Logiciels libres en collectivité territoriale - Pascal Kuczynski

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Titre : Le choix des logiciels libres en collectivité territoriale

Intervenant : Pascal Kuczynski - Évelyne Jardin

Lieu : Radio Agora - Nanterre

Date : février 2018

Durée : 32 min 15

Écouter l'enregistrement

Licence de la transcription : Verbatim

NB : transcription réalisée par nos soins. Les positions exprimées sont celles des intervenants et ne rejoignent pas forcément celles de l'April.

Statut : Transcrit MO

Transcription

Évelyne Jardin : Bonjour chers auditeurs et auditrices de Radio Agora. Nous accueillons aujourd’hui mardi 27 février 2018 Pascal Kuczynski. Pascal, vous êtes délégué général de l’ADULLACT. L’ADULLACT c’est l’association des développeurs et utilisateurs de logiciels libres pour les administrations et les collectivités territoriales. Merci Pascal de venir de Montpellier, par cette journée glaciale, pour nous expliquer les missions de cette association. Pascal, quelles sont les activités de l’ADULLACT ?

Pascal Kuczynski : Bonjour et merci de m’avoir accueilli aujourd’hui. L’ADULLACT est une association loi 1901, créée il y a quinze ans déjà, comme quoi ça doit être utile à quelque chose si ça continue à perdurer, dont l’objet est de promouvoir faire connaître, développer et faire connaître des logiciels libres dans les métiers des collectivités. Je parle bien des métiers des collectivités. J’aime à citer comme exemple le cimetière, il n’y a que 36 000 communes en France qui ont un cimetière, qui doivent gérer un cimetière. Il y a un logiciel libre de gestion de cimetière qui s’appelle openCimetière. Voilà notre mission : faire connaître ce genre de choses, aider les collectivités à partager leurs travaux sur ces outils-là

Et c’est très important de comprendre l’intérêt de ce rouage. Nous on est juste la goutte d’huile qui vient faire que les rouages fonctionnement ensemble. C’est très important de comprendre qu’on passe, grâce à ce genre d’initiatives, d’un milieu où je me contente d’acheter des logiciels sur catalogue, je deviens, alors je caricature en disant un singe savant presse-bouton qui clique sur le bouton là où on m’a dit où il fallait pour enregistrer une nouvelle concession dans mon cimetière. C’est une chose.

Dans le contexte du logiciel libre, il faut bien comprendre la notion de partage, partage d’informations, partage de savoir-faire. Et quand les agents s’intéressent à ce genre de choses, ils se réattribuent leur métier, en l’occurrence là le métier de la gestion de cimetière, mais je peux vous en citer une centaine d’autres, métiers au sein de nos collectivités, y compris la ville de Nanterre qui doit avoir 200-250 métiers à gérer de ce type-là, et une bonne moitié sont couverts par des logiciels libres. Et je disais les agents des collectivités peuvent se réattribuer leurs propres métiers, non plus être des singes savants clique bouton, mais comprendre ce qu’il y a : tiens, au prochain groupe de travail – parce que c’est notre rôle d’organiser des groupes de travail pour faire parler de ces outils et les faire évoluer surtout – l’agent en question pourra dire « moi j’ai besoin de ci, moi j’ai besoin de ça ; j’ai besoin d’un bouton qui fait ça » et de participer à l’évolution du logiciel avec, en toile de fond, bien évidemment, l’économie d’argent public. Puisque je garantis parce que c’est du logiciel libre, je reviendrai là-dessus sur la définition du logiciel libre pour en parler, mais parce que c’est du logiciel libre j’ai la garantie que lorsqu’une collectivité va investir pour ajouter le bouton bleu qui a été jugé nécessaire, ça a été payé une fois oui, mais ça ne sera payé qu’une fois. Un de nos leitmotivs est de dire « l’argent public ne paye qu’une fois ». Et c’est quelque chose qu’on a très largement dans le monde des logiciels dans les services publics.

Évelyne Jardin : Pascal, si je reprends votre exemple, beaucoup de collectivités ont des logiciels pour gérer des cimetières, c’est ça, et ces logiciels-là sont plutôt privateurs, généralement, et vous à l’ADULLACT vous proposez une solution libre ? Est-ce que j’ai bien compris ? Et du coup, quel est l’avantage de passer d’un logiciel privateur à un logiciel libre ? Est-ce que c’est intéressant d’un point de vue pécuniaire pour la collectivité territoriale ? Donc première question, est-ce que c’est moins cher ? Et si je vous comprends bien, est-ce que c’est aussi plus intéressant pour les membres de la collectivité pour s’emparer des outils et les faire évoluer ?

Pascal Kuczynski : Plus intéressant, c’est ce que je venais de raconter, effectivement oui, puisque que chacun se réattribue son métier et participe à l’évolution du logiciel. Quand je dis évolution, ça peut être des besoins purement fonctionnels, pour le confort de chacun et pour le bien-être des citoyens qui voient leurs services s’améliorer, le service qui leur était offert s’améliorer, mais aussi pour les suivis réglementaires. Par exemple il y a une nouvelle réglementation qui vient, je vais l’opérer cette nouvelle réglementation, je vais l’intégrer dans mon logiciel de telle ou telle façon ; l’agent est le premier acteur de son logiciel. Ça c’est sur l’aspect donc confort amélioré.

Maintenant sur l’aspect pécuniaire, je vais vous citer un autre exemple, sans vouloir être trop complexe dans la vie des collectivités, mais sachez qu’à la mairie de Nanterre, il y a un conseil municipal comme dans toutes les villes, ce conseil municipal se réunit régulièrement, sans doute au moins une fois par mois, et puis il y a des commissions, enfin il y a tout plein de réunions qui se font comme ça ; chacune de ces réunions, de ces conseils municipaux, sert à prendre des décisions ; c’est ce qu’on appelle les délibérations : une délibération va fermer la rue machin parce qu’il y a une fête, parce qu’on doit faire préempter la maison de madame Michu, parce qu’on va faire des travaux. Bref ! Il y a tout plein de décisions qui sont prises. Chacune de ces décisions prise par le conseil municipal est envoyée à l’État, la préfecture en l’occurrence des Hauts-de-Seine, pour valider la décision, est-ce qu’elle dans la loi ? C’est ce qu’on appelle le contrôle de la légalité.

Depuis dix ans maintenant ce contrôle de la légalité est dématérialisé à l’initiative de l’État ; il a décidé de dématérialiser, plutôt que d’envoyer des papiers parce qu’il faut vraiment se mettre dans le contexte : il y a un agent de la mairie qui prenait le tas de papiers en sortie du conseil municipal, qui allait à la préfecture à pied, en voiture ou comme il voulait, se faire tamponner chacune des 30, 40, 50 délibérations qui sortent du conseil municipal et revenait avec ses papiers tamponnés après avoir fait des photocopies pour que la préfecture puisse travailler dessus. Fini tout ça ! Aujourd’hui c’est dématérialisé ; ça passe par des plateformes homologuées. Il y a une quinzaine de services de ce type-là opérés par des entreprises qui ont été homologuées par le ministère de l’Intérieur pour opérer ce service de dématérialisation des délibérations en question. Donc les mairies, aujourd’hui, postent les fichiers qu’elles ont fabriqués en sortie de conseil municipal et en quelques clics j’ai envoyé tout ça. Et la réponse ce n’est pas un coup de tampon, c’est un coup de tampon électronique, je l’ai au bout de quelques minutes, donc sans me déplacer ; il y a économie aussi d’argent public à ce niveau-là. Et l’économie d’argent public est prouvée par ADULLACT. Sachez que nous sommes opérateur depuis plus de dix ans sur ce service-là. Nous sommes devenus depuis un an numéro 1 sur le marché français devant tous les éditeurs, qui ne sont pas libres du tout, eux.

Donc voilà un exemple concret où on a prouvé, de part simplement un fait, nous sommes le premier opérateur de dématérialisation des actes administratifs, les délibérations, en France aujourd’hui. Pourquoi ? Ce n’est pas pour nos beaux yeux, ce n’est pas parce qu’on est une asso – les gens s’en moquent –, c’est parce qu’on coûte moins cher en global.

D’ailleurs un deuxième point, c’est que c’est nous qui collectionnons le plus de collectivités inscrites sur notre plateforme. D’autres sont plus forts que nous en termes de nombre de documents envoyés. Ça va devenir un petit peu technique, pardon, mais ça veut dire que des grosses collectivités vont continuer à travailler avec des privateurs, pour reprendre votre terme de tout à l’heure, alors que nous on va avoir plein de petites communes. Ce qui veut dire aussi que non seulement on est moins cher dans l’ensemble, globalement, mais en plus, on couvre beaucoup mieux le territoire national avec les toutes petites communes qui n’ont pas les moyens de se payer la Rolls-Royce de l’outil, etc. Sachant que notre outil est loin d’être à rougir de quelque Rolls-Royce que ce soit encore une fois. Il est tout à fait conforme aux critères et aux usages nécessaires sur le domaine.

Évelyne Jardin : Donc si j’en viens à vos missions, vous faites de l’offre de services, vous faites de l’offre de services pour les collectivités territoriales. Pour bénéficier de cette offre de services, il faut être adhérent de l’ADULLACT ? Comment ça se passe ?

Pascal Kuczynski : Effectivement. On n’est pas vraiment offreur de services. On est offreur de services en ligne, ce qui est un petit différent. C’est-à-dire que l’association, par exemple, ne fait pas de formation, ne fait pas d’accompagnement, ne fait pas ce genre de choses. Il y a des entreprises qui font ça très bien et avec un modèle économique. Je vous rappelle que le modèle économique du logiciel libre s’appuie sur le service. Donc nous, association qui ne vivons que des cotisations de nos membres, nous ne marchons pas sur les plates-bandes des entreprises qui font des services sur les outils libres. Nous, ce qu’on fait c’est quoi ? On choisit des outils libres qui répondent à un besoin métier d’une collectivité ; on les met sur une de nos machines – là, en l’occurrence, on se fait homologuer par le ministère de l’Intérieur pour travailler sur le sujet qu’on vient d’aborder – et on offre ça gratuitement à nos membres. Aujourd’hui la mairie de Nanterre dépense une somme non négligeable pour avoir accès à une telle plateforme. Je ne doute pas que la mairie de Nanterre dématérialise ses actes administratifs. Elle n’est pas inscrite sur notre plateforme qui s’appelle S2LOW [Service Sécurisé Libre inter-Opérable pour la Vérification et la Validation]. S2LOW c’est parce que, petite parenthèse, le numéro 1 à l’époque s’appelait Fast ; on a joué au lièvre et à la tortue et vous voyez on a gagné, tel La Fontaine. La mairie de Nanterre, disais-je, dépense des sommes non négligeables pour opérer ce service. Si elle était adhérente à l’association ça ne lui coûterait rien du tout.

Évelyne Jardin : J’ai regardé un peu vos barèmes d’adhésion. Ils sont en fonction de la grosseur de la collectivité territoriale, si je ne me trompe pas. Donc une ville comme Nanterre aurait un coût de cotisation à peu près de 4000 euros par an pour pouvoir bénéficier de vos services en ligne. C’est ça ?

Pascal Kuczynski : Là on a cité un service en ligne. Mais il n’y en a pas qu’un qui est offert par l’association. Si j’ajoute à ça les marchés publics qui sont aussi dématérialisés, les tablettes des élus pour avoir leurs projets de délibération qui sont aussi dématérialisables, les sites web : je vous rappelle qu’il y a des réglementations pour les collectivités territoriales, leurs sites web, tous leurs sites web intranet, extranet, etc., doivent être accessibles à tout handicap. Nous avons un outil pour auditer automatiquement ce genre de choses. J’ai hâte de faire fonctionner mon outil sur le site des communes non adhérentes. Elles auraient à gagner à utiliser des outils de ce type-là, certainement.

Il ne s’agit de crier haro après les gens qui ne sont pas au niveau. C’est juste qu’on offre des outils dans le contexte de cette adhésion, sans bourse délier supplémentaire au-dessus de l’adhésion, pour augmenter le savoir-faire et la qualité offerte aux citoyens – en l’occurrence on parle des citoyens handicapés, qui sont trop souvent la dernière roue du carrosse – et augmenter le niveau d’accessibilité de ces sites web. Voilà une vraie œuvre de salut public.

10’ 53

Évelyne Jardin : Vous parlez donc de l’accessibilité des sites internet et en effet d’un outil que vous mettez à disposition. Son nom m’échappe, il a nom basque qui veut dire libre je crois.