Lutter contre l'obsolescence programmée - 15 minutes - RTS

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Titre : Peut-on lutter contre l'obsolescence programmée?

Intervenants : François Marthaler - Dragan Ivanovic - Zoé Decker - Joëlle Cachin

Lieu : RTS - Quinze minutes

Date : janvier 2018

Durée : 15 min

Écouter l'émission : ici ou ici

Licence de la transcription : Verbatim

Statut : Transcrit MO

Description

Peut-on lutter contre l'obsolescence programmée? Faut-il mettre en place des lois plus incitatives en Suisse, à l'image de la France? En attendant, que faire de nos appareils jugés obsolètes? Quinze minutes s'intéresse au trajet de nos smartphones usagés, et aux moyens de les revaloriser.

Transcription

RTS info – Quinze minutes – Zoé Decker

Zoé Decker : Trois Suisses sur quatre possèdent un smartphone. En moyenne l’appareil est utilisé pendant 18 mois. Chaque année, dans notre pays, c’est environ huit millions de téléphones portables en état de fonctionner qui finissent alors au fond des tiroirs. Mais à qui la faute ? Eh bien pour certains, Joëlle Cachin, les responsables ce sont les fabricants.

Joëlle Cachin : On les accuse de limiter volontairement la durée de vie de leurs appareils ; c’est ce qu’on appelle l’obsolescence programmée. Ces derniers mois les actions se multiplient contre les géants de la technologie. Récemment plusieurs plaintes ont été déposées contre Apple, l’entreprise américaine ayant admis qu’elle bridait certains de ses anciens modèles d’iPhones.

Zoé Decker : Pour d’autres, en revanche, les consommateurs sont aussi responsables, trop perméables aux effets de mode et aux offres promotionnelles alléchantes.

Joëlle Cachin : Alors la Suisse a-t-elle suffisamment d’outils juridiques, politiques pour lutter ? Et comment rallonger l’espérance de vie de nos smartphones ?

Zoé Decker : Première piste, les ateliers de réparation ; direction La Bonne Combine à Lausanne.

Joëlle Cachin : Récupérer, rafistoler et remettre sur le marché, La Bonne Combine en a fait son créneau depuis près de 40 ans.

Zoé Decker : Des étagères à perte de vue où trônent des tourne-disques, des fers à repasser ou des machines à café qui attendent de retrouver une deuxième vie.

Dragan Ivanovic : On peut dire qu’on est réellement dans la caverne d’Alibaba.

Zoé Decker : Dragan Ivanovic est l’un des responsables.


Dialogue en off : Salut. Comment vas-tu ? — Très bien. — Pour Elna, c’est quel cordon que tu veux  — C’était le cordon électrique. — OK ! Merci.


Zoé Decker : Son métier, il le connaît bien, cela fait plus de 20 ans qu’il est réparateur ici.

Joëlle Cachin : Pour lui, il n’y a aucun doute l’objectif des fabricants a changé avec le temps.

Dragan Ivanovic : Ça devient de pire en pire. Disons que les appareils une vingtaine d’années en arrière qui sont fabriqués au ???, les marques faisaient fabriquer quelque chose de solide, costaud et qui dure, c’était leur slogan. Eh bien maintenant, les marques ce qu’elles font c’est que ce soit joli, qu’il y ait beaucoup d’options,et que ça dure moins de trois ans, si c’est possible !

Zoé Decker : Un état d’esprit que Dragan a aussi vu se développer avec l’avènement des smartphones.

Dragan Ivanovic : Voilà. On va au troisième, c’est la partie électronique. Notre collègue n’a pas ouvert encore.

Joëlle Cachin : Pour nous montrer, il nous propose d’ouvrir un iPhone 6 de chez Apple et un Fairphone 2, ce smartphone modulaire et équitable.

Dragan Ivanovic : On va commencer par le Fairphone. Alors prenez dans le coin. Hop ! Et puis voilà. Là vous avez l’écran, la batterie et puis la coque. Voilà ! C’est clic, clic, clic et c’est fini.

iPhone 6, pour dégager l’écran, il faut enlever un, deux, trois, quatre, cinq vis. On va les dévisser l’une après l’autre. OK. Et encore la dernière. Regardez bien, chaque vis est différente par la taille, la longueur et la profondeur. Alors si quelqu’un l’a démonté et qu’il n’a pas fait attention où est cette vis, comment est cette vis, il ne remontera jamais.

Fairphone, pour enlever le bâti on fait juste un clic et c’est fini.

Par contre, iPhone 6, il y a des plaques qui sont collées ici, qui tiennent. Il faut les chauffer et après il y a une manière pour sortir, il faut tirer en latéral. Si quelqu’un n’arrive pas à faire comme il faut, si tout d’un coup il plie, ça brûle instantanément.

Chez Fairphone, vous pouvez dévisser si vous voulez enlever la partie caméra ou bien lesmicro, il est bien fiché vous voyez, il est bien noté ce que c’est. Vous pouvez mettre une caméra qui est plus performante, vous n’êtes pas obligé de changer le reste. Chaque pièce est livrable et vous pouvez faire vous-même.

Le problème principal du iPhone, ce sont les pièces détachées ; ils ne les fournissent pas, ça c’est sûr. On peut les obtenir, mais c’est dans le marché gris

Joëlle Cachin : En résumé, d’un côté le Fairphone simple comme un Lego, démontable, modulable, transformable par monsieur et madame Tout-le-monde.

Zoé Decker : De l’autre une montre suisse, le iPhone 6, complexe, difficile à démonter, à remontrer, des vis de tailles différentes, sans raison apparente, et des pièces détachées non fournies.

Joëlle Cachin : Alors est-ce que les fabricants cherchent volontairement à compliquer la tâche des réparateurs ?

Zoé DeckeFrançois Marthalerr : Et Est-ce qu’on peut parler d’obsolescence programmée ?

François Marthaler : Quand on parle d’obsolescence programmée, on parle surtout de ce qui se passe, ce que l’on ne voit pas à l’intérieur de l’appareil, à savoir les programmes.

Zoé Decker : François Marthaler, ancien conseiller d’État vaudois, fondateur de La Bonne combine et créateur de Why! open computing, ces ordinateurs programmés pour durer.

François Marthaler : On a vu récemment sur l’iPhone, si vous installez la dernière version du système d’exploitation, votre appareil ralentit au point que vous n’avez juste qu’une envie c’est de l’envoyer par la fenêtre. D’autant plus que s’agissant de logiciels qui ne sont pas libres, il est même interdit d’étudier le code pour essayer de savoir.

Zoé Decker : C’est-à-dire que si on arrive à rentrer dans le code d’un logiciel fermé on pourra y voir l’obsolescence programmée ?

François Marthaler : Oui. Tout à fait. C’est un petit bout de code qui dit « si tu es en train de tourner sur une machine qui a plus de quatre ans, modifie la vitesse du processeur pour que ce soit plus lent. » À l’inverse les logiciels libres qui sont au fond la solution par rapport à cette problématique d’obsolescence programmée, peuvent être étudiés, peuvent être modifiés. Si un petit malin a introduit un virus du type obsolescence programmée, disons-le comme ça, on peut l’en retirer ou contrer le problème.

Il y a plusieurs projets qui courent en ce moment sur des smartphones plus libres. Je pense que de manière tendancielle les logiciels libres vont s’imposer dans ce marché, pour une raison toute simple, ce sont les coûts de développement. Ces logiciels sont devenus tellement complexes, pour réduire les coûts de production, il faut s’associer et éviter que chaque marque développe son propre système.

Zoé Decker : Est-ce que l’économie suisse par exemple, peut tourner sans obsolescence programmée ?

François Marthaler : Bien évidemment ! Pendant des années à La Bonne Combine des clients nous disaient : « C’est très bien ce que faites, réparer, faire durer, mais n’empêche, chaque fois que vous réparez un appareil eh bien c’est un appareil neuf qui n’est pas vendu et donc vous tuez l’emploi industriel ! » J’ai dit mais attendez, non ! Je vais quand même aller voir dans la théorie économique où est-ce que c’est écrit qu’il faut que le gaspillage s’accroisse, qu’on épuise les ressources, qu’on accroisse les inégalités, pour que l’économie fonctionne. La réalité c’est évidemment que la valeur ajoutée des activités de réparation sur la durée de vie du produit, représentait bien plus que le fait d’acheter du produit bas de gamme et de le remplacer toutes les x années. Surtout que ça crée des emplois locaux en plus de ça. Pareil pour les logiciels libres. On n’est pas obligé d’acheter des licences outre-Atlantique. On peut développer localement et créer de l’emploi ici. Cette tendance est bonne pour l’économie, est bonne pour la planète.

7’ 09

Zoé Decker : D’ailleurs, ces derniers mois,