Politique faveur logiciel libre

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Vidéo ici :[1]


00' transcrit Marie-Odile

Donc pour commencer pourquoi une politique publique en faveur du logiciel libre ? Simplement parce quand on prend le logiciel libre et qu'on prend les quatre libertés : usage, étude, modification, redistribution, ce sont quatre libertés qui font sens dans le cadre d'une politique publique d’achats informatiques. Ce sont des termes finalement qui sont importants, simplement qui sont logiques pour l'état, que l'état les demande dans le cadre de ses choix technologiques. Et le logiciel libre finalement c'est aussi un choix politique. C'est une citation de Stallmann, que je pense beaucoup d'entre vous connaissent, comme quoi on peut expliquer la base philosophique du logiciel libre en trois mots : liberté, égalité fraternité. Liberté parce que les utilisateurs sont libres, égalité parce qu'ils disposent tous des mêmes libertés, fraternité parce que nous encourageons chacun à coopérer dans la communauté. Donc en fait on a vraiment ces aspects-là, et vraiment un lien fort et logique, et je pense que la plupart des gens qui sont ici aux RMLLL aujourd'hui en sont convaincus, entre logiciel libre et objectifs de l'état, biens publics, etc.

Donc, en France, maintenant qu'on a fait la partie théorique qui n'est pas forcément la plus intéressante qu'est-ce qui se passe aujourd’hui ? Et comment en fait on part d'une situation qui n'est pas forcément une situation où le politique se préoccupe déjà du logiciel libre et à plus forte raison mène une politique en sa faveur à une situation où on commence à voir des choses bouger. Une fois de plus j'ai bien conscience qu'il y a des pays, des régions, des communes qui sont bien plus avancées que ce que je vais montrer ici, mais ici c'est vraiment l'occasion d'avoir une transition qui est en train de se faire et qu'on espère positive, qu'on espère qu'elle va continuer, mais on est est vraiment en train de basculer, ce qui se rend les choses assez intéressantes.

En France je pense qu'on peut noter un départ, en tout cas avec un signal politique a été fait en 2012, avec une circulaire signée par le premier ministre, donc le 19 septembre 2012, qui avait pour objet l'orientation pour l'usage du logiciel libre dans l'administration. Donc c'est à la fois un courrier signé par le premier ministre à destination de l'ensemble des ministres pour leur demander d'appliquer une politique logiciel libre dans les différentes administrations, mais aussi un texte de travail à destination, vraiment là des fonctionnaires, qui détaillait la manière de faire une politique logiciel libre. Donc c'est un document qui faisait plus de trente pages, qui était long, mais était assez riche et qui était vraiment intéressant dans le sens que c'est un plan pratique où on parle de mettre en place des groupes de travail, de réflexion, de mettre en commun les bonnes pratiques, dans quel cas c'est facile aujourd'hui déjà de mettre du logiciel libre, dans d'autres cas c'est par contre beaucoup plus difficile, beaucoup plus complexe et ce ne sera pas pour tout de suite. Donc on a vraiment l’idée de faire une transition à l'usage du logiciel libre en fonction de ce qui se passe réellement au quotidien dans les administrations et en pertinence ou en lien direct leurs problématiques à elles ; avec aussi donc la mise en place d'un certain nombre de groupes de travail, ou la validation par ce texte d'un groupe de travail déjà existant, interministériels, qui regroupent des gens de différentes DSI, Direction des systèmes d'information, qui regroupent des gens de différents ministères mais aussi éventuellement de différents niveaux, donc à la fois l'état, les collectivités locales, etc, simplement pour discuter, pour voir comment ils fonctionnent, pour éventuellement aussi mutualiser, parce que que ce soit en terme de retour d'expériences sur des migrations, que ce soit en terme de développements spécifiques qui ont été faits, il y a beaucoup de convergences qui sont possibles et donc on a vraiment une incitation avec ça à développer et à mettre en place ces différentes politiques.

Et enfin un truc important avec ce texte c'est que ça a aussi finalement la validation du travail qui a été effectué depuis très longtemps par un certain nombre de personnes au sein des ministères justement pour pousser le logiciel libre et pour montrer en quoi c'est important et donc c'est vrai qu'il y avait quand même aussi un signal assez fort que le premier ministre signe un tel texte ensuite qui montre que leur travail finalement est aujourd'hui clairement reconnu.

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Donc on avait ce signal qui effectivement était une bonne surprise et qui a suscité beaucoup d’enthousiasme dans la communauté des entreprises du libre. D'ailleurs ça a surpris, a priori, au niveau gouvernemental à quel point ce texte-là était repris parce que pour eux une circulaire, c'est un texte qui sort, sans qu'ils en sortent tous les jours, ce n'est pas forcément autant important qu'un texte de loi ou autre. C'est vrai que c'était un texte qui était très attendu. Il y a vraiment de grands espoirs.

Mais dans le même temps on voit en ce moment des occasions manquées finalement de concrétiser ce texte. Et donc là on est sur la deuxième étape, on a un texte qui est bien, qui est très bien, qui est enthousiasmant, mais au final dans la pratique on n'y est pas encore complètement.

Des occasions manquées j'en citerai deux. Il y a eu déjà tout le dossier du brevet unitaire qui nous a beaucoup occupés en 2012 et fin de l'année 2012 notamment, qui est un texte qui revoit les règles d’attribution des brevets. Au départ ça ne nous concerne pas directement parce que ce sont des questions de qui donne les brevets, qui juge les brevets, etc. Sauf que en réalité on se retrouve avec des personnes qui vont avoir quand même un pouvoir important sur le champ de la brevetabilité parce que ce sont elles qui vont dire si quelque chose est brevetable ou pas, qui sont des personnes qui sont complètement en faveur des brevets logiciels. Donc là on se rend compte qu'il il y a un danger très clair pour le logiciel libre.

On a expliqué. On a fait quand même un travail d'information, de sensibilisation important. Au niveau européen on a eu quelques relais même si au final malheureusement le Parlement a fini par adopter le projet de règlement, par contre en France ça a été encore très difficile de faire comprendre ce type de chose et c'est là qu'on voit qu'on a encore un gros travail d'information à faire parce que il y a une logique toujours oui mais le brevet c'est bon pour l'innovation. Plus de brevets égal plus il y a d'innovation alors que le lien n'est absolument démontré que dans des pays où il y a très peu de brevets qui sont déposés, on peut avoir beaucoup d'entreprises qui se créent, beaucoup de nouvelles technologies qui se développent, etc, et l'inverse est vrai. On a des contre-exemples aujourd'hui avec les États-Unis notamment où on des batailles des brevets qui sont très importantes qui au contraire sont nuisibles pour l'innovation, pour le développement de nouvelles entreprises, pour le développement de nouvelles technologies, de nouvelles idées, parce que finalement on dépense aujourd'hui beaucoup plus en avocats et en frais donc d'avocats, de juristes de brevets qu'en frais simplement de R & D. On a vraiment un gros manque à ce niveau-là.

Après un autre dossier qui est sans doute encore plus clair en terme d'occasion manquée de mettre en œuvre cette politique, ça a été la question de l'open bar Microsoft Défense. Pour contexte, qu'est-ce que c'est que cet open bar ? C'est un contrat qui existait déjà depuis 2007 mais qui devait ou vient, on ne sait pas, d’être renouvelé ou en tout cas qui le sera cette année entre donc Microsoft et le Ministère de la Défense en France. Alors pourquoi un contrat open bar ? Simplement parce que c'est un contrat de location, donc pas du tout d'achat, mais où les différents services du ministère peuvent se servir dans toutes les licences Microsoft, sans avoir à payer de coût supplémentaire, etc, ils peuvent piocher dans un catalogue et prendre ce qu'ils veulent au moment qu'ils veulent. Sachant que c'est un contrat de location, c'est-à-dire qu'à la fin du contrat ils n'ont plus rien. Ils ont soit le choix entre acheter les licences alors que ça fait quand même quatre ans qu'ils payent pour les utiliser, soit renouveler un contrat de location, donc continuer à être enfermés dans ce système là, soit abandonner complètement les logiciels même s'ils sont installés sur leur ordinateur parce qu'ils n'ont plus le droit de les utiliser.

Au point de vue coût ça représente des coûts assez importants. On parlait de 100 euros par poste et par an, donc plusieurs millions d'euros. En terme d’indépendance technologique c'est assez catastrophique parce que comme les différents services n'ont pas l'impression de payer pour les logiciels vu que de toutes façons tout est compris dans le prix, on passe au tout Microsoft parce que de toutes façons Microsoft ne coûte rien et qu'ils sont déjà là, donc on a une forme de monopole qui se crée complètement et en plus c'est en plus c'est le non respect complet de tout ce qui règle les marchés publics, etc, parce que c'est passé le tout sans aucun appel d'offre, ni mise en concurrence, ni quoi que ce soit. Donc on a vraiment une problématique. Et en plus un contrat où ça implique des choses comme le fait que Microsoft ait un centre de compétences au sein même du Ministère de la Défense en France aujourd'hui. Donc il y a des gens de chez Microsoft qui travaillent à l'intérieur. Ils sont très combattants, je n'en doute pas !

Il y avait eu quand même un certain nombre d'articles, notamment un hebdomadaire qui s'appelle le Canard enchaîné qui avait publié un article là-dessus où il avait réussi à interviewer quelqu'un du Ministère de la Défense qui avait répondu que ben oui mais de toutes façons les américains n'avaient pas besoins des back doors de Microsoft pour pouvoir savoir ce qui se passait au Ministère de la Défense. Depuis on a eu l'histoire de Prism, etc, donc on se rend d'autant plus compte que c'est vrai, mais il reste qu'en terme de souveraineté ou d’indépendance c'est quand même relativement problématique pour le moins et surtout ??? on dit que maintenant il faut vraiment envisager le logiciel libre systématiquement quand on fait des achats publics et autres.

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Donc on a vraiment encore cette hésitation et ce qui faut voir qu'on a quand même une volonté politique d'avoir plus de logiciel libre. Après on a de mauvaise habitudes et un contrat type open bar en est l'exemple type qui sont très ancrées et on a vraiment ce basculement entre les deux.