Plaidoyer pour l'utilisation de technologies d'assistance libres et open source

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Ceci est une traduction de l'article de Fernando H.F. Botelho, du 7 juillet 2010 et intitulé : "Technologies d'assistance à base de logiciels open source."

L'article original en anglais est disponible en téléchargement au format PDF sur le site G3ict (42 ko).

Auteur : Fernando H.F. Botelho
Traduction : Armony ALTINIER.

Définir le logiciel open source.

"Open" (ouvert) et "open source" sont des termes souvent utilisés à tort pour leur valeur marketing, il est donc important de commencer par donner une définition de base de ce type de logiciels et de la stratégie de développement qu'ils sous-tendent quand le terme est utilisé à bon escient. Le code source fait référence aux commandes qui existent derrière le paquet logiciel, indépendamment du fait qu'il s'agisse d'un navigateur, d'un jeu, ou d'une application de tableur. Quand on dit que la source, ou le code source, est ouvert, cela signifie que le gouvernement, la fondation, l'entreprise ou le particulier ne distribue pas seulement le produit final - le logiciel - mais également la recette qui a permis de le créer, le code source.

L'idée sous-jacente derrière les logiciels open source, dits aussi libres - free - et open source (FOSS), c'est de rendre le code source disponible de façon à ce que chaque individu, entreprise, organisation ou gouvernement puisse comprendre comment le logiciel fonctionne, suggérer et faire des améliorations, et même distribuer leur propre version du logiciel sous un nom différent. Pour rendre cela possible, sur le plan juridique, le code source est placé sous une licence de type copyright qui autorise explicitement la copie, la modification et la redistribution par toute personne ou entité. La licence de ce genre la plus utilisée est la Licence publique générale ou GPL.

Les technologies FOSS sont souvent gratuites, d'un point de vue économique, mais le terme [anglais] "free" présent dans l'acronyme FOSS fait référence à la liberté de modifier et de changer le logiciel plus qu'à sa gratuité. Le fait que de nombreux produits FOSS soient également distribués gratuitement est juste une conséquence du fait que la distribution ou le prix ne sont pas contrôlés par une entité unique et que donc, la plupart reposent sur un modèle économique qui ne dépend pas de telles restrictions.

Business modèle open source et durabilité.

Bien qu'au début la stratégie open source ne semblait ni rentable ni durable, il y a plus de trois décennies d'exemples allant d'Internet lui-même jusqu'à OpenOffice et Firefox prouvant leur viabilité. Certaines entreprises, gouvernements ou particuliers investissent dans le développement de logiciels open source parce qu'ils économisent de l'argent à moyen terme, d'autres ne veulent pas dépendre ou être à la merci des entreprises vendant les logiciels propriétaires, et d'autres encore tirent un bénéfice appréciable du support technique, de la formation et des contrats de personnalisation des logiciels libres.

Il y a de nombreux exemples d'affaires extrêmement fructueuses même si leurs produits peuvent être dupliqués par la plupart des gens. Des institutions éducatives aux boulangeries, ces opportunités d'affaires rivalisent souvent davantage sur la réputation et des facteurs tels que la localisation géographique et le service client, que sur l'utilisation de formules secrètes. Finalement, depuis que les entreprises et organisations qui vendent, font de l'assistance ou utilisent les bénéfices des investissements faits mutuellement sur les logiciels open source, elles réduisent les coûts et offrent un prix plus compétitif sur le marché.

Typologie des produits et projets de technologies d'assistance open source.

Les solutions de technologies d'assistance open source sont développées par une large frange de gouvernements, entreprises, fondation et individus. Alors que les individus, organisations, fondations et gouvernements choisissent souvent ce modèle dans le but de maximiser les bénéfices de leur initiative envers la société, les entreprises investissent dans l'open source dans un double intérêt de responsabilité sociale de l'entreprise et dans le but de vendre au secteur public.

Nous estimons que l'entreprise qui a le plus largement distribué des technologies d'assistance open source est Canonical, développeur de la distribution Linux Ubuntu. C'est la raison pour laquelle leur version de Linux est la version la plus populaire de ce système d'exploitation. Chaque copie va avec un lecteur d'écran et un logiciel d'agrandissement, un clavier virtuel et d'autres fonctionnalités telles qu'une application d'entrée de données conçue pour ceux qui ne peuvent utiliser de claviers conventionnels.

Ubuntu a été adapté par plusieurs ONG, entreprises et particuliers pour des handicaps spécifiques dans des projets tels que F123.org/Motor, F123.org/Visual, LinuxAccessivel.org, Tiflobuntu.org et Vinux. De nombreuses technologies d'assistance tel que le système d'entrée de données Dasher et la synthèse vocale eSpeak ont été adaptées pour un usage au sein de nombreuses autres plateformes incluant les téléphones mobiles et les systèmes d'exploitations fermés ou propriétaires.

Par exemple, les utilisateurs de Microsoft Windows ont accès aux solutions libres et open source telles que Dasher, NVDA, PVoice et la Virtual Magnifying Glass [loupe d'agrandissement virtuelle - ndt]. De ce point de vue, des technologies telles que eSpeak (la synthèse vocale) et OCRopus (le moteur de reconnaissance optique des caractères) sont particulièrement précieuses pour la société en tant qu'outils open source depuis que ce sont des blocs de base utilisés dans la construction de lecteurs d'écrans et autres solutions au sein de multiples systèmes d'exploitation et plateformes.

La polyvalence du modèle open source facilite également la localisation, par exemple la traduction des interfaces des logiciels et l'adaptation des fonctionnalités aux conventions linguistiques et culturelles locales. Les équivalents fermés ou propriétaires à eSpeak, le logiciel de synthèse vocale, n'a pas la même variété de langues que fournit eSpeak. En conséquence les langues qui ne seraient pas disponible dans les modèles propriétaires conventionnels le sont avec les FOSS. Ceci est dû en partie à la facilité pour attirer des donations en argent et en temps par des experts et autres à des projets dont ils savent qu'ils bénéficieront à tous. C'est une réalité, un phénomène non seulement observé dans le développement logiciel, mais également dans la création de contenus au sein d'initiatives telles que Wikipédia qui sont bien plus vibrantes et populaires que leurs équivalents propriétaires.

Canaux de distribution, support technique et formation.

Les technologies d'assistance open source sont disponibles en libre téléchargement ou, dans le cas de la plupart des systèmes d'exploitation, déjà inclues et nécessitent seulement d'être activées. En alternative, quelques solutions peuvent être achetées pré-configurées et prêtes à être lancées depuis un DVD, un CD-ROM ou une clé USB.

Certaines technologies d'assistance FOSS sont conçues pour être portables, afin d'être lancées depuis un CD-ROM ou une clé USB en vue d'une utilisation sur des ordinateurs sans avoir besoin d'installer de logiciel sur l'ordinateur lui-même. Le lecteur d'écran NVDA peut être lancé depuis une clé USB alors que d'autres dérivés d'Ubuntu comme F123.org/Visual peuvent être installés entièrement sur une clé USB et lancés même sur un PC ne contenant pas de disque dur interne.

Les contrats d'assistance sont généralement disponibles auprès des mêmes entreprises qui développent et distribuent la technologie d'assistance FOSS. La formation est fournie par le même type d'ONG liées au handicap, petites entreprises, institutions éducatives et consultants indépendants qui fournissent de la formation pour les technologies d'assistance propriétaires.

Implications stratégiques du choix de technologies d'assistance open source.

Les principales raisons mentionnées dans le choix de solutions logicielles open source sont la facilité de localisation et le faible coût, mais ce ne sont pas les plus importantes. Bien que la viabilité de la localisation pour des langues qui ne seraient pas rentables serait en effet très difficile à dupliquer dans les modèles à code fermé, le coût de solutions propriétaires peut être rendu hors de propos à court terme de par les donations ou rabais substantiels accordés.

De ce point de vue, il convient de garder en tête deux considérations importantes : premièrement, les donations de logiciels de technologies d'assistance propriétaires ne sont jamais faites de façon suffisante pour atteindre la large part des populations nécessitant ces technologies, deuxièmement, les gouvernements, fondations et ONG ont besoin de l'assurance qu'un investissement réalisé dans la formation aujourd'hui sera toujours pertinent dans une ou deux décennies et seuls les modèles open source peuvent l'assurer.

La nature coopérative et décentralisée du développement FOSS assure que même si une entreprise spécifique n'offrait plus des services de développement, de personnalisation ou de formation, de nombreuses autres le pourraient. L'un des meilleurs exemples du risque est illustré par la désormais défunte entreprise Syntha-Voice Computers Inc. L'entreprise a réalisé le Slimware window Bridge, un lecteur d'écran de pointe pour Microsoft Windows qui fut le premier du genre. Quand l'entreprise ferma début 2002, juste deux mois avant que son fondateur ne décède, tous les investissements faits dans la formation et l'achat des licences par les particuliers, ONG, aussi bien que par les agences gouvernementales des États-Unis et du Canada se sont évaporés. En comparaison, le développement et le support de projets comme Orca et NVDA sont distribués à la fois géographiquement et à travers les organisations de sorte que la poursuite de tels projets n'est pas sujette à quelque point faible que ce soit.

Ceci étant dit, il est important d'assurer que le choix de technologies d'assistance open source soit largement respecté et supporté. Pour chaque projet mentionné dans cet article, il y en a des douzaines qui n'attirent pas de masse critique d'utilisateurs et de développeurs et échouent à devenir auto-alimentés de façon durable de même que beaucoup de leurs équivalents à code source fermé.

Conclusion.

Bien que le développement et la stratégie de distribution de l'open source soit encore difficilement compris par le grand public, la résistance et la viabilité du modèle FOSS y compris dans les circonstances économiques les plus difficiles, en fait une alternative crédible dans le portefeuille des options disponibles des décideurs politiques. Comme dans le cas des logiciels propriétaires, la sélection des solutions open source est mieux accomplie en prenant en compte le nombre de gouvernements, entreprises, fondations et particuliers utilisant et supportant la technologie.

Finalement, le succès lié à la nature décentralisée des technologies d'assistance open source reste leur plus grand atout, alors que de multiples contributeurs, promoteurs et fournisseurs de services assurent à la fois longévité et prix compétitif sur le long terme.