ingérence numérique étrangère. Je pense que, aujourd’hui, la conscience est prise, la difficulté va être de trouver les bons moyens, les bons leviers d’action évidemment.<br/><br />
Je pense que ça repose la question qui était tout à l’heure sur la table et qui est vraiment centrale : est-ce que la désinformation fonctionne ?, parce que c’est vraiment ça le nerf de la guerre. Je l’ai indiqué, au début : être exposé à un contenu faux n’a pas ça par un effet mécanique sur nos croyances. Mais ce qu’il faut bien considérer, d’ailleurs mon collègue et ami Hugo Mercier fait très bien de le rappeler dans son livre, il y a une abondante littérature qui montre que nous sommes loin d’être naïfs, pour peu qu’elles aient un peu d’éducation, les populations sont en général capables de séparer le bon grain de l’ivraie informationnelle. Par contre, la question du fonctionnement des informations c’est : que vise la désinformation, notamment les ingérences numériques étrangères ? Que visent-elles à faire ? Si l’idée c’est de se dire qu’elles veulent nous faire gober un message particulier, probablement que ça marche mal. Par contre, si l’objectif de la désinformation et des ingérences numériques étrangères, c’est de créer du doute et de polariser la société cible de ces attaques, en général une démocratie libérale, alors là on peut vraiment penser que ça fonctionne beaucoup mieux. C’est bien ce qu’on voit avec les campagnes russes qui ont notamment attaqué la France déjà pendant la période des Gilets jaunes et avant, et qui continuent depuis. Ces campagnes de désinformation ont pour objectif d’appuyer sur des lignes de fracture qui sont préexistantes au sein de la société, dans le but de les renforcer et, là-dessus en tout cas, on a pas mal d’études qui laissent penser que fréquenter davantage les réseaux sociaux, des réseaux comme X ex-Twitter, augmente, en effet, la polarisation affective, c’est-à-dire le niveau auquel vous détestez le camp adverse. D’ailleurs, il y a des résultats assez amusants qui montrent qu’on a tendance à surestimer la détestation du camp adverse à notre égard et, comme tout le monde fait ça, on a l’impression, à la fin, que tout le monde se déteste et, évidemment, ce n’est pas très bon pour des questions de cohésion nationale. On voit bien que quand ces fractures sont amplifiées dans des sociétés qui sont confrontées à des questions, aujourd’hui, de guerre à leur porte, aux portes de l’Europe, etc., c’est évidemment l’objectif visé et l’objectif qui peut fonctionner par des campagnes, pour le coup, de désinformation ou, en tout cas, d’amplification de certains phénomènes internes.<br />
<br />
==18' 46==<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Quand on est capable, justement, d’identifier ces campagnes de désinformation, ça veut dire qu’on est capable de les stopper ? Thomas ? Que fait-on face à ça ? Là, il y a une commission d’enquête qui est lancée, mais ça veut dire que, derrière, il va y avoir des décisions à prendre. Tout le monde veut réagir.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>On a un vrai problème qui est que tout ça est très difficile à remonter. Il s’agit d’opérations d’influence, bien souvent secrètes, menées par des agences de renseignement, on n’est donc pas exactement sur des gens qui ont toujours pignon sur rue. Ça été le cas avec la création d’un certain nombre de médias, je pense à Russia Today, à Sputnik,, qui ont été aidés des agents de la déstabilisation de la démocratie française, pendant des années, en essayant de se faire passer pour des journalistes, c’est-à-dire en revendiquant un certain nombre de valeurs journalistiques de manière un peu lunaire, mais bon !, c’est aussi ce que permet, finalement, ce marché complètement dérégulé de l’information aujourd’hui. La seule vraie manière de se prémunir contre ces opérations d’influence, c’est de développer l’esprit critique et la résilience dans la société, malheureusement ce n’est pas si facile que ça.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Vous parlez de marché dérégulé, il faut quand même mettre en place des politiques publiques aussi.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Oui, c’est sûr que ça serait beaucoup plus difficile pour les Russes de foutre le bazar dans nos démocraties si les réseaux sociaux respectaient le fait qu’ils sont des médias, donc, qu’ils sont responsables de ce qui est diffusé sur leur page.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Et pas de simples hébergeurs.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Eh bien oui ! À un moment, il va falloir arrêter de considérer que quelqu’un qui éditorialiste le contenu pour vous, qui gagne de l’argent avec de la publicité et qui vous diffuse de l’information, n’est pas un média. À un moment, il va falloir qu’on comprenne ce truc-là !<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Ils ont des obligations de modération qui s’imposent aujourd’hui.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Visiblement, ils n’ont pas l’obligation de déclarer leur chiffre d’affaires publicitaire dans notre pays, ce qui est la majeure partie de l’argent qu’ils gagnent, ils n’ont pas l’obligation de répondre systématiquement à la justice française quand on les interpelle sur des campagnes de harcèlement qu’on peut subir ; c’est mon cas depuis des années, je suis injurié et menacé de mort sur Twitter, sur Facebook sur Instagram, sur TikTok, j’ai beau faire des procédures de manière assez régulière, il ne se passe jamais rien ! Donc, à un moment, tout cela pose quand même un vrai problème. Et enfin, il y a un moment où on ne peut pas laisser des entreprises étrangères, qui ont des lois qui ne correspondent pas aux nôtres, foutre en l’air nos démocraties. On ne peut pas rester assis à regarder ce qui se passe, ce n’est pas possible ! On est dans Politiques numériques, il va falloir que les politiques comprennent qu’ils ont plus d’intérêts à réguler Facebook qu’à faire un live sur Facebook eux-mêmes. Il faut qu’ils comprennent que le jeu de la démocratie ce n’est pas uniquement de décider quand ils veulent parler à leur communauté et, potentiellement, déclencher des raids numériques sur les gens qu’ils détestent. Il va falloir qu’on remette le truc au centre de la table. À un moment, il faut un arbitre, on ne peut pas laisser les équipes continuer comme ça, j’attends donc cet arbitre avec impatience.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Romain, vous vouliez réagir, et puis on va parler de l’esprit critique.<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Justement, ça fera lien. Que faire face à ces campagnes de désinformation ? Je pense qu’il y a trois niveaux de réponse :<br/><br />
déjà, il y a le niveau de réponse sur le plan des médias au sens technique, c’est-à-dire des vecteurs eux-mêmes, soit avec des solutions technologiques, comme vous l’évoquiez, c’est-à-dire le watermarking, etc. Ma conviction profonde c’est que ça sera, malheureusement toujours, un peu une course entre le chat et la souris et qu’il y aura toujours un temps d’avance pour le fraudeur, ce n’est pas pour cela qu’il ne faut pas le faire ; il y a cette piste-là ;<br/><br />
il y a la piste de la régulation, je ne vais pas y revenir, elle a été évoquée. Je trouve que les choses avancent lentement, mais lentement dans le bon sens, notamment l’Europe, qui est une machine lente mais puissante, commence à poser des jalons avec le Digital Markets Act qui vient de rentrer en action.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Et le DSA.<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Aussi. Je trouve, quand même, que l’Europe joue plutôt un rôle plutôt intéressant.<br/><br />
Après, il y a un deuxième plan qui est le plan de la production de contenus. C’est vrai qu’on peut avoir le sentiment que, souvent, les désinformateurs ont un temps d’avance et je le crois pour plusieurs raisons.<br />
D’abord parce que, pour ce qui est des désinformateurs je dirais non étatiques, c’est un fait historiquement vérifié : comme ils n’avaient pas accès aux canaux de communication traditionnels, ils ont été les premiers à se jeter sur Internet et c’est pour cela que, quand on regarde y compris les phénomènes complotistes, sectaires, extrémistes, ils ont souvent eu un temps d’avance dès les années 2000 sur la présence sur le Web parce que, justement, ils avaient compris que c’était la porte d’entrée qui leur permettait de contourner le système, mais qui existait bien puisqu’il avait un système médiatique auquel, heureusement, ils n’avaient pas accès. Le constat que je fais depuis 15 ans et contre lequel je me bats dans tous mes postes successifs, c’est quand même le retard à l’allumage de la puissance publique, au sens large, pour arriver, je vais prendre un terme excessif à dessein, à inonder de contenus Internet. On est dans une bataille de trouvabilité des contenus. À un moment, sans rentrer dans des considérations techniques que, par ailleurs, les auditeurs connaissent, mais si on n’a pas des contenus nombreux et bien optimisés, on ne remonte pas.<br/><br />
Après, sinon on peut choisir un autre biais, le biais de la censure, c’est une autre voie, et on peut dire, pourquoi pas, qu’il faut fermer ces réseaux, je dis ça sans rire. Mais si on dit qu’ils sont ouverts, il faut les réguler et il faut jouer le jeu. Alors ça va mieux, je vais prendre simplement un exemple.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Il y a une autre voie qui est de devenir nous-mêmes des désinformateurs pour contrer les propagandes. Aujourd’hui, c’est envisagé, en tout cas aux États-Unis ils le font, c’est une pratique.<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Un exemple très concret, si vous voulez bien, et je vais finir. En 2016, Congrès de lancement de Santé publique France, qui est l’opérateur que vous connaissez, je me souviens que j’avais fait la démonstration en direct : quand vous regardiez YouTube, vous tapiez « vaccin », les 20 premiers résultats étaient tous des vidéos anti-vaccin. Aujourd’hui c’est mieux, pourquoi ? Parce que, heureusement, les centres de culture scientifique comme celui que je représente, Universcience, les institutions scientifiques, commencent, par exemple sur les vaccins, à produire des contenus, mais on voit bien qu’il y a un retard à l’allumage. Là-dessus, de toute évidence, ça va mieux, mais ça ne va pas encore assez bien. C’est un débat que j’ai souvent, quand j’entends ou que je vois des universités qui disent « on va fermer notre compte Twitter pour faire mal à Elon Musk », d’abord ça ne fait pas mal à Elon Musk et je pense que c’est une décision catastrophique. Selon un vieil adage, « quand partent les dégoûtés restent les dégoûtants », donc, quand il y a un terrain, il faut l’occuper ou alors il faut couper le terrain.<br />
Et puis, le troisième vecteur de réaction, ce sont évidemment les individus, les récepteurs eux-mêmes, avec, en effet, l’importance de développer l’esprit critique, c’est en partie pour cela que je suis invité. Comme vous le savez, à Universcience, on a lancé un programme qui ??? [24 min 48] nationale, avec une cinquantaine d’opérateurs, centres et musées de science, bibliothèques qui sont des super acteurs de terrain sur l’éducation aux médias, on le dit trop peu, mais heureusement c’est souvent dans des territoires peu équipés culturellement qu’il y a des bibliothèques qui font un super travail, c’est arriver à développer l’esprit critique. L’esprit critique c’est quoi ? C’est la capacité à trier et qualifier l’information pour se construire son opinion de manière libre et éclairée. Mais l’esprit critique tout seul ne suffit pas. Il faut aussi le compléter par une culture scientifique. Pourquoi ? Parce que si vous êtes uniquement dans un esprit supercritique, ça peut donner, au bout du compte, ce qu’on voit et ce que Thomas connaît bien, qui est le complotiste, puisque, d’un certain point de vue, certaines formes de complotisme, c’est un hyper-criticisme. Donc, si on ne sait rien et qu’on critique tout, on peut se retrouver dans une forme de paranoïa. C’est pour cela qu’on défend à Universcience, Cité des sciences et de l’industrie, Palais de la découverte, l’idée qu’il faut développer l’esprit critique grâce à l’éducation aux médias, grâce à l’enseignement de la méthode scientifique, parce que la méthode scientifique expérimentale est aussi une manière parallèle à la méthode journalistique d’arriver à analyser les faits, construire une opinion de manière fondée, mais il faut aussi, derrière, développer la culture scientifique, parce que sinon, on doute de tout ! Après tout, moi qui ne suis pas ingénieur en bâtiment, qu’est-ce qui me permet de savoir que les tours du World Trade Center n’ont pas été dynamitées par le gouvernement américain ! Si je pars de rien, d’aucune compréhension sur ce qu’est un consensus scientifique, d’aucun fond scientifique et technologique, je peux douter tout. L’esprit critique n’est pas douter de tout, tout le temps, c’est savoir bien douter. En tout cas, je pense que c’est ce qu’il faut arriver à développer.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Vous allez publier les résultats du troisième baromètre dans quelques jours. Pouvez-vous nous dévoiler déjà quelques chiffres ? Qu’est-ce qu’il en ressort ? Comment s’en ressort-on, en France, quant à l’esprit critique ?<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Je ne vais pas redire ce qu’a j’ai déjà dit Laurent Cordonier, parce que plein de choses sont concordantes entre nos études. Quand même quelques faits massifs. C’est du déclaratif, évidemment, mais, quand on interroge les répondants sur leur manière de discriminer l’information, quelle est la bonne, moins bonne, etc., ils sont plutôt bons, mais il y a un élément sur lequel ils se plantent toujours, c’est sur l’importance de se méfier de ses propres intuitions. Dans une partie de notre questionnaire, on a une question où on demande : « Pour vous, qu’est-ce que c’est que l’esprit critique ? Comment qualifiez-vous la bonne information ? ». Donc, les réponses évidentes du type « regarder la source, l’émetteur, etc. », en général les gens répondent à quinze ??? [27 min], mais quand on leur dit : « Pour vous, est-ce que l’esprit critique c’est se méfier de ses propres intuitions ? », il n’y en a que 18 % qui répondent oui. Et là, on fait le lien avec la problématique des biais cognitifs, c’est-à-dire qu’il y a une très faible connaissance ou une mauvaise connaissance, justement dans le grand public, de la problématique des biais cognitifs. Il faut de toute évidence, là-dessus, notamment au niveau de l’éducation primaire, mais aussi de la formation professionnelle, mettre le paquet sur cette question parce qu’on voit bien que, là-dessus, il y a vraiment quelque chose qui n’est pas tout à fait clair.<br/><br />
Un autre élément intéressant, c’est que ça ne va pas si mal que ça chez les jeunes. Je sais que d’autres études ont pu sortir des résultats catastrophistes, il y a un an, pour dire « les jeunes sont complotistes, croient que la terre est plate, etc. », étude qui pose plein de problèmes méthodologiques, je n’entrerai pas dans ce genre de débat. En revanche, nous, quand on interroge plus spécifiquement les 18- 24 ans on voit, par exemple, qu’ils sont beaucoup plus intéressés et beaucoup plus actifs par rapport à la pratique scientifique et à la formation scientifique que leurs aînés, en revanche, c’est un point d’attention, mais je n’apprendrai rien, la hiérarchie des sources d’information et la confiance qu’ils portent aux sources d’information est radicalement différente. C’est-à-dire que sur l’ensemble du panel quand on demande : « Comment vous renseignez-vous ? », ce qui ressort c’est Internet en numéro un, la télévision à peu près au même niveau, 60/70 %, et les réseaux sociaux ne comptent que pour 30 %, alors que quand vous regardez sur les 18/24 ans, on est sur l’entourage qui compte pour 70 % – on y pense rarement, mais l’entourage est la première source d’information – avec, derrière, Internet à 67 %, les réseaux sociaux à 54 % et la télévision s’effondre à un peu plus de 30 %. Et quand vous demandez « à qui faites-vous confiance ? », sur l’ensemble du panel, on a radio, Internet, télévision qui tiennent le haut du panier. En revanche, chez les jeunes, c’est Internet, l’entourage, les réseaux sociaux et la télévision s’effondre.<br />
Les jeunes d’aujourd’hui étant les vieux de demain, par construction, on voit qu’il faut évidemment revoir beaucoup de choses sur la manière dont on conçoit les stratégies d’information et je reviens à ce que je disais, mettre le paquet sur les réseaux sociaux et sur Internet, à la fois pour les réguler, mais aussi pour y être présent quand on est la puissance publique.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Je voulais juste faire réagir Camille. Vous parlez aussi de la problématique des algorithmes de recommandation, ce n’est pas l’entourage, mais c’est une forme de nouvel entourage, finalement ?<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>D’entourage technique. Juste pour réagir à ce que disait Romain, il y a cette question de où est-ce qu’on met la responsabilité ? Est-ce qu’on met la responsabilité sur les individus qui reçoivent de l’information ?, il y a notamment tous les programmes de l’éducation aux médias, ou est-ce qu’on met la responsabilité sur les plateformes, les réseaux sociaux, qui distribuent l’information en se nourrissant de nos données personnelles, puisqu’ils vont voir que, selon nos intérêts, un certain type de contenu va être poussé ou non ?<br/><br />
Au début, Romain parlait aussi du l’évolution du narratif. On est passé d’un narratif, il y a cinq ans, qui était très sur le contenu lui-même – comment on enlève-t-on les <em<fake news</em>, comment laboure-t-on la mer – à une approche beaucoup plus structurelle aujourd’hui. Nous, nous avons posé cela il y a cinq ans : quels doivent être les principes qui régissent ce bien commun qu’est l’espace de l’information et de la communication, avec des principes de transparence, de promotion de la fiabilité de l’information, de responsabilité ou de redevabilité des acteurs, etc. ? Quand on regarde cet aspect structurel ou systémique, on se rend compte, en effet, que la propagande, la désinformation, la rumeur, les contenus haineux dans la rue, ça a toujours existé, mais aujourd’hui tout cela est un peu au centre du village et la question c’est plutôt comment on remet les producteurs d’informations qui respectent les normes éthiques et professionnelles du journalisme au centre.<br/><br />
À Reporters sans frontières, on a développé la Journalism Trust Initiative, désolé pour les anglicismes, une idée empruntée à de nombreux secteurs économiques et industriels, l’idée d’un standard qui n’est pas sur le contenu. L’idée ce n’est pas de faire la distinction entre le vrai le faux, mais qui est plutôt sur les processus de production de l’information. Produire une information, ici nous sommes dans un magnifique studio, ça coûte quand même de l’argent, ça coûte de l’investissement, Thomas le sait bien. Par contre, quand vous êtes tout seul dans votre garage avec un ordinateur, IA ou non, pour propager n’importe quel type de contenu sans enquête, sans vérification des faits, ça coûte quand même beaucoup moins d’argent.<br />
La question c’est donc comment redonner un avantage comparatif à ces sources, à ces producteurs d’informations fiables ; là, il y a donc l’idée du standard.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Qu’il faudrait pouvoir partager avec les plateformes numériques ?<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Exactement. Et surtout, ce qu’on demande et, malheureusement, j’ai l’impression qu’elles sont un peu réticentes – quand on touche à leur business modèle c’est toujours un peu plus compliqué – c’est justement que dans leurs algorithmes de curation, elles intègrent les données qui sont issues de ce standard pour donner un avantage comparatif à ces sources réputées fiables, à travers un standard qui est audité.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Est-ce que le politique a à se mêler de ça ou pas ?<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Il y a une distinction, aujourd’hui, entre l’intérêt public et l’intérêt du public. L’intérêt public c’est l’intérêt général et, là, il est tout à fait légitime de poser des cadres de régulation. Ce qui intéresse les plateformes c’est l’intérêt du public, c’est notre intérêt avec nos instincts.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Et, pour elles, c’est leur intérêt économique.<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Je pense que poser des obligations aux plateformes de promotion de la fiabilité de l’information, c’est, en ce moment, pas mal repris notamment, désolé encore pour les anglicismes, European Media Freedom Act, où, justement ??? [32 min 55] devrait, à priori, être inclus, donc poser un cadre, encore une fois, pas sur le contenu mais sur la structure de l’espace informationnel, de la façon dont on produit, partage, dont on a accès à l’information, c’est l’histoire des démocraties. Il y a toujours eu des cadres – la loi de 86, par exemple, en France – qui régissent ça, les démocraties sont bâties sur ces cadres démocratiques. On pouvait être d’accord ou pas d’accord, mais l’avantage est qu’elles étaient transparentes et, si on n’était pas d’accord, on pouvait voter, les lois sont transparentes.<br />
Aujourd’hui, les lois qui régissent notre espace informationnel sont les lois qui sont définies à la Silicon Valley par quelques entreprises privées qui n’ont, en effet, comme disait Thomas, d’intérêt que leur valorisation capitalistique.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Laurent. <br />
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==33’ 49==<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>En effet, je pense qu’il ne faut pas chercher à opposer l’intervention sur l’environnement informationnel, la régulation de ce milieu-là, et puis les interventions qui visent à renforcer la résilience de la population. Je pense que ce sont deux pistes qu’il faut suivre en même temps.<br/><br />
Pour ce qui est de question de la résilience des populations, donc la formation à l’esprit critique, un terme très délicat, en effet, parce qu’il a été beaucoup dévoyé, on peut imaginer que c’est la tabula rasa cartésienne, en réalité il faudrait douter de tout, etc., mais, en réalité, c’est une autre définition du complotisme, si l’on veut. Une définition correcte de l’esprit critique, c’est vraiment considérer et réaliser qu’on est tous dans un état de dépendance épistémique « je dépends du témoignage d’autrui pour savoir quoi que ce soit sur le monde », s’il n’y a un journaliste en Ukraine pour me dire qu’il y a une guerre, je n’en sais rien, etc. Une fois qu’on a réalisé que ce que l’on sait, on ne le sait quasiment jamais par nos propres sens et par nos propres expériences, on réalise qu’on a besoin de faire confiance pour savoir quoi que ce soit sur le monde, donc on réalise aussi, par rebond, l’importance d’attribuer sa confiance sur des bases rationnelles.<br/><br />
Des indices comme le ??? [34 min 50], une note non pas de fiabilité de l’information mais de respect de certains critères de création de l’information, de certaines normes, etc., ça peut être un indice tout à fait fiable pour l’individu mais aussi comme levier, par exemple pour les réseaux sociaux s’ils veulent jouer le jeu et ils le voudront quand on décidera de l’exiger de leur part et, pour cela, le <em>Digital Services Act</em> ouvre des fenêtres d’opportunité. Ce règlement, au niveau européen, permet d’avoir des exigences de résultat à l’égard des plateformes pour peu, et le pour peu est vraiment central, que le régulateur national, français pour ce qui nous concerne, décide de jouer le jeu et de mettre en avant ce levier. En France, c’est l’Arcom. L’Arcom a été timide sur un certain nombre d’applications jusqu’à présent en ce qui concerne l’audiovisuel – je ne dis pas que c’est bien ou mal, je le constate –, je peux espérer, par contre, que l’Arcom sera plus assidue à faire respecter le <em>Digital Services Act</em> au sein des frontières françaises. C’est une volonté qui relève, pour le coup clairement vraiment du politique : veut-on utiliser ce levier, qui nous est offert par l’Union européenne, pour réguler l’information sur les réseaux sociaux ? Je pense que c’est l’occasion à ne pas rater, en quelque sorte. C’est vraiment une occasion qui peut avoir des effets importants, parce qu’on peut tout à fait imaginer que l’Arcom puisse, par le biais du <em>Digital Services Act</em>, presser les plateformes pour mettre davantage en avant des contenus informationnels de qualité, quel que soit le sujet, plutôt que de chercher à censurer, à modérer ou à faire disparaître certains posts. Je crois qu’il est plus efficace de mettre en avant des contenus de qualité. C’est un peu ce que Google a fait, comme il a été rappelé, sous la pression.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Parce que, en fait, il y a deux pièges. Il y a le piège de la censure, apparaître comme un censeur, et puis il y a aussi le piège d’apparaître comme celui qui veut remettre la main sur l’information.<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>Oui. Ce n’est pas seulement apparaître. En fait, ce qui nous concerne ici c’est la défense de la démocratie : une information de qualité, une information libre, faite selon certains standards, etc., c’est consubstantiel à la démocratie ; une démocratie n’existe pas son cette information-là.<br/><br />
Il y a un piège dans lequel il ne faut pas tomber, c’est abîmer cette démocratie en voulant la défendre avec des mesures qui seraient, pour le coup, liberticides. C’est pour cela que je crois plus à la piste de renforcer la résilience des populations, mais à réguler aussi les réseaux sociaux pour qu’ils redeviennent, en quelque sorte, des environnements dans lesquels toutes les voix comptent de la même manière, aujourd’hui ce n’est pas le cas. Aujourd’hui, des campagnes de désinformation sont organisées et jouent sur les mécanismes de personnalisation des contenus des réseaux sociaux, etc., donc, la concurrence est biaisée en faveur de la désinformation. C’est rétablir une situation dans laquelle l’information de qualité, produite selon certains standards, puisse réapparaître avant les autres types d’information.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>On arrive déjà, pratiquement, à la fin de notre débat, mais, Thomas, je voulais qu’on revienne sur l’expérimentation que vous avez menée, avant les élections européennes de 2019, avec des étudiants de Sciences Po, pour voir comment, justement, comment se fabriquait l’opinion.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>On était juste après la crise des Gilets jaunes et effectivement, pendant la crise des Gilets jaunes je crois nous sommes nombreux, en nous informant sur les réseaux sociaux, à avoir vécu dans des mondes parallèles. Moi, par exemple, je ne voyais, sur mes réseaux sociaux, que des Gilets jaunes complotistes, d’extrême droite, qui faisaient des choses horribles, qui disaient des trucs horribles, et j’ai plein de gens, dans mon cercle proche, qui avaient plutôt une autre vision des Gilets jaunes : de nouvelles formes de mobilisation, de l’investissement politique de gens qui étaient abstentionnistes traditionnellement, qui ne s’intéressaient pas à la chose publique. Ces deux réalités existaient, il y avait des complotistes chez les Gilets jaunes et il y avait aussi des gens qui ont tenté de nouvelles formes de mobilisation militante.<br/><br />
Après avoir interrogé, pendant des années, le problème du contenu, c’est-à-dire de la circulation de la désinformation, j’ai essayé d’interroger, je me suis posé la question : est-ce que le problème, finalement, ce n’est pas Facebook ? Je dis « Facebook » comme on pourrait dire « frigidaire » à la place de « réfrigérateur ». Facebook c’est le plus gros, ce sont trois milliards d’utilisateurs sur la planète, ce sont plusieurs réseaux sociaux différents, donc, quand je dis Facebook dans cette explication, je veux dire « les réseaux sociaux en général ». Nous avons travaillé sur le réseau Facebook parce que c’était le plus utilisé à l’époque.<br/><br />
Qu’a-t-on fait ? On a créé six profils, sur les réseaux, qui étaient occupés par des étudiants qui essayaient de documenter non pas ce que les communautés militantes fabriquaient comme contenu en ligne, mais de regarder ce que la plateforme Facebook leur montrait comme information. On avait un profil Insoumis, un profil Macron, un profil Rassemblement national, un profil républicain, un profil Gilet jaune et un profil gauche avec, à l’époque, ce conflit entre Benoît Hamon et Raphaël Glucksmann. Sur les trois mois durant lesquels ces profils ont observé ce que Facebook leur montrait de la réalité, on a constaté qu’on n’a pas un seul contenu commun aux six univers que nous avons créés. C’est-à-dire qu’on a des jeunes, étudiants, qui vivent dans la même ville, qui s’intéressent à la chose publique, qui ont, grosso modo, 70 % de leur profil qui est commun et 30 % qui est différent parce qu’il a une orientation politique – ce ne sont pas des militants, ils ne publiaient rien, ils regardaient ce qui se passait –, on n’a pas un seul contenu qui est commun. Pire ! À un moment de crispation de l’actualité, à un moment où il se passe quelque chose que non seulement les réseaux sociaux nous montrent, mais que tous les médias français et de la planète observent, l’incendie de Notre-Dame de Paris. On a l’incendie de Notre-Dame de Paris et là, immédiatement, j’écris aux étudiants et je leur dis « regardez ce qui va se passer sur vos réseaux, ça va être quelque chose de très intéressant ». Eh bien là, on n’a pas seulement six univers différents, on a six univers contradictoires : chez les Insoumis, cette histoire de Notre-Dame était horrible parce que les riches, qui ne veulent pas payer d’impôts, voulaient tous rembourser les travaux de Notre-Dame ; chez le Rassemblement national, c’était un coup de terroristes musulmans ; chez Macron c’était un coup des Gilets jaunes ; chez les Gilets jaunes, c’était un coup de Macron ; chez les Républicains, on pleurait le drame des Chrétiens qui avaient perdu ce symbole et, dans cet univers, Glucksmann et Hamon ne se sont même pas rendu compte que Notre-Dame avait brûlé, ils ont continué à s’engueuler !<br/><br />
On était vraiment dans un truc qui était très problématique pour nos démocraties, non pas sur la qualité de l’information, non pas sur la qualité des contenus, mais sur le fait qu’une démocratie c’est aussi partager un certain nombre de choses. Si nous pouvons vivre avec des vérités différentes, avec des idéologies différentes, avec des choses qu’on pense qui sont totalement différentes, des croyances différentes, c’est parce que nous partageons un point de départ. Ce point de départ ce sont les faits, comme si sur cette table, qui est entre nous, nous posions ce sur quoi nous pouvons nous mettre d’accord. Quelque part, ce nouvel univers de l’information dans lequel nous sommes tous mis – même ceux qui ne sont pas inscrits sur les réseaux sociaux sont victimes de cette segmentation de l’opinion à laquelle on assiste –, eh bien quand on ne partage plus rien, on ne peut plus faire société.<br/><br />
Et en réalité, le vrai problème auquel nous sommes confrontés aujourd’hui mais aussi pour les années à venir, c’est cela : comment on refait du commun ? Comment on refait quelque chose qui nous permet peut-être de nous engueuler, mais, au moins, de partager un point de départ et, potentiellement, d’arriver à continuer à discuter. Quand on ne partage plus rien, on ne peut pas discuter, on ne peut pas débattre et, à la fin, on peut pas vivre ensemble. La nature humaine a tendance à remplacer ses positions de débat, de discussions, de dialogues, par une logique de l’affrontement et quand on rentre dans une logique de l’affrontement, ça devient absolument destructeur pour la société. Je crois que la campagne américaine de cette année 2024 va nous montrer un exemple de cela : on a deux camps qui sont ultra polarisés, qui ne partagent presque plus rien de leur point de départ qui permet de construire leurs opinions et leurs orientations, comment cela va-t-il se passer ? Comment cela va-t-il se passer non pas dans la plus grande démocratie du monde, mais, peut-être, la plus importante – ce sont les Indiens la plus grande démocratie du monde, même plus grande que l’Indonésie dont tu parlais tout à l’heure Camille.<br/><br />
Je crois que le vrai problème auquel nous sommes confrontés c’est ça. Ces réseaux devaient, quelque part, nous permettre de nous rassembler et de créer de la discussion. En réalité, ils ont fractionné la société et ils sont en train de détruire la démocratie. C’est cela le vrai problème qu’ils nous posent. Ce n’est pas qu’ils laissent circuler des mensonges, il y en a toujours eu, ce n’est pas qu’il laisse les gens dire n’importe quoi, tout le monde a toujours dit un peu n’importe quoi, ça se passait plutôt au café du commerce et comme on avait tous un coup dans le nez, à la fin, le lendemain matin, on ne s’en souvenait pas toujours. Là ça reste, le truc reste en place et il est poussé par des algorithmes qui cherchent, en plus, à capter notre attention. Il y a donc un autre jeu trouble derrière tout ça : pour arriver à nous maintenir connectés à ces plateformes, on nous montre plutôt des choses choquantes, plutôt des choses clivantes, plutôt des choses qui font appel à nos émotions, à la colère, à l’indignation. C’est toute cette espèce de mécanique-là qui nous ramène, quelque part, à un stade de sous-citoyen.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Justement, en prenant conscience de cette mécanique, en la découvrant comme vos étudiants qui ont mis le doigt sur quelque chose de vraiment très concret, on progresse, on apprend à s’en servir, on peut sortir de ces mécaniques.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Ils n’étaient que six, malheureusement, nous sommes 70 millions !<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>On est un petit peu plus nombreux, peut-être, à nous écouter !<br/><br />
Romain, vous vouliez réagir et puis je voulais vous demander, parce que ça va être un peu un dernier tour de table, comment on se prépare, justement là, sur le registre de l’information dans le cadre de cette échéance électorale européenne. J’ai un peu posé la question, personne n’a répondu : est-ce qu’on doit nous aussi, Europe, jouer le jeu de la désinformation face à ces ingérences étrangères ?<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>En complément de tout ce qui a été dit, on a à peu près tout dit à nous quatre, je crois qu’il y a quand même une question qui reste fondamentale, c’est : comment occupe-t-on le terrain et comment va-t-on parler à tout le monde ? Quand je dis « on », ce sont les producteurs de contenu fiable, pour qu’il n’y ait, pas, comme on parle parfois des territoires perdus de la République, des territoires perdus du numérique.<br/><br />
Un des enseignements structurels, sur les premières éditions de notre baromètre de l’esprit critique à Universcience, on voit des polarisations, pas forcément en termes d’âge, mais quand on combine âge, sociodémographie, etc. Par exemple, quand on regarde le rapport à la science et à l’esprit critique, c’est-à-dire qui sont ceux qui pratiquent, qui semblent faire le plus preuve d’esprit critique, être prudents dans leur usage des médias et s’intéresser à l’actualité scientifique, c’est un profil qui est plutôt masculin et qui est plutôt dans les centres urbains. En revanche, plus on va dans les périphéries, plus on va sur des personnes qui sont plutôt de sexe féminin, de faible niveau d’éducation, de faible au niveau social et plus âgées, et plus on a un éloignement sur tous ces critères-là. On voit donc qu’il y a des vraies problématiques de rupture sociodémographique de territoire, qui rejoignent d’ailleurs des choses qu’on voit en politique plus globalement. La question aussi c’est comment est-ce qu’on arrive à occuper tous les territoires et aller parler à tout le monde. Et, là-dessus, j’ai dit ce qui ne marche pas, mais il y a aussi des initiatives formidables. Avez-vous déjà entendu parler, sur TikTok, d’un média qui s’appelle Curieux ?<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Moi oui !<br />
<br />
<b>Romain Pigenel : </b>Parce que tu connais tout, comme Thomas ! C’est aujourd’hui, peut-être, la plus grosse chaîne de média sur TikTok, c’est devant les médias français et, en fait, c’est un compte qui a été créé par un collectif d’animateurs de centres de science du Sud-ouest de la France, donc des structures du type d’Universcience, et qui ont tiré parti de tout ce qu’on a vu, qui on dit « il faut être présent sur TikTok ». Ils y sont allés tôt et c’est aujourd’hui une chaîne qui a, je ne vais pas vous dire de bêtise, des millions d’abonnés, qui cartonne. Pourquoi ? Parce qu’ils produisent des vidéos amusantes, mais sur des sujets de science sérieux, donc ça marche et ils jouent le jeu. Ce qui est intéressant c’est qu’avec des moyens, je pense, bien moindres que des gros médias français, ils ont beaucoup plus d’abonnés. On voit donc que ça peut fonctionner, mais il faut jouer le jeu et, encore une fois, si on n’occupe pas le terrain, d’autres l’occuperont. Il faut aussi être prêt à parler avec les codes qui sont efficaces sur ces plateformes.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Je fais tourner la parole. C’est la fin de cette émission. Sur ce sujet, Laurent.<br />
<br />
<b>Laurent Cordonier : </b>Peut-être juste pour répondre directement à votre question : non je ne pense pas que les démocraties libérales doivent riposter avec l’arme de la désinformation face aux attaques qu’elles subissent. Je ne pense pas que ce soit une piste à suivre parce que c’est un jeu dangereux. Les démocraties vivent sur la notion de confiance entre les institutions et les citoyens, confiance qui doit être réciproque, confiance qui est aujourd’hui abîmée, ce qui fait que nos démocraties sont abîmées. Mais, si nos démocraties se mettent à produire de la désinformation à l’égard de populations étrangères, comme ça peut être le cas à notre égard, je pense qu’on peut aussi abîmer ce lien de confiance. On n’utilise pas ces armes-là dans la guerre informationnelle, je ne pense pas que ce soit à nous de le faire.<br/><br />
Après, je parle dans la situation d’aujourd’hui. Évidemment que dans un contexte encore plus dégradé, dans un contexte de guerre, etc., on rentre dans un autre régime de fonctionnement et, là, l’information devient une arme j’ai envie de dire comme les autres, mais on n’en est pas là pour l’instant, espérons qu’on n’y soit pas avant longtemps. Dans ce contexte, je pense que ce serait une erreur de le faire, d’ailleurs ça serait aussi casser la possibilité d’exiger de la part des plateformes qu’elles respectent les exigences qu’on leur impose si, nous-mêmes, démocraties, nous mettons à diffuser de la désinformation et de l’ingérence à l’égard d’autres pays, elles vont simplement nous rétorquer « arrêtez déjà de le faire et ça améliora un peu le problème. »<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Camille.<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Très rapidement, la Commission va publier sous peu des recommandations justement pour cette période électorale. J’étais au lancement d’un rapport de l’OCDE sur la désinformation.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>On n’a pas eu le temps d’en parler, il y a eu un super ??? [47 min 56] de David Colon là-dessus.<br />
<br />
<b>Camille Grenier : </b>Avec David Colon et, notamment, Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe, était présent et disait justement pour revenir sur la prise de conscience des ingérences étrangères que leur stratégie c’est de les dénaturer en les rendant publiques. C’est une stratégie qui a son mérite, à voir si ce sera suffisant. La Commission européenne va donc publier certaines lignes directrices, on vient de contribuer.<br/><br />
Juste pour revenir, si on se recule un peu, je pense qu’il y a une chose qu’il va falloir adresser un moment, c’est l’ouverture des espaces démocratiques face à des espaces fermés dans des régimes autoritaires qui bénéficient, en quelque sorte, de l’ouverture des démocraties. De la même façon que certains États peuvent jouer avec le débat public, en France, en Europe et ailleurs, pour nous c’est beaucoup plus difficile, tout simplement parce qu’en Chine il y a pas Twitter, il n’y a pas Facebook. Donc, à un moment, il faudra peut-être trouver des accords internationaux, de la même façon qu’il y a des accords sur le libre-échange, peut-être des accords sur l’échange de l’information entre États. Merci beaucoup.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Thomas, juste un mot.<br />
<br />
<b>Thomas Huchon : </b>Je vais essayer de faire très court. Quand on parle d’occuper le terrain, je crois, effectivement, que l’un des vrais problèmes auxquels on est confronté aujourd’hui c’est la conséquence du fait que les pouvoirs publics, les grands partis politiques, les grands médias, les journalistes professionnels, n’ont pas voulu aller sur Internet et n’ont pas voulu utiliser cette techno. On n’a pas voulu l’utiliser, ça a été récupéré et, en fait, ce qu’ont gagné « nos adversaires », entre guillemets, c’est la bataille technologique, donc, derrière, la bataille éditoriale. J’ai décidé de faire un truc un peu différent là, en ce moment, c’est de créer un moi en <em>deepfake</em>, donc j’utilise l’intelligence artificielle pour fabriquer beaucoup plus rapidement des vidéos de contre-discours qui vont venir répondre, dans le temps de la diffusion du mensonge, aux théories du complot et aux <em>fake news</em> qui circulent. On essaye de faire de nouvelles choses, on essaye d’utiliser ces technologies. Ma réflexion vient vraiment du fait que j’ai l’impression qu’on a perdu cette bataille parce qu’on n’a pas voulu aller sur le terrain, donc, j’ai décidé d’aller occuper ce terrain, j’espère que nous serons nombreux à le faire. Je précise juste un truc : si c’est bien un faux Thomas Huchon qui vous parle dans ce compte Twitter anti-<em>fake news</em> IA, les mots de cet avatar sont tous humains et sont le fruit d’enquêtes réalisées par des humains. Je crois que c’est aussi cela qui fait la vraie différence, c’est de conserver l’esprit critique, mais d’être capable d’utiliser ces nouvelles technologies et d’essayer de retourner l’arme contre celui qui l’utilise contre nous.<br />
<br />
<b>Dephine Sabattier : </b>Merci Thomas Huchon, Romain Pigenel, Laurent Cordonier, Camille Grenier.<br/><br />
Merci aussi à la réalisation, c’était aujourd’hui Stéphane ??? [50 min 37].<br/><br />
POL/N sera de retour dans une semaine pour de nouveaux débats politiques et numériques et, pour ne rien rater, surtout mettez POL/N dans vos favoris.<br/><br />
À très vite.</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Technicien_informatique_avec_client%C3%A8le_de_retrait%C3%A9sTechnicien informatique avec clientèle de retraités2024-03-23T15:46:13Z<p>Vsanguinetti : /* 37’18 */</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Technicien informatique avec clientèle de retraités<br />
<br />
'''Intervenant :''' Jean-Baptiste Forêt<br />
<br />
'''Lieu :''' École nationale supérieure d’électrotechnique, d’électronique, d’informatique, d’hydraulique et des télécommunications - Toulouse - Capitole du libre 2023<br />
<br />
'''Date :''' 18 novembre 2023<br />
<br />
'''Durée :''' 53 min 21<br />
<br />
'''[https://www.youtube.com/watch?v=Yx_8PAoZ3uU&list=PLU8kgF3be3rQByaL3UBArjy0E0SO7EZvK&index=18 Vidéo]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' À prévoir<br />
<br />
'''NB :''' <em>Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
==Transcription (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
Bonjour. Je m’appelle Jean-Baptiste Forêt. Je suis technicien informatique installé à mon compte. Ma clientèle, comme l’indique l’intitulé de ma conférence, est majoritairement une clientèle de retraités. Je suis orienté logiciels libres, autodidacte, donc à mon compte. J’habite et je travaille à la campagne et je suis handicapé de naissance. Ce sont donc tous les paramètres de ma vie. Je vais vous parler un peu de tout cela si ça vous intéresse, si vous voulez faire un peu la même chose, le même travail.<br/><br />
J’ai illustré la première diapo avec un pingouin, parce que là où j’habite, on a un des plus gros carnavals de France et, une année, ils avaient fait un pingouin comme char fleuri<br />
<br />
Quelques caractéristiques du lieu où je suis installé. Je suis dans le centre de la France, dans le département de l’Allier, tout au milieu, trois villes principales : Moulin, la préfecture, qui est la troisième en population, suivie par Vichy et Montluçon, la première. Dans l’Allier, il y a, au total, 335 628 habitants, vous voyez que c’est très rural, on n’a pas de grandes villes et la plus grande ville la plus proche c’est Clermont-Ferrand à 100 km. J’habite à Ygrande, environ 800 habitants, située à mi-chemin entre Moulins et Montluçon, nous sommes quand même assez à l’écart des villes et c’est très rural.<br/><br />
Comme c’est un département rural, la part des plus de 65 ans est, bien sûr, beaucoup plus élevée que la moyenne nationale, donc, quand on a moins de 40 ans, on est un dans la minorité.<br />
<br />
Je commence au début, chronologiquement.<br/><br />
Je vous ai dit que je suis handicapé, ça ne se voit pas. Je suis né avec une malformation du cœur : cela n’est pas un cœur normal, c’est un cœur comme le mien. Avec la flèche je vais vous montrer, je vais emmener la flèche : là c’est l’aorte, juste en dessous c’est l’artère pulmonaire, normalement elles sont inversées, l’aorte est sur le ventricule gauche et l’artère pulmonaire est sur le ventricule droit, là les deux sont inversées, c’est ce qu’on appelle une transposition des gros vaisseaux. Il y a un trou entre les deux ventricules, ici, c’est ce qu’on appelle une communication interventriculaire, et il y a un rétrécissement de l’artère pulmonaire, ici, ce qu’on appelle une sténose. Moi j’ai tout ça, j’ai eu de la chirurgie. On a permuté les deux artères principales. On coupe, on permute et on recoud, ça marche bien. Pour le trou entre les deux ventricules, on met une rustine, ça marche bien aussi, il faut un chirurgien bon en couture, et, pour la sténose, on met un tube qui contourne, une sorte de pontage, mais là c’est sur une grosse artère.<br/><br />
C’est ce que j’ai, ça ne voit pas, c’est un handicap pour le travail, donc, dans le domaine professionnel, ça gêne : je ne peux pas porter de trucs lourds, je ne peux pas courir, faire des sports intensifs, par contre j’ai une bonne endurance au niveau de la marche et du vélo sur le plat. Au niveau du temps de travail, je ne peux pas faire un plein temps, je suis fatigable davantage que la moyenne, j’ai donc le statut de travailleur handicapé par la MDPH [Maison départementale des personnes handicapées]. Donc, pour moi, le travail de technicien informatique est un peu facultatif parce que je ne suis pas obligé de travailler, mon handicap me donne droit à des allocations et je pourrais en vivre correctement, sans être trop gourmand, sans acheter du Apple !<br />
<br />
J’ai dit que je suis autodidacte. J’ai commencé à l’adolescence, dans ma chambre, à m’intéresser à l’informatique, à monter des ordinateurs par moi-même. À l’époque, je ne connaissais pas Linux, les logiciels libres commençaient à exister, je ne crois pas qu’il y avait d’interface graphique sur Linux et, dans ma famille, personne ne faisait d’informatique. J’ai donc appris avec Windows, ce qui était le plus répandu. À l’époque, le premier ordinateur qu’on a eu était avec Windows 3.11 et, après, le premier que j’ai monté c’était avec Windows 95. À l’époque, on récupérait des CD copiés avec Windows et on l’installait. Pour les logiciels c’était pareil, on récupérait une version piratée d’un Microsoft Office, on l’installait. C’est comme ça que j’ai commencé.<br/><br />
Après, j’ai fait d’autres choses, bien sûr. Comme c’est une passion, on ne veut pas en faire son métier, j’ai donc essayé d’autres choses. À cause de mes problèmes de santé, je n’ai pas pu faire d’études, j’ai fait un CAP de coutellerie et, après, j’ai fait un bac pro Maintenance informatique dans un centre de formation pour les gens qui sont reconnus travailleur handicapé, mais je n’ai pas appris grand-chose parce que je savais déjà beaucoup de choses que j’avais apprises avant, tout seul. J’ai trouvé que toutes ces formations pour adultes c’était un peu de la garderie, c’était plutôt ennuyeux par rapport au temps, beaucoup de temps passé dans le centre, dans les salles de cours pour pas grand-chose à la fin. Ça me permet d’avoir un diplôme qui ne me sert à rien en tant qu’auto-entrepreneur. Dans ce que je fais, on ne me le demande jamais, bien sûr. Je vous ai mis ma carte de visite, j’en ai aussi là si vous en voulez.<br/><br />
Sur ma carte de visite, j’explique un peu ce que sont les logiciels libres parce que les gens ne connaissent pas.<br />
<br />
J’ai illustré mes diapos avec des photos que j’ai faites de certains de mes clients devant leur poste de travail.<br/><br />
En haut, c’est une dame d’environ 80 ans, qui habite en zone blanche, donc, elle ne peut pas avoir de connexion internet et le téléphone portable passe très mal. Elle est seule, elle n’y connaît rien en informatique, du coup elle vient chez moi régulièrement et elle fait tout. Je lui donne un cours d’informatique, je lui explique comment fonctionne sa machine et, en même temps, je fais le secrétaire, c’est-à-dire qu’on fait toutes les tâches administratives ensemble. J’y reviendrai plus tard, mais on sert aussi à accompagner les gens dans leurs démarches administratives.<br/><br />
Le technicien qu’elle a eu avant moi lui a fait acheter un MacBook Pro à 2 500 euros, comme elle a de l’argent, elle n’a pas tiqué. Je pourrais vous parler des défauts de conception qui ne sont pas pris en charge par Apple : la touche espace ne fonctionne plus, c’est une honte pour un ordinateur de ce prix-là. Elle a donc ça, on fait avec, je ne peux pas lui faire changer d’ordinateur.<br/><br />
J’ai souvent des clients qui ont déjà du matériel et c’est souvent du Windows ou du Apple, donc je ne peux pas arriver et leur dire « je suis technicien informatique orienté logiciel libre. Je ne veux pas de votre matériel, vous allez en acheter un autre, vous allez en changer », ce n’est pas possible il faut faire avec ce qu’il y a déjà.<br />
<br />
En dessous c’est un autre client qui m’a demandé de lui monter à un ordinateur complet, un ordinateur de bureau. Il aime beaucoup la musique. Il est militant, il a vu Linux sur ma carte et il a dit « c’est ce que je veux ». Je lui ai monté une machine et je lui ai installé Ubuntu. Il fait des choses, il a beaucoup de musique sur son ordinateur, je ne peux pas vous dire comment.<br />
<br />
J’ai donc un travail de technicien. J’assemble des composants pour monter des ordinateurs, j’installe un système d’exploitation et je conseille toujours Linux. Parfois, tant pis, s’ils ne veulent pas je mets Windows, ça me fait mal au cœur, mais bon ! Je fais aussi de la réparation de tablettes, un peu ce que vont vous demander les gens, c’est très diversifié, vous devez vous diversifier. À chaque fois, il faut chercher comment il faut faire pour réparer parce que, chaque fois, ce sont des pannes très spécifiques. Il y a beaucoup de recherches à faire chez soi. Il faut réinitialiser les appareils – tablettes, téléphones –, parce qu’ils sont devenus trop lents. Je conseille du matériel, je conseille Linux comme système d’exploitation, je conseille le Fairphone 3 comme téléphone parce que je trouve le 4, le 5, très chers, gros et lourds. Je suis resté au Fairphone 3<br />
<br />
Le technicien informatique, qui s’appelle technicien informatique, c’est un nom un peu trompeur, parce que la moitié de mon travail, au moins, c’est faire de la pédagogie, ce n’est pas de la technique, ce n’est pas de la réparation, c’est expliquer aux gens comment fonctionne leur machine, j’ai donc beaucoup à faire, beaucoup de travail.<br />
<br />
Souvent les gens m’appellent, ils ont déjà un ordinateur qui a environ cinq ans, avec Windows, bien sûr, qui rame et ça les embête. Il y a 50 fenêtres qui s’ouvrent, de la publicité, ils disent qu’ils ont des virus. Souvent, ils me disent « je voudrais en acheter un autre, je voudrais le changer », ils sont prêts à le mettre à la poubelle et à payer pour en acheter un autre.<br/><br />
Après, évidemment, vous avez deux démarches : soit vous pensez à gagner de l’argent et vous pouvez leur dire « oui mettez-le à la poubelle, je vous en vends un neuf » ; soit vous êtes militant et vous dites « je fais une sauvegarde de vos fichiers, je vous efface tout ce qui est dessus et je remplace Windows par Linux ». Souvent ils ne connaissent pas, il faut donc expliquer ce qu’est que Linux. On leur dit que c’est gratuit, « ah bon ! », on leur dit qu’il y a pas de virus, alors là, ce n’est pas possible ! Il n’y a pas de virus ! Je n’ai jamais eu de problème de virus sous Linux pour le moment.<br/><br />
Il y a des gens qui franchissent le pas, d’autres non.<br />
<br />
Sur cette photo, comme je suis en milieu rural, c’est chez un agriculteur. Vous voyez la place de l’ordinateur dans la ferme : il est posé sur un buffet, sur une commode ; ce sont des gens qui s’en fichent complètement, l’informatique ne les intéresse pas du tout, ils travaillent dehors toute la journée. Se mettre à l’informatique ne les intéresse pas du tout, pourtant ils doivent en faire beaucoup, parce que, pour leur élevage, ils ont beaucoup de démarches à faire en ligne auprès de la Chambre d’agriculture, par exemple. Ils ont mis l’ordinateur sur l’imprimante, l’imprimante sur la commode, il y a plein de papiers partout, c’est un bazar et c’est souvent comme ça quand j’arrive chez les gens, c’est le bazar, des fils partout, de la poussière.<br />
<br />
Quand je leur propose Linux, j’ai plusieurs types de réponses :<br/><br />
des gens me font entièrement confiance, je suis le sachant et eux sont ignorants, donc je peux faire n’importe quoi. Du coup, je fonce pour leur fourguer un Linux avec des logiciels libres ;<br/><br />
après, il y a ceux qui s’inquiètent tout de suite : « qu’est-ce que vous allez faire ? Dessus j’ai des trucs super importants, j’ai des photos de mes petits-enfants. – Je vais sauvegarder vos photos avant, ne vous inquiétez pas, après je les remettrai, je ne vais pas les perdre » ;<br/><br />
après, il y a des gens qui sont en retraite, qui ont travaillé toute leur vie sur ordinateur, au moins la majorité de leur carrière et ils sont habitués à Windows, donc on ne fera rien. Après un certain âge, la plasticité du cerveau diminue, donc c’est très compliqué d’apprendre du nouveau, de changer des habitudes. Il faut donc se résigner, je pourrais leur dire « non, ça m’intéresse pas je ne veux pas travailler pour Windows, pour Microsoft et tout ça, demandez à quelqu’un d’autre », mais je trouve que ce n’est pas une bonne une solution, ce n’est pas sain, donc, si c’est une machine neuve, j’installe, si c’est une réinstallation je remets Windows, tant pis ! Après, je mets des logiciels plutôt libres, Firefox, LibreOffice, j’essaye de leur faire comprendre qu’il n’y a pas besoin de Microsoft Office pour taper un texte ;<br/><br />
après, vous avez les gens qui ont un périphérique spécifique branché à l’ordinateur, qu’ils utilisent beaucoup, auxquels ils tiennent et qui coûtent presque aussi cher que l’ordinateur. Donc, là, c’est compliqué avec Linux parce qu’il n’y a pas de pilote, c’est souvent le cas. Les gens ont perdu le CD d’installation ou ils ont un compte chez le vendeur, le fabricant du périphérique, j’ai eu le cas dernièrement, ils ne savent plus quelle adresse mail ils ont mis, ils ne savent plus quel est le mot de passe. C’est beaucoup de travail de recherche au niveau des identifiants, des mots de passe, les comptes perdus, les trucs qui sont bloqués parce qu’on n’a pas l’identifiant ni le mot de passe et parfois, ce n’est pas possible, parce qu’ils augmentent le niveau de sécurité, c’est affolant, on se croirait dans une banque pour des conneries, pour ce à quoi ça sert aux gens ! ;<br/><br />
après il y a les militants, comme le monsieur qui télécharge beaucoup de musique ; ils savent très bien les intérêts financiers qu’on a à nous fourguer du Windows, du Apple ou d’autres machins comme ça, donc ils veulent faire le pas de côté et aller dans une autre direction. Donc, là, je n’ai pas eu de soucis, j’ai pu m’éclater, je lui ai fourgué un matériel avec Linux. On est bien d’accord, niveau idéologie, sur ce qu’implique Windows et ce qu’implique Linux.<br />
<br />
==16’ 14 (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
Je vous disais que je fais beaucoup de pédagogie. La pédagogie ça demande des qualités chez celui qui enseigne, qui la fait. Il faut rester calme. C’est vrai que si quelqu’un ne comprend pas ce que vous lui expliquez, ça peut énerver. Quand vous expliquez plusieurs fois, qu’il ne comprend toujours pas, ça peut énerver. Les gens sont comme ça et notre boulot c’est leur expliquer, même ceux qui sont techniciens. J’ai fait des stages pour techniciens dans des services informatiques de grosses entreprises, vous devez aussi faire beaucoup de pédagogie, expliquer à l’utilisateur, dans son bureau, comment fonctionne la machine. Vous devez être très pédagogue, passer du temps avec les gens et leur expliquer, répéter plusieurs fois la même chose. Moi, je répète plusieurs fois la même chose en tournant autour du sujet, en attaquant sous plusieurs angles différents ; vous parlez de la même chose, mais de plusieurs manières différentes, ce sont des répétitions en fait, mais ils finissent par comprendre, des fois, pas tout le temps, mais la majorité du temps ils arrivent à comprendre ou alors ils font semblant d’avoir compris, beaucoup de gens font semblant d’avoir compris, ils ont peur de passer pour quelqu’un qui ne comprend pas.<br />
<br />
Je fais aussi des liens avec des choses qui existent déjà et qu’ils connaissent déjà : s’ils sont orientés écologie, jardinage, je leur parle des graines des semenciers, des graines propriétaires, hybrides, qu’on ne peut pas reproduire et je leur dis « ça ce sont les logiciels propriétaires, c’est Windows, et les graines qu’on peut reproduire soi-même, qui sont reproductibles, c’est Linux », je fais des parallèles comme cela.<br />
<br />
Dans ma génération, à l’école on a appris d’une certaine façon. Je pense que l’abstraction est aujourd’hui beaucoup plus importante dans l’enseignement qu’elle ne l’était avant. J’ai mis deux problèmes, c’est peut-être un peu un peu exagéré, mais avant on raisonnait beaucoup avec des cas concrets, aujourd’hui on raisonne beaucoup avec de l’abstraction, on fait des généralités, du calcul littéral ; le calcul littéral stimule l’abstraction. Un jeune qui va à l’école sait faire des calculs avec des x et des y, mais il ne sait pas faire une opération avec des chiffres. Les deux méthodes ont des inconvénients et des avantages.<br />
<br />
Dans mon travail, j’utilise beaucoup le logiciel libre et je l’installe chez les gens. Je trouve qu’il y a quand même des défauts et c’est dommage : des mises à jour qui suppriment des composants, des éléments du logiciel dont on avait l’habitude.<br/><br />
Comme Linux, c’est Ubuntu que je préfère parce que c’est celui que je trouve le plus complet et il y a moins besoin de rajouts. Je l’ai chez moi et, chez les gens, il faut que ce soit la même version, en tout cas le même Linux, parce que quand ils vous téléphonent et vous disent « l’icône machin a disparu », on ne peut pas deviner le problème parce qu’ils ne le décrivent pas de la bonne façon, il faut arriver à deviner, donc, avoir le même système chez soi, ça aide quand même. Il faut donc essayer d’avoir la même configuration chez soi que chez les clients.<br/><br />
Les mises à jour. Sur Ubuntu, par exemple, une mise à jour supprimait l’affichage du jour dans la date, ce sont des trucs tout bêtes, mais pourquoi ont-ils fait ça ? Sur les forums, on vous dit de taper telle ligne de code et vous avez le jour qui apparaît. Oui, mais avant je l’avais sans faire ça. Ce sont des choses comme ça et c’est assez pénible !<br />
<br />
On a à faire de la pédagogie parce que les gens sont obligés de faire des démarches sur ordinateur et là-dessus, d’un point de vue politique, idéologique, je suis contre le fait qu’on oblige les gens, qu’il n’y ait qu’une seule manière de faire des démarches en passant uniquement par l’informatique. Je suis d’une famille d’électriciens, techniciens dans ce domaine, l’informatique, l’électricité, tout cela me plait, mais tout le monde n’est pas comme ça, il y a des gens que ça n’intéresse pas du tout, ils préfèrent d’autres domaines et il en faut pour tout le monde. Qu’on ferme des guichets et qu’on les remplace par des services en ligne, c’est dégueulasse parce que plein de gens ne savent pas comment faire et ça me gêne quand, parfois, je dois faire un travail de secrétaire auprès des gens, quand je fais le travail que faisait avant le guichetier dans un service public. Je pense que ce n’est pas le travail d’un technicien informatique, surtout qu’étant à mon compte, je fais payer les gens pour ça. En étant à son compte, on demande un tarif horaire et, du coup, on a une clientèle, on n’a que les gens qui ont quand même un peu de sous, on n’a pas beaucoup de pauvres. Dans les photos, les retraités sont souvent des gens qui ont quand même un peu de sous, qui ont les moyens de se payer un artisan, un technicien informatique, parce que vous tarifez à l’heure et ça fait quand même un peu de sous. Donc, quand il faut faire des démarches administratives et payer quelqu’un de privé, ce n’est pas normal, c’est un recul au niveau du service public.<br />
<br />
La manipulation : quand on vieillit on a les doigts beaucoup moins souples et c’est vrai que faire des fonctions où vous poussez le doigt vers le haut, ça fait telle manipulation sur l’ordinateur, vous poussez vers la droite, vous rapprochez les deux doigts, vous les écartez, tous ces trucs-là ont une signification pour l’ordinateur, ça fait une opération ou un changement au niveau de l’apparence. Quand, par accident, des gens frôlent le pavé tactile ou appuient sur une touche, ça leur modifie un peu l’apparence des fenêtres, ça les perd complètement, ils sont dans un trou. J’ai des coups de fil « je n’ai plus Internet chez moi, je n’ai plus Internet à la maison » et ils sont incapables d’expliquer ce qu’ils voient sur l’écran, donc je me déplace, je vais chez les gens et je vois que c’est l’icône du raccourci vers le navigateur qu’ils ont éjecté en faisant glisser, parce qu’ils ont touché le pavé tactile sans faire attention. On n’a pas tous une dextérité exceptionnelle.<br/><br />
Par défaut, les systèmes sont réglés avec ces options-là activées, ces options, c’est bien, mais elles devraient être en option, toujours, elles ne devraient pas être activées par défaut, parce que, après, si vous essayez de les désactiver, c’est un travail monstre.<br/><br />
Il ne faut pas grand-chose pour que les gens soient perdus, parfois les fenêtres se réduisent et se mettent en plus petites fenêtres et vous ne pouvez rien toucher, tout est désactivé. Ils sont perdus, ils sont bloqués.<br />
<br />
À gauche c’est ma mère. Je lui ai installé Ubuntu, ça ne va pas trop mal, les colis des achats en ligne arrivent bien à la maison. Elle n’y arrive pas pour beaucoup de choses, mais les achats en ligne, ça marche bien.<br/><br />
À côté, une autre cliente qui a un ordinateur tout en un, tout est dans l’écran, elle l’avait déjà quand elle a fait appel à moi. Souvent, les gens achètent un matériel. Acheter un matériel c’est facile, ils vont dans le premier Conforama ou Carrefour, le vendeur est très bon pour leur vendre un ordinateur, ils apportent ça chez eux et, après, comment on s’en sert ? Parfois ils arrivent à le faire marcher pendant les deux premières années, après ça commence à ramer, à ralentir.<br/><br />
Elle, elle aurait bien voulu Linux, ça allait bien niveau mentalité, elle est très ouverte, justement, à toutes les alternatives à ce système, à tout ce qui est capitaliste et tout ça, mais, je ne me souviens plus, c’était il y a deux ans, il y avait un problème de pilote pour je ne sais plus quel composant interne, du coup je ne lui ai pas installé Linux et elle a une imprimante, une Brother Laser qui n’est pas compatible Linux, donc, malheureusement, nous sommes restés sur Windows, c’est dommage, mais bon !<br />
<br />
Les gens âgés ont souvent des enfants, des petits-enfants, c’est ce qu’ils me disent en premier, qui sont dans l’informatique, mais ces enfants et ces petits-enfants ne peuvent pas leur expliquer, parce que, souvent, ceux qui savent des choses, dans tous les domaines, ne savent pas, pour beaucoup, les expliquer aux autres. Je trouve important, quand on sait quelque chose, quand on a une connaissance, de savoir l’expliquer aux autres. Vous avez des gens qui ont de la famille dans l’informatique et qui ne peuvent pas faire appel à ces gens-là, donc ils font appel à moi. Ou alors, des fois, ça va très vite, l’explication est donnée très vite, ils ne comprennent rien et ils n’ont pas droit à plus d’éclaircissements. Des fois, c’est l’éloignement, comme nous sommes à la campagne, les enfants et petits-enfants ne travaillent pas à la campagne, ils sont dans les grandes villes donc, il y a aussi une distance.<br />
<br />
[Applaudissements]<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Si vous avez des questions, il y a encore du temps.<br />
<br />
==Questions du public et réponses (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
<b>Public : </b>Bonjour. J’ai une question. En ce moment, il y a pas mal de solutions de prise de contrôle comme VNC, AnyDesk, voire TeamViewer. Est-ce que ce ne sont pas des solutions que vous pourriez utiliser pour, justement, prendre la main sur les ordinateurs et expliquer par téléphone, par exemple ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Ça peut parfois fonctionner. Souvent, j’ai des appels de gens chez qui je ne suis encore jamais allé. Il faut que le client soit déjà capable d’installer le client VNC par exemple, ce n’est pas à la portée de tout le monde. Après, pour des interventions, si ça évite un déplacement en voiture, c’est vrai que ça peut être rentable. Après, comment on le tarifie ? On demande aux gens de nous envoyer un chèque ? C’est un peu compliqué. Je suis aussi un peu réticent parce que le risque c’est que les gens se mettent à appeler pour tout et n’importe quoi et demandent une intervention.<br/><br />
Parfois, quand j’ai un appel, je ne réponds pas tout de suite, je laisse les gens laisser un message et je rappelle le lendemain par exemple. Dans la moitié des cas, ils ont réussi à résoudre le problème eux-mêmes. C’est embêtant financièrement, pour gagner sa vie : vous vous seriez déplacé, vous auriez fait la manip et vous auriez fait payer les gens, vous auriez eu un revenu. Mais, parfois, c’est tellement pour quelque chose de petit que, dans la prestation, la majorité de la somme que vous allez demander c’est pour vous dédommager du trajet. Parfois, il vaut mieux attendre. Les gens essayent de se débrouiller eux-mêmes pour trouver une solution et, si vous voyez qu’ils n’y arrivent pas, vous vous déplacez si vous voyez que ça vaut le coup de se déplacer.<br/><br />
Quand j’installe un ordinateur chez quelqu’un, il faut que j’installe un client pour la prise en main à distance, je ne le fais pas. J’aime bien aller voir les gens si c’est dans le village. Je préfère avoir mes clients dans mon village parce que je suis aussi écolo, j’y vais à vélo quand c’est dans le bourg, ça surprend les gens qu’un artisan vienne chez eux en vélo.<br/><br />
Dans la prise en main à distance, il y a du bien et du mauvais aussi.<br />
<br />
<b>Public : </b>J’avais une question. Je voulais savoir, vous avez expliqué un peu, le pourcentage des gens qui sont passés sous Linux, mais en même temps vous avez dit que ça dépendait s’ils étaient retraités ou pas, ce qui changeait plus ou moins.<br/><br />
Ma deuxième question serait pour ceux qui sont passés sous Linux avec LibreOffice : quand ils reçoivent des documents de l’administration ou d’ailleurs, souvent il peut y avoir des gros changements de mise en forme. Comment faites-vous dans ces cas-là ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Les gens n’ont pas tous Linux.<br/><br />
Au niveau de la compatibilité, au niveau des échanges de documents, la plupart n’en sont même pas là, beaucoup ne sont pas capables d’échanger des pièces jointes.<br/><br />
La majorité a vraiment un usage de base :<br/><br />
le navigateur leur sert à aller sur trois sites maximum : Leboncoin, la messagerie, Facebook ; certains ne veulent pas de Facebook ; <br/><br />
les mails, c’est le plus utilisé parce que je trouve que c’est le plus simple ;<br/><br />
des photos, quelques photos. Ceux qui ont des petits-enfants ont parfois beaucoup de photos des petits-enfants, c’est leur seul lien. Parfois ils les voient plus en photo qu’en vrai.<br/><br />
Échanger des fichiers de traitement des textes, c’est très peu utilisé.<br />
<br />
Je crois que la compatibilité entre Microsoft Office et LibreOffice s’est améliorée.<br/><br />
Quand je leur installe un ordinateur avec le système d’exploitation, même si c’est Windows avec Microsoft Office, j’essaie toujours de les ramener vers les formats libres pour la bureautique, quand ils enregistrent avec Word, qu’ils enregistrent en format libre.<br />
<br />
Parfois, il y a des problèmes de compatibilité, d’affichage ou de mise en page au niveau du texte. Ça fait partie du travail, les gens m’appellent aussi pour ça : « J’ai un problème au niveau de tel document que j’ouvre, pouvez-vous venir voir et faire ce que vous pouvez ». Ce sont vraiment des tâches simples qu’on a parfois à faire.<br/><br />
Ça parait simple quand on a grandi là-dedans, qu’on a fait une formation là-dedans, ce sont des trucs tout bêtes, par rapport au niveau des conférences qu’il y a ici ! Je n’ai pas appris la programmation, je n’ai pas fait d’études dans la programmation, je me suis arrêté au matériel et à l’installation du système d’exploitation, ce sont vraiment des opérations de base que je fais.<br/><br />
Souvent ceux qui sont compétents, qui en connaissent beaucoup en informatique, qui vont être les petits-enfants de mes clients, ils ne savent pas leur expliquer ces opérations techniques de base pour se servir d’un ordinateur. Ils ne prennent pas le temps, ils parlent vite et si ce n’est pas compris du premier coup, tant pis, tu es vieux et tant pis pour toi si tu ne comprends pas !<br/><br />
Pour l’autre question, je n’ai pas fait les comptes, c’est environ la moitié de mes clients, sinon, les autres, c’est du Windows. J’ai quand même beaucoup de Apple par rapport à ce que ça représente dans la population générale, parce que mes clients sont des gens qui ont quand même un peu d’argent et ils vont acheter du Apple. Chez ceux qui ne connaissent pas trop l’informatique, Apple c’est connoté qualité. Là où je suis, à la campagne, il y a beaucoup de gens écolos et Apple a une image de meilleure durabilité, de meilleure durée dans le temps, donc ils sont prêts à payer plus cher. Même ceux qui n’ont pas beaucoup d’argent, qui sont écolos, ils sont prêts à payer plus cher à l’achat pour une machine qui va leur durer plus longtemps et là ils ne voient que Apple.<br/><br />
Pour le téléphone il y a le Fairphone, pour les ordinateurs je ne sais pas, j’avais vu un ordinateur, un truc suisse. Par contre c’est toujours beaucoup plus cher que le reste et, là, je n’arrive pas à leur vendre. Leur faire payer pour un matériel plus cher que les autres, mais dont ils ne connaissent rien, dont ils n’ont jamais entendu parler, qu’il n’y a que moi qui leur présente, en général ça ne marche pas. Par contre, ils connaissent déjà Apple, qui est 20 % plus cher, par exemple, qui a déjà une réputation, là ils sont prêts à dépenser plus. Chez ma cliente qui a un MacBook Pro de 2016, qui lui a coûté 2500 euros, au bout de quelques années j’ai eu le problème de la touche espace, j’ai cherché sur Internet, c’est un défaut de conception, la touche espace se casse dessous, c’est le mécanisme, c’est presque irréparable, j’ai essayé mais c’est impossible. J’ai appelé Apple, Apple c’est bien, on tombe sur quelqu’un, sur un humain, au téléphone, qui m’a dit que la date de rappel était dépassée, la garantie plus la date de rappel est dépassée. Eh bien oui, c’est une dame qui ne se sert presque pas de son ordinateur, donc l’usure a mis plus longtemps que la moyenne à arriver et la panne est arrivée au moment où ce n’était plus du tout garanti. Même en leur disant que la machine coûtait 2500 euros, ils n’en ont rien à faire !<br />
<br />
==37’18 (relu sans audio Véro)==<br />
<b>Public : </b>Bonjour. Déjà merci pour cette présentation, c’est rare d’en avoir des comme cela au Capitole du Libre.<br/><br />
Ma question concernait l’accessibilité. Est-ce que, parfois, vous êtes confronté à l’installation de solutions du genre lecteur d’écran, des affichages avec contrastes ou ce genre de choses ? Parmi les différents OS, est-ce qu’il y en a un que vous préférez ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Non. Je n’ai pas eu de handicap visuel. Parfois, il y a des trucs que je ne connaissais même pas. Les gens vous sortent des trucs qu’ils ont vu et ils vous demandent de le faire aussi et je ne connais pas. Des gens m’ont demandé de changer la couleur des liens visités dans Firefox. La différence de couleur entre un lien non visité et un lien visité était difficilement perceptible, c’était bleu clair, bleu foncé, un truc comme ça. Bien sûr, quand on est jeune, on perçoit bien les différences de couleur, mais, en vieillissant, on ne voit plus trop la différence entre bleu clair et bleu foncé. Ils m’ont demandé de leur mettre un vert fluo, alors, quand j’ouvre leur Firefox je vois les liens en vert fluo, ça crache, ce sont des trucs comme ça, ou changer la taille d’affichage. Souvent, aussi, ils ne comprennent pas la signification des icônes, des pictogrammes, tellement c’est abstrait.<br/><br />
Dans l’explorateur de fichiers d’Ubuntu, le système que j’installe le plus, ils ont mis des icônes et c’est récent, avant ce n’était pas comme ça, il y a des icônes avec trois traits, ça peut tout vouloir dire, ça ne va pas ! Ce ne sont pas des problèmes de handicap, ce sont plus des problèmes dûs à l’âge, ne pas être de cette génération-là<br />
<br />
<b>Public : </b>Juste, peut-être, pour finir. Vous avez dit que parfois les gens vous prennent pratiquement comme secrétaire pour régler leurs problèmes administratifs via Internet, du coup je me demandais, puisqu’il a eu de la pub du gouvernement sur France services, qui est censé faire ça, est-ce qu’il n’y en a pas dans l’Allier, en tout cas pas près de chez vous, ou bien il y en a mais ça ne rend pas le service ? Est-ce que vous connaissez ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>J’ai vu que France services est mis en place, surtout dans les campagnes. Peut-être que dans les grandes villes vous trouvez facilement des services ouverts, mais dans les campagnes ! Je ne sais pas comment ça fonctionne, je ne m’y suis pas intéressé.<br/><br />
À un moment, la mairie de la commune où j’habite m’a commandé un ordinateur. J’ai monté un ordinateur de bureau pour mettre à disposition du public dans la mairie. Ils n’ont pas voulu de Linux, la secrétaire de mairie m’a sorti que pour les permis de conduire on lui demandait Internet Explorer. Ça m’a étonné parce que je n’ai jamais eu ce problème-là en utilisant Linux dans mes démarches administratives. Je leur ai vendu un ordinateur avec Windows. Après, il y a eu le Covid, ils ont enlevé l’ordinateur, ils l’ont mis dans la Maison de santé où ils faisaient les vaccinations et il n’est plus revenu.<br/><br />
J’ai senti le problème. Des gens qui n’ont pas d’ordinateur ne connaissent pas l’informatique, ils vont dans un endroit où il y a un ordinateur et il faut qu’il y ait quelqu’un à côté pour leur expliquer, c’est la secrétaire de mairie à qui on va demander comment on fait, qui va se transformer en secrétaire pour le citoyen qui veut faire une démarche en ligne. Peut-être que ça n’a pas trop marché là-dessus, après, je ne sais pas.<br/><br />
Les démarches administratives c’est le problème, il y a des comptes à créer, des identifiants. Je dis aux gens « prenez un carnet, notez tous vos identifiants, vos mots de passe ». Il y en a qui ne font pas d’informatique, mais ils ont trois/quatre adresses mail, ils ne s’en servent quasiment pas, ils n’ont pas les mots de passe, ils ne savent pas laquelle est la dernière utilisée. Quand on se connecte à un service, ils ne savent pas quelle adresse mail ils ont mis, il faut toutes les essayer. Après, bien sûr, c’est du temps que je passe et c’est du temps que je dois facturer parce que ce n’est pas de ma faute !<br />
<br />
<b>Public : </b>Petite question concernant justement les usages. Tout à l’heure, vous avez présenté un cas où il y a pas de réseau ADSL, très peu de réseau pour le mobile. En ce moment, il y a un plan de déploiement de la fibre. Dans l’Allier, est-ce que la fibre se déploie ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Par exemple, dans mon village, un village de 800 habitants. Il y a un village à neuf kilomètres de 3000 habitants, qui regroupe un peu des services, eux ont la fibre optique jusque dans les maisons. Là il y a un débit phénoménal. Chez mon père, à un autre endroit, on a installé la fibre, ça n’a pas changé son débit, des fois ça ne change pas le débit.<br/><br />
Dans le village où je suis, la fibre passe, elle s’arrête à une grosse armoire France Télécom, elle s’arrête là, donc ceux qui sont dans un périmètre de 200 mètres ont 80 mégaoctets de débit et, après, ça tombe. Vous avez une moitié des habitants dans le bourg et l’autre moitié dans la campagne environnante, à plusieurs kilomètres, et là ça tombe. À plusieurs kilomètres, dans des fermes, en bout de ligne, ça tombe à deux/trois mégas par seconde de débit et, des fois, il y en a qui n’ont rien du tout. La cliente qui vient chez moi habite à cinq kilomètres du bourg.<br/><br />
Dans les campagnes, ils essaient d’accroître les antennes téléphoniques et de diffuser de la 4G ou de la 5G. Je trouve que c’est dommage parce que je suis très critique sur les ondes, sur l’effet que peuvent avoir les ondes sur la santé. Donc on est bien couvert. En venant ici, je suis passé par les petites routes, je m’arrêtais dans n’importe quel patelin avec des montagnes autour, il y avait de la 4G. Ils sont arrivés à un niveau de couverture quand même assez élevé, après on verra les conséquences sur la santé. Ça permet d’avoir des connexions internet rapides. Au lieu de prendre une connexion filaire qui sera lente, des gens prennent une connexion 4G avec le boîtier et la carte Sim dedans. Moi je préfère le filaire, toujours, parce que je pense aux ondes, aux effets sur la santé, et je pense à la consommation énergétique qui est beaucoup plus importante quand vous émettez une onde dans l’air que quand ça suit un fil électrique, par exemple.<br />
<br />
<b>Public : </b>Ce n’est pas une question, c’est une suggestion, je vais dire, que j’utilise avec mes clients, parce que je fais exactement la même activité mais dans le 05, on ne rentrera donc jamais en concurrence. Par rapport aux mots de passe, je déconseille l’utilisation des carnets, je fais faire aux gens un tableau avec trois colonnes ; une colonne prestataire, c’est-à-dire le site, une colonne adresse mail et une colonne mot de passe. On ne peut pas faire ça plus clair. Un tableau sur une feuille A4, pas un quart de feuille.<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Un tableau ! Certains ne sont pas capables de faire un tableau dans un tableur, ils ne savent même pas ce qu’est un tableur.<br />
<br />
<b>Public : </b>Un tableau sur une feuille A4 qu’il ne faut pas mettre en évidence, évidemment !<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Carnet, feuille !<br />
<br />
<b>Public : </b>Un carnet c’est trop petit, ça ne marche pas.<br />
<br />
<b>Public : </b>Pour compléter, vous ne leur faites pas utiliser le gestionnaire de mots de passe de Firefox ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Des fois, le mot de passe n’est pas enregistré dans Firefox. Pour retrouver un mot de passe, ça peut servir, oui, mais des fois ils ont trois/quatre navigateurs sur l’ordinateur, ils ne savent pas lequel ils utilisent. Ils ne connaissent pas les noms des navigateurs. Ils appellent Internet Google : « j’ouvre Google, je lance Google ». Lancer Google, ça veut dire cliquez sur l’icône du navigateur. Ils n’appellent pas Firefox, Firefox, ils l’appellent Google. Ils confondent tout. Je leur dis « Google c’est un site internet sur lequel vous allez, et pour ça il vous faut un navigateur ». Ils n’ont pas toutes ces notions-là, il faut vraiment descendre bas et être très pédagogique.<br/><br />
Si vous avez d’autres questions, on peut continuer. Je suis dispo. Merci<br />
<br />
[Applaudissements]<br />
<br />
<b>Public : </b>Question que je me pose depuis le début en voyant votre photo : est-ce que les habitants de votre village ont fait ce char à fleurs après que vous avez démarré votre activité ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>C’était avant.<br />
<br />
<b>Public : </b>D’accord, c’était avant, ça aurait été très mignon !<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>Peut-être qu’en cherchant sur Internet la photo d’un pingouin ils sont tombés sur une photo du pingouin de Linux parce qu’il y a quand même une ressemblance, mais ils ne savaient pas que c’était Linux. C’est du travail à faire, ce ne sont que des fleurs en papier qu’il faut, après, attacher sur une structure métallique.<br/><br />
Après, je n’ai pas de boutique, ni d’atelier, je travaille de mon domicile, dans mon appartement et c’est un handicap parce que ne pas avoir une enseigne qui donne sur la rue, même une petite enseigne, c’est très utile pour se faire connaître. Souvent, les gens qui sont là depuis longtemps ne savent pas que je suis là.<br />
<br />
<b>Public : </b>Inaudible.<br />
<br />
<b>Public : </b>Est-ce que vous pouvez répéter la question ?<br />
<br />
<b>Jean-Baptiste Forêt : </b>La gestion des données personnelles des gens quand je fais une sauvegarde avant la réinstallation.<br/><br />
Souvent, il y a très peu de données, c’est vrai qu’il faut y penser. Le problème, si je me fais cambrioler, on me vole le disque dur où j’ai sauvegardé les données des gens, il y a tout ce qui est à moi, tout mon matériel. Oui, c’est un peu sommaire, après j’efface. Il n’y a pas grand-chose, il n’y a pas de choses compromettantes parce qu’ils ne sont pas habitués à mettre beaucoup de choses sur l’ordinateur. Ils ne vont même pas voir leur compte en banque sur l’ordinateur. Ils ne font presque rien sur Internet.<br/><br />
Parfois, quand je fais une sauvegarde, je regarde, ce ne sont que des fichiers en doublon, des raccourcis, il y a un tri à faire. Je ne fais pas le tri parce que ça prendrait des heures, je leur dis « j’ai mis tout ce que vous aviez comme fichiers avant dans un dossier que j’ai appelé « sauvegarde », vous en profiterez vous pourrez faire du rangement. – Oui, c’est bien, je vais pouvoir ranger », mais ne le font pas. Quand je reviens, s’ils me rappellent deux ans après, je retrouve le même dossier « sauvegarde » qui n’a pas bougé du fond d’écran, il est toujours là, ils n’ont rien fait.<br/><br />
Pour faire du rangement il faut connaître le copier-coller. Apprendre le copier-coller aux gens, c’est du travail, ce sont des cours et vous pouvez répéter, il y en a à qui on peut faire refaire trois, quatre, cinq, six fois, ça rentre pas ! Comme il y a trois façons : avec le clavier, avec le menu en haut et avec la souris, si un autre leur a expliqué d’une autre façon, ils vont tout mélanger « mais l’autre m’a expliqué comme ça avec la souris. – Oui mais moi j’explique comme ça ». Ils ne se souviennent que d’une partie de la façon dont l’autre leur a expliqué, ils mélangent tout. Expliquer aux gens le copier-coller, c’est un gros morceau du travail. Il y en a plein qui ont des ordinateurs mais qui ne savent pas faire ça.<br/><br />
Sauvegarder, je leur dis « il faut sauvegarder ». Même s’ils ont pas beaucoup de fichiers il faut sauvegarder les photos parce que, des fois, il n’y a qu’un exemplaire des photos des petits-enfants, quand ils le perdent, ils n’ont plus de souvenirs des petits-enfants à tel âge.<br />
<br />
Après, je déconseille de faire ce métier en sortant de l’école. Avec mes problèmes de santé, je n’ai pas pu beaucoup travailler dans les entreprises, j’ai fait des stages. Quand vous êtes salarié, vous ne vous occupez que de la technique, que du travail à faire. Quand vous êtes à votre compte, vous avez tout le côté administratif à gérer ; une micro-entreprise c’est quand même très léger, ce n’est pas compliqué. Je fais une déclaration tous les mois, je vais dire combien j’ai gagné, c’est tout, sur le site de l’Urssaf, c’est vraiment très léger. Après, c’est gérer les gens, leurs comportements, leurs différences de mentalité, leurs exigences, ce qu’ils n’aiment pas, c’est de la psychologie, en dehors en plus de la pédagogie il y a de la psychologie.<br/><br />
Je fais des travaux dans ma maison, je retape une maison, quand je vais chez des gens, je garde les mêmes vêtements, je garde le pantalon qui est sale, le blouson qui est sale, parce que parfois, chez des gens, l’endroit où il faut s’asseoir pour intervenir sur l’ordinateur, c’est bon ! Il y a des gens qui sont sales, il y a des gens chez qui je ne vais plus. Les gens sont différents, on a affaire à plein de gens différents, à des mentalités différentes, donc il faut s’adapter et c’est en plus du travail, de la tâche à accomplir. Il faut comprendre, il faut deviner ce qui leur conviendrait le mieux, vous ne pouvez pas traiter les gens de la même façon, vous ne pouvez pas fourguer la même prestation à tous.<br/><br />
Merci.<br />
<br />
[Applaudissements]</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Organisation-de-conferences-eclairOrganisation-de-conferences-eclair2024-03-20T16:45:48Z<p>Fconil : Finalisation des documents</p>
<hr />
<div>= Organisation de conférences éclair =<br />
<br />
''Basée sur la session 2024''<br />
<br />
== Planning ==<br />
<br />
'''À reprendre et adapter'''<br />
<br />
''Temps un peu court pour que la proposition soit diffusée largement, sachant que beaucoup de proposition arrivent aux environs de la date limite'''.<br />
<br />
* Décision d'organiser des conférences éclair en visio le '''lundi 29 janvier 2024'''<br />
** Les conférences éclair ont lieu lors de l'assemblée générale le '''samedi 16 mars 2024''' de '''10h00 à 12h00'''<br />
** 4 personnes organisatrices : Jean-Christophe, Bookinette, Eda, Françoise<br />
** Durée 6 minutes, 16 présentations ont été faites<br />
* Création de la mailing-list '''confseclairs''' sur https://listes.april.org/wws le '''mercredi 31 janvier 2024''' par Fred<br />
* Création d'un pad pour préparer les conférences éclair<br />
* Mail d'annonce envoyé le '''mercredi 31 janvier 2024'''<br />
* Date limite d'envoi des propositions le '''jeudi 29 février 2024'''<br />
* Réunion de sélection des propositions le '''mercredi 6 mars 2024'''<br />
** Décision de l'ordre de passage<br />
** Idéalement renseigner le planning prévisionnel des conférences éclair sur le wiki de l'assemblée générale à ce moment<br />
* Mise en place d'un tableur partagé pour le suivi des propositions<br />
* Envoi des mails d'acceptation / de refus le '''jeudi 7 mars 2024''' avec demande d'une phrase de présentation de l'orateurice<br />
* Récupération des présentations, réponses aux participant·e·s<br />
* Mail d'information pour les orateurices le '''jeudi 14 mars 2024'''<br />
* Convertir les présentations au format PDF si ce n'est pas le cas et si cela fonctionne<br />
* Renommer les fichiers de présentation avec le numéro d'ordre de passage au début<br />
* Mail de demande d'autorisation de diffusion des supports de présentation le '''lundi 18 mars 2024''' => faire un document à signer sur place<br />
* Déposer les présentations sur un serveur de l'April<br />
* Modifier le planning des conférences éclair pour ajouter les liens vers les présentations<br />
<br />
== Équipement ==<br />
<br />
* ordinateur pour la diffusion des présentations (utilisation de l'ordinateur d'un des organisateurices)<br />
* ordinateur pour afficher le décompte du temps de présentation<br />
* cloche pour signaler la fin du temps de présentation<br />
<br />
== mailing-list ==<br />
<br />
Une mailing-list spécifique '''confseclairs''' a été créée sur https://listes.april.org/wws dont les '''propriétaires''' sont les '''membres organisateurs des conférences éclair'''.<br />
<br />
N'importe qui peut écrire à la liste ce qui permet de regrouper les mails échangés avec les personnes qui proposent une conférence.<br />
<br />
== Annonce ==<br />
<br />
Mail envoyé sur la mailing-list '''Infos'''<br />
<br />
Titre : Appel à conférences éclairs pour le matin de l'AG - <date> à <lieu><br />
<br />
Bonjour à tous et à toutes,<br />
<br />
La prochaine assemblée générale de l'April aura lieu <date><br />
à <lieu>.<br />
<br />
Cette année, nous proposons un temps de conférences éclairs le <date / jour><br />
de <heure début> à <heure fin>.<br />
<br />
Les conférences éclairs sont des présentations très courtes (six<br />
minutes) qui s’enchaînent sur des sujets variés. Vous pouvez présenter<br />
une initiative, un livre ou un film, un logiciel... C'est la diversité<br />
des sujets qui fait la richesse de l'événement. On découvre des<br />
personnes et des projets, on partage des idées, on ressort plein<br />
d'énergie et de motivation.<br />
<br />
Bien sûr, puisque cette proposition s'inscrit dans le contexte de<br />
l'April, un lien est souhaité avec le Libre, entendu au sens large<br />
(logiciel libre, données ouvertes, licences libres...).<br />
<br />
Vous pouvez utiliser un support pour votre présentation que vous devrez<br />
impérativement envoyer à l'avance à l'équipe d'organisation pour réduire<br />
le plus possible les aléas logistiques pendant l'événement. Pour<br />
favoriser un déroulé fluide et dynamique, il n'y aura ni questions ni<br />
interventions du public entre les présentations. L'attention la plus<br />
bienveillante est attendue de la part du public.<br />
<br />
Sur le temps de midi, nous vous proposons de partager un repas tiré du<br />
sac pour faire connaissance et poursuivre les échanges sur un mode<br />
convivial.<br />
<br />
Pour réussir une session de conférences éclairs, il faut des<br />
intervenants et des intervenantes. Nous en attendons une quinzaine.<br />
L'objectif de ce message est donc de vous inviter à proposer une<br />
intervention. Le format court et le contexte amical offrent un cadre<br />
rassurant. L'objectif est vraiment d'encourager chacun et chacune à oser<br />
venir partager sur un sujet.<br />
<br />
La date limite pour l'envoi des propositions est le <date limite d'envoi>. Il<br />
suffit d'écrire à confseclairs@april.org en indiquant votre nom ou votre<br />
pseudo ainsi que le titre de votre présentation et éventuellement un<br />
lien pour en savoir plus.<br />
<br />
Merci et bonne journée<br />
Librement<br />
<signature><br />
<br />
== Templates de courriels ==<br />
<br />
=== Exemple d'accusé de réception ===<br />
<br />
Bonjour,<br />
<br />
Nous vous remercions pour votre proposition de conférence éclair pour la<br />
prochaine assemblée générale de l'April.<br />
<br />
Nous reprendrons contact avec vous dans la semaine dès que la sélection des<br />
propositions aura été faite.<br />
<br />
Bien cordialement<br />
<signature><br />
<br />
=== Exemple de réponse positive ===<br />
<br />
Bonjour,<br />
<br />
L'équipe April vous remercie pour votre proposition de conférence éclair :<br />
<titre>.<br />
<br />
Celle-ci a été acceptée!<br />
<br />
Nous avons donc besoin que vous nous confirmiez votre participation à la<br />
matinée des conférences éclair le <date et heure de début des confs éclair> et que vous nous<br />
fournissiez une phrase de présentation pour vous introduire.<br />
<br />
Nous vous rappelons que vous devez impérativement nous envoyer votre<br />
présentation au format PDF ou lien vers une présentation web (type reveal.js)<br />
avant le <date limite envoi présentation>, minuit, à l'adresse : confseclairs@april.org. Aucun aléas<br />
technique de transfert de fichiers ou d'affichage ne pourra être géré sur le<br />
moment au risque de briser la dynamique de la matinée.<br />
<br />
Pour rappel le temps de parole de 6 minutes doit être rigoureusement respecté<br />
pour permettre à tout le monde d'intervenir.<br />
<br />
Librement<br />
<br />
=== Exemple de réponse négative (cause distanciel) ===<br />
<br />
Bonjour,<br />
<br />
L'équipe April vous remercie pour votre proposition de conférence éclair :<br />
<titre>.<br />
<br />
Malheureusement, l'équipe a le regret de vous faire savoir que votre<br />
proposition n'a pu être retenue car l'organisation ne permettra pas la mise en<br />
place de présentations en distanciel pour cet événement. <br />
<br />
Néanmoins, votre sujet nous intéresse et pourrait faire l'objet d'une<br />
intervention de ''six minutes'' dans l'émission de radio de l'April "Libre à vous",<br />
soit en direct et à distance le mardi après-midi, soit par l'intermédiaire d'un<br />
enregistrement réalisé par vos soins diffusé pendant l'émission.<br />
<br />
Librement<br />
<br />
https://www.libreavous.org/<br />
<br />
=== Exemple de mail d'information aux orateurices ===<br />
<br />
Titre : Informations aux orateurices pour les conférences éclairs APRIL du <date des confs éclair><br />
<br />
bonjour,<br />
<br />
L'équipe April est ravie de vous accueillir <date des confs éclair> pour la session de conférences éclairs qui commencera à <heure de début> précise. L'accès à l'amphi sera possible à partir de <heure d'accès possible>. Merci d'arriver sur place avant <heure de début>.<br />
<br />
Les conférences se dérouleront à la <nom du lieu des confs éclair> :<br />
<adresse du lieu des confs éclair><br />
<br />
''Merci de vous munir du document PDF ci-joint qui pourrait vous être demandé par les vigiles à l'accueil. Imprimez-le ou gardez en trace sur votre téléphone mobile, ordinateur portable …''<br />
<br />
Si ce n'est pas déjà fait, nous vous rappelons que vous devez impérativement nous envoyer votre présentation au format PDF ou lien vers une présentation web (type reveal.js) avant ce soir, minuit, à l'adresse : confseclairs@april.org. Aucun aléas technique de transfert de fichiers ou d'affichage ne pourra être géré sur le moment au risque de briser la dynamique de la matinée.<br />
<br />
Il est important de veiller à respecter rigoureusement le temps de parole prévu qui sera de 6 minutes au maximum. Une personne de l'organisation surveillera le temps et la présentation en cours sera interrompue au bout de 6 minutes si elle n'est pas terminée.<br />
<br />
Vous pouvez trouver le planning prévisionnel des présentations sur le wiki : <page avec l'annonce des confs éclair><br />
<br />
''Il sera possible de déjeuner sur place sur le temps de midi pour faire connaissance et poursuivre les échanges sur un mode convivial. Chaque personne intéressée devra apporter son repas.''<br />
<br />
Librement<br />
<br />
=== Exemple de mail d'autorisation de diffusion du support ===<br />
<br />
Titre : Autorisation de diffusion du diaporama présenté aux conférences éclairs APRIL du samedi 16 mars 2024<br />
<br />
bonjour,<br />
<br />
L'équipe April vous remercie pour votre présentation pendant les conférences éclairs. <br />
Les retours ont été très positifs et plusieurs personnes ont demandé la mise à disposition des diaporamas.<br />
<br />
Est-ce que autorisez l'APRIL à mettre en ligne votre support de présentation sur la page du wiki : <page avec l'annonce des confs éclair><br />
<br />
Sans réponse de votre part avant la fin de la semaine (<date limite à définir>), votre présentation ne sera pas mise en ligne.<br />
<br />
Librement<br />
<br />
== Documents utiles ==<br />
<br />
* tableur de suivi<br />
* affichage du planning provisionnel sur le wiki<br />
* pad pour les notes<br />
* autorisation de diffusion des supports à faire signer sur place<br />
* affiche des présentations pour la salle et les organisateurices<br />
* idéalement un document de présentation des orateurices pour celui/celle qui annonce les présentations<br />
<br />
=== Tableur de suivi ===<br />
<br />
Il faudrait parfois des dates plutôt que oui / non pour le suivi (confirmation de la venue, ...).<br />
<br />
<pre><br />
"Nom","Mail","Date proposition","Présentiel","Enregistrement","Titre","Détail","Remarques","URL","Accusé réception","Ordre","Retour envoyé","Confirmation mail","Inscription wiki","Autorisation diffusion","Présentation","Slides","URL"<br />
"Prénom nom","adresse mail",01/02/2024,"oui","non","Moteur de recherche avancé développé dans Libre à vous","J'en ferai bien une le moteur de recherche avancé développé dans Libre à vous et sur des perspectives d'amélioration.",,,"oui",3,"oui","non","oui","oui",,"03-diapos-moteur-de-recherche.pdf",<br />
</pre><br />
<br />
=== PAD ===<br />
<br />
{|border="1"<br />
|-<br />
! '''Ordre'''<br />
! '''Orateur/Oratrice'''<br />
! '''Titre'''<br />
! '''Diaporama'''<br />
! '''URL'''<br />
|-<br />
| <br />
| <br />
| <br />
| <br />
| <br />
|-<br />
|}<br />
<br />
=== Affichage du planning provisionnel sur le wiki ===<br />
<br />
https://pad.chapril.org/<br />
<br />
=== Exemple : Autorisation de diffusion des supports ===<br />
<br />
'''À revoir juridiquement et à adapter en terme de licence / texte'''<br />
<br />
Objet : Conférences éclair APRIL <année><br />
<br />
Je soussigné(e) (Nom &Prénom) .................................<br />
<br />
demeurant à .................................<br />
<br />
travaillant au sein de .................................<br />
<br />
né(e) le, .................................<br />
<br />
en qualité de .................................<br />
<br />
autorise l'association APRIL, dans le cadre de ses conférences éclair <année> (<page du wiki>)<br />
<br />
- à filmer une partie ou la totalité de mon intervention lors de <identification de l'événement> cité/e en objet<br />
<br />
- à diffuser tout ou partie de ce film (diffusion visuelle et sonore) sous licence<br />
Creative Commons BY-NC-ND (Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International) dont le contenu explicite est disponible à l'adresse suivante :<br />
https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/deed.fr<br />
<br />
- à mettre en ligne une partie ou la totalité de mon intervention sur le site internet<br />
indiqué sur la page <page du wiki>, page qui sera donc référencée sur le site APRIL<br />
<br />
- à diffuser et mettre en ligne tout ou partie de mes documents présentés lors de<br />
cette intervention sous la même licence.<br />
<br />
Cette autorisation est donnée sans limitation dans le temps et à titre gratuit.<br />
<br />
Fait à .................<br />
<br />
Signature<br />
<br />
=== Affiche des présentations ===<br />
<br />
Tableau avec les champs :<br />
<br />
Orateurice, Titre, URL<br />
<br />
=== Document de présentation des orateurices ===<br />
<br />
Tableau avec les champs :<br />
<br />
Orateurice, Titre, Présentation, Slides<br />
<br />
Il faut demander à chaque orateurice une '''phrase''' de présentation pour l'annoncer.<br />
<br />
== Outils ==<br />
<br />
=== Timer logiciel ===<br />
<br />
Code adapté de https://github.com/wesbos/JavaScript30/, "29 - Countdown Timer".</div>Fconilhttps://wiki.april.org/w/Alain_Issarni_CEO_@Numspot_-_L%27Open_Source_pour_un_cloud_souverainAlain Issarni CEO @Numspot - L'Open Source pour un cloud souverain2024-03-14T12:20:38Z<p>Morandim : /* 13’ 53 (relu sans audio Véro) */</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Alain Issarni CEO @Numspot - L'Open Source pour un cloud souverain<br />
<br />
'''Intervenants :''' Alain Issarni - Thomas Walter<br />
<br />
'''Lieu :''' Podcast Med in tech<br />
<br />
'''Date :''' 15 février 2024<br />
<br />
'''Durée :''' 1 h 17 min 32<br />
<br />
'''[https://audio.ausha.co/B6G9ziGe6jxe.mp3 Podcast]'''<br />
<br />
'''[https://open.spotify.com/episode/3Nps64PjDqFr9CLEUuESyd Présentation du podcast]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' À prévoir<br />
<br />
'''NB :''' <em>Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
==Transcription (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
<b>Alain Issarni, voix off : </b>Il y a des gros travaux à l’heure actuelle et des discussions au niveau Europe, justement pour harmoniser cette vision sur la souveraineté et ce niveau de dépendance que l’on souhaite, ou pas, par rapport aux acteurs qui bénéficient de lois extraterritoriales. Je suis plutôt optimiste et confiant et on voit, aujourd’hui, que ça avance à une telle vitesse que les certitudes d’aujourd’hui ne sont pas les certitudes de demain.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est parti pour un nouvel épisode. Aujourd’hui, je crois que j’ai coché le bingo parce que ce sont tous les sujets que j’adore. On va parler de <em>cloud</em>, de données de santé, d’hébergement de données pour les acteurs de la santé tels que les établissements, un sujet qui m’est cher depuis que j’ai commencé à m’intéresser à la santé. On va parler d’IA générative, notamment d’IA générative dans le milieu hospitalier, un sujet qui est vraiment brûlant et qui m’intéresse particulièrement ; de cybersécurité, bref !, tout ce que j’adore.<br/><br />
Alain, bienvenue. J’ai hâte qu’on aborde un peu tout ça. On peut commencer, je vais te laisser te présenter et puis on va attaquer tous ces sujets, si tu veux bien.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Bonjour. Ravi de participer à ce podcast. Je partage aussi tous ces sujets passionnants.<br/><br />
Pour ma part, je suis le président de Numspot<ref>[https://numspot.com/ Numspot - Le partenaire cloud souverain et de confiance des secteurs stratégiques et sensibles]</ref>, une entreprise qui a été créée récemment, en février, j’y reviendrai. Auparavant j’ai été DSI à l’Assurance maladie pendant un peu plus de sept ans, encore auparavant j’ai été DSI non pas dans le monde de la santé, mais toujours dans la sphère publique, à la Direction générale des finances publiques. Donc un parcours très services publics et une bascule, en février, vers Numspot qui est une entreprise privée qui a de beaux actionnaires que sont la Caisse des dépôts et consignations, Docaposte, Dassault Systèmes et Bouygues Telecom. Le but de la société Numspot, qui a été créée en février, c’est de créer, on reviendra probablement sur le terme, un « <em>cloud</em> souverain et de confiance », à valeur ajoutée, avec des services managés pour servir le domaine de la santé, mais aussi tous les domaines qui ont une attention toute particulière sur la sensibilité des données et la protection des données. L’aventure a commencé en février, nous étions deux/trois, nous sommes à peu près une centaine maintenant et c’est juste enthousiasmant.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>J’imagine. On va expliquer un peu tout ça.<br/><br />
Peut-être, pour lancer ma première question, on en parlait tout à l’heure quand on a préparé, c’est un sujet qui me tient particulièrement à cœur parce que, je te l’ai expliqué, j’avais essayé de faire une première aventure entrepreneuriale dans le milieu hospitalier, j’avais monté une boîte, on cherchait à prédire des erreurs de prescription à l’hôpital, les écarts, la pratique. Sorti d’école, je ne connaissais rien, avec beaucoup d’humilité, je ne connaissais pas grand-chose. J’avais une expérience plutôt de <em>data science</em> et de Web et je me suis dit « avec ces compétences-là, je vais aller à l’hôpital ; il y a des besoins d’utiliser de l’IA, des technologies pour aider les pratiques au quotidien, les pharmaciens qui essaient de détecter et de valider les prescriptions. » En fait, le premier problème auquel on s’est heurté, ce sont ces fameuses données.<br/><br />
Pour expliquer rapidement pourquoi on en avait besoin. L’idée c’est : on prend toutes les données qu’il y a sur les patients à l’hôpital, donc tout ce qui est rentré dans le système d’information. On a entraîné un algorithme qui prédit s'il y a un risque d'erreur, ou pas, pour ce patient de cette prescription. Du coup, on fait remonter les patients aux risques d’erreur, comme ça le pharmacien peut les regarder et prioriser son travail.<br/><br />
Sur le papier, ça marchait très bien, mais, dès qu’on a voulu passer en production, nous nous sommes heurtés à un problème d’infrastructure. Pour faire ça on a besoin de machines, on a besoin de GPU, de cartes graphiques qui peuvent faire beaucoup de calculs en parallèle. Du coup, on a demandé à la DSI [Direction des Systèmes d'Information] de l’hôpital « est-ce qu’on peut avoir cette machine ? » et la réponse a été « c’est compliqué » et, finalement, ça a pris plus de six mois pour l’avoir, c’était en 2018. Ça illustre un petit peu la difficulté, le paradoxe qu’il y a : on sent qu’on a besoin de nouveaux outils à l’hôpital ; l’IA, notamment, qui fait beaucoup parler d’elle en ce moment, pourrait être une solution à certains problèmes et, pour autant, on a l’impression que les infrastructures ne sont pas là et, à l’hôpital, on a ces délais, on n’a pas les machines pour faire tourner tout ça.<br/><br />
Est-ce que tu pourrais expliquer un peu ce paradoxe et, déjà, d’où ça vient ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Déjà bravo si, dès 2018, tu pensais à ces sujets-là, parce que, aujourd’hui, ça devient presque banal. Maintenant, tout le monde connaît l’IA générative. Je pense qu’en 2018 c’était un peu moins le cas. C’est un sujet important et la santé en a besoin.<br/><br />
Ce paradoxe, j’allais dire, est plutôt « simple », entre guillemets, malheureusement il faut le constater. On parle là de données de santé, des données extrêmement sensibles. Je pense que les DSI des hôpitaux sont particulièrement attentifs à la protection de ces données-là, donc, parfois, rechignent à aller dans le <em>cloud</em> pour des problèmes de confiance que l’on peut y accorder. Donc, faute de trouver des offres de confiance pour pouvoir y aller, ils gardent ça chez eux, mais, malheureusement, en fait les DSI ont des moyens limités, comme un peu partout, et c’est probablement difficile pour eux de pouvoir monter cela, surtout si ce sont des configurations atypiques, parce que ce que tu demandais en 2018 n’était peut-être pas totalement classique par rapport à ce que délivrait la DSI locale. Ça fait donc partie des difficultés qu’il peut y avoir.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est vrai qu’en comparaison, j’avais déjà fait d’autres projets, on allait sur des services de <em>cloud</em>, on les connaît, WS, GCP, les grands classiques, OVH<ref>[https://fr.wikipedia.org/wiki/OVHcloud OVHcloud]</ref> en France. C’est vrai que je vais sur un site, je me connecte, je m’inscris, je clique sur un bouton, j’ai ma machine et je peux commencer à travailler. Il y avait donc cette dichotomie entre, d’un côté, je l’ai en un jour et, de l’autre côté je l’ai dans six mois.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement, mais je pense que tout cela est lié, en fait, au niveau de confiance que l’on peut faire quand on va dans le <em>cloud</em>. J’allais dire que la raison d’être de Numspot est d’apporter cette confiance-là, on y reviendra probablement avec les hautes qualifications SecNumCloud<ref>[https://certification.afnor.org/numerique/qualification-secnumcloud Qualification SecNumCloud]</ref> et autres, avec des services managés, pour, justement, apporter cette flexibilité et cette agilité qu’on est en droit d’attendre dans le <em>cloud</em>. Les DSI ont besoin d’un haut niveau de confiance, de cette flexibilité et de cette agilité. En 2018, ça n’existait pas à ce point-là, je pense donc que ça posait les pires difficultés et ça allait à l’encontre du progrès que l’on est en droit d’attendre et que l’on espère un peu partout.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Avant d’enchaîner un peu sur ces sujets de SecNumCloud et de <em>cloud</em>, dans ton expérience d’avant, puisque tu étais DSI, tu gérais énormément de données santé extrêmement sensibles –~d’ailleurs, je ne sais pas si les données de l’Assurance maladie sont aujourd’hui dans le <em>cloud</em> ou pas~–, est-ce que c’est similaire comme raisonnement et, finalement, pourquoi ne pas décider d’aller dans le <em>cloud</em> il y a quelques années de ça ? Comment, en tant que DSI, as-tu raisonné à ce moment-là ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Question désagréable !<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Désolé, je ne pensais pas que c’étaient des sujets qui fâchent.<br/><br />
C’est important parce que je trouve que c’est assez opaque. Quand j’ai commencé, j’ai essayé de comprendre. J’avais l’impression de ne pas comprendre les vraies raisons qui m’empêchaient d’avoir les bons outils pour travailler.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>J’ai coutume de dire que la sphère publique en général, pas la sphère santé uniquement, mais la sphère publique en général, a un taux d’adoption du <em>cloud</em> qui est plutôt faible, voire très faible. Quand on se compare avec les pays anglo-saxons, les États-Unis ou autres, déjà, ne serait-ce qu’en général, le <em>cloud</em> est d'un niveau plus faible et la sphère publique d'un niveau encore plus faible.<br/><br />
Je dis qu’il y a deux raisons, il y a les bonnes et les mauvaises.<br/><br />
Je vais commencer tout de suite par les mauvaises et c’est pour cela que je disais la partie désagréable.<br/><br />
En fait, quand on a la chance d’être dans une DSI de taille très importante–~à l’Assurance maladie j’avais 1500 informaticiens en interne, à la DGFiP [Direction générale des Finances publiques] il y en a 4000~–, on a les moyens de faire quelque chose et on fait beaucoup de choses ; on a donc l’impression que l’on peut tout faire et qu’on peut être indépendant. Dans les faits, ces entités-là font de très belles choses au niveau informatique, il y a de très belles réussites, tout cela en le faisant en interne, mais ça nécessite des compétences j’allais dire du sol au plafond, c’est-à-dire de bâtir des salles, d’installer des serveurs, de câbler, en fait il faut tout faire.<br/><br />
Ça c’est plutôt la mauvaise raison et je pense que même les grosses DSI, dans l’avenir, n’auront pas les moyens de pouvoir faire ça, parce que tout cela va tellement vite que ça nécessite des ressources et des compétences qui sont particulières.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Quels sont, justement, les problèmes de faire soi-même ? Si j’ai des gros besoins d’IT sur les cinq/dix prochaines années, je me dis « je dimensionne suffisamment grand, je mets suffisamment de serveurs, j’entraîne les personnes qu’il faut et puis ça devrait le faire », non ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>C’est presque aussi facile que ça.<br/><br />
Déjà, si on veut bâtir une salle d’hébergement, ça nécessite des investissements considérables ; ces entités-là bâtissent des salles d’hébergement. Il faut s’occuper de métiers qui ne sont pas tout à fait dans l’informatique, s’occuper de la climatisation, de l’électricité, de tout cela ; il faut mettre de la redondance parce qu’il faut une salle d’hébergement avec un haut niveau de disponibilité, aujourd’hui on ne peut pas se contenter d’une salle qui, tous les trois jours, tomberait en panne parce qu’on n’aurait pas d’électricité ou autre. Ce sont donc les fameux tiers, deux, trois ou peut-être quatre. Ça nécessite des compétences, c’est un métier particulier.<br/><br />
Ensuite, une fois qu’on a la salle et l’infrastructure, il faut y mettre les serveurs, il faut le réseau.<br/><br />
Tout cela ce sont des métiers que l’on peut exercer.<br/><br />
L’avantage du <em>cloud</em> c’est que, justement, ça donne à un DSI la possibilité de ne pas avoir à s’occuper de cela. Pourquoi a-t-on créé les <em>clouds</em> ? En fait, c’est justement pour éviter ces sujets-là. Certes, il y avait le sujet de partage et de partage de coûts, mais, de fil en aiguille, le <em>cloud</em> a transformé les sujets en commodités, c’est-à-dire que tout cela devient une commodité. Dans certains milieux, on appelle cela des servitudes, dans la marine, les bateaux de servitude. Juste, peut-être, une pointe d’humour, c’est que servitude ça peut être « rendre service » mais ça peut être aussi « rendre servile ». Certains acteurs ont bien compris que cette servitude était aussi un moyen de rendre serviles et de tenir prisonniers, un peu, leurs clients. Pardon pour la parenthèse.<br/><br />
Je voulais dire par là que oui, si on est gros on peut faire cela, mais ça nécessite des compétences et des métiers qui sont parfois assez loin de ce que l’on imagine dans le monde de l’informatique et ça nécessite des investissements. Monter une salle d’hébergement, ça ne se fait pas tout de suite ; équiper et mettre des serveurs dans une salle d’hébergement, c’est un peu compliqué.<br/><br />
Quand on compare ça par rapport à la flexibilité qu’apporte, en toute objectivité, le <em>cloud</em>, c’est sûr qu’on peut se dire, si on fait confiance à l’acteur, « autant profiter de cette flexibilité et y aller ».<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est la mauvaise raison. Quelle serait la bonne raison de ne pas aller dans le <em>cloud</em> ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>La bonne raison. Je pense que, dans la sphère publique, beaucoup d’acteurs ont à cœur de protéger leurs données, ils sont convaincus que leurs données sont confidentielles et nécessitent d’être protégées. J’indiquais que j’étais à la DGFiP, j’allais dire qu’il n’y a pas plus gros secret que le secret fiscal. C’est juste catastrophique que d’imaginer que les données fiscales de quelqu’un tombent dans la boîte aux lettres d’un autre. C’est un gros sujet. Quand on est à l’Assurance maladie, on est particulièrement sensible aux données de santé, on a une attention toute particulière. Je crois que l’on peut généraliser cela à peu près à toute la sphère publique.<br/><br />
La bonne raison c’est qu’il y a quand même, derrière tout cela, la réflexion qui est « ces données étant ultrasensibles, il faut faire attention à ce que l’on fait, donc, si je n’arrive pas à trouver quelque chose dans le <em>cloud</em> qui me rassure complètement, alors je me réfugie et je le fais chez moi, parce que j’ai l’impression de beaucoup mieux protéger tout cela. »<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup, à l’époque, est-ce que c’était une impression ou est-ce que c’était véridique ? C’est-à-dire est-ce que c’était plus sécurisé d’avoir les données chez soi ou est-ce que c’était une impression que les données étaient moins sécurisées dans le <em>cloud</em> ? Tu parles de confiance, finalement. Quel est le degré de réalité de derrière ça ?<br />
<br />
==13’ 53 (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Dans les faits, je pense que l’on peut dire que ces entités, qui hébergent des données qui sont particulièrement sensibles, les ont plutôt bien protégées au fil des années. Elles arrivent à faire des choses et à assurer un bon niveau de confiance et de sécurité de leurs données.<br/><br />
Le niveau de confiance que l’on peut avoir dans le <em>cloud</em> augmente de plus en plus, notamment grâce à l’ANSSI [Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information] qui a édicté le référentiel SecNumCloud, justement pour apporter ce niveau de confiance. La sphère État et l’ANSSI ont estimé qu’il était intéressant d’avoir ce niveau de qualification, justement pour pouvoir apporter aux acteurs ce niveau de confiance, qui n’existait pas, à tort ou à raison, je dirais plutôt à raison. En France, on a un label, une qualification qui est extrêmement exigeante et qui est de nature à pouvoir quand même rassurer les acteurs sur le niveau de confiance que l’on peut y accorder.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>On avait un petit peu discuté avec Cyprien, dans un épisode précédent, de SecNumCloud. Peux-tu nous expliquer ce qui fait que ce label est particulièrement exigeant ? Qu’est-ce qui fait que je peux avoir une grande confiance dans ceux qui ont ce label-là, et me dire « je sais que les données sont sécurisées par rapport à d’autres qui ne l’ont pas forcément, mais qui pourraient aussi avoir certaines normes de sécurité ? »<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Il faut voir qu’on parle de <em>cloud</em> et de <em>cloud</em> public. L’intérêt du <em>cloud</em> public c’est de mutualiser, donc de faire côtoyer, potentiellement, des <em>workloads</em> de différents clients, si ce n’est sur les mêmes machines, sur des machines qui sont assez proches. Quand on fait ces choses-là en interne, en fait on n’a pas d’entités étrangères, au sens « étrangères à l’entité », qui viennent manipuler des données des serveurs ou autres. On a donc une sorte de bulle qui semble assez sécurisante.<br/><br />
Quand on veut faire cela dans le <em>cloud</em>, il faut quand même apporter ce niveau de sécurité et être sûr que telle entreprise qui utilise des <em>workloads</em> sur ces serveurs avec, à côté, une autre entreprise, il n’y a pas de communication possible et il n’y a pas la possibilité de pouvoir accéder de l’un à l’autre.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est-à-dire que physiquement si, demain, un établissement mettait ses données dans le <em>cloud</em> public, il pourrait y avoir les données d’un autre établissement sur la même machine, les données et les serveurs d’un site d’e-commerce ou ce genre de chose.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>En fait, l’établissement qui va sur le <em>cloud</em> ne se préoccupe plus de savoir sur quelle machine, ce dont on parle. Numspot c’est du <em>cloud</em> public, ce n’est pas du <em>bare-metal </em>, c’est du <em>cloud</em> public. Il ne se soucie pas de savoir sur quelle machine, il a des instances, il a sa zone et sa préoccupation c’est d’être sûr qu’il n’y a pas de communication possible avec le voisin, qui est d’une proximité plus ou moins grande au niveau matériel. La difficulté c’est de pouvoir garantir au client cette étanchéité, alors même qu’on lui fait profiter de l’agilité du <em>cloud</em>. Les machines ne sont pas des machines qu’il achète en propre, ce sont des services et des instances, et il ne sait pas où elles sont, mais il est convaincu que tout cela est sécurisé pour lui.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup, comment SecNumCloud garantit-il cela concrètement ? Qu’est-ce qui fait que c’est sûr, si je suis SecNumCloud, que mon voisin ne pourra pas accéder à mes données ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Justement en implémentant ces fonctionnalités et en assurant l’ANSSI, parce que c’est l’ANSSI qui qualifie, que tout ce qui a été mis en œuvre est conforme à sa doctrine et, effectivement, ne présente pas ce risque-là.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Aurais-tu un exemple d’une exigence qui permet d’assurer ça, pour bien comprendre, pour illustrer un petit peu ? Qu’est-ce qui fait que, physiquement, c’est sécurisé ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Physiquement et logiquement en fait. Tu es client, tu crées une application sur le <em>cloud</em>, tu administres donc ton application. Il faut être sûr que l’administrateur d’une application n’accède pas à l’administration de l’autre application, j’allais dire que c’est banal, pourquoi pas ! Mais l’exigence va plus loin entre la segmentation entre l’exploitant fonctionnel, c’est-à-dire le client, et l’exploitant qui est le fournisseur de <em>cloud</em>. Les exigences sont extrêmement fortes entre le prestataire et le commanditaire, dans le jargon du SecNumCloud, c’est-à-dire entre le client et le fournisseur de <em>cloud</em>, pour être sûr que la segmentation est aussi bonne et que le fournisseur de <em>cloud</em> n’accède pas aux données malgré l’utilisateur. Tout cela c’est une préoccupation que l’on n’a pas quand on crée son propre <em>cloud</em>, parce que, bien évidemment, l’admin-système c’est celui qui a la main sur tout et qui, potentiellement, peut accéder aux données. Dans les faits ce n’est pas tout à fait le cas. C’est-à-dire que celui qui administre les basses couches ou les services, n’a pas ces droits-là, c’est quand même le client qui les a.<br/><br />
C’est donc une garantie supplémentaire, on y reviendra probablement après, notamment sur la protection aux lois extraterritoriales : on s’interdit de pouvoir faire cela, plus une protection juridique compte-tenu de l’actionnariat qui nous donne une garantie encore plus forte ; ça fait partie des choses qui sont extrêmement contraignantes. Il y a d’autres choses, ça peut paraître anecdotique, mais qui agacent, en fait, les informaticiens : pour pouvoir accéder aux zones d’administration, il faut qu’on leur donne des PC qui soient bridés, qui ne soient pas exposés sur Internet pour ne pas prendre des risques d’avoir des rebonds de pollution ou autre. Tout cela, mine de rien, est assez contraignant et, j’allais dire, il y a assez peu d’entités qui poussent cet exercice à avoir ce niveau de sécurisation.<br/><br />
Il y a donc toute une palette de niveaux de sécurité qui a été pensée dans cet esprit de pouvoir apporter cette confiance sur la sécurité et, j’allais dire, l’exercice a été poussé suffisamment loin pour qu’obtenir la qualification soit un vrai challenge. Dans les faits, aujourd’hui, il n’y a que très peu d’acteurs qui sont qualifiés SecNumCloud. L’enjeu c’est que le nombre d’acteurs augmente pour rendre le SecNumCloud j’allais dire beaucoup plus accessible, mais en gardant toujours ce niveau d’exigence.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup, ça y est, maintenant que ce label existe, va-t-on voir de plus en plus d’acteurs publics, en santé ? Est-ce que des DSI vont faire le pas d’aller vers le <em>cloud</em> ? Y a-t-il a des signes qui le montrent ? Est-ce que ça y est, on va avoir un niveau de confiance suffisant ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Je le pense. La notion de souveraineté, même si ce qu’on y met derrière est toujours un peu variable, est dans l’esprit de beaucoup de personnes, beaucoup plus que ça ne pouvait l’être, je pense, il y a deux ou trois ans. Il y a une préoccupation particulière là-dessus et l’enjeu, face à ce marché qui est en attente, c’est de créer l’offre en adéquation avec ce marché.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>On avait parlé, on avait évoqué, j’ai vu passer ça mais je ne suis pas très au clair sur ce que ça veut dire : la doctrine « Cloud au centre »<ref>[https://www.numerique.gouv.fr/services/cloud/doctrine/#contenu Cloud au centre : la doctrine de l'État]</ref>. Tu m’en avais parlé tout à l’heure. Est-ce que tu peux nous expliquer un petit peu ce qu’est cette doctrine, en quoi elle consiste et si cela change quelque chose ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Cette doctrine est extrêmement importante dans toute cette logique de sécurisation et de <em>cloud</em> de confiance. C’est une doctrine dont la première version a été édictée en 2018, il y en a eu une importante en 2021 et la dernière a été mise à jour en mai 2023.<br/><br />
Quel est le but de cette doctrine ? L’État veut inciter les acteurs de la sphère État à favoriser l’adoption du <em>cloud</em> et aller dans le <em>cloud</em>, premier élément. Je pense que c’est intéressant, ça répond à ce que je disais tout à l’heure, au constat que l’on peut faire qu’il y a du retard dans ce monde-là, et je pense que c’est bon de pouvoir bénéficier du <em>cloud</em>, de toute cette flexibilité et autres. Premier point, c’est inciter les gros projets à aller dans le <em>cloud</em>.<br/><br />
Deuxième point et c’est la dernière version de la doctrine « Cloud au centre » qui a fait apparaître ça, c’est une définition des données sensibles qui, quand elles vont dans le <em>cloud</em>, alors elles doivent absolument aller en SecNumCloud. Il y a quelques rubriques, je vais les donner de mémoire. Il y a tout ce qui relève du secret de la vie privée, du secret des affaires, et, pour ce qui nous intéresse, du secret médical. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que la doctrine qui touche, en fait, la sphère publique, dit que quand des données de santé vont dans le <em>cloud</em> alors il faut aller dans le SecNumCloud. Le constat que l’on peut faire c’est, j’allais dire, la qualité qui est accordée par la sphère État à ce label SecNumCloud et aussi l’importance que l’on peut donner à la protection des données qui méritent d’avoir un hébergement qui a subi des épreuves longues pour obtenir cette qualification, mais qui, en contrepartie, apporte ce niveau de confiance.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Ça me fait beaucoup penser au projet du Health Data Hub<ref>[https://fr.wikipedia.org/wiki/Dossier_m%C3%A9dical_partag%C3%A9#Le_Health_Data_Hub Health Data Hub]</ref> qu’on avait évoqué, je crois que tu as un avis là-dessus. Peut-être, pour expliquer l’idée, telle que je la comprends : les données de santé, d’une part, sont très confidentielles, mais ont aussi de la valeur pour faire de la recherche, accélérer la découverte de nouveaux traitements, comprendre les tendances d’épidémiologie, on a bien vu, avec la crise du Covid, l’intérêt que ça pouvait avoir. Donc, d’un côté un grand intérêt, de l’autre, quand même, des polémiques sur le choix de l’hébergeur, il me semble que c’est Microsoft Azure.<br/><br />
Est-ce que, dans ce contexte-là, cette fameuse doctrine aurait changé quelque chose ? Est-ce que, demain, si un autre projet comme le Health Data Hub sort, tout le monde va sur forcément sur le SecNumCloud ? Quel est ton avis sur ce projet du Health Data Hub ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>C’est un très beau sujet. Health Data Hub va avoir pas mal de données, c’est la cible, pour permettre, justement, de faire de la recherche et pouvoir utiliser les données qui sont très nombreuses, qui viennent du SNDS [Système National des Données de Santé] qui est la plus grande base de données de santé en Europe et au monde, que je connais assez bien puisque c’est la CNAM qui l’a. L’enjeu du Health Data Hub c’est de pouvoir mener des projets en récupérant les données du SNDS, plus les données que fournissent les porteurs de projets, pour les combiner et pour pouvoir, grâce à l’analyse de data et de l’IA, en tirer des enseignements, parce que les données sont là et, probablement, assez peu exploitées.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Pour préciser, quelles sont les données qu’il y a dans le SNDS pour qu’on ait tous bien ça en tête ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Dans le SNDS, en fait, ce sont toutes les données de consommation médicale en France. Tu vas voir un médecin, tu te fais rembourser, le fait que tu aies consulté à un médecin y figure.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Donc tel jour, telle personne a consulté tel médecin.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>C’est protégé, parce qu’il n’est pas marqué « Thomas », ce n'est pas intéressant que ça soit Thomas. Par contre, il est intéressant de savoir si Thomas est allé consulter un médecin tel jour, un mois après un autre médecin et ainsi de suite. Pour faire de l’analyse importante, je pense que c’est bien d’avoir une forme de pseudo Thomas pour pouvoir faire de l’analyse. Donc, depuis des années et des années, tout cela est collecté et permet d’avoir de façon pseudonymisée, c’est le terme, les données qui ont donné lieu à du remboursement. C’est donc extrêmement précieux.<br/><br />
Le but du Health Data Hub, c’est de pouvoir utiliser ça, le confronter avec d’autres données qui viennent des hôpitaux et autres, et voir ce que l’on peut en faire. C’est donc potentiellement extrêmement intéressant, on voit bien l’intérêt, notamment pour la recherche, que tout cela peut avoir.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Évidemment. Du coup, aujourd’hui, toutes ces données-là sont hébergées chez Azure ? Comment ça marche ce Health Data Hub ?<br />
<br />
==26’ 24 (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Ça va nous emmener loin. Je vais essayer d’être prudent là-dessus.<br/><br />
Pour l’instant les données sont à l’Assurance maladie, SNDS, et justement il y a, j’allais dire, un peu un peu de bataille ou de discussions quant à savoir si l’ensemble de ces données peut aller sur le HDH, pour l’instant ce n’est pas le cas, c’est ponctuellement, par projet, que tout cela est traité. C’est ce qui crée pas mal d’agacement pour les chercheurs, parce que tout cela met du temps pour récupérer les données, donc on n’y est pas.<br/><br />
De l’autre côté de la face, ce qui crée de la difficulté c’est ce choix de l’hébergeur, le sujet est maintenant assez ancien, il y a eu une polémique que l’on sait, c’était pendant le Covid, c’était en 2020, des annonces avaient été faites sur le fait que le Health Data Hub allait sortir de Azure pour aller sur des <em>clouds</em> souverains. Tout cela tarde un peu et il y a un peu de discussions sur les raisons de cela. En fait, il y a, je dirais, deux mondes qui s’affrontent.<br/><br />
Il y a ceux qui considèrent que ce qui est le plus important c’est de bénéficier de toutes les richesses fonctionnelles du <em>cloud</em>, parce que c’est ça qui est important et c’est ce qui permet d’aller vite et il y a ceux qui disent « attention, n’oublions pas les sujets de sécurité, de protection juridique qu’il peut y avoir ». Il y a donc deux visions qui s’affrontent. À un moment donné, il va bien falloir statuer là-dessus. Bien évidemment, j’ai mon avis personnel, je suis plutôt sur le deuxième point. Pourquoi je suis plutôt sur le deuxième point ? Pour plusieurs raisons.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Justement, tu parles de souveraineté. Comment la définis-tu ?, parce que c’est de cela dont il s’agit. Est-ce qu’on est sur un <em>cloud</em> et on considère que c’est souverain ou pas ? Peux-tu expliquer un petit peu quelle est ta vision de la souveraineté et quels sont les enjeux qu’il y a derrière ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Ça va être passionnant.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Je sais, j’avais dit que c’était un bingo, il y a tous les sujets.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Il y a y a beaucoup de sujets et la souveraineté c’est un débat j’allais dire passionné, passionnant mais aussi passionné, peut-être parfois à tort.<br/><br />
Les extrémistes de la souveraineté disent « de toute façon, jamais vous ne construirez les puces, les serveurs et autres, arrêtez de nous parler de souveraineté parce que vous n’êtes pas souverains ! »,.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Au sens complètement indépendants de tout.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. En fait, il y a deux choses.<br/><br />
Un instant je vais m’élever au-dessus de ma condition, et je vais dire « il y a la souveraineté parce que ça appartient à l’État. » Aujourd’hui, constater que plus de 70 % du <em>cloud</em> en Europe est détenu, je vais le dire comme ça, par des GAFAM qui relèvent d’un même pays, je pense que c’est un problème de souveraineté. Je ferme la parenthèse, ce n’est pas cette souveraineté que je suis censé défendre, mais, accessoirement, si je peux aider là-dessus, j’en serais ravi.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est un problème parce que c’est un problème de protection des données ? Est-ce que c’est un problème plutôt économique ? C’est un problème politique ? Ce sont les GAFAM, on sait que ce sont des acteurs américains, mais concrètement ? Tu parlais aussi des lois extraterritoriales, je pense que ça en fait partie, mais concrètement quels sont les risques ? On l’avait un peu abordé avec Cyprien, mais je trouve que c’est important de l’expliquer, parce que c’est vrai que ce sont des concepts qu’on évoque, mais je trouve que le vrai risque derrière n’est pas forcément toujours très clair.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Le risque, c’est d’avoir un niveau de dépendance. En fait, derrière la souveraineté, c’est quel niveau de dépendance on accepte, ou pas. Tu vois bien que si tu as 70 % d’un <em>cloud</em> chez un acteur, je vais dire – on va faire de la politique fiction et, désolé, on va aller très loin. Je ne sais pas ce qui va se passer le quatre novembre prochain, ce sont les élections aux États-Unis, je ne sais pas si je devrais le dire comme ça : si on tombe sur un président qui n’est pas contrôlable ou qui n’est pas raisonnable, il pourrait nous imposer certaines choses ou pire, que, finalement, les GAFAM n’aient plus le droit de rendre service à tel endroit, il y a quand même pas mal de choses qui s’arrêtent.<br/><br />
Je veux bien qu’on me dise « si ça se trouve il est en train de dérailler, il est en train d’imaginer un cas qui ne se présentera pas », je n’en sais rien.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>En tout cas, c’est un risque qui est dans la tête des politiques, c’est un risque qui existe, qu’on a dans la tête.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Oui, exactement. Après, c’est l’autonomie que l’on veut garder.<br/><br />
Je vais changer complètement de sujet. Au moment de la guerre d’Irak, je ne sais pas si tu te souviens, la France n’avait pas décidé de suivre immédiatement les États-Unis. Je crois que le Premier ministre d’alors, Dominique de Villepin – il était peut-être aux Affaires étrangères, je ne sais pas –, avait fait un discours à l’ONU en disant « on ne va pas y aller ». Une légende dit que, dans la foulée, les câbles de catapultage des avions du porte-avion n’étaient plus disponibles, je ne sais pas si c’est vrai, je veux bien imaginer que c’est vrai.<br/><br />
Pardon, je m’égare de ce qu’est le sujet Numspot. On ne sait pas ce qui va se passer demain et si on se retrouve contraints, compte-tenu des dépendances que l’on a, c’est un sujet et c’est ça la souveraineté État/Europe ou autre.>br/><br />
Il y a un autre élément qui est, de mon point de vue, important et c’est un peu mon expérience de DSI qui dit ça : quand on dépend d’un acteur puissant, parfois il est un peu trop conscient du fait qu’il est puissant et on peut être soumis à une stratégie commerciale qui devient détestable. C’est aussi un niveau de dépendance qui peut être gênant.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du jour au lendemain augmenter les prix.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. Je l’ai connu dans le monde des licences, ce n’était pas le <em>cloud</em>. Auparavant, on achetait des licences, elles étaient perpétuelles, après on achetait du support. Si on ne s’entendait pas avec l’éditeur, on pouvait continuer à utiliser le produit. Maintenant les licences ne sont presque plus perpétuelles, c’est sous souscription. Quand arrive l’échéance, soit tu t’es mis d’accord avec l’éditeur, soit tu ne t’es pas mis d’accord et si tu ne t’es pas mis d’accord, qu’est-ce qui se passe ? Ton service s’arrête. Donc, dans les faits, tu es obligé de te mettre d’accord aux conditions qu’il a commises.<br/><br />
Petite anecdote, et je ne citerai pas l’éditeur en question, dans une autre vie qui est très lointaine maintenant, on utilisait des logiciels à souscription. On avait des contraintes budgétaires, on fait 60 % de réduction de notre taux d’utilisation, <em>in fine</em> ça s’est traduit par plus 5 % sur le coût annuel ! Quand on a ce niveau-là de dépendance, il faut l’assumer dans la durée, ça n’est pas facile !<br/><br />
Donc oui, je pense que oui, c’est un sujet que d’avoir ce très haut niveau de dépendance dans le <em>cloud</em>.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup, aujourd’hui, comment réponds-tu à ces deux sujets de souveraineté ? On peut l’illustrer un petit peu avec ce que tu montes avec Numspot?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Nous étions partis de ce qu’est la souveraineté. Je ne suis pas une extrémiste de la souveraineté parce que, bien évidemment, on ne construit pas tout. En fait, la question c’est de savoir quel niveau de dépendance on accepte. Donc, côté Numspot, on s’appuie sur Outscale qui est une filiale de Dassault Systèmes. J’ai la chance d’avoir déjà un fournisseur de <em>cloud</em>. Donc, je n’aurai pas de salle d’hébergement, je n’aurai pas de serveur, en fait je m’appuie sur les services rendus par Outscale, qui est aussi dans cette orientation souveraineté et indépendance. Par exemple, l’hyperviseur qu’ils utilisent est un hyperviseur en propre, qu’ils ont développé en propre à partir de Libre.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est-à-dire un hyperviseur ? Peux-tu expliquer ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>C’est le service qui permet d’automatiser la fourniture de services pour le client, c’est un automate.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Tu n’as pas à gérer toi-même des machines.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. Pourquoi je dis ça ? Pareil, c’est pour faire un comparatif avec un éditeur du moment, qui fait ça, qui est extrêmement répandu, qui a été racheté par un autre acteur, ça a fait pas mal de débats ; je vais les citer, VMware et Broadcom. À l’occasion de ce rachat, la politique commerciale de ce nouveau propriétaire inquiète lourdement les DSI.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Oui, puisque tout le monde utilisait les services de VMWare, très connu.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement, beaucoup utilisaient les services de VMWare, que ça soit des fournisseurs de <em>cloud</em> ou même des entreprises, à titre personnel, sur leur propre SI. C’est un niveau de dépendance qui est fort, c’est une dépendance commerciale. De mémoire, je crois que c’est un rachat de 69 milliards, une entreprise qui devait faire 13 milliards de chiffre d’affaires, peut être deux/trois milliards à l’année. Pour rentabiliser 69 milliards, je pense qu’il va falloir faire quelque chose sur les prix.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup, un impact sur les prix de VMWare va avoir un impact sur les prix de tous les autres services.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. Ça c’est le niveau de dépendance. Outscale a été, j’allais dire, plutôt audacieux, mais finalement judicieux là-dessus. Et nous, côté Numspot, pour tous les services managés que l’on construit, on s’appuie, je ne vais pas dire exclusivement parce qu’il ne faut pas être jusqu’au-boutiste, mais, pour l’instant, sur des logiciels libres ; ce que l’on bâtit c’est sur des logiciels libres, c’est donc une meilleure garantie quant à l’indépendance que l’on peut avoir vis-à-vis de ces acteurs.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est-à-dire qu’il n’y a pas de prix sur les logiciels libres, évidemment ! Si, il y en a ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>C’est une erreur de dire que libre c’est gratuit. Libre, ça coûte. Ça coûte pour l’entretien que tu veux pouvoir avoir ou mettre sur le produit, mais tu as la liberté de l’utiliser comme tu souhaites.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Tu n’as pas cette dépendance ou tu as une dépendance beaucoup moins forte.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement, c’est-à-dire qu’à la limite si ton mainteneur ou la communauté ne te convient pas, tu accèdes au code et c’est toi qui continues à le modifier et à le maintenir. Tu n’es pas dans la situation où on te dit « ça s’arrête, vous ne pouvez plus l’utiliser, vous n’avez pas les clés qui vont bien. » De ce point de vue-là, de mon point de vue, en fait les logiciels libres, c’est probablement le meilleur gage de souveraineté que l’on peut avoir dans le numérique.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Je fais un parallèle avec ce qu’on avait évoqué aussi avec Çyprien. Il y a plusieurs acteurs qui se placent sur l’hébergement souverain. Il disait qu’en fait toutes les technologies de <em>cloud</em> ont commencé à être développées, les GAFAM ont commencé à les développer dans les années 2000/2005 et ont investi des milliards chaque année, pour conserver cette technologie-là, grosso modo. Nous sommes arrivés trop tard, du coup on ne rattrapera jamais ce retard.<br/><br />
Selon toi, est-ce que c’est vrai ou est-ce que, justement, les technologies libres sont aussi au niveau ? Finalement où en est-on de cet écart ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Je le prendrai un peu différent. Je ne suis pas défaitiste sur ce sujet-là. De mon point de vue, je dirais que ce n’est pas parce qu’on a pris du retard qu’il faut accélérer le retard et augmenter le niveau de dépendance. Après, je ne me fais pas d’illusions. Bien évidemment qu’aller concurrencer ces GAFAM-là sur la plénitude de leurs fonctionnalités et de leurs services, ça n’a pas de sens. Je pourrais le prétendre et, dès que je dis ça, je discrédite Numspot, bien évidemment, parce que ça n’est pas possible.<br/><br />
Est-ce que, parce que l’on ne sait pas faire à ce niveau-là, il ne faut rien faire et se résigner à dire que la bataille est perdue et ne pas monter à bord du <em>cloud</em> ? Je suis convaincu du contraire, toujours pour des sujets de dépendance. Qu’est-ce que l’on gagne à, j’allais dire, avoir une Ferrari si, dans six mois ou un an, on n’a pas les pièces de rechange et elle reste au garage ? D’accord ? Et est-ce que c’est grave, à défaut d’avoir la Ferrari, de commencer par une Clio et de monter en gamme au fur et à mesure où on bâtit les choses ? Je suis d’une philosophie qui est totalement différente. Je comprends l’argument qui consiste à dire « vous avez raté le train, allez jouer ailleurs parce que, de toute façon, jamais vous n’arriverez à concurrencer », mais au bout du bout, les demandes existent. Je ne suis pas en train de dire qu’il faut supprimer les GAFAM, il peut y avoir des données qui n’ont pas de raison d’être protégées particulièrement et qui peuvent bénéficier de ces services-là, mais je dis « attention, quand les données deviennent sensibles, il faut regarder les dépendances et où on met les pieds. »<br/><br />
Entre privilégier uniquement la fonctionnalité au détriment de la sécurité ou ne privilégier que la sécurité avec une fonctionnalité faible, il y a un juste milieu à trouver. C’est ce juste milieu qu’on essaye de combler avec Numspot.<br/><br />
Sortons du débat. D’ailleurs, c’est celui que l’on a avec le HD, qui est : dites-nous que vous êtes au niveau des GAFAM, avec votre niveau de sécurité, et on ira avec vous. Mais on sait que quand on dit ça, en fait ça ne sert à rien de poser la question, ça n’est pas possible. Il faut donc consentir, ou pas, à dire que les données méritent une protection particulière et dire voilà ce que l’on peut faire.<br/><br />
L’État, avec le Ségur, a dépensé énormément d’argent. Pourquoi, par exemple, ne pourrait-on pas aussi dire « on se contente de cela et on bâtit des offres qui vont être adaptées ».<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Finalement, avec la Clio, on peut déjà aller très loin.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. Donc oui, je suis d’accord, l’ambition ce n’est pas d’aller concurrencer et terrasser les GAFAM du jour au lendemain, ça n’a pas de sens. L’ambition, c’est justement de partir d’offres sur un socle qui est bien sécurisé et de l’enrichir au gré des besoins des clients.<br />
<br />
==40’ 57 (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Pour illustrer, la première fois que j’avais ouvert la console AWS, quand on crée un compte, je crois qu’il y a 150 services qui ont tous des noms différents, on ne sait même pas lesquels utiliser, tellement c’est complexe, et, au final, on en utilise trois/quatre et ça couvre à peu près tous les besoins. De mon expérience personnelle, aujourd’hui, c’est cela qu’on fait. L’idée c’est de choisir les trois à quatre bons services à développer peut-être en premier, si j’ai bien compris.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Oui, exactement. C’est la règle des 80/20, tout simplement.<br/><br />
Je pourrais ajouter qu’il y a la sécurité juridique, on l’a un peu évoquée, les lois extraterritoriales. L’Europe n’est pas complètement alignée là-dessus, c’est assez étonnant de constater que les GAFAM, dans d’autres pays d’Europe, prétendent eux-mêmes fournir une offre souveraine sous prétexte qu’elle sera installée en France.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Peux-tu détailler un peu ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Il n’y a pas très longtemps AWS, ou Oracle, ont sorti une offre dite souveraine en Allemagne ou en Italie, je ne sais plus dans quel pays, sous prétexte que les <em>datacenters</em> sont installés là.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est peut-être assez évident, mais qu’est-ce qui fait que, finalement si je suis chez AWS, mais que je suis hébergé en France, je ne suis pas souverain ? C’est peut-être une question évidente pour toi, mais c’est quand même un argument qui est effectivement souvent cité. Les données sont en France, elles ne sortent pas, elles sont dans des serveurs, dans des machines, dans des locaux qui sont en France.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>J’allais dire que la meilleure démonstration, c’est que s’il y a des offres comme Bleu et Adsense, donc un vrai contact soit avec Azure, soit avec Google, eux-mêmes estiment que les offres de ces GAFAM, installés en France, n’y suffisent pas, il faut donner une garantie supplémentaire, effacer du paysage, de la société, les GAFAM pour apporter cette garantie.<br/><br />
On a des acteurs en Europe qui, dans certains pays, défendent qu’ils peuvent être souverains et, en France, je crois qu’il n’y a pas que la France, il y a aussi peut-être un peu l’Allemagne, il y a des acteurs qui, au contact avec ces mêmes GAFAM, disent « attention, il y a un risque », je vais revenir sur le risque, « et pour me prémunir du risque, je crée une société qui va rendre le service mais en effaçant du capital le plus possible ces acteurs. »<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est vrai que ça montre qu’il y a effectivement un problème. C’est quoi exactement ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Ça veut dire qu’il y a des acteurs proches des GAFAM, en contact avec les GAFAM, qui considèrent qu’il y a un problème à les utiliser directement. Pour répondre à ta question, c’était pour moi la meilleure démonstration : même les plus grands sachants l’avouent, même les plus grands sachants disent de ces GAFAM qu’il y a quelque chose à faire.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Quel est le vrai risque du coup ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Le vrai risque c’est effectivement le risque juridique et des fameuses lois extraterritoriales qui permettent – on y reviendra peut-être un petit peu plus et j’essaierai de ne pas rentrer trop dans la technique – aux services de renseignement américains, et il y en a beaucoup, de pouvoir accéder largement aux données pour les entreprises qui sont de droit américain. Tout le monde a entendu parler du <em>CLOUD Act</em>, mais, finalement c’est plus une autre loi qui est gênante, c’est ce qu’on appelle le FISA, <em>Foreign Intelligence Surveillance Act</em>. En fait, ça autorise tous les services de renseignement, de façon plus ou moins encadrée, c’est là le débat, à pouvoir accéder, facilement, aux données, et à les réclamer à des entreprises de droit américain où que soient les données, je dis bien où que soient les données, que ce soit en France ou ailleurs, ça permet de pouvoir y accéder.<br/><br />
Pourquoi ça pose problème selon moi ? Ce FISA, en fait, devait être renouvelé décembre 2023, il avait une échéance en décembre 2023. Les acteurs, au Congrès américain, n’ont pas réussi à se mettre d’accord, je reviendrai sur pourquoi ils n’ont pas réussi à se mettre d’accord, donc, pour l’instant, il y a une prolongation de quatre mois jusqu’au mois d’avril.<br/><br />
Pourquoi n’ont-ils pas réussi à se mettre d’accord ? Parce qu’il y en a qui veulent durcir cela et donner encore plus de pouvoirs aux services de renseignement et il y en a qui disent « attention, si cette loi est mal appliquée, elle est anticonstitutionnelle au sens de la Constitution des États-Unis. » En fait, le quatrième amendement de la Constitution des États-Unis protège ce qu’on appelle les <em>US persons</em>, c’est-à-dire les Américains ou les personnes qui vivent aux États-Unis. Qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que si l’application du FISA touche des données d’<em>US persons</em>, elle est anticonstitutionnelle aux États-Unis.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est-à-dire que s’il y a des données d’Américains, par exemple en France, hébergées sur des serveurs en France, ça voudrait dire que des agences de renseignement pourraient y accéder. J’ai un tout petit peu de mal à comprendre.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Ce n’est pas tout à fait ça : s’il y a des données qui sont rendues accessibles par une entreprise de droit américain, alors les services de renseignement peuvent contraindre cette entreprise à accéder aux données et, en plus, interdire à cette entreprise de prévenir que les données ont été accédées, accessoirement.<br/><br />
On prend une entreprise de droit américain, soumise au droit américain, elle doit s’exécuter vis-à-vis des demandes des services de renseignement. C’est ce que ça autorise. Je dis que si les données accédées concernent des Américains ou des personnes qui vivent aux États-Unis, alors ces services de renseignement sont en infraction par rapport au quatrième amendement de la Constitution.<br/><br />
Bien évidemment, il y a des discussions aux États-Unis. Personne ne se préoccupe quant à savoir si les données accédées appartiennent à des Européens qui ne sont pas de droit américain, ça ne préoccupe donc personne !<br/><br />
En fait, il y a une distorsion du droit dans la façon de voir les différents individus et la protection n’est pas la même entre une <em>US person</em> et un Européen. Je pense donc qu’il y a un problème de fond, d’ailleurs l’activiste Schrems, qui a donné lieu à Schrems 1 et Schrems 2, qui a contesté les équivalences auprès de la Cour européenne de justice, prétend que de toute façon les droits sont incompatibles, ce qui fait que ça ne pourra pas matcher.<br/><br />
Donc, au fond du fond, il y a ce débat qui est le risque juridique.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est donc ce risque juridique qui fait que les GAFAM ne peuvent pas prétendre à une offre souveraine s’ils sont hébergés en France ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. La dernière version du SecNumCloud, la version 3.2, au-delà de toute la technique qu’on évoquait tout à l’heure, qui est extrêmement contraignante, a introduit des limites sur la structure capitalistique de la société et, une société qui est détenue à plus de 24 % par des entreprises non européennes, par définition, ne peut pas prétendre au SecNumCloud.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Sinon, il y a un risque que ces lois s’appliquent.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Je change un peu du sujet, parce que je voulais absolument l’évoquer. Je reprends l’exemple de mon premier projet où on faisait de l’IA à l’hôpital. On avait de forts besoins de GPU, ces cartes graphiques dont on entend beaucoup parler en ce moment avec l’IA générative, ces gros modèles qui font tourner ChatGPT et puis tous les autres.<br/><br />
Il y a, d’une part, une forte demande des GPU partout dans le monde et une offre assez faible, c’est surtout Nvidia qui répond, et aujourd’hui, même moi si je veux acheter un GPU, je vais attendre un petit peu. Il y a donc ce côté hardware avec une vraie pression.<br/><br />
De l’autre, il y a forcément OpenAI, le grand acteur de ChatGPT, qui est américain, mais on voit aussi apparaître des Français, je ne sais pas si tu as entendu parler de Mistral qui a fait parler de lui parce que là où OpenAI a un modèle qui est fermé, ça s’appelle OpenAI, mais finalement… c’est la petite blague ! En face, on a des acteurs comme Mistral qui a une approche totalement différente, qui dit « notre modèle est ouvert, voilà l’ensemble des poids qui constituent le modèle », on peut les télécharger, je peux les télécharger et les faire tourner sur mon PC, ça fonctionne, à condition d’avoir ce fameux GPU.<br/><br />
En même temps, on voit des acteurs dans la santé, on voit des applications de l’IA générative dans la santé, j’ai vu la news : aujourd’hui, Alexandre Lebrun, que j’avais eu dans le podcast, à levé 24 millions avec Nabla, pour utiliser l’IA générative pour aider les médecins au quotidien à prendre des notes automatiquement, pour, finalement, minimiser le temps passé à faire de l’administratif, qui est un gros problème aujourd’hui pour les professionnels de santé, notamment hospitaliers, qui passent beaucoup de temps à faire de l’administratif, parce qu’il faut coder les actes, il faut être précis, il faut écrire des comptes-rendus. On pourrait donc réduire toute cette démarche-là et, du coup, passer plus de temps avec le patient, ce genre de choses.<br/><br />
On sent qu’il y a un gros potentiel. On sent aussi qu’en France on n’a pas ce retard, on a des acteurs qui sont très bien placés, très performants, aussi performants, je crois, que ChatGPT 3.5 qui est le premier modèle d’OpenAI.<br/><br />
As-tu un avis là-dessus ? Est-ce que les infrastructures vont être prêtes, demain, et les hôpitaux pourront en bénéficier ? Est-ce que, du coup, cette offre, ce mouvement <em>cloud</em>, et peut-être ce que tu proposes chez Numspot, permettra d’avoir un vrai impact sur le quotidien des professionnels de santé ?<br />
<br />
==50’ 58 (relu sans audio Véro)==<br />
<b>Alain Issarni : </b>L’IA générative est un vrai sujet, c’est un sujet d’actualité qui a explosé avec le Covid, on a parlé d’exponentielle, mais là je pense qu’on dépasse les exponentielles en termes de niveau d’adoption et de ce qui va se créer.<br/><br />
Oui, il y a des alternatives qui se créent. Je ne suis pas un spécialiste, mais je partage le fait que Mistral ressemble à une belle pépite et, effectivement, les spécialistes disent que leur dernier modèle libre serait équivalent, si ce n’est mieux, que ChatGPT 3.5, donc c’est encourageant. Et ce que je disais avec le Libre, ça me plaît.<br/><br />
Donc oui, ça va exploser. Il y a des cas d’usage qui sont énormes, ceux que tu décrivais, il y a un cas d’usage qui a été annoncé par Docaposte avec qui nous sommes associés, justement pour bénéficier de cette IA générative. Le cas d’usage est « simple », entre guillemets, c’est un patient qui a un lourd dossier, je vais le dire comme ça, qui un parcours de santé assez important, qui va voir un professionnel de santé et, pour aider la préparation du rendez-vous avec le professionnel de santé, l’idée c’est de prendre le dossier médical, de nourrir l’IA là-dessus, pour en sortir un résumé des informations importantes, pour préparer au mieux le rendez-vous. Ça fait partie d’un cas d’usage qu’est en train de développer Docaposte avec Open Value et ALEIA. On voit bien qu’il n’y a rien de plus sensible que les données que l’on met là : ce sont les pathologies directes du patient. Tout cela va être hébergé sur Numspot. Il y a une attention toute particulière à ces données de santé. Quand on va discuter avec une IA générative on va lui donner des informations et s’il y a bien des choses à protéger ce sont celles-ci.<br/><br />
On se positionne bien évidemment là-dessus, on bénéficie de GPU de Outscale – je reviendrai sur la pénurie des GPU –, qui, accessoirement, sont qualifiés SecNumCloud, donc présentent ce niveau de confiance supplémentaire, pour pouvoir développer ce modèle et pouvoir, donc, bénéficier de ces avancées technologiques, de toutes ces fonctionnalités, et faciliter la vie des professionnels de santé.<br/><br />
Mais, encore une fois, on touche les professionnels de santé, on touche la santé, attention aux données. De mon point de vue, il ne me paraît pas raisonnable de dire qu’on va mettre ces données-là sur ChatGPT, compte-tenu de tout ce qu’on s’est dit jusqu’alors et des conditions.<br/><br />
Oui, il y a une pénurie de GPU, mais, j’allais dire, elle touche à peu près tout le monde. À titre individuel, je pense que c’est super compliqué d’acheter des GPU, ça l’est aussi pour les fournisseurs de <em>cloud</em>. Il y en a, mais il va falloir, peut-être sur certains sujets, patienter, mais pour l’instant on en a et on peut en mettre à disposition.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Justement, sur ce sujet des GPU, l’acteur principal est donc Nvidia, c’est aussi un acteur américain. Est-ce qu’il y a ce vrai risque aussi de souveraineté ? Est-ce que c’est un sujet qui est adressé, aujourd’hui, dans les politiques françaises ou européennes ? Ou est-ce que, selon toi, ce n’est pas vraiment un risque ? Est-ce que, très concrètement, Nvidia pourrait dire « on arrête de servir les acteurs français, on privilégie les acteurs américains » ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Je suis entièrement d’accord, mais, encore une fois, c’est le niveau de dépendance que l’on a. Le jour où on se fâche, quand est-ce que l’aventure s’arrête ? Ce que je disais tout à l’heure : si on a un logiciel en mode souscription, le jour où on se fâche, l’aventure s’arrête tout de suite. Si on a un éditeur ou un fournisseur de <em>cloud</em> qui dit « j’ai décidé d’arrêter », l’aventure s’arrête tout de suite. Si Nvidia s’arrête, il a déjà vendu les puces, donc on peut continuer à les utiliser. Certes, l’avenir n’est pas complètement rose, mais ça ne s’arrête pas immédiatement et ça laisse peut-être le temps d’essayer de se reconfigurer. C’est là où je dis « attention, il faut pas être extrémiste sur la souveraineté, il faut savoir quelles sont les dépendances et quel est le niveau de risque de dépendance que l’on prend ». Pour moi, prendre un risque de dépendance qui fait que l’aventure s’arrête tout de suite, c’est un peu rédhibitoire. J’aimerais bien qu’il y ait des puces GPU françaises, mais il n’y en a pas, dont acte. Il faut être aussi un peu pragmatique. Un fournisseur de <em>cloud</em> qui a des puces GPU Nvidia les utilisera tant qu’elles fonctionneront !<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Très clair ! Du coup, avec ce premier POC qui est fait avec Docaposte, un premier <em>use case</em> qu’ils sont en train de développer pour les professionnels de santé, quelle est ta prédiction ? Quand est-ce que ça va arriver concrètement dans les hôpitaux pour en faire bénéficier les centaines de milliers de médecins ? On voit la vitesse à laquelle ça va ; c’est essentiellement un sujet de vitesse ! ChatGPT est arrivé et, en fait, en un mois, je crois qu’il y a eu un million d’utilisateurs, un truc incroyable ! Tout le monde a pu en bénéficier, il y a forcément des médecins qui l’ont utilisé, je pense qu’il y a des données personnelles, c’est même sûr, qui ont dû y passer D’ailleurs, est-ce que c’est un vrai problème, ou pas ? Du coup, je pense que les médecins ou les professionnels de santé qui s’y intéressent ont aussi envie, très largement, d’en bénéficier. Concrètement, quand pourront-ils le faire de manière <em>safe</em>, dans le bon cadre ? Si on dit que la manière sécurisée c’est dans cinq ans et que ChatGPT est là aujourd’hui, imaginer où il sera dans cinq ans ! Est-ce qu’on arrivera à répondre assez vite à cette demande ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>La réponse est oui et ce n’est pas dans cinq ans. Tu citais tout à l’heure Mistral, leur modèle est libre, n’importe qui peut l’installer sur du <em>cloud</em> souverain et l’utiliser sur du <em>cloud</em> souverain ; c’est donc tout de suite.<br/><br />
Je pense qu’il faut faire attention. Il y a l’état de l’art, ce qu’on dit, ce qui est <em>rocket science</em>. Certes, il y a ce sujet de l’IA générative qui est extrêmement intéressant, il intéresse les chercheurs pour être à la pointe, mais il y a énormément d’autres usages, même dans le monde de la santé il y a des choses pour faciliter la tâche, un parcours d’admission, par exemple ; qui dit qu’il ne pourrait pas y avoir un peu d’usage d’IA générative pour faciliter cela ? On peut donc aider le système de santé à plusieurs niveaux. Certes, il y a le sujet recherche, ou à la pointe, pour aider éventuellement le professionnel de santé à faire des diagnostics, je ne sais pas si c’est ce que tu avais en tête. Mais, par exemple, aider le profil santé à préparer un rendez-vous, c’est accessible, c’est ce que propose Docaposte avec les outils de maintenant, on n’a pas besoin d’attendre cinq ans. Il y a donc beaucoup de choses qui sont à faire et on va en découvrir énormément, en fait les cas d’usages ne font qu’exploser. C’est-à-dire qu’au fur à mesure où l’IA générative touche le plus grand nombre, énormément d’idées vont apparaître : comment je peux l’appliquer vis-à-vis de mon métier, comment je peux me faciliter la tâche et autres.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Quels sont les verrous qui restent à débloquer ? OK, les modèles sont là, Mistral est là. Je suis médecin généraliste dans un hôpital de l’AP-HP, qu’est-ce qui bloque, aujourd’hui, pour que je l’aie concrètement ? Je prends un médecin mais ça pourrait aussi être des profils non médicaux, un secrétaire médical pour aider à prendre un compte-rendu. Qu’est-ce qui reste encore à débloquer ? Est-ce qu’il suffit d’un go ou est-ce qu’il y a encore des problèmes vraiment techniques, physiques pour que tout le monde en bénéficie ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Non, non. Pour moi il n’y a pas de technique. Pour que ça se répande énormément, en fait c’est un sujet d’industrialisation du cas d’usage pour le rendre disponible au plus grand nombre. Les produits existent et, de façon <em>ad hoc</em>, tout cela peut se faire. Pas mal d’entreprises, dans le monde de l’IA, font d’ores et déjà des choses.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Est-ce que, c’était l’autre sujet que je voulais qu’on évoque, ça va rendre les hôpitaux – je pense surtout aux hôpitaux, mais ça concerne tous les acteurs de santé – plus vulnérables à des attaques ? On parle beaucoup de cybersécurité. Je me posais une question, je crois que je l’avais posée quand on a préparé : selon toi, quelles sont les causes des attaques que subissent les hôpitaux aujourd’hui ? De ce que je comprends, ce sont surtout des rançons : on chiffre les données, on demande rançon. D’ailleurs, est-ce que, aujourd’hui, ce sont des rançons qui sont payées et par qui ? Est-ce que ça bloque l’hôpital ? Je me demande si des patients ont des chances de survie amoindries à cause de ça. Quel était l’impact ? Je ne sais pas si tu as une idée précise de ça, mais je suis vraiment très curieux de comprendre un peu plus ce sujet très opaque des attaques de cybersécurité, puisqu’on en entend beaucoup parler dans les médias. Concrètement, qu’en est-il ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Peut-être, juste avant, quelques généralités sur les hackers dans le sens déformé du terme, puisque un hacker c’est un informaticien. En français, le hacker a d’abord été le geek à capuche qui voulait éprouver la protection d’un système d’information, dont le seul but était de l’éprouver et ensuite d’annoncer, avec fierté, qu’il avait pu contourner tout cela, et ça s’arrêtait là.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Il n’y avait pas forcément d’exploitation derrière.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>On n’y est plus, c’est fini ! Peut-être qu’il y en a encore qui jouent à ça, mais, en fait, ce n’est pas ça qui pose problème.<br/><br />
Au niveau cyber, il y a deux risques, aujourd’hui, qui sont beaucoup plus importants : il y a le risque étatique. On en entend parler de temps en temps, mais, forcément, tout cela est secret. Il y a ce risque-là, de toute évidence, et le risque qui explose c’est le risque, j’allais dire, mafia. En fait, c’est juste un business. Ça peut, potentiellement, apporter beaucoup d’argent aux malfrats, donc ça explose.<br/><br />
Pourquoi je dis cela ? En fait, ces gens-là vont chercher là où c’est facile et là où il y a de l’intérêt. Le risque est lié au taux de convoitise des informations que l’on possède ou est lié au niveau de dégâts que l’on peut potentiellement créer. Pourquoi ? Parce que, de toute façon, quand on est là, on a une pression phénoménale pour obtenir de l’argent. Tu parlais des rançons, on y reviendra.<br/><br />
Dans la sphère santé, le potentiel image ou dégâts à créer est tellement énorme que ça attire ces groupes-là pour attaquer, parce que s’ils arrivent à attaquer, ils imaginent avoir une bonne chance d’en retirer de l’argent. Ils ne font ça que pour du business, il ne faut pas se leurrer. Les données de santé sont extrêmement précieuses et puis il y a l’aspect que tu évoques. Si je condamne l’informatique d’un hôpital, qu’est-ce qui se passe ? Pour les quelques cas qui se sont présentés, c’est le déclenchement du plan blanc : les personnes ne sont plus soignées en local et vont ailleurs.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>C’est-à-dire un plan blanc ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Je suis pas un fin spécialiste, mais un plan blanc ça veut dire que la patientèle est détournée de cet hôpital pour aller dans un autre hôpital, parce que cet hôpital-là ne peut plus rendre le service parce que son système d’information est bloqué et, plus grave encore, en fait tous les équipements. Ils sont informatiques, donc s’ils ne fonctionnent pas, si l’IRM ne fonctionne pas, si le scanner ne fonctionne pas, si l’équipement radio ne fonctionne pas, tout cela est à base d’informatique, eh bien le service n’est pas rendu.<br/><br />
Pourquoi sont-ils attaqués ? Parce que le pouvoir de nuisance est grand si on arrive à attaquer, donc la capacité à arriver à leurs fins est énorme.<br/><br />
Est-ce que les rançons sont payées ? Je ne sais pas y répondre. La doctrine État est de dire que la sphère publique ne paye pas de rançon. Je ne sais pas en dire beaucoup plus.<br/><br />
Ce sont donc des cibles privilégiées, c’est pour ça qu’ils sont attaqués.<br/><br />
Après, les systèmes d’information, ou les DSI des hôpitaux, sont de taille de taille raisonnable. Est-ce que, compte-tenu de ce que je disais tout à l’heure, ils ont la capacité, tous les moyens ou toutes les ressources pour couvrir la sécurité du sol au plafond, c’est un peu compliqué ! Et oui, je pense que le <em>cloud</em> est de nature à les aider, s’il est de confiance, ce n’est pas la garantie absolue, parce que sur un SecNumCloud tu crées une application qui est grande ouverte et qui expose tes données, tu as beau être sur du SecNumCloud, c’est toi qui as mis les données, qui les as exposées.<br />
<br />
==1 h 04’ 34 (relu sans audio Véro)==<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>La personne qui développe l’application peut aussi faire des…<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. Il faut être vigilant là-dessus. Le SecNumCloud apporte la garantie sur le fait que ce qui est managé par le fournisseur de <em>cloud</em> est en sécurité.<br/><br />
Donc oui, je pense que le <em>cloud</em> de confiance est de nature à les aider pour justement faire en sorte qu’ils bénéficient de ce que j’appelais les commodités et non pas les servitudes, pour se consacrer aux couches supérieures à valeur ajoutée métier dans le domaine de santé.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Aujourd’hui est-ce que tu connais des causes, des vulnérabilités qui ont permis, justement, d’attaquer les hôpitaux ? Je comprends que ce sont des cibles privilégiées parce qu’il y a un fort intérêt économique pour ces acteurs malveillants, plus que d’autres, mais comment, concrètement, arrivent-ils à les pénétrer ? Est-ce que c’est quelqu’un qui ouvre un e-mail et qui n’aurait pas dû ? Quelle est la nature de ces attaques ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Souvent ça part de cela, c’est-à-dire via un e-mail qui n’aurait pas dû être ouvert, qui, combiné au fait que cette personne-là a des accès au système d’information ou à des zones sensibles – d’où les fameux sujets que j’ai évoqués, le postes de travail qui doit être protégés –, donc le poste de travail, en fait, est infecté, donc ce virus-là va se propager et aller toucher le système d’information. Et là, quand il est dans le système d’information, il se propage un peu partout. Souvent, ça commence comme ça. C’est pour cela que l’ANSSI est extrêmement rigoureuse sur la protection du poste d’administrateur pour éviter que, par une manipulation malencontreuse, un système d’information se retrouve contaminé.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>D’où l’idée de brider les ordinateurs des personnels.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement. Brider l’accès internet, brider tout plein de choses sur les postes qui accèdent aux fonctions les plus sensibles du système d’information.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup ça contraint leur travail, c’est plus difficile.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>C’est l’éternel débat, c’est ce que j’évoquais tout à l’heure sur le HDH, c’est le débat entre les fonctionnalités et la sécurité. Il y a un moment où la sécurité ne peut pas être la variable d’ajustement et il faut la considérer comme étant un incontournable.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>On a évoqué beaucoup de sujets. Est-ce qu’il y a des choses que tu voulais évoquer et qu’on n’a pas eu temps d’évoquer ? Je pose la question. Je pose tellement de questions que mes invités, parfois, ont dit « on n’a pas parlé de ça, ça aurait été cool ! ». Y a-t-il un sujet que tu aurais voulu évoquer ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Juste à l’instant non. On a parlé de beaucoup de choses, de beaucoup de sujets passionnants et qui me passionnent. Je ne sais pas si tu as vu.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Moi de même. Peut-être, pour commencer la conclusion, donc Numspot a été créée, il y a presque un an, tu l’as déjà évoqué, aujourd’hui, où en êtes-vous ? Est-ce qu’on peut déjà bénéficier de vos offres ? Peux-tu nous en dire un petit plus sur les prochaines étapes ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Oui, bien sûr. Donc créée en février en mode start-up. Nous étions trois quand on est arrivé, nous sommes à peu près une centaine maintenant. On a la chance, compte-tenu de l’actionnariat, d’être adossés à Outscale, un fournisseur de <em>cloud</em> SecNumcloud sur les couches IaaS, très performant. On a déjà ces services-là et on peut en faire bénéficier nos clients, c’est disponible dès maintenant.<br/><br />
La finalité ce n’est pas de revendre uniquement de l’Outscale, c’est de rajouter des fonctionnalités et des services managés. On est en train de bâtir tout notre système d’information pour être fournisseur de <em>cloud</em> et d’avoir des services managés. Ils arrivent au mois de mai, c’est notre calendrier, et les premiers services managés que l’on va avoir ce sont du Kubernetes, du K8S managé, de l’Openship managé et du Postgre managé.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>D’accord. Ces services managés permettront d’aller lancer tout ça.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Exactement, c’est le début de l’aventure sur les services managés, ce sont les services qui sont les plus demandés quand on veut aller dans le <em>cloud</em>, on les a identifiés et ce sont ceux-là que l’on veut rendre en premier.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Du coup, si je reprends, pour illustrer, mon exemple, puisque c’était quand même ce qui me tenait à cœur quand j’avais lancé ma première boîte, je cherchais justement ces services-là qui n’existaient pas. Est-ce que ça veut dire que si je commençais aujourd’hui cette startup, je pourrais développer une application avec de l’IA, là, dès aujourd’hui, ou est-ce que ce serait plutôt en mai et combien de temps ça me prendrait ? Concrètement, là, je suis développeur, j’ai un projet d’une application en santé avec de l’IA, est-ce que je peux t’appeler, je décroche mon téléphone et c’est parti ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>La réponse est oui. Après, ça dépend du service que tu veux. Si tu veux une IA qui est déjà façonnée, il faut qu’on travaille un peu ensemble pour voir exactement ce que tu veux et je pense que c’est facile. En fait, ça explose tellement ! Avant juin dernier, Mistral n’existait pas. Nous sommes en février, ils ont déjà d’ores et déjà créé un modèle qui est un équivalent de ChatGPT 3.5. Je pense que ça ne va aller qu’en s’accélérant. Donc, si ce que tu as en tête c’est d’utiliser une IA, qu’on te la mette à disposition pour que tu crées des cas d’usage, je pense que ça va arriver très rapidement.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>OK. Donc ça, c’est pour cette année. Des perspectives pour les deux, trois, cinq ans, quels sont les prochains grands chantiers que tu as envie d’adresser ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Dans la poursuite des fonctionnalités, j’ai dit qu’on est loin des fonctionnalités qui peuvent exister chez les GAFAM, on commence, on va avoir une <em>roadmap</em> au gré des discussions qu’on peut avoir avec nos clients pour enrichir, émettre des services managés et servir le plus grand nombre. On commence en France et l’ambition que l’on a, dans les années à venir, c’est d’aller en Europe, le domaine que l’on veut couvrir c’est l’Europe, tu l’as bien compris. Nous sommes très orientés sécurité juridique et, en France, au niveau juridique, c’est l’Europe, donc ce que l’on fait pour la France est de nature à servir toute l’Europe.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>D’ailleurs, on avait parlé un petit peu de l’Allemagne qui a un peu cette même politique de souveraineté. On avait un peu évoqué, avec Cyprien, les différences entre la France et l’Europe. Où en est-on ? Sommes-nous les premiers ? Est-ce qu’il y en a qui vont suivre ? Est-ce qu’il y a des différences ? Est-ce que les lois sont différentes ou, plutôt, y a-t-il une tendance à bosser, à décider d’harmoniser tout ça ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Il y a des gros travaux à l’heure actuelle et des discussions au niveau Europe pour, justement, harmoniser cette vision sur la souveraineté et ce niveau de dépendance que l’on souhaite, ou pas, par rapport aux acteurs qui bénéficient de lois extraterritoriales. Ça fait partie des discussions qui sont extrêmement importantes, que l’on suit bien.<br/><br />
Je pense que l’Europe mérite cette protection-là qui, tout naturellement, va faire émerger des acteurs équivalents. C’est assez agaçant de constater que finalement, dans le monde de l’informatique, beaucoup de choses ont prospéré aux États-Unis, mais les inventeurs de tout cela venaient de l’Europe. C’est pour cela que je ne suis pas tout à fait dans la démarche qui consiste à dire qu’il y a déjà eu des investissements, que la bataille est perdue, donc arrêtons. Je suis plutôt optimiste et confiant, et on voit, aujourd’hui, que ça avance à une telle vitesse que les certitudes d’aujourd’hui ne sont pas les certitudes de demain. Encore une fois, Mistral n’existait pas en juin, ça existe maintenant, et ils ont un produit qui concurrence ChatGPT. Qu’est-ce qui fait que, en juin prochain, il n’y aurait pas une autre initiative qui va permettre de faire émerger quelque chose qui n’aura pas à rougir de ce qui se fait par ailleurs ?<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Je suis d’accord avec toi, ça bouge très vite et dans le bon sens. Je suis plutôt optimiste.<br/><br />
Dernière petite question, je voulais changer un petit peu. Je te pose la question : si tu étais ministre de la Santé, qu’est-ce que tu changerais ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Oh là ! Belle question.<br/><br />
Déjà, première réponse, je ne serai pas ministre de la Santé. Tu as bien compris que j’ai une sensibilité particulière sur les données santé, j’ai une formation d’ingénieur, je ne suis pas indifférent aux progrès technologiques pour faire en sorte que la santé puisse bénéficier de tous les projets, de toutes les technologies qui existent. Pour moi, l’enjeu important sur cet aspect-là c’est de pouvoir combiner les deux et de pouvoir les combiner de façon astucieuse et intelligente. Il faut donc trouver le juste équilibre entre tout ce qu’apportent les nouvelles technologies et la sécurité. Tu as donc bien compris que j’accorde une importance pas totalement nulle à la sécurisation. Si je devais faire le constat, en tant que ministre de la Santé, que j’aie besoin de fonctionnalités qui ne sont pas sécurisées comme je le souhaite, alors je mettrais de l’énergie ou je ferai en sorte de pouvoir faire développer ces fonctionnalités – il ne doit pas y en avoir trente-six mille et on peut commencer de façon raisonnable –, sur du souverain et du sécurisé. Et arrêtons d’être dans le mode qui est « à vous de prouver que vous êtes au niveau pour qu’on vienne vous voir ». On sait que la réponse à cette question-là est simple : des acteurs ont mis des milliards sur la table, il sera impossible de les rattraper. Donc sortons de cela, la souveraineté est un enjeu ; l’enjeu technologique et le progrès dont doivent bénéficier la santé sont extrêmement importants, faisons en sorte de favoriser l’émergence de ces fonctionnalités sur du <em>cloud</em> sécurisé.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Très clair.<br/><br />
Alain, merci beaucoup pour ton temps, pour cet épisode, une discussion effectivement passionnée et passionnante.<br/><br />
Où est-ce qu’on peut te retrouver ? Déjà Numspot, numspot.com ?<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Effectivement, numnspot.com, on a un très beau site, on participe à des événements ; la semaine prochaine je vais participer à une table ronde sur la santé, tendance e-santé, à station F. Nous serons présents à SantExpo. On suit tout cela ; la santé fait partie de nos cibles, il n’y a pas que la santé, on regarde aussi d’autres d’autres secteurs, mais c’est une belle cible qui est importante pour nous. Nous sommes déjà positionnés dans le secteur public – juste pardon, une petite parenthèse et un instant de pub. On sait que les centrales d’achat c’est extrêmement important pour les services publics parce que quand on est dans les services publics, il faut un marché et si on n’a pas un support contractuel on n’arrive pas à passer la commande. Les centrales d’achat sont de nature à faciliter la vie des acheteurs publics. La CAIH, la centrale d’achat qui sert toute la sphère hospitalière, a passé un marché et, depuis octobre dernier, on a réussi à avoir un marché chez eux. C’est-à-dire qu’un marché a été gagné par Sopra et permet à l’ensemble des adhérents de la CAIH, c’est-à-dire de la sphère hospitalière, d’aller taper à la porte de Sopra, on fera en sorte que Sopra aille taper à la porte de tout le monde, mais d’aller taper à la porte de Sopra pour les faire bénéficier du <em>cloud</em> Numspot. D’ores et déjà on a cela, nous sommes installés, on peut d’ores et déjà rendre des services à toute la sphère hospitalière sur ce sujet-là.<br />
<br />
<b>Thomas Walter : </b>Très bon sujet, effectivement. J’en avais fait aussi les frais dans mon expérience précédente.<br/><br />
Très bien. Merci beaucoup pour ton temps. Je te souhaite déjà bon courage et bonne chance pour la suite, on va suivre ça de près.<br/><br />
À mes auditeurs, je propose de suivre Alain et Numspot. N’hésitez pas à vous abonner pour suivre les prochains épisodes et je vous dis à très bientôt.<br/><br />
Salut Alain.<br />
<br />
<b>Alain Issarni : </b>Merci.</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_diffus%C3%A9e_mardi_19_mars_2024_sur_radio_Cause_CommuneÉmission Libre à vous ! diffusée mardi 19 mars 2024 sur radio Cause Commune2024-03-12T14:52:07Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-19-mars-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Mars 2024 »</p>
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<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
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Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-19-mars-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Num%C3%A9rique_:_%C2%AB_On_a_besoin_des_femmes_!_%C2%BBNumérique : « On a besoin des femmes ! »2024-03-09T16:09:24Z<p>Morandim : </p>
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<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Numérique : « On a besoin des femmes ! »<br />
<br />
'''Intervenant·e·s :''' Marta de Cidrac - Manon Dubien - Guy Mamou-Mani - Caroline Ramade - Delphine Sabattier<br />
<br />
'''Lieu :''' Podcast <em>Politiques Numériques</em>, alias POL/N<br />
<br />
'''Date :''' 8 mars 2024<br />
<br />
'''Durée :''' 50 min<br />
<br />
'''[https://audio.ausha.co/WxX1jHD4lk19.mp3 Podcast]'''<br />
<br />
'''[https://podcast.ausha.co/politiques-numeriques/numerique-on-a-besoin-des-femmes Présentation du podcast]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' À prévoir<br />
<br />
'''NB :''' <em>Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
==Description==<br />
<br />
Il y a 52% de femmes dans le monde... seulement 15% dans l'Intelligence artificielle !<br/><br />
Émission spéciale de <em>Politiques Numériques</em> pour la Journée internationale des droits des femmes.<br/><br />
Quelle est la place des femmes dans les métiers et les filières technologiques ? Quelles actions politiques, législatives, pourraient s’avérer utiles ?<br />
<br />
==Transcription==<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Bonjour à tous. Vous écoutez <em>Politiques Numériques</em>, alias POL/N. Je suis Delphine Sabattier.<br/><br />
Aujourd’hui, émission spéciale parce que demain, non, aujourd’hui, à l’heure où vous écoutez, vous, cette émission, c’est la Journée internationale des droits des femmes, alors on va parler de la place des femmes et, même au-delà, de l’importance de la mixité, de la diversité dans les métiers et les filières technologiques et puis des actions politiques, peut-être même législatives, qui pourraient s’avérer utiles dans ce domaine.<br/><br />
Mon invitée politique, aujourd’hui, Marta de Cidrac, sénatrice LR des Yvelines. Bonjour.<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Vous avez été la secrétaire de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes et puis, aujourd’hui, vous êtes surtout une fidèle de tous les événements, de toutes les initiatives autour des femmes dans le numérique, dans la tech. Vous êtes notamment la marraine de la dernière édition des Trophées Européens de la Femme Cyber, d’ailleurs, on a une représentante du CEFCYS [Cercle Femmes Cybersécurité] que je vais présenter dans quelques instants. Comment en êtes-vous venue à vous impliquer autant sur cette question de la mixité des femmes dans le registre des technologies, dans ce domaine particulier ?<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>En fait, je dirais que cela s’est presque imposé à moi. Avant même de devenir sénatrice, donc membre de la Délégation aux droits des femmes entre 2017 et 2020, comme vous l’avez rappelé, j’observais que, dans beaucoup de domaines, la place des femmes n’était pas tout à fait à la hauteur à laquelle on espérait qu’elle le soit et le numérique m’a happé. Vous voyez que nous sommes dans une époque où, en fait, tout devient numérique, tout devient tech, tout devient objet connecté, tout devient réseaux et médias. Je n’ai absolument aucune expertise dans ce domaine d’un point de vue technique, moi-même je suis architecte de métier. En revanche, il me semblait fondamental de pouvoir informer, expliquer à nos jeunes femmes quels sont les enjeux derrière les métiers de la tech pour les femmes de manière spécifique – nous sommes le 8 mars, il est important de le rappeler –, mais aussi, plus amplement, pour notre pays et pour, en fait, tout ce qui aujourd’hui devient très prégnant dans notre société, à savoir l’intelligence artificielle. Ce n’est qu’un aspect de tout ce qui est tech, en matière numérique, je pense qu’on va revenir là-dessus, on voit bien qu’il y a énormément de biais qui sont liés, en réalité, à nos sociétés qui, aujourd’hui, s’interrogent beaucoup sur ces sujets-là et cette intelligence artificielle devient un outil pour nous tous aujourd’hui, y compris pour les pouvoirs publics. Or, beaucoup de biais sont encore présents, y compris dans l’intelligence artificielle, à travers les informations de cette intelligence artificielle générative que l’on connaît tous et qui, aujourd’hui, reproduit des stéréotypes dont on voudrait véritablement ne plus avoir à parler.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Également en studio avec nous, Marta de Cidrac, nous avons Manon Dubien. J’imagine que vous vous connaissez bien, toutes les deux, puisque, Manon, vous êtes la vice-présidente du CEFCYS, le Cercle des Femmes de la Cybersécurité, vous êtes chargée des affaires de certification de cybersécurité, au sein d’un grand groupe, à titre professionnel, mais, à titre plus personnel vous êtes très engagée en faveur de l’inclusion dans la filière de la cybersécurité. Comment en êtes-vous venue justement, à rencontrer Marta de Cidrac, à l’impliquer dans vos événements ?<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Bonjour. Merci de me recevoir, je suis ravie.<br/><br />
C’est vrai que cela fait plusieurs années que l’on connaît Marta. Quand je dis « on », c’est le Cercle des Femmes de la Cybersécurité puisqu’elle est très impliquée avec nous, elle nous soutient sur nos événements, notamment notre événement phare dans le domaine de la cybersécurité qui est le Trophées Européens de la Femme Cyber, à l’échelle européenne, quand même, et, à ce titre, nous avons des marraines tous les ans, donc on a le plaisir d’avoir Marta.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est difficile de trouver, chez les politiques, des personnalités impliquées ?<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Surtout que nous sommes une association apolitique, nous sommes vraiment dans les actions de terrain, donc tout le monde est bienvenu parmi le CEFCYS et c’est très important, quand même, d’avoir des soutiens politiques, puisque nous n’avons pas cette influence-là. Pour porter vraiment cette voix d’inclusion dans la cybersécurité, il est primordial d’avoir quelques politiques qui nous soutiennent, c’est pour cela que nous sommes ravies.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>À côté de vous, vous voyez un homme quand même en studio, aujourd’hui. Guy Mamou-Mani, merci. Bonjour.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Entrepreneur, <em>business angel</em>, prof en école de commerce, conférencier. Vous avez coprésidé pendant une vingtaine d’années l’une des premières entreprises françaises de services numériques, le groupe Open. Vous êtes aussi passé par la présidence du Syntec Numérique est devenu Numeum. Vous avez été le vice-président du Conseil national du numérique, pendant un an ou deux, c’est ça ?<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Oui, pendant ans deux ans.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Pendant deux ans. Vous avez récemment publié <em>Pour un numérique humain</em>, aux éditions Hermann, et vous êtes le cofondateur, c’est aussi mais principalement pour cela, je dirais, que je vous ai invité, de ce mouvement #JamaisSansElles. Qu’est-ce qui fait qu’un jour vous vous êtes dit « tiens, il faut absolument, désormais, que quand on nous sollicite pour des interventions publiques, qu’on n’y aille pas juste entre hommes, qu’on ait aussi des femmes à nos côtés. » ?<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Tout a commencé quand j’étais président du Syntec Numérique ; j’avais lancé une commission, Femmes du numérique. On avait fait une étude, à l’époque, qui reste encore valable, malheureusement, sur la présence des femmes dans le numérique. On avait trouvé qu’il n’y avait que 27 % de femmes dans l’industrie du numérique et encore, j’insiste toujours pour préciser que ce chiffre est arrangé, parce que, dans ces 27 %, vous avez le marketing, toutes les fonctions transversales, et si on se cantonne à la partie technique, en particulier à l’intelligence artificielle, comme le dit Marta, on se retrouve entre 10 et 15 %. Je suis dans des conseils d’administration ou d’orientation de l’EPITA [École pour l’informatique et les techniques avancées], ESIEA [École supérieure d’informatique électronique automatique], toutes ces écoles d’informatique, et c’est dramatique parce que ces chiffres ne s’améliorent pas.<br/><br />
En fait, dans cet engagement depuis 15 ans, je me suis retrouvé une fois devant une situation, avec un échange de tweets, où on mettait en avant qu’il y avait à l’Élysée une table ronde qui parlait du numérique avec 12 hommes. J’ai eu cette réaction instinctive de dire « à partir de maintenant, je ne participerai plus à une table ronde, une émission de radio ou de télé, s’il n’a pas au moins une femme. » Il faut expliquer pourquoi. J’ai la conviction qu’une jeune fille qui va passer le bac, qui est excellente dans les matières scientifiques si, chaque fois qu’elle voit une table ronde, une émission sur le numérique où il n’y a que des hommes, elle dit « ce n’est pas pour moi ». On a donc cette nécessité de mettre en avant des rôles modèles de façon à attirer des jeunes filles dans ces métiers qui sont si importants, comme on l’a déjà expliqué maintes fois.<br/><br />
Je tiens quand même à dire que cette association s’est parfaitement développée avec deux femmes fantastiques qui sont Tatiana Salomon et Natacha Quester-Séméon, qui ont fait un travail extraordinaire, et, maintenant, je crois qu’il y a près de 500 hommes qui ont signé de cet engagement, ce qui est énorme.<br/><br />
Je voudrais dire aussi que j’ai soutenu le CEFCYS depuis le début, d’ailleurs j’ai été membre du jury des trophées et je soutiens toutes les affaires qui s’adressent au numérique.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est finalement un petit monde parce que vous connaissez aussi très bien notre intervenante à distance, Caroline Ramade.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Évidemment !<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Bonjour Caroline.<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>Bonjour.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Merci beaucoup d’être connectée dans <em>Politiques Numériques</em>. Vous êtes ancienne responsable de l’innovation de la mairie de Paris et directrice générale de WILLA, ex Paris Pionnières, qui est le plus grand incubateur de femmes fondatrices en Europe et puis vous avez lancé 50inTech, en 2019, avec cette volonté de créer le réseau de référence des femmes dans la tech. Votre objectif, surtout, tient dans ce nom, 50inTech, arriver à ce 50 % de femmes dans la tech, dans les métiers technologiques, dans cette filière. Je précise que vous êtes aussi administratrice du ONU Femmes France depuis 2018. Est-ce ce que vous avez vu les choses évoluer depuis 2018/2019, Caroline ?<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>On va essayer d’être positif. Les chiffres n’ont malheureusement pas beaucoup évolué quand même, on reste à 22 % de femmes dans des rôles techniques en Europe, 17 % en France. Je pense que ce qu’on a vu évoluer, c’est la question de la prise de conscience, et la prise de conscience aussi des entreprises, qu’elles avaient un rôle énorme à jouer. Quand j’ai monté 50inTech qui, aujourd’hui, crée des solutions tech pour féminiser la tech – on a une plateforme, qui s’appelle Gender ??? [8 min 50], qui permet d’aller sourcer des profils tech en France et en Europe, et on a développé un Gender Score qui permet aux entreprises, basé sur leur data et leur politique, d’aller leur faire de la recommandation d’actions basées sur ce qu’on a vu qui marchait le mieux, donc de les ranker aussi par rapport à des entreprises tech en Europe, pour comprendre là où elles pouvaient évoluer.<br/><br />
Ce chiffre qui est absolument choquant et qui existe depuis quelques années, c’est qu’on a une femme sur deux qui quitte après 35 ans pour des raisons de discrimination au travail et dans la cybersécurité, puisque on a des membres éminents chez 50inTech, je crois que c’est encore pire, je crois qu’elles quittent après trois ans d’expérience.<br/><br />
En fait, il y a, on va dire, quatre problématiques majeures qui les font quitter la tech : elles sont bloquées dans leur carrière, il y a un manque de progression des femmes dans les carrières tech, ce qui impacte la question du salaire, il y a 19 % d’écart de rémunération inajustée en Europe, ce qui plus que la moyenne européenne qui est à 13 % pour le reste des professions et à 5 % compétences égales, expériences égales, ce qui, dans des carrières pénuriques, ne devrait pas exister.<br/><br />
Le troisième point c’est un problème de flexibilité et d’équilibre vie pro/vie perso, puisque les politiques parentales ne sont pas bien mises en œuvre avec des moyennes d’âge qui sont souvent autour de 29 ans.<br/><br />
Dernier point. Dans les univers où vous avez 80/90 % d’hommes, les stéréotypes s’appliquent et les remarques sexistes sont très communes avec, aussi, une remise en cause de leur légitimité à être dans la tech, ce qui les fait partir.<br/><br />
On a donc un enjeu de rétention et là je voudrais apporter un message d’espoir. Aujourd’hui, on lance un mouvement qui s’appelle #NoWomenNoTech, qui se base aussi sur la dernière étude de McKinsey qui, je pense, est assez fondamentale. On parle beaucoup d’éducation, ce qui est nécessaire et là je rapproche tout ce qui est dit sur la nécessité d’amener les jeunes filles à la tech, mais tant qu’on n’aura pas des rôles modèles que sont les mères, les cousines, les tantes, les copines, qui sont heureuses dans cette industrie, en fait le <em>butterfly effect</em>, l’effet papillon, ne fonctionne pas.<br/><br />
Cet enjeu de la rétention des femmes et de la promotion des femmes dans l’écosystème est clé pour créer ces rôles modèles, donc amener ces jeunes filles pour avoir plus de femmes dans les conférences, plus de femmes dans les entreprises, plus de femmes à haut niveau, partout. Il y a trois leviers dans cette étude de McKinsey qui s’appelle « Comment closer la pénurie de talents en Europe ». Elle démontre qu’on pourrait atteindre 3,9 millions de talents en plus rien qu’en focussant sur la rétention à trois endroits :<br />
<ul><br />
<li>créer des structures inclusives, donc accélérer le changement de politique interne dans les entreprises et veiller à ce que les questions de harcèlement soient réglées, tout ce que je viens d’évoquer, en parlant des salaires, etc. ;</li><br />
<li>le deuxième point c’est les promouvoir, on a seulement une femme sur six exécutive en Europe dans la tech alors qu’elles sont plus en bas de l’échelle, ce n’est pas normal, il y a une déperdition, donc il y a un biais, quelque part, qui ne les fait pas progresser et le premier rang managérial est impacté ;</li><br />
<li>le troisième point c’est qu’on a des jeunes filles qui font des STEM, aujourd’hui, mais qui se retrouvent dans des écoles assez masculines et qui n’ont pas envie de rejoindre ces entreprises parce qu’elles ne leur donnent pas envie d’y aller. Donc changer la culture, leur dire qu’elles vont être traitées différemment, qu’elles vont avoir des perspectives extraordinaires parce que la tech est extraordinaire.</li><br />
</ul><br />
Eh bien avec ça, dans les calculs de McKinsey, je vous ramène à cette étude, on pourrait atteindre 47 % de femmes dans la tech d’ici 2050, juste en travaillant le biais, l’attaque de la rétention et de la promotion des femmes et l’attraction des femmes qui sont aujourd’hui dans les STEM et qui ne vont pas vers la tech.<br/><br />
Je pense que c’est vraiment un point essentiel dans le débat. La responsabilité sociétale des entreprises qui sont dans ce secteur est essentielle.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Vous disiez, Caroline, qu’on avait vraiment un problème, en particulier dans la cybersécurité, pour retenir les femmes tout au long de leur carrière. Je voulais vous faire réagir, bien évidemment, Manon. Êtes-vous heureuse, déjà, comment ça se passe ?<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Dans mon domaine, oui, très heureuse, je suis toujours la seule fille. Mais c’est vrai qu’on ne voit que 14 % de femmes dans la cybersécurité, maintenant 17, ça évolue très doucement, trop doucement. Pourquoi les femmes se rejoignent-elles dans des associations ? Pour se soutenir, parce qu’elles n’ont pas ce soutien-là en entreprise, il y a une réelle souffrance et je rejoins totalement Caroline là-dessus. On voit que les entreprises, bien souvent, ne font absolument aucun effort pour intégrer les femmes.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>J’ai reçu, dans une autre émission, Fanny Forgeau, qui a d’ailleurs été célébrée lors des Trophées Européens de la Femme Cyber et, justement, j’ai bien aimé qu’elle nous dise « pour moi tout va bien. Je m’amuse dans mon job, je suis heureuse de travailler dans la cybersécurité, on est bien accueilli. » Alors, visiblement, elle est bien tombée !<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Elle est très bien tombée.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Mais ce n’est pas toujours le cas.<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Elle a été aidée par les hommes, vraiment.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est ce qu’elle raconte.<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Il y a vraiment une mentalité qui est extraordinaire chez Yogosha chez qui elle travaille.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>On a besoin de ces rôles modèles, on nous dit que c’est aussi une question de responsabilité sociétale des entreprises.<br/><br />
Du côté du politique, comment peut-on s’emparer de ce sujet ?<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>On peut s’emparer de différentes façons. Je souscris totalement à l’analyse qui a été faite, évidemment, on ne peut pas la nier.<br/><br />
Je pense qu’il y a le sujet, évidemment, de l’aval, c’est-à-dire une fois que les femmes sont formées, quelles perspectives de carrière ont-elles dans ce domaine-là ? Mais je pense qu’il y a aussi tout le travail que les pouvoirs publics doivent faire en amont, à savoir, vis-à-vis de nos jeunes filles et de nos jeunes garçons. Je crois que c’est fondamental et il faut le rappeler. Je dis volontairement « jeunes filles et jeunes garçons » parce que je crois que c’est un sujet qui nous concerne tous et qui nous concerne tous en tant que parents au moment de l’orientation vers les formations que l’on donne aux petits garçons ou aux petites filles.<br/><br />
Par exemple, lorsqu’on va à un salon d’étudiant où les écoles essayent d’attirer telle ou telle jeune profil, inscrire telle ou telle jeune fille, jeune homme, on observe, on voit souvent que les parents n’orientent pas leurs filles vers ces métiers-là. Je crois que c’est un vrai sujet sociétal.<br/><br />
Pour répondre à votre question : comment moi, par exemple en tant que législateur, en fait comment les pouvoirs publics peuvent-ils se saisir de ce sujet-là ? Je crois qu’il est fondamental de rappeler deux choses.<br />
C’est vrai que ce n’est pas forcément dans notre culture française, mais très tôt, dès l’école – le collège, le lycée, je ne vais pas dire que c’est presque trop tard –, mais dès le début de la scolarité, l’école républicaine, l’école de la France, doit pouvoir donner cette perspective aux jeunes garçons comme aux jeunes filles en leur expliquant deux choses : d’une part on a besoin des jeunes femmes, on a besoin de cette ressource-là, 50 % de la population, voire un peu plus, est féminine, comment se passer de cette manne, en fait de toute cette matière grise qu’on perd pour la suite ; et puis deuxième sujet d’information, c’est que ce sont des métiers qui payent bien, ce sont des métiers qui attirent. Or, nous sommes encore dans une société dans laquelle il y a le patriarcat, pardon cher Guy, qui est encore omniprésent. On parle encore de « chef de famille », c’est quand même quelque chose qui n’est pas tout à fait anodin dans l’imaginaire global que nous pouvons tous voir, entendre, y compris dans nos propres familles.<br/><br />
Donc à un moment donné, je crois que pour les femmes, au-delà même du secteur de la tech, les pouvoirs publics doivent s’en saisir : il faut qu’on explique à tout le monde, garçons et filles, « va dans ce secteur-là parce que c’est important ». On reviendra aussi sur les biais. Je reprends, par exemple, l’intelligence artificielle : les gens qui travaillent là-dedans sont eux-mêmes complètement déformés par les biais sexistes de leur propre éducation. Comment voulez-vous que l’intelligence artificielle ne devienne pas, elle-même, sexiste ? Premier sujet : il nous faut des femmes dans ce domaine-là, au plus haut niveau, dans l’opérationnel lui-même. Il faut que les pouvoirs publics trouvent les moyens de les encourager à travers des textes, à travers peut-être des contraintes légales, il faut y réfléchir très sérieusement.<br/><br />
Le deuxième sujet ce sont les finances. Je plaide, depuis toujours, quel que soit le secteur : il faut absolument expliquer aux jeunes femmes que ce n’est pas tabou de vouloir bien gagner sa vie. L’émancipation de la femme passe par là. Je viens d’un secteur, le bâtiment, je suis architecte de métier et, à un moment donné, vous avez peut-être lu, entendu cela, dans les 80/90 on disait « waouh, génial, la profession d’architecte se féminise terriblement, génial ! ». En fait on voit bien que ça correspondait à une période où cette profession-là se paupérisait.<br/><br />
Cette petite anecdote, cette petite alarme qu’il faut que nous ayons tous en tête : l’émancipation des femmes, quel que soit le domaine, va passer aussi par l’émancipation financière et la tech, pour moi, est un excellent vecteur, d’abord parce qu’on a besoin de femmes et aussi parce que, je le dis toujours aux jeunes femmes « ça paye bien, allez-y mesdames, allez-y ! »<br />
<br />
==18’34==<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Il y a cette partie sensibilisation qui est importante, mais est-ce qu’il faut aller au-delà, justement ? Est-ce qu’il faut imposer des contraintes sur cette mixité dans les entreprises ? Jusqu’où doit-on aller ? La question des quotas est une question récurrente, qui revient sans arrêt sur la table, je voulais avoir votre avis Guy, parce qu’un chef d’entreprise a un paquet de contraintes. En a-t-on besoin de davantage ? Est-ce que ça fait partie des priorités ?<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Je voudrais d’abord dire, pour rebondir, c’est qu’on est quand même à l’aube d’un nouveau monde. Il est absolument impératif que les femmes se mobilisent pour être actrices de la construction de ce nouveau monde, c’est en ça aussi que c’est important. Vous avez bien voulu citer mon dernier livre <em>Pour un numérique humain</em>, le sous-titre c’est <em>Les 8 conditions d’une transformation réussie</em> et une des conditions, c’est bien celle-là, je l’ai mise en avant parce que ça m’a paru impératif.<br/><br />
Alors quels sont les moyens et, en particulier, législatifs ?<br/><br />
D’abord, moi j’étais contre les quotas. Grosse discussion avec ma femme qui, elle-même, est contre.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Alors ça va ! Vous étiez d’accord.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Oui, nous étions d’accord. Elle dit, comme pas mal de femmes d’ailleurs, « moi je n’ai pas eu besoin de quotas pour faire ma carrière ». Elle est devenue inspectrice de l’Éducation nationale, elle a réussi ses concours, elle dit que ce n’est pas la peine. Au début, j’étais d’accord avec elle, et puis il y a une réalité qui s’impose. On a vu que grâce à la loi sur les quotas dans les conseils d’administration, on est arrivé, en France, à peu près à 50 %, pas tout à fait, à un peu moins, mais on venait de 4 %. Il y a quand même une réalité, sinon on va attendre deux siècles pour que ça se fasse, donc, maintenant, je suis partisan des quotas.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>D’ailleurs même chose en politique.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Même chose en politique. Évidemment, il faut faire attention parce qu’après on vous dit « on va aller mettre des quotas dans les comex », c’est un peu plus <em>touchy</em>, parce que c’est compliqué. Par exemple, dans une profession comme la nôtre, il n’y a pas de femmes, si vous voulez mettre les dans les comex il faut qu’il y en ait plus, donc que ça vienne en amont.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Il n’y a pas de femmes ou on ne les voit pas, on ne les a pas identifiées ?<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Non. On l’a dit : dans les écoles vous êtes à 10/15 %, 15/17 peut-être. En fait, quand vous faites vos recrutements, vous vous retrouvez avec le même taux, donc au bout du compte, dans un comex, vous vous retrouverez avec deux femmes sur six, c’est ce que nous avons chez Open, même si notre directrice générale est une femme, ça prouve bien qu’il n’y a pas d’ostracisme.<br/><br />
Ce que je voudrais ajouter aussi, dans le même le même cadre, c’est que j’ai beaucoup soutenu bien qu’il était critiqué par le Medef, à l’époque, et par pas mal de chefs d’entreprise, finalement l’index Pénicaud, l’Index de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Chez Open on est, je crois, pour la septième année consécutive, à 94 et c’est quelque chose qui est important parce que ça rejoint la problématique salariale qu’il ne faut pas oublier, en effet ; Marta, vous l’avez mise en évidence, vous avez parfaitement raison. C’est bien beau de faire des déclarations sur l’égalité hommes-femmes, sur la promotion des femmes, si, au bout du compte, il y a une inégalité salariale, c’est inadmissible.<br/><br />
Et pour finir, je voudrais dire qu’on a beau faire toutes les contraintes qu’on veut, on ne peut pas forcer des jeunes filles à choisir ces métiers. Il va donc falloir se remettre en question dans nos entreprises, dans nos secteurs, dans nos associations, pour rendre ces métiers attractifs pour les femmes et ça marche. Regardez le travail qu’a fait Sophie Vigier à l’École 42. Quand elle est arrivée, je crois qu’il y avait 5 % de filles et, maintenant, je crois qu’on est à 30 ou 35 %. Elle s’est battue, vraiment de toutes ses forces, pour y arriver et elle a réussi, quand même, à faire progresser les choses. Je pense qu’on doit suivre ce chemin.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Caroline, sur cette question de la contrainte, ça peut être punitif, mais ça peut être aussi une récompense. On peut aussi encourager, par exemple par des mesures fiscales. Ça a été proposé par la Journée de la femme digitale, donner un avantage fiscal aux entreprises qui seraient les bonnes élèves en matière de mixité.<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>Oui, tout à fait. Je pense que ça serait quelque chose de bien, ne pas avoir que le bâton qui, de toute façon, démontre ses limites. Aujourd’hui l’Index de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, c’est bien, mais il a ses défauts et puis beaucoup d’entreprises savent aussi très bien le détourner, sinon on aurait plus de femmes en haut des organisations. On est en train de penser à le rendre plus transparent et je pense que la transparence est un point qui va devenir essentiel. De toute façon, avec des directives sur la transparence des salaires qui arrivent dans moins de trois ans en Europe, il y aura tout un enjeu autour de ces enjeux de transparence, donc oui, je pense que la récompense est un bon point.<br/><br />
Pour revenir juste sur ce que disait Guy sur les comités de direction, je diverge un petit peu parce que, dans des comités de direction, on n’a pas que des gens dans la tech, je pense donc qu’on peut arriver à 30 % sans trop de problèmes. Quand on voit que dans les start-ups on n’arrive pas à répondre, déjà, sur la question des <em>boards</em>. À ??? [23 min 40], on a fait passer à plus de 200 entreprises de la tech, on est à peu près à 25 %, donc elles sont dans l’illégalité, alors que j’ai, par ailleurs, au moins trois à quatre demandes par semaine de femmes top niveau qui, en plus, se sont formées au conseil d’administration qui rêve de rentrer dans ses dans ses entreprises.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est ça. Peut-être qu’il faut ratisser un petit peu plus large finalement.<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>Oui, il faut ratisser plu large, mais aujourd’hui ce sont les investisseurs qui décident, donc on prend toujours les mêmes. Et comme c’est un peu moins régulé que dans les entreprises type Open ou CAC 40, ça marche un peu moins.<br/><br />
Deuxième point. Quand vous regardez aussi dans les start-ups vous n’avez que 4 % de femmes <em>Chief Operating Officer</em>, dans les opérations, donc vous venez du business ; elles font plus de 50 % de femmes dans les écoles de commerce, donc absolument rien à voir. C’est donc bien qu’elles ne sont pas promues à la hauteur de ce qu’elles pourraient faire, il y a donc un enjeu de travailler ce champ de la promotion.<br/><br />
Si on revient aux quotas, je pense sincèrement que l’État a un énorme rôle à jouer, notamment sur les écoles. Je suis sûre que si on mettait un quota aux écoles d’ingénieurs au démarrage, si on dit qu’on est à 15 à 25, je peux vous jurer que l’ensemble des responsables d’orientation de France sauraient que c’est un métier qui est bien rémunéré, qu’il faut se bouger, et ils enverraient plus de gens les collèges et les lycées pour pouvoir jouer la donne. Donc, je serais partisane d’un quota et puis d’un changement des méthodes de concours. D’ailleurs, il y a eu une augmentation du nombre de femmes qui sont entrées dans les écoles d’ingénieur juste sur les notes, pendant Covid, entrée qui se passait par concours, parce qu’ils avaient arrêté les concours, comme par hasard ! Du coup, je pense qu’il y a un enjeu à ce niveau-là et puis, plus globalement, je voudrais remettre en perspective, parce que, en fait, cette question du manque de femmes dans la tech est très européenne et très nord-américaine. Je ne reviens pas sur l’histoire du pourquoi on n’a plus de femmes dans la tech depuis les années 80 ; dans les années 70 on avait 40 % de femmes en <em>computer science</em> aux États-Uniset c’est l’apparition de l’ordinateur personnel qui a produit une décélération jusqu’en 84, très profonde, et jusqu’en 2010 on n’a jamais augmenté les chiffres. Mais si vous allez dans d’autres pays, qui ont fait des choix massifs de formation pour des raisons culturelles ou de différenciation d’appréciation des jobs, vous allez au Maroc, en Algérie et en Tunisie, vous avez presque 50 % de femmes dans ces filières. Ils ont fait des choix massifs, il y a une culture des mathématiques, certes, il n’y a pas de biais, elles y vont, elles font math sup, math spé, elles ont deux choix : ingénierie civile ou programmation informatique. Aujourd’hui, dans l’ensemble des leaders de l’IA, beaucoup de femmes : la femme qui a inventé le métro automatique d’Amiens c’est une Tunisienne, qu’elle est allée refaire à Singapour. Et puis, vous allez en Asie du Sud-est, là vous avez 40 à 42 % en Thaïlande et à Singapour.<br/><br />
C’est pour vous montrer les stéréotypes et la perception qu’on a, très individualiste, en Europe et en Amérique du Nord des jobs et de la progression sociale ; là-bas, c’est beaucoup plus collectif. On est sur une ressource qui va être utile, donc, là, les femmes sont 40 à 42 %. Isabelle Collet a aussi démontré qu’en Malaisie où il y a eu, à un moment donné, 60 % de femmes en <em>computer science</em>, que ce métier était décrit comme un métier féminin. Alors attention, les perspectives féministes seront heurtées quand je vais vous décrire pourquoi c’est un métier féminin : ça ne requiert pas de force, c’est propre et on peut le faire de chez soi.<br/><br />
Pour vous montrer que les stéréotypes et la construction du narratif autour du geek, blanc, qui a commencé avec la constitution du hardware qui était <em>hard</em> et qui, aujourd’hui, est un software, donc devrait être <em>soft</em> effectivement, ne devrait pas demander de force, avec d’ailleurs, une méthode de langage qui pourrait intéresser des femmes qui sont très intéressés par la littérature, etc., eh bien on n’y est pas. Nous sommes extrêmement biaisés, les mères sont plus biaisées par exemple en France qu’en Russie où on sait que les professions scientifiques sont des professions d’avenir.<br/><br />
Donc je mettrais effectivement toute la chaîne de valeur, pourquoi pas.<br />
Imaginez : aujourd’hui votre enfant est hyper doué en maths, ma fille, la petite, est très douée en maths. Je dis « oui, super, les mathématiques », je la pousse. Mais, honnêtement, aller à CentraleSupélec, au plateau de Saclay, avec les cas de harcèlement sexuel, avec un directeur qui fait des choses mais pas tant que ça, vous pensez que je vais aller mettre ma fille dans l’école qui va lui demander, en plus, de ne plus vivre pendant trois ans parce que, pour rentrer dans ces écoles-là, il faut vraiment se sacrifier, il faut y aller ! Elle y va et elle n’est pas dans un endroit <em>safe</em> !<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Aujourd’hui, ces affaires sortent. Je ne sais pas, je n’ai de conseil à donner à personne, c’est votre décision parentale.<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>Je vous dis juste que, aujourd’hui, les écoles ont un rôle à jouer pour avoir plus de jeunes filles, faire de ces endroits des <em>safe places</em>.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est intéressant. C’est vrai qu’on parle effectivement de l’éducation dès le plus jeune âge, la sensibilisation des petites filles, mais c’est vrai qu’on n’a pas, aujourd’hui, de mesures qui adressent la question de l’entrée dans les écoles d’ingénieurs.<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Absolument. D’ailleurs, je voudrais prendre deux exemples, même deux anecdotes qui, effectivement, illustrent cela et sur lesquelles il va falloir que l’on travaille, peut-être même nous, au niveau législatif. Je ne suis pas certaine que ce soit toujours pertinent de tout mettre dans la loi, mais pourquoi pas, en tout cas il faut ouvrir le débat.<br/><br />
Je prends l’exemple de l’accueil, au-delà du sexisme, dans les grandes écoles. Aujourd’hui, dans les grandes écoles d’ingénieurs –~pardon, je vais être un petit peu triviale~– le nombre de toilettes pour les jeunes femmes n’est pas en adéquation avec l’accueil des jeunes femmes. C’est du quotidien.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Si on revient sur l’École 42, je crois qu’au départ il n’y avait pas de toilettes hommes-femmes.<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Pourquoi je parle de cela ? Parce que, effectivement, il y a tout le sujet qui vient d’être évoqué, du harcèlement, éventuellement du sexisme, des comportements inappropriés, cela existe. Comme vous le dites, aujourd’hui la parole se libère, donc on peut espérer que tout cela s’améliore. Mais il y a aussi l’aspect purement matériel, j’ai envie dire, de l’accueil des jeunes femmes. Je crois que là il y a une vraie réflexion à avoir. De la même manière que le législateur aujourd’hui impose l’isolation thermique, je prends cet exemple parce que ça concerne le bâtiment, on peut peut-être imposer, dans les écoles d’ingénieurs, dans les grandes écoles de la tech, que l’accueil matériel des jeunes femmes soit en adéquation avec leur genre. Il faut quand même admettre que nous n’avons pas non plus les mêmes besoins et que c’est quelque chose qui est parfaitement audible.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est un sujet qui va, finalement, au-delà de la mixité, c’est le sujet de l’inclusion de tous.<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Absolument, tout à fait. Je pense que c’est quelque chose qui est un petit peu sous les radars et je vous en parle parce que je l’ai vécu dans ma famille. J’ai des nièces qui, à un moment donné, se sont dit « non, ce truc-là ce n’est pas pour moi. Si c’est pour que je me retrouve avec une bande de, pardon, j’allais dire un gros mot, autour de moi, qui vont m’imposer leur mode de vie, jouer au foot parce qu’il n’y a que ça comme règles, ça m’intéresse pas », première chose. Mais c’est valable même dans les toutes petites classes, dans les écoles. Vous savez que dans les communes – je suis sénatrice, j’ai ce défaut-là –, quand on regarde comment la cour de récréation est divisée, aujourd’hui, on voit bien que le jeu pour les petits garçons occupe l’espace de la cour et les petites filles arrivent, dès toutes petites, à contourner cet aspect-là et se créent, en fait, une autre façon d’occuper l’espace public.<br/><br />
Je pense qu’on est au cœur même, ce que je vais vous dire est presque philosophique. La manière dont l’espace public aujourd’hui en France, je parle pour la France, je n’ai pas la prétention de savoir tout ce qui se passe dans le monde entier, pose une vraie question. À un moment donné, il faut se demander : est-ce que nos espaces publics, donc nos écoles, notamment de la tech, sont conçues, prévues pour accueillir aussi les femmes ?, au-delà de tous ces sujets qui ont aussi déjà été évoqués.<br/><br />
Je crois que c’est quelque chose qui est important et sur lequel les pouvoirs publics peuvent réfléchir et peuvent s’améliorer, c’est certain.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Caroline va nous laisser dans quelques minutes. Je voulais vous interroger là-dessus, parce que je disais que, finalement, c’est une question d’inclusion de tous les publics qui se pose aujourd’hui. Est-ce qu’il y a une spécificité, quand même, sur la question de la femme dans la tech par rapport à la question plus large de l’inclusion numérique ?, c’est-à-dire de publics de visages différents, variés, de tous horizons, de toutes origines ; l’inclusion du handicap. Est-ce que c’est le même sujet, aujourd’hui cette inclusion, au sens large que celui de la mixité ?<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>Non, ce n’est pas complètement le même sujet. Cela dit, si vous êtes une femme noire, avec un handicap, vous aurez des difficultés encore plus grandes. Aujourd’hui, on ne peut pas ??? [32 min 33] sur la question notamment ethnique. Il y a évidemment une sous-représentation complète puisque s’ajoutent, potentiellement, des questions de racisme ou de mauvaise intégration des profils en situation de handicap. Aujourd’hui, si vous regardez le handicap, visible et invisible, ce sont 12 millions de Françaises et de Français. On devrait tous avoir des personnes en situation de handicap.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Je pense aussi à l’origine sociale, tout simplement. En quoi la question de la mixité, pour vous, est particulière ?<br />
<br />
<b>Caroline Ramade : </b>La question de la mixité est particulière parce que les femmes c’est 52 % de l’humanité, donc déjà, normalement, nous ne sommes pas une minorité ; nous sommes une minorité dans la tech. Il y a déjà une espèce de chose qui est complètement contre naturelle par rapport à ça. Ensuite, beaucoup d’études ont démontré, et j’y crois fermement, que quand on commence par travailler sur le point de la mixité et de mettre les femmes dans des organisations, et là je parle de mon <em>Living Lab</em> qui était WILLA, on avait une femme, forcément, cofondatrice, on avait 50 % d’hommes et des profils extrêmement diversifiés en origine sociale, ethnique, dans l’incubateur, dans les employés.<br/><br />
Je pense que de par notre éducation qui, parfois, est d’ailleurs aussi stéréotypée, on est un tout petit peu plus dans une démarche de recrutement qui est plus large, un petit peu moins clonée, où on voit les profils de manière différente, etc. Une fois qu’on a diversifié déjà sur le genre, on peut plus facilement, en fait, adresser les autres domaines et on peut aller ouvrir.<br/><br />
Après il y a des spécificités. Vous n’accueillez pas, dans votre entreprise, quelqu’un qui a une neurodiversité ou un handicap physique de la même manière que vous allez parler de la question des femmes. De la même manière que quand vous avez des enjeux d’origine sociale, là j’aime bien parler d’équité, on n’est pas sur la même échelle ; l’échelle peut être beaucoup plus haute pour certains que d’autres. Donc, il y a des politiques qui existent pour permettre d’adapter tout ça.<br/><br />
Je crois fermement que déjà en s’attaquant à la question de la mixité on ouvre sur les autres sujets et, ensuite, il faut prendre les sujets un à un et trouver des solutions qui répondent à ça.<br/><br />
Mais 52 % de l’humanité, ça ne peut pas être 15 % de femmes dans l’intelligence artificielle, ça donne, en Autriche, pôle emploi ; le <em>chatbot</em> basé, pluggé sur ChatGPT, sur le même CV, le même diplôme, recommande à un homme d’aller vers une carrière d’ingénieur, recommande à une femme d’aller vers des métiers du <em>care</em>.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Merci beaucoup, Caroline Ramade, de 50inTech, d’avoir été avec nous dans <em>Politiques Numériques</em>.<br/><br />
Nous allons continuer un peu la conversation en studio.<br />
Guy, je vous ai vu quand même réagir sur cette histoire du manque de femmes, aujourd’hui dans les comex, qui pourrait, finalement, être réglé assez facilement ; une question de volonté nous dit Caroline.<br />
<br />
==35’ 40==<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Je comprends ce que veut dire Caroline, mais si c’est pour avoir dans les comex la DRH, la directrice marketing, ce n’est pas cela qui fera changer les choses. Pour moi il est très important de favoriser l’engagement des femmes dans la technologie, c’est un petit peu ça qui m’a fait tiquer.<br/><br />
L’autre point. Elle dit qu’il faudrait faire des quotas dans les écoles d’ingénieurs. Je pourrais être partisan. Je l’ai vécu dans la création d’une école qui s’appelle l’IA Institut, c’est formidable, c’est une école qui vient d’être créée par le groupe IONIS, pour avoir des spécialistes de l’intelligence artificielle. Bon ! Très bien. Comme j’étais au conseil d’orientation, j’ai évidemment imposé qu’on parle de la mixité depuis l’origine, en parlant de l’ADN de cette école qui doit être autour de la mixité, de l’inclusion, de la diversité. Tout le monde a dit « bien sûr, tu as raison », et ils ont démarré l’école, mais si vous n’avez pas de candidates !<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Et alors ?<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Eh bien oui, le résultat est un peu qu’ailleurs, je crois qu’ils sont à 25 %, quelque chose comme ça, mais ils sont très loin des 50 % et c’est normal puisqu’il n’y a pas de candidates. Vous faites tous les salons que vous voulez, tous les appels d’offres que vous voulez pour favoriser les candidatures de femmes, s’il n’y en a pas, il n’y en a pas ! Pour moi, le sujet essentiel, c’est d’aller le plus en amont possible, je crois que Marta l’avait évoqué.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Après, on pourrait mesurer une progression, peut-être, les efforts fournis ou les dispositifs mis en place pour essayer de travailler ce sujet de la mixité.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Je pourrais vous parler d’une autre école, l’EPITA, qui a fait d’énormes efforts depuis quinze ans et, bon, ça monte à 10 %, ça redescend ! Bref !<br/><br />
Je crois vraiment qu’il y a un souci le plus en amont possible, c’est pour cela que je trouve que les initiatives de Blanquer, à l’époque, d’introduire le coding à l’école, de faire le CAPES, l’agrégation d’informatique, sont de très bonnes choses, même si, par ailleurs il fait une grosse bêtise sur la question de l’option mathématique. Disons que plus on formera le plus tôt, pas forcément avec des écrans d’ailleurs, j’insiste là-dessus, vous savez qu’il y a des outils comme COLORI, par exemple, qui permet de faire de l’informatique sans écran dès le plus jeune âge, donc plus on favorisera cela, plus j’ai la conviction qu’au bout du compte, les jeunes filles, très naturellement, iront vers ces métiers-là.<br/><br />
Je voudrais juste faire une petite anecdote sur ce sujet. J’étais à une table ronde avec le directeur d’une école d’ingénieur qui a mis sur le tapis, justement, la proposition de Caroline en disant « dans mon conseil d’administration, j’ai dit qu’on devrait faire des quotas pour avoir plus de filles », eh bien qui s’est opposé ? La représentante des étudiants qui était une femme, qui a dit « non, il ne faut pas faire ça parce que ça va dévaloriser notre diplôme ». On a toujours cette même discussion.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Face aux quotas qui réveillent le syndrome de l’imposteur.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>D’ailleurs, je l’ai contredite. Je trouve qu’on devrait y aller quand même. Il faut savoir qu’il y a ce type de réflexe.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Manon, comment en êtes-vous arrivée à rentrer dans la cybersécurité ? Qu’est-ce qui vous a motivée ? Vous êtes notre rôle modèle aujourd’hui dans l’émission.<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Merci. J’ai toujours cherché du sens dans ce que je faisais, en tout cas en termes de travail vu que je suis chargée d’affaires. J’avais envie de vendre quelque chose qui me passionne tous les jours, donc je suis allée consciemment vers cette voie, parce que ça m’a tout de suite intéressée, passionnée j’ai vu un aspect tout à fait international. Je tiens quand même à avoir un discours très positif parce que la cybersécurité c’est vraiment la filière où il y a énormément de mixité. L’anglais est absolument obligatoire, voire l’arabe, le russe, toutes les langues pour contrer les menaces cyber sont très importantes. Concernant la mixité, on a des rôles modèles qui viennent d’absolument partout. La présidente de l’association, Nacira Salvan, vient d’Algérie, et elle est très opérationnelle. On veut voir des femmes réussir, des rôles modèles opérationnels, pour avoir envie, en fait, de suivre cette voie et de se dire « oui, nous sommes capables de réussir également ». Je pense que l’aspect rôle modèle est très important.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Quand vous avez annoncé à votre entourage que vous alliez travailler dans la cybersécurité, quelle a été la réaction ?<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Ce qui me touche beaucoup c’est que j’ai trois filles, j’espère qu’au moins une ira dans la cybersécurité. Elles me voient tous les jours épanouie dans mon boulot, donc je pense que même l’image des parents, quand on il y a une rôle modèle à la maison qui se sent épanouie dans ce qu’elle fait, elles vont se dire « oui je pourrais le faire demain ». Je suis même allée faire un atelier dans l’école d’une de mes filles pour parler de l’usage du numérique pour les enfants, ils ont adoré. Donc, vraiment, je suis d’accord sur cet aspect de communication au plus bas âge et c’est ce qu’on fait dans l’association : on fait de la sensibilisation, on forme les membres, on propose du mentorat. Donc plus on accompagne ces jeunes filles, plus les promotions de filles vont augmenter. Donc vraiment, dans les écoles, il faut qu’il y ait plus de filles, mais comment vont-elles pouvoir se sentir un peu attirées ? Déjà, il va falloir leur expliquer tous ces métiers, valoriser ces métiers qui ne sont pas que techniques, oui, il y a de la technique, mais il y a de la gouvernance, il y a du management de projet. Le champ des possibles est donc immense, en fait, dans la cybersécurité. Plus on valorise ces métiers, plus ils sont compris, et plus les jeunes filles se disent « oui je vais y aller, je vais m’éclater. »<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Je pense, par exemple, à France Travail. Aujourd’hui toutes ces reconversions s’imposent à nous, les longues carrières dans une seule et même organisation, c’est terminé. Au niveau de France Travail, est-ce qu’on a une approche spécifique sur les métiers du numérique ? Est-ce qu’on encourage les femmes ? Est-ce qu’il y a vraiment une volonté politique de pousser sur la mixité dans les filières tech ?<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Pour être tout à fait précise par rapport à votre question : non, pas spécifiquement. C’est quelque chose qui, effectivement, est évoqué, mais il n’y a pas de règles, il n’y a pas d’obligations spécifiques par rapport à cela. En réalité, quand vous avez des personnes qui recherchent un emploi, en réalité on leur renvoie un certain nombre de propositions qui existent, ou pas, et ainsi se détermine le choix.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Si c’est un algorithme qui décide quelle formation on envoie à qui, ça peut être un problème.<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>J’allais y venir, justement. Si on aborde le sujet des algorithmes, je pense qu’il faut que nous menions collectivement une vraie réflexion, y compris le législateur, puisque les algorithmes sont faits, à un moment donné, sur la base de données qui existent, qui elles-mêmes aujourd’hui, sont encore de la production humaine en tant que tel. Là-dessus il y a un vrai travail de réflexion, un vrai travail aussi de base de données que l’on a ou que l’on n’a pas.<br/><br />
Manon a évoqué les langues également, aujourd’hui, en termes de base de données, nous avons très peu de données en français. C’est aussi quelque chose qu’il faut que nous ayons en considération. On sait bien que la langue est aussi vectrice d’un certain nombre de comportements, de valeurs, et ainsi de suite. En tant que législateur, c’est un sujet qui ne me laisse pas insensible, vous vous en doutez bien.<br/><br />
Il y a aussi deux choses – pardon, je vais me répéter un petit peu –, qui me semblent vraiment fondamentales aujourd’hui, Journée du 8 mars où on s’adresse, pour beaucoup, aux femmes, mais également aux hommes.<br/><br />
Premier étage, je dirais, de la fusée : dans tous les secteurs, évidemment, il faut promouvoir la réussite de nos jeunes femmes, quel que soit le métier et, particulièrement, dans les métiers de la tech, c’est fondamental. Il faut apprendre à nos jeunes femmes, le plus en amont possible, à nos jeunes filles même, qu’il est très épanouissant – Manon l’a très bien rappelé et je la remercie – de réussir sa carrière aussi. J’utilise volontairement ce terme-là qui, parfois, n’est pas accolé au parcours d’une femme : la carrière d’une femme est épanouissante et c’est heureux, c’est heureux ! Mais aussi, derrière une carrière, il y a du pouvoir et de l’argent. Il faut aussi que les jeunes femmes aujourd’hui intègrent cela.<br/><br />
Je pense aussi que nos jeunes femmes – et nos jeunes hommes aussi, sauf que eux, par un tropisme naturel, s’y intéressent beaucoup plus –, ne sont absolument pas formés, en réalité, à l’économie ; dans la formation des jeunes collégiens dans les pays anglo-saxons, c’est quelque chose qui est, somme toute, assez naturel. De mon point de vue, c’est un véritable enjeu sociétal.<br/><br />
Deuxième enjeu très sociétal, toujours dans cette partie en amont : les parents. Il faut que les parents encouragent autant leurs garçons que leurs filles, surtout lorsqu’ils sont bons en mathématiques, lorsqu’ils sont bons dans les filières scientifiques, à y aller, indépendamment de ce qui pourrait les attendre. On entend la crainte : non, ma fille, tu ne vas pas aller dans cet univers d’hommes, tu vas te faire flinguer, ça va être difficile pour toi, laisse tomber, va vers le <em>care</em>, va vers le social, va vers le littéraire. Je pense qu’il faut véritablement se battre là-dessus. Je n’ai pas la solution ce matin, mais les pouvoirs publics doivent se saisir de ces questions-là.<br />
<br />
Pourquoi je dis tout cela ? Parce qu’il y a un véritable enjeu de société pour nous tous qui est, vous l’avez évoqué, justement, c’est pour cela que je rebondis là-dessus, que sont nos algorithmes. Aujourd’hui l’intelligence artificielle s’impose de plus en plus, y compris dans les RH. Donc, lorsque vous avez des profils qui sont identifiés et, comment dire, décrits pour embaucher quelqu’un, d’ailleurs quel que soit le poste, dans tous les domaines, sur la base d’algorithmes qui vont aller chercher l’information dans les bases qui existent, mais qui, elles-mêmes, sont encore, malheureusement, beaucoup trop imprégnées de sexisme, comment voulez-vous qu’à un poste donné on préfère une femme ? Et là-dessus nous avons aussi des chiffres, c’est un vrai sujet et ça rejoint, à un moment donné, ce que Guy évoquait : c’est que, après, on n’a plus la ressource.<br/><br />
Du coup, là je vais aller un tout petit peu à l’encontre de ce que disait Guy. L’amont, pour moi, est fondamental, il y a là, véritablement, un sujet de politique publique, je le concède, mais il y a quand même l’actuel, c’est-à-dire l’aval. C’est vrai, j’entends ce que dit Guy, mais peut-être qu’il faut jouer sur les deux tableaux : il faut quand même insuffler, je vais le dire comme ça, un tout petit peu de contraintes. C’est aussi un enjeu de pouvoir, c’est un enjeu décisionnaire, et il n’y a pas de raison que, dans un comex, ce soit que de la matière grise masculine qui fonctionne et qui décide, pour les entreprises, ce que doivent être leur stratégie ou pas. Il est fondamental que la matière grise féminine puisse aussi s’exprimer dans ces enceintes qui sont des enceintes de pouvoir, cela me semble fondamental.<br/><br />
Je pense vraiment qu’il faut jouer sur les deux tableaux : la structure, le squelette, la base et après, à un moment donné, ça ne sera même plus un sujet ; c’est un monde dont on rêve tous, mais le monde étant ce qu’il est, il faut aussi agir là, tout de suite et maintenant, même si ça peut sembler, pour certains secteurs, j’ai presque envie de dire pour tous les secteurs, une forme de contrainte. On ne peut pas le nier.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>C’est difficile de trouver des profils, des candidates, pour les Trophées de la femme cyber ?<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>Non pas du tout. Par contre, et je suis admirative de tout ce que vous avez fait, Guy, parce que ce qui est très difficile c’est de faire parler des expertes. Aujourd’hui, dans la cybersécurité, les hommes ont totalement le monopole des prises de parole, que ce soit sur les tables rondes, les conférences, tous les événements, ils ont le monopole, ils savent s’exprimer et ils ont raison d’y aller. Donc, aujourd’hui, il est important que les femmes soient intégrées dans ces prises de parole parce qu’elles en sont tout à fait capables, à la même hauteur, et surtout qu’elles y aillent à fond, qu’elles s’expriment également, comme ça on aura une parité autour des échanges, c’est très important.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Parce qu’il y a aussi une responsabilité des femmes ? Dans le #JamaisSansElles, on en parle souvent, Guy, j’ai souvent des difficultés, finalement, à faire venir les femmes autour d’une table, en plateau, en studio.<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>C’est vrai. Et les candidates des trophées sont là, il y en a beaucoup, elles seront très heureuses.<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>C’est le complexe de l’imposteur chez les femmes, c’est une réalité.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Delphine peut être témoin que j’ai refusé de venir dans une émission pour cette raison-là.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Tout à fait. Bravo<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>J’ai réussi, comme ça, à faire changer beaucoup de tables rondes. Pourquoi je voulais faire un clin d’œil : il y a une dizaine d’années, dans un salon de la cybersécurité, je me souviens que je m’étais bagarré avec l’organisateur pour qu’il invite Nasssira à une table ronde, alors qu’il ne voulait pas, c’était incroyable ! J’ai dit « il faut lui donner la parole ».<br />
<br />
<b>Manon Dubien : </b>C’est génial !<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Est-ce que vous me permettez juste une parole ? Je pense que nous, les femmes, il faut que l’on se nomme, il faut que nous soyons identifiées. On ne parle pas « des femmes », il y a des individualités. Et, en politique, c’est un exercice que je m’impose, même lorsque je suis face à une « adversaire », entre guillemets, politique : lorsqu’elle s’exprime, je la nomme, c’est-à-dire « je ne suis pas d’accord avec elle, et je la nomme ». Les hommes le font très bien, observez bien. Lorsque nous sommes dans des réunions, les hommes se renvoient la balle. Nous, les femmes, nous n’avons pas encore ce réflexe-là. Mesdames, renvoyons-nous la balle et je vous assure que ça ira quand même un petit peu mieux dans l’espace.<br />
<br />
<b>Guy Mamou-Mani : </b>Ce n’est pas ce que j’ai fait ! Vous dites « les hommes » !<br />
<br />
<b>Marta de Cidrac : </b>Non, justement, je rebondissais par rapport à ce que tu disais et qui est tout à fait vrai.<br />
<br />
<b>Delphine Sabattier : </b>Guy Mamou-Mani, notre homme modèle.<br/><br />
Merci beaucoup d’avoir été là pour ce débat assez exceptionnel en cette Journée du 8 mars.<br/><br />
Merci à Madame de Cidrac, sénatrice des Yvelines, et puis merci beaucoup à Manon Dubien. Je remercie aussi Caroline Ramade qui était avec nous tout à l’heure.<br/><br />
C’est fini pour <em>Politiques Numériques</em>. Notre réalisateur, aujourd’hui, était Stéphane.<br/><br />
Je vous donne rendez-vous dans une semaine puisque <em>Politiques Numériques</em> est hebdomadaire et surtout, pour ne rater aucun épisode, inscrivez-le dans vos favoris sur votre plateforme de podcast préférée. À très vite.</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Les_grandes_questions_juridiques_pos%C3%A9es_par_l%E2%80%99IA_avec_St%C3%A9phanie_Le_CamLes grandes questions juridiques posées par l’IA avec Stéphanie Le Cam2024-03-08T12:55:54Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/les-grandes-questions-juridiques-posees-par-l-ia-avec-stephanie-le-cam ici] - Mars 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/fada-de-data-avec-joel-gombin ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_5_mars_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 5 mars 20242024-03-04T11:59:41Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-5-mars-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Mars 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/christine-hennion-le-besoin-de-donnees-pour-piloter-les-politiques-locales ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_27_fevrier_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 27 fevrier 20242024-02-27T15:57:05Z<p>Morandim : </p>
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<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Émission <em>Libre à vous !</em> diffusée mardi 27 février 2024 sur radio Cause Commune<br />
<br />
'''Intervenant·e·s :''' Lorette Costy - Laurent Costy - Luk - Isabella Vanni - Magali Garnero à la régie<br />
<br />
'''Lieu :''' Radio Cause Commune<br />
<br />
'''Date :''' 27 février 2024<br />
<br />
'''Durée :''' 1 h 30 min<br />
<br />
'''[https://media.april.org/audio/radio-cause-commune/libre-a-vous/backups/output-2024-02-27-15h29.mp3 Podcast PROVISOIRE]'''<br />
<br />
'''[https://www.libreavous.org/201-parcours-libriste-avec-laurent-costy-chronique-de-laurent-et-lorette-costy Page de présentation de l'émission]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' Déjà prévue<br />
<br />
'''NB :''' <em>Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
==Transcription==<br />
<br />
<b>Voix off : </b><em>Libre à vous !</em>, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Bonjour à toutes. Bonjour à tous.<br/><br />
Parcours libriste avec Laurent Costy, vice-président de l’April et chroniqueur dans <em>Libre à vous !</em>, l’occasion d’en savoir plus sur son parcours personnel et professionnel. C’est le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy et aussi la chronique « La pituite de Luk ».<br/><br />
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.<br />
<br />
Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de <em>Libre à vous !</em>, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.<br />
<br />
Je suis Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April.<br />
<br />
Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.<br />
<br />
Nous sommes mardi 27 février, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast<br />
<br />
À la réalisation de l’émission aujourd’hui, Magali Garnero. Salut Magali.<br />
<br />
<b>Magali Garnero: </b>Salut.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Nous vous souhaitons une excellente écoute.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
==Chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy sur le thème « Chaloir pour deux doigts coupe fin »==<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Comprendre Internet et ses techniques pour mieux l’utiliser, en particulier avec des logiciels libres et services respectueux des utilisatrices et utilisateurs pour son propre bien-être en particulier et celui de la société en général, c’est « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy qui, aujourd’hui porte sur le thème « Chaloir pour deux doigts coupe fin ».<br/><br />
Cette chronique a été enregistrée il y a quelques jours, je vous propose donc de l’écouter et on se retrouve juste après.<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Hello Lorette ! Depuis qu’Alexis Kauffmann nous a proposé de faire une chronique en direct à la fin de la Journée du Libre Éducatif, vendredi 29 mars prochain, j’ai un peu de mal à dormir. Toi, tu as l’habitude de faire le Zénith mais moi, ça fait 20~ans que je prêche dans le désert pour convaincre les associations de migrer vers les logiciels libres. Et, en général, il n’y a pas plus de trois personnes dans la salle.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Dont deux personnes du stand de l’April à qui on a dit « il faut aller à la conférence, s’il vous plaît, parce que, sinon, il n’y aura personne dans le public ! ». Et tu exagères un peu sur le nombre de mes expériences au Zénith, je n’ai fait que trois fois de l’intérim pour le nettoyage post-concert ! Mais bon, ne t’inquiète pas, de toute façon, ce ne sera qu’un bon moment à passer. On pourra parler de logiciel libre et d’éducation par exemple.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C’est une excellente idée ! On pourra communiquer en amont sur le Mastodon de l’April. Par contre, ce ne sera plus possible sur le Raider, car l’April a, justement, décidé d’arrêter de communiquer via ce réseau social qui part en vrille depuis son rachat par ce libertarien à l’incompétence crasse lorsqu’il s’agit de comprendre ce qu’est réellement la liberté d’expression dans une société.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Ah oui, tu m’as expliqué un jour pourquoi tu appelais « Raider » ce qu’il reste de Twitter. Je résume : Twitter est devenu X, ce qui nous donne « Twix », logique ! Twix, dont le nom précédent était Raider avant 1991. CQFE, Ce Qu’il Fallait Expliquer !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Merci Lorette pour cette clarification qui n’est effectivement pas évidente quand on n’est pas dans mon cerveau. En plus, je ne peux plus inviter qui que ce soit dans ma tête, on est déjà trop nombreux là-dedans. Je rajouterais quand même que, si ça se trouve, on est à deux doigts de la fin pour Raider.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Je vais passer mon tour de joker et ne rigolerai donc pas.<br/><br />
Sinon, sur les sujets importants que sont les libertés et l’éthique dans le numérique pour lesquels on t’a accordé, à contrecœur, ce créneau de radio, tu as des choses à dire, j’espère ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Le logiciel libre, c’est bien.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Merci papa ! Tu aurais pu ajouter que le logiciel libre se définit par quatre libertés et certainement pas la gratuité qui est souvent constatée à l’usage. Mais tu préfères me laisser faire ton boulot !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Tiens, puisqu’on parle de logiciel libre, je me sens obligé de revenir sur notre dernière chronique. Comme j’avais laissé décanter ma boîte mail un peu trop longtemps, je n’avais pas vu la réponse intelligente de Stéphane Bortzmeyer à ma question stupide. Je finis par me demander si ce ne serait pas plus simple que tu fasses directement la chronique avec lui.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Ça ne me dérangerait pas ! Mais, Papa, il n’y a pas que les compétences et les connaissances dans la vie, il y a aussi, pour toi par exemple… des trucs.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Merci ! Bon, l’une des questions en suspens était de comprendre la différence qu’il pouvait y avoir entre le navigateur libre Chromium distribué par Google et Iridium.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Donc, comme le dit Stéphane, Chromium est une production Google. Ce navigateur contient donc toute l'infrastructure de surveillance de Google, couches que justement Iridium a épurées !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>De carottes, exactement ! Outre la polémique autour du fait qu’il n’était pas disponible sur le magasin d’application F-Droid.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Magasin alternatif à Google Play Store, qui propose des applications moins intrusives pour notre vie privée, je le rappelle, en passant, pour les personnes qui ne nous écouteraient pas assez régulièrement !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Il y avait la même question pour Signal, la messagerie alternative à WhatsApp : si ça ne fait aucun doute que Signal est mieux que WhatsApp pour la vie privée, logiciel libre ne veut pas dire non plus logiciel « gentil-bisounours-licorne » pour reprendre une formule de Stéphane, formule qui restera peut-être, d’ailleurs, dans l’histoire de l’informatique aux côtés de celle d’Edward Snowden sur la vie privée.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Je connais cette citation ! Tu me la lisais tous les soirs quand j’étais petite à la place de mes histoires favorites et de Desproges. Je cite de mémoire : « Dire que votre droit à la vie privée importe peu, car vous n’avez rien à cacher, revient à dire que votre liberté d’expression importe peu, car vous n’avez rien à dire. Car, même si vous n’utilisez pas vos droits aujourd’hui, d’autres en ont besoin. Cela revient à dire : les autres ne m’intéressent pas ! »<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je trouvais l’histoire du <em>Petit Chaperon rouge</em> assez peu politique, finalement, et très surcotée. Et puis, je préparais déjà ton conditionnement à ta participation choisie, mais néanmoins obligatoire, à ce podcast.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>C’est un plaisir indicible et, encore une fois, un mot que l’on n’utilise plus guère, mon cher Papa. Et pour en revenir sur la transparence, incarnée par le code ouvert, elle ne se suffit donc pas à elle-même. Tu m’avais raconté, un jour, qu’une association était transparente sur toute sa comptabilité auprès de ses adhérent et adhérentes. L’initiative est louable, mais sans formation et sans accompagnement sur les règles de comptabilité, ça peut, parfois, être même contre-productif.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui, parce que ça peut générer un faux sentiment de « sécurité », entre guillemets. Comme c’est à la vue de tous et toutes, on se dit « c’est bien », sauf que c’est un peu trop simpliste de penser comme ça. Avec cette transparence qui, en passant, nécessite l’anonymisation des données, il est nécessaire d’accompagner et de faire œuvre de pédagogie. Il est important, aussi, de bien définir qui a accès aux données, qui peut les lire, les écrire et configurer le système d’information de manière ad hoc.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Tout à fait mon capitaine ! Finalement, on peut faire un parallèle avec le développement et la maintenance du logiciel libre. C’est souvent une inquiétude des personnes qui connaissent peu les logiques, l’organisation et les conditions de développement des logiciels libres. Ils pensent que c’est Open Bar –~voir à ce sujet les communications passées pertinentes de l’April sur les liens entre Microsoft et le Ministère des Armées~– et que, donc, tout ça c’est le dawa.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non, les logiciels libres, ce n’est pas le DAWa. Éventuellement, on peut se servir de ce terme comme acronyme,<em>Digital Alternative Way</em>, mais il manquerait « pour un monde numérique meilleur », mais c’est tout. D'ailleurs, pour illustrer ça, je peux te raconter ma dernière contribution à un logiciel libre.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Oh oui ! Surjoué parce que, dans le fond, peu te chaut du verbe chaloir. Ah non, « surjoué parce que, dans le fond peu te chaut –~du verbe chaloir~– c’était entre crochets, il ne fallait pas que je le lise.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui, c’est ça, il ne faut pas lire ce qui est entre crochets. Donc, devant tant d’enthousiasme, je me plie à ta demande insistante. Petit préambule : comme j’ai des compétences relativement limitées en programmation –~changer la couleur d’affichage d’<em>Hello World</em> relève pour moi de l’exploit~–, j’ai opté pour contribuer à un projet libre par la traduction.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>J’ai souvenance que ton niveau d’anglais était a peu près du même niveau que la colorisation d’<em>Hello World</em> ! Tu es sûr que c’était une bonne idée ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui, une excellente idée même. Pour deux bonnes raisons de mauvaise foi. D’abord, j’ai choisi de traduire un tutoriel bientôt obsolète de <em>Minetest</em>, l’alternative à <em>Minecraft</em>. Donc, vraiment, peu de monde devrait être confronté à mes traductions très littéraires. Et, par ailleurs, n’importe qui peut désormais contribuer à la traduction d’un projet libre en utilisant, par exemple, LibreTranslate, outil, sous licence libre, de traduction.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Et tu as trouvé tous les diamants et tous les lingots d’or du tutoriel de <em>Minetest</em> ? Ou, finalement, tu as préféré jouer avec la forge logicielle, pas dans le jeu, mais dans la réalité, pour soumettre tes propositions de modifications ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non, mon niveau de <em>crafting</em> frise ma compétence de colorisation des mots anglais <em>Hello World</em>, mais, j’ai finalement soumis sur la forge du projet effectivement, les fichiers utiles à l’affichage des textes français. Et j’ai échangé avec le responsable de ce projet. C’est lui qui a regardé la pertinence de l’intégration de cette branche et qui a validé. Désormais, si tu joues au tutoriel de <em>Minetest</em>, les textes d’apprentissage sont en français si ton système est dans cette langue !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Finalement, la contribution, ce n’est pas sorcier, même quand on n’a pas des compétences avancées en informatique. Si on devait ne retenir qu’une seule chose de cette chronique, somme toute assez insipide, ce serait bien celle-là !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Ce n’est pas faux ! En plus, on est fier, ensuite, de sa contribution quand on sait qu’elle va servir à d’autres et qu’on a enrichi un commun numérique !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Carrément Cicéron ! C’est très différent de ce que l’on essaie chaque jour de nous faire passer pour de la contribution alors que ce n’est que de l’évaluation pour améliorer des business privés ! Je m’explique, parce que j’ai lu, dans ton expression faciale, généralement agréable, une grande dubitativité. À chaque interaction dans le Web mercantile, comme des achats sur Internet, des mails échangés avec le service après vente, etc., on est intimé, puis relancé, pour mettre un maximum d’étoiles. Et on nous vend ça comme du Web contributif. Beurk sérieux, pourquoi contribuerais-je à améliorer quelque chose au seul bénéfice financier de quelqu’un d’autre ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je confirme que tu es bien la fille de ton père, j’ai la même attitude ! Et je ne supporte pas les évaluations par étoiles où on ne peut pas s’exprimer avec des vrais mots pour dire ce qu’on pense parce qu’ils ont la flemme de lire. Bref, il y a contribution et contribution !<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>En parlant d’étoiles, on va donner rendez-vous à nos p·auditeurs et p·auditrices pour la prochaine chronique où on leur mettra encore plein d’étoiles dans les yeux !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>En leur ouvrant de belles perspectives d’alternatives libres pour leurs systèmes d’information. Bien joué pour la conclusion, je te garde pour la prochaine chronique. La bise ma puce.<br />
<br />
<b>Lorette Costy : </b>Merci. La bise mon Papa gratifiant et reconnaissant !<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Vous êtes de retour en direct sur radio Cause Commune.<br/><br />
Nous venons d'écouter une nouvelle chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy.<br/><br />
Nous allons faire une petite pause musicale.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Après la pause musicale nous aurons le plaisir d'accueillir Laurent Costy, auteur de la chronique, pour une interview « Parcours libriste ».<br/><br />
En attendant nous allons écouter <em>La Marguerite </em> par Ozabri. On se retrouve dans environ trois minutes. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>La Marguerite </em> par Ozabr.<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Nous venons d’écouter <em>La Marguerite </em> par Ozabri, disponible sous licence libre Art Libre.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Passons maintenant au sujet suivant.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Parcours libriste de Laurent Costy==<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui, aujourd'hui, sera un nouveau « Parcours libriste ». Il s'agit du cinquième épisode de ce format que nous avons inauguré lors de la précédente saison de <em>Libre à vous !</em>, l'idée étant d'inviter une seule personne pour parler avec elle de son parcours personnel et professionnel. Un parcours individuel qui va, bien sûr, être l'occasion de partager messages, suggestions et autres.<br/><br />
Notre invité du jour est Laurent Costy, vice-président de l'April et chroniqueur pour <em>Libre à vous !</em>, nous avons justement entendu, en début de l'émission, la chronique « À cœur vaillant la voie est libre » qu'il fait chaque mois avec sa fille Lorette.<br/><br />
Pour cet échange, nous avons le plaisir d'avoir Laurent au studio avec nous. Bonjour Laurent.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Bonjour à tous et à toutes.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>N'hésitez pas à participer à notre conversation au 09~72~51~55~46 ou sur le salon web dédié à l'émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat ».<br />
<br />
Sur le site de l'April, nous avons un trombinoscope où les membres qui le souhaitent peuvent apparaître et afficher une courte bio. Laurent Costy étant administrateur de l'April, plus précisément vice-président, il n'a pas le choix, il doit forcément y apparaître. Je vous lis ce qu'il écrit pour se présenter : « J’ai souhaité rejoindre l'April pour apporter mon expérience en milieu associatif et contribuer au développement de l'utilisation des logiciels libres dans les associations, dont les valeurs sont, en général, très proches de celles que l'on retrouve dans le Libre, en particulier en ce qui concerne l'éducation populaire. Je suis donc actif dans le groupe de travail Libre Association. »<br />
Tu parles de « mon expérience en milieu associatif », je pense qu’on peut partir de là. Qu'est-ce que tu as souhaité apporter à l'April et comment as-tu recueilli cette expérience ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Disons que je ne peux apporter d'expérience que sur des questions associatives, car je n'ai travaillé qu'en milieu associatif depuis le début de ma carrière professionnelle, ce serait donc difficile de faire autrement. C'est effectivement une question qui a jailli au fil de mon expérience, au début de ma carrière professionnelle.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>À quel âge as-tu commencé ta carrière associative ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>J’ai fait une objection de conscience, ça existait encore à l'époque. J'ai donc commencé mon objection de conscience en 96. On peut dire que ma carrière professionnelle a commencé à ce moment-là. J’ai fait partie des dernières personnes sous ce régime-là et puis j'ai rejoint une association qui s'appelait encore ANSTJ, Association Nationale Sciences Techniques Jeunesse à l'époque, qui est devenue, depuis, Planète Sciences, dont l'objet était de promouvoir la culture scientifique et technique auprès des jeunes, ce qu'elle continue d'ailleurs à faire aujourd'hui. C'est pendant cette période-là, qui a duré une dizaine d'années, que j'ai commencé à m'intéresser sérieusement à cette question de l'informatique libre parce que je découvrais qu’on commençait déjà à être, disons, asservis à des outils qui nous étaient imposés.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Peux-tu faire un exemple ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui. Du coup, je vais expliquer ce qui a déclenché, chez moi, cette envie d'aller un peu plus loin que de simples questions. À l'époque, on utilisait un logiciel de comptabilité qui s'appelait Ciel, je crois, et on n'avait pas pris, me semble-t-il, le support. Il fallait payer un montant supplémentaire pour pouvoir avoir le support, l'appui. Un jour, on a rencontré un souci, on a appelé l'éditeur du logiciel qui nous a répondu que, comme on n'avait pas payé le support, il ne pouvait pas répondre à la question. On nous a dit « il faut payer les 100~euros pour qu'on puisse répondre à la question ». J’ai trouvé que ça faisait cher la réponse, d'une part, et puis surtout, quelque temps après, on s'est aperçu que c'était bien un bug du logiciel et non pas un problème de notre côté qui faisait que ça ne fonctionnait pas. Donc, finalement, on devait payer pour améliorer leur logiciel et la contribution n'était pas partagée. C'est un petit peu ça, je pense, qui m'a vraiment engagé sur le chemin du logiciel libre et qui fait que je suis, encore, vice-président de l'April aujourd'hui.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Comment as-tu rencontré le logiciel libre ? Par des personnes, par des recherches sur Internet ? Des conférences auxquelles tu as assisté ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>À l'époque –~quand je dis « à l'époque », c'était au début des années 2000, l’April étant née 1996, une des premières, une des associations pionnières~–, je pense que l'écosystème du logiciel libre était relativement restreint. Il y avait l'AFUL, je pense que j'avais commencé à adhérer à l'AFUL, l'Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres, justement sur des questions d'éducation populaire. J'ai dû, sans doute, me rapprocher de Jean-Christophe Becquet qui a été président de l'April et qui, lui aussi avait un pied dans l'éducation populaire, puisqu'il travaillait, à l'époque, à la Ligue de l'enseignement dans le sud de la France. C'est sans doute par ce biais-là que j'ai commencé à appréhender l’April et que, tout doucement, j'ai rejoint l'April.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Vous étiez géographiquement voisins. Comment vous êtes-vous rencontrés ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Peut-être dans les premières réunions à l'April, je pense que c'est là que ça a matché, j'essaye de me souvenir, c’est vieux !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>C'est vieux ! Non, ce n'est pas si vieux que ça !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Il a dû y avoir une conjonction éducation populaire/April qui a fait que ça a accroché.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>À propos d’éducation populaire, c’est bien évidemment un sujet qu'on a abordé à plusieurs reprises dans notre mission, je voulais savoir ce qu’est, pour toi, l’éducation populaire, parce que je sais qu’on peut lui donner plein de définitions différentes et, en fait, en Italie, je viens d'Italie, cette expression en tant que telle n’existe pas, donc j'ai mis du temps à comprendre ce que c'était. Qu’est-ce que c’est pour toi ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je n'ai pas encore complètement compris après 30/40~ans ! C'est vrai que ça reste compliqué à expliquer simplement ; ce n'est pas bien, parce que ça n’aide pas les gens à comprendre. Du coup, je me suis dit que j’allais prendre quelques citations de gens qui ont vraiment réfléchi à la question de l'éducation populaire, ce sera plus simple, plus clair que mes propos, parfois je m'emmêle dans mes phrases !<br/><br />
Donc Françoise Tétard, qui a été une historienne de l'éducation populaire, qui est décédée au début des années 2010, expliquait justement que « l'éducation populaire est, par définition, indéfinissable, et c'est un ressenti partagé ». Donc, au moins, tout le monde est d'accord pour se dire que c'est compliqué.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Donc je n'étais pas folle, c'est vrai !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Elle précise, après : « L'éducation populaire est née plusieurs fois depuis un siècle. L'éducation populaire a été définie de différentes manières à chaque période de l'histoire, de plus, elle n'a pas toujours signifié la même chose au cours d'une même période. C'est comme si elle était adaptable, malléable à chaque pensée politique, à chaque vision du monde, à chaque courant pédagogique. L'éducation populaire, un terme valise, c'est d'abord et surtout un discours venant qualifier des pratiques de militants qui ont fait des choses ensemble et qui souhaitent se mettre sous une même bannière. » C'est peut-être ça qui est intéressant, c'est-à-dire que ce sont des gens qui se retrouvent pour se dire « en fait, on converge sur la manière d'avancer, sur la manière de former les gens. » Il y a évidemment une notion de formation qui est extrêmement importante dans l'éducation populaire.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>C'est finalement cette définition qui te convient le plus ? En as-tu d’autres que tu veux lire ? Vas-y, avec plaisir.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Ça, c'est une non-définition quelque part. Ce qui m'intéressait, c'était aussi de citer Hugues Bazin parce que, du coup, il y a aussi cette logique de ceux qui s'en revendiquent et qui n'ont pas forcément, par exemple, l'agrément jeunesse et éducation populaire, qui est une reconnaissance par l'État, finalement, et puis les associations que j'appelle vénérables qui « sont » éducation populaire depuis très longtemps. Je vais citer Hugues Bazin et puis j’expliciterai un tout petit peu après : « D'un côté, il y a ceux qui parlent de l'éducation populaire et n’en font plus vraiment et, de l'autre, ceux qui ne s'en revendiquent pas, mais la pratiquent effectivement. À l'évidence, et c'est là le paradoxe, nous assistons à un renouveau de l'engagement militant, des nouvelles formes créatives d'innovation sociale et artistique à travers l'émergence d'une génération d'associations plus sous la forme de réseaux que de fédérations. »<br/><br />
C'est vrai que l'âge d'or de l'éducation populaire, ça a été les grandes fédérations d'éducation populaire. Elles ont encore des choses à dire, elles ont encore des choses à faire, mais ça fait parfois contraste, parfois, avec des structures qui, par exemple, ne veulent pas rentrer dans des logiques fédératives. On peut prendre un exemple extrêmement concret, celui de Framasoft qui se revendique de l'éducation populaire, qui avait demandé l'agrément éducation populaire jusqu'à il n’y a pas longtemps, qui fait de l'éducation populaire quotidiennement, mais qui, finalement, a refusé de signer –~j’ai oublié, ça va me revenir, il y a peut-être quelqu'un dans le <em>chat</em> qui le mettra~– la charte que le Gouvernement voulait mettre en place vis-à-vis des associations, qui intimait aux associations l'ordre de ne pas maltraiter le drapeau français. Évidemment, je caricature la charte, mais vous aurez compris que Framasoft n'avait pas envie de s'engager dans quelque chose qui était mal écrit, mal défini, donc du coup, de fait, perdait cet agrément d'éducation populaire, mais certainement pas leurs actions quotidiennes d'actions d'éducation populaire.<br/><br />
Ce sont un petit peu tous ces contrastes-là qu'on peut voir se croiser au sein des mouvements, au sein des fédérations qui sont plus anciennes. C'est aussi pour cela que c'est toujours en renouvellement et qu’il y a toujours de plus en plus d'acteurs qui s'en revendiquent.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Merci. Tu disais, dans ta présentation sur le trombinoscope de l'April, que les associations ont des valeurs en général très proches de celles que l'on le retrouve dans le Libre. Ça semble évident, mais c'est bien de les rappeler.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Du coup, je vais conclure en donnant une définition qui va faire lien.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>C'est super ! C'est parfait !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est une merveilleuse transition ! Je vais conclure avec une citation de Marie-Jo Mondzain qui fait justement le lien. Dans cette définition de l'éducation populaire, qui est une vraie définition, en tout cas pas une longue définition, on fait le lien avec le logiciel libre. Elle dit : « L’éducation populaire fut pensée par ceux qui voulaient véritablement l'émancipation du peuple grâce à la circulation libre des signes et des idées —~et c'est là, évidemment, qu’on rejoint le logiciel libre~—, grâce au partage patient du temps qu'il faut pour parler, pour penser et pour créer. » Là, on n’était pas dans cette logique de numérique mais, fondamentalement, cette définition-là rejoint bien toute la question que les communautés libristes défendent au quotidien et elle rejoint bien tout ce que font les associations d'éducation populaire.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Entre-temps, la réponse à notre question est effectivement arrivée sur le <em>chat</em>. C'était la Charte de la laïcité, obligatoire pour toutes les associations subventionnées. Tu avais effectivement dit charte.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est le CER, le Contrat d'Engagement Républicain, ça me revient.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Contrat d'Engagement Républicain .<br/><br />
Tu disais que tu as milité pendant dix~ans, tu as fait partie, pendant dix~ans, de cette association qui était plutôt une association d’éducation populaire autour de la science. C'est parce que tu avais fait une formation scientifique ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui. Je me destinais plutôt à être enseignant de physique-chimie. À l'époque, j'avais passé une licence de physique-chimie, j'avais passé le Capes, j'avais aussi passé le Capet pour être enseignant en lycée technique et puis, en fait, ma rencontre avec Planète Sciences est venue bousculer un peu tout ça, tout ce projet-là, qui m'a encouragé à faire cette objection de conscience. Je me suis effectivement bien éclaté, c’était extrêmement jubilatoire d'aller dans les écoles, de faire des projets de fusées, de ballons expérimentaux avec les jeunes, avec les enseignants, du coup j'y suis resté une dizaine d'années et j’ai un peu mis de côté ce projet d'enseignement.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Sans regrets ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non, sans regrets parce que, dans l'éducation populaire, on fait aussi énormément de formation, on accompagne énormément les gens de manière parfois moins lourde, avec un système moins pesant que peuvent avoir les enseignants dans le cadre scolaire et puis, parfois aussi, le mépris. On a vu, ces derniers temps, ce qui s'est passé à l'échelon ministériel. Donc oui, on est quand même un peu plus libre !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Après, tu as quitté Planète Sciences, vers où as-tu migré ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je suis allé en Bourgogne-Franche-Comté, parce que j'ai postulé pour être délégué régional des Maisons des jeunes et de la culture en Bourgogne-Franche-Comté. C'était un métier qui consistait à soutenir les MJC sur leur territoire, dans leurs projets associatifs, pour les soutenir aussi vis-à-vis des partenaires locaux, vis-à-vis des mairies qui subventionnaient les postes de directeur de MJC, qui subventionnent toujours pour la majorité. Je parcourais les routes et, du coup, c'était aussi l’occasion : j'en ai profité, évidemment, pour essayer de faire passer des messages sur les systèmes d'information dans les MJC, à l'échelon fédéral, et puis aussi dans le monde inter-associatif.<br/><br />
Je ne sais pas si on en parle maintenant, mais, à cette occasion-là, j'ai été président du CRAJEP de Bourgogne-Franche-Comté, je vais expliquer l'acronyme parce que ça ne doit pas parler à tout le monde. C'est le Comité Régional des Associations de Jeunesse et d'Éducation Populaire, on revient à l'éducation populaire, c'est à l'échelon régional, mais il y a aussi un échelon national, le CNAJEP. En tout cas, à cet échelon régional, disons que tout a convergé, entre les membres, pour qu'on puisse mettre en place un projet qui s'est appelé Bénévalibre, un projet de logiciel libre pour faciliter la valorisation du bénévolat dans les associations.<br/><br />
Pour la faire très courte, souvent, quand on rencontre des financeurs, en particulier à l'échelon local, la mairie, par exemple, dit : « Nous vous subventionnons à 80 %, ce n'est pas normal, il faut diversifier vos financements, etc. » Or, si on oublie de valoriser le bénévolat, de dire « attendez, vous apportez une part financière, mais l'association apporte une quantité de « travail » –~je mets « travail » entre guillemets, vraiment des gros guillemets pour ne pas faire un parallèle entre le travail et le bénévolat parce que ce serait une mauvaise chose~–, en tout cas on apporte quelque chose, une richesse sur ce territoire-là qui passe complètement à la trappe si on ne la valorise pas. Certaines associations le faisaient, le faisaient un peu au doigt mouillé, d'autres le faisaient bien. On a convergé pour dire que s'il y avait un outil qui permette de simplifier ça, ce serait pertinent et, finalement, dans le cadre du CRAJEP, Bénévalibre est né, en 2018 je crois, et continue à être mis à disposition gratuitement des associations, évidemment à l'échelon de la Bourgogne et de la Franche-Comté et de tout le territoire. N'importe quelle association peut accéder à la plateforme qui, de surcroît, a été développée par une Scic, une société coopérative d'intérêt collectif, qui s’appelle Cliss XXI, qui développe pratiquement exclusivement du logiciel libre et qui maintient le logiciel.<br/><br />
En fait, là, on a un très bon exemple, un très beau projet en commun, parce que j’y tiens beaucoup, où chacun a pu exprimer son besoin, définir le cahier des charges. Finalement, chaque membre s'est senti concerné par le projet, a donc pu le faire connaître dans son propre réseau et a eu envie de le faire changer d'échelle. Au départ c'était en Bourgogne-Franche-Comté, on est monté à l'échelon national : le CNAJEP et le Mouvement associatif, à l'échelon national, relaient ce projet parce qu’il est pertinent pour l'ensemble du territoire.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>D'ailleurs, le comité de pilotage du projet s'est élargi au fur et à mesure, puisque c'était un comité ouvert.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est vrai que le mode de fonctionnement s'est fait de manière très naturelle : les gens rentrent, sortent du comité et, pour l'instant, ça fonctionne. C'est vrai que c'est extrêmement intéressant. On pourra renvoyer les personnes qui nous écoutent vers <em>Les Cahiers de l'action</em> que l'INJEP produit —~l’INJEP c'est l'institut national de la jeunesse et de l'éducation Populaire, encore l'éducation populaire~—, et, dans le cahier numéro 61, il y a tout un article qui explique justement la genèse du projet et comment on est vraiment dans un commun numérique. C'est cela que je trouve extrêmement intéressant dans ce projet-là.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tu parlais d'éducation populaire. Cliss XXI, en plus d'être une coopérative spécialisée dans le logiciel libre, fait aussi des actions d'éducation populaire, des install-parties, des fêtes d'installation, des conférences, etc. C'est donc vraiment tout l'environnement qui a adhéré.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Complètement. Il y a des textes très militants et très intéressants sur le site de Cliss XXI, je vous invite à aller voir.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tout à fait.<br/><br />
Toujours dans ta présentation sur le trombinoscope, tu dis que tu es actif sans le groupe de travail Libre Association. Peut-être veux-tu nous en dire quelques mots ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est effectivement ce qui me motivait quand je suis arrivé à l'April : pouvoir faire circuler l'information entre des associations qui avaient des expériences sur tel ou tel logiciel libre, qu’elles pouvaient conseiller, recommander à d'autres associations qui étaient en transition pour, justement, aller vers un numérique plus éthique.<br/><br />
L'outil essentiel, c'était une liste de mails où les gens posaient des questions, échangeaient, faisaient part des manifestations, en complément à l'Agenda du Libre, peut-être qu'on en parlera un peu plus ; c'était très spécifiquement orienté sur la question associative.<br/><br />
Pour être tout à fait transparent, je dirais que le nombre de mails, sur la liste, a beaucoup baissé ces deux dernières années, le Covid est passé par là. Cette question-là évolue dans l'écosystème libriste, je pense que tout le bon travail que fait Framasoft autour de ça fait que les choses se déplacent, les besoins sont différents, je pense au projet Emancip'Asso que Framasoft est en train de mettre en place, qu’ils ne vont pas tarder à lancer. On va réfléchir, voir comment, éventuellement, faire se rejoindre les projets, si c'est pertinent ou pas, etc.<br/><br />
En 2007/2008, on avait produit un questionnaire, à peu près 500~associations avaient répondu. C'est vrai que, maintenant, le questionnaire est devenu, on peut dire, l'alpha et l'oméga de l'Internet, on en a tous les jours, mais, à l'époque, c'est vrai que ça nous avait permis d'avoir un éclairage sur les usages des logiciels libres des associations.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je précise que Framasoft, l'association qu'on a citée déjà plusieurs fois, utilise Bénévalibre, que Cliss XXI, qu'on a citée, est membre de l'April, que les flyers d'Emancip'Asso sont prêts, tout cela grâce à Magali, en régie.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Framasoft fait plus que l'utiliser, ils le soutiennent financièrement, ce qui est vraiment incroyable : à un moment donné, ils ont eu besoin d'une fonctionnalité dans le logiciel. Ils ont dit « on va faire ce qu'on préconise depuis toujours, on va financer cette fonctionnalité. » Ils ont donc payé directement Cliss XXI pour permettre de développer cette fonctionnalité qui permet, à une association, de déplacer ses données d'une instance à une autre. Peut-être faut-il que j'explique très rapidement ce qu'est instance ? Une instance c'est, finalement, une version installée sur des serveurs. Bénévalibre a été pensé dans une logique décentralisée, ce qui fait qu'une fédération peut choisir de prendre le code source du logiciel Bénévalibre et d'aller l'installer sur ses propres serveurs pour son usage fédératif, avec ses propres règles.<br/><br />
Framasoft a dit « on va commencer à utiliser l'instance 0, la première que Cliss XXI avait installée et puis, dans un deuxième temps, on migrera nos données et, pour migrer nos données, il faut la fonctionnalité, donc on subventionne. » En plus, ils ne se sont pas arrêtés là, parce que ça fait deux~ans, même trois, je crois, qu'ils subventionnent une fonctionnalité qui permet de faire évoluer le logiciel en fonction des besoins de la communauté.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>On rappelle, encore une fois, qu’il y a une organisation, une structure, une personne, bref !, quelqu'un qui finance un logiciel libre ou une fonctionnalité et, après, tout le monde en profite. C’est merveilleux !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est ça. Du coup, en passant, on peut quand même remercier le Conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté qui, au départ, avait mis 10~000 euros sur la table et la Fondation Crédit Coopératif qui a permis de lancer le projet. On a attendu d'avoir ces financements pour se dire « on a assez d'argent pour commencer le projet ». Nous ne sommes pas partis à l'envers en se disant « on cherche des sous, on fait un appel, puis, après, on trouve le projet pour aller avec les sous ! »<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>On part des besoins ! Ah, si tous les logiciels pouvaient se développer comme ça, nous serions heureuse et heureux !<br/><br />
Il n'y a pas que ça. Le groupe de travail Libre Association a aussi édité un guide. Tu as été contributeur, bien évidemment, du Guide Libre Association.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui. C'était un peu la suite logique du questionnaire de l'époque. Il y avait à la fois un catalogue de logiciels utiles aux associations, on citait des logiciels de comptabilité, de graphisme, etc., et on donnait aussi un petit peu de matière pour un discours politique. Parce que, finalement, si on en reste à des questions techniques, à des questions d'utilisateurs et d'utilisatrices, c'est assez limité. Il faut aussi donner des arguments pour pouvoir convaincre la gouvernance associative. Si on ne fait pas ça, il y a peu de chances que ça fonctionne, parce que ça va être l'envie d'une personne un peu technique de l'association qui ne va pas être considérée. Il faut donc donner de la matière pour faire comprendre aux gouvernances associatives qu’il y a un enjeu pour elles de migrer vers du logiciel libre.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Et on sait très bien que l'argumentaire vaut pour tout le monde, vaut aussi pour aider, par exemple, des élus à militer, à faire des actions importantes pour le Libre dans l'hémicycle ou pour convaincre son entourage. C'est toujours très bien de trouver des arguments.<br/><br />
Il y a eu une autre une autre action, dont j'ai envie de parler, c'est le Cerfa en format ODT, c'est un cas très concret et c'est aussi une belle victoire, une belle action du groupe Libre Association.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Effectivement, tu me le remémores. Pour faire des demandes de subventions, les associations ont besoin de remplir un document. À l'époque, ce n'était pas complètement numérisé, c'est-à-dire qu’on n'allait pas sur une plateforme. Maintenant, je crois qu’il n’y a plus ces documents téléchargeables, je n'en ai pas rempli récemment. En tout cas, à l'époque, il y avait un canevas à remplir et le format qui nous était proposé était un format propriétaire. Du coup, le groupe a travaillé, pendant l'été, pour faire un PDF que l'on pouvait remplir, sous un format ouvert, à partir de LibreOffice. On l'a communiqué au ministère qui l'a mis à disposition, sur la plateforme gouvernementale. C’était plutôt pour montrer comment on peut contribuer et faire que ce soit plus simple pour les utilisateurs et utilisatrices.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Belle satisfaction pour le groupe d'être écouté.<br/><br />
J'ai envie de faire la pause musicale là, parce que, après la pause musicale, on va attaquer un sujet très intéressant, une expérience personnelle avec ce qu'on appelle la vente forcée. Donc, je préfère lancer la pause là.<br/><br />
Nous allons écouter un morceau choisi justement par notre invité, Lauren Costy. Le morceau s'appelle <em>Optimism</em> par Minda Lacy. On se retrouve dans environ deux minutes trente. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>Optimism</em> par Minda Lacy.<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Nous venons d’écouter <em>Optimism</em> par Minda Lacy, disponible sous licence libre Creative Commons By SA 3.0.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je suis Isabella Vanni de l'April. Nous allons reprendre le fil de notre discussion, avec notre sujet principal consacré aujourd'hui au Parcours libriste de Laurent Costy, vice-présidente de l'April, chroniqueur dans <em>Libre à vous!</em> et expert du monde associatif.<br/><br />
Je rappelle que vous pouvez participer à notre conversation par téléphone au 09~72~51~55~46 ou sur le salon web dédié à l'émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat ».<br />
<br />
Nous allons attaquer un gros dossier, la bataille de Laurent Costy contre la vente forcée, j'ai même noté : « Ce qui m'a motivé pour intégrer le conseil d'administration de l'April. » Donc vas-y, raconte-nous ! Pourquoi cette bataille ? Comment ça s'est passé ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est vrai qu'à l'époque Microsoft était le grand méchant, le Libre s’est quand même construit en opposition à Microsoft qui imposait, et c'était légitime, tellement à marche forcée sa logique, ses logiciels, que le Libre s'est construit là-dessus. D'ailleurs, l’AFUL a été plutôt un peu novatrice.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je rappelle que l’AFUL est l’Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Au départ, elle soutenait même un peu financièrement les gens qui souhaitaient se faire rembourser la licence Windows qui était imposée lorsqu’on achetait un ordinateur. À l'époque, c'était extrêmement compliqué de trouver des ordinateurs neufs sans Windows dessus, à part, évidemment, monter son propre ordinateur, mais, pour les ordinateurs portables, c'était hors de question, ça n'existait pas. Du coup, ayant besoin d'un nouvel ordinateur portable, j'ai acheté un ordinateur portable. Il y avait Windows dessus et j'ai engagé un procès, puisque, au départ, j'ai fait une simple demande de remboursement de la licence que je n'utilisais pas puisque j'utilisais un système alternatif GNU/Linux, une distribution GNU/Linux, h'ai donc engagé un procès. Le procès a duré plusieurs années, trois/quatre~ans au total.<br/><br />
C'est vrai que c'est quand même une expérience un peu traumatisante. Déjà, ce qui était très étonnant, c'est que c’était finalement HP mon opposant, ce n'était pas Microsoft. C'est là que je trouve que Microsoft est extrêmement malin, parce qu’il laisse les constructeurs se débrouiller avec ces problématiques-là, alors que la vraie problématique est bien chez Microsoft, c'est-à-dire que ce sont les fabricants qui protègent le contrat qu'ils ont entre Microsoft et eux-mêmes.<br/><br />
Je n'ai pas gagné ce procès, je sais que d'autres d'autres personnes ont gagné après, un Italien en particulier, tu as peut-être les références. Je n'ai pas gagné ce procès, il aurait fallu que j'aille en cassation après. Étienne Gonnu aurait pu nous expliquer un peu mieux les processus juridiques, je ne suis pas très expert. J'ai préféré m'arrêter, parce que, finalement, on a des gens qui sont prêts à mettre des moyens colossaux. J'avais trouvé un avocat quand même un peu spécialiste de la question, mais HP avait sollicité trois avocats de la place parisienne, extrêmement bien mieux payés, à mon avis, que mon avocat, pour aller jusqu'au bout et faire que je ne puisse pas gagner.<br />
<br />
De cette expérience-là, je retiens quand même un exemple extrêmement intéressant pour expliquer aux gens qu’on a toujours quelque chose à cacher. Souvent, sur Internet, les gens disent « pas de problème, je n'ai rien à cacher, donc peu importe, ce n'est pas grave si je laisse filer mes données, mes métadonnées, ce n'est pas un problème, je ne fais pas de choses illégales, etc. » En fait, dans le cadre de ce procès-là, un des arguments des avocats de HP a été de dire « regardez, ce monsieur fait des conférences pour le logiciel libre, donc c'est quelqu'un qui nous en veut, c'est quelqu'un qui est méchant. » J’estimais ces données-là, qui faisaient la promotion du logiciel libre, extrêmement positives, vues par un avocat, c'était du pain béni pour se retourner contre moi.<br/><br />
Avec cet exemple-là, si je devais retenir une chose de ce procès-là, c'est d'être extrêmement prudent quand on affirme qu'on n’a rien à cacher, parce que, finalement, n'importe quelle donnée peut vous paraître positive, mais elle peut être vue complètement négativement par quelqu'un qui veut l'utiliser contre vous. Si on peut retenir quelque chose de ce procès-là, c'est peut-être ça.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tu t’étais embarqué dans une sacrée expérience ! Avais-tu une idée de l'ampleur que ça pouvait prendre en termes de durée, de stress ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non. Là on appréhende aussi toute la mécanique judiciaire. C'est vrai que c'est quand même compliqué, c'est très compliqué surtout quand on n'est pas de la partie, il faut un peu de moyens financiers pour avancer l'argent, ce n'est pas à négliger. Si je ne suis pas allé en cassation c'est parce que, finalement, face aux moyens que pouvait avoir HP, à un moment donné je me suis dit « je ne vais pas jouer, ils ont plus de moyens que moi ! » Là c'est pareil, la perception de la justice, dans ces moments-là, est complexe pour des gens comme moi. Je ne vais pas complètement dénigrer le système, mais ça pose quand même la question des moyens pour aller en justice.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Donc, tu n’es pas jusqu'au bout, tu as perdu parce que tu as décidé d'arrêter le processus.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>J’ai décidé de ne pas aller en cassation.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Récemment, il paraît que tu as acheté un ordi reconditionné, cette fois sans Windows.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non, c'est plus compliqué !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>J'ai mal lu mes notes !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Ce n’est pas grave. On aurait pu penser que cette question-là était derrière nous et que, finalement, ça avait beaucoup changé. Ça a un peu changé parce que, maintenant, on peut réussir à acheter certains ordinateurs reconditionnés sans système d'exploitation. Je parvenais à le faire avec certaines boutiques de reconditionnement et, récemment, j'ai été confronté à un changement des conditions de leur part. La dernière fois, j'avais demandé un ordinateur en particulier, qui avait déjà Windows installé dessus, je leur ai dit « je le souhaiterais mais sans licence », ils ont dit « d'accord, OK, on vous déduit un montant. » On ne sait pas trop comment le montant était déduit.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Comment il était calculé, tu veux dire, mais ils ont pris en compte le fait qu’il y avait à un coût en plus du fait que le système d’exploitation était installé.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Jusqu'à il y a trois/quatre~ans je pratiquais de cette manière-là, donc je recevais un ordinateur sans licence Windows. Là, j'ai refait avec une entreprise –~je ne sais pas si on la cite ou pas, de toute façon je pense que j'écrirai une tribune sur le site de l'April parce que c'est quand même assez éloquent~–, j'ai refait avec cette entreprise-là qui m'a dit « non, on ne peut pas retirer la licence, ce n'est pas possible. » Les échanges que j'avais avec eux étaient lunaires et ça s'est conclu par « on ne peut pas vous communiquer le prix de la licence ». Donc, ils ne peuvent pas communiquer l'accord qu'ils ont avec Microsoft, ils sont visiblement tenus au secret. Ils sont tenus par la logique de laisser des licences Windows. Ils m'ont dit : « On a quelques ordinateurs avec des systèmes d'exploitation libres », ce qui est très bien, sauf, évidemment, qu’en termes de performances ça n'a rien à voir, ce ne sont pas du tout les mêmes objets.<br />
<br />
Je pensais en avoir terminé, avoir laissé cette question de la licence Windows derrière moi et, en fait, on s'aperçoit que Microsoft continue d'inonder, avec toute cette logique-là, et puis, surtout, d’être le plus invisible possible. En fait, les gens ne se rendent même plus compte qu'ils payent des licences Windows, alors que la logique commerciale voudrait qu'on affiche le prix de ce qu'on achète. C’est le minimum d'une logique commerciale pour avoir confiance en qui on achète, etc.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Pourtant, la Cour de justice de l’Union européenne a dit qu’il ne s'agit pas d'une façon de vendre déloyale.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Là aussi, on peut se poser la question du poids de Microsoft. On va faire du conspirationnisme ! Quand on regarde, par exemple, le rapport GAFAM Nation, le document-là écrit pas des journalistes, quand on voit l'investissement en temps et en argent des GAFAM auprès de la Commission européenne, on est en droit de se poser la question de ce poids-là sur nos lois, même s'il y a des députés, des gens qui se battent, etc. De fait, avec de tels moyens humains et financiers, il y a des gens qui vont aller à la facilité, qui vont se dire « ce n’est pas un problème important. » Effectivement, par rapport à la faim dans le monde, par rapport à des problèmes de guerre, etc., on peut se dire ça, sauf que derrière, de mon point de vue, ça a des conséquences démocratiques.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Et <em>Code Is Law</em>, comme on le rappelle souvent, donc ce n'est pas négligeable du tout.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Voilà ! Donc, de mon point de vue, ça a des conséquences pour nos démocraties. Pour expliciter ce serait un peu plus long, le raccourci est un peu trop raccourci, justement, il faudrait plus de temps.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>On n’a qu’une heure aujourd’hui. Marie-Odile, sur le salon de webchat, dit qu’il faut virer les lobbies de Bruxelles.<br/><br />
Tu parlais de cette capacité de Microsoft à se rendre presque invisible, indispensable et invisible en même temps. C'est une parfaite transition pour un autre gros dossier auquel tu t'es attelé qui est le dossier Solidatech et Techsoup. Est-ce que tu veux nous en dire plus ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>On avait déjà eu une rencontre avec Solidatech. Solidatech est un programme, ça s'appelle un programme, qui émane des Ateliers du Bocage, une entreprise d'insertion qui fait un travail incroyable dans les Deux-Sèvres. Ils reconditionnent des ordinateurs, ils forment des gens qui ont du mal à retrouver du travail, ils sont dans la sphère Emmaüs. Ils ont donc mis en place, ou ils ont été sollicités pour le faire –~je pense que c'est plutôt ça~– un programme, qui s'appelle Solidatech, qui a pour vocation de faciliter le numérique dans les associations.<br/><br />
Sauf que, quand on creuse un petit peu, on s'aperçoit que derrière cette structure-là, il y a une espèce de grosse structure américaine qui s'appelle Techsoup, qui, en fait, fait du <em>soft power</em> américain. C'est une énorme structure qui a des partenaires, les Big Tech américains –~Microsoft, Cisco, etc.~–, et qui diffuse du matériel et des logiciels à des ONG, partout dans le monde, à des prix défiant toute concurrence. C’est bien parce que ça facilite, après, l'informatique, le numérique, dans ces structures-là, sauf que, évidemment, ça entretient les outils américains dans ces structures-là. Pourquoi une association s’embêterait-elle à aller vers un numérique plus éthique, à essayer GNU/Linux, par exemple, si on lui offre une licence Windows à 5,80~euros, ce qui est réellement le cas quand on passe par Solidatech.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Là, à nouveau, l'importance des argumentaires. Pourquoi devrait-on se tourner vers Microsoft si on sait que c'est du logiciel privateur, qui ne respecte pas nos données, etc. ? Le fait de mettre des tarifs extrêmement bas risque de faire pencher la décision avant même de se poser des questions.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est évident. Les gens sont déjà habitués à ces logiciels-là, ils ne vont pas passer du temps à changer leurs habitudes, ce serait trop compliqué. Ils préfèrent, effectivement, avoir l'impression de faire une excellente affaire parce que la licence n'est qu’à 5,80~euros ! Sauf que, derrière, ils continuent à entretenir un système qui, de mon point de vue, je reboucle avec la question de Bruxelles de tout à l'heure, impacte nos démocraties et oriente, finalement, une vision du numérique. Peut-être que cette vision du numérique est intéressante, encore une fois je n'ai pas de jugement sur le fond, ce qui m'importe c'est, à un moment donné, d'être dans la boucle pour pouvoir en discuter et mettre dans la boucle des discussions des gens autres que ces GAFAM, parce que ce sont eux qui tracent la route du numérique sans qu'on ait le moindre mot à dire, sans qu'on puisse interroger, poser des questions par rapport à ça. Le vrai danger est là. Fondamentalement, je pense que ça part de bonnes intentions, mais le poids et l'argent qu'ils mettent après influencent trop nos choix démocratiques. C'est ça qui me perturbe.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Quand tu dis que ça entretient la domination de Microsoft, que ça emprisonne les utilisateurs et utilisatrices, quand tu parles de licence qui ne coûtent presque rien, sur le webchat on dit « la première dose est gratuite ».<br/><br />
J'ai été assez étonnée par le travail d'investigation que tu as fait, c'est presque du travail de journaliste d'enquête. Tu as vraiment creusé la question parce que ce n'était pas facile de savoir ce qu’est Solidatech. Tout était sur le fond.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Il faut creuser pour ne pas dire de bêtises non plus. Ce serait trop facile de dire « c'est mal, c'est le mal, etc. » Encore une fois, ce que font les Ateliers du Bocage est remarquable. Je pense aussi que même les salariés de Solidatech ne mesurent pas combien ils sont le jeu, finalement, de Techsoup, de cette grosse entreprise mondiale qui fait un <em>soft power</em> digne de Coca-Cola qui investissait tous les pays, qui distribuait des enseignes qu'on retrouve au fin fond de l'Afrique, etc. C'est extrêmement malin, c'est extrêmement puissant. Du coup, il faut en avoir conscience pour essayer d'atténuer, de sortir un peu de ça, pour se prendre en main. On parle de souveraineté, mais, si on n'a pas conscience de ça, c'est très rigolo comme mot, mais, à part ça, on ne peut pas en sortir, on ne pourra pas se prendre en main, on ne pourra pas agir !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tu veux rappeler qu’à l’April on préfère parler plutôt de gouvernance.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Le terme « souveraineté » est un terme qui est utilisé par les journalistes, c'est vrai que je l'utilise là. Dans l'article qui sortira les jours prochains sur Solidatech/Techsoup, on fait un peu le mélange, on essaye de nuancer un peu ce qu'est la souveraineté, parce qu’il peut y avoir, parfois, un peu un relent de nationalisme, ce qu'on ne veut pas à l'April. On préfère donc parler de gouvernance partagée, de maîtrise des outils logiciels qu'on utilise et le Libre est une condition nécessaire, même si elle n’est pas suffisante, pour aller vers une gouvernance mieux maîtrisée.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Aux personnes qui s’intéressent à ce sujet, c’est annoncé, il y aura bientôt une actu diffusée sur notre sur notre site.<br/><br />
Jusqu'à maintenant tu as été très sérieux, on a abordé des sujets très sérieux. Si vous écoutez les chroniques de Laurent et Lorette Costy, « À cœur vaillant la voie est libre », en fait, on rigole beaucoup. C’est cet autre côté de toi dont je voulais parler. Comment est née la chronique « À cœur vaillant la voie est libre » et que t’apportes cette expérience, en plus vécue avec ta fille ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Comment est-elle née ? Déjà, quand on était membre du conseil d’administration c'était obligatoire de faire une chronique, on n'avait pas le choix !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Voilà, la pression qu’on a ! On oblige les gens à faire des choses, c’est absurde !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Bonne question. Il fallait monter un programme et, du coup, il y a eu des appels à contribution. Ce n'est pas simple de monter un programme, même une heure et demie de radio. Au départ, c'était une fois par mois, mais, après, de manière hebdomadaire, ce n'est pas simple, tu es bien placée pour le savoir, Isabella ! Même en vous répartissant, à trois salariés, la charge, c'est quand même très lourd. Il fallait donc trouver des contenus.<br/><br />
Je ne sais plus comment ma fille a bien voulu faire un essai avec moi et je lui en suis extrêmement reconnaissant. Si ça n'avait tenu qu'à moi, réécoutez la première, vous verrez à quel point je suis mauvais, alors que Lorette a fait ça toute sa vie avec le Zénith ! C'est vrai qu'on prend beaucoup de plaisir à faire ça de manière à peu près mensuelle, on se retrouve et, franchement, on s'éclate bien, donc, tant qu'on s'éclate ! On avait dit qu'on arrêterait à la 42e.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Non ! Je n'étais pas au courant ! Qu'est-ce qu'on peut faire ? Il faut faire une pétition contre cette décision ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Il y a encore de la marge. En plus, j'aime beaucoup échanger en amont avec Stéphane Bortzmeyer qui nous fait le grand honneur de relire la chronique à chaque fois, qui donne de très bons conseils et l'échange est vraiment agréable sur ces points-là.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Il trouve beaucoup d'erreurs ou ça va mieux ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Au début, la chronique était très technique et, plus ça avance, moins il y a de fond, moins il y a de contenu. Ce sont de plus en plus de blagues et de moins en moins de choses dedans. Je pense donc que Stéphane n'a pas trop de travail, de moins en moins de travail. Prochainement, on va essayer de faire un peu de cybersécurité puisque je sors d'une formation, on va essayer de donner des éclairages et peut-être un peu de technique, mais ce n’est pas toujours simple, à la radio, d'expliquer des choses techniques.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je sais aussi que la chronique te demande un énorme boulot, je crois que tu parlais d’environ huit heures pour la préparer ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est ça. Les premières c'était huit heures parce que je travaillais beaucoup de questions techniques. Là, comme je travaille moins de questions techniques, c'est un peu plus léger. Avec l'enregistrement, le traitement, c'est entre six et sept~heures.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je confirme : au début, il y avait une grosse différence dans la capacité de jeu entre Laurent et Lorette, Lorette a été extraordinaire dès le départ, mais, franchement, je trouve que tu t'es vachement amélioré. Magali, en régie, est d'accord.<br/><br />
À propos d’humour, tu aimes bien l'humour subtil et confidentiel, les blagues de deuxième, voire de troisième écoute. Qu'est-ce que tu veux dire par là ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est issu d'un podcast que j'ai écouté il y a très longtemps, qui n'existe plus,qui est très difficilement trouvable sur Internet, même sur Internet Archive on ne le retrouve pas forcément, on ne peut pas charger les épisodes, ça s'appelait <em>L’improbable podcast</em>. Ils faisaient des blagues et ils disaient : « Si vous n'avez pas compris, ce sera à la deuxième ou à la troisième écoute, réécoutez », donc ça encourageait à réécouter, à re-télécharger. Je trouvais ça plutôt malin, même si, effectivement, parfois on ne comprenait pas, on était un peu comme deux ronds de flan.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Parfois, si on écoute seulement la chronique, sans lire la transcription qui existe grâce au groupe Transcriptions animé par notre merveilleuse Marie-Odile Morandi, on ne comprendrait peut-être pas toutes les blagues. Il y a des choses qui se cachent !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Même moi, en me relisant, parfois je ne les comprends pas ! Ce qui est très drôle c'est que des fois Lorette, à la chronique d'après, me dit « j'ai compris la blague ! » C'est très drôle, en général ça me fait bien rigoler.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Mon collègue Étienne dit qu’il est très fan de la chronique des Costy, père et fille, je pense que beaucoup pensent comme lui, au point que cette chronique reçoit une consécration incroyable, une invitation à « performer », entre guillemets, en clôture de la Journée du Libre Éducatif.<br/><br />
La Journée du Libre Éducatif est une journée organisée chaque année, depuis trois~ans, par le ministère de l’Éducation nationale, notamment par Alexis Kauffmann qui a une mission logiciels libres au ministère de l'Éducation [chef de projet logiciels et ressources éducatives libres et mixité dans les filières du numérique au sein de la Direction du numérique pour l'éducation du ministère de l'Éducation nationale]. Vous avez été surpris quand vous avez reçu cette invitation ? Comment ça s’est passé ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Ça ne sera pas tout à fait en clôture, finalement ce sera en fin de matinée après les interventions flash. Je savais qu'Alexis Kauffmann écoutait la chronique, il nous avait déjà fait un retour très positif. Je pense que ça lui a donné l'idée de nous faire intervenir à Créteil, je crois que c'est le 29~mars, en fin de matinée.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>C'est déjà prêt ? La chronique est déjà prête ? Tu y travailles.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>On va parler de logiciel libre et d'éducation. On ne l’a pas encore écrite.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Ça paraît pertinent ! En fait, tu es l’auteur ou est-ce que Lorette contribue aussi à l'écriture ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est vrai que j'en écris la majorité, mais quand on fait le premier enregistrement, qui n’est jamais le bon en général, c'est à cette occasion-là qu'elle me corrige un peu le vocabulaire, qu'elle met dans sa bouche des mots de vocabulaire un peu plus jeunes, pour justement, qu'on contraste. Elle apporte un peu sa touche, heureusement.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Parce que certains mots, comme « souvenance », j’aime bien les mots les mots littéraires.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Les vieux mots et les vieilles publicités.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>J'ai mis comme point, que j'aimerais aborder, l'éthique du <em>Do it yourself</em>. Au bout d'un moment tu as essayé d'héberger toi-même avec Yunohost. Tu as même fait une émission, tu as préparé et animé une émission <em>Libre à vous !</em> sur cela, mais pas que, tu as aussi fait une cotte de mailles, du fait main, pour participer aux Geek Faëries, un festival de l'imaginaire qui a lieu lui aussi chaque année à Selles-sur-Cher, en mai/juin. Est-ce que tu veux parler de cette envie que tu as de faire par toi-même et utilises-tu encore Yunohost ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Faire le lien entre Yunohost et la cotte de mailles, ça ne va pas être simple !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je me suis dit que tu en est capable !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je ne fais pas vraiment par moi-même : Yunohost est justement une distribution qui est faite pour faciliter l'installation et la gestion d'un serveur. Je remercie toute la communauté qui développe ça. Je pense d'ailleurs qu'il y a beaucoup de Français, je pense, qu’au départ, c’est une initiative qui est française.<br/><br />
C'est un projet qui est extraordinaire, parce que, finalement, on gère son serveur avec des petites briques en disant « j'ai besoin de telle application, j'ai besoin d'un <em>cloud</em>, donc j'installe Nextcloud » ; après j'ai une petite brique, je clique sur la brique et je suis sur mon Nextcloud. Nextcloud est un <em>cloud</em> alternatif à ce que les gens connaissent sur Google : je peux déposer des fichiers, partager des fichiers, avoir un mail, etc. Il y a un catalogue de plus en plus important d'applications qu'on peut installer avec une interface graphique, c'est donc extrêmement bien et pertinent pour des gens comme moi.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tu n'es pas informaticien.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non, je ne suis pas informaticien à la base. Évidemment, à force, on finit par devenir un peu geek et à avoir, quand même, quelques compétences. Néanmoins, je trouve que ce projet-là est à souligner, il est extrêmement intéressant.<br/><br />
J’ai demandé à une association belge, qui fait aussi de l'hébergement, de me donner une box, ils appellent ça la Brique Internet qui permet justement d'héberger cette instance de Yunohost. Du coup, j'ai mes petits services à moi. Pour l'instant, je ne vais pas dire qu'ils sont en production parce que, de temps en temps, je rencontre quand même des petits soucis, je suis un peu obligé de les appeler pour savoir comment on fait pour remettre en route. Ils sont réactifs et on finit toujours par arriver à une solution. Il faut effectivement connaître certaines techniques. Par exemple, quand ça bloque, les logs s'accumulent, du coup ça sature la carte, du coup ça ne redémarre pas. On acquiert tout ça par l'expérience. Ils ont évidemment des forums, mais, avec leur appui, c'est beaucoup plus facile d'apprendre et de s'améliorer sur ces sujets.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Difficile, comme tu le dis, de trouver un lien avec la cotte de mailles. Combien pèse ta cotte de mailles pour te déguiser en chevalier qui vient du passé ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Entre dix et onze~kilos, je pense, il y a à peu près 15~000 anneaux. C'est vrai qu'un jour ça m'a pris. J'ai toujours été un peu intéressé par le médiéval fantastique. Il y a déjà eu une émission sur le jeu de rôle, j'ai aussi fait du jeu drôle quand j'étais jeune et le médiéval-fantastique m'intéressait pas mal. Un jour je me suis dit « tiens si je faisais une cotte de mailles ». Il a fallu faire des anneaux, donc prendre du fil de fer, entourer le fil de fer autour d'une tige, couper « les ressorts », entre guillemets, obtenus pour faire des anneaux, puis assembler les anneaux pour pouvoir faire une cotte de mailles. Ça prend un an, un an et demi, une tendinite parce que, à force de couper, ça force un peu sur certains muscles, mais, après, on est fier. On ne la sort pas souvent, c'est sûr, en soirée ce n'est pas évident, pour chercher un emploi ce n'est pas évident non plus !<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>C'est pour cela que tu participes, quand tu peux, aux Geek Faëries, ce festival de l'imaginaire dont j’ai parlé et tu avais aussi imaginé une conférence, une intervention en tant que chevalier.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui. Je suis intervenu une fois, en cotte de mailles, au Bar commun, dans le 18e à Paris. Ça marque les esprits, du coup, on peut jouer un peu l'étonnement sur le partage, les communs. J’avais monté un petit truc, c'était très modeste, mais c’est rigolo.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Notre vice-président intervient aussi à différents évènements, c'est l'une des façons qu'il a de contribuer à l'April, en plus de faire toutes les actions qu'on vient d'énumérer.<br/><br />
Quels sont tes projets professionnels à venir ? Je crois qu'en ce moment tu es en formation.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>En transition, on va dire. J'ai fini une formation en cybersécurité de 399~heures, qui a commencé fin novembre et qui s'est terminée vendredi. C'est extrêmement intéressant pour appréhender, pour consolider des savoirs autodidactes, des savoirs techniques dont je parlais tout à l'heure ; c'était extrêmement intéressant. Appréhender aussi que la question de la cybersécurité est quand même pensée pour des grosses structures et que la question du Libre n'est pas complètement appréhendée non plus. C’était vraiment intéressant, aussi, de confronter un peu ces savoirs-là.<br/><br />
Je me suis incrusté pour intervenir auprès de mes camarades pour parler de logiciel libre, parce qu’il leur manque quand même une cette culture-là. De bonne grâce, ils ont bien voulu m'accorder un petit créneau, ce qui était plutôt intéressant.<br/><br />
C'est très cohérent. On trouve aussi des cohérences, de mon point de vue, à aller vers le logiciel libre quand on parle de cybersécurité. On a eu des débats avec des formateurs qui n'étaient pas complètement en phase avec cette pensée-là, mais ça ouvrait des discussions extrêmement riches et intéressantes.<br/><br />
Depuis vendredi, j'ai terminé cette formation. Mon projet c'est de rejoindre une coopérative, Coopaname à priori, pour faire de l'accompagnement et de la formation d'associations dans leur transition vers un numérique plus éthique,. Donc transition vers les logiciels libres et puis un système d'information émancipé des GAFAM, pour toutes les raisons qu'on a un peu évoquées dans l'émission et qu'on peut retrouver, pour beaucoup, sur le site de l'April.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Pourquoi veux-tu rejoindre cette coopérative et pas, par exemple, être indépendant ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>D’abord, parce que le travail en équipe, le commun m'importe. Être seul me fait un peu peur, en tout cas ça ne m'intéresse pas. Même si, évidemment, dans la coopérative on est quand même en partie seul, il y a des choses à échanger. On est sur un projet commun, une coopérative.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Toutes les personnes qui font partie de cette coopérative sont dans le domaine de l'accompagnement de l'informatique, du numérique, ou il y a peu de tout ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Non. Pour l'instant, je ne les connais encore pas tous et toutes. Les premières réunions seront en mars. Il y a, à mon avis, beaucoup de projets divers. Je tiens juste à souligner que Coopaname était présente à la première réunion pour Bénévalibre, à la Fondation pour le Progrès humain, en 2016 je crois. La question du Libre et du numérique libre est présente au sein de cette coopérative.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Des oreilles vont t’écouter.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>J'espère. Il y a déjà des gens qui militent sur ces sujets-là.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Très bien. Je pense qu'on a abordé tous les sujets que je voulais mettre à l'honneur. Est-ce qu'il y a des messages que tu voulais faire passer, qui te tiennent à cœur ? Tu pourrais profiter de ce temps pour les exprimer.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>J’ai pris deux citations.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Très bien. Beaucoup de citations aujourd’hui, mais c’est bien, j'adore !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>En général, les gens parlent mieux que moi donc je préfère les citer.<br/><br />
e-Rabelais disait : « Numérique sans conscience n'est que ruine de l'âme », facile, mais assez efficace. Et e-Louise Michel disait : « Le logiciel libre est au numérique ce que le syndicalisme est au monde du travail, une conscience.»<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>eLouise Michel.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Oui, bien sûr, notez bien le « e », sinon on va m’alpaguer.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Ça me paraît une bonne conclusion. Il nous reste encore quelques minutes, c’est très bien parce que, comme ça, tu peux partager avec nous des conseils de lectures, de podcasts, ce que tu veux.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je ne vais pas conseiller des choses sérieuses. Je peux, les gens peuvent me contacter, je peux leur conseiller des livres sérieux, Shoshana Zuboff, <em>L’Âge du capitalisme de surveillance</em>, on a déjà parlé de tout cela à maintes reprises, j'ai plein d'autres références, pas que celles-là, bien sûr.<br/><br />
Tout ce qui sur le Framablog est excellent.<br/><br />
Hubert Guillaud était venu, on l'avait interviewé dans une émission, tous ses articles sont un éclairage extrêmement pertinent, intéressant sur le numérique.<br/><br />
Donc plutôt des trucs sympas.<br/><br />
En ce moment, je suis en train d'écouter un podcast sur Arte Radio qui s'appelle <em>La Chute de Lapinville</em>, je vous le recommande, il n'est pas encore complètement fini. Ce sont quatre/cinq~minutes par jour, ils postent un épisode par jour.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>De quoi ça parle ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C'est un type qui perd son allocation de pervers narcissique, qui doit, du coup, se bouger un peu, donc c'est un peu compliqué pour lui, pour sa vie. Il est obligé de retourner à Lapinville, chez ses parents et ce n'est pas simple. Du coup, il propose un programme de podcast thérapie<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Ça a l'air pas mal !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Franchement je vous le recommande, j'ai beaucoup rigolé debout dans le train en revenant de Dijon, hier, parce que le TER était plein. Ça a un peu atténué la pénibilité du voyage. Franchement, je vous le recommande, ils en sont à 16 épisodes.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tu l'as tellement bien vendu que mon collègue Étienne, sur le webchat, dit : « J'ai pris de l'avance, j'ai commencé à écouter <em>La Chute de Lapinville</em>. Excellent ! » Donc très bien. Ensuite ?<br/><br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Une BD que François Poulain avait beaucoup aimée, qu’il avait apportée en passant chez moi.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>François Poulain, lui aussi administrateur de l’April.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Trésorier de l'April. C’est <em>Jean Doux et le mystère de la disquette molle</em> de Philippe Valette.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Peux-tu en dire plus ?<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je ne l'ai pas relu récemment. Déjà le dessin est très particulier, c'est un format de BD plutôt en long.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>On est à la radio, on ne voit pas les gestes !<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Je sais qu’il y a une disquette molle dans l'histoire. À un moment donné, il décolle la moquette de son bureau, il tombe dans un trou. Je ne veux pas spoiler non plus, il faut que les gens regardent.<br/><br />
Et puis, en termes de BD, pour moi c'est toute l'œuvre de Bill Watterson, mais c'est plutôt plus ancien, tout ce qui est <em>Calvin et Hobbes</em>.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Quand j'ai lu ça j'avais les larmes aux yeux, moi aussi j'adorais cette bande-dessinée.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>L'auteur de cette bande dessinée est quelqu'un de modeste, qui n’a pas cédé au <em>star system</em>, c’est quelqu'un d'admirable aussi pour sa pensée philosophique.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Calvin est un enfant autour de dix/onze~ans, on va dire, et Hobbes est son ami imaginaire, c'est aussi une peluche en forme de tigre, sauf que quand ils sont seuls, c'est un vrai tigre.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Le tigre prend vie et ils ont des aventures extraordinaires.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Tu disais qu’il n’est pas tombé dans le <em>star system</em>.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>C’est quelqu’un qui est resté modeste dans sa façon de faire.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Et il a su aussi arrêter. Au bout d'un moment il a dit « je préfère arrêter là parce que je sens que je ne vais plus avoir de bonnes idées, donc je préfère finir quand la BD est encore de bonne qualité. »<br />
<br />
Je pense qu'on a fait le tour. En réalité, on pourrait faire plusieurs épisodes avec Laurent Costy. On a on essayé de trouver les gros morceaux, les dossiers, les sujets les plus importants, notamment en lien avec le Libre.<br/><br />
Merci beaucoup d'avoir accepté de parler de ton parcours personnel et professionnel à la radio. Merci pour ce que tu fais pour l'April et pour le Libre en général. Vous avez eu beaucoup d'exemples des actions de Laurent. Du coup à une prochaine, avec probablement une chronique.<br />
<br />
<b>Laurent Costy : </b>Merci à tous. J'espère qu'il n'y a pas eu trop de Costy ! Il faudra quand même qu'on répartisse un peu mieux.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>C'est vrai, c'était le cas!<br/><br />
Nous allons maintenant faire une pause musicale.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Après la pause musicale, nous entendrons un nouvel épisode de la chronique « La pituite de Luk ».<br/><br />
Nous allons écouter <em> Bug</em> par Les bretons de l’est. On se retrouve dans environ une minute trente. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em> Bug</em> par Les bretons de l’est.<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Nous venons d’écouter <em> Bug</em> par Les bretons de l’est, disponible sous licence libre Art Libre.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Je suis Isabella Vanni de l’April. Nous allons maintenant passer au sujet suivant.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Chronique « La pituite de Luk »==<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Nous allons poursuivre avec la chronique « La pituite de Luk », chronique rafraîchissante au bon goût exemplaire qui éveille l’esprit et développe la libido. Il a été prouvé scientifiquement qu’écouter la pituite de Luk augmente le pouvoir de séduction, augmente le succès dans les affaires ou aux examens et décuple le sex-appeal. Retour de l’être aimé, il reviendra manger dans votre main comme un petit chien.<br/><br />
Je crois que ça vous donne le ton de la chronique qui, aujourd’hui, va encore plus loin que d’habitude.<br/><br />
Cette chronique a été enregistrée il y a quelques jours. Je vous propose de l’écouter et on se retrouve juste après.<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Luk : </b>Les IA génératives commencent à changer le monde comme on l’avait prévu, notamment en rendant certains métiers obsolètes. Or, il semblerait que les jolies filles, plus ou moins court-vêtues, soient en première ligne. Le sujet est définitivement glissant, j’aurais pu opter pour le terme de « femmes sexualisées » pour les nommer, mais je ne suis même pas certain que cette définition soit pertinente pour tout le monde. Alors, autant mettre les pieds dans le plat et choisir le terme un poil grossier et péjoratif de « bombasses », dont je suis certain qu’il n’est pas pertinent.<br />
<br />
Dans l’économie de l’attention, les bombasses sont en compétition directe avec les bébés et les chatons. Elles ont le gros avantage sur eux d’aller titiller la libido de la grosse majorité des hommes, contrairement aux bébés et aux chatons qui n’excitent que très peu de gens.<br/><br />
Accoler une bombasse a à peu près n’importe quoi capte l’attention. C’est particulièrement vrai dans les domaines à forte concentration de testostérone, mais c’est également vrai dans les médias à destination des femmes. Ce n'est juste pas le même genre de bombasse qui est affiché.<br />
<br />
J’avais évoqué, dans une précédente chronique, ce motard cinquantenaire qui utilisait l’application FaceApp pour se faire passer pour une jeune femme. Ses virées, partagées sur Twitter, recueillaient tous les suffrages jusqu’à ce qu’un fan découvre la supercherie en examinant un reflet. Boomer ou bombasse, c’est ça qui fait la différence, les virées à moto, elles-mêmes, sont secondaires !<br />
<br />
Taylor Swift, dont la presse parle beaucoup ces temps-ci, est un exemple inverse. Je suis convaincu qu’elle n’aurait pas pu connaître le succès stratosphérique qui est le sien sans avoir des qualités et des talents exceptionnels. J’ai regardé des photos et les clips et je suis également convaincu qu’avec les mêmes qualités, mais sans un physique avenant, ni mini-shorts qui brillent, sa carrière aurait été tout au plus troposphérique.<br/><br />
De mon point de vue peu pertinent de boomer mâle, être une bombasse, c’est avant tout une question de contrôle de soi-même, que ce soit de son apparence, mais aussi de son comportement. C’est un réel choix de carrière qui demande énormément de travail, de connaissances et d'autodiscipline.<br />
<br />
Malgré cela, les bombasses sont en train de se faire disrupter par les IA génératives qui leur opposent des concurrentes virtuelles. Une bombasse générée atteint un niveau de perfection tel qu’une bombasse naturelle, même lissée par le fitness, l’épilation, le maquillage, l’éclairage, les filtres photo et tout le reste, ne peut pas lutter.<br/><br />
Une bombasse virtuelle ne demande pas de salaire, ne présente pas le risque de faire tache avec des trucs aussi inutiles qu’une personnalité et des aspirations.<br/><br />
La bombasse virtuelle est plus lisse que n’importe quelle humaine. Et peut-être aussi que, contrairement à la bombasse humaine qui peut maîtriser plus ou moins son image et surfer sur la vague d’attention générée par sa propre sexualisation, la bombasse virtuelle est entièrement contrôlée par son créateur. Je dis créateur, car, dans les articles publiés sur le sujet, ce sont bien des hommes qui les génèrent.<br/><br />
Il y en a pour tous les goûts. Du bon, avec, par exemple, Anne Kerdi qui fait la promo de la Bretagne ou Kenza Layli au Maroc ; du tendancieux avec des influenceuses sexy comme Aitana Lopez qui place des produits à la con et du mauvais avec une myriade de bombasses pornographiques à l’anatomie improbable.<br />
<br />
Mais comment se fait-il que le public adhère ? Ça fait un bail que des personnages fictifs sont mis en avant par les marques, mais c'étaient essentiellement des mascottes ; cela ne les a pas empêchées de générer des émotions profondes et intenses. La haine inextinguible que l’humanité utilisatrice de Windows 95 à 2003 voue à Clippy en est la preuve, mais là, ce n’est pas pareil. Les bombasses virtuelles sont des personnages. Elles ont un état civil et jouent un rôle de personne réelle.<br />
<br />
Pourquoi ça marche ?<br/><br />
Première hypothèse : pour une partie de la population, c’est un réflexe atavique. Puisque ça a l’air féminin, on doit pouvoir introduire un pénis dedans. Une blogueuse explique que le bot qu’elle utilise pour gérer son agenda reçoit régulièrement des propositions de rendez-vous galants.<br/><br />
Seconde hypothèse : à force de faux cils, de faux ongles, de faux cheveux, de faux seins, de fausses lèvres, le pas à faire entre une créature entièrement synthétique et une qui ne l’est que partiellement n’est pas si important. Une bombasse doit rester inaccessible pour conserver son pouvoir d’attraction, donc, vraie ou fausse !<br/><br />
Troisième hypothèse : l’authenticité n’est plus une vertu. Se lier à de vraies personnes, c’est compliqué, ça demande de faire des compromis, d’évoluer au contact de l’autre. Dans des sociétés de masse telles que les nôtres, on peut bien se satisfaire de l’illusion tant qu’elle est confortable. Les bombasses virtuelles ne seraient alors qu’un perfectionnement du système.<br />
<br />
[Virgule sonore]<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Vous êtes de retour en direct sur radio Cause Commune. Je suis Isabella Vanni de l'April. Nous venons d'écouter un nouvel épisode de la chronique « La pituite de luk » qui a été enregistré il y a quelques jours.<br />
Nous approchons de la fin de l'émission. Nous allons terminer par quelques annonces<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre==<br />
<br />
<b>Isabella Vanni : </b>Cause Commune vous propose un rendez-vous convivial, chaque premier vendredi du mois, à partir de 19~heures~30, dans ses locaux, à Paris, au 22 rue Bernard Dimey dans le 18e arrondissement. Une réunion d'équipe ouverte au public avec apéro participatif à la clé. Occasion de découvrir le studio, de rencontrer les personnes qui animent les émissions. La prochaine soirée-rencontre aura lieu vendredi 1er mars et l’April sera présente à cet apéro.<br />
<br />
Chaque premier samedi de chaque mois, de 14~heures à 18~heures, des bénévoles passionnés de logiciels libres se retrouvent au Carrefour numérique<sup>2</sup> de la Cité des sciences pour une install-partie de distributions GNU/Linux. Le prochain rendez-vous du Premier samedi du Libre aura lieu samedi 2~mars 2024 à la Cité des sciences et de l'industrie, à Paris, dans le 19e arrondissement.<br />
<br />
Il est encore temps de proposer des événements de découverte logiciels libres pour le Libre en Fête, du 9~mars au 7~avril 2024, partout en France.<br />
<br />
Une nouvelle édition des Journées des libertés numériques aura lieu du 11 au 30~mars 2024 aura lieu à Nantes, Angers, La Roche-sur-Yon et certaines animations seront accessibles en ligne.<br />
<br />
Je vous invite à consulter le site de l'Agenda du Libre, agendadulibre.org, pour trouver des événements lien avec le logiciel libre ou la culture libre près de chez vous.<br />
<br />
Notre émission se termine.<br />
<br />
Je remercie les personnes qui ont participé à l'émission : Laurent Costy, Lorette Costy, Luk.<br/><br />
Aux manettes de la régie aujourd’hui, Magali Garnero.<br/><br />
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, Julien Osman, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.<br/><br />
Merci aussi aux personnes qui découpent les podcasts complets des émissions en podcasts individuels par sujet : Quentin Gibeaux, bénévole à l’April, et mon collègue Frédéric Couchet.<br/><br />
<br />
Vous retrouverez sur notre site web, libreavous.org, toutes les références utiles, ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.<br />
<br />
N’hésitez à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu, mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondrons directement ou lors d’une prochaine émission. Toutes vos remarques sont les bienvenues à l’adresse à contact@libreavous.org.<br/><br />
Si vous préférez nous parler, vous pouvez nous laisser un message sur le répondeur de la radio pour réagir à l'un des sujets l'émission, pour partager un témoignage, vos idées, vos suggestions, vos encouragements ou pour nous poser une question. Le numéro du répondeur est le 09~72~51~55~46.<br />
<br />
Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission.<br />
<br />
Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et faites également connaître la radio Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
La prochaine émission aura lieu en direct mardi 5~mars 2024 à 15~heures~30. Notre sujet principal portera sur l’IGN, l’Institut national de l'information géographique et forestière, et les géo-communs. Notre invité sera Sébastien Soriano, directeur de l’IGN.<br />
<br />
Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 5~mars~2024. D’ici là, portez-vous bien.<br />
<br />
<b>Générique de fin d’émission : </b><em>Wesh Tone</em> par Realaze.</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Am%C3%A9liorer_la_diversit%C3%A9_en_luttant_contre_les_discriminations_-_Raphael_IslaAméliorer la diversité en luttant contre les discriminations - Raphael Isla2024-02-27T07:17:51Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/ameliorer-la-diversite-en-luttant-contre-les-discriminations ici] - Mars 2024 »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/ameliorer-la-diversite-en-luttant-contre-les-discriminations ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Logiciel_Libre_:_garant_de_notre_ind%C3%A9pendance_strat%C3%A9giqueLogiciel Libre : garant de notre indépendance stratégique2024-02-26T06:43:17Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/logiciel-libre-garant-de-notre-independance-strategique ici] - Mars 2024 »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/logiciel-libre-garant-de-notre-independance-strategique ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Asma_Mhalla_:_les_enjeux_et_les_perspectives_de_l%27IAAsma Mhalla : les enjeux et les perspectives de l'IA2024-02-24T06:37:49Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/asma-mhalla-les-enjeux-et-les-perspectives-de-l-ia Asma Mhalla : les enjeux et les perspectives de l... »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/asma-mhalla-les-enjeux-et-les-perspectives-de-l-ia Asma Mhalla : les enjeux et les perspectives de l’IA ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Le_logiciel_libre,_une_lutte_politique_pour_une_soci%C3%A9t%C3%A9_plus_juste_et_plus_durable_-_BookynetteLe logiciel libre, une lutte politique pour une société plus juste et plus durable - Bookynette2024-02-23T14:08:42Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/le-logiciel-libre-une-lutte-politique-pour-une-societe-plus-juste-et-plus-durable-bookynette ici - F... »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/le-logiciel-libre-une-lutte-politique-pour-une-societe-plus-juste-et-plus-durable-bookynette ici - Février 2024]</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/FaqAG2024FaqAG20242024-02-19T14:21:57Z<p>FredericCouchet : FAQ pour l'AG du 16 mars 2024</p>
<hr />
<div>{{Introduction|Questions fréquentes concernant l'Assemblée générale du 16 mars 2024}}<br />
<br />
Si vous ne trouvez pas la réponse que vous cherchez dans cette FAQ,<br />
envoyez un message sur la liste "support-ag A april POINT" org ou<br />
appelez-nous au 01 78 76 92 80.<br />
<br />
==Je ne retrouve pas mon identifiant pour voter==<br />
<br />
Consultez le courriel de convocation à l'AG, il précise le lien pour<br />
voter ainsi que votre identifiant. Sinon contactez la liste de support<br />
pour l'AG : support-ag AT april POINT org.<br />
<br />
== Je viens d'adhérer, puis-je voter ?==<br />
<br />
Vous pouvez voter à l'AG. Si vous estimez ne pas pouvoir donner en<br />
conscience un avis sur les votes, car vous n'étiez pas membre en 2019,<br />
vous pouvez choisir le vote "abstention". Mais il est important que<br />
vous votiez, et participiez ainsi à atteindre le quorum, sans quoi<br />
l'AG ne peut valablement délibérer.<br />
<br />
==Je n'arrive pas à inscrire ma présence sur le wiki==<br />
<br />
Vous devez cliquer sur "Modifier" sur la page dédiée à l'AG ou [https://wiki.april.org/index.php?title=Assemblee_generale_16_mars_2024&action=edit&section=13 directement sur le lien]. Pour modifier il faut avoir un compte sur le wiki, si ce n'est pas le cas vous pouvez [https://wiki.april.org/index.php?title=Sp%C3%A9cial:Cr%C3%A9er_un_compte&returnto=Accueil vous créer un compte].<br />
<br />
Si vous rencontrez des problèmes, adressez un message à la liste<br />
dédiée support-ag AT april POINT org en expliquant précisément votre<br />
problème et en joignant si possible une copie d'écran.<br />
<br />
==Vous dites que je ne suis pas à jour, alors que je viens de payer ma cotisation==<br />
<br />
Il est possible que l'équipe Vie associative n'ait pas encore mis à jour votre<br />
fiche suite au paiement de votre cotisation (par exemple, si vous avez<br />
envoyé un chèque, payé par virement, ou envoyé une autorisation de prélèvement, il y a un délai de traitement de<br />
notre côté). N'hésitez pas à envoyer un courriel à support-ag AT april POINT org.<br />
<br />
==Le vote en ligne pour l'assemblée générale (AG) est-il anonyme ?==<br />
<br />
Le vote en ligne respecte votre anonymat, au sens où les votes ne sont<br />
pas publiés. Néanmoins, votre vote n'est pas stocké de façon anonyme dans<br />
le logiciel de vote, et les administrateurs de la plate-forme de vote ont<br />
accès à ces données.<br />
<br />
La question plus précise relative à la nécessité ou non d'un stockage<br />
"anonyme" des votes est discutée ici : [[Discussion vote électronique]].<br />
<br />
==Pour quelle période le vote électronique est-il ouvert ?==<br />
<br />
La clôture du vote se fait l'avant-veille de l'AG à 20 h 00. Pour l'AG<br />
le vote sera clos le jeudi 14 mars 2024 à 20 h 00.<br />
<br />
==J'ai essayé de me connecter pour voter en ligne sans succès. J'ai changé mon mot de passe, sans plus de résultat==<br />
<br />
Des raisons de l'erreur peuvent être :<br />
<br />
* Utilisez-vous votre identifiant (première lettre du prénom + nom, le tout attaché) ou votre adresse email pour vous identifier ? Vous devez utiliser l'alias mail en @april.org constitué de la façon suivante: identifiant (première lettre du prénom + nom)@april.org. <br />
Lors de l'ouverture du vote un courriel vous a été envoyé contenant les informations d'authentification. <br />
<br />
*Avez-vous changé votre mot de passe sur notre site web ou sur notre outil de vote ? Vous aurez remarqué que les noms de domaine sont différents (april.org vs. poll-o.fr). Les deux bases sont distinctes et non synchronisées. Un changement dans l'une d'entre elles n'est pas reproduit dans l'autre.<br />
<br />
==Je me connecte au site sans problèmes, mais je ne reçois pas de mot de passe pour l'abonnement à la liste dédiée AG==<br />
<br />
Changez l'adresse email où doit arriver le mot de passe. Si le<br />
problème persiste, contactez l'équipe Vie associative<br />
(secretaire AT april POINT org) en vous efforçant de donner le plus possible de détails .<br />
<br />
==Ma cotisation couvre uniquement la période jusqu'au 1er mars 2024, mais j'ai voté avant : mon vote est-il nul et non avenu ? ==<br />
<br />
Non, si vous régularisez l'année avant l'AG.<br />
<br />
==Est-il possible de régler ma cotisation le jour de l'AG ?==<br />
<br />
Oui. Le jour de l'AG il y a un espace accueil pour l'émargement des présents et pour le paiement des cotisations. Cela implique donc que vous n'aurez pas voté en ligne, mais que vous voterez lors de l'AG.<br />
<br />
==J'aimerais régler ma cotisation par carte bancaire via le site, mais je rencontre des problèmes==<br />
<br />
Adressez votre message à la liste support-ag AT april POINT org en<br />
donnant un lien vers votre espace personnel et l'identifiant de<br />
connexion ou contactez l'équipe Vie associative pour qu'elle vérifie les archives (secretaire AT april POINT org). <br />
<br />
Pour tout cas particulier tel :<br />
<br />
* Je viens de régler ma cotisation par paiement via le site web. Pourriez-vous vérifier que votre compte a bien était crédité de cette somme et nous le faire savoir ?<br />
<br />
* J'ai choisi un règlement de cotisation par prélèvements automatiques mais l'état des lieux n'est pas à jour dans la catégorie idoine de mon espace personnel. <br />
<br />
* J'ai voulu régler ma cotisation par carte bancaire, mais j'ai un problème de paiement ("carte refusée") : que faire ?<br />
<br />
S'adresser à l'équipe Vie associative (secretaire AT april POINT org) en expliquant vos difficultés de la façon la plus détaillée possible.<br />
<br />
==Je n'ai pas bien compris comment inscrire ma participation à l'AG==<br />
<br />
Vous pouvez vous rendre sur la page wiki dédiée à l'évènement, à la [[Assemblee_generale_16_mars_2024#Tableau_pr.C3.A9sences.2C_repas_et_h.C3.A9bergement|section correspondant aux inscriptions ]] et l'éditer (après connexion). Ainsi, vous rajoutez votre nom dans les tranches horaires qui vous conviennent. N'oubliez pas de nous indiquer votre éventuelle présence au déjeuner.<br />
<br />
Si vous rencontrez des problèmes, adressez un message à la liste dédiée support-ag AT april POINT org.<br />
<br />
[[Catégorie:Animation]]</div>FredericCouchethttps://wiki.april.org/w/OSINT_:_nos_vies_priv%C3%A9es_entre_ombre_et_lumi%C3%A8reOSINT : nos vies privées entre ombre et lumière2024-02-16T14:13:46Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/osint-nos-vies-privees-entre-ombre-et-lumiere ici] - Février 2024 »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/osint-nos-vies-privees-entre-ombre-et-lumiere ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Stupeur_au_sein_du_num%C3%A9rique_fran%C3%A7ais_:_Microsoft_h%C3%A9bergeur_des_donn%C3%A9es_de_sant%C3%A9Stupeur au sein du numérique français : Microsoft hébergeur des données de santé2024-02-15T12:16:02Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/stupeur-au-sein-du-numerique-francais-microsoft-hebergeur-des-donnees-de-sante ici] - Février 2024 »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/stupeur-au-sein-du-numerique-francais-microsoft-hebergeur-des-donnees-de-sante ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Assemblee_generale_16_mars_2024Assemblee generale 16 mars 20242024-02-13T08:23:58Z<p>Mgarnero : /* Boîte à idées */</p>
<hr />
<div>= Assemblée Générale (samedi 16 mars 2024) =<br />
<br />
''(l'AG se tient début 2024 mais concerne le bilan de l'année 2023 et les perspectives de l'année à venir)''<br />
<br />
L'assemblée générale aura lieu '''samedi 16 mars de 14 h à 18 h dans l'amphi Durand (bâtiment Esclangon) à la Faculté des Sciences et Ingénierie, 4, place Jussieu 75005 Paris. Accueil à partir de 13 h 30.<br />
<br />
En cas de souci un numéro à connaître : 06 60 68 89 31 (Frédéric Couchet)<br />
<br />
'''Merci de vous munir du [https://www.april.org/files/document-membres-AG.pdf document PDF] qui pourrait vous être demandé par les vigiles à l'accueil. Imprimez-le ou gardez en trace sur votre téléphone mobile, ordinateur portable…'''<br />
<br />
L'organisation de notre assemblée générale a été possible grâce à l'aide de Cécile Braunstein (maître de conférence au laboratoire d'Informatique de paris 6), que nous remercions très chaleureusement.<br />
<br />
Nous organiserons une soirée le samedi à partir de 19 h. L'organisation de cette soirée dépendra du nombre de personnes présentes et des possibilités à notre disposition. Nous devons connaître à l'avance le nombre de personnes intéressées par une possible soirée. '''Merci donc d'indiquer dans le document, partie [[#Tableau présences, repas et hébergement]], si vous souhaitez participer à la soirée (ou par courriel à support-ag A april POINT org). La date limite pour répondre est vendredi 7 mars à 9h00'''. <br />
<br />
== Besoin d'aide, des questions ? FAQ ==<br />
<br />
N'hésitez pas à nous contacter par courriel (support-ag A april POINT org) ou par téléphone (01 78 76 92 80).<br />
<br />
Nous avons réuni dans [[FaqAG2024|cette FAQ]] les questions et problèmes qui peuvent se poser à l'occasion de l'AG (vote, inscription aux repas, etc...).<br />
<br />
Pensez à consulter également [http://www.april.org/faq-adherents la page sur le site de l'April].<br />
<br />
==Lieux==<br />
<br />
Tous les lieux sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.<br />
<br />
*Le samedi 16 mars 2024, accueil à partir de 13h30, rencontre avec Mathilde Saliou à 14h puis assemblée générale de 14h30 à 18h :<br />
<br />
Faculté des Sciences et Ingénierie<br><br />
bâtiment Esclangon<br><br />
Amphi Durand<br><br />
4, place Jussieu<br><br />
75005 Paris<br><br />
<br />
Métro : Jussieu (ligne 7 et 10)<br><br />
<br />
* sinon, en sortant du métro il faut entrer dans l'université et suivre le fléchage<br />
<br />
[https://sciences.sorbonne-universite.fr/vie-de-campus-sciences/accueil-vie-pratique/plan-du-campus plan PDF de la faculté]<br />
<br />
[https://www.openstreetmap.org/node/707655942 Voir sur OpenStreetMap].<br />
<br />
[??? Tous les moyens d’accès au site principal de l’université].<br />
<br />
'''[http://www.april.org/files/document-membres-AG.pdf Merci d'imprimer et de vous munir du document] qui pourrait vous être demandé par les vigiles à l'accueil. Imprimez-le ou gardez-en trace sur votre téléphone mobile, ordinateur portable…'''<br />
<br />
==Co-voiturage==<br />
<br />
===Co-vélo / co-piéton===<br />
Station Vélib' à proximité.<br />
<br />
== Conférences éclairs samedi 16 mars 2024 de 10 h à 12 h ==<br />
<br />
Pour l'organisation des conférences éclairs voir la [https://wiki.april.org/w/Organisation-de-conferences-eclair page dédiée]<br />
<br />
Le matin, un temps de conférences éclairs est prévu, ouvert à toute personne, membre ou pas de l'April. <br />
<br />
Les conférences éclairs auront lieu '''samedi 16 mars de 10 h à 12 h dans l'amphi Durand (bâtiment Esclangon) à la Faculté des Sciences et Ingénierie, 4, place Jussieu 75005 Paris'''. L'accueil commencera à partir de '''09 h 30'''.<br />
<br />
Les conférences éclairs sont des présentations très courtes (six minutes) qui s’enchaînent sur des sujets variés: présentation d'une initiative, d'un livre ou d'un film, d'un logiciel, d'un langage, d'un service, d'une association... C'est la diversité des sujets qui fait la richesse de l'événement. On découvre des personnes et des projets, on partage des idées, on ressort plein d'énergie et de motivation. Bien sûr, puisque cette proposition s'inscrit dans le contexte de l'April, ces conférences auront toutes un lien avec le Libre, entendu au sens large (logiciel libre, données ouvertes, licences libres...).<br />
<br />
Les conférencières et conférenciers pourront utiliser un support pour leur présentation, au format PDF ou lien vers une présentation web (type reveal.js), qui sera à envoyer avant le 14 mars minuit à l'équipe d'organisation pour réduire le plus possible les aléas logistiques pendant l'événement. Pour favoriser un déroulé fluide et dynamique, il n'y aura ni questions ni interventions du public entre les présentations. <br />
<br />
Le '''programme prévisionnel''' est détaillé ci-dessous. N'hésitez pas à nous [mailto:support-ag@april.org signaler votre présence par courriel] si vous venez uniquement aux conférences éclairs. Si vous être membre de l'April, et que vous venez à la fois aux conférences éclairs et à l'AG, merci de vous inscrire dans le tableau plus bas dans cette page.<br />
<br />
Sur le temps de midi, partage d'un repas tiré du sac pour faire connaissance et poursuivre les échanges sur un mode convivial. Chaque personne intéressée devant apporter son repas. Ce repas aura lieu sur place et sans doute debout.<br />
<br />
<br />
{|border="1"<br />
|-<br />
! '''Ordre'''<br />
! '''Orateur/Oratrice'''<br />
! '''Titre'''<br />
! '''Diaporama'''<br />
! '''URL'''<br />
|-<br />
| 1<br />
| Khrys<br />
| Démasculiniser (l'histoire de) l'informatique<br />
| [https://khrys.eu.org/conferences/d%C3%A9masculiniser/ La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 2<br />
| Vincent-Xavier Jumel<br />
| Future forge des communs numérique de l'Éducation Nationale<br />
| [https://codimd.apps.education.fr/p/SHalhCxxa La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 3<br />
| Vincent Calame<br />
| Moteur de recherche avancé développé dans Libre à vous<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/03-diapos-moteur-de-recherche.pdf La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 4<br />
| Yvette Allimann<br />
| À quoi servent et comment se passe l’élaboration de normes ISO<br />
| <br />
| <br />
|-<br />
| 5<br />
| Denis Dordoigne<br />
| Comment ouvrir un ticket de bug d'un logiciel libre<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/05-6min-bug.pdf La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| <del>6</del><br />
| <del>Olivier Lader</del><br />
| <del>Logiciel propriétaire, biais de confirmation et l'Éducation Nationale</del><br />
| <br />
| <br />
|-<br />
| 7<br />
| Jean-Paul Chaput et Marie-Minerve Louerat<br />
| Coriolis, un logiciel libre de conception des puces libres<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/07-Coriolis_AprilJussieu2024_vl.pdf La présentation]<br />
| http://coriolis.lip6.fr/<br />
|-<br />
| 8<br />
| Georges Khaznadar<br />
| GNU-Linux, c'est dans la poche<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/08-linux-en-poche.pdf La présentation]<br />
| https://usb.freeduc.org/<br />
|-<br />
| 9<br />
| Michael Opdenacker<br />
| Anki : n'oubliez plus ce que vous apprenez !<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/09-michael-opdenacker-anki.pdf La présentation]<br />
| https://fr.wikipedia.org/wiki/Anki<br />
|-<br />
| 10<br />
| Françoise Conil<br />
| Extraction des métadonnées des essais cliniques sur le COVID-19<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/10-Extraction_des_metadonnees_des_essais_cliniques_sur_le_COVID-19.pdf La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 11<br />
| Association Nos oignons<br />
| Association Nos oignons : Activités et perspectives. Intérêt du réseau Tor<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/11-2024-03-17_Nos-oignons_April.pdf La présentation]<br />
| https://nos-oignons.net/<br />
|-<br />
| 12<br />
| Pablo Rauzy<br />
| Paradoxe libriste et logiciel émancipateur<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/12-paradoxe-libriste.pdf La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 13<br />
| Nicolas Dandrimont, David Douard<br />
| Software Heritage, l'archive universelle du logiciel libre <br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/13-2024-03-16-April-presentation.pdf La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 14<br />
| Isabelle Carrère<br />
| Présentation d'ANTANAK et du réseau RéFIS<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/14-AK_presentation_2024.pdf La présentation]<br />
| https://antanak.com/<br />
|-<br />
| 15<br />
| Frédéric Urbain<br />
| FramaSpace<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/15-prez-framaspace.pdf La présentation]<br />
| <br />
|-<br />
| 16<br />
| Cédric Dumond<br />
| Librezo, un collectif libristes prônant l'auto-hébergement<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/16-prez_5mn_librezo.pdf La présentation]<br />
| https://librezo.fr/<br />
|-<br />
| 17<br />
| Magali Garnero - Bookynette<br />
| Vous êtes la bonne personne!<br />
| [https://april.org/files/conferences-eclairs-16-mars-2024/17-20240316_vous_êtes_la_bonne_personne.pdf La présentation]<br />
|<br />
|-<br />
|}<br />
<br />
<!--<br />
N'hésitez pas [mailto:confseclairs@april.org à proposer une intervention]. Le format court et le contexte amical offrent un cadre rassurant. L'objectif est vraiment d'encourager chacun et chacune à oser venir partager sur un sujet. La date limite pour l'envoi des propositions est le 29 février. Il suffit d'écrire à confseclairs@april.org en indiquant votre nom ou votre pseudo ainsi que le titre de votre présentation et éventuellement un lien pour en savoir plus.<br />
--><br />
<br />
== Ordre du jour prévisionnel de l'assemblée générale ==<br />
<br />
L'AG (y compris la conférence d'ouverture) est réservée aux membres de l'April. On vous glisse [https://www.april.org/adherer le lien pour devenir membre] :)<br />
<br />
Samedi 16 mars 2024 de 14 h à 18 h :<br />
<br />
De 14 h à 14 h 30, la journalise Mathilde Saliou fera une présentation intitulée « Comment rendre le numérique plus inclusif ». Le [https://april.org/files/20240316-diaporama-mathilde-saliou.pdf diaporama de la présentation].<br />
<br />
Ordre du jour de l'AG (à partir de 14 h 30) :<br />
<br />
* présentation du rapport d'activité et vote du quitus ;<br />
<br />
* présentation du bilan financier et vote du quitus ;<br />
<br />
* élection du conseil d'administration ;<br />
<br />
* questions diverses.<br />
<br />
* perspectives brainstorming général avec les adhérents<br />
<br />
== Procurations ==<br />
<br />
Pour les personnes membres absentes, il est possible de se faire représenter lors de l'assemblée générale par une autre personne membre à jour de cotisation, si celle-ci est munie d'une procuration signée.<br />
<br />
Le jour de l'assemblée générale, seule la liste des personnes votantes et le décompte global des votes sera public. Les personnes qui auront voté électroniquement peuvent bien sûr venir à l'assemblée générale mais ne pourront évidemment pas re-voter ce jour là sur les quitus.<br />
<br />
Nous acceptons trois formes de procuration :<br />
<br />
* version papier : la traditionnelle procuration papier signée (confiée au membre représentant ou envoyée par la poste) :<br><br />
April <br><br />
44/46 rue de l'Ouest<br><br />
Bâtiment 8<br><br />
75014 Paris<br />
<br />
* version électronique : même texte que la version papier, le courriel devant être signé si possible de la clé GPG de la personne adhérente et envoyé à la personne adhérente représentant celle-ci, avec copie à '''support-ag A april POINT org'''.<br />
<br />
* Si la personne adhérente n'a pas de clé GPG, nous acceptons un courriel simple. Toutefois, si la procuration est envoyée depuis une adresse différente de l'adresse d'inscription à l'association, nous enverrons une demande de confirmation à la personne adhérente par courriel à l'adresse d'inscription à l'association.<br />
<br />
Le délai maximum pour la réception des procurations transmises par courrier papier et par courrier électronique, afin qu'elles soient prises en compte lors de l'AG, est fixé au '''jeudi 14 mars 2024 à 08 h 00'''.<br />
<br />
Le texte de la procuration est :<br />
<br />
----<br />
<br />
Version A - Vous savez qui désigner :<br />
<br />
Association April<br />
<br />
Procuration<br />
<br />
Assemblée Générale Ordinaire du 16 mars 2024<br />
<br />
Je soussigné⋅e, [VOS PRÉNOM ET NOM][et Nom personne morale le cas échéant],<br />
membre de l'April, à jour de ma cotisation, donne procuration à [PRÉNOM ET NOM]<br />
[et Nom personne morale le cas échéant], membre de l'April, à jour de sa<br />
cotisation, s'il/elle l'accepte, et à défaut à toute autre personne membre du Conseil<br />
d'Administration désignée par lui/elle, pour l'Assemblée Générale Ordinaire<br />
de l'April du samedi 16 mars 2024<br />
<br />
Fait pour valoir ce que de droit.<br />
<br />
À [VOTRE COMMUNE], le [DATE]<br />
<br />
bon pour pouvoir<br />
<br />
[SIGNATURE]<br />
<br />
----<br />
<br />
Version B - Vous ne savez pas qui désigner : <br />
<br />
Association April<br />
<br />
Procuration<br />
<br />
Assemblée Générale Ordinaire du 16 mars 2024<br />
<br />
Je soussigné⋅e, [VOS PRÉNOM ET NOM][et Nom personne morale le cas échéant],<br />
membre de l'April, à jour de ma cotisation, donne procuration à toute <br />
personne membre du Conseil d'Administration, pour l'Assemblée Générale Ordinaire<br />
de l'April du samedi 16 mars 2024<br />
<br />
Fait pour valoir ce que de droit.<br />
<br />
À [VOTRE COMMUNE], le [DATE]<br />
<br />
bon pour pouvoir<br />
<br />
[SIGNATURE]<br />
<br />
==Flux vidéo==<br />
<br />
Un flux vidéo de l'AG devrait être disponible [https://visio.octopuce.fr/b/fre-8o7-ruj sur ce salon BigBlueButton] (merci à la société Octopuce pour la mise à disposition de ce serveur).<br />
<br />
==Soirée festive samedi 16 mars à 19 h==<br />
<br />
Une soirée festive est prévue samedi à partir de 19 h dans le tiers-lieu [https://cesure.paris/ Césure], à quelques minutes à pied du lieu de l'AG.<br />
<br />
Adresse :<br />
<br />
Césure<br />
<br />espace « La cantine »<br />
<br />13 rue Santeuil<br />
<br />75005 Paris<br />
<br />
À savoir qu'une initiation à la tarantelle (dance folk italienne) à 19h, ainsi qu'un concert du groupe ''I Carbonari'' (spécialisé en tarantelles) [https://cesure.paris/agenda/bal-tarentelle-2024-03-16 sont prévus ce soir-là à Césure] :)<br />
<br />
Une offre restauration à prix doux (plats à 8,50 euros) sera assurée par l'association [https://www.spadella.fr/ Spadella], qui proposera des plats végétariens et végans d'inspiration italienne.<br />
<br />
Selon [https://cesure.paris/espaces le plan de Césure] La cantine est située au 1er étage. Pour les personnes à mobilité réduite, il faut entrer par la porte 1 qui permet d'accéder aux ascenseurs. La porte 2, qui permet d'accéder directement à La cantine, a des escaliers uniquement.<br />
<br />
'''Le repas est à la charge des personnes présentes.'''<br />
<br />
==Participer sans être à Paris==<br />
<br />
Vous ne viendrez pas à Paris pour l'AG, mais vous avez quand même envie de vous réunir avec d'autres membres April...<br />
N'hésitez pas à organiser un événement simultanément.<br />
Et tenez nous au courant via un courriel à contact AT april DOT org , nous pourrons envoyer un courriel à ceux qui habitent pas loin de chez vous.<br />
<br />
=Personnes et structures invitées=<br />
==Invitation aux groupes d'utilisateurs et utilisatrices de logiciels libres==<br />
<br />
Dans l'objectif de renforcer encore ses liens avec les groupes d'utilisateurs et utilisatrices de logiciels libres (GULL) qu'ils soient membres ou pas de l'April, nous souhaitons inviter, comme chaque année, des représentants de GULL à notre AG. N'hésitez pas à nous contacter : contact AT april DOT org ou au 01 78 76 92 80.<br />
<br />
=Planning (en cours d'élaboration)=<br />
<br />
==Samedi 16 mars 2024 (Faculté des Sciences et Ingénierie)==<br />
<br />
- 09 h 30 :<br />
<br />
::* accueil<br />
::* conférences éclairs<br />
<br />
- 13 h 30 - 14 h 00 :<br />
<br />
::* accueil des membres pour l'AG : signature feuille d'émargement, paiement de cotisation, distribution bulletins de vote<br />
<br />
- 14 h 00 - 14 h 30 : la journaliste Mathilde Saliou fera une présentation intitulée « Comment rendre le numérique inclusif ».<br />
<br />
- 14 h 30 - 18 h 00 : '''Assemblée générale de l'April''' (courte pause à 16 h 00)<br />
<br />
::* émargement des personnes présentes et calcul du quorum<br />
::* présentation du rapport d'activité et vote du quitus<br />
::* présentation du bilan financier et vote du quitus<br />
::* élection du conseil d'administration<br />
::* discussions/perspectives<br />
<br />
<br />
- 18 h - 18 h 45 :<br />
<br />
::* sortie pour prendre l'air, discussions informelles, signature de clés GPG ([http://2008.rmll.info/Key-Signing-Party.html Déroulement de la «signing party» des RMLL] [http://cryptnet.net/fdp/crypto/keysigning_party/en/keysigning_party.html Le HowTo «officiel»])<br />
<br />
- 18 h 50 : départ groupé pour la soirée<br />
<br />
- 19 h 00 - : soirée April dans un lieu accessible PMR et avec options végétariennes<br />
<br />
==Dimanche 17 mars 2024 - FPH (Paris) et à distance ==<br />
<br />
La journée du dimanche est consacré à un April Camp : des ateliers en petits groupes ou discussions en plénière. L'April Camp est ouvert à toute personne, membre ou pas de l'April.<br />
<br />
Il a lieu de 09h à 18h, en présentiel à la FPH et à distance. Pour les détails pratiques et pour s'inscrire [https://pad.april.org/p/aprilcampdimanche17mars2024 allez sur le bloc-notes]<br />
<br />
===Adresse===<br />
<br />
Fondation Charles Mayer pour le Progrès humain (FPH)<br />
<br />
38 Rue Saint-Sabin<br />
<br />
75011 Paris <br />
<br />
Métro: Bréguet-Sabin<br />
<br />
=Tableau présences, repas et hébergement=<br />
<br />
'''Pour l'hébergement'''<br />
<br />
Les membres qui le peuvent et le souhaitent proposent d'héberger d'autres membres. Quelques jours avant l'AG, nous essayons d'apparier les demandes.<br />
<br />
Voir également la liste d'[[AG2007Hebergement|hébergements payants]].<br />
<br />
'''Comment s'inscrire sur le tableau ci-dessous'''<br />
*Connectez-vous au wiki. Si vous n'avez pas de compte April MediaWiki - qui est différent de votre compte membre sur april.org - vous pouvez [https://wiki.april.org/index.php?title=Sp%C3%A9cial:Cr%C3%A9er_un_compte&returnto=Assemblee+generale+16+mars+2024 '''le créer à cette page'''].<br />
*Cliquez sur "modifier"<br />
*Copiez le premier pavé qui suit la ligne commençant par "{|", et collez-le à la fin du tableau (en laissant toujours le "|}")<br />
*Remplacez les intitulés par vos informations<br />
*Puis allez en bas de page et cliquez sur "sauvegarder".<br />
*Répondez à la question qui vous est éventuellement posée (pour éviter les spams).<br />
<br />
'''On peut s'inscrire autrement qu'en modifiant le wiki ?'''<br />
<br />
Oui ! En alternative au wiki, vous pouvez envoyer un courriel à support-ag A april POINT org, en précisant les informations vous concernant.<br />
<br />
== Personnes présentes ==<br />
<br />
{|border="1"<br />
|-<br />
! '''Membre (localisation)'''<br />
! '''Nombre de personnes'''<br />
! '''Jour d'arrivée (heure lieu)'''<br />
! '''Jour de départ (heure, lieu)'''<br />
! '''Présence aux confs éclairs, ouvertes aussi aux non-membres (oui)'''<br />
! '''Présence à l'AG, réservée aux membres April (oui)'''<br />
! '''Besoin d'hébergement'''<br />
! '''Possibilité d'héberger (détailler)'''<br />
! '''Participation à l'éventuel dîner samedi, réservé aux membres April (nb personnes)<br />/!\Nombre de places limité : ne tarder pas à vous inscrire/!\'''<br />
! '''Participation à l'éventuel déjeuner dimanche, ouvert aussi aux non-membres (nb personnes)'''<br />
|-<br />
| Bookynette<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 13h<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| plus maintenant<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Echarp<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 13h<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Jean-Christophe Becquet (Grenoble)<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 14h<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Michael Opdenacker (84)<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 7h30<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| ?<br />
| 0<br />
|- <br />
| Gee<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 18h<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Frédéric Couchet (93)<br />
| 1<br />
| Samedi matin (09 h ou 09 h 30)<br />
| Dimanche (heure indéfinie)<br />
| Oui<br />
| Oui<br />
| Non<br />
| Non (places déjà réservées)<br />
| Oui (1)<br />
| Ne sait pas<br />
|-<br />
| Étienne Gonnu (93)<br />
| 1<br />
| Samedi 9 h 30<br />
| je ne sais pas encore<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| je ne sais pas encore<br />
|-<br />
| François Poulain (61)<br />
| 1<br />
| Samedi 9 h 30<br />
| Dimanche après midi<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Françoise Conil (Lyon)<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 15h<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Isabella Vanni (salariée, 75)<br />
| 1<br />
| Samedi 9 h 30<br />
| je ne sais pas encore<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| oui (1)<br />
| je ne sais pas encore<br />
|-<br />
| Denis Dordoigne (IdF)<br />
| 1<br />
| samedi 10h00<br />
| samedi 20h00<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| oui (une place)<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Laurent Costy<br />
| 1<br />
| samedi 09h00<br />
| dimanche 16h00<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 1<br />
|-<br />
| Jean-Baptiste Gieu (Paris)<br />
| 1<br />
| samedi 09h30<br />
| samedi 18h45<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| peut-être<br />
| non<br />
|-<br />
| Georges Khaznadar (Dunkerque)<br />
| 2<br />
| samedi 9h30<br />
| samedi 18h50<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 0<br />
| 0<br />
|-<br />
| Jean-Philippe Barbier (Argenteuil)<br />
| 1<br />
| samedi 14h<br />
| samedi 19h<br />
| non<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 0<br />
| 0<br />
|-<br />
| Marie-Minerve Louerat (Sorbonne Université-CNRS, Paris)<br />
| 1<br />
| samedi 09h30<br />
| samedi 18h45<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 0<br />
| 0<br />
|-<br />
| Thierry M. (78)<br />
| 1<br />
| samedi 14h00<br />
| je ne sais pas encore<br />
| non<br />
| <del>oui</del> non (impondérable)<br />
| non<br />
| non<br />
| <del>oui</del> non (impondérable)<br />
| non<br />
|-<br />
| Vincent-Xavier Jumel (IdF)<br />
| 1<br />
| Samedi matin 10h<br />
| Samedi après-midi 16h30 (avec peut-être un retour)<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| si oui (1,5 personnes)<br />
| non<br />
|-<br />
|Éric Goazou<br />
|1<br />
|Samedi 10 h<br />
|?<br />
|oui<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|oui (1)<br />
|?<br />
|-<br />
| Loïc Dayot (Paris)<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| dimanche 17h<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1 pas sûr<br />
| 1<br />
|-<br />
| Franck Sinimalé (Noisy-le-Grand)<br />
| 1<br />
| samedi 9h30<br />
| samedi 18h50<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| non<br />
| non<br />
|-<br />
|Vincent Calame<br />
|1<br />
|samedi 9h30<br />
|dimanche 18h<br />
|oui<br />
|oui<br />
|non<br />
|noin<br />
|1<br />
|1<br />
|-<br />
|Samuel Ortion (91)<br />
|1<br />
|samedi 9h30<br />
|dimanche 18h <br />
|oui<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|1<br />
|1<br />
|-<br />
| Jean-François Lance (93)<br />
| 1<br />
| samedi 14h<br />
| samedi 18h30<br />
| non<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 0<br />
| 0<br />
|-<br />
| Laurent Boivin<br />
| 1<br />
| samedi 10h (me faire signe si besoin de bras + tôt)<br />
| samedi 18h30<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 0<br />
| 0<br />
|-<br />
| Nicolas Dandrimont<br />
| 1<br />
| samedi 10h<br />
| samedi soir<br />
| oui<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 1<br />
| 0<br />
|-<br />
| Benjamin F<br />
| 1<br />
| samedi 14h<br />
| samedi 18h<br />
| non<br />
| oui<br />
| non<br />
| non<br />
| 0<br />
| 0<br />
|-<br />
|Olivier Pla<br />
|1<br />
|samedi entre 9h30 et 10h<br />
|samedi 18h<br />
|oui<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|-<br />
|Armony Altinier<br />
|1<br />
|samedi 14h<br />
|samedi 18h<br />
|non<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|-<br />
|Marc G alias Arkem<br />
|1<br />
|samedi 10h ou 14h<br />
|samedi 18h<br />
|peut-être<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|peut-être<br />
|non<br />
|-<br />
|Emmanuel Seyman<br />
|1<br />
|samedi 14h<br />
|samedi 18h<br />
|non<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|-<br />
|Eda<br />
|1<br />
|samedi 9h30<br />
|samedi 18h<br />
|oui<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|0<br />
|0<br />
|-<br />
|Dondup Bobanga Mpoko<br />
|1<br />
|samedi 9h30 <br />
|samedi après 18h <br />
|oui <br />
|oui <br />
|non <br />
|non <br />
|peut-être <br />
|non <br />
|-<br />
|Fabrice Mouhartem (94)<br />
|1<br />
|samedi ~10h <br />
|Ne sait pas encore<br />
|oui <br />
|oui <br />
|non <br />
|non <br />
|non<br />
|peut-être (1)<br />
|-<br />
|zaart<br />
|1<br />
|samedi ~10h <br />
|samedi soir<br />
|oui <br />
|oui <br />
|non <br />
|non <br />
|0<br />
|0<br />
|-<br />
|Fil<br />
|1<br />
|samedi ~10h <br />
|dimanche soir<br />
|oui <br />
|oui <br />
|non <br />
|oui (1 place) <br />
|1<br />
|1<br />
|-<br />
|Benoît Sibaud<br />
|1<br />
|samedi ~10h<br />
|samedi 18h<br />
|oui<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|-<br />
|Paul J<br />
|1<br />
|samedi 10h<br />
|samedi 12h<br />
|oui<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|non<br />
|-<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|<br />
|-<!!!!!!------- NE RIEN INSCRIRE SOUS CETTE LIGNE ------><br />
! '''Membre (localisation)'''<br />
! '''Nombre de personnes'''<br />
! '''Jour d'arrivée (heure lieu)'''<br />
! '''Jour de départ (heure, lieu)'''<br />
! '''Présence aux confs éclairs, ouvertes aussi aux non-membres (oui)'''<br />
! '''Présence à l'AG, réservée aux membres April (oui)'''<br />
! '''Besoin d'hébergement'''<br />
! '''Possibilité d'héberger (détailler)'''<br />
! '''Participation à l'éventuel dîner samedi, réservé aux membres April (nb personnes)<br />/!\Nombre de places limité : ne tarder pas à vous inscrire/!\'''<br />
! '''Participation à l'éventuel déjeuner dimanche, ouvert aussi aux non-membres (nb personnes)'''<br />
|-<br />
|}<br />
<br />
= Communiquer sur l'AG et sur les conférences-éclairs autour de vous =<br />
<br />
Des messages que vous pouvez relayer sur Mastodon :<br />
<br />
*[https://pouet.april.org/@aprilorg/112088192888183749 Annonce/rappel AG]<br />
*[https://pouet.april.org/@aprilorg/112088195556118362 Annonce/rappel confs-éclairs]<br />
*[https://pouet.april.org/@aprilorg/112088261167143023 Suggestion d'adhérer à l'April à l'occasion de l'AG]<br />
<br />
=Liste des choses à faire=<br />
<br />
Pour participer à l'organisation, merci de vous inscrire à la liste ''orga A april POINT org''<br />
en suivant ce lien :<br><br />
http://listes.april.org/wws/info/orga<br />
<br />
Vous pouvez également noter votre nom ci-dessous :<br />
* <br />
<br />
''N. B. : Si vous souhaitez participer à une de ces tâches, marquez votre nom à côté, ou signalez-le par courriel à "orga A april POINT org". Merci !''<br />
<br />
* Être présent⋅e sur le stand à l'entrée de l'AG dès de 13 h 10 et au moins jusqu'à 14 h 00 pour faire signer les personnes présentes : '''Bookynette, Éric Goazou et Isa'''<br />
* Être présent⋅e sur le stand à l'entrée de l'AG dès de 14 h 30 à 15 h pour faire signer les personnes présentes : '''Bookynette, Éric Goazou et Isa'''<br />
* Chercher le matos au local (docs, goodies, marchandise) :<br />
<br />
=Point forts, points de vigilance=<br />
<br />
Voir le fonctionnement sur la page [[Les Points Forts et les Points de Vigilance]]<br />
<br />
Vous pouvez [[Assemblee_generale_25_mars_2023#Point_forts_.2F_points_de_vigilance|consulter les point relatifs à l'AG précédente]] qui a eu lieu le 25 mars 2023.<br />
<br />
Il est nécessaire de se connecter pour modifier la présente page. Si vous n'avez pas de compte April MediaWiki - qui est différent de votre compte membre April - vous pouvez [https://wiki.april.org/index.php?title=Sp%C3%A9cial:Cr%C3%A9er_un_compte&returnto=Assemblee+generale+16+mars+2024 le créer à cette page]. En alternative, vous pouvez transmettre vos remarques par courriel à support-ag AT april POINT org (liste non publique).<br />
<br />
'''Points forts (+)'''<br />
<br />
En amont<br />
<br />
Le lieu<br />
<br />
* un amphi de taille cohérente (150 personnes) avec le nombre de personnes présentes (environ 45), ça ne laisse pas l'impression d'un amphi vide et ça laisse de la place pour accueillir plus de monde<br />
* le lieu est accessible, l'amphi est bien équipé en matériel<br />
* un super accueil humain par les personnes de Jussieu<br />
* dans Paris (presque central), pas loin du métro<br />
* un super plan<br />
* un quartier sympa<br />
<br />
Samedi matin - conférences éclairs<br />
<br />
* beaucoup de présents dès le samedi matin<br />
* parfaits déroulement et organisation des confs éclair<br />
* <del>17</del> 16 présentations sur des sujets variés et avec une diversité de personnes intervenantes<br />
* respect du timing des 6 minutes par présentation<br />
* découverte de projets<br />
* la clochette pour signaler la fin des 6 minutes<br />
* l'affichage du décompte horaire sur un écran de laptop<br />
* Le protocole photos a été utile (plusieurs personnes ne souhaitaient pas être prises en photo)<br />
* Deux photographes « April » (Loïc et Samuel) pour les photos plus Fil<br />
* super dynamique<br />
* beaucoup d'humour chez les intervenants<br />
* 6 intervenantes sur 17, soit plus de 35%<br />
<br />
<br />
Samedi - AG<br />
<br />
* une conférence introductive (sur la diversité de genre)<br />
* horaires respectés, on a même fini plus tôt que prévu<br />
* des remerciements pour le dynamisme, le fun dans les présentations des bilans<br />
* du café fait au percolateur pour la pause de 16h (les tests la semaine précédente n'étaient pas concluants)<br />
* viennoiseries, mandarines, quiche épinards/fromage pour la pause de 16h<br />
* la diffusion vidéo via BBB<br />
* Deux fois plus de personnes présentes sur place que l'an dernier<br />
* Plusieurs membres pour qui c'était la première AG<br />
* Le temps de présentation des membres du CA face à la salle<br />
* une bonne ambiance et de l'humour<br />
* deux adhésions le jour de l'AG<br />
<br />
Samedi - soirée<br />
<br />
* Une soirée pas loin du lieu de l'AG (à Césure, 10 minutes à pied)<br />
* nourriture végé (italienne) pas chère<br />
* soirée avec initiation et concert tarentelle<br />
<br />
Dimanche - April Camp<br />
<br />
* le repas du midi (omelettes aux champignons, riz, fromage) préparé par Loïc<br />
* de nouvelles têtes<br />
* le lieu (FPH) toujours aussi accueillant<br />
* les restes de la veille (viennoiseries)<br />
<br />
<br />
'''Points de Vigilance (-)'''<br />
<br />
En amont <br />
<br />
* Accuser réception des propositions de conf-éclair<br />
* Trouver un moyen plus simple pour permettre aux personnes de s'inscrire, la syntaxe wiki étant indigeste pour les personnes qui n'ont pas l'habitude de l'utiliser<br />
* Dommage pour le conflit d'agenda avec l'AG de l'Aful<br />
* Trouver un nom plus "vendeur" pour l'événement confs-éclairs ?<br />
* ne distribuer qu'un seul bulletin par votant plutôt que 3 qui ne seront jamais utilisés simultanément (déjà demandé [https://wiki.april.org/w/AG_23_mars_et_reunion_des_membres_24_mars_2019#Point_forts_.2F_points_de_vigilance depuis 2019])<br />
* Prévoir une personne pour poster des messages sur Mastodon (et suivre les éventuels commentaires)<br />
<br />
Samedi matin - conférences éclairs<br />
<br />
Samedi - AG<br />
<br />
* L'enregistrement BBB de la conférence de Mathilde Saliou et de l'AG n'est pas terrible. Il faudrait prévoir un enregistrement spécifique avec du matériel vidéo dédié (et pas une simple webcam)<br />
* Prévoir une bâche April ou autre pour cacher un peu le tableau vert qui est en bas de l'amphi<br />
* Il y avait de l'écho sur le salon de diffusion vidéo BBB. C'est lié au fait qu'il y avait un peu d'écho dans l'amphi et que le son pour BBB était capté par le micro Rode NT-USB. Pour l'an prochain, il faudra s'arranger pour récupérer le son des micros de l'amphi<br />
* Après la présentation de Mathilde Saliou, il y a eu 4 questions posées par des hommes (de mémoire) puis 1 par une femme. Le graphique de la page [https://frompoverty.oxfam.org.uk/how-to-stop-men-asking-all-the-questions-in-seminars-its-really-easy/ How to stop men asking all the questions in seminars – it’s really easy] compare le nombre de questions posées par les femmes si la première question est posée par une femme versus par un homme. Prévoir peut-être, pour la partie questions/réponses, une diapo avec être un graphique plus rapide à lire et/ou un texte encourageant les femmes présentes à poster la première question. Et/ou mettre en œuvre les suggestions de l'article :<br />
** augmenter la durée ou le nombre de questions réduit le déséquilibre dans les questions posées<br />
** avoir des questions et réponses courtes pour avoir plus de questions posées durant la période de questions/réponses<br />
** annoncer dès le départ que l'ordre des questions serait alternativement femme, homme.<br />
** l'article indique aussi que souvent ce sont les personnes plus agées qui posent les questions. Et que potentiellement les plus jeunes et les femmes ont souvent besoin de plus de temps pour formuler des questions et se donner le courage de poser la question. <br />
* Utiliser aussi le percolateur à café le matin ? +1 <br />
<br />
Dimanche - April Camp<br />
<br />
* Programme trop vague. S'il était plus précis, plus de personnes (nouvelles venues) aurait peut-être participé.<br />
<br />
=Boîte à idées=<br />
* il pourrait peut-être être sympa d'illustrer certaines diapos du rapport d'activité avec un dessin humoristique, fait spécialement pour cette occasion. Gee pourrait peut-être faire ça<br />
* Je ne sais pas si Gee aime faire ça mais illustrer l'AG au fil de l'eau avec ses dessins et commentaires marrants, ça peut continuer à contribuer à l'animation de l'AG. Ceci dit, si Gee n'est pas là [oui, Gee s'est inscrit], on peut aussi dédier quelqu'un qui utiliserait le générateur.<br />
* Pour la prochaine AG, on pourrait faire inscrire les personnes sur mobilizon.chapril. Avantages :<br />
** les personnes seraient plus autonomes (la syntaxe wiki n'est pas évidente pour tout le monde)<br />
** on collecterait automatiquement les adresse de contact des personnes participantes : super-pratique si on a besoin de les contacter<br />
** possibilité (à priori) d'indiquer un alias pour l'affichage public. En effet, certaines personnes pourraient ne pas souhaiter rendre publique leur participation à l'AG<br />
** à la fin des votes, proposer un origami avec les bulletins pour finir en mode jeu et que chacun reparte avec un souvenir<br />
[[Catégorie:Animation]]</div>Mgarnerohttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_20_fevrier_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 20 fevrier 20242024-02-12T16:40:26Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-20-fevrier-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Mars 2024 »</p>
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<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-20-fevrier-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Quelles_sont_les_conditions_d%E2%80%99un_num%C3%A9rique_et_d%E2%80%99une_IA_responsable_-_Vincent_CourboulayQuelles sont les conditions d’un numérique et d’une IA responsable - Vincent Courboulay2024-02-12T10:47:36Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/quelles-sont-les-conditions-d-un-numerique-et-d-une-ia-responsables ici] - Février 2024 »</p>
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<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/quelles-sont-les-conditions-d-un-numerique-et-d-une-ia-responsables ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Nos_donn%C3%A9es_de_sant%C3%A9,_c%27est_de_l%27or_pour_ceux_qui_peuvent_y_acc%C3%A9derNos données de santé, c'est de l'or pour ceux qui peuvent y accéder2024-02-10T13:06:15Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/nos-donnees-de-sante-c-est-de-l-or-pour-ceux-qui-peuvent-y-acceder ici] - Février 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/nos-donnees-de-sante-c-est-de-l-or-pour-ceux-qui-peuvent-y-acceder ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/L%27utilisation_des_donn%C3%A9es_dans_l%27%C3%89ducation_nationale_-_Philippe_AjuelosL'utilisation des données dans l'Éducation nationale - Philippe Ajuelos2024-02-09T13:43:27Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/l-utilisation-des-donnees-dans-l-education-nationale ici] - Mars 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/l-utilisation-des-donnees-dans-l-education-nationale ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Pour_un_num%C3%A9rique_plus_frugal_-_Antoine_AmarilliPour un numérique plus frugal - Antoine Amarilli2024-02-07T12:41:27Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/pour-un-numerique-plus-frugal ici] - Février 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/pour-un-numerique-plus-frugal ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_6_fevrier_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 6 fevrier 20242024-02-06T06:11:16Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-6-fevrier-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Février 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-6-fevrier-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Renforcer_la_cybers%C3%A9curit%C3%A9,_une_n%C3%A9cessit%C3%A9_vitale_pour_la_nationRenforcer la cybersécurité, une nécessité vitale pour la nation2024-02-05T17:20:01Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/anne-le-henanff-renforcer-la-cybersecurite-c-est-une-necessite-vitale-pour-la-nation ici] - Février... »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/anne-le-henanff-renforcer-la-cybersecurite-c-est-une-necessite-vitale-pour-la-nation ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Intelligence_artificielle_%C3%A0_l%27h%C3%B4pital_-_Entretien_avec_C%C3%A9dric_VillaniIntelligence artificielle à l'hôpital - Entretien avec Cédric Villani2024-02-02T10:18:21Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/intelligence-artificielle-a-l-hopital ici] - Mars 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/intelligence-artificielle-a-l-hopital ici] - Mars 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_30_janvier_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 30 janvier 20242024-01-30T10:37:44Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-30-janvier-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Février 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-30-janvier-2024-sur-radio-cause-commune ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Formations_et_m%C3%A9tiers_du_num%C3%A9rique,_trop_peu_connusFormations et métiers du numérique, trop peu connus2024-01-28T09:56:19Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/formations-et-metiers-du-numerique-trop-peu-connus ici] - Février 2024 »</p>
<hr />
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<br />
Publié [https://www.librealire.org/formations-et-metiers-du-numerique-trop-peu-connus ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Comment_l%E2%80%99IA_est_int%C3%A9gr%C3%A9e_%C3%A0_Parcoursup_2024Comment l’IA est intégrée à Parcoursup 20242024-01-28T06:43:09Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/comment-l-ia-est-integree-a-parcoursup-2024 ici] - Février 2024 »</p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
Publié [https://www.librealire.org/comment-l-ia-est-integree-a-parcoursup-2024 ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_23_janvier_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 23 janvier 20242024-01-23T12:22:17Z<p>Morandim : </p>
<hr />
<div>[[Catégorie:Transcriptions]]<br />
<br />
'''Titre :''' Émission <em>Libre à vous !</em> diffusée mardi 23 janvier 2024 sur radio Cause Commune<br />
<br />
'''Intervenant·e·s :''' Xavier Berne - Magali Garnero - Pierre Beyssac - Vincent Calame - Étienne Gonnu - Élise à la régie<br />
<br />
'''Lieu :''' Radio Cause Commune<br />
<br />
'''Date :''' 23 janvier 2024<br />
<br />
'''Durée :''' 1 h 30 min<br />
<br />
'''[https://media.april.org/audio/radio-cause-commune/libre-a-vous/backups/output-2024-01-23-15h29.mp3 Podcast PROVISOIRE]'''<br />
<br />
'''[https://www.libreavous.org/197-au-cafe-libre-actualites-chaudes-ton-relax Page de présentation de l'émission]'''<br />
<br />
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]<br />
<br />
'''Illustration :''' Déjà prévue<br />
<br />
'''NB :''' <em>transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/><br />
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em><br />
<br />
Corrections de Pierre Beyssac reportées MO<br />
<br />
==Transcription==<br />
<br />
<b>Voix off : </b><em>Libre à vous !</em>, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Bonjour à toutes. Bonjour à tous.<br/><br />
C'est le moment que vous avez choisi pour vous offrir 1~heure~30 d'informations et d'échanges sur les libertés informatiques et également de la musique libre.<br/><br />
Ce mardi, nous vous convions Au café libre pour débattre autour de l’actualité du logiciel libre et des libertés informatiques, ce sera le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme, en début d’émission, la chronique de Xavier Berne sur les logiciels utilisés par les administrations et, en fin d’émission, la chronique de Vincent Calame sur le livre <em>Une histoire des libertés associatives</em> de Jean-Baptiste Jobard.<br />
<br />
Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de <em>Libre à vous !</em>, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.<br/><br />
Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.<br />
<br />
Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.<br />
<br />
Nous sommes mardi 23 janvier 2024, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.<br />
<br />
À la réalisation de l’émission du jour, Élise. Bonjour Élise.<br />
<br />
<b>Élise : </b>Bonjour tout le monde. Bonne émission.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Merci. Nous vous souhaitons une excellente écoute.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
==Chronique « Ma Dada » de Xavier Berne - Les logiciels utilisés par les administrations==<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons commencer avec la chronique de Xavier Berne, ancien journaliste et actuel délégué général de la plateforme associative Ma Dada, qui vous explique comment faire valoir vos droits à la transparence sur les documents publics : contrats de marchés publics, codes sources, notes de frais, statistiques, etc.<br/><br />
Bonjour Xavier. De quoi vas-tu nous parler aujourd’hui ?<br />
<br />
<b> Xavier Berne : </b>Bonjour. Bonjour à toutes et tous.<br/><br />
Aujourd’hui, je pense que c’est le jour que vous attendiez un peu tous depuis le début de ces chroniques, au mois de septembre de l’année dernière, puisque je vais vous parler de logiciels et, plus particulièrement, des logiciels, en tout cas des algorithmes des programmes informatiques qui sont utilisés par les administrations. On n’y pense pas forcément, au premier abord, mais ces algorithmes se cachent, aujourd’hui, dans plein de choses du quotidien :<br/><br />
derrière les feux de circulation, on se doute qu’il y a bien un programme qui définit quand le feu passe au rouge ou passe au vert ;<br/><br />
derrière l’attribution d’aides sociales, les APL, la Caf , les allocations familiales, le chômage ;<br/><br />
derrière Parcoursup, dont on a beaucoup entendu parler dernièrement pour ses problèmes d’opacité ;<br/><br />
également derrière tout ce qui a trait au calcul d’impôt, l'impôt sur le revenu par exemple, des taxes, la taxe foncière par exemple ; etc.<br/><br />
On ne s’en rend pas forcément compte, mais tous ces algorithmes, qui sont utilisés par les administrations ont vraiment des implications sur notre vie quotidienne. Pour éviter que ce soient des boîtes noires, en quelque sorte, notre droit permet, sous certaines conditions, d’obtenir de nombreuses informations relatives à leur fonctionnement. On a parlé de code source tout à l’heure, mais aussi, pourquoi pas, de la documentation technique, des règles de fonctionnement des traitements dits algorithmiques utilisés pour prendre des décisions individuelles.<br />
<br />
Ce droit, qu’on trouve très précieux, s’appelle le droit d’accès aux documents administratifs. On a la chance d’avoir ce droit, en France, qui nous permet d’obtenir gratuitement, et relativement facilement, tout document produit ou reçu par une administration dans le cadre d’une mission de service public.<br />
<br />
Parmi ces documents, accessibles à tous au nom du droit à la transparence, qui, en plus, est un droit à valeur constitutionnelle, il y a donc les codes sources —~c’est écrit noir sur blanc dans la loi depuis 2016~—, mais aussi tout ce qu’il peut y avoir autour du code source comme, j'en parlais tout à l’heure, notamment la documentation technique.<br />
<br />
J’imagine que la question que vous vous posez tous, c’est : comment s’y prendre pour obtenir un code source ?<br />
<br />
Avant de vous lancer dans une demande, même si c’est assez facile, il est quand même important de vérifier que le code du logiciel que vous souhaitez obtenir n’est pas déjà disponible en ligne. Pour cela, je vous invite à aller faire un tour sur le sitecode.gouv.fr.<br/><br />
Si vous ne trouvez pas, voici ce qu’il faut faire :<br/><br />
première étape, forcément, c’est d’identifier le code source que vous souhaitez obtenir, par exemple celui de l’algorithme utilisé pour les feux de circulation de votre ville, pourquoi pas le code du logiciel qui a été utilisé pour calculer votre impôt sur les revenus de l’année 1998, etc. Je fais volontairement référence à l’année 1998, même si c’est un peu vieux, parce qu’il est important, en pratique, de bien dater la version qui vous intéresse, pour qu’on vous donne la bonne version du logiciel. Typiquement, sur l’exemple que j’ai donné, je pense que les calculs ne sont pas les mêmes entre 1998 et 2022 par exemple ;<br/><br />
deuxième étape, une fois que vous avez identifié ce que vous souhaitez obtenir, il faut envoyer votre demande. C’est assez simple en pratique, on le fait par courrier, par mail, il n’y a pas besoin de fournir de justificatif, ni de payer quoi que ce soit. Le plus simple, si vous n’en avez jamais fait, c’est peut-être d’utiliser notre plateforme associative, Ma Dada, qui vous propose un texte de demande pré-rempli. Sinon, je vous invite à retrouver nos modèles : vous pouvez retrouver ces modèles sur la page de l’émission et aussi sur le forum de Ma Dada.<br />
<br />
Une fois que votre demande est envoyée, l’administration dispose d’un mois pour vous répondre. Si elle ne vous répond pas, cela équivaut à un refus, dit refus implicite. À ce moment-là vous aurez la possibilité, si vous le souhaitez, de contester ce refus devant la CADA, la Commission d’accès aux documents administratifs.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Est-ce que ça marche, dans la pratique ?<br />
<br />
<b>Xavier Berne : </b>Je vais peut-être faire un peu le Normand : parfois oui, parfois non. En principe, ça doit marcher. Aujourd’hui, beaucoup de codes sources sont ouverts, notamment ceux qui ont trait à l’impôt sur le revenu, même à la taxe foncière, il y en a quand même un certain nombre. Là où ça bloque, en pratique, c’est lorsqu’il y a des droits d’auteur, du copyright, sur les logiciels. N’allez pas demander à l’administration de vous donner le code source du Word qui est utilisé dans votre mairie, ça ne marchera pas, vous n’aurez pas le code source, tout simplement parce que la loi prévoit des exceptions au principe de transparence, notamment au titre du secret industriel et commercial et aussi du droit d’auteur, ce qui justifie que, parfois, les logiciels ne sont pas ouverts.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Tout le monde n’est pas expert ou experte du code source du logiciel. Pour les personnes qui ne sont pas expertes, comment explorer ce sujet ?<br />
<br />
<b>Xavier Berne : </b>Le droit est assez complet. Comme je le disais, ce sont tous les documents produits ou reçus dans le cadre d’une mission de service public.<br/><br />
Il y a effectivement le code source pour ceux qui vont vraiment chercher à voir comment fonctionne le logiciel, parce qu’ils en ont les compétences. Sinon, vous pouvez aussi demander la documentation technique en plus de ces codes sources qui est, bien entendu, communicable, comme je l’expliquais tout à l’heure. Je parlais plutôt du code source, mais vous pouvez aussi dire que vous demandez la documentation technique relative au code source en question. Si vous êtes plutôt dans une optique de comprendre pourquoi et comment l’administration choisit tel ou tel logiciel, vous pouvez aussi demander des documents de marchés publics, on avait consacré une chronique à ce sujet. Ça porte, par exemple, sur les contrats, les factures, si vous voulez savoir, par exemple, combien coûte l’utilisation de tel logiciel. Vous pouvez aussi obtenir des rapports expliquant pourquoi il a été préconisé de recourir à telle solution plutôt qu’une autre.<br/><br />
Je sais que l’April est bien au courant de ces choses de part ses combats et je sais que vous avez demandé des documents, notamment pour savoir pourquoi le Libre n’est pas privilégié dans certains cas de figure.<br />
<br />
Je voulais aussi revenir sur un autre outil prévu par la loi, qui est complémentaire, qui vise un autre cas de figure : dès lors qu’un algorithme est intervenu dans une prise de décision administrative —~j’ai un peu détaillé tout à l’heure, il y en a énormément sur les impôts, les aides sociales, etc.~—, l’usager, premièrement, doit être informé qu’un algorithme s'est immiscé, à un moment, dans son dossier, il doit y avoir une petite ligne sur la décision le concernant. Et, deuxièmement, il a le droit de savoir, en gros, comment et pourquoi l’algorithme en est arrivé à telle conclusion dans son dossier. Ce droit est malheureusement peu connu, d’où l’importance de ces chroniques dans <em>Libre à vous!</em>, mais il est aussi mal appliqué de la part les administrations, ce qui est quand même assez dommage au regard de l’utilisation croissante des algorithmes par les acteurs publics. Je vous invite donc chaudement à vous en saisir, cette fois-ci non pas en faisant une demande classique de document administratif, comme je l’ai expliqué tout à l’heure, mais une demande d’explication, bien plus simple en fait. Pour cela, vous pouvez faire une demande, il y a des espaces en ligne, soit par mail, en citant, cette fois-ci, l’article L311-3-1 du Code des relations entre le public et l’administration.<br/><br />
C’est un droit que vous avez, servez-vous-en.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>C'est effectivement un droit important. On a récemment évoqué, je ne sais plus dans quelle émission [Émission 194, NdT], l'algorithme de la Caisse d'allocations familiales, la Caf, La Quadrature du Net, ayant fait, justement, une demande de communication de l'algorithme et du code source et a révélé un certain nombre de dysfonctionnements. Je vous renvoie sur libreavous.org, vous chercher Caf ou Caisse d'allocations familiales, parce que je n'ai pas en tête le numéro de l'émission.<br/><br />
J'ai une question d'une des personnes qui participent Au café libre après : Xavier, pourquoi certains documents arrivent caviardés ?, c'est-à-dire que des parties sont noircies. Nous-mêmes, à l'April, avons reçu un certain nombre de documents où, en fait, quasiment tout le document était illisible parce que noirci, des parties étaient complètement inaccessibles. Est-ce que c'est légal ? Pourquoi est-ce fait ?<br />
<br />
<b>Xavier Berne : </b>Tout à fait. C’est légal, c’est au nom de la protection des secrets dits légaux. La loi prévoit que les documents administratifs ne sont pas communicables si leur communication peut porter atteinte à certains secrets, typiquement le secret Défense, les intérêts nationaux, etc. ; il y a aussi le fameux droit d'auteur dont je vous parlais tout à l'heure. Du coup, l'administration a deux choix : soit elle caviarde, simplement, certaines parties, les parties qui sont problématiques, ce qui permet, malgré tout, de communiquer le reste du document, même si, parfois, le fait du caviardage enlève tout l'intérêt qu'il y avait à obtenir le document ; sinon, si c'est trop compliqué, à ce moment-là, elle refuse complètement de transmettre le document.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>D'accord. Merci Xavier.<br/><br />
On va rappeler que toutes les ressources que tu as évoquées, notamment le tutoriel, sont sur la page de l'émission, sur libreavous.org/197. Les personnes qui veulent aller plus loin peuvent aller sur le site de Ma Dada, madada.fr, dont tu es le délégué général. Ma Dada est une plateforme qui vise à faciliter les demandes d'accès aux documents et données administratifs.<br/><br />
Xavier, je te remercie. On se retrouve le mois prochain pour ta prochaine chronique. Belle journée à toi.<br />
<br />
<b>Xavier Berne : </b>Merci, bonne émission.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Merci, à bientôt.<br/><br />
On va faire une pause musicale.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Après la pause musicale, nous parlerons de l'actualité du logiciel libre avec notre équipe de choc qui est autour de moi, au studio.<br/><br />
En attendant, nous allons écouter <em>Revel</em> par Shelby Merry. On se retrouve dans 3 minutes 30. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>Revel</em> par Shelby Merry.<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous venons d’écouter <em>Revel</em> par Shelby Merry, disponible sous licence libre Creative Commons Partage dans les mêmes conditions, CC By SA.<br/><br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons passer au sujet suivant.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Au café libre==<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons poursuivre par notre sujet principal et nous vous souhaitons la bienvenue, ce mardi, à la quatrième édition, Au café libre, où on vient papoter sur l'actualité du logiciel libre dans un moment convivial. Un temps de débats avec notre équipe de libristes de choc, issus d'une rigoureuse sélection, pour discuter entre elle et eux et débattre des sujets d'actualité autour du logiciel libre et des libertés informatiques.<br/><br />
Autour de la table, Magali Garnero, libraire, présidente de l'April. Bonjour Magali.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Salut Fred.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Vincent Calame, informaticien, bénévole à l'April et chroniqueur dans <em>Libre à vous !</em>. Salut Vincent.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Salut. Je précise que je suis un joker.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>J'expliquerai après la préparation de l'émission.<br/><br />
Et enfin, Pierre Beyssac, informaticien libriste de longue date. Tout ça pour dire qu'il est, peut-être, un peu plus vieux que les deux autres personnes présentes. C'est surtout un membre historique de l'Internet français, actuellement fondateur d’eriomem.net, un service de stockage de fichiers. Bonjour Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>J'ai les cheveux blancs qui poussent. Bonjour à tous.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>C’est notamment l'un des cofondateurs de Gandi. Il a fait plein de choses et on a déjà eu l'occasion, plusieurs fois, de l’avoir dans l'émission.<br/><br />
N'hésitez pas à participer à notre conversation, parce que c'est un débat, effectivement, entre les personnes présentes, mais aussi les personnes qui nous écoutent, soit par téléphone au 09~72~51~55~46, sur le salon web dédié à l'émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat », salon #libreavous, ou directement sur le site libreavous.org, la zone de <em>chat</em> est affichée.<br />
<br />
Effectivement, comme il le disait en introduction, Vincent est un joker parce que Vincent est là, normalement, pour faire sa chronique après ce sujet principal. Vincent remplace Isabelle Carrère qui devait intervenir, mais qui a un contretemps. Moi-même, je suis aussi un joker : je remplace Étienne Gonnu, qui avait préparé le sujet avec vous, et qui a un contretemps ce matin. Donc voilà, c'est une émission avec deux jokers.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Et puis deux Batman !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Et deux titulaires, Pierre et Magali.<br/><br />
Je présente mes excuses, j'ai repris la préparation de l’émission tout à l'heure, je vais peut-être être un petit peu flou. On va évoquer un certain nombre de sujets plus ou moins longuement, en fonction de ce que vous avez à dire et de l'intérêt du sujet.<br />
<br />
===Anniversaire de Blender===<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>On va commencer par un anniversaire. Premier sujet : Blender a eu 30~ans le 2~janvier~2024. D’abord, qu'est-ce que c'est que Blender ? Qui veut commencer ? Magali.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Je vais commencer, je n'y ai jamais touché, donc je suis la mieux placée pour en parler.<br/><br />
Blender est un logiciel de modélisation et d'animation 3D, c'est-à-dire que ça fait plein d'animations, de dessins animés et ainsi de suite. Ils sont connus depuis belle lurette. Ils utilisent ce logiciel-là depuis le 8~janvier 1994, ça fait 30~ans ! Ils sont plus vieux que l'April, c'est amusant.<br/><br />
On en est à la version 4.0.2. Ce n'est pas parce que du temps passe qu'il y a beaucoup de versions, on est vraiment en mode qualité. Je me suis renseignée, c'est fait en langage C, C++ et Python et ils utilisent une licence publique générale, la GNU~3, la GNU version 3.<br/><br />
C’est donc un beau logiciel, qui demande un coût d'entrée assez important, et qui a fait de très belles choses.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Peut-être préciser, ce n'est pas la GNU~3, c’est la GNU GPL version 3, pour <em>GNU General Public License</em>, donc licence publique générale GNU.<br/><br />
À quoi sert Blender, en fait, Pierre ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ça sert à faire des modélisations d'objets 3D. C’est fait pour des créateurs, c'est plutôt orienté jeux vidéo artistiques, ce n’est pas fait pour des objets industriels. C'est reparti de tout petit dans les années~90. Ce qui est intéressant, avec Blender, c'est qu’aujourd'hui c'est un logiciel libre qui est au niveau des meilleurs logiciels du marché, il a rattrapé les logiciels commerciaux.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Les logiciels propriétaires, parce qu’un logiciel libre peut être commercial.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Il y a~30 ans, il est parti d'une petite bande de développeurs qui vendaient des prestations par-dessus, mais le logiciel lui-même n'était pas libre, il était donné gratuitement, par contre, il fonctionnait sur des systèmes libres. C’est parti de tout petit. C'était loin derrière des logiciels extrêmement chers, par exemple quelque chose qui s'appelle Maya, un logiciel professionnel utilisé par les graphistes, et, petit à petit, il a fait son bonhomme de chemin.<br/><br />
En fait, au bout d'une dizaine d'années, les investisseurs de la boîte ont dit au développeur principal « ton truc ne rapporte pas grand-chose, on voudrait se retirer. » En gros, la boîte était mise en faillite et le développeur, en 2002, s'est dit « c'est quand même dommage de plier tout ça, on va racheter le code source du logiciel et on va continuer à bosser dessus. On va le diffuser en libre. » Il a donc fait une collecte, il a réuni 100~000~euros en 2002, il a créé une fondation à but non lucratif pour gérer le logiciel. À partir de là, le logiciel est devenu libre et contributif. Il s'est donc développé, il a fait son petit bonhomme de chemin, il est devenu ce qu'il est aujourd'hui : un logiciel assez compétitif face à ce qui existe en beaucoup plus cher par ailleurs.<br/><br />
On peut faire des animations, on peut faire des effets spéciaux, on peut faire des incrustations, on peut même faire un peu de montage vidéo avec. On peut, par exemple, faire du <em>tracking</em>, c'est-à-dire prendre une vidéo classique, réelle, puis donner des points de <em>tracking</em> au logiciel pour lui dire « tu vas me faire tourner, par-dessus, l’objet 3D que j'ai simulé et l'incruster. » On peut donc mettre un robot ou une soucoupe volante dans une scène. Il y a plein de choses géniales dans ce logiciel. Il sert à des concepteurs de jeux vidéo, maintenant, il sert pour plein de choses et il a une communauté très forte derrière.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b> À l'origine, le développeur est Ton Roosendaal.<br/><br />
Si vous voulez en savoir un peu plus sur Blender, je vous renvoie à l’émission 108 de <em>Libre à vous !</em>, donc sur libreavous.org/108, on avait parlé d'outils libres pour le graphisme et la vidéo dont Blender. C'était effectivement, à l'origine, un logiciel privateur, propriétaire. La boîte, entre guillemets, « fait faillite », en tout cas les investisseurs ont voulu arrêter. Ton Roosendaal a négocié le rachat des droits d'auteur pour le transformer en logiciel libre. À l'époque, il lui est demandé 100~000~euros et la somme a été réunie assez rapidement, ce qui fait que maintenant, et depuis 21~ans, c'est un logiciel libre qui produit des dessins animés, en termes de démonstration, qui sont très sympas à voir. Je n'ai plus les noms des dessins animés en tête.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Je les ai tous.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Tu les as tous.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Je ne vais pas tous les citer, mais les plus connus : <em>Big Buck Bunny</em>, parce que c’était très drôle.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Qu’est-ce que raconte <em>Big Buck Bunny</em> ?<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b><em>Big Buck Bunny</em> est l’histoire d'un énorme lapin qui se fait embêter par, je ne sais pas si ce sont des rats, des écureuils.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Des écureuils. Je l’avais vu.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Vincent, tu nous diras après ce que tu en penses.<br/><br />
Magali, continue.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Ça date de 2007, c'est donc assez âgé. C'est vraiment super drôle et assez court. Je conseille vraiment aux gens d'aller le voir.<br/><br />
Je vais aussi vous parler de <em>Sintel</em>, une jeune fille qui part à la recherche de son animal de compagnie, mais je sais plus si c'est un dragon, bref, quelque chose, et ça va lui prendre toute sa vie. C'est hyper-émouvant, je conseille vraiment le mouchoir, et ça avait été fait par une équipe sous la direction de David Revoy, dont on a souvent parlé dans cette émission.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>On a souvent parlé de David Revoy. Rappelle qui c’est.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>David Revoy est un homme formidable, que j'adore, qui a fait la bande dessinée <em>Pepper&Carrot</em>. Pepper est une petite sorcière du chaos, qui est consolée de toutes ses bêtises par son chat qui s'appelle Carrot, un petit chat roux. David travaille énormément avec des logiciels libres et il publie cette série-là sur son blog.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Et il fait beaucoup d'illustrations libres pour Framasoft.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Voilà, toutes les campagnes de Framasoft, c'est lui.<br/><br />
Je vais vous parler du dernier, <em>Sprite Fright</em>. Je vous en parle parce que je n'ai pas encore eu l'occasion de le voir, donc, si quelqu'un qui nous écoute l'a vu, qu'il n'hésite pas à nous en parler, que ça nous donne envie d'aller le voir.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>D'accord. En attendant que quelqu'un nous appelle, nous fasse un retour sur le salon web, Vincent, tu avais donc vu le premier qu’a cité Magali.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Oui, c'était l'exemple, Bon, un logiciel libre ne va pas remplacer un bon scénario. C’est d'abord une œuvre artistique, mais effectivement, maintenant, toute œuvre artistique a derrière elle tout un arrière-plan technique gigantesque, donc tant mieux et heureusement que c’est en Libre.<br/><br />
Il me semble que c’est très utilisé dans l'industrie-même du dessin animé.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Je crois me souvenir, comme l'a dit Pierre tout à l'heure, que c’est effectivement très utilisé, que c'est à un niveau professionnel. Aujourd'hui, c'est donc géré par une fondation, la Fondation Blender. Est-ce que vous avez une idée des sommes que la fondation récolte en termes de don ou autre, même vague ? Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>En détail, je ne sais pas, mais je sais qu'ils ont eu un méga-don de la part de Epic Games, qui est un énorme, un des plus grands éditeurs de jeux vidéo de la planète, en fait. Ils ont donc un soutien majeur de la part de l'industrie.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Il me semble qu'ils sont même utilisés par Ubisoft, un autre éditeur de jeux vidéo assez connu, même français il me semble.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Ubisoft est français.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Plein de jeux sont faits par Ubisoft, derrière lesquels, donc, il y a Blender.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Donc un outil libre qui, à l'origine, était privateur, qui existe depuis 30~ans, dont le développement continue, qui est soutenu par l'industrie parce que, effectivement, celle-ci a besoin d'un outil : plutôt que de développer chacun dans son coin ses propres outils ou de mettre des millions dans un outil privateur, dont Pierre a cité le nom tout à l'heure, mais que j'ai oublié ! C’est de la coopération.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Il y en a d’autres, c’est l’un des plus connus, mais il y a plusieurs autres ténors de l'industrie.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. En tout cas, on constate que des logiciels libres sont développés sur la durée.<br/><br />
Vincent.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Ça permet aussi de se libérer d'un matériel privateur, parce que, dans ce monde-là, du graphisme, c'est Mac qui dominait énormément. Par contre, Blender fonctionne n'importe où. Ça a aussi permis de se libérer du matériel qui était pratiquement obligatoire en plus des logiciels.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ça fonctionne même sur le système que j'utilise, qui est un peu plus confidentiel, FreeBSD. Donc, je ne peux qu’aimer Blender en tant qu’outil libre !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Pierre et moi, nous nous connaissons depuis quelques années. J'allais justement lui faire la blague : ça tourne même sur FreeBSD, qui est un autre système d'exploitation libre, qu'on cite moins souvent que GNU/Linux ici, tout simplement parce qu’il est beaucoup moins connu, il y a moins de communautés d'entraide, on va dire, pour le grand public. Par contre, tout à l’heure j'ai pensé et je pense qu'il faudrait qu'on fasse une émission <em>Libre à vous !</em> justement sur FreeBSD et sur les autres types de systèmes d'exploitation de type Unix, libres, en dehors de GNU/Linux, FreeBSD, NetBSD et d’autres. Tu en es effectivement un spécialiste et ça me fait penser que Blender tourne sur de nombreuses plateformes, y compris des plateformes comme Windows. Pour Mac je ne sais pas.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Mac, Windows, ça tourne à peu près sur tout maintenant.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>À peu près sur tout. C'est vraiment quelque chose qui peut être utilisé par tout le monde, qui vient de fêter ses 30~ans, qui est, effectivement, un poil plus vieux que l'April, vu qu’elle a été fondée en 1996.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Légalement en 1996.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>La création de l’association date de quelques semaines avant cette date, c'est à peu près pareil !<br/><br />
Si vous êtes en région parisienne, je crois que chaque premier samedi du mois, dans le cadre des Premier Samedi du Libre, à la Cité des sciences et de l'industrie, il y a des réunions du groupe d'utilisateurs et d'utilisatrices d’Île-de-France de Blender. Je vérifierai, on mettra la référence. En tout cas, il y a un groupe d’utilisateurs et d’utilisatrices de Blender en région parisienne et je pense qu'il y en a sans doute d'autres ailleurs. Je vérifierai, je mettrai la référence sur le site de l'émission, à moins que vous confirmiez.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Oui, ils participaient souvent au Premier Samedi du Libre.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Tu ne sais pas si ça continue.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Non. Le confinement a tellement changé de choses.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Je note de vérifier. Je crois que ça s'appelle le BUG, Blender User Group, le bug étant aussi une erreur de programmation, un problème en informatique.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Oui, c'est ça. C'est très drôle.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>OK. C'était une petite introduction sur un logiciel, Blender. Plus d'informations sur blender.org.<br/><br />
<br />
[Sonnette]<br />
<br />
===Publication d’un nouveau noyau Linux===<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Changement de sujet. Là c’est un peu plus technique. On va demander à Pierre d'intervenir le premier sur ce sujet-là, vu ce qu'il vient de dire avant.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je sais ce dont tu vas parler !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Écoutez, je suis le joker. On m'a donné une liste de sujets qu'il faut que je lance, et puis voilà !<br/><br />
Une nouvelle version du noyau Linux a été publiée et, selon ZDNet, on va balancer, il s'agit d'un très gros bébé dans le sens où, visiblement, c'est une version dans laquelle il y a beaucoup de lignes de code, avec rajout d’un certain nombre de fonctionnalités. Avant, peut-être, de rentrer dans le détail, mais très rapidement, parce que, finalement, on a l'article, mais c'est quand même très technique, c'est peut-être l'occasion de rappeler ce qu'est un noyau de système d'exploitation. Je pense, Pierre, que tu sais à peu près de quoi je parle.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>J'ai révisé un peu avant !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Est-ce que tu peux expliquer ce qu’est, vraiment, le noyau Linux ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Le noyau d'un système d'exploitation, c'est la partie centrale du système qui démarre quand on allume l'ordinateur et qui fait un peu l'intermédiaire entre les programmes qu’on utilise et le fonctionnement du matériel. Il contient tous les pilotes du matériel, ce qui permet d'avoir des logiciels qui ne sont pas trop au courant du type de souris qu'on utilise, du type d'écran qu'on utilise, donc ça isole ; en fait, ça permet d'avoir des logiciels qui fonctionnent sans trop se casser la tête sur n'importe quelle machine, et ça gère le réseau, ça gère la sécurité, ça gère toutes les choses centrales du système et ça protège également les programmes les uns des autres.<br/><br />
À une époque, quand on avait des systèmes, comment dire, plus spartiates, on avait moins de protection. Depuis qu'il y a des systèmes comme Linux ou tous les systèmes professionnels, on a des protections entre processus pour éviter que tel programme malveillant puisse attaquer. Ça permet donc de la protection antivirus, ça permet tout un tas de choses. On fait évoluer ça, évidemment, au fil du temps, pour intégrer de nouveaux périphériques, de nouvelles cartes réseau, de nouvelles cartes graphiques et de nouveaux protocoles réseau, etc.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Donc aujourd'hui, quand on installe une distribution GNU/Linux, il y a le noyau Linux sur la distribution, il y a un certain nombre de logiciels et tout s'installe tranquillement, sans trop de soucis. Je précise cela, car, il y a quelques années, il fallait quasiment compiler son noyau si on voulait rajouter, par exemple, un pilote pour un périphérique. Aujourd'hui, c'est utilisable par toutes les personnes.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Oui. Je peux même dire que récemment, pour des raisons bassement, comment dire, de maladie ferroviaire, je me suis installé un Windows et je me suis aperçu que GNU/Linux est plus facile à installer que Windows. Quand on n’achète pas une machine toute installée, les distributions Linux d'aujourd'hui sont finalement ultra-faciles à installer, c'est impressionnant, ça démarre. D'ailleurs, si on ne veut pas installer la distribution, si on ne veut pas risquer d'abîmer ce qu'on a déjà installé sur son ordi, on peut la tester avec une simple clé USB, un truc qui vaut dix~euros, c'est assez marrant à voir ; Windows, c'est une autre paire de manches. En fait, on a des systèmes qui démarrent facilement, qui sont très faciles à configurer et qui sont très accessibles.<br/><br />
Le noyau démarre et effectivement, derrière, il y a tous les outils : votre navigateur, votre traitement texte, si ça vous plaît, la gestion des casques, des haut-parleurs, des écrans, tout cela fonctionne sans souci. Ça fait 30~ans qu’on attendait d'y être et là, on y est !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Justement, j'allais dire que la première version du noyau Linux, c’est 1991. Les familles BSD, les noyaux BSD, c'est quelle époque, à peu près, en Libre ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Les versions en Libre, sur PC, c'est 1991/1993 en gros. Un gars qui s'appelait Bill Jolitz et sa femme, Lynne Jolitz, ont pris ce qui existait sous forme de noyau libre à l'époque, qui venait de l'université de Berkeley, d'où le « B » dans BSD, ils ont fait marcher ça sur PC et, après, ça a été récupéré en mode contributif pour en faire différentes souches de logiciels libres.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>D'accord. On fera clairement une émission sur la famille des BSD, BSD voulant dire <em>Berkeley Software Distribution</em>, distribution de logiciels par l'université de Berkeley.<br/><br />
Pour cette nouvelle version du noyau Linux, je vous renvoie vers l'article qu'on a mis en ligne sur le site de l'émission, libreavous.org/197, qui détaille, justement, quelques nouvelles fonctionnalités, comme le système de fichiers dont tu as parlé, il y a de nouveaux systèmes de fichiers, des modifications au niveau des cartes graphiques, au niveau du CPU.<br/><br />
Vincent, Magali, voulez-vous dire quelque chose là-dessus ?<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Moi, c’est une question. J’ai vu qu’il y a une émulation en 32~bits. 64~bits, je vois, mais, du coup, 32, je ne sais pas.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Pierre ou Vincent, qui veut répondre ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>32~bits, ce sont les anciennes machines ; jusqu'à, à peu près, 15/20~ans, tout était en~32 bits. Les processeurs devenant plus puissants et plus rapides, avec plus de mémoire, on a créé les processeurs 64~bits qui permettent d'exploiter le matériel. Du coup, ce n'était plus compatible, il fallait réécrire les logiciels. Il y a eu toute une période –~on arrive un peu à son terme ; maintenant, pratiquement, tout est en 64~bits directement~– durant laquelle il fallait quand même continuer à faire tourner les logiciels anciens, qui avaient été écrits à l'époque du 32~bits. Il y avait eu d'autres périodes avant, quand on est passé du 16 au 32, du 8 au 16, c'est encore plus loin.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Dans ce nouveau noyau, il y a donc une option qui permet d'activer ou de désactiver l’émulation 32~bits, qui permet de désactiver ou d'activer le démarrage d'applications en 32~bits sur les systèmes d’exploitation en 64~bits.<br/><br />
J’avais dit que ce serait un peu plus technique que d'habitude. En tout cas, c’est une des options et, de toute façon, ça sera intégré dans le noyau de votre distribution favorite ; en fonction de la distribution, c'est plus ou moins rapide. Actuellement, je pense qu’on doit être à la version 6.5 ou 6.6 de la distribution, je ne sais plus exactement.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>6.7, la nouvelle version.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Vincent, tu voulais rajouter quelque chose ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Je voulais juste réagir. À un moment, tu as dit « il y a quelques années, il fallait compiler le noyau. » Ça fait quand même très longtemps qu'il fallait compiler le noyau. Ça fait tout de même un certain temps que le noyau est compilé et disponible dans les distributions. Et Pierre, à un moment, a parlé d'un casque. Ça donne l'impression que c'est uniquement dans le nouveau noyau qu'on sait gérer les casques audio ! Je vous rassure !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Tu plaisantes, mais, dans FreeBSD, il n’est pas possible de brancher un casque en Bluetooth, il n'y a pas la fonction, parce que c'est plutôt un système qui est destiné aux serveurs et pas tellement aux machines de bureau.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Il n’y a pas encore la fonction !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Oui, pas encore ! D’ici à 2040, peut-être, je ne sais pas !<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Méchant !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Ce sont des systèmes qui ont des objectifs différents et, sans doute, des publics cibles différents. On consacrera vraiment une émission à cette famille de logiciels libres.<br/><br />
Vincent.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Quand on parle du noyau Linux, c'est le seul moment où on peut parler de Linux tout seul, alors que quand on parle de distribution Linux, on fait une erreur, parce que c'est une distribution GNU/Linux.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Exactement !<br/><br />
On va faire une petite pause musicale parce que, finalement, on avance quand même plutôt pas mal dans l'émission, et puis le sujet d'après un petit peu lourd. On va faire une pause musicale en attendant.<br/><br />
Nous allons écouter <em>Balcarabic Chicken</em> par Quantum Jazz. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>Balcarabic Chicken</em> par Quantum Jazz.<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous venons d’écouter <em>Balcarabic Chicken</em> par Quantum Jazz, disponible sous licence libre Creative Commons Partage dans les mêmes conditions, CC By SA 3.0.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons poursuivre notre sujet principal. Vous êtes Au café libre avec Magali Garnero, Vincent Calame, Pierre Beyssac et moi-même, Frédéric Couchet. Nous parlons de l'actualité autour du logiciel libre et des libertés informatiques.<br/><br />
<br />
===<em>Cyber Resilience Act</em>===<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons quitter le domaine un petit peu technique pour entrer dans le domaine européen et responsabilités avec le <em>Cyber Resilience Act</em> dont la version finale vient d'être publiée. On va revenir un petit peu sur ce sujet. On va commencer par rappeler ce qu'est le <em>Cyber Resilience Act</em>. Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Le <em>Cyber Resilience Act</em> ce sont tout un tas de mesures destinées à forcer, en fait, les entreprises qui utilisent des logiciels ou les éditeurs de logiciels à prendre des précautions concernant les attaques contre leurs logiciels. Il y avait tout un tas d'obligations d'audits auprès des éditeurs et auprès des exploitants de logiciels pour leur demander de prendre des précautions et de vérifier que leurs logiciels étaient conformes aux préconisations.<br/><br />
Il y avait une inquiétude par rapport au logiciel libre, parce que, évidemment, quand on est un développeur bénévole sur un projet bénévole, et comme certains, comme OpenSSL, sont utilisés littéralement par toute la planète, avec des développeurs qui ne crèvent pas la dalle, mais quasiment. Il y a eu des cas, comme ça, de logiciels extrêmement stratégiques, critiques, utilisés par un nombre hallucinant de sociétés, pratiquement tout l’Internet.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Explique ce qu’est OpenSSL.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>OpenSSL, c’est ce qui permet de faire du chiffrement dans le navigateur, dans toutes les applications qui utilisent du chiffrement, le chiffrement lui-même s'étant énormément déployé depuis l'affaire Snowden qui a révélé que les services secrets américains écoutaient tout ce qui n'était pas chiffré, autant qu'ils pouvaient, d'ailleurs, au passage, en violant la loi américaine.<br/><br />
Il y a une réaction de tous les milieux réseau disant « ce n'est quand même pas normal. On a du chiffrement qu'on a légalement le droit d'utiliser, donc on va déployer du chiffrement partout. » Cela utilise donc des logiciels comme OpenSSL, puisque la couche de base, disons de chiffrement, était déjà écrite, ce sont des logiciels quand même assez sensibles, on ne peut pas écrire ça en faisant un TP dans un coin de son salon le soir. Le problème, c'est que les développeurs qui gèrent cela étaient essentiellement bénévoles, pas payés pour ça.<br/><br />
On a donc des cas pour lesquels on ne peut pas imposer à des développeurs bénévoles des obligations qui ne sont pas les leurs ; ils n'ont pas les moyens de faire des audits extrêmement coûteux sur ces logiciels. Ça repose éventuellement sur du contributif, c'est-à-dire qu’il va y avoir des centaines, des milliers d'experts qui vont examiner le logiciel pour essayer d'en détecter des failles et les corriger. Mais imposer des obligations légales là-dessus et engager leur responsabilité ça pouvait, franchement, empêcher littéralement d’écrire du logiciel libre sur ces sujets, sur quasiment tous les sujets.<br/><br />
La loi, le fameux <em>Cyber Resilience Act</em>, a été amendée vu les alertes qui ont été lancées sur ces sujets, pour border un petit peu le cas du Libre et tout ce qui est non lucratif. Tout un tas de corrections ont été faites.<br/><br />
Un Hollandais, Bert Hubert, spécialiste de ces sujets, a écrit un article : il avait levé des inquiétudes là-dessus, il y a quelques mois, et il a expliqué que dans les dernières versions du texte, c'était quand même relativement bien bordé. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas être attentif à ce que ça va donner, mais, en la matière, les grosses bêtises vis-à-vis du logiciel libre ont quand même été relativement évitées.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Si j'ai bien compris, ces éclaircissements tournent notamment autour de la définition de l'activité commerciale, pour faire peser la responsabilité sur des acteurs, des entreprises notamment, qui ont eu une activité commerciale autour du logiciel libre.<br/><br />
Et puis, la deuxième clarification, c'est peut-être pour protéger les PME/PMI, les petites et moyennes entreprises, notamment européennes, qui n'ont pas les mêmes moyens que des grandes entreprises, notamment américaines, qui sont bardées d'avocats et qui peuvent se protéger beaucoup plus efficacement. Ce sont à peu près les éclaircissements, si j'ai bien compris.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est ça. L’Europe aime bien réguler, ce qui est légitime, et on est aussi, en partie, dans une position de forteresse assiégée vis-à-vis des majors américaines, on veut se protéger contre les abus des grosses sociétés américaines qui se sont créées. C'est aussi vrai, d'ailleurs, dans l’<em>AI Act</em> qui est en train d'être écrit.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b><em>AI Act</em> ? C'est quoi ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b><em>Artificial intelligence Act</em>, sur l'intelligence artificielle, qui n'est pas encore finalisé. Un brouillon a fuité hier, il fait~892 pages. En fait, il y a les quatre versions présentées en colonnes. Le texte final doit faire aux alentours de 150/200~pages. Là, les quatre versions sont présentées avec les différences.<br/><br />
Il y a le même type de problème : c'est bien de réguler, mais il ne faut pas le faire de manière à, littéralement, empêcher soit les libristes, soit les chercheurs, les PME aussi. Il ne faut pas leur tirer une balle dans le pied en leur imposant des obligations que seules des grosses compagnies peuvent respecter.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>J’imagine, notamment, les personnes qui font de la recherche en sécurité informatique, qui visent à améliorer les algorithmes de chiffrement et compagnie, qui ont, sans doute, besoin de faire des choses que ce projet de règlement pouvait éventuellement mettre en danger.<br/><br />
Là-dessus, Vincent, Magali, est-ce que vous voulez ajouter quelque chose ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Une précision, c'est une directive ?<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Un règlement européen.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Juridiquement, je lis ce que j'ai devant moi : « c'est un projet de règlement européen visant à renforcer les règles en matière de cybersécurité afin de garantir une plus grande sécurité des produits matériels et logiciels en Europe. » L'idée, effectivement, c'est de faire une sorte de norme CE sur des produits numériques, c'est donc un projet de règlement.<br/><br />
La version qui a été, entre guillemets, « finalisée, c'est un équilibre entre les trois institutions au niveau de l’Europe : la Commission européenne qui propose des projets de directives ou de règlements, le Conseil de l'Union européenne, qui est la réunion des personnes représentant les gouvernements des différents États membres, et le Parlement. Ce n’est pas encore voté définitivement parce que ça doit être ratifié par le Parlement européen pour avoir force de loi et, s'il est ratifié, ça devrait rentrer en application 36~mois après, à part quelques exceptions.<br/><br />
Le processus n'est pas totalement fini, mais, à partir du moment où il y a effectivement un accord des trois principales institutions européennes, ce qu'on appelle le trilogue, normalement le texte devrait être ratifié par le Parlement européen.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Il n’y a pas de transcription dans le droit français. Est-ce qu’il y aura des débats au niveau français ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est effectivement d'application directe, il n'y a pas de transposition.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>C'est comme le RGPD, le Règlement général sur la protection des données, c’est d'application directe.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Par contre, il peut y avoir besoin de modifier la loi française pour qu'elle ne soit pas en contradiction avec le règlement.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Magali.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Ce qui ne veut pas dire que le Gouvernement ne va pas essayer de légiférer alors qu’il y a déjà un règlement, ça n’exclut rien.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Par exemple pour le RGPD, qui est également un règlement, le Règlement général de protection des données, qui était inspiré des lois type CNIL, il a quand même fallu faire quelques modifications à la loi française pour adapter le droit français.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Il y a une encore une source d’inquiétude sur la façon dont toutes ces dispositions vont être interprétées, évidemment, et puis, il y a aussi une définition du logiciel libre qui est donnée dans ce règlement : en fait, le fait que ce soit développé de façon collaborative sur Internet pourrait rentrer dans la définition, alors que, normalement, ce n'est pas dans la définition telle que nous la connaissons à partir des quatre libertés du logiciel libre. Il y a encore quelques petites choses à faire.<br/><br />
En tout cas, effectivement, il y a eu une mobilisation d'un certain nombre de personnes, de structures, du monde du logiciel libre et, visiblement, les inquiétudes ont été entendues au niveau européen, c'est plutôt une bonne chose de ce point de vue-là.<br/><br />
On met les références des textes intéressants sur le site de l'émission, libreavous.org/197, et on vous tiendra, évidemment, informés, à la fois du vote et puis de la publication, notamment en français, de l'analyse poussée. Sur ce genre de dossier, la difficulté c'est d'avoir des analyses écrites en français, bien détaillées. À moins que tu en connaisses déjà, Pierre ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ce sont des textes extrêmement consistants et qui évoluent.<br/><br />
Ce qui se passe aussi, c'est qu’on va avoir les élections européennes en juin, donc le Parlement va être complètement renouvelé et les parlementaires de la mandature actuelle ont envie de boucler tous les dossiers. C'est d’ailleurs pour cela aussi que c'est un petit peu « hâté », entre guillemets, précipité, parce que ça fait quand même deux ou trois~ans qu’ils bossent là-dessus. Comme ce sont des sujets qui touchent à la société de l'information, des sujets qui deviennent de plus en plus essentiels, une grande prudence est nécessaire sur ces sujets-là. Il faut écouter les « lanceurs d'alerte », entre guillemets, les gens qui pointent les problèmes des textes, donc ça réclame pas mal de travail et, en fait, ça bouillonne tout le temps. C'est pour cela qu'on a une version relativement tard. La version actuelle a fuité il y a quelques jours. C'est très difficile à suivre, parce que ce sont des projets très lourds, très copieux, où la moindre virgule peut avoir des implications importantes. Tout le monde est un peu charrette là-dessus, je dirais. C’est un truc géré un peu à l'arrache et il faut essayer de faire au mieux pour ne pas se tirer une balle dans le pied.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Là-dessus, c’est vrai que beaucoup de choses sont assez positives au niveau européen, sur la transparence au niveau Parlement, textes, amendements. C'est vrai qu'au niveau des négociations du trilogue, qui réunit les trois institutions, il y a un peu plus de confidentialité, de portes closes. Donc, avant d'avoir effectivement la version finale et de savoir quels ont été les échanges pour arriver au point d'équilibre, c'est assez compliqué. Ça devrait arriver assez rapidement, comme tu le dis, vu que les élections européennes de juin arrivent.<br/><br />
Pierre, tu as suivi ce dossier, nous également. En 2019, il y a eu la révision de la directive sur le droit d'auteur. J’en profite pour signaler que la Commission a déjà annoncé que l'un des projets de la prochaine mandature européenne, à partir de 2024, serait une nouvelle révision de la directive droit d'auteur, qui devrait, évidemment, nous occuper.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ça va être intéressant !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Exactement.<br/><br />
C’était donc le <em>Cyber Resilience Act</em>. On vous tiendra évidemment informés de la suite des opérations.<br/><br />
On va changer de sujet.<br />
<br />
[Sonnette]<br />
<br />
===CentipedeRTK ou la naissance d’un géocommun===<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>On va carrément changer de sujet. J'avoue que c'est un sujet que j'ai totalement découvert ce matin quand j'ai compris qu'il fallait que j'anime l'émission, je crois que c'est Pierre qui l’a proposé : Centipede,un géocommun. Qu’est-ce qu’un géocommun ? Qu’est-ce que c’est que Centipede ? Introduis-nous le sujet, s’il te plaît.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Centipede est un réseau de récepteurs, on va dire GPS pour simplifier, en fait c'est un peu plus que le GPS, qui vise à avoir un réseau de référence pour avoir un GPS amélioré, si on veut. Donc, au lieu d'avoir une précision de quatre, cinq mètres, comme le GPS habituel, classique, on a une précision de quelques millimètres.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Carrément millimètres ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Oui. Littéralement quelques millimètres. On peut faire mieux depuis, mais ça coûte encore plus cher. Là, ce sont des petits appareils, un peu plus coûteux que des GPS classiques, ça coûte ce que coûtait le GPS il y a 20~ans, ça revient entre 300 et 500~euros le récepteur, et ça intéresse notamment les agriculteurs. Pourquoi ? Parce que ça leur permet de faire tourner le tracteur de façon autonome dans leurs champs, parce que c'est d’une précision suffisante que n'a pas le GPS classique.<br/><br />
Des constructeurs, des fabricants de tracteurs vendaient ça sous forme d'option propriétaire et très chère, avec des abonnements bien entendu, parce qu’il ne suffit pas de vendre le matériel, c'est bien aussi si on peut avoir un revenu récurrent, donc des abonnements type 10~000 euros~par an, du matériel à peut-être 10~000~euros à l'acquisition, tout cela pour des techniques qui sont, je ne dirai pas banales, mais relativement simples à mettre en œuvre.<br/><br />
Des gens ont donc travaillé pour reprendre, refaire ces protocoles sous forme de logiciel libre, utiliser les références type IGN, l'Institut géographique national qui diffuse des références, c’est leur métier, une de leurs activités, c'est de diffuser des références précises pour le positionnement géographique pour les architectes, les géomètres, etc. Une équipe de l'INRAE, l'Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, a décidé de déployer un réseau de bornes libres en France.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Petite question, parce que j'ai quand même lu le texte qui est mis en référence : est-ce que c'est l'initiative de l'INRAE ou c'est un agriculteur ? J’ai compris que c'est un agriculteur qui a commencé ce projet, qui a, ensuite, eu le soutien de l'INRAE.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est possible, je ne connais pas le détail de l'histoire.<br/><br />
Effectivement, des agriculteurs ont commencé à déployer cela pour leur utilisation personnelle. En gros, il faut une base de référence, une base dont on connaît très bien la position, il faut faire un petit réglage préalable. La base diffuse sa position et, ensuite, il faut faire un petit calcul : la comparaison, la différence avec les positions reçues par le GPS classique et les autres satellites de navigation comme Galileo européen, etc.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Ce qui permet, avec ce système, de passer d'une précision GPS de quelques mètres près, à une précision quasiment millimétrique.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C’est ça. Un agriculteur peut installer ça dans sa ferme et ça permet « d'arroser » la région, entre guillemets, s'il veut diffuser les résultats de ces mesures. Bien entendu, il n'est pas obligé de le faire, mais s’il ouvre ça à ses collègues, ça peut être utilisé dans un rayon de 20/30, voire plus, kilomètres, ça dépend de la précision. On perd de la précision au fur et à mesure qu'on s'éloigne de la base de référence, mais on peut avoir des résultats sympas jusqu'à 100~kilomètres, j'ai fait des tests moi-même.<br/><br />
En gros, la France rurale est quasiment toute couverte. C'est tellement intéressant pour les agriculteurs qu'ils ont été les premiers à l'utiliser. Mais c'est également utilisé par des gens qui font de la recherche sur les marées, par exemple, ça permet d'avoir une bien meilleure précision de mesure de la hauteur de la mer ; par des gens qui font de la recherche en terrain sauvage, en forêt ou autre, pour repérer des plans d'arbres, pour repérer la pousse d'une année sur l'autre ; aussi par les gens qui vérifient la dérive d'une falaise, l'érosion.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Oui. Là ça se joue vraiment à quelques millimètres par an.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Tout un tas de travaux sont rendus possibles par ça. Et évidemment, pour un projet comme OpenStreetMap, ça permet aussi de faire une cartographie précise de nouvelles constructions ou de nouvelles routes, par exemple.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Rappelle ce qu’est OpenStreetMap.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>En gros, OpenStreetMap c'est le Wikipédia de la cartographie, je pense que vous serez d'accord. C'est une carte, c’est l'équivalent de Google Maps, mais contributif et en Libre. C’est effectivement sous licence libre, tout le monde peut récupérer l'information. Ce qui est super motivant dans OpenStreetMap, c'est que si on voit une erreur sur la carte ou une nouveauté, on peut l'intégrer immédiatement et c'est disponible immédiatement sur le site, c'est donc extrêmement gratifiant pour les contributeurs. Je m'en sers énormément ; en matière ferroviaire, c'est la meilleure carte ferroviaire.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Rassure-toi, on va parler de trains. Pierre est un fan de trains, il y a un sujet sur les trains après. On va parler de trains.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Pour OpenStreetMap, ça permet, en particulier, de cartographier des nouvelles routes, des nouvelles infrastructures de manière précise, avant d'avoir la photographie aérienne, qui vient, en général, quelques années après.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Sur l'article qu’on a mis en référence, je lis que ce projet permet de créer l'alternative libre pour photo-cartographier les territoires. J'aime bien cette expression : photo-cartographier les territoires<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Peut-être un dernier mot sur Centipede. Il y a ce qu'on appelle un caster.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>C’est quoi un caster ? Je me suis posé la question.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Le caster, c’est le serveur internet qui collecte les données de référence de toutes les bases du réseau. C'est évidemment un point central très sollicité, névralgique. Il y a un défaut du système : cette partie-là n'est pas du logiciel libre, je crois que c'est un logiciel vendu par une université, sous licence, on ne peut pas le diffuser de manière libre. C'est effectivement un point de contention du système pour la montée en charge.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Magali.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>J’ai deux points à rajouter, parce que je trouve que c'est assez pertinent.<br/><br />
Le premier. Ce projet, dont tu as parlé, venait de deux personnes dont je vais donner les noms : Julien Ancelin, informaticien, agriculteur, et Stéphane Péneau qui est un inventeur autodidacte. De ce que j'avais compris, chacun, dans son coin, avait essayé de faire des choses bien. Il y en a un qui a pris un abonnement à une des marques de tracteurs, dont tu parlais, qui n'était pas libre et qui, vu le coût, a décidé d'arrêter, il en a parlé sur les réseaux sociaux. L'autre l'a contacté et ils ont commencé à faire des choses ensemble. Donc, ce n’est pas juste un serveur qui balance des données, ce sont des bases de données au centimètre près, c'est un logiciel qui s'appelle RTKBase qui est libre, c'est une suite, qui s'appelle RTKLib, qui est libre, et ils ont commencé avec un Raspberry. Un Raspberry, c’est tout petit, c’est un ordinateur minuscule !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>La base fonctionne sur un Raspberry. Tu n'es pas obligé de la faire tourner sur un Raspberry. Chaque agriculteur qui est dans le projet a, à priori, installé un Raspberry relié à Internet avec l'antenne locale pour monter sa base.<br/><br />
Je connais effectivement Julien et Stéphane pour avoir vu leurs conférences et avoir discuté avec eux. Je ne savais pas pour Julien. Pour moi, Julien était une personne de l'INRAE.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>C’est pour cela que j'ai posé la question tout à l'heure.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Tu fais bien de citer leurs noms.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Dans ce sens-là, effectivement.<br/><br />
Vincent, est-ce que tu veux intervenir là-dessus avant qu'on passe au sujet suivant ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Ça sera un peu hors sujet. Je ne suis pas totalement rassuré par une agriculture qui fonctionne au GPS. Je ne suis pas convaincu, d'un point de vue social, que ce soit bon pour le monde rural d'avoir des tracteurs tous commandés au GPS.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>De ce que je voyais, ça évite les chevauchements de semences ou d’entrants : comme c'est fait au centimètre près, on évite de planter deux fois la même chose ou de mettre des entrants au même endroit. Et ça évite aussi que des zones ne soient pas cultivées.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Si on pouvait respecter les 15~mètres de limite d'épandage des pesticides, pour les parcelles, tant mieux ! On verra.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Je pense qu’on consacrera une émission à ce sujet et visiblement, l'année 2024, selon l'article, verra la création d'une association pour porter le projet Centipede et l'élaboration d'une gouvernance. L'un des premiers projets, c’est d'améliorer l'infrastructure autour du caster, dont tu as parlé tout à l'heure, notamment pour améliorer la redondance et peut-être, aussi, pour avoir une version libre du logiciel qui traite ça.<br />
<br />
[Sonnette]<br />
<br />
===«800 franchisés de la poste britannique condamnés à tort à cause d’un logiciel défectueux»===<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Sujet suivant, on ne va pas parler tout de suite des trains.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Je crois que je suis repéré !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Je regarde, je suis quand même le temps qui reste et je ne veux pas qu'on oublie de traiter ce sujet, donc on va le faire tout de suite. On en a déjà parlé ici, il y a deux ans, avec Vincent, et la presse s'en fait l'écho aujourd'hui. C’est d'ailleurs un article de NextINpact, qui s'appelle maintenant Next, intitulé « 800 franchisés de la poste britannique condamnés à tort à cause d'un logiciel défectueux ». C'est quoi, ce truc, Vincent ? Tu nous en avais déjà parlé dans l'émission 140 de <em>Libre à vous !</em>, il y a donc deux~ans, tu avais fait une chronique sur cela. Est-ce que tu peux nous rappeler les faits ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Oui, tout à fait. À l’époque, ma source était un article du <em>Monde</em>.<br/><br />
Première chose à rappeler : les faits sont très anciens. On parlait de Blender qui a 30~ans, mais cela a commencé il y a 20~ans. <br/><br />
Pour situer, tout part de la poste britannique, une grande institution, une entreprise publique, mais qui fonctionne avec des franchisés, donc des gérants indépendants auxquels elle fournit un logiciel qui s'appelle Horizon, pas de rapport avec le parti !, qui est développé par l'entreprise japonaise Fujitsu. Il se trouve que très rapidement, dès 99, il y a des différences inexpliquées au niveau des recettes, des dépenses et des ventes, au niveau des gérants des agences. Qu'a fait la poste ? Elle n’a pas dit que le logiciel avait un problème, elle a accusé les gérants de malversations et de détournements de fonds. Il y a eu des cas vraiment dramatiques, des condamnations pour vol. En plus, il y avait des gens très jeunes, des personnes de 18/19~ans qui ouvraient une franchise de la poste, qui se sont retrouvés condamnés. Les premiers chiffres que j'avais, c'était 550, puis là, on passe à 800, c'est énorme, des gens ont été mis en prison avec très peu de possibilités de réagir.<br/><br />
Cette affaire a effectivement plein d'enseignements.<br/><br />
La partie logicielle a un problème et, pourtant, est prise comme argent comptant, c'est le cas de le dire.<br/><br />
Ce qui explique aussi le retard, c'est que les gens étaient seuls, puisque c‘est un système de franchise ; s'ils avaient été des employés, il y aurait eu des syndicats, il y aurait eu un comité d'entreprise, il y aurait eu des choses alors que là, ils étaient seuls, ils ignoraient qu'ils étaient plusieurs dans le cas, en fait, chacun était pris séparément. Ce n’est que quand une association des victimes du logiciel s'est créée que ça a commencé à réagir.<br/><br />
En plus, la poste britannique pouvait saisir la justice sans enquête de police. C’est un vieux droit historique, qui doit dater de Robin des Bois, c’est à peu près le problème, évidemment en niant tout, en disant « le logiciel est bon, le logiciel l'a dit, c'est forcément la vérité. »<br/><br />
Ça a mis beaucoup de temps. Il y a eu des condamnations de la poste, des annulations. Et là, ça ressort parce que c'est intéressant aussi d'un point de vue médiatique : il y a eu une mini-série télévisée qui a été un succès, qui a été vue par des millions de téléspectateurs. C'est devenu une affaire d'État du fait de cette série télévisée, avec excuses publiques du Premier ministre et ainsi de suite, qui a qualifié ça de plus grande erreur judiciaire britannique.<br />
<br />
Il y a donc plein de choses là-dedans.<br/><br />
Il y a cette uberisation qui fait cette solitude. Il y a le fait que, finalement, le logiciel a été pris comme référence, avec, en plus, disparition de tout document papier qui permettait de contrer, de vérifier. Et, bien sûr, aucun accès au code source, évidemment, et aucune condamnation des responsables, que ce soit de l'entreprise initiale productrice, que ce soit des dirigeants de la poste.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b> <em>The Guardian</em> précise et tu l'as dit : « En droit anglais et gallois, les ordinateurs sont considérés comme fiables, sauf preuve du contraire, ce qui renverse la charge de la preuve normalement appliquée dans les affaires pénales. »<br/><br />
Pierre, Magali, qui veut régir ? Peut-être Magali, déjà ?<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Je trouve aberrant qu’il n’y ait pas eu plus de vérifications. Qu’il y ait une personne, deux personnes, dix personnes qui veulent arnaquer la poste, mais 550 ? Au départ, tu dis 550 et, en fait, on se rend compte que, maintenant, c'est 800. Ils ne se sont pas dit, à un moment donné, « il y a peut-être un problème dans le logiciel ? ». C'est ça que je n'arrive pas à comprendre : comment ont-ils pu se mettre à attaquer en justice 800 personnes avant de se dire « il y a peut-être un problème avec le logiciel » ? C'est quoi ? Un manque d'esprit critique ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Il faut savoir que le logiciel était fait, en plus, par un prestataire extérieur. Il y a sans doute beaucoup plus de juristes que d'informaticiens au sein de la poste. Quelles étaient leurs compétences informatiques ? Après, ils ne se sont pas posé de questions. Comme ils les avaient la puissance pour eux, ils ne se sont pas remis en cause, c’est sûr.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>J'avais noté la même partie que toi, cette disposition incroyable du droit anglais qui dit que l'ordinateur a raison par défaut. Je crois qu'il est question de changer ça ou ça a déjà été changé, mais ils vont remettre en cause cette disposition.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>L'article dit : « "En attendant les résultats de l'enquête, le comité des règles de procédure pénale examinera les pratiques actuelles et les problèmes liés à la fiabilité des preuves informatiques", a déclaré un porte-parole du ministère de la Justice ». C'est le moins qu'on puisse faire, effectivement.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>J'ai vu aussi qu'il y a quand même 95~personnes qui ont réussi à se défendre, qui ont réussi à avoir gain de cause. C'est peu par rapport aux 800, mais c'est tout de même déjà beaucoup. On imagine les efforts et le coût que ça dû impliquer pour elles. Cette histoire est effectivement vraiment effrayante.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>C'est ce qui est précisé dans l'article et ce que disait Vincent. Avant que la mini-série existe, seuls 96~chefs de bureaux de poste avaient réussi à renverser leur jugement en appel. Effectivement, quand on sait la masse d'énergie et d'argent qu'il faut pour aller en appel ! En fait, c'est la mini-série qui a révélé l'ampleur du problème, qui a été qualifié de pire injustice de l'histoire britannique et, visiblement, ils ont prévu un milliard de livres sterling, ce qui correspond, en gros, à un milliard d'euros, pour les indemnisations, selon la BBC. Voilà pour ce scandale qui reposait sur la confiance absolue dans les ordinateurs.<br/><br />
Vincent.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>En plus, ça s'est étalé, jusqu'en 2014, il y a des cas de gens qui ont été accusés. Ça a commencé en 2000 et, en plus, ça s’est étalé sur presque une quinzaine d'années.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>On revient à la chronique de Xavier Berrne, en début d’émission, sur l'importance de pouvoir accéder aux codes sources et aux algorithmes de ce genre d'outil pour que des personnes, effectivement indépendantes, vérifient ce que fait ce logiciel.<br/><br />
Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>D'ailleurs, on a une disposition française, je crois, d'obligation de certification des logiciels de compta. Tu as suivi le sujet mieux que moi, je suis sûr que tu as plus d'éléments, mais il me semble que ça pouvait poser des problèmes au logiciel libre, là encore, puisque c’était une obligation de vérification de conformité.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Les problèmes ont été levés. Ça remonte à très longtemps, vu le temps qui reste et vu ton envie de parler des trains, si on commence à expliquer comment ça a été levé, on n'en est pas sorti. On mettra la référence, c’était effectivement sur les logiciels de caisse. Un certain nombre de problèmes avaient été remontés à la fois par des associations libristes, comme l'April, et aussi par des gens qui font des logiciels libres de gestion, notamment de compta, comme Dolibarr. On avait eu des rencontres, notamment au ministère des Finances, à Bercy. Les problèmes avaient effectivement été réglés, un peu comme au niveau du <em> Cyber resilience Act</em>. C'est la problématique habituelle : les gens qui rédigent ces lois n'ont pas forcément en perspective et dans l'esprit toutes les implications possibles, notamment sur la partie logicielle libre.<br/><br />
Est-ce que sur la poste, c'est bon pour vous ? Magali ? OK ?<br />
<br />
[Sonnette]<br />
<br />
===Les trains en Pologne===<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Les trains ! Je pense que ça va être notre dernier sujet. Je surveille l’heure.<br/><br />
On blague un peu avec Pierre sur sa passion pour les trains, il faut préciser que non seulement Pierre est un passionné de trains, mais un spécialiste de trains, si vous le suivez sur les réseaux sociaux, c'est absolument passionnant. Là tu voulais nous parler d'un sujet concernant les trains en Pologne. C'est ça ?<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C'est une histoire absolument incroyable. En Pologne, une compagnie régionale faisait circuler des rames électriques dans sa région, une trentaine de rames. Typiquement, un train nécessite de la maintenance régulière. Problème : les rames qui étaient envoyées en maintenance tombaient en panne. L'atelier de maintenance appelait : « On a un problème, le train est bloqué. On n'arrive pas à le faire fonctionner comme il devrait. »<br/><br />
La société appelle le constructeur ou l'atelier, je ne sais pas exactement ; le constructeur des rames est contacté, c’est une société polonaise qui s'appelle Newag, qui répond : « Vous n'avez pas fait la maintenance dans nos ateliers agréés, vous avez attribué le contrat à un concurrent. On pense que le concurrent a fait des bêtises dans la maintenance et c'est pour ça. On va vous débloquer les rames, mais il faudrait que vous nous les fassiez maintenir. Il faudrait que vous nous attribuiez à nouveau le marché qu'on avait perdu. »<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Captation totale du problème !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Oui. La compagnie était sceptique, les ateliers aussi, parce qu'ils étaient quand même compétents, ils ne pensaient pas avoir commis d'erreur. Ils finissent par se dire « on va chercher des hackers informatiques » ; ils ont cherché des pirates. Après, il y a toute une histoire sur le sens du mot <em>hacker</em>.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Oui, parce que <em>hacker</em> ne veut pas forcément dire pirate.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ils ont cherché, je ne sais pas exactement ce qu'ils ont dit en polonais. Au niveau journaliste, on fait souvent la confusion.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Ils ont cherché des personnes très compétentes.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Des personnes très compétentes, ce qu'on appelle des <em>hackers</em> en termes habituels, mais qui a dérivé ; on pourrait dire « pirates ». Ils ont cherché des gens sur Internet.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Si je peux me permettre, le terme « pirate » est assez noble, toi-même étant membre du Parti pirate, je me permets !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Absolument ! Ce ne sont pas des gens qui veulent forcément violer la loi.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Exactement.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Pourquoi le sait-on ? Parce qu’il y a un buzz polonais depuis un bon moment, en fait, mais là, ça a éclaté beaucoup plus médiatiquement dans le monde entier, parce que les personnes qui se sont occupées de cette affaire ont présenté leurs résultats à une conférence de sécurité informatique allemande ultra-connue, dont je ne sais plus le nom, désolé, un nom avec des lettres et des chiffres [37C3, Note de l'intervenant]. Bref !<br/><br />
Les gens en question ont étudié les systèmes. Ils se sont aperçu qu’il y avait des trucs très bizarres. Ils ont réussi à faire démarrer un train. Ils ont regardé, ils ont fouiné dans l'intérieur du fonctionnement logiciel du train. Ils n'ont pas modifié le logiciel parce que ça peut poser des problèmes de conformité et de sécurité, évidemment, mais ils ont quand même trouvé, pour forcer le déblocage, l'endroit où le train était bloqué.<br/><br />
Dans leur conférence, ils expliquent d'ailleurs que les ateliers qui les avaient mandatés pour cet audit commençaient à perdre patience, parce que ça leur a pris énormément de temps ; c'est un système extrêmement particulier dont on n'a pas forcément l'habitude quand on est informaticien, ils ont donc mis un temps énorme pour faire ça et, en fait, 45 minutes plus tard, le responsable de la boîte devait venir leur enlever le contrat. Ils ont réussi à débloquer 43~minutes avant la <em>deadline</em>.<br/><br />
Ils se sont aperçus que le constructeur avait mis du logiciel à l'intérieur du logiciel du train pour bloquer automatiquement le train sans message d'erreur, comme une panne, simuler une panne, si le train restait 20~jours ou 21~jours, je crois, au même endroit, ce qui était vérifié par le GPS.<br/><br />
Une autre disposition vérifiait si le train était dans certains lieux particuliers. Ils ont retrouvé les coordonnées géographiques des endroits correspondants et ça correspondait à tous les ateliers concurrents, y compris les ateliers du constructeur lui-même, parce que ça permettait au constructeur de tester que le logiciel fonctionnait bien pour bloquer les trains qui n'étaient pas chez lui.<br/><br />
Ils avaient également fait des modifications bizarrement quelques jours avant que le train arrive dans les ateliers.<br />
<br />
Ça a fait un énorme buzz en Pologne. L’autorité de la concurrence, qui avait été assez peu motivée pour s'occuper du dossier, a fini par s'en saisir. Il va aussi y avoir une audition parlementaire de l'équipe et de l'exploitant. Ça chauffe donc pas mal pour le constructeur qui a menacé de procès en diffamation, mais qui, à priori, n'a pas grand-chose pour se défendre, parce qu’il y a quand même énormément d'éléments extrêmement en sa défaveur, disons.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Si je comprends bien, c’est un outil logiciel pour empêcher la concurrence et la réparabilité.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Oui. Pour torpiller la concurrence et garder le marché de maintenance sur le matériel en question.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Ce qu’on regroupe, plus généralement, sous le terme de DRM, les dispositifs de contrôle d'usage.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Du DRM pour train. En plus, les DRM c'est souvent abusif pour nos droits, mais c'est quand même annoncé dans les contrats. Là, ce n'était absolument pas dit de manière contractuelle, c'était planqué et le constructeur a même nié que ça existait.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>D'accord.<br/><br />
Vincent, Magali, une réaction ou une question ?<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Je trouvais que l’obsolescence programmée c'était moche, mais alors là, c'est pire, c'est vraiment pire !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>C'est incroyable !<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Ça tue la concurrence. Ça oblige à aller voir le constructeur et, en plus, ils ne sont même pas au courant. Ils sont totalement captifs.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>En plus, ils ont caché leur jeu. Ils ont nié l'existence du souci.<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>J'espère que ça va leur coûter très cher !<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Probablement !<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Ce qui est quand même impressionnant, c'est qu'on parle d'un train, ce n'est pas une liseuse ou quelque chose, c'est un produit d'industrie lourde qui est stratégique pour un pays. La Pologne, c'est juste à côté de l’Ukraine, on sait que le GPS peut détourner. Ça pose aussi des questions sur la fragilité. On parle de cyber-résilience, mais, là, on en est très loin avec ce type de système pour des produits, pour du matériel vraiment stratégique.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>De manière intéressante, selon les personnes qui ont fait l'audit, une hypothèse : il semblerait que le système initial était fait, évidemment, pour éviter des modifications logicielles anarchiques, donc pour protéger l'intégrité logicielle du train, pour éviter qu’il se passe n'importe quoi. Le problème c'est, qu'après, le système a été détourné et étendu pour ajouter des règles abusives, en fait.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Impressionnant ! Tu nous tiendras au courant de l'évolution de ce qui se passe là-bas, pour savoir ce que ça va donner : est-ce que, effectivement, il va y avoir une condamnation de l'entreprise ? Est-ce que la loi polonaise sur ces questions-là, que je ne connais pas, va évoluer ou pas ? Peut-être que ça aura un écho, d'ailleurs, au niveau de la future directive européenne sur le droit d'auteur, on ne sait pas.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Ou sur le <em>Cyber Resilience Act</em> ou autre, le règlement sur l’intelligence artificielle, je ne sais pas. Ça laisse rêveur.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Peut-être les deux. Effectivement ça laisse rêveur.<br/><br />
On a déjà plusieurs fois parlé dans l'émission de la question des DRM, ces fameux dispositifs de contrôle d'usage. Je vous renvoie à l'émission 4 avec Jean-Baptiste Kempf et Marie Duponchelle, il y a deux/trois~ans. On en avait parlé un petit peu, l'émission concernait plus la musique et la vidéo, mais ça explique un petit peu ces concepts-là et pourquoi il est aussi important de pouvoir contourner ces dispositifs de contrôle d'usage pour des questions notamment licites, ou des questions de sécurité ou d'études des systèmes tels qu'on en a parlé tout à l'heure dans un sujet.<br/><br />
Une question de Marie-Odile, réponse ultra-rapide : est-ce qu’on est certain que pour la France, ça n'existe pas ? Pour les trains français? Pierre.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>On n'a pas connaissance d'épisodes comme ça. On peut difficilement en être certain, en fait. Je sais qu'il y a eu des bugs dans certaines séries TGV, des vrais bugs : si, au moment de démarrer, le TGV reculait, le moteur se bloquait et il était en rade. J'ai entendu des histoires comme ça. Il y a eu des bugs dans des séries de locomotives, mais il n'y a pas eu de mise en évidence de malveillances, de volontés de malveillance derrière.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Vincent et Magali en dernière intervention.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>La SNCF garde ses propres compétences en interne et a ses propres ateliers de maintenance. Le TGV c'est quand même une coconstruction en collaboration, en coopération. Là, c'est aussi le fait d'acheter une locomotive sur étagère, on va dire.<br />
<br />
<b>Pierre Beyssac : </b>Maintenant, ça se passe comme ça. À une époque, la SNCF concevait ses matériels, maintenant c'est quand même largement externalisé, c’est fait par des sociétés comme Alstom parce qu’il y a vraiment des choses très spécialisées, comme le logiciel, justement, il y a de plus en plus de logiciels dans les trains. Au niveau électrotechnique, c'est assez complexe aussi. La SNCF s'occupe en général de la maintenance, c'est peut-être une des rares compagnies à le faire encore. Elle veut être autonome de ce point de vue-là, mais il y a des choses qui doivent quand même relever du constructeur, du vendeur du matériel.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Magali, tu voulais intervenir ?<br />
<br />
<b>Magali Garnero : </b>Oui, mais ça a été déjà dit. Je vais rajouter quelque chose : pour éviter ce genre de malversations, je suis sûre qu’il faudrait utiliser beaucoup plus de logiciels libres, donc auditables beaucoup plus facilement. Ça résoudrait beaucoup de problèmes !<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Merci à vous pour cette nouvelle édition de Au café libre, avec Pierre Beyssac, Magali Garnero, Vincent Calame qui reste en place et qui se prépare pour sa chronique.<br/><br />
Je vous souhaite une belle fin de journée.<br/><br />
On va faire une pause musicale.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons écouter <em>Throne Room</em> par Sawtooth. On se retrouve dans environ 3~minutes~20. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.<br />
<br />
<b>Pause musicale : </b><em>Throne Room</em> par Sawtooth.<br />
<br />
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous venons d’écouter <em>Throne Room</em> par Sawtooth, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By 3.0.<br />
<br />
[Jingle]<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons passer au sujet suivant.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Chronique «Lectures buissonnières » de Vincent Calame – <em> Une histoire des libertés associatives</em>==<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Vincent Calame, toujours au studio, informaticien libriste et bénévole à l’April, nous propose des chroniques « Lectures buissonnières » ou comment parler du Libre par des chemins détournés en partageant la lecture d’ouvrages divers et variés. Vincent va nous parler, ce mardi, du livre <em> Une histoire des libertés associatives</em> de Jean-Baptiste Jobard.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Oui. Tout à fait. Cet ouvrage est paru en 2022 aux Éditions Charles Léopold Mayer. Il fait un peu de moins de 150~pages petit format, il est disponible gratuitement en ligne sur le site de l’éditeur, eclm.fr. Il peut aussi être commandé, pour un montant de 13~euros, chez votre libraire préféré.<br />
<br />
Avant d’aborder le sujet de l’ouvrage, il faut préciser que l’auteur, Jean-Baptiste Jobard, est coordinateur du Collectif des associations citoyennes –~vous retrouverez les liens sur la page de l’émission~– et ce collectif est lui-même membre d’une coalition autour des libertés associatives appelée L.A. Coalition. Parmi les membres de cette coalition, on retrouve deux associations bien connues à cette antenne : Framasoft et La Quadrature du Net. Je crois qu’il n’y a pas besoin que je les présente.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Effectivement, Pouhiou, codirecteur de Framasoft, était notre invité le 19~décembre~2023, dans l’émission 195, et nous citons régulièrement La Quadrature du Net dans notre Café libre, je l’ai d’ailleurs fait tout à l’heure.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Oui, nous sommes en terrain connu. C’est pour cela que j’ai pensé que cet ouvrage serait susceptible d’intéresser celles et ceux qui nous écoutent.<br/><br />
Nous baignons dans le tissu associatif, presque sans nous rendre compte, ne serait-ce que dans ce studio où nous sommes en direct dans une émission proposée par l’April, que je ne présente pas, sur la radio Cause Commune gérée par une association qui est Libre à Toi. Bref, les libertés associatives nous concernent de près et, comme le dénonce L.A. Coalition, l’actualité n’est pas rose, nous aurons l’occasion de l’aborder dans une future chronique.<br />
<br />
Revenons à notre ouvrage. Pour son auteur, Jean-Baptiste Jobard, on défend encore mieux une cause quand on en connaît l’histoire, c’est ce qui l’a poussé à l’écrire.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Justement, quand commence cette histoire ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>En France, une date nous vient tout de suite à l’esprit : 1901. Mais cette fameuse loi, portée par Waldeck-Rousseau, qui consacre, dans son article 2, la liberté de s’associer sans autorisation ni déclaration préalable, n’est pas venue de nulle part. C’est le fruit d’un long processus. Jean-Baptiste Jobard le fait remonter à la Révolution française et, je cite l’auteur : « L’histoire […] commence […] de bien singulière façon : par une interdiction pure et simple de la constitution d’associations de personnes, signifiée dans le décret d’Allarde en mars 1791 et par la fameuse loi Le Chapelier en juin de la même année. »<br/><br />
Évidemment, pour nous qui considérons, en tout cas en ce qui me concerne, que les associations sont des acteurs importants de la vie démocratique, cela fait bizarre. Il y a, bien sûr, des raisons historiques à cette loi qui signifiait la fin des corporations de l’Ancien Régime qui bridaient la libre entreprise, mais cette loi signifiait aussi, et surtout peut-être, l’interdiction des syndicats ouvriers. Pour plus de détails, pour en savoir plus, je vous renvoie à la fiche Wikipédia sur la loi Le Chapelier que j’ai mise dans les références.<br/><br />
Les régimes suivants ont quelque peu allégé la loi, mais pour ces régimes autoritaires, que ce soit l’Empire ou la Restauration, de l’association à l’agitation, il n’y a qu’un pas et on sait que l’agitation conduit à la sédition. Il faut dire que la période n’a pas été avare en sociétés secrètes conspirant contre les régimes réactionnaires partout en Europe.<br />
<br />
L’illégalité n’a heureusement pas empêché la montée en puissance de l’associationnisme tout au long de la première moitié du 19e siècle, car c’était tout simplement une question de survie. Avec la Révolution industrielle, l’exode rural, la disparition des vieilles solidarités paysannes et la misère de la classe ouvrière, même si on ne l’appelait pas encore comme ça, il fallait créer de nouvelles solidarités et de nouvelles formes d’entraide.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Peux-tu préciser le terme « associationnisme » ?<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Oui, il est assez dur à prononcer, c’est peut-être pour cela qu’il n’a pas eu beaucoup de succès. Aujourd’hui, on voit bien qu’il y a une différence entre une association, un syndicat, une mutuelle, une coopérative, ce ne sont pas les mêmes statuts et les mêmes objectifs. À l’époque, aucun de ces statuts n’existait et l’association était illégale, même si tolérée.<br/><br />
« L’associationnisme » est un terme un peu générique pour désigner toutes ces initiatives, ces « proto-associations », entre guillemets, pour reprendre une expression proposée dans l’ouvrage. Bien sûr, du fait de la misère, ces « proto-associations » avaient, en grande majorité, un but économique, l’heure n’était pas encore à l’association sportive, d’animation culturelle ou de la défense du logiciel libre, mais nous sommes les héritiers de ce bouillonnement de « l’associationnisme ».<br/><br />
Vient ensuite la révolution de 1848, pour laquelle l’auteur a d’ailleurs une affection toute particulière, qui voit, dans un premier temps, le triomphe de « l’associationnisme » avec la proclamation du droit d’association dès les premiers jours de la Deuxième République, le 24 février. Malheureusement, le mouvement est réprimé dans le sang lors des Journées de juin 1848 lorsque les ouvriers se soulèvent contre la fermeture des ateliers nationaux et c’en est fini de l’espoir de la République sociale.<br/><br />
Si la liberté d’association demeure dans la constitution de la Deuxième République, le Second Empire pointe très rapidement le bout de son nez et met fin à la récréation en soumettant toute création à une autorisation préfectorale.<br/><br />
Les graines sont cependant semées, elles attendent la Troisième République pour germer.<br/><br />
Comme le temps est court, je vous propose de m’arrêter là pour aujourd’hui et de vous parler de la suite dans ma prochaine chronique.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Merci Vincent. Comme tu le dis, le temps est court. Une chronique toujours aussi passionnante. Le livre c’est <em> Une histoire des libertés associatives</em> de Jean-Baptiste Jobard. On se retrouve donc le mois prochain pour la suite, dans ta prochaine chronique.<br />
<br />
<b>Vincent Calame : </b>Tout à fait.<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Merci Vincent.<br/><br />
Nous allons terminer très rapidement par quelques annonces.<br />
<br />
[Virgule musicale]<br />
<br />
==Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre==<br />
<br />
<b>Frédéric Couchet : </b>Dans les annonces, ça va faire plaisir à Vincent qui, si je me souviens bien, est franco-suisse : les 7e Rencontres Hivernales du Libre auront lieu du vendredi 26 janvier au dimanche 28 janvier 2024, à St-Cergue, en Suisse avec des conférences et des ateliers. Il y aura peut-être de la fondue ! Je rappelle, pour les gens qui rencontreront un jour Vincent, de lui demander sa recette de fondue ou, même, de se faire préparer une fondue par Vincent. C'est une merveille !<br />
<br />
Chaque premier vendredi du mois, la radio Cause Commune, sur laquelle nous diffusons avec plaisir cette émission, organise une rencontre à partir de 19~heures~30 au studio de la radio dans le 18e arrondissement de Paris, au 22~rue Bernard Dimey. La prochaine rencontre aura lieu vendredi 2 février 2024 et je participerai à cet évènement.<br />
<br />
Comme chaque premier samedi de chaque mois, de 14~heures à 18~heures, vous avez un événement logiciel libre au Carrefour numérique de la Cité des sciences et de l'industrie à Paris, pour vous faire installer et paramétrer des logiciels libres. Il y a également des ateliers et des conférences. Le prochain aura lieu samedi 3 février 2024 avec installation, par exemple, de distributions libres comme GNU/Linux et peut-être de FreeBSD, si Pierre Beyssac est présent !, mais je ne sais pas.<br />
<br />
Notre émission se termine.<br />
<br />
Je remercie les personnes qui ont participé à l'émission du jour : Xavier Berne, Magali Garnero, Pierre Beyssac, Vincent Calame.<br/><br />
Aux manettes de la régie aujourd’hui, Élise.<br/><br />
Je remercie également mon collègue Étienne Gonnu pour avoir participé à la préparation de l’émission.<br/><br />
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, Julien Osman, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.<br/><br />
Merci également à Quentin Gibeaux, bénévole à l’April, qui découpe le podcasts entier en podcasts individuels par sujet.<br />
<br />
Vous retrouverez sur notre site web, libreavous.org, toutes les références utiles, ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.<br/><br />
N’hésitez à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu, mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondrons directement ou lors d’une prochaine émission. Vous pouvez également nous suggérer des sujets à traiter.<br/><br />
Si vous préférez nous parler, vous pouvez aussi nous laisser un message sur le répondeur de la radio, pour réagir à l'un des sujets de l'émission, pour partager un témoignage, vos idées, vos suggestions, vos encouragements ou, tout simplement, pour nous poser une question. Le numéro du répondeur : 09~72~51~55~46.<br />
<br />
Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission du jour. Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et également à faire connaître la radio Cause Commune, la voix de possibles.<br />
<br />
La prochaine émission aura lieu en direct mardi 30 janvier 2024 à 15~heures~30. Notre sujet principal portera sur les jeux de rôle libres. Elle sera animée par ma collègue Isabella Vanni et par Luk, qui est également chroniqueur dans l'émission.<br />
<br />
Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 30 janvier et d’ici là, portez-vous bien.<br />
<br />
<b>Générique de fin d’émission :</b><em>Wesh Tone</em> par Realaze.</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Les_limites_de_la_reconnaissance_faciale_via_l%E2%80%99IA_avec_Hubert_GuillaudLes limites de la reconnaissance faciale via l’IA avec Hubert Guillaud2024-01-23T06:36:46Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/les-limites-de-la-reconnaissance-faciale-via-l-ia ici] - Janvier 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/les-limites-de-la-reconnaissance-faciale-via-l-ia ici] - Janvier 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Philippe_Latombe_:_avec_les_JO,_pensons_%C3%A0_nos_capacit%C3%A9s_de_r%C3%A9siliencePhilippe Latombe : avec les JO, pensons à nos capacités de résilience2024-01-20T14:22:07Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/philippe-latombe-avec-les-jo-pensons-a-nos-capacites-de-resilience ici] - Février 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/philippe-latombe-avec-les-jo-pensons-a-nos-capacites-de-resilience ici] - Février 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Loi_SREN_:_une_r%C3%A9gulation_du_num%C3%A9rique_%C3%A0_la_fran%C3%A7aise_tr%C3%A8s_critiqu%C3%A9e_-_Marc_ReesLoi SREN : une régulation du numérique à la française très critiquée - Marc Rees2024-01-18T13:56:55Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/loi-sren-une-regulation-du-numerique-a-la-francaise-tres-critiquee ici] - Janvier 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/loi-sren-une-regulation-du-numerique-a-la-francaise-tres-critiquee ici] - Janvier 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Les_%22communs%22_:_une_alternative_au_capitalisme_num%C3%A9rique_-_Le_Meilleur_des_MondesLes "communs" : une alternative au capitalisme numérique - Le Meilleur des Mondes2024-01-15T12:54:30Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/les-communs-une-alternative-au-capitalisme-numerique ici] - Janvier 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/education-numerique-une-generation-sacrifiee ici] - Janvier 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/%C3%89mission_Libre_%C3%A0_vous_!_sur_Cause_Commune_du_16_janvier_2024Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 16 janvier 20242023-12-31T09:21:05Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-16-janvier-sur-radio-cause-commune ici] - janvier 2024 »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/emission-libre-a-vous-diffusee-mardi-16-janvier-sur-radio-cause-commune ici] - janvier 2024</div>Morandimhttps://wiki.april.org/w/Le_d%C3%A9put%C3%A9_geek_Eric_Bothorel_d%C3%A9fend_son_point_de_vueLe député geek Eric Bothorel défend son point de vue2023-12-29T11:38:39Z<p>Morandim : Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/le-depute-geek-eric-bothorel-defend-son-point-de-vue-projet-de-loi-sren-ai-act-tres-haut-debit ici]... »</p>
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Publié [https://www.librealire.org/le-depute-geek-eric-bothorel-defend-son-point-de-vue-projet-de-loi-sren-ai-act-tres-haut-debit ici] - Janvier 2024</div>Morandim