Différences entre les versions de « Rapport Open GLAM : Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels »

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#l’importance d’une réaffirmation de la mission des institutions publiques dans la diffusion et la réutilisation des données culturelles, a fortiori concernant les oeuvres du domaine public ;
 
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#les préoccupations économiques susceptibles d’entraver la diffusion et la réutilisation des données culturelles.
 
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===LE RÉGIME DÉROGATOIRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978  FACE À L'OPEN DATA===
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Il s’agit, en France, de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 « portant diverses mesures d'amélioration des relations entre
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l'Administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal » telle qu’elle a été modifiée par la loi
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n° 79-587 du 11 juillet 1979 « relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre
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l'Administration et le public » et l’ordonnance n° 2005-650 « relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la
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réutilisation des informations publiques » signée le 6 juin 2005.
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Cette loi instaure un principe de libre diffusion et réutilisation des informations publiques, tout en insérant un article 11 — dit
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« exception culturelle » — qui pose un certain nombre d’obstacles à l’ouverture des données culturelles. Cet article permet
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une dérogation au principe général de réutilisation des données publiques, offrant aux institutions culturelles de fixer les
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conditions dans lesquelles les informations peuvent être réutilisées.
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Faute de réelle définition de la portée de cet article, et malgré le rapport « Partager notre patrimoine culturel » remis en 2010
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au Ministère de la Culture, de nombreux flous relatifs aux règles de réutilisation des données culturelles (telles la question des
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données à caractère personnel, la détermination des tarifs, etc.) n'ont jamais été éclaircis. La difficile application de cette
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exception fragilise les institutions culturelles et constitue un frein important au développement de l'Open Data dans ce
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secteur.
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Cet article a été notamment invoqué à plusieurs reprises devant les tribunaux par des services d’archives départementales
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pour refuser la mise à disposition des données leur appartenant, ce qui a donné lieu à  la décision du 13 juillet 2011 du
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Tribunal administratif de Clermont-Ferrand donnant droit à NotreFamille.com contre les Archives départementales du Cantal
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*l’abolition de l’« exception culturelle », en réintégrant les données culturelles dans le régime général de réutilisation des informations publiques.
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*une réelle mise en place du droit à la réutilisation des informations publiques, passant par une information claire sur les obligations des institutions culturelles.
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Version du 12 août 2013 à 15:22

| Exception pédagogique et ressources libres dans l'éducation | Propositions de l'April éducation | | Education |

Conclusion de réflexions préparatoires menées lors des réunions «  Open Glam » des 27 avril et 29 mai 2012 à Paris.
Le document est sous double licence Art Libre et Creative Commons By-Sa.

Encore disponible sur le net ici :

Open Glam est un réseau informel de personnes et d’organisations cherchant à favoriser l’ouverture des contenus conservés ou produits par les institutions culturelles (Glam etant l’acronyme anglais de Galleries, Libraries, Archives, Museums).

Souhaitant contribuer aux démarches d'ouverture des données et contenus culturels à l'oeuvre dans les institutions culturelles françaises, notre groupe de travail a étudié les enjeux relatifs à l’ouverture des données et contenus culturels, s’est intéressé aux principaux points de blocage freinant cette diffusion et a formulé quelques préconisations et pistes d'évolution pour l'administration et le législateur, dans un esprit constructif de corésolution des problèmes. L’Open Knowledge Foundation et Wikimédia France ont réuni un groupe de réflexion informel et bénévole, formé de juristes, de professionnels des institutions culturelles et de membres d'associations oeuvrant pour la diffusion des contenus et données culturels.

Ce document, finalisé par :

représente la conclusion de réflexions préparatoires menées lors des réunions «  Open Glam  » des 27 avril et 29 mai 2012 à Paris.


PROPOSITIONS DU RAPPORT

La réussite d’une réelle politique d’ouverture des données et contenus culturels repose selon nous sur un certain nombre de facteurs/actions. Nous préconisons donc :

DE LA PART DU MINISTÈRE DE LA CULTURE :

  • Un effort pédagogique pour définir les termes employés dans le domaine de l’ouverture des données et des contenus, ainsi qu’un accompagnement des usages ;
  • Une mise en valeur et un encouragement des expériences d’ouverture réalisées, issues d’initiatives institutionnelles ou privées, afin de montrer ce qui est réalisable ;
  • La rédaction d’un clausier à destination des établissements publics et des institutions culturelles afin de sécuriser les marchés publics entraînant le transfert de droits de propriété intellectuelle ;
  • Une information claire et pédagogique pour les institutions culturelles sur l’existence du droit à la réutilisation des informations publiques, sur sa portée, son articulation avec la Loi Informatique et libertés et sur les conditions dans lesquelles elles peuvent encadrer ces usages.

DE LA PART DES INSTITUTIONS CULTURELLES :

  • Une intégration de leur démarche d’Open Data dans la conception et la refonte de leur système d’information,
  • Un travail commun permettant de mutualiser et fédérer des démarches similaires ;
  • Une mutualisation globale, des moyens et des fonds, notamment pour l’anonymisation et la numérisation des données ;
  • La reconnaissance d’un accès systématique et gratuit aux   oeuvres du domaine public numérisées, y compris en cas d’usage commercial ;
  • l’usage privilégié de licences ayant une clause de «  partage à l'identique  » (SA – Share Alike) en parallèle ou à la place de toute clause interdisant la réutilisation commerciale afin d’assurer une diffusion et une réutilisation optimales.

DE LA PART DU LÉGISLATEUR :

  • La réintégration du régime des données culturelles dans le régime général de réutilisation des informations publiques et la validation de l’usage de licence de type «  partage à l'identique  » (à l’échelle nationale et communautaire) ;
  • Une modification de la circulaire du 26 mai 2011 pour étendre le principe de gratuité dans la réutilisation de leurs données aux établissements culturels sous tutelle de l’État (avec portée rétroactive) ;
  • Une modification de la Loi DADVSI afin que la cession des droits des agents publics s’étende aussi aux usages commerciaux et dépasse le seul cadre de l’accomplissement d’une mission de service public ;
  • Un refus des propositions de la nouvelle directive européenne qui envisagent les droits des agents publics comme limites à la diffusion des informations publiques.

INTRODUCTION

Depuis quelques années, on observe un mouvement général d'ouverture des institutions vers le grand public dans le monde entier (États-Unis, Grande Bretagne, Kenya etc.) comme en France (villes de Paris, Rennes, Toulouse, Montpellier, Nantes, mission interministérielle Etalab, etc.).

Conjointement à ces actions, la société civile s'investit également dans la mise en valeur et la demande de partage des données et contenus culturels.

Dans le secteur culturel, l’Open Data prend la forme parallèlement d’une ouverture des reproductions numériques d’oeuvres qui sont elles-mêmes dans le domaine public ou appartenant à une personne publique et d’une ouverture des données relatives à ces oeuvres (catalogues, bases de données descriptives, etc.).   À ce titre, le sujet intéresse le ministère de la Culture, le législateur et les institutions culturelles (publiques comme privées).

Nous avons identifié certains enjeux qui nécessitent une clarification parfois, de la pédagogie bien souvent, et dans quelques cas particuliers, une réflexion voire des changements juridiques.

Pour surmonter ces blocages et permettre une réelle et fructueuse ouverture des institutions culturelles, nous portons l’attention de l’administration et du législateur sur :

  1. la méconnaissance des concepts et enjeux de l’Open Data au sein des institutions culturelles ;
  2. une volonté politique insuffisante en France en ce qui concerne la diffusion et de la réutilisation des données culturelles sur Internet et à l’échelle internationale ;
  3. la complexité du cadre juridique relatif à la diffusion des données cultuelles ;
  4. l’importance d’une réaffirmation de la mission des institutions publiques dans la diffusion et la réutilisation des données culturelles, a fortiori concernant les oeuvres du domaine public ;
  5. les préoccupations économiques susceptibles d’entraver la diffusion et la réutilisation des données culturelles.

L’IMPORTANCE D’UNE PÉDAGOGIE AUTOUR DE L’OPEN DATA

Les enjeux et les potentialités de l'open data et de l'ouverture des contenus sont trop souvent méconnus au sein des institutions culturelles, alors même qu'ils sont essentiels à l'innovation et à l’établissement de nouvelles relations avec le public.

La complexité des situations et la méconnaissance des agents des institutions freinant l’ouverture, un travail important d’information, de formation et d’accompagnement est donc nécessaire à toute démarche d’Open Data. Ainsi, les données et contenus ne s'ouvrant pas selon les mêmes modalités (leurs statuts juridiques et leurs modalités d’exploitation n’étant pas identiques), il est par exemple indispensable d'expliquer et de clarifier ce qui est du domaine de la « donnée » : données brutes et chiffrées (fréquentation d'une institution, statistiques diverses) ; et ce qui est du domaine du « contenu »  : contenu rédactionnel (dossiers pédagogiques, notices d'oeuvres, etc.) ou iconographique (numérisation ou photographies d'oeuvres, etc.).

Les institutions culturelles sont également amenées à jouer un nouveau rôle consistant à suggérer (et non imposer) des usages innovants afin de laisser un maximum de libertés aux réutilisateurs sur l’usage des données. Cela passe notamment par une culture de diffusion de données complètes et par l’usage systématique de formats interopérables.


Nous préconisons:

  • un effort pédagogique de la part des administrations à destination de leurs services et de leurs agents pour définir correctement les termes employés et accompagner l’émergence de ces nouveaux usages.
  • la mise en valeur des expériences déjà réalisées, qu'elles soient issues d'initiatives institutionnelles ou privées, afin de montrer ce qu'il est possible de réaliser grâce à l'ouverture des données et des contenus.
  • de fédérer et mutualiser les efforts, soit au sein d’un nouveau collectif soit en s’inspirant et étendant ceux existants (telle collectif Open Data France qui fédère un nombre important de collectivités engagées dans un projet de partage des Données Publiques en France).


LA MISE EN PLACE D’UN RÉGIME FAVORABLE À L’OPEN DATA

Une lecture chronologique des différentes normes (loi, circulaire et directive) est nécessaire pour situer la politique publique actuelle  face à l’Open Data.

LE RÉGIME DÉROGATOIRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978  FACE À L'OPEN DATA

Il s’agit, en France, de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 « portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'Administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal » telle qu’elle a été modifiée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 « relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'Administration et le public » et l’ordonnance n° 2005-650 « relative à la liberté d’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques » signée le 6 juin 2005.

Cette loi instaure un principe de libre diffusion et réutilisation des informations publiques, tout en insérant un article 11 — dit « exception culturelle » — qui pose un certain nombre d’obstacles à l’ouverture des données culturelles. Cet article permet une dérogation au principe général de réutilisation des données publiques, offrant aux institutions culturelles de fixer les conditions dans lesquelles les informations peuvent être réutilisées.

Faute de réelle définition de la portée de cet article, et malgré le rapport « Partager notre patrimoine culturel » remis en 2010 au Ministère de la Culture, de nombreux flous relatifs aux règles de réutilisation des données culturelles (telles la question des données à caractère personnel, la détermination des tarifs, etc.) n'ont jamais été éclaircis. La difficile application de cette exception fragilise les institutions culturelles et constitue un frein important au développement de l'Open Data dans ce secteur.

Cet article a été notamment invoqué à plusieurs reprises devant les tribunaux par des services d’archives départementales pour refuser la mise à disposition des données leur appartenant, ce qui a donné lieu à  la décision du 13 juillet 2011 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand donnant droit à NotreFamille.com contre les Archives départementales du Cantal en estimant que le régime dérogatoire ne permettait pas pour autant aux Archives de s'opposer au principe même de la réutilisation (une décision qui a été pleinement confirmée par l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Lyon du 4 juillet 2012).

Nous préconisons :

  • l’abolition de l’« exception culturelle », en réintégrant les données culturelles dans le régime général de réutilisation des informations publiques.
  • une réelle mise en place du droit à la réutilisation des informations publiques, passant par une information claire sur les obligations des institutions culturelles.