Différences entre les versions de « Libre à vous ! Radio Cause Commune - Transcription de l'émission du 16 avril 2019 »

De April MediaWiki
Aller à la navigationAller à la recherche
Ligne 103 : Ligne 103 :
 
==16’ 38 Le collectif CHATONS [https://media.april.org/audio/radio-cause-commune/libre-a-vous/emissions/20190416/libre-a-vous-20190416-sujet-long-collectif-chatons.ogg Podcast]==
 
==16’ 38 Le collectif CHATONS [https://media.april.org/audio/radio-cause-commune/libre-a-vous/emissions/20190416/libre-a-vous-20190416-sujet-long-collectif-chatons.ogg Podcast]==
  
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous venons d’écouter <em>Clémentines</em> par Löhstana qui est une musique libre, licence Creative Commons Partage à l’identique. Les références sont sur le site de l’April. Comme vous l’avez entendu ce n’est pas tout à fait de saison parce que c’est la fin des clémentines, en tout cas. C’est un très beau titre qui est en licence Art libre.
+
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous venons d’écouter <em>Clémentines</em> par Löhstana qui est une musique libre, licence Creative Commons Partage à l’identique. Les références sont sur le site de l’April. Comme vous l’avez entendu ce n’est pas tout à fait de saison parce que c’est la fin des clémentines ; en tout cas c’est un très beau titre et qui est en licence Art libre.
  
Vous écoutez toujours l’émission <em>Libre à vous !</em> sur radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm. Vous écoutez toujours l’émission, nous allons changer de sujet. Excusez-moi le démarrage a été un petit peu speed parce qu’on avait un petit problème technique. Je vais en profiter pour indiquer que le générique de début a changé ; je ne sais pas si les personnes qui écoutent régulièrement l’émission l’ont noté. Vous le réécouterez la semaine prochaine et je salue au passage PG qui est une personne du salon qui nous a fait ce nouveau montage avec des voix réenregistrées récemment. Donc petit montage différent par rapport à d’habitude. Je voulais signaler parce que je l’avais oublié tout à l’heure lors de la diffusion du générique de début.
+
Vous écoutez toujours l’émission <em>Libre à vous !</em> sur radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm. Nous allons changer de sujet. Excusez-moi le démarrage a été un petit peu speed parce qu’on avait un petit problème technique. Je vais en profiter pour indiquer que le générique de début a changé ; je ne sais pas si les personnes qui écoutent régulièrement l’émission l’ont noté. Vous le réécouterez la semaine prochaine et je salue au passage PG qui est une personne du salon, qui nous a fait ce nouveau montage avec des voix réenregistrées récemment, il y a un petit montage différent par rapport à d’habitude. Je voulais le signaler parce que je l’avais oublié tout à l’heure lors de la diffusion du générique de début.
  
Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui va porter sur les CHATONS, le Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires des mots qu’on va expliquer au fur et à mesure et je vais commencer par présenter mes invités. Normalement nous avons au téléphone Angie Gaudion de l’association Framasoft. Bonjour Angie.
+
Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui va porter sur les CHATONS, le Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires, des mots qu’on va expliquer au fur et à mesure et je vais commencer par présenter mes invités. Normalement nous avons au téléphone Angie Gaudion de l’association Framasoft. Bonjour Angie.
  
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Bonjour.
  
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Avec nous en studio Denis Dordoigne de l’association INFINI. Bonjour Denis.
  
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Bonjour Fred.
  
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Christian Pierre Momon de l’association April et du chaton Chapril. Bonjour Christian.
  
 +
<b>Christian Momon : </b>Bonjour.
  
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons donc parler des CHATONS, je vais refaire l’acronyme, dans le site web c’est chatons avec un « s » point org, donc Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires. D’abord un petit tour de table de présentation rapide de chacun et chacune d’entre vous pour dire qui vous êtes. On va faire dans le sens inverse ce coup-ci. Christian.
  
 +
<b>Christian Momon : </b>Moi je suis développeur du Libre, membre de l’April, membre du conseil d’administration de l’April. Je fais des choses depuis une vingtaine d’années avec l’April. Je soutiens le chaton de l’April, entre autres, j’y participe activement.
  
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Qui s’appelle Chapril, évidemment jeu de mots en « chaton » et « April ». Denis.
  
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Moi, à titre professionnel, je travaille chez un hébergeur, ce sont des gens qui fournissent des services sur Internet ; on aide certaines boîtes à le faire. Je fais partie d’une association qui s’appelle INFINI, qui existe depuis plus de 20 ans maintenant, presque 25, qui fournit des services justement à ses utilisateurs et qui a été parmi les premiers chatons au lancement du projet.
  
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Je précise que tous les deux vous êtes bénévoles dans des structures de type chaton. Et toi Angie ?
  
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. On va faire une pause musicale avant de poursuivre sur la partie héherger. Le titre s’appelle <em>Akilou</em> le groupe 6 février 1985 et on se retrouve juste après.
+
<b>Angie Gaudion : </b>Moi je suis salariée au sein de l’association Framasoft qui a pour mission, objectif, de faire la promotion du logiciel libre et de la culture libre en général. Au sein de mes missions je suis chargée de communication et de partenariat et j’ai, pour le coup, actuellement la coordination du collectif CHATONS.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Très bien. Je précise d’ailleurs qu’on recevra normalement Pierre-Yves Gosset délégué général de Framasoft le 4 juin pour une émission sur Framasoft, et peut-être d’autres personnes de Framasoft. La date reste à confirmer ; en tout cas suivez l’actualité de l’émission. Première question collective : quel est le problème que le Collectif souhaite résoudre ? Qui veut commencer ? Christian ?
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Angie représente le collectif. Donc Angie à toi.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Donc Angie Gaudion de Framasoft.
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Le Collectif se donne pour mission de répondre à plusieurs problématiques. La première c’est la concentration des services sur le Web. On le sait très bien, les utilisateurs, les internautes savent qu’ils utilisent beaucoup de services très centralisés au sein de grandes entreprises qu’on appelle souvent les géants du Web ou les GAFAM. Ça c’est le premier élément. Le deuxième c’est la sécurité de nos données personnelles ; les affaires Snowden ou Cambridge Analytica nous on a montré qu’effectivement, quand on utilisait ces services très concentrés, eh bien en échange d’une fausse gratuité, on utilisait nos données personnelles. Et le dernier élément c’est qu’on a beaucoup de menaces sur la liberté d’expression et le partage des informations du coup qu’on a sur le Web. Ça ce sont des constats de base qui ont été faits avec la nécessité de repenser, en fait, comment on permet aux internautes d’utiliser des services qui vont leur permettre d’accéder à de l’information de manière plus neutre, de communiquer sur des outils qui ne vont pas les espionner ou ne pas utiliser leurs données personnelles, etc.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Merci Angie. Qui veut compléter cette introduction, Christian Momon.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Historiquement c’était très intéressant de voir la démarche de Framasoft de mettre en ligne des services libres pour justement montrer qu’il existait des alternatives. Ça a été encore plus intéressant de voir, après quelques années, cette réflexion de dire que Framasoft ne devait pas être le point central de propositions.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Christian, tu vas peut-être un peu vite pour les personnes qui nous écoutent. On va juste rappeler des dates. La première chose à laquelle tu fais référence c’est la campagne Dégooglisons Internet de Framasoft, en 2014. Framasoft propose un certain nombre de services libres, éthiques, loyaux en alternative aux services des géants du Web plus connus sous le nom des GAFAM, mais il n’y a pas que les GAFAM ; GAFAM c’est Google Amazon Facebook, Apple, Microsoft, mais il y a aussi évidemment les géants chinois, etc. Ça c’est en 2014, Framasoft propose à travers Dégooglisons Internet de proposer des services.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Une très belle campagne qui marche très bien. Plein de gens utilisent les services. D’ailleurs ils ont dû, je ne veux pas parler en leur nom, mais on sait qu’ils ont eu une montée en puissance des serveurs qui a été nécessaire, qu’ils ont assurée et qui fonctionne très bien. Du coup après effectivement, à priori il y a eu une réflexion en se disant « on ne va pas centraliser à nous toutes les alternatives. Ça serait bien que d’autres le fassent et que ça soit décentralisé ; que la fourniture de services alternatifs libres soit décentralisée. » Donc l’idée d’un collectif a mûri pour encourager cette démarche.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>L’idée c’était que la porte d’entrée ne soit pas uniquement Framasoft, la porte d’entrée des alternatives aux GAFAM, mais soit un collectif. Denis est-ce que tu veux rajouter quelque chose sur cette partie-là.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Oui. Il faut bien se rendre compte que c’était progressif comme démarche. D’abord on prend conscience de ce qu’on fait, donc le Framablog, des choses qui proposent des articles régulièrement pour expliquer ce que sont les enjeux des grands du Net. Après il y avait eu l’étape « il faut arrêter d’aller chez les GSPIPAFAM » donc les services par Framasoft. Maintenant on a une troisième étape pour les utilisateurs : « attention Internet ne doit pas être centralisé » et c’est là-dedans que s’amène le projet CHATONS.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Angie, comme tu travailles pour Framasoft est-ce que tu souhaitais ajouter des précisions sur cette partie historique ?
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Non. C’est la démarche en fait. Nous on dit souvent : « On ne veut pas devenir, du coup, le Google du libre », c’est la formule qu’on emploie. Le collectif CHATONS a vraiment été pensé pour éviter cette entrée, ce tuyau unique d’accès aux outils libres alternatifs.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Je vais rappeler les dates : 2014 la campagne Dégooglisons Internet et  le lancement du collectif CHATONS en 2016. Christian tu veux ajouter un dernier point sur cette introduction ?
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Oui. Il faut bien avoir en tête que des associations qui proposaient des services pour leurs adhérents ou même ouverts à tout le monde, il y en avait en parallèle de l’action, de la campagne de Framasoft. Mais il faut bien dire que c’était peu connu, il y avait peu de communication dessus et c’était souvent pour les adhérents du GULL qui n’étaient pas forcément très nombreux.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>GULL c’est un groupe d’utilisateurs et d’utilisatrices de logiciel libre. On va éviter les acronymes ou on les explique. Mais c’est important que tu rappelles que des structures offraient déjà ces services-là. INFINI, par exemple, existe depuis une vingtaine d’années de mémoire.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>On a 25 ans l’année prochaine. Faites le calcul : 1995.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>25 ans ! Encore plus anciennement que je ne pensais ! Donc ces structures-là existaient. Par contre ce qui va peut-être changer avec le Collectif et on va en parler, justement c’est un collectif avec une dynamique et aussi avec une charte et un manifeste dont on va parler assez rapidement.<br/>
 +
Ça c’est l’introduction un petit historique avec le lancement en 2016 de ce Collectif. Dans le terme CHATONS donc avec un « S », parce qu’aujourd’hui on va parler des CHATONS avec un « S » et des « chaton » sans « s » qui sont les hébergeurs individuels, CHATONS ça veut dire Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires. Évidemment on ne va pas rentrer dans le détail de tout le manifeste et de la charte, mais si on se place du point de vue d’une personne qui nous écoute, qui a bien conscience des problématiques qu’a notamment exposées Angie au début sur la vie privée et les données personnelles d’utiliser les services des GAFAM ou des géants du Web et qui se dit : tiens je souhaiterais utiliser les services d’un chaton, donc d’un hébergeur, d’une structure qui héberge, qu’est-ce que va lui apporte un chaton en termes de services et aussi en termes d’engagement ? Finalement qu’est-ce qui différencie ces fameux chatons d’autres services ? Angie, peut-être, si tu veux commencer.
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Il y a plusieurs choses. Souvent on compare les membres du Collectif, donc chaque chaton, à des AMAP. En fait c’est une bonne analogie, je trouve, pour expliquer la façon dont fonctionne le Collectif et dont il est pensé au départ, à savoir des personnes de proximité. Dans les AMAP ça va être des producteurs ; dans l’univers des CHATONS ça va être des hébergeurs, donc des hébergeurs de proximité qui vont proposer des services alternatifs et avec qui on va pouvoir avoir un échange. Il y a vraiment cette notion très importante du coup qui est bien sûr faire héberger des services ailleurs que chez les géants du Web, mais pas que. C’est vraiment rencontrer des personnes qui ont un engagement, avec qui je vais pouvoir échanger, avec qui je vais pouvoir aller boire un café, peut-être même auprès desquelles je vais aussi pouvoir m’investir pour faire fonctionner tout simplement les services qu’ils proposent. C’est vraiment un élément très important dans les CHATONS. Donc le chaton va pouvoir soit apporter du service, soit apporter de la discussion, soit de l’entraide au sein d’une communauté plus large.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Je rappelle qu’une AMAP c’est une association pour le maintien de l’agriculture paysanne. Finalement, dans le cadre des CHATONS, au lieu de trouver des paniers de légumes fournis par un agriculteur ou une agricultrice, on trouve des services en ligne fournis par un hébergeur de proximité. C’est un point important : quand tu as parlé de prendre un café ou un verre avec les personnes qui hébergent un chaton ça fait partie des engagements des chatons. Oui Christian ?
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Ça c’est un point très important de pouvoir rencontrer les gens qui gèrent les services parce que ça permet de créer une relation de confiance. Aujourd’hui, est-ce que les utilisateurs des services de Microsoft ou Google ont confiance en ces entreprises-là ? Eh bien difficilement ! Si elles veulent entrer en contact avec ce n’est pas évident ! Si elles veulent demander des vérifications ou comment ça fonctionne derrière, eh bien elles n’auront pas de réponse ! Alors que justement, là, avec de telles structures, on peut les rencontrer, ce sont des êtres humains, des vrais êtres humains, on peut leur poser des questions, on peut même participer. Du coup la relation de confiance et de transparence est géniale. Voilà !
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Tu parles de transparence. Dans le mot des CHATONS il y a aussi « Ouverts », donc ouverture. L’un des engagements de base dans la charte et dans le manifeste – tous ces documents sont trouvables évidemment sur le site chatons.org, chatons avec un « s » – il y a la partie on va dire informatique qui est l’engagement logiciel libre. Denis c’est quoi l’engagement logiciel libre au niveau des CHATONS ?
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Je ne vais pas forcément réexpliquer ce qu’est un logiciel libre ? Les gens doivent connaître à force d’écouter l’émission.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Tu peux réexpliquer en quelques mots.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Les logiciels libres ce sont des logiciels qui se définissent par les libertés qu’ils fournissent : la liberté de l’utiliser comme on veut, la liberté de l’étudier, la liberté de le modifier si on a des connaissances dessus et on a le droit de le redistribuer sous toutes les formes, même modifiées. Pour nous c’est important de n’utiliser que des logiciels libres, parce que c’est l’aspect pour que vraiment les gens puissent avoir confiance sur toute la ligne en ce qu’on fait, de ce qu’ils ont. Du coup, si quelqu’un qui utilise nos services nous demande : « Mais comment c’est fait, il y a quoi à l’intérieur ? », on peut lui donner. S’il n’a pas de compétences il peut demander à quelqu’un de vérifier, mais on sait que c’est transparent : n’importe qui peut vérifier que ce qu’on a c’est ce qu’on dit.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Christian tu veux compléter ?
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>De ce point de vue-là la charte est magnifique. J’encourage vraiment les auditeurs à aller la voir ; elle reprend chacune des lettres du nom du Collectif, de CHATONS, et pour chaque lettre est expliqué ce qui est attendu et en fait ce sont d’énormes contraintes. Si on lit attentivement, il y a plein de contraintes.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Ce ne sont pas des contraintes, ce sont des engagements forts !
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Oui, mais quand on veut adhérer à cette charte ça représente beaucoup de contraintes, à beaucoup de niveaux. Par exemple il faut même documenter sa plateforme, ses services, et il faut partager la documentation sur ses services. Du coup j’utilise le mot « contrainte » exprès pour montrer que la charte est un vrai engagement mais que ces contraintes, en fait, ne sont pas si négatives que ça dans le sens où elles montrent une démarche et elles permettent vraiment de partager et d’avancer.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Donc la charte et le manifeste ont été rédigés en grande partie par Framasoft mais avec un appel à commentaires ouverts. Angie, est-ce qu’il y a des points de la charte ou du manifeste que tu souhaites mettre en avant sur la partie engagement justement par rapport aux personnes qui vont utiliser les services d’un chaton ?
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Un élément qui à moi semble intéressant ce sont les conditions générales d’utilisation. On en parle beaucoup auprès des services privateurs proposés par les géants du Net ; en général c’est incompréhensible, ça fait une longueur incroyable ! Il y a une obligation dans la charte que l’ensemble des hébergeurs qui font partie du Collectif aient des conditions générales d’utilisation qui soient claires, accessibles à tout le monde et qui ne soient pas contradictoires, bien sûr, avec le reste de la charte, qui respectent les principes qui sont posés dans cette charte. Je trouve que c’est vraiment un élément important : quand on a des conditions générales d’utilisation qui sont faciles à comprendre, eh bien c’est le premier élément de la confiance. Ce qui n’empêche pas ensuite d’aller rencontrer, mais je trouve qu’arriver sur un site et avoir ses CGU c’est vraiment un élément très important pour rendre visible ce que fait chaque hébergeur.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>On va préciser que ces CGU, donc ces conditions générales d’utilisation, sont lisibles.
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Bien sûr.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Parce que souvent elles ne sont pas lisibles, volontairement évidemment, chez d’autres structures. Elles sont plus ou moins longues. Je précise, même si on le rappellera tout à l’heure, que quand on veut créer un chaton Framasoft, on peut s’inspirer des CGU qui existent déjà. Par exemple dans le cas du Chapril on s’est inspiré des CGU de Framasoft ; ça c’est important. Dans les CGU on a parlé de logiciel libre, on a parlé aussi de transparence, de données personnelles, il y a un engagement très fort sur la protection des données personnelles et sur la transparence des demandes qui pourraient être faites de retrait ou d’interventions, par exemple judiciaires. Christian, quand tu parlais tout à l’heure de transparence, normalement chaque chaton doit afficher sur ses pages à la fois les incidents techniques mais aussi les demandes éventuelles de retrait, les problèmes techniques qu’il pourrait y avoir sur les données personnelles. Il y a un engagement très fort, et je vais vous redonner la parole, je crois aussi, de mémoire, qu’il y a un engagement sur le modèle économique : de ne pas recourir à la publicité pour éviter le filtrage des personnes qui utilisent ces services. Christian ?
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Oui et de ne pas faire d’argent avec les données personnelles ou les données collectées dans le cadre de l’exploitation de la plateforme.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Ne pas les monétiser.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Exactement !
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Denis là.-dessus.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>On a le droit à la publicité, mais elle ne doit pas être par rapport aux données personnelles. Les publicités ne doivent pas utiliser les données personnelles pour être personnalisées, etc. On peut avoir le modèle économique qu’on veut.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Merci de cette correction. Effectivement j’avais peut-être lu un petit vite. Christian.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Effectivement on parlait d’AMAP tout à l’heure, mais n’importe quelle entreprise ou structure juridique peut se déclarer un chaton du moment qu’elle respecte la charte. La charte n’est pas un point de blocage par rapport à une structure d’entreprise.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>On va y revenir effectivement tout à l’heure. J’encourage les personnes à aller sur le site des CHATONS, chatons.org avec un « s », notamment pour lire un petit peu le manifeste et la charte ; il y a aussi une foire aux questions. Vous y trouverez notamment des engagements sur la neutralité aussi, sur l’absence de censure à priori. Peut-être qu’on n’entrera dans le détail aujourd’hui sur ces aspects-là, peut-être qu’on fera une autre émission où on rentrera plus dans le détail, notamment parce qu’il y a des évolutions juridiques qui arrivent. Un point essentiel d’ailleurs : quand on parle d’hébergeur on parle bien du statut d’hébergeur dans le sens de la loi pour la confiance dans l’économie numérique ; c’est un point essentiel qu’on abordera peut-être dans une seconde émission parce que si on n’a pas officiellement ce statut-là, en tout cas si on ne se déclare pas en tant qu’hébergeur, on peut avoir quelques problèmes quand on héberge un chaton. Je parle d’un point de vue simplement « héberger un chaton ».
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>D’où l’intérêt d’utiliser vraiment la charte CHATONS et d’intégrer le Collectif parce qu’il y a vraiment une base qui donne un périmètre clair, qui aide à démarrer quand on veut se lancer et c’est très pratique.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>On va revenir et on va continuer sur les hébergés, parce quand il y a hébergeur il y a des hébergés, donc des personnes ou des structures hébergées qui utilisent les services d’un chaton. Naturellement on se pose la question : quels services on trouve sur ces fameux chatons ? Est-ce qu’on trouve tous les services dont on pourrait avoir besoin ? Quels types de services on trouve ? Angie, toi qui animes ce Collectif, tu as sans doute une vision plus large que nous, quels sont les types de services qu’on trouve sur les différents chatons et quels sont les services finalement les plus demandés si on a déjà cette information-là, les plus entre guillemets « utilisés » par les personnes ?
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Le nombre de services est très large. On va trouver vraiment tous types de services, en revanche on ne va pas forcément tous les trouver au sein du même hébergeur. Il va y avoir des hébergeurs qui vont se focaliser sur le fait de proposer par exemple uniquement du courrier électronique et du stockage et du partage de fichiers. D’autres qui vont être davantage sur, je ne sais pas, l’agrégateur de flux RSS, un gestionnaire de mots de passe, de la cartographie, de la messagerie collaborative. Voilà ! C’est très varié en fait sur les types de services qui sont proposés et, j’allais dire, ça regroupe quasiment tous les types de services qu’on peut avoir, du coup, dans les services web actuels, avec même en plus des services, on va dire, liés proprement à l’hébergement. C’est-à-dire qu’on peut passer par un chaton pour avoir un hébergement sur un serveur, ce qui relève, du coup, d’autre chose que du service web dans sa globalité. Mais d’un chaton à l’autre on va avoir des choix qui vont être faits tout simplement par les personnes qui vont proposer le chaton, la structure qu’il y a derrière qui ne pourra pas forcément maintenir tous les types de services, c’est impossible, et qui diront on va faire des choix en fonction de sa compétence.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Justement petite question collective et on commencera par toi Angie : en gros au niveau de Framasoft vous êtes historiquement les premiers est-ce que tu sais combien de services différents vous offrez aujourd’hui ?
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Au dernier comptage on est à 34 services différents.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Bravo !
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Bravo ! Donc une large de palettes de services. Je vais poser la même question. On va commencer par Denis pour INFINI.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Ça dépend ce qu’on appelle services, mais entre 30 et 50 je dirais selon la définition qu’on utilise.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Ah ! D’accord. OK.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Vos utilisateurs.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>En fait quand on est devenu chaton on a proposé les services que faisaient Framasoft, le pad des choses comme ça ; on en a récupéré une douzaine. C’est vraiment parce qu’on voulait participer au projet de Framasoft de se décentraliser. On fournit des services depuis 1995 à nos adhérents donc il y a des services très divers comme le mail et des listes de diffusion. On fait de l’accompagnement pour créer des sites internet, des wikis, des SPIP, enfin…
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Ça dépend effectivement de la définition de service. Là je parlais plutôt de services en ligne, donc pas forcément des formations pour utiliser un SPIP. C’est intéressant d’expliquer que vous faites les deux, en fait, chez INFINI.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Et dans les services qu’on aide. On a un service de publication de vidéos qu’on n’a pas ouvert au public ; on a des services de cartographie qu’on commence à ouvrir au public. On a un service de cloud pour synchroniser son téléphone qui n’est réservé qu’aux adhérents. Techniquement on a des services qu’on est les seuls à proposer chez les chatons. Par exemple on fait de la diffusion de radio en ligne : il y a des réémetteurs aujourd’hui en Bretagne qui sont alimentés par des services hébergés par les services INFINI. Là je ne pourrais pas les dire, mais vraiment beaucoup de services parce qu’on est anciens, tout simplement.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Vous retrouverez toute la liste sur infini.fr. Je vais la parole à Christian qui rigole d’avance parce le nombre de services offerts sur le Chapril pour l’instant va faire petit, mais c’est un petit chaton, le Chapril. Combien de services, Christian ?
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Chapril, le chaton de l’April, est très récent. Il est né fin 2017, donc il propose actuellement quatre services et il y en a six en cours de préparation. Voilà !
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Effectivement c’est un service récent. On n’inclut pas les services qu’on propose aux membres depuis très longtemps et ça me fait penser que tout à l’heure on aura justement une discussion, après la pause musicale qui va bientôt arriver, sur justement à quels types de public s’adressent les services ? Est-ce que certains services sont restreints en fonction du type de public ? On voit déjà quand même, en tout cas en allant sur chatons.org, on peut trouver largement des services et avec un aspect local qui est très important parce que j’ai peut-être oublié de préciser que INFINI c’est en Bretagne.
 +
 
 +
<b>Denis Dordoigne : </b>Oui. À Brest.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>À Brest. Une partie de l’équipe Framasoft est à Lyon. C’est bien ça Angie ?
 +
 
 +
<b>Angie Gaudion : </b>Oui. Cependant on dit plutôt que notre univers c’est le Web, On n’est pas trop localisés puisque, du coup, on propose des services web qui sont accessibles à priori à n’importe qui.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Chapril, c’est pareil, c’est accessible à n’importe qui même si beaucoup d’évènements, notamment les apéros et les rencontres, se font à Paris, même s’ils peuvent se faire également ailleurs.
 +
 
 +
<b>Christian Momon : </b>Oui. À Marseille, à Montpellier et bientôt à Toulouse j’espère. Dans nos animateurs de services au Chapril on a des Lillois on a maintenant des Mulhousiens, enfin c’est assez réparti. Donc s’il y a besoin de rencontrer, on a des gens qui ne sont pas que à Paris.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. On va faire une pause musicale avant de poursuivre la discussion sur la partie « héhergés ». Le titre s’appelle <em>Akilou</em>, le groupe s’appelle 6 février 1985 et on se retrouve juste après.
  
 
Pause musicale : <em>Akilou</em> par 6 février 1985.
 
Pause musicale : <em>Akilou</em> par 6 février 1985.

Version du 18 avril 2019 à 20:18


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 16 avril 2019 sur radio Cause Commune

Intervenants : Marie-Odile Morandi - Angie Gaudion - Denis Dordoigne - Christian Pierre Momon - Noémie Bergez - Frédéric Couchet

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 16 avril 2019

Durée : 1 h 30 min

Écouter ou télécharger le podcast

Page des références utiles concernant cette émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration :

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Statut : Transcrit MO

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous. Vous êtes sur la radio Cause Commune 93.1 FM en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm. La radio dispose d’un webchat, donc utilisez votre navigateur libre préféré, rendez-vous sur le site de la radio et rejoignez-nous sur le webchat consacré à l’émission.
Nous sommes mardi 16 avril 2019, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre. Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’April c’est april.org, a, p, r, i, l, point org et vous y retrouvez déjà une page consacrée à cette émission avec un certain nombre de références, qui sera mise à jour après l’émission. Je vous souhaite une excellente écoute.

Nous allons passer maintenant au programme de l’émission.
Nous commencerons dans quelques secondes par la chronique de Marie-Odile Morandi intitulée « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture ». Marie-Odile est avec nous avec nous par téléphone, on la retrouve d’ici quelques secondes.
D’ici une quinzaine de minutes notre sujet principal portera sur les CHATONS, le Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires et je présenterai mes invités à ce moment-là.
En fin d’émission nous aurons la chronique juridique de Noémie Bergez intitulée In code we trust.

À la réalisation de l’émission aujourd’hui Patrick Creusot, bonjour Patrick, avec l’aide d’Isabella Vanni ma collègue de l’April.

1’ 41 chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture Podcast

Frédéric Couchet : Nous allons commencer tout de suite par une intervention de Marie-Odile Morandi pour sa chronique intitulée « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture ». Marie-Odile bonjour.

Marie-Odile Morandi : Bonjour à tous.

Frédéric Couchet : Quel est le sujet dont tu souhaites nous parler aujourd’hui ?

Marie-Odile Morandi : Le sujet de cette nouvelle chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture » m’est venu suite à une situation que j’ai vécue récemment, pas sur Internet mais dans une banque. On m’a demandé de signer un document… j’avais la personne en face qui me pressait comme si c’était banal… Et le lendemain, après réflexion je me suis dit que ce qui m’avait été demandé était intrusif, concernait ma vie privée et j’ai repensé à la réflexion qu’on entend encore bien trop souvent « je n’ai rien à cacher ».
Diverses conférences ont été transcrites par notre groupe avec dans leur intitulé cette affirmation et vous retrouverez tous les liens sur le site de l’April, sur la page de références concernant cette émission.

Frédéric Couchet : Quelle est la conférence la plus ancienne que le groupe Transcriptions ait transcrite avec ces mots dans son intitulé « je n’ai rien à cacher » ?

Marie-Odile Morandi : Déjà en 2013, lors de l’évènement Pas Sage en Seine, une personne dont le pseudo est Numendil avait tenu une conférence intitulée « Si, vous avez quelque chose à cacher ».
Il nous montre qu’il est très difficile de définir ce qu’est la vie privée, qui dépend de nombreuses variables si bien que chacun d’entre nous aura sa propre définition et toutes ces définitions seront différentes.
Il rappelle que quand on dit : « moi j’ai des choses à cacher », il nous est répondu « c’est que tu es un terroriste, un pédophile, voire les deux » Bien entendu, comme l’idée même de ces crimes est révoltante, il sera facile pour les gouvernements d’expliquer que la vie privée, eh bien on la met au second plan. On en arrive à une société de surveillance généralisée avec, comme conséquence, une évolution de l’État policier au fur et à mesure des années.
Numendil nous indique comment il a pu, presque par jeu, connaître la vie complète d’une personne et donc combien ce sera facile pour d’autres entités.
- Ses conclusions sont qu’il faut une sensibilisation dès le plus jeune âge, une éducation au numérique ; qu’il faudrait plus de transparence de la part des sites qu’on consulte concernant la récupération de nos données et qu’il faudrait expliquer au public que la nécessité de lire les fameuses CGU, les conditions générales d’utilisation, avant de cliquer sur le bouton « OK » est très importante.
Je vous laisse lire la transcription de cette conférence, je le rappelle de 2013, avec en particulier une actualité de l’époque concernant la reconnaissance faciale dans le métro pour repérer les personnes ayant un comportement suspect. L’actualité récente, certes dans le registre de la publicité ciblée dont il est aussi fait mention dans la conférence, a pointé les fameux panneaux publicitaires dans les couloirs du métro qui diffuseront des messages différents selon les heures de la journée en fonction du profil des usagers. Cela ne manque pas de laisser perplexe…

Frédéric Couchet : Ça c’est la plus ancienne conférence. Par la suite quelles conférences ont été transcrites ?

Marie-Odile Morandi : Diverses conférences ont été transcrites par la suite, en particulier en 2015 car plusieurs conférences se sont tenues sur ce sujet. 2015 est l’année qui correspond à la discussion de la loi renseignement au Parlement et à sa promulgation.
Nous avons transcrit la conférence de Julien Vaubourg, alors doctorant dans une équipe de recherche, et qu’il a donnée loirs d’un séminaire à Nancy. Il aborde la question de façon provocatrice en disant : je n’ai rien à cacher donc j’ai donné à Google une licence de reproduction, de modification, d’affichage, de distribution de tous les contenus que je lui fournis. Quand j’envoie un message sur Gmail, Google en fait ce qu’il veut parce que je l’ai accepté : il a le droit de lire, d’interpréter, de recopier, de distribuer les informations. J’ai accordé à Facebook une licence non-exclusive, transférable, des contenus que je publie. » Il nous rappelle que certes sur Facebook on peut effacer des contenus sauf ceux qui sont partagés par d’autres, l’essence même d’un réseau social !
Il nous invite à réfléchir avec cette question : « Sommes-nous prêts à assumer dans dix ans ce que nous faisons aujourd’hui ? », mentionnant le conseil du PDG de Google : « Si nous souhaitons que personne ne soit au courant de certaines choses que nous faisons peut-être ne faudrait-il pas les faire, tout simplement ! »
Il nous rappelle qu’une analyse de 2008 du principal fichier policier français comportait de nombreuses erreurs dues à des fautes de frappe, à des homonymies, qu’il faut se méfier de cette surveillance de masse dont on fait l’objet au quotidien et qui risque de nous mettre en péril.
Surtout il s’inquiète de la façon dont évoluera la société et à quoi ressembleront nos lois dans 20 ans. « Certes, dit-il, peut-être que j’ai confiance dans mon gouvernement actuel, mais qu’en sera-t-il des gouvernements qui suivront et des gouvernements étrangers ? » Son opinion est qu’il faut toujours garder une certaine latitude pour que la population puisse ne pas respecter totalement la loi, puisse faire un pas de travers pour se rebeller si ça part dans le mauvais sens, pour que la loi puisse évoluer, qu’elle ne soit pas morte. N’est-ce pas cela la démocratie ?
Je vous invite aussi à lire la transcription des questions du public et des réponses apportées par Julien Vaubourg lors de cette conférence. Le lien est sur la page des références concernant notre émission.

Frédéric Couchet : Ça c’était en 2015 et toujours en 2015 il y a une conférence de Laurent Chemla à Pas Sage en Seine.

Marie-Odile Morandi : Oui, et qui était intitulée « Rien à cacher – Vie privée : guide de survie en milieu hostile ». Pour Laurent Chemla, le milieu hostile c’est notre famille, nos amis, les personnes avec qui nous sommes en relation.
Laurent nous rappelle que ce sujet n’est pas très récent, il en parlait déjà en 2004. Il constate lui aussi que personne n’a jamais vraiment défini ce qu’est la vie privée et il nous demande de ne pas confondre privé et secret, je vous laisse aller lire ses explications.
Pour Laurent, cela fait une trentaine d’années que la vie privée a perdu de son importance dans l’esprit du public ; il cite tour à tour les émissions de télé-réalité, les babyphones, la vidéoconférence ainsi que la sémantique avec l’exemple du mot « vidéosurveillance » qui devient « vidéo protection ».
Laurent indique qu’une façon de convaincre son interlocuteur qu’il a bien quelque chose à cacher sera de lui marteler :« Si toi tu considères que tu n’as rien à cacher, moi j’ai des choses à cacher. Donc en te protégeant, tu protèges aussi ton entourage dont je fais partie. »
Mais pour Laurent ce qui est plus grave, c’est qu’avec cette surveillance constante, on ne se sent plus libre, on n’agit plus de la même façon non seulement physiquement mais dans sa façon de penser. On adopte un conformisme qui nous est imposé, on ne se démarque plus. Il n’y a plus de confrontation des idées, tout le monde adopte les mêmes. « Il n’y aura plus de démocratie, nous dit-il, mais un semblant de démocratie. Certes on ira toujours voter, mais pour quoi ? Aura-t-on encore le choix ? »
Laurent est bien conscient qu’il donne cette conférence devant un public de convaincus, le public de PSES. Il nous propose des pistes, que je vous engage à lire, car selon lui faudra beaucoup de travail et de temps pour faire en sorte que les gens se sentent concernés, pour que la vie privée retrouve de sa valeur auprès du public.

Frédéric Couchet : Tu cites Pas Sage en Seine. Pas Sage en Seine c’est à Choisy-le Roi près de Paris et la prochaine édition arrive dans quelques mois, je n’ai pas les dates en tête, mais c’est sans doute juin 2019. Le site c’est passageenseigne.org, « passageenseine » tout attaché. Dernière question : Laurent Chemla ne te semble-t-il pas un peu pessimiste sur le sujet ?

Marie-Odile Morandi : Oui, il me semble un peu pessimiste même si lui dit qu’il est optimiste. Il est optimiste surtout parce que nous parlons de cette question-là et qu’il y a des conférences concernant ce sujet.
Pour terminer sur quelque chose d’un petit peu plus léger dans son expression, je souhaitais terminer en voua parlant de la transcription d’un podcast enregistré en 2016 et intitulé « Je n’ai rien à cacher – Conversation entre 4 assos du Libre », « Partage d’arguments pour répondre au fameux « je n’ai rien à cacher ».
Le thème est traité de façon plus légère et plus accessible, mais de façon tout aussi percutante, les exemples choisis allant du journaliste qui veut protéger ses sources aux ados qui ne souhaitent pas que leurs parents ou leurs profs sachent ce qu’ils partagent avec leurs amis. Je vous laisse prendre connaissance de ces divers exemples.
Il nous est aussi redit que les bases de données dans lesquelles chacun d’entre nous se retrouve de nombreuses fois sous de nombreuses formes ne sont pas du toutes fiables, qu’il y a des homonymies, des risques d’usurpation d’identité.
Les mœurs changent. L’évolution vers des systèmes autoritaires est en marche. Nous risquons demain d’être fichés demain comme ayant eu des comportements qui ne sont plus tolérés. Avec comme conclusion ce cet échange entre 4 assos du Libre : « Peut-être qu’on n’a rien à cacher, mais on a des choses à protéger. »

Frédéric Couchet : Pour conclure tu encourages les personnes à relire ces transcriptions dont les références sont sur le site de l’April, april.org, c’est bien ça ?

Marie-Odile Morandi : Effectivement, j’encourage les auditeurs et les auditrices à relire ces transcriptions afin de garder à l’esprit et à tout moment ce dont il est question et d’être en capacité de réfléchir. Il en va effectivement de la protection de notre vie physique, de notre vie numérique et, comme cela a été souligné plusieurs fois, de notre démocratie.

Frédéric Couchet : Écoute merci Marie-Odile pour cette nouvelle chronique intitulée « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture ». Les références sont sur le site de l’April, april.org. Marie-odile je te souhaite de passer une belle journée, on se retrouve le mois prochain.

Marie-Odile Morandi : Entendu. À la prochaine fois.

Frédéric Couchet : À la prochaine. Nous allons faire maintenant une pause musicale. Le titre a été choisi par l’un de nos invités qui intervient tout à l’heure ; le titre s’appelle Clémentines, l’artiste c’est Löhstana et on se retrouve juste après.

Pause musicale : Clémentines par Löhstana.

16’ 38 Le collectif CHATONS Podcast

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Clémentines par Löhstana qui est une musique libre, licence Creative Commons Partage à l’identique. Les références sont sur le site de l’April. Comme vous l’avez entendu ce n’est pas tout à fait de saison parce que c’est la fin des clémentines ; en tout cas c’est un très beau titre et qui est en licence Art libre.

Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune 93.1 en Île-de-France et partout ailleurs sur le site causecommune.fm. Nous allons changer de sujet. Excusez-moi le démarrage a été un petit peu speed parce qu’on avait un petit problème technique. Je vais en profiter pour indiquer que le générique de début a changé ; je ne sais pas si les personnes qui écoutent régulièrement l’émission l’ont noté. Vous le réécouterez la semaine prochaine et je salue au passage PG qui est une personne du salon, qui nous a fait ce nouveau montage avec des voix réenregistrées récemment, il y a un petit montage différent par rapport à d’habitude. Je voulais le signaler parce que je l’avais oublié tout à l’heure lors de la diffusion du générique de début.

Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui va porter sur les CHATONS, le Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires, des mots qu’on va expliquer au fur et à mesure et je vais commencer par présenter mes invités. Normalement nous avons au téléphone Angie Gaudion de l’association Framasoft. Bonjour Angie.

Angie Gaudion : Bonjour.

Frédéric Couchet : Avec nous en studio Denis Dordoigne de l’association INFINI. Bonjour Denis.

Denis Dordoigne : Bonjour Fred.

Frédéric Couchet : Christian Pierre Momon de l’association April et du chaton Chapril. Bonjour Christian.

Christian Momon : Bonjour.

Frédéric Couchet : Nous allons donc parler des CHATONS, je vais refaire l’acronyme, dans le site web c’est chatons avec un « s » point org, donc Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires. D’abord un petit tour de table de présentation rapide de chacun et chacune d’entre vous pour dire qui vous êtes. On va faire dans le sens inverse ce coup-ci. Christian.

Christian Momon : Moi je suis développeur du Libre, membre de l’April, membre du conseil d’administration de l’April. Je fais des choses depuis une vingtaine d’années avec l’April. Je soutiens le chaton de l’April, entre autres, j’y participe activement.

Frédéric Couchet : Qui s’appelle Chapril, évidemment jeu de mots en « chaton » et « April ». Denis.

Denis Dordoigne : Moi, à titre professionnel, je travaille chez un hébergeur, ce sont des gens qui fournissent des services sur Internet ; on aide certaines boîtes à le faire. Je fais partie d’une association qui s’appelle INFINI, qui existe depuis plus de 20 ans maintenant, presque 25, qui fournit des services justement à ses utilisateurs et qui a été parmi les premiers chatons au lancement du projet.

Frédéric Couchet : D’accord. Je précise que tous les deux vous êtes bénévoles dans des structures de type chaton. Et toi Angie ?

Angie Gaudion : Moi je suis salariée au sein de l’association Framasoft qui a pour mission, objectif, de faire la promotion du logiciel libre et de la culture libre en général. Au sein de mes missions je suis chargée de communication et de partenariat et j’ai, pour le coup, actuellement la coordination du collectif CHATONS.

Frédéric Couchet : Très bien. Je précise d’ailleurs qu’on recevra normalement Pierre-Yves Gosset délégué général de Framasoft le 4 juin pour une émission sur Framasoft, et peut-être d’autres personnes de Framasoft. La date reste à confirmer ; en tout cas suivez l’actualité de l’émission. Première question collective : quel est le problème que le Collectif souhaite résoudre ? Qui veut commencer ? Christian ?

Christian Momon : Angie représente le collectif. Donc Angie à toi.

Frédéric Couchet : Donc Angie Gaudion de Framasoft.

Angie Gaudion : Le Collectif se donne pour mission de répondre à plusieurs problématiques. La première c’est la concentration des services sur le Web. On le sait très bien, les utilisateurs, les internautes savent qu’ils utilisent beaucoup de services très centralisés au sein de grandes entreprises qu’on appelle souvent les géants du Web ou les GAFAM. Ça c’est le premier élément. Le deuxième c’est la sécurité de nos données personnelles ; les affaires Snowden ou Cambridge Analytica nous on a montré qu’effectivement, quand on utilisait ces services très concentrés, eh bien en échange d’une fausse gratuité, on utilisait nos données personnelles. Et le dernier élément c’est qu’on a beaucoup de menaces sur la liberté d’expression et le partage des informations du coup qu’on a sur le Web. Ça ce sont des constats de base qui ont été faits avec la nécessité de repenser, en fait, comment on permet aux internautes d’utiliser des services qui vont leur permettre d’accéder à de l’information de manière plus neutre, de communiquer sur des outils qui ne vont pas les espionner ou ne pas utiliser leurs données personnelles, etc.

Frédéric Couchet : Merci Angie. Qui veut compléter cette introduction, Christian Momon.

Christian Momon : Historiquement c’était très intéressant de voir la démarche de Framasoft de mettre en ligne des services libres pour justement montrer qu’il existait des alternatives. Ça a été encore plus intéressant de voir, après quelques années, cette réflexion de dire que Framasoft ne devait pas être le point central de propositions.

Frédéric Couchet : Christian, tu vas peut-être un peu vite pour les personnes qui nous écoutent. On va juste rappeler des dates. La première chose à laquelle tu fais référence c’est la campagne Dégooglisons Internet de Framasoft, en 2014. Framasoft propose un certain nombre de services libres, éthiques, loyaux en alternative aux services des géants du Web plus connus sous le nom des GAFAM, mais il n’y a pas que les GAFAM ; GAFAM c’est Google Amazon Facebook, Apple, Microsoft, mais il y a aussi évidemment les géants chinois, etc. Ça c’est en 2014, Framasoft propose à travers Dégooglisons Internet de proposer des services.

Christian Momon : Une très belle campagne qui marche très bien. Plein de gens utilisent les services. D’ailleurs ils ont dû, je ne veux pas parler en leur nom, mais on sait qu’ils ont eu une montée en puissance des serveurs qui a été nécessaire, qu’ils ont assurée et qui fonctionne très bien. Du coup après effectivement, à priori il y a eu une réflexion en se disant « on ne va pas centraliser à nous toutes les alternatives. Ça serait bien que d’autres le fassent et que ça soit décentralisé ; que la fourniture de services alternatifs libres soit décentralisée. » Donc l’idée d’un collectif a mûri pour encourager cette démarche.

Frédéric Couchet : L’idée c’était que la porte d’entrée ne soit pas uniquement Framasoft, la porte d’entrée des alternatives aux GAFAM, mais soit un collectif. Denis est-ce que tu veux rajouter quelque chose sur cette partie-là.

Denis Dordoigne : Oui. Il faut bien se rendre compte que c’était progressif comme démarche. D’abord on prend conscience de ce qu’on fait, donc le Framablog, des choses qui proposent des articles régulièrement pour expliquer ce que sont les enjeux des grands du Net. Après il y avait eu l’étape « il faut arrêter d’aller chez les GSPIPAFAM » donc les services par Framasoft. Maintenant on a une troisième étape pour les utilisateurs : « attention Internet ne doit pas être centralisé » et c’est là-dedans que s’amène le projet CHATONS.

Frédéric Couchet : D’accord. Angie, comme tu travailles pour Framasoft est-ce que tu souhaitais ajouter des précisions sur cette partie historique ?

Angie Gaudion : Non. C’est la démarche en fait. Nous on dit souvent : « On ne veut pas devenir, du coup, le Google du libre », c’est la formule qu’on emploie. Le collectif CHATONS a vraiment été pensé pour éviter cette entrée, ce tuyau unique d’accès aux outils libres alternatifs.

Frédéric Couchet : D’accord. Je vais rappeler les dates : 2014 la campagne Dégooglisons Internet et le lancement du collectif CHATONS en 2016. Christian tu veux ajouter un dernier point sur cette introduction ?

Christian Momon : Oui. Il faut bien avoir en tête que des associations qui proposaient des services pour leurs adhérents ou même ouverts à tout le monde, il y en avait en parallèle de l’action, de la campagne de Framasoft. Mais il faut bien dire que c’était peu connu, il y avait peu de communication dessus et c’était souvent pour les adhérents du GULL qui n’étaient pas forcément très nombreux.

Frédéric Couchet : GULL c’est un groupe d’utilisateurs et d’utilisatrices de logiciel libre. On va éviter les acronymes ou on les explique. Mais c’est important que tu rappelles que des structures offraient déjà ces services-là. INFINI, par exemple, existe depuis une vingtaine d’années de mémoire.

Denis Dordoigne : On a 25 ans l’année prochaine. Faites le calcul : 1995.

Frédéric Couchet : 25 ans ! Encore plus anciennement que je ne pensais ! Donc ces structures-là existaient. Par contre ce qui va peut-être changer avec le Collectif et on va en parler, justement c’est un collectif avec une dynamique et aussi avec une charte et un manifeste dont on va parler assez rapidement.
Ça c’est l’introduction un petit historique avec le lancement en 2016 de ce Collectif. Dans le terme CHATONS donc avec un « S », parce qu’aujourd’hui on va parler des CHATONS avec un « S » et des « chaton » sans « s » qui sont les hébergeurs individuels, CHATONS ça veut dire Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires. Évidemment on ne va pas rentrer dans le détail de tout le manifeste et de la charte, mais si on se place du point de vue d’une personne qui nous écoute, qui a bien conscience des problématiques qu’a notamment exposées Angie au début sur la vie privée et les données personnelles d’utiliser les services des GAFAM ou des géants du Web et qui se dit : tiens je souhaiterais utiliser les services d’un chaton, donc d’un hébergeur, d’une structure qui héberge, qu’est-ce que va lui apporte un chaton en termes de services et aussi en termes d’engagement ? Finalement qu’est-ce qui différencie ces fameux chatons d’autres services ? Angie, peut-être, si tu veux commencer.

Angie Gaudion : Il y a plusieurs choses. Souvent on compare les membres du Collectif, donc chaque chaton, à des AMAP. En fait c’est une bonne analogie, je trouve, pour expliquer la façon dont fonctionne le Collectif et dont il est pensé au départ, à savoir des personnes de proximité. Dans les AMAP ça va être des producteurs ; dans l’univers des CHATONS ça va être des hébergeurs, donc des hébergeurs de proximité qui vont proposer des services alternatifs et avec qui on va pouvoir avoir un échange. Il y a vraiment cette notion très importante du coup qui est bien sûr faire héberger des services ailleurs que chez les géants du Web, mais pas que. C’est vraiment rencontrer des personnes qui ont un engagement, avec qui je vais pouvoir échanger, avec qui je vais pouvoir aller boire un café, peut-être même auprès desquelles je vais aussi pouvoir m’investir pour faire fonctionner tout simplement les services qu’ils proposent. C’est vraiment un élément très important dans les CHATONS. Donc le chaton va pouvoir soit apporter du service, soit apporter de la discussion, soit de l’entraide au sein d’une communauté plus large.

Frédéric Couchet : D’accord. Je rappelle qu’une AMAP c’est une association pour le maintien de l’agriculture paysanne. Finalement, dans le cadre des CHATONS, au lieu de trouver des paniers de légumes fournis par un agriculteur ou une agricultrice, on trouve des services en ligne fournis par un hébergeur de proximité. C’est un point important : quand tu as parlé de prendre un café ou un verre avec les personnes qui hébergent un chaton ça fait partie des engagements des chatons. Oui Christian ?

Christian Momon : Ça c’est un point très important de pouvoir rencontrer les gens qui gèrent les services parce que ça permet de créer une relation de confiance. Aujourd’hui, est-ce que les utilisateurs des services de Microsoft ou Google ont confiance en ces entreprises-là ? Eh bien difficilement ! Si elles veulent entrer en contact avec ce n’est pas évident ! Si elles veulent demander des vérifications ou comment ça fonctionne derrière, eh bien elles n’auront pas de réponse ! Alors que justement, là, avec de telles structures, on peut les rencontrer, ce sont des êtres humains, des vrais êtres humains, on peut leur poser des questions, on peut même participer. Du coup la relation de confiance et de transparence est géniale. Voilà !

Frédéric Couchet : Tu parles de transparence. Dans le mot des CHATONS il y a aussi « Ouverts », donc ouverture. L’un des engagements de base dans la charte et dans le manifeste – tous ces documents sont trouvables évidemment sur le site chatons.org, chatons avec un « s » – il y a la partie on va dire informatique qui est l’engagement logiciel libre. Denis c’est quoi l’engagement logiciel libre au niveau des CHATONS ?

Denis Dordoigne : Je ne vais pas forcément réexpliquer ce qu’est un logiciel libre ? Les gens doivent connaître à force d’écouter l’émission.

Frédéric Couchet : Tu peux réexpliquer en quelques mots.

Denis Dordoigne : Les logiciels libres ce sont des logiciels qui se définissent par les libertés qu’ils fournissent : la liberté de l’utiliser comme on veut, la liberté de l’étudier, la liberté de le modifier si on a des connaissances dessus et on a le droit de le redistribuer sous toutes les formes, même modifiées. Pour nous c’est important de n’utiliser que des logiciels libres, parce que c’est l’aspect pour que vraiment les gens puissent avoir confiance sur toute la ligne en ce qu’on fait, de ce qu’ils ont. Du coup, si quelqu’un qui utilise nos services nous demande : « Mais comment c’est fait, il y a quoi à l’intérieur ? », on peut lui donner. S’il n’a pas de compétences il peut demander à quelqu’un de vérifier, mais on sait que c’est transparent : n’importe qui peut vérifier que ce qu’on a c’est ce qu’on dit.

Frédéric Couchet : Christian tu veux compléter ?

Christian Momon : De ce point de vue-là la charte est magnifique. J’encourage vraiment les auditeurs à aller la voir ; elle reprend chacune des lettres du nom du Collectif, de CHATONS, et pour chaque lettre est expliqué ce qui est attendu et en fait ce sont d’énormes contraintes. Si on lit attentivement, il y a plein de contraintes.

Frédéric Couchet : Ce ne sont pas des contraintes, ce sont des engagements forts !

Christian Momon : Oui, mais quand on veut adhérer à cette charte ça représente beaucoup de contraintes, à beaucoup de niveaux. Par exemple il faut même documenter sa plateforme, ses services, et il faut partager la documentation sur ses services. Du coup j’utilise le mot « contrainte » exprès pour montrer que la charte est un vrai engagement mais que ces contraintes, en fait, ne sont pas si négatives que ça dans le sens où elles montrent une démarche et elles permettent vraiment de partager et d’avancer.

Frédéric Couchet : D’accord. Donc la charte et le manifeste ont été rédigés en grande partie par Framasoft mais avec un appel à commentaires ouverts. Angie, est-ce qu’il y a des points de la charte ou du manifeste que tu souhaites mettre en avant sur la partie engagement justement par rapport aux personnes qui vont utiliser les services d’un chaton ?

Angie Gaudion : Un élément qui à moi semble intéressant ce sont les conditions générales d’utilisation. On en parle beaucoup auprès des services privateurs proposés par les géants du Net ; en général c’est incompréhensible, ça fait une longueur incroyable ! Il y a une obligation dans la charte que l’ensemble des hébergeurs qui font partie du Collectif aient des conditions générales d’utilisation qui soient claires, accessibles à tout le monde et qui ne soient pas contradictoires, bien sûr, avec le reste de la charte, qui respectent les principes qui sont posés dans cette charte. Je trouve que c’est vraiment un élément important : quand on a des conditions générales d’utilisation qui sont faciles à comprendre, eh bien c’est le premier élément de la confiance. Ce qui n’empêche pas ensuite d’aller rencontrer, mais je trouve qu’arriver sur un site et avoir ses CGU c’est vraiment un élément très important pour rendre visible ce que fait chaque hébergeur.

Frédéric Couchet : On va préciser que ces CGU, donc ces conditions générales d’utilisation, sont lisibles.

Angie Gaudion : Bien sûr.

Frédéric Couchet : Parce que souvent elles ne sont pas lisibles, volontairement évidemment, chez d’autres structures. Elles sont plus ou moins longues. Je précise, même si on le rappellera tout à l’heure, que quand on veut créer un chaton Framasoft, on peut s’inspirer des CGU qui existent déjà. Par exemple dans le cas du Chapril on s’est inspiré des CGU de Framasoft ; ça c’est important. Dans les CGU on a parlé de logiciel libre, on a parlé aussi de transparence, de données personnelles, il y a un engagement très fort sur la protection des données personnelles et sur la transparence des demandes qui pourraient être faites de retrait ou d’interventions, par exemple judiciaires. Christian, quand tu parlais tout à l’heure de transparence, normalement chaque chaton doit afficher sur ses pages à la fois les incidents techniques mais aussi les demandes éventuelles de retrait, les problèmes techniques qu’il pourrait y avoir sur les données personnelles. Il y a un engagement très fort, et je vais vous redonner la parole, je crois aussi, de mémoire, qu’il y a un engagement sur le modèle économique : de ne pas recourir à la publicité pour éviter le filtrage des personnes qui utilisent ces services. Christian ?

Christian Momon : Oui et de ne pas faire d’argent avec les données personnelles ou les données collectées dans le cadre de l’exploitation de la plateforme.

Frédéric Couchet : Ne pas les monétiser.

Christian Momon : Exactement !

Frédéric Couchet : D’accord. Denis là.-dessus.

Denis Dordoigne : On a le droit à la publicité, mais elle ne doit pas être par rapport aux données personnelles. Les publicités ne doivent pas utiliser les données personnelles pour être personnalisées, etc. On peut avoir le modèle économique qu’on veut.

Frédéric Couchet : D’accord. Merci de cette correction. Effectivement j’avais peut-être lu un petit vite. Christian.

Christian Momon : Effectivement on parlait d’AMAP tout à l’heure, mais n’importe quelle entreprise ou structure juridique peut se déclarer un chaton du moment qu’elle respecte la charte. La charte n’est pas un point de blocage par rapport à une structure d’entreprise.

Frédéric Couchet : On va y revenir effectivement tout à l’heure. J’encourage les personnes à aller sur le site des CHATONS, chatons.org avec un « s », notamment pour lire un petit peu le manifeste et la charte ; il y a aussi une foire aux questions. Vous y trouverez notamment des engagements sur la neutralité aussi, sur l’absence de censure à priori. Peut-être qu’on n’entrera dans le détail aujourd’hui sur ces aspects-là, peut-être qu’on fera une autre émission où on rentrera plus dans le détail, notamment parce qu’il y a des évolutions juridiques qui arrivent. Un point essentiel d’ailleurs : quand on parle d’hébergeur on parle bien du statut d’hébergeur dans le sens de la loi pour la confiance dans l’économie numérique ; c’est un point essentiel qu’on abordera peut-être dans une seconde émission parce que si on n’a pas officiellement ce statut-là, en tout cas si on ne se déclare pas en tant qu’hébergeur, on peut avoir quelques problèmes quand on héberge un chaton. Je parle d’un point de vue simplement « héberger un chaton ».

Christian Momon : D’où l’intérêt d’utiliser vraiment la charte CHATONS et d’intégrer le Collectif parce qu’il y a vraiment une base qui donne un périmètre clair, qui aide à démarrer quand on veut se lancer et c’est très pratique.

Frédéric Couchet : On va revenir et on va continuer sur les hébergés, parce quand il y a hébergeur il y a des hébergés, donc des personnes ou des structures hébergées qui utilisent les services d’un chaton. Naturellement on se pose la question : quels services on trouve sur ces fameux chatons ? Est-ce qu’on trouve tous les services dont on pourrait avoir besoin ? Quels types de services on trouve ? Angie, toi qui animes ce Collectif, tu as sans doute une vision plus large que nous, quels sont les types de services qu’on trouve sur les différents chatons et quels sont les services finalement les plus demandés si on a déjà cette information-là, les plus entre guillemets « utilisés » par les personnes ?

Angie Gaudion : Le nombre de services est très large. On va trouver vraiment tous types de services, en revanche on ne va pas forcément tous les trouver au sein du même hébergeur. Il va y avoir des hébergeurs qui vont se focaliser sur le fait de proposer par exemple uniquement du courrier électronique et du stockage et du partage de fichiers. D’autres qui vont être davantage sur, je ne sais pas, l’agrégateur de flux RSS, un gestionnaire de mots de passe, de la cartographie, de la messagerie collaborative. Voilà ! C’est très varié en fait sur les types de services qui sont proposés et, j’allais dire, ça regroupe quasiment tous les types de services qu’on peut avoir, du coup, dans les services web actuels, avec même en plus des services, on va dire, liés proprement à l’hébergement. C’est-à-dire qu’on peut passer par un chaton pour avoir un hébergement sur un serveur, ce qui relève, du coup, d’autre chose que du service web dans sa globalité. Mais d’un chaton à l’autre on va avoir des choix qui vont être faits tout simplement par les personnes qui vont proposer le chaton, la structure qu’il y a derrière qui ne pourra pas forcément maintenir tous les types de services, c’est impossible, et qui diront on va faire des choix en fonction de sa compétence.

Frédéric Couchet : D’accord. Justement petite question collective et on commencera par toi Angie : en gros au niveau de Framasoft vous êtes historiquement les premiers est-ce que tu sais combien de services différents vous offrez aujourd’hui ?

Angie Gaudion : Au dernier comptage on est à 34 services différents.

Frédéric Couchet : D’accord.

Christian Momon : Bravo !

Frédéric Couchet : Bravo ! Donc une large de palettes de services. Je vais poser la même question. On va commencer par Denis pour INFINI.

Denis Dordoigne : Ça dépend ce qu’on appelle services, mais entre 30 et 50 je dirais selon la définition qu’on utilise.

Frédéric Couchet : Ah ! D’accord. OK.

Christian Momon : Vos utilisateurs.

Denis Dordoigne : En fait quand on est devenu chaton on a proposé les services que faisaient Framasoft, le pad des choses comme ça ; on en a récupéré une douzaine. C’est vraiment parce qu’on voulait participer au projet de Framasoft de se décentraliser. On fournit des services depuis 1995 à nos adhérents donc il y a des services très divers comme le mail et des listes de diffusion. On fait de l’accompagnement pour créer des sites internet, des wikis, des SPIP, enfin…

Frédéric Couchet : Ça dépend effectivement de la définition de service. Là je parlais plutôt de services en ligne, donc pas forcément des formations pour utiliser un SPIP. C’est intéressant d’expliquer que vous faites les deux, en fait, chez INFINI.

Denis Dordoigne : Et dans les services qu’on aide. On a un service de publication de vidéos qu’on n’a pas ouvert au public ; on a des services de cartographie qu’on commence à ouvrir au public. On a un service de cloud pour synchroniser son téléphone qui n’est réservé qu’aux adhérents. Techniquement on a des services qu’on est les seuls à proposer chez les chatons. Par exemple on fait de la diffusion de radio en ligne : il y a des réémetteurs aujourd’hui en Bretagne qui sont alimentés par des services hébergés par les services INFINI. Là je ne pourrais pas les dire, mais vraiment beaucoup de services parce qu’on est anciens, tout simplement.

Frédéric Couchet : Vous retrouverez toute la liste sur infini.fr. Je vais la parole à Christian qui rigole d’avance parce le nombre de services offerts sur le Chapril pour l’instant va faire petit, mais c’est un petit chaton, le Chapril. Combien de services, Christian ?

Christian Momon : Chapril, le chaton de l’April, est très récent. Il est né fin 2017, donc il propose actuellement quatre services et il y en a six en cours de préparation. Voilà !

Frédéric Couchet : Effectivement c’est un service récent. On n’inclut pas les services qu’on propose aux membres depuis très longtemps et ça me fait penser que tout à l’heure on aura justement une discussion, après la pause musicale qui va bientôt arriver, sur justement à quels types de public s’adressent les services ? Est-ce que certains services sont restreints en fonction du type de public ? On voit déjà quand même, en tout cas en allant sur chatons.org, on peut trouver largement des services et avec un aspect local qui est très important parce que j’ai peut-être oublié de préciser que INFINI c’est en Bretagne.

Denis Dordoigne : Oui. À Brest.

Frédéric Couchet : À Brest. Une partie de l’équipe Framasoft est à Lyon. C’est bien ça Angie ?

Angie Gaudion : Oui. Cependant on dit plutôt que notre univers c’est le Web, On n’est pas trop localisés puisque, du coup, on propose des services web qui sont accessibles à priori à n’importe qui.

Frédéric Couchet : Chapril, c’est pareil, c’est accessible à n’importe qui même si beaucoup d’évènements, notamment les apéros et les rencontres, se font à Paris, même s’ils peuvent se faire également ailleurs.

Christian Momon : Oui. À Marseille, à Montpellier et bientôt à Toulouse j’espère. Dans nos animateurs de services au Chapril on a des Lillois on a maintenant des Mulhousiens, enfin c’est assez réparti. Donc s’il y a besoin de rencontrer, on a des gens qui ne sont pas que à Paris.

Frédéric Couchet : D’accord. On va faire une pause musicale avant de poursuivre la discussion sur la partie « héhergés ». Le titre s’appelle Akilou, le groupe s’appelle 6 février 1985 et on se retrouve juste après.

Pause musicale : Akilou par 6 février 1985.

Voix off : Cause Commune 93.1

41’ 45 Le collectif CHATONS Suite

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Akilou par 6 février 1985. Cette musique est disponible en licence libre Art libre et vous retrouvez la référence sur le site de l’April.






Frédéric Couchet : Nous allons faire une pause musicale, un nouveau titre choisi par Christian, c’est Schmaltz par Jahzzar et on se retrouve juste après.

Pause musicale : Schmaltz par Jahzzar.

Voix off : Cause Commune 93.1

1 h 11’ 53 Chronique « In code we trust » Podcast

Frédéric Couchet : Nous étions en train d’écouter Schmaltz par Jahzzar. Nous allons maintenant passer au sujet suivant, je vais demander à la régie d’activer le micro de Noémie. Merci Patrick. Le sujet suivant, comme je le disais tout à l’heure, c’est la chronique juridique « In code we trust »