Différences entre les versions de « Libre à vous ! Radio Cause Commune - Transcription de l'émission du 2 juin 2020 »

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==Entretien avec Nicolas Dandrimont, ancien président de Debian France et membre de l'équipe travaillant sur le projet Software Héritage==
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<b>Étienne Gonnu : </b>Normalement j’ai le plaisir d’être avec Nicolas Dandrimont. Est-ce que tu es avec nous ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Oui bonjour.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Comment ça va déjà ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Tout va bien avec ce beau temps et les oiseaux qui chantent dehors c’est assez chouette.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Oui, ça fait du bien au moral, c’est sûr.<br/>
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On avait eu le plaisir de te recevoir dans une émission sur les distributions GNU/Linux, le30 avril 2019, on mettra le lien sur la page de l’April, pour nous parler de Debian puisque tu es très engagé dans la communauté de cette distribution libre, tu as même été président de Debian France, si je ne me trompe pas. Pour nos auditeurs et auditrices qui n’auraient pas le plaisir de te connaître, est-ce que tu pourrais te présenter rapidement s’il te plaît ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Oui. Nicolas Dandrimont, je suis développeur de logiciels libres, depuis longtemps maintenant, ça va faire 12 ans à peu près. Je suis pas mal actif effectivement dans Debian et je travaille en tant qu’ingénieur dans le projet Software Heritage qui est un projet d’archivage de tout le patrimoine logiciel de l’humanité.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Une belle ambition en tout cas.<br/>
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Du coup j’imagine que le confinement a dû potentiellement t’impacter, comme tout le monde d’ailleurs. Professionnellement dans le cadre de ton travail sur Software Heritage et dans le cadre de ton engagement associatif dans la communauté Debian, en commençant par l’un ou par l’autre comme tu le sens, est-ce que tu peux nous expliquer comment a pu se passer cette période pour toi et pour le projet ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Je crois que le changement principal c’est bien sûr la distanciation physique et le fait que ce soit très compliqué de se rencontrer physiquement. C’est moins vrai sur Debian qui est quand même un projet sur lequel les gens travaillent en ligne donc on a l’habitude de travailler de manière désynchroniser et à distance. Plus encore, effectivement, pour mon travail au jour le jour sur Software Heritage : c’était assez bizarre du jour au lendemain de se retrouver isolé chez soi sans pouvoir discuter avec son équipe à la pause café. On va dire que ça nous a mis la tête première dans une modalité complètement <em>remote</em>. Je pense que c’est quelque chose que va contribuer au moins pendant quelques mois, puisqu’il y a assez peu de chance qu’on retrouve nos bureaux avant la fin de l’été si ce n’est plus tard.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Du coup je te propose qu’on commence par Software Heritage, puisque tu abordes la question. Vous avez été amenés à télétravailler, j’imagine que du fait de vos profils de travail ce n’était pas trop compliqué techniquement, mais tu pourras me corriger. C’est quelque chose que vous avez déjà l’habitude de faire ou est-ce que ça a été provoqué justement par la situation ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>C’est quelque chose qu’on est habitué à faire à la marge, c’est-à-dire qu’actuellement en tout cas, tous les membres de l’équipe travaillent sur le même site, du coup on se retrouve au bureau tous les jours en temps normal. Mais là, effectivement, on s’est retrouvés à passer en distant par défaut et je pense qu’il y a du bon et du moins bon. C’est assez clair que c’est important pour un projet comme le nôtre qui a une portée mondiale et qui fait un gros travail de collaboration de faire en sorte que nos échanges puissent être suivis même à l’extérieur. Tout notre travail est ouvert à l’extérieur, d’ailleurs c’est quelque chose qu’on veut encore plus favoriser à l’avenir. Par exemple, là on a commencé à travailler sur l’archivage d’une forge de logiciels qui s’appelle Bitbucket, qui a annoncé il y a quelques mois qu’ils allaient fermer au mois de mars – ils ont repoussé cette fermeture avec la pandémie. On a travaillé avec la NLnet Foundation qui est une fondation internationale pour le financement et avec Octobus qui est une entreprise française pour la réalisation du travail à l’archivage de Bitbucket, en collaborant, du coup, avec une équipe extérieure, ce qui est une nouveauté pour nous.
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<b>Étienne Gonnu : </b>OK. C’est important.<br/>
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Tu as déjà évoqué Software Heritage. Je pense que tout le monde n’a pas forcément en tête ce qu’est Software Heritage et que ça pourrait justement éclairer ces informations que tu nous donnes. On avait reçu en février 2019 Roberto Di Cosmo qui est à l’initiative du projet, on mettra le lien vers l’émission. Il faut quand même souligner à quel point ce projet est démentiel et fondamental dans son principe. Est-ce que tu pourrais nous le vendre un petit peu ? Nous rappeler un peu ce que c’est dans les grandes lignes ? Plus concrètement, on sait que le projet est porté au sein de l’Inria, c’est vraiment un projet de recherche. Je ne sais pas combien vous êtes maintenant à bosser dessus. Est-ce que tu pourrais nous donner ces quelques éléments pour remettre dans le contexte ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Bien sûr. J’aurais certainement dû le mentionner au début. Software Heritage c’est la bibliothèque d’Alexandrie du logiciel. L’objectif du projet c’est de construire une archive pérenne et intégrale de tout le code source des logiciels développés par l’humanité, que ce soit des logiciels qui sont développés aujourd’hui sous la forme de logiciels libres ou des logiciels plus anciens que l’on souhaite archiver pour la postérité.<br/>
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En fait, notre projet c’est effectivementune plateforme qui est impulsée par Inria, le grand laboratoire de recherche publique en informatique en France. Ce projet est à vocation internationale, il a vocation aussi à sortir de juste un projet de recherche et à être un projet qui est utilisé évidemment par la communauté de la recherche, mais aussi par l’industrie pour ses besoins et même en tant qu’objet d’héritage culturel de notre société.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Clairement en tant que libriste, défendant l’éthique du logiciel libre, on voit immédiatement à quel point garder ces archivages pour finalement maintenir la connaissance accessible est extrêmement important. Peut-être qu’on peut même dire que pendant cette période de pandémie où les outils de communication ont joué un rôle fondamental, on voit peut-être là, encore une fois, l’importance d’avoir des outils de qualité dans la durée, sur lesquels on pourra reconstruire. Peut-être que je suis un peu utopiste dans la manière dont je le décris, mais il me semble que c’est à nouveau révélateur de l’importance d’avoir ce genre de bibliothèque.
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Je pense que tu as tout à fait raison. Je pense que ce n’est pas utopique et, effectivement, cette situation de pandémie nous l’envoie en plein face en fait. On a besoin de partage des connaissances de manière massive pour la collaboration de la société toute entière. Pour faire ça, on a besoin de se préparer pour le futur et de construire des infrastructures qui soient transverses, pérennes, collaboratives, sur lesquelles des gens peuvent collaborer de manière ouverte.<br/>
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Par exemple nous, à Sotware Heritage, on a pu avoir des retours de certaines personnes qui nous disent on a retrouvé des logiciels qui étaient des objets de recherche il y a cinq ans, dont l’hébergement a disparu et qui, aujourd’hui, reprennent un intérêt nouveau. Je crois que ça c’est le cœur de notre mission et de notre volonté.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Il y a quand même eu un impact de cette pandémie, des enjeux qui en ressortent pour Software Heritage du coup.<br/>
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Pour revenir à ton ???, pour revenir un peu à cette idée du télétravail parce que ça a été un peu une arlésienne nos chroniques de prises de nouvelles, comment s’est passé pour toi le télétravail ? Est-ce que c’est vraiment un truc que tu avais, même à la marge, l’habitude de faire, que tu apprécies ou au contraire que tu n’aimes pas ? Comment tu as pu te mettre par rapport à ton travail sur ce projet ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Le télétravail c’était vraiment quelque chose que je n’ai jamais fait entre guillemets « sérieusement ». C’est-à-dire que je n’ai pas d’installation correcte chez moi pour faire du télétravail en temps normal. Là j’ai eu la chance de pouvoir me déplacer chez ma compagne dans un espace plus grand, dans lequel on a pu s’organiser pour avoir chacun des espaces pour travailler sans s’embêter les uns les autres. J’ai récupéré du matériel de mon bureau, en fait j’ai reconfiguré mon bureau chez moi. Mais, comment dire, si on passe à un mode plus pérenne de travail à distance, de télétravail, il est clair que toutes les bonnes pratiques d’ergonomie, de séparation du privé et du travail ne sont pas vraiment mises en place aujourd’hui, donc on est toujours sur entre guillemets du « télétravail d’urgence » et pas sur du pérenne.
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<b>Étienne Gonnu : </b>OK. Effectivement, donc pour la qualité du travail j’imagine que ça peut avoir un impact.<br/>
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Est-ce que tu voulais rajouter quelque chose sur Software Heritage, n’hésite pas à en faire de la pub, sinon on peut passer à l’autre sujet qui t’intéresse.
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>J’ai juste une petite mention. Je parlais de notre collaboration avec l’équipe d’Octobus pour l’archivage de Bitbucket. On a d’autres bourses qui sont ouvertes grâce à la fondation Sloan. Donc si des gens sont intéressés à collaborer avec nous pour améliorer la couverture de notre archive sur les codes sources de logiciels, il y a sur notre dite web, sur notre blog softwareheritage.org tout attaché, un appel à projet qui est ouvert pour les gens qui seraient des développeurs et qui seraient intéressés à venir nous aider.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Ça marche. On ne manquera pas de relayer et je te demanderai les liens qu’on pourra mettre sur la page consacrée à l’émission pour que les personnes les retrouvent facilement, tu as cité Bitbucket, Sloan Foundation, Octobus, on pourra mettre les liens dessus. En tout cas le message est passé.<br/>
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Du coup je te propose de parler de Debian qui a en plus une actualité ce week-end, les MiniDebConfs Online. C’était une nouveauté il me semble, ou j’ai peut-être mal lu, et j’imagine que c’est en répercutions à la situation de pandémie et de distanciation.
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Oui, c’était une première, effectivement. Le projet Debian est un projet qui vit sur Internet. C’est un projet qui est complètement distribué. Les gens sont aux quatre coins du monde et contribuent au projet. On a régulièrement des évènements en présentiel, des Debconfs, des conférences Debian, et on a des MiniDebConfs qui sont des minis conférences Debian qui ont lieu à peu près sur un week-end, qui sont des évènements de plus petite nature où développeurs, utilisatrices et tous les gens intéressés par Debian peuvent effectivement venir et voir ce qui se passe dans la distribution.<br/>
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Ça fait quelques mois, un petit peu plus d’un an qu’on discute d’améliorer la participation à distance à ces évènements parce que, d’un point de vue écologique par exemple, faire voler la moitié de la planète vers un site commun ça a un impact très important. Peu importe le pays que tu choisis pour héberger un évènement, tu empêches des gens de s’y déplacer pour des raisons politiques, pour des raisons sociales, etc., donc ça fait un bon moment qu’on se dit que ce serait intéressant de faire des évènements un peu plus distribués, un peu moins physiques.<br/>
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Là, effectivement, on a pris un peu – je dis « on », mais c’est le travail d’une équipe, j’ai juste participé à la marge – la balle au rebond cette situation de pandémie mondiale pour organiser notre première Mini DebConf <em>on line</em>. Donc pendant le week-end passé des développeurs, des développeuses se sont rassemblés et ont fait des présentations de leur travail dans Debian et autour de Debian avec des interactions en ligne à distance. C’était une première, je pense que ça a été un succès. Évidemment, aujourd’hui ce sont des conférences qui étaient plutôt axées développeurs, c’est vrai que les MiniDebConfs ont plus de discussions techniques en profondeur que la DebConf, la grosse conférence DebConf. C’est aussi en anglais, donc ce n’est pas forcément très accessible à tout le monde, mais ce sont des formes d’interaction et de conférences qu’on est en train de développer.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Super. Tu devances une question d’un auditeur qui nous pose exactement ces questions-là : est-ce qu’il n’y aura pas une volonté d’inclure des conférences plus grand public vu le niveau de connaissance technique exigé et la barrière potentielle de la langue. Écoute, tu devances, du coup, la question.<br/>
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Quel bilan en tires-tu ? J’imagine que ça a été riche pour toi, d’une part parce qu’il y avait peut-être un peu d’enjeu technique à mettre ça en place et après dans la qualité. Est-ce que tu en sentis un impact ? Est-ce que c’était finalement la même qualité que tu as pu retrouver dans des MiniDebConfs précédentes ? Qu’en tires-tu finalement ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>D’un point de vue technique c’était assez intéressant parce que l’équipe vidéo s’est concentrée du coup sur l’utilisation d’outils libres à 100 % avec du déploiement, à ma connaissance, sur Debian. Du coup c’était un bon test, peut-être pas un test de stress, mais au moins un test d’intégration de tous les outils ; il y avait de l’IRC pour la discussion en direct, il y avait du Jistsi pour la prise de parole des conférencières et conférenciers. Effectivement on avait un petit peu d’infrastructure à mettre en place, ça s’est plutôt bien intégré à notre système habituel de diffusion en direct, c’était assez confortable. On va se retrouver à devoir faire la grande DebConf, celle qui dure une semaine complète aussi à distance, à priori, il me semble que la décision finale a été prise cette semaine. Du coup, là on va effectivement avoir un vrai test des modalités d’interaction parce que toutes ces rencontres entre développeurs ont un gros impact sur la qualité de la collaboration entre ces gens qui sont tous distribués à droite à gauche sur la planète. Ce sont des évènements où tu peux avoir des conversations avec une bande passante très élevée de manière synchrone donc ça permet de résoudre tout un tas de problèmes que tu peux avoir si tu es à distance. Pour ça, effectivement, on a réussi à avoir ce qu’on appelle en anglais une <em>hallway track</em> c’est un peu, comment dire, la série de conférences du couloir, en gros c’est un salon de discussions libres où tu peux discuter de choses et d’autres. Ça ne remplace pas des interactions de vive voix, mais c’était quand même assez chouette de voir une partie des copains et des copines en direct.
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<b>Étienne Gonnu : </b>J’imagine. Tu parles de discussions informelles à distance. Il y a eu potentiellement un enjeu, j’imagine, de modération pour que ça reste audible, pour que les personnes qui souhaitent s’exprimer puissent le faire, ce qui est déjà un enjeu en présentiel physique parce qu’on sait qu’il y a des personnes pour lesquelles la prise la parole est peut-être moins évidente, d’autres qui ont tendance à prendre plus de place. Est-ce que c’est quelque chose que vous aviez anticipé ? Est-ce que vous avez laissé faire les choses naturellement ? Comment ça s’est passé de ce point de vue ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>En tout cas, pour ce qui est des conférences qui étaient planifiées, on avait une seule discussion de groupe. Pour cette discussion-là, en fait, on avait séparé les intervenants et intervenantes dans un <em>chat</em> Jitsi séparé, avec un mot de passe. Du coup ils se modéraient entre eux et on n’a pas fait spécifiquement de système pour améliorer l’équité dans la prise de parole, c’est quelque chose qu’on ne fait pas non plus en vrai. Je pense que c’est aussi un problème en vrai, mais on n’a pas encore travaillé pour des solutions pour ça, malheureusement.
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<b>Étienne Gonnu : </b>OK. ??? j’imagine qu’on améliore, c’est aussi l’intérêt d’améliorer à chaque fois, au moins d’être vigilant sur les potentiels problèmes.<br/>
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On pose une question sur le salon #libreavous de Cause Commune : les conf ont-elles été captées, j’imagine que oui, et seront-elles visionnables bientôt ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Les conférences ont effectivement été enregistrées en direct. Je pense qu’il y a déjà une partie des conférences qui est disponible sur notre archive vidéo. J’ai vu des discussions de gens de l’équipe vidéo sur la publication. Si ce n’est pas le cas ce sera le cas, je pense, d’ici la fin de la semaine et ce sera aussi publié sur notre instance de PeerTube et sur YouTube parce qu’il y a des gens qui utilisent toujours ça.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Précisons PeerTube, je n’aime pas forcément le terme « alternative », mais un système de partage de vidéos basé sur du logiciel libre qui avait été mis en place par Framasoft. C’est toujours bien aussi de s’appuyer sur ces outils même si on sait qu’ils n’ont pas la même portée. Il faut les faire vivre, justement, c’est un super projet.<br/>
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Je vois que le temps avance. Est-ce que tu aurais une dernière chose que tu aurais aimé dire sur Debian, MiniDebConf, sur un autre sujet qui te tient à cœur et qui n’a pas été évoqué ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Sur Debian, pendant cette MiniDebConf, il y a une tendance qui se confirme qui est que le projet a de plus en plus conscience de sa difficulté à recruter de nouvelles bonnes volontés et commence à travailler sérieusement pour améliorer l’intégration de nouvelles contributrices, de nouveaux contributeurs. Si vous avez envie de contribuer, quel que soit votre niveau de compétence, il ne faut surtout pas hésiter à vous rapprocher de associations de cadres (???), il y a une association Debian France qui est active en France. On a prévu une MiniDebConf au mois d’octobre, si je ne dis pas de bêtise, j’espère que la situation sanitaire permettra qu’elle ait lieu dans les meilleures conditions. Je vous invite à vous rapprocher de Debian France si ça vous intéresse de contribuer.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Le message est à nouveau passé. Il me semble, en plus, que vous avez quand même historiquement à Debian une vraie vigilance pour créer des espaces accueillants, sécurisants, pour toutes les personnes, en fait, quelle que soit leur situation, pour les femmes notamment, pour les personnes transgenres, pour les personnes racisées. Il me semble qu’il y quand même une vigilance de ce point de vue, peut-être que je me trompe.
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Non, tu as raison, c’est un travail de longue haleine. En tout cas j’ai l’impression qu’il y a des améliorations visibles de mois en mois sur ce sujet.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Dernière question de métrique et après on te laissera : cpm demande combien de confs et combien d’intervenants il y a eu ce week-end ?
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Ce week-end il y a eu une dizaine de conférences et je pense une quinzaine d’intervenantes et d’intervenants en tout. Mon comptage des personnes qui ont visionné le stream c’est autour de 230/250, c’est en nombre d’adresses IP. C’est une surestimation du nombre de personnes qui ont vu les conférences en direct.
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<b>Étienne Gonnu : </b>En direct, ça me paraît tout à fait honorable pour une première.
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>C’est assez impressionnant vu la communication limitée qui a été faite autour de la conférence, c’est une très bonne surprise.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Parfait. Vous le méritez, je trouve.<br/>
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Un grand merci, Nicolas Dandrimont de Debian et de Software Heritage. Grand merci d’avoir pris ce temps avec nous et je te souhaite une excellente fin de journée.
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<b>Nicolas Dandrimont : </b>Merci beaucoup de m’avoir reçu et bonne émission.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Merci,<br/>
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Nous allons faire une pause musicale avant de passer au sujet suivant. Nous allons écouter <em>Intro</em> par Quantum Jazz. On se retrouve juste après. Je vous souhaite une belle journée à l’écoute de Cause Commune, 93.1 FM, la voix des possibles.
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<b>Pause musicale : </b><em>Intro</em> par Quantum Jazz.
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<b>Voix off : </b> Cause Commune, cause-commune.fm, 93.1.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Nous venons d’écouter <em>Intro</em> par Quantum Jazz. <em>Intro</em> bien sûr étant l’introduction de leur excellent album, disponible sous licence libre Creative Commons, Partage dans les mêmes conditions. Vous retrouverez les références sur le site de l’April, april.org.<br/>
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Vous écoutez l’émission <em>Libre à vous!</em> sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm. Je suis Étienne Gonnu en charge des affaires publiques pour l’April.<br/>
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Nous allons maintenant passer au sujet suivant.
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==Échange avec Christian Quest, collaborateur de la députée Paula Forteza, coprésidente du groupe Écologie Démocratie Solidarité, sur le travail parlementaire à l'Assemblée nationale==
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<b>Étienne Gonnu : </b>Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui porte donc sur le travail parlementaire.<br/>
  
 
==Entretien avec Nicolas Dandrimont, ancien président de Debian France et membre de l'équipe travaillant sur le projet Software Héritage, que nous avions reçu lors du Libre à vous ! du 30 avril 2019 sur les distributions GNU/Linux==
 
==Entretien avec Nicolas Dandrimont, ancien président de Debian France et membre de l'équipe travaillant sur le projet Software Héritage, que nous avions reçu lors du Libre à vous ! du 30 avril 2019 sur les distributions GNU/Linux==
  
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Normalement j’ai le plaisir d’être avec Nicolas Dandrimont.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Normalement j’ai le plaisir d’être avec Nicolas Dandrimont.

Version du 4 juin 2020 à 13:19


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 2 juin 2020 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : Véronique Bonnet - Yann Kervran - Stéphane Crozat - jums - Magali Garnero - Frédéric Couchet - William Agasvari à la régie

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 2 juin 2020

Durée : 1 h 30 min

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Page des références utiles concernant cette émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration :

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.

Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcrit MO

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Étienne Gonnu : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
L’envers du décor du travail parlementaire, c’est le sujet principal de l’émission du jour avec également au programme des nouvelles de Nicolas Dandridont avec qui nous échangerons sur Debian et sur Software Heritage, des nouvelles de Laurent Costy sur les associations dans la période de confinement.
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Vous êtes sur la radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm. Cause Commune, sur la bande FM, c’est de midi à 17 heures puis de 21 heures à 4 heures en semaine, du vendredi 21 heures au samedi 16 heures et le dimanche de 14 heures à 22 heures. Sur Internet c’est 24 heures sur 24. La radio dispose également d’une application Cause Commune pour téléphone mobile et elle diffuse désormais en DAB+ 24 heures sur 24 ; le DAB+ c’est la radio numérique terrestre avec notamment un meilleur son et c’est le terme officiel choisi par le CSA. Le DAB+ est gratuit, sans abonnement, il faut juste avoir un récepteur compatible avec la réception DAB+.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre. Je suis Étienne Gonnu chargé des affaires publiques pour l’April.
Le site web de l’April est april.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à cette émission avec tous les liens et références utiles, les détails sur les pauses musicales et toute autre information utile en complément de l’émission, et également les moyens de contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours en indiquant ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration.

Nous sommes mardi 2 juin 2020, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

Si vous souhaitez réagir, poser une question pendant ce direct, n’hésitez pas à vous connecter sur le salon web de la radio. Pour cela rendez-vous sur le site de la radio, causecommune.fm, cliquez sur « chat » et retrouvez-nous sur le salon dédié à l’émission.
Nous vous souhaitons une excellente écoute.

Voici maintenant le programme détaillé de cette émission.

  • Nous commencerons donc par prendre des nouvelles de Nicolas Dandrimont de la communauté et qui travaille sur le fabuleux projet Software Heritage.
  • D’ici 15/20 minutes nous aborderons notre sujet principal qui portera sur le travail parlementaire. Nous devions recevoir la députée Paula Forteza mais étant finalement indisponible, nous aurons le plaisir de recevoir un de ses collaborateurs parlementaires, libriste convaincu, Christian Quest.
  • En fin d’émission nous prendrons des nouvelles de Laurent Costy, vice-président de l’April, animateur du groupe Libre Association et nous ferons un point avec lui sur comment les associations ont pu, ont dû même s’adapter pendant la période de confinement.

À la réalisation de l’émission William Agasvari

Tout de suite place au premier sujet.

Entretien avec Nicolas Dandrimont, ancien président de Debian France et membre de l'équipe travaillant sur le projet Software Héritage

Étienne Gonnu : Normalement j’ai le plaisir d’être avec Nicolas Dandrimont. Est-ce que tu es avec nous ?

Nicolas Dandrimont : Oui bonjour.

Étienne Gonnu : Comment ça va déjà ?

Nicolas Dandrimont : Tout va bien avec ce beau temps et les oiseaux qui chantent dehors c’est assez chouette.

Étienne Gonnu : Oui, ça fait du bien au moral, c’est sûr.
On avait eu le plaisir de te recevoir dans une émission sur les distributions GNU/Linux, le30 avril 2019, on mettra le lien sur la page de l’April, pour nous parler de Debian puisque tu es très engagé dans la communauté de cette distribution libre, tu as même été président de Debian France, si je ne me trompe pas. Pour nos auditeurs et auditrices qui n’auraient pas le plaisir de te connaître, est-ce que tu pourrais te présenter rapidement s’il te plaît ?

Nicolas Dandrimont : Oui. Nicolas Dandrimont, je suis développeur de logiciels libres, depuis longtemps maintenant, ça va faire 12 ans à peu près. Je suis pas mal actif effectivement dans Debian et je travaille en tant qu’ingénieur dans le projet Software Heritage qui est un projet d’archivage de tout le patrimoine logiciel de l’humanité.

Étienne Gonnu : Une belle ambition en tout cas.
Du coup j’imagine que le confinement a dû potentiellement t’impacter, comme tout le monde d’ailleurs. Professionnellement dans le cadre de ton travail sur Software Heritage et dans le cadre de ton engagement associatif dans la communauté Debian, en commençant par l’un ou par l’autre comme tu le sens, est-ce que tu peux nous expliquer comment a pu se passer cette période pour toi et pour le projet ?

Nicolas Dandrimont : Je crois que le changement principal c’est bien sûr la distanciation physique et le fait que ce soit très compliqué de se rencontrer physiquement. C’est moins vrai sur Debian qui est quand même un projet sur lequel les gens travaillent en ligne donc on a l’habitude de travailler de manière désynchroniser et à distance. Plus encore, effectivement, pour mon travail au jour le jour sur Software Heritage : c’était assez bizarre du jour au lendemain de se retrouver isolé chez soi sans pouvoir discuter avec son équipe à la pause café. On va dire que ça nous a mis la tête première dans une modalité complètement remote. Je pense que c’est quelque chose que va contribuer au moins pendant quelques mois, puisqu’il y a assez peu de chance qu’on retrouve nos bureaux avant la fin de l’été si ce n’est plus tard.

Étienne Gonnu : Du coup je te propose qu’on commence par Software Heritage, puisque tu abordes la question. Vous avez été amenés à télétravailler, j’imagine que du fait de vos profils de travail ce n’était pas trop compliqué techniquement, mais tu pourras me corriger. C’est quelque chose que vous avez déjà l’habitude de faire ou est-ce que ça a été provoqué justement par la situation ?

Nicolas Dandrimont : C’est quelque chose qu’on est habitué à faire à la marge, c’est-à-dire qu’actuellement en tout cas, tous les membres de l’équipe travaillent sur le même site, du coup on se retrouve au bureau tous les jours en temps normal. Mais là, effectivement, on s’est retrouvés à passer en distant par défaut et je pense qu’il y a du bon et du moins bon. C’est assez clair que c’est important pour un projet comme le nôtre qui a une portée mondiale et qui fait un gros travail de collaboration de faire en sorte que nos échanges puissent être suivis même à l’extérieur. Tout notre travail est ouvert à l’extérieur, d’ailleurs c’est quelque chose qu’on veut encore plus favoriser à l’avenir. Par exemple, là on a commencé à travailler sur l’archivage d’une forge de logiciels qui s’appelle Bitbucket, qui a annoncé il y a quelques mois qu’ils allaient fermer au mois de mars – ils ont repoussé cette fermeture avec la pandémie. On a travaillé avec la NLnet Foundation qui est une fondation internationale pour le financement et avec Octobus qui est une entreprise française pour la réalisation du travail à l’archivage de Bitbucket, en collaborant, du coup, avec une équipe extérieure, ce qui est une nouveauté pour nous.

Étienne Gonnu : OK. C’est important.
Tu as déjà évoqué Software Heritage. Je pense que tout le monde n’a pas forcément en tête ce qu’est Software Heritage et que ça pourrait justement éclairer ces informations que tu nous donnes. On avait reçu en février 2019 Roberto Di Cosmo qui est à l’initiative du projet, on mettra le lien vers l’émission. Il faut quand même souligner à quel point ce projet est démentiel et fondamental dans son principe. Est-ce que tu pourrais nous le vendre un petit peu ? Nous rappeler un peu ce que c’est dans les grandes lignes ? Plus concrètement, on sait que le projet est porté au sein de l’Inria, c’est vraiment un projet de recherche. Je ne sais pas combien vous êtes maintenant à bosser dessus. Est-ce que tu pourrais nous donner ces quelques éléments pour remettre dans le contexte ?

Nicolas Dandrimont : Bien sûr. J’aurais certainement dû le mentionner au début. Software Heritage c’est la bibliothèque d’Alexandrie du logiciel. L’objectif du projet c’est de construire une archive pérenne et intégrale de tout le code source des logiciels développés par l’humanité, que ce soit des logiciels qui sont développés aujourd’hui sous la forme de logiciels libres ou des logiciels plus anciens que l’on souhaite archiver pour la postérité.
En fait, notre projet c’est effectivementune plateforme qui est impulsée par Inria, le grand laboratoire de recherche publique en informatique en France. Ce projet est à vocation internationale, il a vocation aussi à sortir de juste un projet de recherche et à être un projet qui est utilisé évidemment par la communauté de la recherche, mais aussi par l’industrie pour ses besoins et même en tant qu’objet d’héritage culturel de notre société.

Étienne Gonnu : Clairement en tant que libriste, défendant l’éthique du logiciel libre, on voit immédiatement à quel point garder ces archivages pour finalement maintenir la connaissance accessible est extrêmement important. Peut-être qu’on peut même dire que pendant cette période de pandémie où les outils de communication ont joué un rôle fondamental, on voit peut-être là, encore une fois, l’importance d’avoir des outils de qualité dans la durée, sur lesquels on pourra reconstruire. Peut-être que je suis un peu utopiste dans la manière dont je le décris, mais il me semble que c’est à nouveau révélateur de l’importance d’avoir ce genre de bibliothèque.

Nicolas Dandrimont : Je pense que tu as tout à fait raison. Je pense que ce n’est pas utopique et, effectivement, cette situation de pandémie nous l’envoie en plein face en fait. On a besoin de partage des connaissances de manière massive pour la collaboration de la société toute entière. Pour faire ça, on a besoin de se préparer pour le futur et de construire des infrastructures qui soient transverses, pérennes, collaboratives, sur lesquelles des gens peuvent collaborer de manière ouverte.
Par exemple nous, à Sotware Heritage, on a pu avoir des retours de certaines personnes qui nous disent on a retrouvé des logiciels qui étaient des objets de recherche il y a cinq ans, dont l’hébergement a disparu et qui, aujourd’hui, reprennent un intérêt nouveau. Je crois que ça c’est le cœur de notre mission et de notre volonté.

Étienne Gonnu : Il y a quand même eu un impact de cette pandémie, des enjeux qui en ressortent pour Software Heritage du coup.
Pour revenir à ton ???, pour revenir un peu à cette idée du télétravail parce que ça a été un peu une arlésienne nos chroniques de prises de nouvelles, comment s’est passé pour toi le télétravail ? Est-ce que c’est vraiment un truc que tu avais, même à la marge, l’habitude de faire, que tu apprécies ou au contraire que tu n’aimes pas ? Comment tu as pu te mettre par rapport à ton travail sur ce projet ?

Nicolas Dandrimont : Le télétravail c’était vraiment quelque chose que je n’ai jamais fait entre guillemets « sérieusement ». C’est-à-dire que je n’ai pas d’installation correcte chez moi pour faire du télétravail en temps normal. Là j’ai eu la chance de pouvoir me déplacer chez ma compagne dans un espace plus grand, dans lequel on a pu s’organiser pour avoir chacun des espaces pour travailler sans s’embêter les uns les autres. J’ai récupéré du matériel de mon bureau, en fait j’ai reconfiguré mon bureau chez moi. Mais, comment dire, si on passe à un mode plus pérenne de travail à distance, de télétravail, il est clair que toutes les bonnes pratiques d’ergonomie, de séparation du privé et du travail ne sont pas vraiment mises en place aujourd’hui, donc on est toujours sur entre guillemets du « télétravail d’urgence » et pas sur du pérenne.

Étienne Gonnu : OK. Effectivement, donc pour la qualité du travail j’imagine que ça peut avoir un impact.
Est-ce que tu voulais rajouter quelque chose sur Software Heritage, n’hésite pas à en faire de la pub, sinon on peut passer à l’autre sujet qui t’intéresse.

Nicolas Dandrimont : J’ai juste une petite mention. Je parlais de notre collaboration avec l’équipe d’Octobus pour l’archivage de Bitbucket. On a d’autres bourses qui sont ouvertes grâce à la fondation Sloan. Donc si des gens sont intéressés à collaborer avec nous pour améliorer la couverture de notre archive sur les codes sources de logiciels, il y a sur notre dite web, sur notre blog softwareheritage.org tout attaché, un appel à projet qui est ouvert pour les gens qui seraient des développeurs et qui seraient intéressés à venir nous aider.

Étienne Gonnu : Ça marche. On ne manquera pas de relayer et je te demanderai les liens qu’on pourra mettre sur la page consacrée à l’émission pour que les personnes les retrouvent facilement, tu as cité Bitbucket, Sloan Foundation, Octobus, on pourra mettre les liens dessus. En tout cas le message est passé.
Du coup je te propose de parler de Debian qui a en plus une actualité ce week-end, les MiniDebConfs Online. C’était une nouveauté il me semble, ou j’ai peut-être mal lu, et j’imagine que c’est en répercutions à la situation de pandémie et de distanciation.

Nicolas Dandrimont : Oui, c’était une première, effectivement. Le projet Debian est un projet qui vit sur Internet. C’est un projet qui est complètement distribué. Les gens sont aux quatre coins du monde et contribuent au projet. On a régulièrement des évènements en présentiel, des Debconfs, des conférences Debian, et on a des MiniDebConfs qui sont des minis conférences Debian qui ont lieu à peu près sur un week-end, qui sont des évènements de plus petite nature où développeurs, utilisatrices et tous les gens intéressés par Debian peuvent effectivement venir et voir ce qui se passe dans la distribution.
Ça fait quelques mois, un petit peu plus d’un an qu’on discute d’améliorer la participation à distance à ces évènements parce que, d’un point de vue écologique par exemple, faire voler la moitié de la planète vers un site commun ça a un impact très important. Peu importe le pays que tu choisis pour héberger un évènement, tu empêches des gens de s’y déplacer pour des raisons politiques, pour des raisons sociales, etc., donc ça fait un bon moment qu’on se dit que ce serait intéressant de faire des évènements un peu plus distribués, un peu moins physiques.
Là, effectivement, on a pris un peu – je dis « on », mais c’est le travail d’une équipe, j’ai juste participé à la marge – la balle au rebond cette situation de pandémie mondiale pour organiser notre première Mini DebConf on line. Donc pendant le week-end passé des développeurs, des développeuses se sont rassemblés et ont fait des présentations de leur travail dans Debian et autour de Debian avec des interactions en ligne à distance. C’était une première, je pense que ça a été un succès. Évidemment, aujourd’hui ce sont des conférences qui étaient plutôt axées développeurs, c’est vrai que les MiniDebConfs ont plus de discussions techniques en profondeur que la DebConf, la grosse conférence DebConf. C’est aussi en anglais, donc ce n’est pas forcément très accessible à tout le monde, mais ce sont des formes d’interaction et de conférences qu’on est en train de développer.

Étienne Gonnu : Super. Tu devances une question d’un auditeur qui nous pose exactement ces questions-là : est-ce qu’il n’y aura pas une volonté d’inclure des conférences plus grand public vu le niveau de connaissance technique exigé et la barrière potentielle de la langue. Écoute, tu devances, du coup, la question.
Quel bilan en tires-tu ? J’imagine que ça a été riche pour toi, d’une part parce qu’il y avait peut-être un peu d’enjeu technique à mettre ça en place et après dans la qualité. Est-ce que tu en sentis un impact ? Est-ce que c’était finalement la même qualité que tu as pu retrouver dans des MiniDebConfs précédentes ? Qu’en tires-tu finalement ?

Nicolas Dandrimont : D’un point de vue technique c’était assez intéressant parce que l’équipe vidéo s’est concentrée du coup sur l’utilisation d’outils libres à 100 % avec du déploiement, à ma connaissance, sur Debian. Du coup c’était un bon test, peut-être pas un test de stress, mais au moins un test d’intégration de tous les outils ; il y avait de l’IRC pour la discussion en direct, il y avait du Jistsi pour la prise de parole des conférencières et conférenciers. Effectivement on avait un petit peu d’infrastructure à mettre en place, ça s’est plutôt bien intégré à notre système habituel de diffusion en direct, c’était assez confortable. On va se retrouver à devoir faire la grande DebConf, celle qui dure une semaine complète aussi à distance, à priori, il me semble que la décision finale a été prise cette semaine. Du coup, là on va effectivement avoir un vrai test des modalités d’interaction parce que toutes ces rencontres entre développeurs ont un gros impact sur la qualité de la collaboration entre ces gens qui sont tous distribués à droite à gauche sur la planète. Ce sont des évènements où tu peux avoir des conversations avec une bande passante très élevée de manière synchrone donc ça permet de résoudre tout un tas de problèmes que tu peux avoir si tu es à distance. Pour ça, effectivement, on a réussi à avoir ce qu’on appelle en anglais une hallway track c’est un peu, comment dire, la série de conférences du couloir, en gros c’est un salon de discussions libres où tu peux discuter de choses et d’autres. Ça ne remplace pas des interactions de vive voix, mais c’était quand même assez chouette de voir une partie des copains et des copines en direct.

Étienne Gonnu : J’imagine. Tu parles de discussions informelles à distance. Il y a eu potentiellement un enjeu, j’imagine, de modération pour que ça reste audible, pour que les personnes qui souhaitent s’exprimer puissent le faire, ce qui est déjà un enjeu en présentiel physique parce qu’on sait qu’il y a des personnes pour lesquelles la prise la parole est peut-être moins évidente, d’autres qui ont tendance à prendre plus de place. Est-ce que c’est quelque chose que vous aviez anticipé ? Est-ce que vous avez laissé faire les choses naturellement ? Comment ça s’est passé de ce point de vue ?

Nicolas Dandrimont : En tout cas, pour ce qui est des conférences qui étaient planifiées, on avait une seule discussion de groupe. Pour cette discussion-là, en fait, on avait séparé les intervenants et intervenantes dans un chat Jitsi séparé, avec un mot de passe. Du coup ils se modéraient entre eux et on n’a pas fait spécifiquement de système pour améliorer l’équité dans la prise de parole, c’est quelque chose qu’on ne fait pas non plus en vrai. Je pense que c’est aussi un problème en vrai, mais on n’a pas encore travaillé pour des solutions pour ça, malheureusement.

Étienne Gonnu : OK. ??? j’imagine qu’on améliore, c’est aussi l’intérêt d’améliorer à chaque fois, au moins d’être vigilant sur les potentiels problèmes.
On pose une question sur le salon #libreavous de Cause Commune : les conf ont-elles été captées, j’imagine que oui, et seront-elles visionnables bientôt ?

Nicolas Dandrimont : Les conférences ont effectivement été enregistrées en direct. Je pense qu’il y a déjà une partie des conférences qui est disponible sur notre archive vidéo. J’ai vu des discussions de gens de l’équipe vidéo sur la publication. Si ce n’est pas le cas ce sera le cas, je pense, d’ici la fin de la semaine et ce sera aussi publié sur notre instance de PeerTube et sur YouTube parce qu’il y a des gens qui utilisent toujours ça.

Étienne Gonnu : Précisons PeerTube, je n’aime pas forcément le terme « alternative », mais un système de partage de vidéos basé sur du logiciel libre qui avait été mis en place par Framasoft. C’est toujours bien aussi de s’appuyer sur ces outils même si on sait qu’ils n’ont pas la même portée. Il faut les faire vivre, justement, c’est un super projet.
Je vois que le temps avance. Est-ce que tu aurais une dernière chose que tu aurais aimé dire sur Debian, MiniDebConf, sur un autre sujet qui te tient à cœur et qui n’a pas été évoqué ?

Nicolas Dandrimont : Sur Debian, pendant cette MiniDebConf, il y a une tendance qui se confirme qui est que le projet a de plus en plus conscience de sa difficulté à recruter de nouvelles bonnes volontés et commence à travailler sérieusement pour améliorer l’intégration de nouvelles contributrices, de nouveaux contributeurs. Si vous avez envie de contribuer, quel que soit votre niveau de compétence, il ne faut surtout pas hésiter à vous rapprocher de associations de cadres (???), il y a une association Debian France qui est active en France. On a prévu une MiniDebConf au mois d’octobre, si je ne dis pas de bêtise, j’espère que la situation sanitaire permettra qu’elle ait lieu dans les meilleures conditions. Je vous invite à vous rapprocher de Debian France si ça vous intéresse de contribuer.

Étienne Gonnu : Le message est à nouveau passé. Il me semble, en plus, que vous avez quand même historiquement à Debian une vraie vigilance pour créer des espaces accueillants, sécurisants, pour toutes les personnes, en fait, quelle que soit leur situation, pour les femmes notamment, pour les personnes transgenres, pour les personnes racisées. Il me semble qu’il y quand même une vigilance de ce point de vue, peut-être que je me trompe.

Nicolas Dandrimont : Non, tu as raison, c’est un travail de longue haleine. En tout cas j’ai l’impression qu’il y a des améliorations visibles de mois en mois sur ce sujet.

Étienne Gonnu : Dernière question de métrique et après on te laissera : cpm demande combien de confs et combien d’intervenants il y a eu ce week-end ?

Nicolas Dandrimont : Ce week-end il y a eu une dizaine de conférences et je pense une quinzaine d’intervenantes et d’intervenants en tout. Mon comptage des personnes qui ont visionné le stream c’est autour de 230/250, c’est en nombre d’adresses IP. C’est une surestimation du nombre de personnes qui ont vu les conférences en direct.

Étienne Gonnu : En direct, ça me paraît tout à fait honorable pour une première.

Nicolas Dandrimont : C’est assez impressionnant vu la communication limitée qui a été faite autour de la conférence, c’est une très bonne surprise.

Étienne Gonnu : Parfait. Vous le méritez, je trouve.
Un grand merci, Nicolas Dandrimont de Debian et de Software Heritage. Grand merci d’avoir pris ce temps avec nous et je te souhaite une excellente fin de journée.

Nicolas Dandrimont : Merci beaucoup de m’avoir reçu et bonne émission.

Étienne Gonnu : Merci,
Nous allons faire une pause musicale avant de passer au sujet suivant. Nous allons écouter Intro par Quantum Jazz. On se retrouve juste après. Je vous souhaite une belle journée à l’écoute de Cause Commune, 93.1 FM, la voix des possibles.

Pause musicale : Intro par Quantum Jazz.

Voix off : Cause Commune, cause-commune.fm, 93.1.

Étienne Gonnu : Nous venons d’écouter Intro par Quantum Jazz. Intro bien sûr étant l’introduction de leur excellent album, disponible sous licence libre Creative Commons, Partage dans les mêmes conditions. Vous retrouverez les références sur le site de l’April, april.org.
Vous écoutez l’émission Libre à vous! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm. Je suis Étienne Gonnu en charge des affaires publiques pour l’April.
Nous allons maintenant passer au sujet suivant.

Échange avec Christian Quest, collaborateur de la députée Paula Forteza, coprésidente du groupe Écologie Démocratie Solidarité, sur le travail parlementaire à l'Assemblée nationale

Étienne Gonnu : Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui porte donc sur le travail parlementaire.

Entretien avec Nicolas Dandrimont, ancien président de Debian France et membre de l'équipe travaillant sur le projet Software Héritage, que nous avions reçu lors du Libre à vous ! du 30 avril 2019 sur les distributions GNU/Linux

Étienne Gonnu : Normalement j’ai le plaisir d’être avec Nicolas Dandrimont.