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Bonjour. Ça va être une conférence un peu particulière. D'habitude, à toutes les Ubuntu Party, il y a quelqu’un de la Quadrature du Net, dont je fais partie, qui fait un point un peu sur les sujets de la Quadrature, où est-ce qu'on est, ce qu'on a fait. Cette fois-ci on va faire un truc un peu différent, parce que c'est un peu ce qu'on avait envie de faire, et puis parce que ce ne sont pas les mêmes qui ont fait la conf. Et donc on est partis d'une idée assez rigolote qu'on avait un peu, à deux ou trois, dans le conseil d'orientation et puis des gens proches de la Quadrature. Et puis on a essayé de tirer le bout de ficelle et j'ai plus de questions que de réponses à vous apporter aujourd’hui, mais c'est bien d'avoir des questions. On va essayer de se poser quelques questions.
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L'idée c’était de voir, un peu, entre le logiciel libre, la façon dont fonctionne Internet, la surveillance de masse et l'écologie et un peu l'avenir de la planète. Ça tombe bien avec COP 21, on est un peu. Non, on n'y est pas du tout, on oublie COP 21, mais la surveillance, par contre, on est dessus. En quoi c'est quelque chose en relation avec ce qu'on appelle les Communs, qu'est-ce que c'est et, en tout cas de mon point de vue, pourquoi c'est une révolution qui est en cours. Et le petit truc bleu dans le coin, c'est un peu le centre du sujet.
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Rapidement, je suis Benjamin Sonntag, je suis un des cofondateurs de la Quadrature du Net. Je ne fais pas beaucoup d'apparitions publiques. C'est plutôt les Jérémie, Philippe ou Félix qui s'y collent et maintenant Adrienne, beaucoup. Mais je suis plutôt le geek de la bande. S'il y a des trucs à faire avec les machines c'est plutôt moi qui m'y colle. Sauf qu’aujourd’hui on ne va pas trop parler des machines
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Qui n'a jamais entendu parler de la Quadrature du Net ici ? Avant aujourd'hui ? Non, alors toi je sais que c'est faux, toi je sais que c'est faux donc c'est bon. Donc personne. Tout le monde en a entendu parler donc je ne vais pas vous dire ce que c'est. Association de défense des libertés dans le numérique. Juste un petit truc. Au début on était une association de défense des libertés numériques. Puis c'est devenu il y a quoi, deux ans, une association de défense des libertés dans le numérique. C'est-à-dire qu'on applique des contextes où il y a Internet, la communication, etc. Et en fait, aujourd’hui, on est plus ou moins en train de se demander si on ne va pas juste se faire association de défense des libertés, point. Le contexte politique actuel peut en expliquer beaucoup.
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Avant de parler du sujet, de questions qui nous intéressent, je vais vous poser quand même un petit bilan de ce qu'on a fait à la Quadrature du Net dans l'année passée. Eh bien ça été très lourd, je me dis, l'année 2015. Eh bien peut-être de laisser, Agnès, si elle veut nous dire 45 secondes ce qu'on a fait au niveau de la neutralité du net. Est-ce qu'il y en a à qui le concept de neutralité du net est totalement inconnu ici ? OK. Les mêmes qui veulent jouer. Donc c'est bon. La neutralité du net, je vais quand même faire une toute petite définition, c'est l'idée très rapide de dire que, sur Internet, qui est un réseau de communication, où l'intelligence est aux extrémités, c'est-à-dire c'est votre ordinateur ou le serveur en face qui est intelligent, mais les tuyaux entre deux sont bêtes, ils ne font que passer l'information. Il est fondamental et il devrait être politiquement défendu, enfin oui, on devrait défendre politiquement le fait que les opérateurs n'ont pas le droit d'accélérer, ralentir, bloquer ou mettre sur des tuyaux préférentiels les contenus en fonction de leur origine, de leur destination ou de leur nature.
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En gros, une lettre à la poste, quel que soit le contenu de la lettre, elle ira à la même vitesse. Il n'y a pas de raison qu'il n'en soit pas de même sur Internet, notamment pour favoriser l'innovation et pour éviter les groupements de gros acteurs. Donc c’est un sujet qui est très débattu au Parlement européen et je vais laisser Agnès nous dire où est-ce qu'on en est très récemment.
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'''Agnès :''' Donc la neutralité du net. On a eu des négociations sur le règlement européen pendant des années, enfin depuis au moins 2011/12. Le règlement a fini par passer il y a quelques semaines, moins bien que ce qu'on aurait aimé et ce qu'on aurait pu espérer. Moins mauvais que ce qu'on craignait. Mais il n'est pas parfait du tout. On a jusqu’au bout essayé de déposer des amendements pour le renforcer, ils ne sont pas passés, donc on n'est pas contents. Et du coup tout n'est pas perdu, Il y a encore des régulateurs européens réunis au sein de l'Union européenne, au sein du PEREC. Les régulateurs des Télécoms, c'est l'ARCEP en France et puis les ARCEP de tous les pays de l'Union européenne, qui sont réunis au sein de l'Union européenne, au sein d'une organisation qu'on appelle le PEREC. Et ce PEREC a six mois pour sortir des lignes directrices, pour donner aux régulateurs nationaux, donc aux ARCEP, des lignes directrices pour savoir comment appliquer exactement ce règlement dans les différents pays. Et là-dessus on va essayer de jouer encore un petit peu pour renforcer, via ces lignes directrices, le règlement. Donc c'est quelque chose qu'on continue à faire, on continue à travailler avec l'ARCEP et au niveau du PEREC, au niveau européen. Voilà.
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'''Benjamin :''' Le vert est coupé, ce n'est ps grave. Merci Agnès. C'est un des sujets de la Quadrature sur lequel on est très actifs dès le début de la Quadrature finalement. Il y a un autre qui nous est un peu tombé dessus en début d'année, qui était prévu depuis longtemps, mais forcément, après les attentats de Charlie hebdo, ça a été compliqué à défendre, c’était le projet de loi renseignement qui visait, en gros, à légaliser la surveillance de masse des citoyens par les services secrets français. Et quand je dis des citoyens c'est des citoyens français et des citoyens non français, c'est-à-dire y compris les tuyaux de l'internet qui viennent ou qui sortent du pays. Les services secrets se permettent d'écouter et surtout aussi ce que font les citoyens français, ils se permettent d'écouter en masse. Eh bien le projet de loi renseignement visait à, tout simplement, légaliser ces pratiques et dire que les services ont le droit de faire ça et que c'est normal.
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Ce n'est pas ce qu'il y a écrit dans les fondamentaux de notre République. Mais bon ils ont essayé de faire passer cette loi. FDN, FFDN et la Quadrature ont attaqué un certain nombre de décrets, de choses comme ça. On a attaqué, non pas les décrets. On a attaqué au Conseil constitutionnel. On s'est fait rabrouer, on s'est fait rabrouer massivement. Ce projet de loi est passé comme une lettre à la poste sauf un petit bout qui est la partie surveillance internationale, parce qu'en gros c’était vraiment <em>open bar</em> côté surveillance internationale. Et dans tous les cas les institutions de régulation, c'est-à-dire le machin semi-parlementaire chargé de vérifier que les services font bien leur boulot n'a, a priori, quasiment pas de pouvoir, en tout cas surtout pas en amont et en aval, enfin, après coup, il ne va pas pouvoir faire grand-chose. Donc le sous-projet surveillance internationale est ensuite passé comme proposition au de projet de loi et il est aussi passé comme une lettre à la poste. Et on a su récemment que le Conseil constitutionnel le validait en disant : « Non, non, tout va bien, il n'y a pas de problème. »
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Donc, citoyens, bienvenue. Tout ce que vous dites sur votre téléphone, sur votre accès Internet, tout ce que vous faites sur Internet est écouté et mis en statistiques par nos services qui sont censés nous protéger. On sait ce que ça a donné avec les révélations Snowden. On a vu tous les abus que les Américains ont fait en la matière. Je ne doute pas que nos services soient capables de faire le même genre d'abus.
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Donc, si vous êtes sur Internet protégez-vous. Considérez que vos conversations, comme toutes les enveloppes en Allemagne de l'Est, sous la Stasi, étaient ouvertes, considérez que tout ce que vous faites sur Internet est fiché. Et ce n'est pas une paranoïa. Snowden nous l'a prouvé et même ça ne coûte rien !
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La loi numérique de Mme Axelle Lemaire, avec sa consultation bidon. Alors ça a donné un vrai succès, il y a plein de citoyens qui se sont exprimés. Et puis ils ont pris à peu près tout ce qui avait été exprimé et puis ils ont tout jeté, dès que le CSPLA ou d'autres trucs d'ayants droit ont dit : « Non, mais cet article-là est nul, on n'en veut pas ! ». Ils ont dit : « Bon d'accord, fschuit ». Globalement la loi numérique on n'en attend rien, ça ne va pas changer, ça ne va pas défendre la neutralité, ça ne va pas permettre le partage des œuvres entre citoyens. Ça ne va pas avancer grand-chose. Peut-être un peu sur l'open data et encore. Voilà. Donc ce n'est pas gagné.
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La loi création avec notre autre ministre, Fleur Pellerin, à venir, pas encore finie d'écrire a priori. On a eu des brouillons, déjà noyautés par les ayants droit ou les ayants tort, je ne sais plus trop, enfin bon. Celle-là aussi elle est bien. Il va falloir probablement taper très fort sur nos députés. Mais comme, de toutes façons, le pouvoir en place, l'exécutif, prend tous les moyens pour aller au forcing, on n'y croit plus trop, mais il va falloir quand même se battre parce que des fois on a des petites victoires de batailles et on se dit « au moins celui-là ils s'en souviendront ». Souvenez-vous d'HADOPI, joli fiasco.
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D'autres petits projets de loi comme, par exemple, le projet de loi contre le système prostitutionnel. Ça c'est un des exemples. Avant HADOPI, en gros, quand il y avait des projets de loi, ils ne parlaient pas d'Internet. Ils parlaient de sujets A, B, C. Et puis il y avait d’autres projets de loi qui parlaient du numérique et d'Internet. Après HADOPI, ils ont commencé, peu à peu, à faire des projets de loi sur tous les sujets, comme d'habitude, mais qui, à chaque fois, incluaient un article parlant d'Internet. Et c'est devenu un problème pour la Quadrature, c'est qu'on s'est retrouvés sous l'eau de projets de loi à suivre et d’articles de projets de loi à défendre ou à attaquer. Typiquement, celui sur la lutte contre le système prostitutionnel, comme tous les projets de loi de ce type, ou la défense du consommateur ou la protection des données, etc., à chaque fois ils proposent de pouvoir censurer des sites web sans intervention du juge judiciaire, ce qui n'est pas normal, a priori. Parce que quand on veut faire de la censure, l'atteinte à la liberté d'expression c'est quelque chose de grave. Il n'y a pas de raison qu'on ne passe pas par un juge qui dit : « Bonjour, c’est normal, ce n'est pas normal, il faut bloquer, il ne faut pas bloquer ». Donc ça c'est devenu la petite marotte du gouvernement, celui-là et le précédent d'ailleurs, que de censurer administrativement à tout-va. Donc voilà un autre exemple, on n'est pas bien partis.
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Dans les bonnes nouvelles, il y a eu l'invalidation du Safe Harbor qui est en gros le fait que, au niveau européen, on disait s'il y a des pays, considérant l'UE comme un pays, où les données des citoyens sont à peu près bien protégées, on autorise les boîtes privées à faire des transferts de données entre ces pays, entre l'UE et ces pays, sans avoir besoin de règlement particulier, tant que ça respecte les lois du pays cible.
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Les États-Unis faisaient partie du Safe Harbor, parce que vous comprenez bien, les données des citoyens sont protégées aux États-Unis. Suite aux révélations de Snowden, c'est la CEDH ou la CJUE, la CJUE, la Cour de justice de l'Union européenne a décidé que le Safe Harbor, pour les États-Unis, était invalide, parce qu'il n'y avait aucune raison d’avoir confiance dans les fournisseurs américains. Ce qui veut dire que théoriquement les Facebook, Google, Apple, Microsoft, et tous ces gens qui aspirent vos données, qui regardent tout ce que vous faites sur Internet pour vous traquer, vous ficher, devraient normalement avoir leurs données uniquement en Europe typiquement, ou ne plus avoir le droit de les transférer vers les États-Unis en tout cas. Vous vous doutez bien que ça ne va pas aller aussi vite, mais c’est quand même un sujet intéressant. Donc à suivre pour en voir les conséquences surtout. Donc là-dessus, c'est assez rigolo.
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La protection des données au Parlement européen.

Version du 20 avril 2016 à 10:47


Titre : Logiciel libre, Internet, surveillance, écologie : vision commune d’une révolution en cours

Intervenant : Benjamin Sonntag - Agnès de Cornulier

Lieu : Ubuntu Party - Paris

Date : Novembre 2015

Durée : 52 min 47

Pour suivre la vidéo

00' Transcription MO

Bonjour. Ça va être une conférence un peu particulière. D'habitude, à toutes les Ubuntu Party, il y a quelqu’un de la Quadrature du Net, dont je fais partie, qui fait un point un peu sur les sujets de la Quadrature, où est-ce qu'on est, ce qu'on a fait. Cette fois-ci on va faire un truc un peu différent, parce que c'est un peu ce qu'on avait envie de faire, et puis parce que ce ne sont pas les mêmes qui ont fait la conf. Et donc on est partis d'une idée assez rigolote qu'on avait un peu, à deux ou trois, dans le conseil d'orientation et puis des gens proches de la Quadrature. Et puis on a essayé de tirer le bout de ficelle et j'ai plus de questions que de réponses à vous apporter aujourd’hui, mais c'est bien d'avoir des questions. On va essayer de se poser quelques questions.

L'idée c’était de voir, un peu, entre le logiciel libre, la façon dont fonctionne Internet, la surveillance de masse et l'écologie et un peu l'avenir de la planète. Ça tombe bien avec COP 21, on est un peu. Non, on n'y est pas du tout, on oublie COP 21, mais la surveillance, par contre, on est dessus. En quoi c'est quelque chose en relation avec ce qu'on appelle les Communs, qu'est-ce que c'est et, en tout cas de mon point de vue, pourquoi c'est une révolution qui est en cours. Et le petit truc bleu dans le coin, c'est un peu le centre du sujet.

Rapidement, je suis Benjamin Sonntag, je suis un des cofondateurs de la Quadrature du Net. Je ne fais pas beaucoup d'apparitions publiques. C'est plutôt les Jérémie, Philippe ou Félix qui s'y collent et maintenant Adrienne, beaucoup. Mais je suis plutôt le geek de la bande. S'il y a des trucs à faire avec les machines c'est plutôt moi qui m'y colle. Sauf qu’aujourd’hui on ne va pas trop parler des machines

Qui n'a jamais entendu parler de la Quadrature du Net ici ? Avant aujourd'hui ? Non, alors toi je sais que c'est faux, toi je sais que c'est faux donc c'est bon. Donc personne. Tout le monde en a entendu parler donc je ne vais pas vous dire ce que c'est. Association de défense des libertés dans le numérique. Juste un petit truc. Au début on était une association de défense des libertés numériques. Puis c'est devenu il y a quoi, deux ans, une association de défense des libertés dans le numérique. C'est-à-dire qu'on applique des contextes où il y a Internet, la communication, etc. Et en fait, aujourd’hui, on est plus ou moins en train de se demander si on ne va pas juste se faire association de défense des libertés, point. Le contexte politique actuel peut en expliquer beaucoup.

Avant de parler du sujet, de questions qui nous intéressent, je vais vous poser quand même un petit bilan de ce qu'on a fait à la Quadrature du Net dans l'année passée. Eh bien ça été très lourd, je me dis, l'année 2015. Eh bien peut-être de laisser, Agnès, si elle veut nous dire 45 secondes ce qu'on a fait au niveau de la neutralité du net. Est-ce qu'il y en a à qui le concept de neutralité du net est totalement inconnu ici ? OK. Les mêmes qui veulent jouer. Donc c'est bon. La neutralité du net, je vais quand même faire une toute petite définition, c'est l'idée très rapide de dire que, sur Internet, qui est un réseau de communication, où l'intelligence est aux extrémités, c'est-à-dire c'est votre ordinateur ou le serveur en face qui est intelligent, mais les tuyaux entre deux sont bêtes, ils ne font que passer l'information. Il est fondamental et il devrait être politiquement défendu, enfin oui, on devrait défendre politiquement le fait que les opérateurs n'ont pas le droit d'accélérer, ralentir, bloquer ou mettre sur des tuyaux préférentiels les contenus en fonction de leur origine, de leur destination ou de leur nature.

En gros, une lettre à la poste, quel que soit le contenu de la lettre, elle ira à la même vitesse. Il n'y a pas de raison qu'il n'en soit pas de même sur Internet, notamment pour favoriser l'innovation et pour éviter les groupements de gros acteurs. Donc c’est un sujet qui est très débattu au Parlement européen et je vais laisser Agnès nous dire où est-ce qu'on en est très récemment.

Agnès : Donc la neutralité du net. On a eu des négociations sur le règlement européen pendant des années, enfin depuis au moins 2011/12. Le règlement a fini par passer il y a quelques semaines, moins bien que ce qu'on aurait aimé et ce qu'on aurait pu espérer. Moins mauvais que ce qu'on craignait. Mais il n'est pas parfait du tout. On a jusqu’au bout essayé de déposer des amendements pour le renforcer, ils ne sont pas passés, donc on n'est pas contents. Et du coup tout n'est pas perdu, Il y a encore des régulateurs européens réunis au sein de l'Union européenne, au sein du PEREC. Les régulateurs des Télécoms, c'est l'ARCEP en France et puis les ARCEP de tous les pays de l'Union européenne, qui sont réunis au sein de l'Union européenne, au sein d'une organisation qu'on appelle le PEREC. Et ce PEREC a six mois pour sortir des lignes directrices, pour donner aux régulateurs nationaux, donc aux ARCEP, des lignes directrices pour savoir comment appliquer exactement ce règlement dans les différents pays. Et là-dessus on va essayer de jouer encore un petit peu pour renforcer, via ces lignes directrices, le règlement. Donc c'est quelque chose qu'on continue à faire, on continue à travailler avec l'ARCEP et au niveau du PEREC, au niveau européen. Voilà.

Benjamin : Le vert est coupé, ce n'est ps grave. Merci Agnès. C'est un des sujets de la Quadrature sur lequel on est très actifs dès le début de la Quadrature finalement. Il y a un autre qui nous est un peu tombé dessus en début d'année, qui était prévu depuis longtemps, mais forcément, après les attentats de Charlie hebdo, ça a été compliqué à défendre, c’était le projet de loi renseignement qui visait, en gros, à légaliser la surveillance de masse des citoyens par les services secrets français. Et quand je dis des citoyens c'est des citoyens français et des citoyens non français, c'est-à-dire y compris les tuyaux de l'internet qui viennent ou qui sortent du pays. Les services secrets se permettent d'écouter et surtout aussi ce que font les citoyens français, ils se permettent d'écouter en masse. Eh bien le projet de loi renseignement visait à, tout simplement, légaliser ces pratiques et dire que les services ont le droit de faire ça et que c'est normal.

Ce n'est pas ce qu'il y a écrit dans les fondamentaux de notre République. Mais bon ils ont essayé de faire passer cette loi. FDN, FFDN et la Quadrature ont attaqué un certain nombre de décrets, de choses comme ça. On a attaqué, non pas les décrets. On a attaqué au Conseil constitutionnel. On s'est fait rabrouer, on s'est fait rabrouer massivement. Ce projet de loi est passé comme une lettre à la poste sauf un petit bout qui est la partie surveillance internationale, parce qu'en gros c’était vraiment open bar côté surveillance internationale. Et dans tous les cas les institutions de régulation, c'est-à-dire le machin semi-parlementaire chargé de vérifier que les services font bien leur boulot n'a, a priori, quasiment pas de pouvoir, en tout cas surtout pas en amont et en aval, enfin, après coup, il ne va pas pouvoir faire grand-chose. Donc le sous-projet surveillance internationale est ensuite passé comme proposition au de projet de loi et il est aussi passé comme une lettre à la poste. Et on a su récemment que le Conseil constitutionnel le validait en disant : « Non, non, tout va bien, il n'y a pas de problème. »

Donc, citoyens, bienvenue. Tout ce que vous dites sur votre téléphone, sur votre accès Internet, tout ce que vous faites sur Internet est écouté et mis en statistiques par nos services qui sont censés nous protéger. On sait ce que ça a donné avec les révélations Snowden. On a vu tous les abus que les Américains ont fait en la matière. Je ne doute pas que nos services soient capables de faire le même genre d'abus.

Donc, si vous êtes sur Internet protégez-vous. Considérez que vos conversations, comme toutes les enveloppes en Allemagne de l'Est, sous la Stasi, étaient ouvertes, considérez que tout ce que vous faites sur Internet est fiché. Et ce n'est pas une paranoïa. Snowden nous l'a prouvé et même ça ne coûte rien !

La loi numérique de Mme Axelle Lemaire, avec sa consultation bidon. Alors ça a donné un vrai succès, il y a plein de citoyens qui se sont exprimés. Et puis ils ont pris à peu près tout ce qui avait été exprimé et puis ils ont tout jeté, dès que le CSPLA ou d'autres trucs d'ayants droit ont dit : « Non, mais cet article-là est nul, on n'en veut pas ! ». Ils ont dit : « Bon d'accord, fschuit ». Globalement la loi numérique on n'en attend rien, ça ne va pas changer, ça ne va pas défendre la neutralité, ça ne va pas permettre le partage des œuvres entre citoyens. Ça ne va pas avancer grand-chose. Peut-être un peu sur l'open data et encore. Voilà. Donc ce n'est pas gagné.

La loi création avec notre autre ministre, Fleur Pellerin, à venir, pas encore finie d'écrire a priori. On a eu des brouillons, déjà noyautés par les ayants droit ou les ayants tort, je ne sais plus trop, enfin bon. Celle-là aussi elle est bien. Il va falloir probablement taper très fort sur nos députés. Mais comme, de toutes façons, le pouvoir en place, l'exécutif, prend tous les moyens pour aller au forcing, on n'y croit plus trop, mais il va falloir quand même se battre parce que des fois on a des petites victoires de batailles et on se dit « au moins celui-là ils s'en souviendront ». Souvenez-vous d'HADOPI, joli fiasco.

D'autres petits projets de loi comme, par exemple, le projet de loi contre le système prostitutionnel. Ça c'est un des exemples. Avant HADOPI, en gros, quand il y avait des projets de loi, ils ne parlaient pas d'Internet. Ils parlaient de sujets A, B, C. Et puis il y avait d’autres projets de loi qui parlaient du numérique et d'Internet. Après HADOPI, ils ont commencé, peu à peu, à faire des projets de loi sur tous les sujets, comme d'habitude, mais qui, à chaque fois, incluaient un article parlant d'Internet. Et c'est devenu un problème pour la Quadrature, c'est qu'on s'est retrouvés sous l'eau de projets de loi à suivre et d’articles de projets de loi à défendre ou à attaquer. Typiquement, celui sur la lutte contre le système prostitutionnel, comme tous les projets de loi de ce type, ou la défense du consommateur ou la protection des données, etc., à chaque fois ils proposent de pouvoir censurer des sites web sans intervention du juge judiciaire, ce qui n'est pas normal, a priori. Parce que quand on veut faire de la censure, l'atteinte à la liberté d'expression c'est quelque chose de grave. Il n'y a pas de raison qu'on ne passe pas par un juge qui dit : « Bonjour, c’est normal, ce n'est pas normal, il faut bloquer, il ne faut pas bloquer ». Donc ça c'est devenu la petite marotte du gouvernement, celui-là et le précédent d'ailleurs, que de censurer administrativement à tout-va. Donc voilà un autre exemple, on n'est pas bien partis.

Dans les bonnes nouvelles, il y a eu l'invalidation du Safe Harbor qui est en gros le fait que, au niveau européen, on disait s'il y a des pays, considérant l'UE comme un pays, où les données des citoyens sont à peu près bien protégées, on autorise les boîtes privées à faire des transferts de données entre ces pays, entre l'UE et ces pays, sans avoir besoin de règlement particulier, tant que ça respecte les lois du pays cible.

Les États-Unis faisaient partie du Safe Harbor, parce que vous comprenez bien, les données des citoyens sont protégées aux États-Unis. Suite aux révélations de Snowden, c'est la CEDH ou la CJUE, la CJUE, la Cour de justice de l'Union européenne a décidé que le Safe Harbor, pour les États-Unis, était invalide, parce qu'il n'y avait aucune raison d’avoir confiance dans les fournisseurs américains. Ce qui veut dire que théoriquement les Facebook, Google, Apple, Microsoft, et tous ces gens qui aspirent vos données, qui regardent tout ce que vous faites sur Internet pour vous traquer, vous ficher, devraient normalement avoir leurs données uniquement en Europe typiquement, ou ne plus avoir le droit de les transférer vers les États-Unis en tout cas. Vous vous doutez bien que ça ne va pas aller aussi vite, mais c’est quand même un sujet intéressant. Donc à suivre pour en voir les conséquences surtout. Donc là-dessus, c'est assez rigolo.

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La protection des données au Parlement européen.