Que manque-t-il pour avoir des licences Open Hardware qui fonctionnent - Calimaq

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Titre : Que manque-t-il pour avoir des licences Open Hardware qui fonctionnent ?

Intervenant : Calimaq

Lieu : PSESHSF

Date : Juin 2016

Durée : 57 min 29

Pour télécharger la vidéo

Licence : Verbatim

Statut : Transcrit MO

Description

La logique du Libre est née dans le secteur du logiciel, où elle a pu se déployer en s'appuyant sur des licences ancrées dans les principes du droit d'auteur. La GNU-GPL et toutes ses descendantes garantissent les 4 libertés fondamentales des utilisateurs et les protègent par le biais du mécanisme du Copyleft (Partage à l'identique). Plus tard, cette dynamique du Libre a pu être prolongée dans le domaine de la création culturelle par le biais de nouvelles licences comme les Creative Commons, adaptées à la diffusion de tous les types d’œuvres protégées par le droit d'auteur (textes, vidéos, musiques). En ce qui concerne les données, après une phase de tâtonnement, des licences spécifiques comme l'ODbL ont permis d'appliquer la logique du Libre à des bases de données en donnant naissance à l'Open Data.

Transcription

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Juriste aussi, c’est pour ça que je suis assez content de faire cette conférence dans une bibliothèque. Je suis au CA de La Quadrature et je suis aussi dans un collectif qui s’appelle SavoirsCom1 et je m’intéresse, en général, à tous les aspects juridiques du libre et à tous les aspects de la culture libre. Et ça m’a amené, après m’être beaucoup intéressé on va dire à la création artistique sous licence libre, la musique, les films, les livres, à m’intéresser à un autre domaine, que vous connaissez sans doute, qui est l’open hardware c’est-à-dire e matériel libre ou le matériel open source — on va voir que ce n’est pas tout à fait la même chose — et à m’intéresser à savoir comment ça allait marcher du point de vue juridique. Parce que, dans le monde du logiciel, on a eu la chance d’avoir des licences qui ont bien balisé le terrain, qui ont permis tout ce qu’a permis le logiciel libre, en commençant par la GNU GPL, on a parlé de Richard Stallman cet après-midi, ça a été quand même un outil fondamental. Et, dans le domaine des licences open hardware, vous allez voir que le terrain est beaucoup moins solide et qu’on est en train de construire quelque chose qui est hyper-intéressant, c’est-à-dire la possibilité d’avoir du matériel libre, ce qui est absolument déterminant, j’essaierai de vous montrer des exemples, avec le développement de l’internet des objets, avec toutes ces choses qui peuvent avoir des facettes assez inquiétantes. Le fait d’avoir du matériel vraiment libre c’est un enjeu fort, mais ça va être beaucoup plus difficile que dans le logiciel. Donc je vais essayer de vous montrer un petit peu où est-ce qu’il y a un bug, parce qu’en fait il y a un bug das le système, qui va rendre les choses beaucoup plus difficiles à libérer pour du matériel que pour d’autres éléments. Je vais essayer de vous montrer un peu pourquoi il y a un bug et comment on pourrait éventuellement essayer d’y remédier. Pardon ?

Public : Ce n’est pas par les usines ? Parce que fabriquer...

Calimaq : Oui, l’open hardware c’est souvent assez do it yourself, parce que ce sont des trucs qui sont assez liés au mouvement des fab labs, des hackerspaces où on ne fait pas les choses dans des usines, mais on les fait soi-même en relocalisant la production. Là je vais surtout me concentrer sur les aspects juridiques.

Je précise que tout ce travail-là en fait, on l’a fait en collaboration. Vous avez peut-être entendu cet après-midi quelqu’un qui s’appelle Antoine Chevrier, qui a présenté un projet d’éolienne, et il n’a pas mal réfléchi aussi à ces questions. Moi je vais reprendre sûrement certains des sujets qu’il a abordés. Il y a des gens qui travaillent dans une association qui s’appelle PiNG, qui est à Nantes, qui ont un fab lab qui s’appelle Plateforme C, qui ont beaucoup réfléchi à ces questions. Ils ont un juriste qui s’appelle Vladimir Ritz, notamment, et on va sûrement bientôt publier une synthèse là-dessus pour essayer de montrer ces problématiques.

Comment est-ce que j’en suis venu, moi, à m’intéresser à ces questions ? En fait ça a commencé il n’y a pas si longtemps que ça. Je ne sais pas si vous avez entendu parler de ce projet qui s’appelait POC21. C’était un projet qui était porté par WeShare, le collectif WeShare sur l’économie collaborative qui, en marge de la COP21, a voulu faire une sorte de contre évènement où ils ont invité des designers, pendant six semaines, à rester dans un château et à designer douze projets qui devaient avoir un impact environnemental fort et qui devaient être dans la philosophie de l’open source, c’est-à-dire des projets de matériel libre. Il y avait des éoliennes, il y avait des matériels de construction modulaire. Il y avait un tracteur à pédales, il y avait un four solaire. Voilà, une sorte de laboratoire qui était dans un château et l’engagement de ces gens c’était de faire un prototype, de faire un prototype qui soit réalisable et, au bout du compte, de le libérer en utilisant des licences.

Donc moi, ils m’avaient invité pour essayer d’accompagner ces porteurs de projets à choisir une licence et à voir comment on allait faire pour aller jusqu’au bout de la démarche. Alors au final, comme il fallait que ce soit relativement cadré, les gens qui ont participé à ce projet ont signé un contrat. Parce qu’on voulait être sûrs, quand même, qu’au bout du compte les gens aillent jusqu’au bout. Donc ils ont ??? un contrat sur les aspects juridiques et ce qu’on leur conseillait c’était, vous voyez, parce que quand vous faites du matériel, il y a plusieurs couches différentes. Donc quand il y avait des logiciels à associer au matériel il fallait qu’ils utilisent une GNU GPL, une FreeBSD, une MIT License, des choses assez connues. Pour tous les contenus médias, s’ils produisaient du texte des photos, de la vidéo, etc., on leur conseillait d’utiliser des licences Creative Commons. Et on leur conseillait d’utiliser des licences spécifiques pour l’open hardware qui sont la TAPR OHL, Open Hardware License, et CERN Open Hardware Licence. Voilà un peu l’engagement qu’ils devaient avoir.

Il se trouve qu’en discutant avec ces personnes on s’est rendu compte que c’était beaucoup plus compliqué que ça, parce qu’il y avait beaucoup de couches de droit différentes à ouvrir. Il y a des gens qui se posaient beaucoup de questions sur est-ce qu’il faut que je dépose un brevet, ou pas, sur ce que j’ai fait. Des gens qui voulaient savoir s’ils devaient déposer une marque sur le nom de leur objet. Il y a eu beaucoup de discussions et ça s’est fini beaucoup plus simplement. Ils ont mis la documentation de leurs projets sur un site qui s’appelle Instructables, où on a des vidéos, des images, des descriptions, des fichiers de conception, etc., toute la documentation, et ils ont tout mis, en fait, sous une licence Creative Commons classique CC-BY-SA, c’est la licence de Wikipédia, c’est celle qui est un peu l’équivalent de la GNU GPL pour le logiciel, avec cette clause là, que vous connaissez peut-être, qui est la clause de copyleft, celle qui fait un effet viral. Voilà ! Donc ça s’est terminé comme ça et j’avoue que ça m’a laissé un petit peu sur ma fin parce que vous allez voir que ça n’est pas très satisfaisant sur les effets que ça produit.

Après l’open source, si vous voulez, c’est un mouvement qui se structure, qui se développe, et qui finit par avoir des définitions. L’open source hardware, il y a une fondation qui s’est montée, qui donne des instructions sur comment est-ce qu’on doit faire pour être dans une démarche d’open source hardware et qui nous conseille dans la définition : il faut que « conceptions réalisées publiquement et disponibles de manière à ce que n’importe qui puisse étudier, modifier, distribuer, créer et vendre un design, ou un produit basé sur ce design. » Ça, ça ressemble beaucoup en fait à la définition du logiciel libre, en général. C’est une espèce de transposition de ce que peut être le libre ou l’open source au domaine de la fabrication.

Ça, ça rentre dans un processus qui nous a conduits à passer des premières licences, on va dire, de logiciel libre, donc la GNU GPL et ses déclinaisons qui ont été portées à la base par la Free Software Foundation avec Richard Stallman et tout ce qui s’est fait. On a eu une sorte de bifurcation à un moment donné avec les licences open source. Vous savez il y a un grand débat entre le libre et l’open source, avec des gens qui ont fait des licences qui, en fait, étaient plus permissives que les premières licences libres, qui là, on restait dans le champ du logiciel.

Ensuite il y a eu la branche Creative Commons où là, en fait, on a étendu la logique du logiciel libre aux œuvres, donc aux textes, à la musique aux vidéos, aux jeux vidéos, tout ce qui était de l’ordre de ce qu’on appelle les œuvres de l’esprit qui sont protégées par le droit d’auteur. Et on a vu aussi une bifurcation qui s’est faite pour les données avec l’open data. Il y a eu aussi des déclinaisons ???, spéciales, qui s’appliquent aux bases de données. Il y a en une qui s’appelle ODBL, par exemple, Open Data Base License, et il a fallu à chaque fois, si vous voulez, créer, décliner, de nouvelles licences et, dans ces domaines-là, on a une certaine certitude juridique. C’est-à-dire que ces licences sont valides, elles s’appuient sur des droits qui existent. Les licences de logiciels s’appuient, vous le savez, sur le copyright et le droit d’auteur, en fait. Un logiciel c’est une œuvre de l’esprit protégeable par le droit d’auteur et c’est c’est ce fondement-là qui leur donne une vraie force. Notamment si quelqu’un viole une licence de logiciel, eh bien vous pouvez l’attaquer au tribunal. C’est un aspect important. Les Creative Commons, c’est pareil, c’est fondé sur le droit d’auteur. Et dans l’open data il y a un droit des bases de données qui sert de fondement aussi aux licences.

Mais pour l’open hardware, il y a un problème, si vous voulez. Parce que quand vous faites un objet qui est fabricable, vous allez vous trouver sur un autre terrain que le droit d’auteur. Il peut y avoir du droit d’auteur parce que la forme de votre objet peut être une œuvre. Si elle est originale, s’il y a un design qui se rapproche de ce qu’on appelle une œuvre de l’esprit originale, dans sa forme, la forme de l’objet en elle-même peut être protégée par le droit d’auteur, un peu comme une sculpture et là le droit d’auteur va marcher. Mais il y a plein d’objets qui ne sont pas des œuvres de l’esprit. Vous voyez cette table, là, par exemple, je ne suis pas du tout sûr qu’on puisse la qualifier d’œuvre originale. Sa forme est trop banale pour pouvoir être protégée par le droit d’auteur. Il n’empêche qu’elle peut quand même être protégée par des droits de propriété intellectuelle, mais là on rentre dans un champ qui s’appelle la propriété industrielle, qui comporte d’autres droits, par exemple des droits qui s’appellent les dessins et modèles, qui concernent la forme d’objets, fonctionnels, et qui peuvent avoir une protection, mais au titre des dessins et modèles. Et évidemment, il y a un autre droit qui s’appelle le brevet qui lui va porter sur l’invention, c’est-à-dire un procédé technique qui répond à un problème technique et là il y a toute une branche du droit qui est structurée autour.

Le gros problème qui se pose dans le domaine de l’open hardware, c’est que le droit d’auteur et la propriété industrielle ne fonctionnent pas du tout de la même manière. Il y a des règles complètement différentes notamment pour obtenir le droit.

09’ 46

Notamment la règle fondamentale pour avoir un droit