Différences entre les versions de « Peut-on dégoogliser internet - Du grain à moudre d'été »

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'''Titre :''' Peut-on dégoogliser internet ?
 
 
 
'''Intervenants :''' Andréa Fradin - Benjamin Jean - Olivier Babeau - Émilie Chaudet
 
 
 
'''Lieu :''' France Culture - Émission Du grain à moudre d'été
 
 
 
'''Date :''' Août 2015
 
 
 
'''Durée :''' 44 min
 
 
 
'''[http://www.franceculture.fr/emission-du-grain-a-moudre-d-ete-peut-on-degoogliser-internet-2015-08-17- Lien]''' vers la '''vidéo'''
 
 
 
==00' ''transcrit MO''==
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Bonsoir à toutes et à tous. Bienvenue dans Du grain à moudre d'été, une émission préparée par Fanny Richez, Catherine ???, Virginie Leduault et Marie ???, réalisée par Lise Côme, accompagnée ce soir à la technique de Clément ???.
 
 
 
« Google est ». Si vous tapez juste ça sur le moteur de recherche en question, votre phrase se complète automatiquement, sur votre écran : « Google est un moteur de recherche », ou « Google est ton ami ». Maintenant, tapez « Google est un », vous tombez très vite sur une femme ou un dieu. Et je vous passe encore la tentative d'une recherche « Google est trop », un sursaut fantasmé, un brin mégalo, qui donne une idée de la position que se donne la firme à l'échelle du monde, celle d'une entreprise qui jouit de plus en plus d'un contrôle sur la vie privée des internautes, et qui se donne pour objectif de contrôler la vie tout court. En effet, la restructuration de la firme qui s'appelle donc Alphabet depuis une semaine, nous rappelle que Google n'est pas qu'un moteur de recherche, une messagerie ou un réseau social, c'est une entreprise de plus de 53 000 salariés qui travaillent aussi à la création et au développement de voitures sans chauffeur, de remèdes contre des maladies graves, tout comme Facebook ou Amazon. Une fois qu'on a dit ça, une question se pose : qui les contrôle ces entreprises ? Qui ? Quelle instance peut leur imposer des limites professionnelles, éthiques, les contraindre à un meilleur respect de la vie privée de leurs usagers ? Et ces questions se posent d'autant plus que Google, qui devait répondre aujourd'hui à des griefs de la Commission européenne pour abus de position dominante, vient, une fois de plus, de repousser ce délai à la fin du mois d’août. Alors peut-on dégoogliser Internet ? Ou, en tout cas, limiter, réglementer le pouvoir de Google sur le web ? C'est notre sujet du jour.
 
 
 
Et pour en parler j'ai le plaisir de recevoir trois invités. Andréa Fradin, bonsoir.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Bonsoir.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Vous êtes journaliste pour le site d'information Rue89, spécialiste des questions numériques. À côté de vous, Benjamin Jean, bonsoir.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Bonsoir.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Vous êtes juriste, spécialisé en propriété intellectuelle, et vous êtes membre de Framasoft, une association qui promeut, entre autres, le logiciel libre et qui tente de mettre au point des plates-formes alternatives à Google, Facebook, Twitter ou Skype. Nous y reviendrons, bien sûr, dans le courant de cette émission. Et avec vous, en face de vous, pour discuter, Olivier Babeau, bonsoir.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Bonsoir.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Vous êtes professeur de stratégie d’entreprise à l’université de Bordeaux et vous êtes, également, membre du Conseil scientifique de l'institut pour la Souveraineté numérique. Vous êtes une vingtaine dans ce comité, je crois. C'est une association, donc, qui compte, une vingtaine, enfin une vingtaine de personnes au sein de ce comité, peut-être plus en réalité. C'est ça ?
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Oui, il y a peut-être une vingtaine de participants très actifs et puis après toute une myriade de participants qui apportent leur savoir et leur intérêt.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' En tout cas cet institut tente de sensibiliser les citoyens et les entreprises sur la protection de nos données et de proposer des actions juridiques en ce sens ; nous aurons, d'ailleurs, l’occasion d'en reparler aussi. Nous avons mis l'accent, aussi bien dans le titre que dans l'introduction de cette émission, sur Google, car c'est cette filiale qui est aujourd'hui dans le collimateur de la Commission européenne et au centre de l'actualité, mais nous allons, bien sûr, aborder ces questions aussi à travers les cas de Twitter, de Facebook, d'Apple, d'Amazon, etc. Google devait répondre aux griefs de la Commission européenne, à la fin du mois de juin, des griefs dans le cadre d’une enquête de cette Commission pour abus de position dominante. Le délai d'une réponse imparti à Google a été repoussé une première fois, et les dirigeants de la société devaient donc livrer leur argumentaire aujourd'hui. Or, la semaine dernière, un délai leur a été de nouveau accordé. Ils ont maintenant jusqu'au 31 août pour répondre à ces griefs. Alors, qu'est-ce que ce déroulé à rallonge de cette procédure juridique dit du pouvoir de Google, de son image d'intouchable, face aux institutions qui lui demandent des comptes ? Benjamin Jean.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' C'est une grande question. Le premier élément de réponse c'est, qu'effectivement, Google est une organisation qui produit des services qui remplissent des besoins, déjà, qui répondent aux attentes des utilisateurs, des internautes, et je pense que Google, en cela, a innové sur Internet. La difficulté c'est que, de part leur position qui devient, effectivement, de plus en plus dominante, on en est venu à se demander s'il n'y avait pas abus possible de cette position et c’était toute la crainte et les raisons de l’enquête menée par la Commission européenne. Oui.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Il ne faut pas confondre deux choses. En fait, il y a la position dominante qui est un fait incontestable, et l'abus, c'est l'abus qui est incriminé en l'occurrence. La longueur de la procédure n'est pas très étonnante, si on se souvient de celle de Microsoft. Elle avait duré 13 ans entre 2000 et 2013, et à l'issue de laquelle ils avaient été condamnés à quasiment six cents.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Plus que ça.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Deux milliards d'euros. Il y a eu deux milliards d'euros d'amende au total.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Il y a eu plusieurs amendes, effectivement, au titre d'Internet Explorer, ils avaient eu une amende extrêmement importante. Ça avait quand même duré treize ans. Ici finalement, on aura été sur une durée, si je ne me trompe pas, un peu inférieure, en fait.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Pour le moment on est à cinq ans, à peu près.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Voilà. C'est relativement rapide.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Ça peut durer encore !
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Pour une procédure qui est quand même extrêmement complexe.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Justement, Andréa, sur cette question, vous vouliez rajouter quelque chose ?
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Oui. Moi je suis tout à fait d'accord. C'est un peu l’histoire qui se répète. Et, à mon sens, Google aimerait bien arriver à ce que Microsoft a réussi à avoir aux États-Unis. Parce qu'il faut bien se rappeler que si Microsoft a été condamnée à deux milliards, ce qui n'est pas grand-chose quand on regarde les chiffre d'affaires. Là Google, je crois, encourt en gros, une amende équivalente à maximum 10 % de son chiffre d'affaires, ce qui fait en gros six milliards, sur soixante milliards de chiffre d'affaires ça fait beaucoup pour nous autres, mais pour une entreprise comme Google, ce n'est pas si énorme. Mais il faut bien voir que Microsoft, par exemple aux États-Unis dans les années 2000, s’était fait condamner, puis après avait réussi à trouver un accord avec le Département de justice américain, équivalent de notre ministère de la justice. Je pense que Google, et d’ailleurs ils ont fait des propositions en ce sens pour le moment refusées, cherche à trouver un accord avec la Commission européenne pour, justement, préserver son image en Europe déjà très écornée et ensuite, essayer de s'en tirer sans faire trop de vagues.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Mais justement est-ce que Google peut trouver un accord quand on voit le nombre de plaintes qui ont déjà été déposées à son encontre, que ce soit en France ou dans d'autres pays d'Europe ? Olivier Babeau.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' En fait, si on regarde l'affaire de la procédure, le détail de la procédure, mais sans, effectivement, rentrer trop dans la complexité de ce qui s'est passé, mais, à un moment donné Jochim Almunia, qui était l'ancien commissaire à la concurrence, avait failli accepter les conditions qui avaient été proposées.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' D’ailleurs je rappelle juste que cet abus de position dominante, ça consiste, pour expliquer un petit peu à nos auditeurs que, en fait Google est accusé de faire sortir.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' De favoriser ses services.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' De favoriser ses services.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Dans le moteur de recherche
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Si on tape une recherche sur Google
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Qui est son produit, c'est un de ses produits au milieu de centaines d'autres, mais c'est son produit phare.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Et on tombe sur des services produits par Google.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' L'idée en gros, ce serait qu'il favorise ses propres services.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Plus précisément, Google shopping, je crois.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Comparateur de prix, tout à fait.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Au lieu de mettre par exemple, je ne sais pas, quel autre service, Amazon, ou eBay, ou je ne sais quoi d'autre, on voit ressortir, quand on fait une recherche, en premier, en exergue, comme par hasard, les services de Google, et c'est ce que met en cause la Commission.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Benjamin Jean.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Et d’ailleurs, pour re-contextualiser aussi, au regard de la première affaire qui concerne Microsoft, effectivement, Microsoft a été condamnée, mais son concurrent Netscape était mort depuis de nombreuse années au moment où Microsoft a été condamnée. C'est là où on voit que le temps a un effet certain.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Le temps de la justice n'est pas celui des affaires.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Exactement.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Et c'est probablement ce sur quoi les grandes sociétés, de façon générale, jouent et Google, en particulier, ils savent parfaitement qu'ils peuvent faire bouger les lignes de façon considérable, le temps que toute la machine judiciaire se mette en marche et donc, quand arrive la sanction, si elle est importante, parce que si on regarde la sanction de la Cnil, 50 000 euros à l’encontre de Google, qui était le maximum légal, 50 000 euros évidemment pour Google ce n’était pas grand-chose, quand arrive la sanction, en fait, ils ont déjà réussi à faire bouger les lignes de fait. La stratégie à mon avis, elle est assez assumée. Ce n'est pas propre à Google, c'est propre à la plupart des grandes entreprises.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Mais justement, la question qui se pose là, tout de suite, c'est pourquoi Google demeure intouchable là-dessus, alors que Microsoft a quand même réussi au terme de dix ans certes, mais quand même, à être condamnée, et jusqu’à quand Google peut gagner comme ça du temps, petit à petit, de report en report ?
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Effectivement Microsoft ça a pris extrêmement de temps, beaucoup de temps, alors que l'affaire était, selon les juristes qui ont examiné le cas, beaucoup plus simple. Là, la ligne de défense de Google se tient finalement. Ce que dit Eric Schmidt, il l'a encore répété il y a quelques mois, il ne force personne à aller sur le moteur de recherche. La concurrence est à un clic, comme il le dit et, comme vous l'avez très bien rappelé, finalement il y a une demande. Quand on parle de Google, comme ça, on a l'impression qu'on met le couteau sous la gorge des utilisateurs, de l'internaute, en les forçant à aller sur Google ou Facebook ou autre chose. Mais ce n'est pas le cas. Il y a une véritable demande et, finalement, les gens tant qu'on leur offre un service qui leur convient, ils y vont, ils ne vont pas se poser la question, et c'est peut-être ça le problème aussi.
 
 
 
==08' 50==
 
'''Émilie Chaudet :'''  Il y a pile une semaine Google s'est restructurée, maintenant le moteur de recherche est devenu une filiale abritée sous la maison mère Alphabet qui regroupe plein d'autres activités de Google. L'entreprise, donc, se consacre aussi à la recherche. Larry Page, l'un des patrons de la société, a justifié cette nouvelle organisation par un souci, dit-il, d'allégement et de clarté. Il dit donner plus de niveaux de gestion pour pouvoir gérer indépendamment des choses qui ne sont pas liées. Est-ce que cette restructuration, aussi, c'est une manière de brouiller les pistes juridiques ? Est-ce que c'est une manière d'échapper, une fois de plus, de faire obstacle à des actions juridiques ? Olivier Babeau.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Il y a deux lectures. Une première lecture, assez business, qui est donnée par la plupart des observateurs en stratégie, qui est que, quand une entreprise croît, naturellement, elle va passer d'une organisation fonctionnelle à une organisation divisionnelle. Parce qu'on est beaucoup trop gros, il va falloir séparer les activités pour quelles soient, on pourrait dire, plus indépendantes dans leur fonctionnement. C'est la première explication et ça se justifie. La deuxième, c'est peut-être une explication du point de vue des créateurs qui est qu'ils ont mis de côté, on peut dire, le moteur à rentabilité de l’entreprise, et puis ils vont pouvoir, comme ça, s'intéresser et gérer plus directement ce qui les intéresse plus et qui constitue, aujourd'hui, le cœur du développement et de la recherche de Google, on va peut-être en parler, tout ce qui est biomédecine notamment, robotique, intelligence artificielle.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Benjamin Jean, sur cette question, de la protection juridique qui impliquerait, ou non, Alphabet ? Vous allez nous répondre.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Là ce n'est pas tant en termes de protection juridique, ça serait savoir si le droit à la concurrence sera impacté par cette nouvelle organisation. Je ne crois pas, simplement parce que, dans les faits, effectivement, même si maintenant il y a une holding et différentes entités, rien n'a changé dans le modèle de gouvernance : ce n'est qu'une maison mère qui a une multitude de filiales. Donc elle pourrait tout à fait être condamnée pour le même motif d'abus de position dominante. Vraiment, je ne vois aucune difficulté à ça. Pour le reste, effectivement. Peut-être le timing a fait que ça leur permettait, aussi, de gagner du temps au regard de la Commission européenne, ça je ne saurais le dire, mais, pour moi, en tout cas, ce n'est pas un argument suffisant pour échapper à la Commission européenne. Même si ça permet, éventuellement, de donner plus de clarté sur les chiffres des différentes filières et notamment sur cet abus de position dominante, au regard de certains ???.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Oui, ça peut avoir, beaucoup de gens ont souligné que ça avait un intérêt boursier. Ça permettait de rassurer.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Oui, de rassurer les investisseurs.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' De clarifier, de montrer clairement où et comment la valeur était produite à l'intérieur de l'entreprise.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Andréa Fradin.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Ce que disent les patrons de Google, Lary Page et Sergueï Brin, c’est que les investisseurs un peu traditionnels peuvent être effrayés par les grands projets visionnaires de Google qui sont vraiment, aujourd'hui, au cœur de l'entreprise.
 
 
 
''' Émilie Chaudet :''' Oui, on parlera de Google Genomics, les génomes humains.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Voilà, notamment ils ont un gros labo de recherche qui génère tout un tas de fantasmes, Google X, et ça peut effrayer ; c'est un peu éloigné du cœur de métier, donc Internet, moteur de recherche, pub en ligne, et ça va dans tout un tas de domaines, et ça permet de donner un peu plus de visibilité.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Olivier Babeau sur cette dernière question ?
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Il y a une dernière lecture. Vous savez il y a un fameux libre qui s'appelle « Le dilemme de l'innovateur », d'un auteur qui s'appelle Christensen, qui explique que les grosses entreprises, qui souvent sont nées de l'innovation, ont un grand problème, c'est qu'une fois qu'elles sont devenues grosses, elles n’arrivent plus à innover. D'une certaine façon, les GAFA, on définit l'acronyme
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Donc Google, Apple.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Apple, Facebook et Amazon, ces grosses entreprises d'Internet savent qu'elles sont confrontées à ce dilemme, elles sont nées de l'innovation, mais elles savent qu'elles doivent innover en permanence pour survivre. Et pour régler ce dilemme, pour le surmonter, on pourrait dire que chacune essaye en permanence, n'hésite pas, par exemple, à se cannibaliser. C'est ce que fait Apple quand elle a annoncé un iPhone, dont elle sait qu'elle allait tuer l'iPod, Steve jobs a été assez clairvoyant de ce côté-là. Peut-être que Google en faisant ça, aussi, essaye de continuer à garder sa capacité innovatrice tout en conservant son activité, enfin l'activité qui intéresse les actionnaires qui est le cash d'aujourd'hui, en préparant le cash de demain.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :'''  Andréa Fradin.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Et c'est une véritable obsession chez Google et d'ailleurs la presse américaine s'en faisait l'écho ces derniers jours après l'annonce de la création d'Alphabet. En fait, Google se réorganise en permanence, et veut toujours avoir le coup d'après. Ils ne veulent pas devenir le Yahoo ou le Microsoft de demain. Ils ne veulent pas s’effondrer parce qu'ils ont encore cette image de trublion du secteur qui sont nés dans un garage, dans l'innovation, dans une espèce de dynamique. Effectivement, les lourdeurs d'une organisation peuvent un petit enrayer. L'obsession de Google c'est d’être dans nos vies, demain et toujours. Voilà, ce coup d’avance : ne jamais être en retard quoi.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Alors juste avant de continuer, Andréa Fradin, vous venez d'introduire, sans le vouloir, le son, cet extrait de documentaire que je voudrais vous faire écouter, très court. C’est un documentaire qui s'appelle « Google, la machine à penser », un documentaire réalisé en 2007 par Gilles Cayatte.
 
 
 
'''Voix off :''' Il y a un paradoxe intéressant avec Google. Le service est gratuit, le nom est sympa, c'est plein de jeunes, le décor est branché. Il y a des baballes en plastique et des tables de billard. Google est synonyme d'éclat, de contre-culture et plus encore. Mais en fait, quand vous lisez les journaux, le Google que vous découvrez n'est pas le Google de votre imagination. Ce Google-là est énorme. Il domine tous les secteurs qu'il a pénétrés. Il est en train d'avaler l'ensemble du monde de la publicité, morceau par morceau. Il a cédé aux Chinois sur la censure. Il ressemble à un énorme prédateur et, en même temps, dans votre esprit, c'est Google !
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Archive sélectionnée par Virginie Leduault. L'homme que l'on entendait c'était Michael Malone,  éditorialiste au Wall Stret Journal. Donc Google c'est un paradoxe, dit-il, en termes d'image. Est-ce que cette entreprise est aussi insaisissable au niveau juridique ? Benjamin Jean.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Oui merci. Toujours la même idée, c'est-à-dire que se mettre en position de monopole comme c'est le cas, en tant que tel, ce n'est pas du tout condamnable d'un point de vue de droit à la concurrence, j'entends. Ce qui sera sanctionné c'est s’il y a un abus ou s'il y a une entente avec d'autres sociétés, et donc un effet pervers sur la concurrence, sur le marché. Là, en l’occurrence, si Google se sert de l'une de ses positions dominantes dans un marché pour gagner dans un autre marché, sur lequel ils auraient un produit a priori moins pertinent, parce que c'est ce qui était reproché à Google Shopping à l'origine, ce n'était pas shopping, je n'ai plus le nom en tête.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Si, c'est shopping.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Maintenant c'est shopping, mais ça a évolué au fur et à mesure.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Google Shopping.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Ah oui, probablement.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Donc ils avaient un service ils ont lancé un service qui était moins pertinent que d'autres, mais par leur position dominante en matière de recherche ils ont, semble-t-il, en tout cas c'est ce qui leur est reproché, réussi à rendre leur service plus attractif et ensuite plus pertinent. Donc c'est vraiment ça qui est sanctionnable quel que soit le montage choisi.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Vous parlez d’abus mais est-ce que ces recherches menées par Google et notamment sur le génome humain, donc Google qui stocke des génomes différents dans un cloud, dans un nuage dématérialisé de données, pour les mettre à la disposition de chercheurs, pour les tester, est-ce que ça, d'un point de vue éthique, c'est considéré, ça doit être considéré comme un abus ? Andréa Fradin.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Comme un abus, je ne sais pas, mais il est clair que les États ne doivent pas se laisser dépasser par les entreprises de cette envergure sur des questions aussi essentielles que la recherche sur le génome humain. Et c'est un petit peu le problème éventuel, parce que, pour le moment, il n'y a pas de problème, mais la question que peuvent susciter les Google, Facebook et tout ça qui s'engagent dans des secteurs qui n'ont plus rien à voir, comme je le disais plus tôt, avec leur cœur de métier, avec Internet. Et c'est d'autant plus préoccupant qu'il y a ce paradoxe, auquel l'extrait audio faisait référence, et, en fait, ce paradoxe qui montre une image très cool de Google. On l'a encore vu avec Alphabet, ils ont fait toute une campagne marketing très réussie, très cool. Tous les amateurs de high tech, de news high tech, étaient ravis. Ils sont même comparés à une entreprise qui existe, virtuelle, fictionnelle, qui n’existe pas, fictive qui n’existe pas en réalité, qui est dans une série de ???, série américaine. Ils se comparent et tout le monde a dit « Ah mon Dieu, c'est génial, Google se compare à cette entreprise qui s'appelle ???, sauf que ???, dans la série est horrible. Et Google en vient à se comparer à une boîte horrible pour le clin d’œil et tout le monde trouve ça cool. Moi ça me terrifie.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Allez-y Benjamin Jean.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Juste cet élément, je trouvais votre remarque vraiment intéressante quand vous parliez d'éthique. Effectivement, pour moi la question elle est juridique, on en a déjà parlé il y a quelques minutes. Mais elle est aussi sur bien d'autres plans, et notamment cette question éthique. Est-ce que ce qui est fait, ce type de société, les projets sur lesquels ces types de sociétés travaille sont éthiques, c'est une question à part entière, sur laquelle il revient à chacun de se positionner. On n'est plus sur la Commission européenne qui va juger au regard du droit à la concurrence la position d'un acteur. C'est vraiment chacun qui se positionne face à une organisation qui est partout, sur nos PC, sur nos téléphones. Est-ce que son comportement est éthique ou pas ?
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Olivier Babeau, sur cette question ?
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' La remarque appelle d'autres questions. C'est de souligner que jamais, il n'y a pas d'exemples dans l’histoire de l'humanité que des entités, on peut dire privées, aient autant de pouvoirs. Certes, autrefois il y a eu des banques qui arrivaient à prêter aux empereurs et aux rois qui, donc, du coup vouaient à l’Église et aux papes, et du coup avaient énormément de pouvoirs, mais on n'a jamais eu d'entreprises qui soient, pas seulement Google mais les GAFA, qui soient aussi puissantes. Si vous prenez le chiffre d'affaires cumulé des GAFA, vous avez l'équivalent du PIB du Danemark, soit la quinzième puissance mondiale. Si vous prenez les réserves financières des GAFA, vous avez 123 milliards de dollars, c’est-à-dire de quoi acheter, grosso modo, les cinquante startups les plus prometteuses et les plus innovantes. Vous avez un pouvoir énorme, et cela va effectivement bien plus loin, et c'est un petit peu ce que vous souligniez à travers votre remarque sur l'éthique, qui est qu'aujourd'hui le pouvoir de ces GAFA de façon générale c'est d’être la porte d'entrée du monde sur vous, sur l'individu, et la porte d'entrée de l'individu sur le monde.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Avec la collecte de données personnelles. Oui, c'est ça.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Et donc, c'est être capable de contrôler, on pourrait dire, les deux côtés, et de ce contrôle que vous monétisez, vous tirez votre puissance financière mais aussi votre capacité d'influence.
 
 
 
== 19' 12==
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Avant justement ces questions-là sur la e-santé, sur ces recherches-là, il y a aussi cette question, longtemps débattue, et encore débattue aujourd'hui, du droit à l'oubli, que ne respecte toujours pas Google. Il y a encore eu une plainte déposée aussi par l'UFC-Que Choisir, en France, par rapport à Facebook et à Twitter. Ce droit à l'oubli, fin juillet, la Cnil s'est fait signifier que ce droit à l'oubli ne serait pas respecté. Est-ce qu'il faut mettre au point un meilleur outil de répression ? Ou alors un meilleur outil de surveillance, permanent, pour faire plier Google ? Andréa Fradin ?
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Sur ce point il faut un petit peu nuancer parce qu'en plus le débat est très passionné. Ce qu'a dit Google à la Cnil française c'est « nous n’appliquerons pas votre vision du droit à l'oubli »
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' « Au monde entier »
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' « Au monde entier ». Voilà, c'est ça. C'est-à-dire la Cour de justice européenne a dit « voilà, le droit à l'oubli c'est ça, vous avez la responsabilité de retirer des contenus suite à des plaintes ».
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' C'est-à-dire que moi si demain je demande à Google de supprimer du contenu me concernant sur Internet, il peut le faire sur Google France.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Voilà.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Mais si on se connecte en Allemagne, en Italie, aux États-Unis, en Amérique latine, on retrouvera ce contenu.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Sur google.fr ce ne sera pas là. Mais si vous voulez vous mettre sur google.com, ou .de, ou point je ne sais quoi, ça apparaîtra. Et Google dit « on ne peut pas se permettre d'appliquer cette vision des droits sur Internet qui est proprement européenne, parce que c'est la porte ouverte à des demandes de régimes moins structurés, moins recommandables, plus dangereux, qui peuvent dire « eh bien voilà, nous on n'accepte pas des critiques », je ne sais pas, « de notre roi », comme en Thaïlande par exemple, « donc vous enlevez tout l'Internet ».
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Ça c'est le directeur juridique de Google qui a dit ça. C'est ça ?
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Oui c'était sur le blog de Google. Il prenait l'exemple de la Thaïlande. Et, en même temps, ça se pose vraiment. Est-ce qu'il y a un droit universel d'Internet ? Est-ce qu'il y a une cour internationale d'Internet ? Non. Pour le moment ce n'est pas le cas.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Est-ce qu'il devrait y en avoir ?
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Je ne pense pas que ce soit souhaitable, tellement Internet est flexible.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Ce n'est pas dans l'esprit d'Internet. Il faut, au contraire, être très décentralisé.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Olivier Babeau.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Cette question du droit à l'oubli est effectivement compliquée. Moi, elle me fait tout de suite penser à « 1984 », et à la réécriture des journaux, enfin réécriture d'histoire.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Georges Orwell.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Oui, Georges Orwell, évidemment. La question c'est jusqu’où vous devez oublier et quoi. Peut-être que si vous avez fait, je ne sais pas, une erreur dans votre jeunesse, il y a prescription et donc, vous avez droit à l'oubli, mais jusqu'à quand peut-on nier un fait historique, un fait qui devient un événement et qui, de fait, fait partie de l'histoire et, à ce moment-là, Google est obligé de le répercuter. Je trouve que ce débat, en tout cas, a le mérite d'attirer l'attention sur ce qui fait un petit peu le paradoxe de ces grandes plateformes d'Internet. On pourrait dire en apparence, et en réalité aussi, elles réalisent une formidable désintermédiation, puisque, à travers la plateforme, vous avez la demande et l'offre qui va se rencontrer comme aujourd'hui chez Uber, chez ???, etc, et donc, au-delà des institutions et de tous les intermédiaires. Donc, en apparence, il y a, on pourrait dire, une sorte, carrément, d’hyper démocratie qui peut se mettre en place. Mais, en réalité, cette plateforme elle est toujours un filtre, elle est toujours une sélection de la réalité. Elle opère un filtre. Évidemment, le premier filtre c'est celui de la recherche qui ne vous donne pas la réalité d'Internet. Il n'y a pas de réalité d'Internet. Il vous donne un choix dans toutes les réponses qu'il peut y avoir aux questions que vous posez. Peut-être que le côté un petit peu pernicieux de ces grands plateformes c'est qu'elles opèrent forcément un choix, mais qui ne dit jamais son nom et qui n’annonce pas la couleur. Et d'ailleurs personne ne connaît la nature de l’algorithme de Google.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Allez-y, Andréa Fradin.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Sur ce point, un autre point pernicieux qui montre la difficulté d'appréhender ces plateformes et de leur imposer une forme de droit au niveau international ou régional au niveau européen, au niveau national en France, c'est le fait que, en essayant de les responsabiliser comme l'a fait la Cour de justice européenne, on leur donne, en même temps, le pouvoir qu'on leur reproche. Finalement, sur le droit à l'oubli, on dit « eh bien c'est Google qui tranche ». Et sur tout un tas d'autres sujets comme le retrait de contenus, on demande aux plateformes de se responsabiliser, finalement de mettre un peu la casquette de justicier.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Et ce ne serait pas à elles de gérer cet aspect ?
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Mais si fait ça, on leur donne, du coup, un pouvoir énorme, qui est a priori celui de l’État, tout en leur reprochant qu'elles ont déjà trop de pouvoirs. Donc ça montre bien la difficulté et la place qu'elles ont déjà, de fait.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Il y a aussi cette responsabilisation de l'utilisateur. La plainte d'UFC-Que Choisir, reprochait notamment à Facebook et à Twitter de faire des conditions générales d’utilisation, ce qu'on signe souvent avant d’utiliser un réseau social, avec des liens très flous, quarante, cent liens hypertextes dans un même texte. Ça aussi c'est à l’utilisateur de faire attention ? Ça tient à l’utilisateur de tout lire ? Ou alors, au contraire, est-ce qu'on doit réformer un petit peu, est-ce qu'on doit modifier ces textes-là ? Simplifier ? Rendre plus accessible, justement, plus transparent, cet aspect-là des réseaux sociaux ? Benjamin Jean.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Plusieurs éléments de réponse. J'aurais tendance à dire que, d'une part, des acteurs comme Facebook, Twitter sont assez représentatifs de sociétés qui changent leurs CGU toutes les semaines, tous les mois.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' C'est le cas d'Apple, par exemple.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' De toutes façons, même si on les a lues une fois, le mois plus tard elles ont changé, et en se reconnectant, on les accepte à nouveau sans le savoir. Ça c'est ce qui est sur le papier.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Avec des changements parfois invisibles.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Tout à fait. Ça c'est ce qui est sur le papier ce n'est pas nécessairement ce que le juge retiendrait pour finir, parce qu'il y a quand même un droit qui protège le consommateur et qui protège l'internaute. Est-ce qu'il faut que la loi impose un certain comportement aux plateformes ? Alors peut-être. On pourrait très bien, effectivement, il y a des lois qui contraignent tous les acteurs d'Internet, qui obligent à ce que les mentions légales soient affichées d'une certaine manière, à certains endroits. Pourquoi pas ? On pourrait rajouter les aspects conditions générales d'utilisation. Là je vous rejoins entièrement quand vous dites que l'utilisateur, lui-même, doit se sentir concerné. Je pense que c'est aux internautes, aux personnes qui choisissent telle ou telle plateforme, tel ou tel outil, de choisir, peut-être, la plateforme ou l'outil qui lui paraît la plus respectueuse de ses besoins, de ses volontés, de ses droits, de ses libertés. Et là, actuellement, les gens ne le font pas.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Andréa Fradin.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' En même temps, le vrai souci et qu'on voit particulièrement depuis les révélations d'Edward Snowden sur la surveillance de masse mise en place par les États-Unis, c'est que les gens qui ne sont pas vraiment intéressés par les sujets numériques s'en fichent de ces questions.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Oui.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Et ça, c'est terrible. À chaque fois qu'on écrit un article sur le sujet, on va toujours avoir : « On s'en fiche. Je n'ai rien à cacher. On le savait déjà ». Et, en fait, les gens ne veulent pas changer. J'ai le souvenir d'une anecdote très marquante : une ancienne collègue qui avait amené sa mère, une ancienne prof, à une conférence de hackers, donc vraiment la collusion de deux mondes. Et les hackers lui expliquaient l'importance de la vie privée.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Des pirates informatiques.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Oui, voilà, des gens qui bidouillent le code et qui savent comment marchent toutes ces machines.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Pas forcément des pirates.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' D'accord.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Des spécialistes.
 
 
 
'''Andréa Fradin :''' Ceux qui savent comment ça marche, disons.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' D'accord.
 
 
 
'''Andréa Fradin :'''Et donc, qui expliquaient l'importance de la vie privée, l'importance de choisir les bons logiciels, les bons services en ligne, etc. Et, à la fin de la conférence, tout le monde attendait un petit peu une espèce d'épiphanie chez cette dame, qu'elle n'a pas eue. En fait, elle a dit à la fin « eh bien non, s'il y a un système alternatif à Microsoft ou à Google tout aussi pratique, tout aussi confortable, tout aussi gratuit et je ne sais quoi, je n'irai pas ». Donc il n'y a pas de demande, en fait, dans le grand public, c'est peut-être ça le problème.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Olivier Babeau.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Oui. Là on est au cœur du reproche principal qui est fait aux GAFA, en fait, c'est de monétiser nos données, volées à notre insu, prises, captées à notre insu.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Alors qu'elles sont souvent données par les utilisateurs.
 
 
 
'''Olivier Babeau :''' Alors qu'effectivement elles sont données en totale indifférence, mais souvent en totale ignorance aussi, parce que non seulement vous donnez, je ne sais pas, votre nom, votre date de naissance, mais en plus, le site va souvent capter, par exemple, votre comportement on line en dehors de ce que vous faites sur sa propre… Et ça, on ne le sait pas, en général. Si on parle peut-être des mesures, ou des règles à mettre en place, je ne suis pas le seul à le dire, mais il y aurait quelque chose à mettre en place comme une forme d'<em>opt-in</em>, c'est-à-dire le fait que vous devez, pour accepter qu'on prenne vos données et qu'on suive vos données, faire une acceptation. Alors qu'aujourd'hui c'est plutôt, à la limite c'est plutôt l'''opt-out'', c’est-à-dire vous pouvez essayer, si vous faites beaucoup d'efforts pour essayer de refuser le suivi.
 
 
 
'''Émilie Chaudet :''' Allez-y, Benjamin Jean.
 
 
 
'''Benjamin Jean :''' Le régime que vous évoquez c'est celui de la loi Informatique et libertés, mais qui ne concerne que les données à caractère personnel. Et là, en l’occurrence, on a des données qui ne sont pas nécessairement à caractère personnel, ou qui sont considérées comme telles, ce qui leur permet de ne pas être dans l'''opt-in'', mais effectivement je vous rejoins tout à fait sur ce raisonnement.
 
 
 
== 27' 38==
 
 
 
'''Voix off :''' France Culture. Du grain à moudre d'été. Émilie Chaudet
 

Dernière version du 19 juin 2016 à 14:29