Libre à vous ! Radio Cause Commune - Transcription de l'émission du 7 janvier 2020

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Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 7 janvier 2019 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : Luk - Xavier Berne - Frédéric Couchet

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 7 janvier 2020

Durée : 1 h 30 min

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Page des références utiles concernant cette émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration :

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcrit : MO

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous. Vous êtes sur la radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm. La radio dispose également d’une application Cause Commune pour téléphone mobile.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre. Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.
Le site web de l’April c’est april.org et vous y trouvez d’ores et déjà une page consacrée à cette émission avec tous les liens et références utiles, les détails sur les pauses musicales et toute autre information en complément de l’émission ainsi que les moyens de nous contacter pour nous faire des retours.

Nous sommes mardi 7 janvier 2020, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

J’ai le plaisir de vous adresser les meilleurs vœux de l’April et de la radio pour l’année 2020. Recevez tous nos vœux de bonheur et de santé pour vous et vos proches. Nous vous souhaitons une excellente écoute pour cette première édition Libre à vous ! de l’année 2020.

Voici maintenant le programme de cette émission.
Nous allons commencer dans quelques instants normalement par la chronique « La pituite de Luk » qui portera sur Amazon.
D’ici cinq à sept minutes nous aborderons notre sujet principal, ce seront des interviews réalisées lors du salon POSS en décembre 2019 à Paris, avec au programme le Conseil national du logiciel libre, le site d’information LinuxFr, le logiciel libre dans l’administration, l’association du Libre de l’école 42, le réseau Libre-entreprise et également des messages de soutien à l’April.
En fin d’émission nous aurons la chronique de Xavier Berne, journaliste à Next INpact qui nous parlera du projet de loi sur l’économie circulaire et plus particulièrement les parties concernant l’obsolescence programmée.
À la réalisation de l’émission aujourd’hui exceptionnellement nous avons le soutien de William Asgavari. Bonjour William.

Tout de suite place au premier sujet.

Nous allons commencer par la chronique « La pituite de Luk ». Luk, est-ce que tu es au téléphone ?

Chronique « La pituite de Luk » sur Amazon

Luk : Oui Fred, je suis là. J’aurais voulu venir mais encore une fois je n’ai pas pu, mais je ne suis pas loin. En fait, je suis coincé aux toilettes. Je n’ose plus sortir. C’est que, tu vois, je viens d’avoir une épiphanie. Ça ne veut pas dire que je viens de déposer une galette. Je parle d’une révélation. Une grande illumination cosmique s’épanouissant sur son socle de faïence.
Je ne l’ai pas vue venir. Ça s’est mis en place soudainement et tout est devenu si clair.
Il faut savoir pour comprendre que je me documente ces temps-ci sur l’achat d’une imprimante. J’étais donc assis sur les toilettes, en train de contempler mon sexe. Je pensais à tous ces sites qui proposent une sélection des meilleures imprimantes de l’année sans qu’on sache s’ils les ont vraiment testées. Je réfléchissais au fait que tous ont un point commun : ils font des liens vers Amazon, comme si on ne pouvait acheter ces produits nulle part ailleurs ! Amazon est absolument omniprésent et c’est là que ça m’a frappé : si ça se trouve Amazon est dieu et Jeff Bezos est son prophète.
Ouais, Amazon est le temple virtuel de la consommation mais possède aussi des magasins dans le monde réel. Il est également dans le salon des gens par l’entremise de sainte Alexa et fournit des serveurs au monde entier.
Amazon est même dans Ubuntu, si ça ce n’est pas un signe de félicité ! Je rappelle, Ubuntu est un principe philosophique porté par Nelson Mandela et Desmond Tutu avant d’être une distrib Linux. C’est du bantou et ça veut dire « mon humanité est inextricablement liée à ce qu’est la vôtre ». Considérant que l’Afrique du Sud est encore plus inégalitaire aujourd’hui qu’au temps de l’apartheid, je perçois bien la cohérence théologique d’associer Amazon et Ubuntu.

Amazon est omniscient. Sainte Alexa particulièrement. Elle connaît tous nos centres d’intérêt et nos désirs, elle a récemment mis la main sur les données de santé des Britanniques. Et ce n’est qu’un début ! Alexa écoute nos prières et y répond. Parfois même elle écoute aussi le reste et elle n’oublie rien.
Un jour, j’avais posté un truc quelque part sur Internet avec des liens vers des sites marchands mais aucun n’était Amazon, hérétique que j’étais. Miracle ! Il n’a pas fallu bien longtemps pour qu’un bon samaritain commente ma publication avec des liens Amazon. Amazon sait tout ce qui se passe dans tous les recoins du Web.

Pour compléter le tableau, Amazon est omnipotent. Il fait tourner tout Internet dans une unique machine virtuelle. C’est lui qui apporte les cadeaux de Noël. Le barbu et ses rênes sont un mythe, en vérité les rênes ce sont des drones de livraison et les petits lutins font les trois huit. Ils connaissent un bonheur régressif qui leur fait faire pipi dans des bouteilles pour rigoler. Ils contractent des TMS [troubles musculo-squelettiques] avec la jouissance normalement ressentie quand on attrape des MST [maladies sexuellement transmissibles].

Amazon a aussi le pouvoir de faire disparaître des trucs. Il l’a fait avec des e-books par la magie des DRM et c’est tellement bien que même la fondation Mozilla en fait la promotion. Mais ce n’est pas tout ! Amazon fait aussi disparaître ses impôts !

Omniprésent, omniscient, omnipotent… La nature divine d’Amazon est une évidence. Mais en même temps, Amazon est bien plus tangible, il offre bien plus qu’une promesse de vie éternelle qui n’engage que ceux qui y croient. Il fait sourire les cartons, maintenant, tout de suite. Amazon est une post-divinité !

Il faut, à ce stade, que je mentionne Bezos, son prophète. Transhumaniste convaincu, on comprend déjà qu’il est plus qu’humain. Bezos nous protège de Donald Trompe grâce au Washington Post qu’il possède et c’est là que ça devient très phallique. Le démon s’appelle « Trompe » et a un prénom de canard, ce n’est déjà pas anodin. En février dernier, le National Enquirer qui est un tabloïd qui roule pour Donald, a soumis Bezos à un chantage à la dick pic, ou photo de pénis en bon français. Ce fut un combat de bites épique. La Trompe à moumoute contre le chibre surpuissant de Bezos. Bien entendu, Bezos a vaincu.
Et un jour, Bezos s’élèvera dans le ciel, dans le puissant phallus ultra-technologique construit par sa compagnie spatiale Blue Origin. C’est pour ça qu’Amazon est masculin. On n’a pas le culte de Mère Nature, hein… Elle est en train d’agoniser sous une montagne de gadgets connectés aussi rapidement obsolescents que rapidement livrés par Amazon.
Dieu est mort, la Nature n’en a plus pour longtemps, place à la toute puissance d’Amazon.

OK, il y a de la concurrence : Apple a un réseau d’églises partout et des hordes d’Apple Fans prosélytes, mais ce n’est qu’une secte minoritaire qui distille un amour tarifé. Google et Facebook sont de faux dieux incapables de miracles dans le réel. Est-ce que Facebook peut livrer un poulet en caoutchouc en moins de 24 heures chez moi ? Non ! Amazon le peut. Leur catéchisme publicitaire est une pure illusion tautologique qui prend l’eau. Quant à Microsoft… Ce dieu caduc qui règne par la terreur et la force. C’est pour ça qu’il triomphe auprès du Pentagone, mais pour combien de temps encore ? Amazon est sur le coup !
Amazon nous offre un vrai culte, ancré dans le réel, avec un SAV impeccable. Il nous laisse notre libre arbitre, celui de choisir le camp du tangible et du vrai.
Allez ! Je sors des toilettes et je lance la guerre sainte. Il y a quatre lettres de trop à GAFAM.

Frédéric Couchet : Merci Luk pour cette belle chronique qui attaque bien l’année. D’ailleurs on nous fait de beaux commentaires sur le salon web en disant notamment que pour le début d’année « La pituite de Luk » attaque fort. Donc merci Luk.

Luk : J’espère que vous allez tous vous joindre à la vraie foi et on se retrouve le mois prochain.

Frédéric Couchet : J’espère surtout qu’on aura la chance de te voir en studio le mois prochain. En décembre on avait prévu de faire une diffusion depuis le salon POSS. Tu avais prévu de venir et tu as organisé une grève pendant tout le mois pour empêcher, finalement, que la diffusion ait lieu.

Luk : C’est exact.

Frédéric Couchet : Quand même, tu es trop fort !
En tout cas on se retrouve effectivement le mois prochain. C’était « La pituite de Luk » je précise avec un « k ». Sur le site de l’April et sur causecommune.fm vous retrouvez une page avec des références d’articles en lien avec la chronique de Luk et le site de Luk c’est incoyableluk.org, je répète Luk avec un « k ». Je te souhaite une belle journée Luk.

Luk : Merci et bonne émission.

Frédéric Couchet : Merci.
Après cette belle chronique nous allons faire une pause musicale. Nous allons écouter El Jefe par San Blas Posse. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause commune.

Pause musicale : El Jefe par San Blas Posse.

Frédéric Couchet : Vous êtes toujours sur Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm. Nous venons d’écouter El Jefe par San Blas Posse, qui est disponible sous licence libre Creative Commons Partage dans les mêmes conditions.

Nous allons passer maintenant à notre sujet principal.

Diffusion d'interviews réalisées en décembre 2019 sur le salon POSS

Frédéric Couchet : Le sujet principal va porter, en fait, sur des interviews que nous avons réalisées lors du salon POSS, Paris Open Source Summit, qui s’est tenue en décembre 2019 à Paris. Comme je le disais précédemment, à la fin de la chronique de Luk, nous avions prévu de diffuser en direct de là-bas, mais les grèves nous ont empêchés de pouvoir diffuser donc j’en ai profité pour faire des interviews sur place. On va diffuser trois blocs d’interviews séparés par une petite pause musicale entre chaque bloc d’interviews.

D’abord petite précision de terminologie parce que le salon s’appelle Paris Open Source Summit, vous entendrez peut-être beaucoup parler d’open source.
Du côté de l’April les termes « logiciel libre » qui vient de l’anglais free software et open source dans le sens donné par l’Open Source Initiative désignent en pratique presque exactement les mêmes logiciels. Mais l’usage de ces deux termes met en valeur des points de vue très différents. Le mouvement du logiciel libre est avant tout un mouvement éthique basé sur le partage de la connaissance et de l’entraide, là où le mouvement open source met en avant les logiciels libres pour leurs avantages techniques, pratiques. De plus, le terme open source a souvent été utilisés pour tromper les personnes et qualifier des logiciels ne répondant pas à la définition de l’Open Source Initiative et donc n’étant pas des logiciels libres. C’est pourquoi le terme « logiciel libre » étant plus précis et renforçant l’importance des libertés, il est utilisé par l’April.
Voilà pour la petite précision.
Maintenant on va diffuser un premier bloc d’interviews qui va durer une quinzaine de minutes et on se retrouve juste après.

Petit problème technique

Frédéric Couchet : Je suis avec Pierre Baudracco, le coprésident du CNLL. Pierre, première question, c’est quoi cette structure ?

Pierre Baudracco : Bonjour Frédéric. Le CNLL pour Conseil National du Logiciel Libre est, en fait, l’union des entreprises du numérique ouvert. C’est une fédération nationale qui regroupe 12 clusters régionaux, c’est-à-dire des associations régionales de professionnels de l’open source : Occitanie, Nouvelle Aquitaine, PACA, Bretagne, Paris, etc.

Frédéric Couchet : Donc toutes les régions.

Pierre Baudracco : Quasiment toutes les régions. On s’est fédéré au niveau du CNLL pour permettre d’avoir une représentativité nationale et faire du lobbying au niveau national et européen aujourd’hui.

Frédéric Couchet : D’accord. Ça existe depuis combien de temps ?

Pierre Baudracco : Le CNLL a dix ans.

Frédéric Couchet : Dix ans. Et toi es coprésident depuis quelques semaines, c’est ça ?

Pierre Baudracco : Depuis quelques mois. Depuis à peu près la rentrée et on a communiqué il y a quelques semaines.

Frédéric Couchet : D’accord. On est à un salon avant tout professionnel, donc le POSS à Paris en décembre 2019, quel est l’état aujourd’hui du marché du logiciel libre en France notamment ?

Pierre Baudracco : On vient justement de publier d’une étude, d’avoir le résultat d’une étude faite par le CNLL, le Syntec Numérique et le Hub open source de Systematic qui dit, en gros, que le marché de l’open source cette année pèse à peu près 5 millions d’euros en France, services et logiciels confondus. Les particularités de ce marché c’est déjà que la France dans le marché européen de l’open source est le pays le plus développé, donc la France est le pays où le marché est le plus important. C’est un marché qui est en croissance entre 7 et 10 % selon les pays européens, ce qui est à peu près le double de la croissance du marché de l’IT. Donc point clé : le marché de l’open source croît deux fois plus vite que le marché de l’IT.

Frédéric Couchet : Pour situer, le marché de l’informatique en général.

Pierre Baudracco : Le marché de l’informatique en général. Pour situer, pour se positionner, il y a dix ans quand on avait la première enquête, c’est quelque chose qu’on fait chaque année, le poids de l’open source/logiciel libre était d’environ 2 %. Aujourd’hui on est à 10 % à peu près du marché de l’informatique en général et avec une projection d’atteindre les 12 % d’ici trois ans.
Autre point clé, la croissance, donc l’emploi : c’est un marché qui pèse cette année à peu près 47 000 emplois selon l’étude et on va gagner 12 000 emplois d’ici quatre ans.

Frédéric Couchet : D’accord. 12 000 emplois d’ici quatre ans. J’ai entendu dire qu’il y a des difficultés d’embauche, de recrutement, pour trouver des bons profils. Est-ce que c’est toujours le cas ces difficultés de recrutement ou, au contraire, vous trouvez des profils facilement ?

Pierre Baudracco : Nous c’est toujours le cas. Le numérique prend de l’ampleur partout. L’open source croît dans le numérique. En général les profils qui sont très open source sont des gens plutôt autonomes, débrouillards, qui aiment bien creuser, donc des profils plutôt recherchés Effectivement, vu qu’à peu près toutes les sociétés sont en train d’essayer de recruter, les petites comme les grosses, les éditeurs comme les intégrateurs, ça met une tension très forte sur le marché de l’emploi et sur la recherche de profils open source.

Frédéric Couchet : Est-ce qu’à ce niveau-là il y a des actions que vous attendriez de l’État, peut-être au niveau de la formation dans les grandes écoles pour, justement, avoir des profils logiciel libre prêts lorsqu’ils ont fini leurs études ?

Pierre Baudracco : Oui. Globalement, en fait, on aimerait que l’État reconnaisse un peu plus cette filière-là, sa capacité d’innovation et sa participation à la reconquête de la souveraineté numérique. L’open source est un point clé là-dessus. Ça veut dire qu’il faut former, donc qu’il faudrait avoir des filières dédiées, avoir des branches ou des cursus open source dans les écoles généralistes d’informatique et on aimerait avoir plus d’incitation au niveau État, gouvernement.

Frédéric Couchet : D’accord. Est-ce qu’en dix ans le CNLL a vu une évolution politique dans les divers gouvernements qui se sont succédé et au sein de l’administration également pour la prise en compte du Libre ? Est-ce que l’évolution est positive de ce côté-là ? C’est-à-dire qu’il y a plus en plus de soutiens de l’État ou est-ce qu’il y a encore des freins qu’il fait lever au-delà de la formation dont on vient de parler ?

Pierre Baudracco : C’est un petit peu compliqué. On a eu beaucoup de soutiens notamment au niveau politique ou via des textes en 2012, la loi Lemaire en 2016. Le problème est un petit peu toujours le même, c’est dans l’application, c’est-à-dire, en fait, le SAV des lois n’est pas effectué.

Frédéric Couchet : Le service après-vente.

Pierre Baudracco : Oui, le service après-vente. Il faut faire appliquer la loi, s’attacher à ce que les gens la respectent. Comme personne ne contrôle, comme personne n’incite, ce qui se passe c’est qu’il y a toujours des marchés qui ne respectent pas ces lois-là. En fait, tant qu’on ne vient pas les dénoncer il ne se passe rien. Donc on a toujours ce sujet-là. L’État parle un peu d’open source. Aujourd’hui il y a recul quand même sur ce sujet, de la DINUM notamment, même si certains, en interne, se battent pour, on sent que l’appui a faibli, que l’open source est un petit moins porteur en ce moment-là au niveau de l’État.

Frédéric Couchet : La DINUM c’est la Direction interministérielle du numérique, anciennement DINSIC, Direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État. Effectivement il y a des gens qui font des choses à l’intérieur, notamment qui sont présents à ce salon, à travers l’initiative Blue Hats, donc des personnes dans l‘administration qui contribuent u logiciel libre et des personnes à l’extérieur. Vous attendez quand même un engagement politique encore plus fort et surtout dans l’application derrière, le suivi, pour s’assurer que la loi qui encouragerait, qui donnerait la priorité au logiciel libre soit vraiment suivie d’effets ?

Pierre Baudracco : Tout à fait, ce serait logique ! La DINUM que tu as décrite, effectivement fait de choses : Bastien Guerry qui est là, qui anime les ateliers Blue Hats toute la journée, montre qu’il y a de l’open source dans l’administration avec des volontés de faire et de diffuser. Aujourd’hui c’est moins suivi au niveau politique. Par exemple le SILL qui était le Socle interministériel de logiciel libre donc un document qui est référencé, qui préconise des logiciels, n’est pas vraiment reconduit, n’est pas certifié cette année. Donc il y a des signaux politiques dangereux pour l’open source et ça c’est dommage parce qu’il y reste des actions, le côté politique ne suit plus trop.

Frédéric Couchet : D’accord. En tout cas, côté clientèle il y a de plus en plus de demandes autour du logiciel libre. Tu as parlé de souveraineté numérique tout à l’heure, il y a eu un rapport récent du Sénat sur la souveraineté numérique dans lequel, justement, il y a un encouragement à mettre en place une politique en faveur du logiciel libre.
Sur un salon tel que POSS, aujourd’hui c’est un peu particulier parce qu’il y a moins de monde que prévu suite aux grèves, mais le type de public qui vient, c’est un nouveau public ? Ou finalement c’est le public traditionnel de clients habituels ?

Pierre Baudracco : Effectivement, c’est dur de juger sur cette année. Au POSS qui est un salon généraliste sur l’open source, c’est la grande messe de l’open source, du coup le public est assez varié. Il y a toute une partie très professionnelle, expositions professionnelles, offres, qui montre la maturité côté marché. Là on va trouver un public de DSI, de décideurs, qui viennent voir quels types de solutions, quels types d’infra, quels types de stratégie puisqu’il y a aussi un programme très important de conférences sur le sujet. On va également retrouver toute la partie communauté de techs qui échangent sur le côté technique, les frameworks, les dévops, l’intégration, etc., les nouveaux enjeux comme ???, etc., également présents, mais on va trouver aussi le marché réel. Et là on va retrouver tout un tas de ce qu’on appelle des geeks ou des techs passionnés, du contributeur à la personne qui a un simple intérêt et là on retrouve toute la sphère technologique, technique qui est représentée.

Frédéric Couchet : D’accord. Malgré les conditions particulières de ce salon, malgré le manque de soutien politique, il y a toujours la motivation et finalement, comme tu le disais au départ, il y a un développement du logiciel libre, des marchés aussi peut-être par ailleurs. Les choses sont plutôt positives quelque part, évoluent positivement.

Pierre Baudracco : Globalement les choses sont positives parce que l’open source aujourd’hui ne fait plus peur, est devenue quasiment standard. Maintenant il y a des enjeux, les géants du cloud, les GAFAM, amis ou ennemis, contribuent mais, en même temps, ils deviennent hégémoniques, donc ils écrasent un peu tout le reste. Donc il y a vraiment des choses à penser, notamment il y a très certainement un modèle à l’européenne à penser. Donc éviter d’avoir des géants hégémoniques qui ensuite décident tout ce qu’ils veulent, mais plutôt répartir la confiance, les solutions, et équilibrer les acteurs, avoir de nombreux acteurs, avoir une sorte de cercle vertueux de confiance, en termes d’acteurs, en termes de règle et pour ça l’open source est un bon critère puisque c’est un critère de transparence, un peu d’équité d’accès aux informations.

Frédéric Couchet : D’accord. Pierre je te remercie. Est-ce que tu souhaites ajouter quelque chose ?

Pierre Baudracco : Non, Merci à toi Frédéric. Merci à l’April de soutenir le combat qui est mené depuis tant d’années et en espérant que vous soyez toujours aux côtés du POSS et de l’open source même si je n’ai pas beaucoup de doutes.

Frédéric Couchet : Voilà. Même si nous on emploie évidemment le terme « logiciel libre ». En tout cas rendez-vous l’an prochain, je ne sais pas si le salon aura lieu au même endroit.

Pierre Baudracco : À priori ça ne sera pas au même endroit ça serait plutôt au Palais des Congrès.

Frédéric Couchet : D’accord. OK. On verra ça. En tout cas merci. C’était Pierre Baudracco coprésident du CNLL. Merci Pierre.

Pierre Baudracco : Merci Frédéric.