Les idées reçues des OSC sur l’open : parlons open source et open data !

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Titre : Webinaire - Les idées reçues des OSC sur l’open : parlons open source et open data !

Intervenant·e·s : Mathieu Wostyn - Mathieu Noblecourt - Jean-Christophe Becquet - Johan Richer - Maeve

Lieu : Webinaire - Projet Renforcer la gestion des données programmes des OSC francophones

Date : 17 mai 2022

Durée : 1 h 17 min 40

Vidéo

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Maeve :Bonjour à tous. Bienvenue à ce premier webinaire de la série du décryptage des enjeux de la gestion de données programmes qu’on organise au niveau de CartONG avec Ritimo et nos partenaires pour ce webinaire.
Je me présente. Je suis Maeve, je suis responsable du projet qui vise à renforcer les pratiques des ONG francophones en gestion de données programmes. C’est dans ce cadre-là qu’on organise cette série de webinaires.
On est sur la troisième année du projet. Dans le cadre du projet on a sorti et publié énormément de ressources à la fois un peu structurantes pour le secteur et aussi très pratico-pratiques avec une boîte à outils pour les ONG, etc. Mais, avec cette série de webinaires, on voulait vraiment aider les ONG à prendre un peu de hauteur sur certains enjeux importants à long terme, aujourd’hui il y a la question l’open, mais on en a également d’autres en réserve pour les quatre mardis qui viennent.
Pour poser un petit peu le sujet, la semaine dernière on avait une session inter ONG sur la gestion de leurs données programmes et pendant cette journée qui a été pleine de péripéties, on a évoqué un peu le sujet de l’open source en demandant aux ONG d’indiquer, selon elles, qu’elle était leur maturité sur ce sujet-là, sur d’autres également et sur le sujet de l’open source, sur une échelle de 0 à 5 les ONG opérationnelles se sont placées à peu près toutes entre 0 et 1, pour vous donner un petit peu le cadre pour ce webinaire d’aujourd’hui.
Il y a une multitude de raisons à tout cela qu’on va vraiment explorer avec plus de détails aujourd’hui. C’est vraiment pour vous dire que cette séance d’aujourd’hui a vraiment pour objectif d’outiller un petit peu les ONG, les aider à cerner le sujet, les possibilités qui s’offrent à elles, quand est-ce que ça peut être pertinent pour elles d’utiliser de l’l’open source.
Pour vous présenter très rapidement le déroulé, on démarrera avec Mathieu qui présentera un petit peu les intervenants qu’on a et que j’on remercie d’être là. Qui va également vous présenter un petit peu les concepts de l’open et du Libre, on parle beaucoup d’open source, mais on traite aussi le sujet de l’open data aujourd’hui.
On enchaînera un peu avec un état des lieux de la situation des ONG aujourd’hui en termes d’open qui sera fait par un de nos intervenants, Martin.
On basculera ensuite sur une série de questions pour nos intervenants auxquelles vous pouvez également ajouter, par le biais de la discussion publique, toutes les questions qui vous semblent intéressantes.
En termes d’open on a tenté aujourd’hui de montrer un petit peu l’exemple au niveau de CartONG en passant sur un nouvel outil, BBB [BigBlueButton], parce que nos webinaires, par le passé, étaient sur Zoom. Nous sommes tous plein de contradiction, en particulier dans le monde de l’humanitaire, il faut garder ça en tête. Je pense que beaucoup d’intervenants n’ont pas forcément l’habitude d’utiliser BBB. Pour les aspects pratiques vous avez le chat sur lequel vous pouvez réagir, on prendra les questions en fonction du déroulé, en gardant en tête que le public cible reste aujourd’hui les ONG, je le précise parce que, en termes de niveau technique, de vocabulaire utilisé et du type de questions ça peut avoir quand même un impact. On ne pourra pas répondre à toutes les questions techniques, en une heure et quart, si on veut aborder tous les sujets, donc les garder en tête. On vous demande juste de ne pas utiliser la main levée qui est disponible, mais vraiment utilise le chat si vous avez des interventions à faire.
Dernier point. Ce webinaire est enregistré. Il sera également disponible en licence libre suite au webinaire, bien entendu. Si on parle en vocabulaire Framasoft on peut parler un peu de ressources compostables. Vous le trouverez, on le mettra à la fois à disposition sur, désolée, le YouTube de CartONG et je pense également sur un PeerTube libre par ailleurs. Vous pourrez le voir. N’hésitez pas aussi à consulter le portail, on partagera le lien, le portail IAM sur lequel on a des posts de blogs où on fera également une série de posts de blogs associés à ce webinaire. On en aura moins deux sur l’open, c’est aussi une occasion pour vous d’aller voir un petit peu les sujets liés à ce webinaire un peu plus en détail suite à l’intervention.
Je m’arrête là. Je laisse la parole à Mathieu Wostyn.

Mathieu Wostyn : Bonjour à toutes et à tous. Merci beaucoup d’être présents et présentes. Merci beaucoup à Maeve pour l’initiative. Maeve s’est présentée rapidement, elle est aussi responsable de projets en collecte de données et gestion de l’information pour CartONG. Je suis moi-même en charge du numérique pour le réseau Ritimo qui compte à peu près une soixantaine d’associations membres en France sur des questions de solidarité internationale, en particulier sur les questions liées à l’information et ses conditions de production, de publication et de diffusion, d’où le lien avec le numérique, en particulier le numérique libre, puisque aujourd’hui Ritimo fonctionne uniquement avec des logiciels libres. Je pense Johan aura aussi l’occasion de témoigner de ça de son côté.
Je voulais présenter rapidement nos intervenants du jour. Merci à eux d’avoir répondu présent pour cette session.
Johan est cofondateur de la coopérative multi, qui s’appelait Jailbreak, qui était connue sous ce nom-là avant et qui a une grosse implication dans de nombreuses initiatives qui tournent autour des questions de l’open data et de la Carto, mais peut-être qu’il développera quand il prendra la parole.
Martin exerce aussi au sein de CartONG et est responsable de projets en cartographie participative et en open data, du coup SIG Map, OpenStreetMap, pareil il développera un petit peu.
Enfin Jean-Christophe, actuellement vice-président de l’April, l’association de promotion du logiciel libre, qui est aussi membre du groupe de travail Libre Asso dans ce cadre-là et qui est le fondateur d’Apitux.
Mer remerciements également pour ??? et Anaïs qui ont apporté de précieuses contributions pour la préparation de ce temps et puis à John pour la gestion technique de l’évènement À propos de cette instance de BigBlueButton sachez qu’elle est hébergée chez Globenet qui est un hébergeur militant pour les organisations de la société civile et les organisations de la solidarité internationale depuis le milieu des années 90 et qui a la particularité d’être totalement autonome sur son infrastructure tant du point de vue des machines que du réseau, ce qui est suffisamment rare pour le souligner.
Je vais passer tout de suite aux concepts clés qu’on va aborder. Pas d’inquiétude à ce sujet, vous verrez qu’on aura amplement le temps de développer ces concepts et leurs conséquences pratiques. Là on voulait juste redéfinir un petit peu ce qu’on entend par logiciel libre, en l’occurrence qu’il est principalement défini par sa licence. Ce qui fait qu’un logiciel est dit libre c’est en raison de la licence sous laquelle il est délivré en particulier pour ce commun de la connaissance. En contradiction avec le logiciel dit propriétaire, si ça vous va on va l’appeler privateur de liberté ou privateur tout court, que le logiciel libre ou open source accorde des droits aux utilisateurs et utilisatrices et il donne des obligations aux éditeurs ou aux développeurs et développeuses. C’est absolument l’inverse de ce qu’on connaissait avec le logiciel privateur qui nous accorde bien peu de droits en tant qu’utilisateur et utilisatrice et qui s’arroge tous les droits en tant qu’éditeur de logiciel.
Il y a la question des quatre libertés qui sont à l’écran, ces fameuses libertés qui sont accordées aux utilisateurs et utilisatrices, celle d’exécuter le logiciel, celle de l’étudier et de le modifier, celle de le diffuser, de le redistribuer et également de redistribuer des versions que vous auriez modifiées : à compter du moment vous apportez des modifications vous êtes tenu de communiquer les modifications que vous avez apportées à l’ensemble de la communauté.
Un logiciel open source, souvent les deux sont employés comme des synonymes, on ira peut-être un peu plus dans ce détail-là, parce que, en réalité, ça ne recouvre pas tout à fait le même sens. Si, d’un point de vue technique ou juridique ce sont quasiment les mêmes objets, d’un point de vue politique, on parlera de projet de société, Jean-Christophe y reviendra longuement, c’est un peu différent. D’un point de vue purement techniquement technique un logiciel open source est un logiciel développé par des communautés de manière décentralisée, massivement. Le logiciel open source est délivré sous des licences qui sont compatibles avec le logiciel libre, mais l’intention qui est derrière est un petit peu différente. On y reviendra.
Enfin on voulait vous citer quelques exemples que vous connaissez probablement, que vous êtes nombreux et nombreuses à connaître et à utiliser, en l’occurrence des logiciels plutôt métiers comme Toolbox ou Open Data Kit. Il y a des logiciels que vous utilisez peut-être au quotidien comme LibreOffice, comme Mozilla Firefox et peut-être des services en ligne, c’est-à-dire des logiciels hébergés par des hébergeurs comme Nextcloud qui est un logiciel libre également et des associations qui font la promotion ou qui mettent à disposition des logiciels libres comme Framasoft et comme l’April. On en a parlé en introduction puisque Jean-Christophe en est issu.
Je voulais aussi revenir sur la question de l’open data et d’où ça vient. C’est vraiment l’idée qu’on parle de données numériques dont l’accès et l’usage sont laissés libres aux usagers, donc il y a une filiation avec le Libre et l’open source dans l’objectif d’être dans une plus grande transparence et de permettre l’exploitation de ces données, c’est-à-dire que ça implique forcément qu’il y a un droit à la réutilisation des données. L’idée c’est qu’on s’inscrit un petit peu dans les communs et qu’on favorise la contribution avec le point d’attention qui va être souligné, à mon avis, par les intervenants, en l’occurrence la question de l’interopérabilité, c’est-à-dire les données structurées et comment on peut les réemployer.
Quelque chose que j’ai oublié de dire et je présente mes excuses, je mets intervenant au masculin. On a eu cette discussion et ça serait important pour nous d’avoir cette attention qu’il y ait une parité dans les intervenants et les intervenantes, malheureusement on n’a pas réussi. En tout cas c’était un point d’attention de notre part.
On peut passer à quelques exemples au sujet de l’open data que vous connaissez probablement, certainement même, qui sont OpenStreetMap ou HDX [Humanitarian Data Exchange], des logiciels qui sont gérés par leur communauté.
Je vais passer la parole à Martin qui va nous faire un petit état des lieux sur là où en sont les ONG sur ces questions de l’open, open source ou open data.
Martin c’est à toi.

13’ 37

Mathieu Noblecourt : Merci Mathieu.
En introduction je vais préciser, je vais vous donner quelques points qui sont forcément subjectifs vus de l’angle de CartONG qui est amenée à travailler avec diverses organisations humanitaires de toutes tailles, des petites aux plus grosses. Après chacun dans sa réalité, dans son terrain, dans son organisation, voit les choses un peu différemment. C’est aussi le sujet de la discussion.
En termes de propos introductifs peut-être préciser que ce sont quand même deux sujets, l’open source et l’open data, qui sont de plus en plus fréquemment évoqués dans les ONG mais avec souvent des incompréhensions, des manques de connaissances. On a déjà eu quelques points informatiques de Mathieu mais c’est aussi l’objet de ce webinaire de creuser.
Du point de vue de CartONG on constate que le prisme qu’on a dans les ONG sur ces questions-là c’est souvent celui qu’on retrouve sur beaucoup de sujets, à savoir aller vers le plus opérationnel, le plus efficace, le moins cher, en l’occurrence ici, dans le cas de l’open, sans forcément se poser la question de la licence. C’est notamment lié, évidemment, au fait que vous connaissez bien, au contexte, au modèle économique et organisationnel des organisations ONG ou associations qui sont souvent sur peu de moyens avec peu de ressources humaines, donc qui se focalisent sur l’opérationnel sans forcément se poser de questions sur les enjeux qu’on pourrait appeler de support ou d’outils, derrière, ce qui fait qu‘il y a parfois un décalage.
L’usage tel qu’il est actuellement, tel qu’on l’observe, est en fait très varié selon les champs techniques au niveau des outils open source et libres. On va avoir certains champs qui sont, on va dire, liés à d’autres secteurs où le Libre est très utilisé, ça va être le cas notamment dans toutes les technos web, par exemple tout ce qui va être développement de dashboard en JavaScript, tout ce qui va être les technologies d’Internet où le Libre est très présent, donc forcément le secteur humanitaire se cale dessus. On va avoir un usage mixte avec une présence d’outils propriétaires existants mais aussi des outils libres assez performants, c’est notamment le cas dans les systèmes d’information géographique où on a vraiment un duopole entre les outils ESRI, ArcGIS et QGIS le logiciel libre qui sont à peu près à l’équilibre avec chacun, on va dire, ses points de performance, ses points de faiblesse, donc un usage assez équilibré et souvent complémentaire d’ailleurs. On a tout le champ où, à l’inverse, on va dire dans le secteur hors humanitaire, dans la ??? générale, le propriétaire est très présent. C’est notamment le cas de tout ce qui va être les outils un peu simples de type bureautique, donc la suite Office, notamment Excel qui a un usage écrasant dans le secteur, la suite Google aussi est très utilisée, des outils comme Power BI où là, effectivement, la très forte présence de ces outils en général fait que secteur se cale aussi dessus. Enfin dans le champ des outils plus métiers on pourrait dire, là c’est plus proche de ce qu’on peut avoir sur le SIG, c’est assez variable, notamment tout ce que sont les outils de collecte des données où on va avoir quelques outils très en pointe en Libre et en open source et, à l’inverse aussi, des solutions propriétaires développées par des structures spécialisées qui ont parfois une forme de monopole sur un champ assez réduit.
Sur la question de l’open data. Au niveau du secteur on constate une pratique de partage des données qui est très généralisée entre les opérationnels sur le terrain mais rarement formalisée. C’est-à-dire que la question de la licence est souvent une zone grise pour différentes raisons. Il y a souvent des problématiques de qualité de la donnée qui est insuffisante ou incertaine donc les organisations ont du mal à la rendre complètement publique, c’est-à-dire qu’elles la partageront informellement mais sans forcément la mettre sur une plateforme. On a un manque de connaissance de ces sujets-là, parfois aussi un manque de temps tout simplement pour faire ce partage.
On a quand même de plus en plus des plateformes et des organismes qualifiés qui sont présents pour les gérer, Mathieu a cité HDX qui est une émanation de OCHA, l’organisation humanitaire des Nations-Unies. Ce sont des outils qui se déploient de plus en plus, des plateformes nationales font ça de plus en plus, les équivalents de data.gouv.fr existent dans de plus en plus de pays maintenant.
Une des questions qu’on a encore, qui est assez prégnante, c’est la question du modèle économique derrière tout ça, c’est-à-dire la question du partage par défaut en open data des données publiques ou d’intérêt général, ce qu’on a depuis toujours par exemple aux États-Unis, qui se fait de plus en plus France, n’est pas encore acté à l’échelle mondiale et on a encore des pays où on a, également pour des raisons économiques, des instituts statistiques ou géographiques nationaux qui sont sur des modèles économiques très précaires parce qu’ils n’ont pas les mêmes bases de financement public que ce qu’on peut avoir en Europe donc pour lesquels cette banque de données reste une composante importante avec parfois des situations dans certains pays où le modèle économique n’est pas très clair et on peut se retrouver à acheter des données sur une clef USB sans qu’il y ait une licence très formalisée. Ce sont des choses qui existent encore.
Au niveau des efforts pour aller vers plus d’open source et d’open data. On a des exemples d’outils, j’ai cité HDX au niveau de l’open data, on l’a aussi en open source. On a cité KoBoToolbox qui est basé ODK, un des outils les plus utilisés de collecte de données, qui sont des efforts mutualisés on va dire à l’échelle du secteur pour développer ce type de plateforme. Les deux exemples, en l’occurrence, sont soutenus par les Nations-Unies, ce sont effectivement les très gros acteurs qui sont en capacité de porter ça, sachant que même dans ces cas de figure c’est souvent de l’open source et c’est vraiment du Libre pour reprendre la définition qu’a prise Mathieu parce que les acteurs qui portent ces plateformes ont souvent un manque de temps, de ressources et de capacités pour faire un vrai portage communautaire. Ils vont développer en Libre, ils vont le publier, mais personne n’est capable de contribuer parce que le travail de documentation et d’entraînement n’est pas fait, généralement pas par mauvaise volonté, mais en fait par manque de ressources parce que c’était déjà un gros effort pour eux de faire cet outil-là en open data. Je ne vais pas gloser sur les questions de financement du secteur humanitaire et du développement, mais tout le système de financement par projet fait que c’est souvent assez facile de dire on va faire un one-shot de développement en open source par contre après, maintenir dans le temps une communauté de contributeurs, évidemment il n’y a plus aucun bailleur pour payer ça, il y en a un petit peu mais c’est assez rare.
On a quelques contre-exemples. Le meilleur contre-exemple c’est OpenStreetMap dont, je pense, on reparlera au cours de ce webinaire, qui est né, on va dire, d’une initiative est beaucoup plus venue du terrain et qui a réussi à se structurer avec le temps, mais aussi avec beaucoup de relations avec le ???. C’est aussi un exemple intéressant de comment ces questions de modèle économique sont rarement noires ou blanches.
Pour conclure. J’ai fait un panorama général. Il y a une grande diversité d’usages dans ce qu’on voit entre les sièges d’organisation et le terrain, les grosses et les petites organisations. Il faut parfois se méfier un petit peu de ce qu’on pourrait imaginer, c’est-à-dire que ce ne sont pas forcément les plus petites organisations ou les acteurs de terrain qui vont aller vers de l’open source ou de l’open data, ce qui serait pourtant plus pertinent pour eux, mais parce que, encore une fois justement, ces questions de formation, de connaissances, etc.
Tout ça pose la question de l’alignement entre les enjeux éthiques, les positionnements politiques, finalement les missions de ces organisations, leurs problématiques financières que j’ai évoquées plusieurs fois et la réalité opérationnelle. Je pense que ça va faire l’objet de ce dont on va discuter dans la suite de webinaire.
Merci.

Mathieu Wostyn : Merci beaucoup à toi. C’est effectivement une super transition. Je voulais adresser ma première question à Jean-Christophe et à Johan, parce que ce qui nous a interrogé c’est quels seraient les arguments, quelles sont les raisons qui pourraient pousser les ONG à adopter l’open source et l’open data. Je pense qu’on va tirer les fils que tu as présentés, Martin, sur l’alignement des valeurs mais aussi tous les aspects communautaires et, à côté de ça, les risques que fait peser le fait de choisir des outils privateurs pour des ONG. Je laisse la parole tout de suite à Jean-Christophe ou Johan. C’est à vous.

Jean-Christophe Becquet : Bonjour à tous, bonjour à toutes.
J’accompagne depuis une vingtaine d’années des structures, associations, collectivités territoriales, entreprises pour passer au logiciel libre et à l’open data. Au titre de mon implication associative, comme l’a dit Mathieu, je suis vice-président de l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Ce dont je vais vous parler c’est de logiciel libre et pas d’open source, parce que ce qui m’intéresse dans le logiciel libre, c’est l’aspect politique et éthique qui est porté et qui est à l’initiative du logiciel libre. Vraiment insister sur ce qu’a dit Mathieu en introduction sur le fait qu’un logiciel libre n’est pas un logiciel qui n’a pas de licence. On emploie parfois à tort l’expression « libre de droits ». En fait un logiciel libre est libre par le droit. C’est parce que les auteurs qui ont conçu ce logiciel ont décidé de le partager sous licence libre que ce logiciel est un logiciel libre.
À l’April on va jusqu’à dire que le logiciel libre est un projet de société. En effet cette liberté logicielle, cette liberté informatique, cette liberté sur les données lorsqu’on parle d’open data, pourquoi est-elle si importante ? Elle est importante parce que aujourd’hui, dans tous les aspects de nos vies, l’informatique est présente. Aujourd’hui on utilise l’informatique pour communiquer, on utilise l’informatique pour exerce sa vie citoyenne, on utilise l’informatique pour apprendre et bien sûr dans le travail, dans l’activité professionnelle, qu’on exerce à titre salarié ou associatif dans une organisation, l’informatique est omniprésente. Ça a été en plus amplifié par ces deux années de crise sanitaire avec un grand nombre d’interactions qui sont passées en ligne, avec des outils de travail collaboratif, de visioconférence, de réunion à distance, etc. On voit bien que l’informatique est vraiment présente dans tous les aspects de nos actions. C’est pour ça que c’est si important de questionner la liberté qui est octroyée ou pas par les outils qu’on utilise.
On parle beaucoup du logiciel libre, c’est un sujet qui est assez à la mode dans les médias, mais ce phénomène est assez récent. En fait le logiciel libre n’est pas récent du tout. Il est inventé en 1984 et c’est quelque chose de solide, d’éprouvé. L’endroit où on trouve le plus de logiciels libres c’est dans l’infrastructure d’Internet. S’il n’y avait pas de logiciel libre, eh bien Internet ne pourrait tout simplement pas fonctionner ; la majorité des serveurs et des routeurs de l’Internet fonctionne avec des logiciels libres. On peut vraiment dire qu’il y a une coconstruction qui s’est faite entre le réseau internet et le logiciel libre. Sans le logiciel libre le réseau internet ne pourrait pas fonctionner mais c’est aussi grâce au réseau internet qui a permis le travail collaboratif et à distance que les développeurs de logiciels libres ont pu monter en puissance et travailler sur des projets logiciels à l’échelle planétaire.
Donc comprendre que le logiciel libre est un sujet essentiel aujourd’hui dans tous les aspects de nos vies, que c’est une solution techniquement robuste, éprouvée à la plupart des besoins informatiques.
Peut-être pour finir et avant de laisser la parole à Johan, revenir un peu sur cet aspect historique. En effet, lorsque Richard Stallman formalise la notion de logiciel libre en 1984, son objectif n’est pas de faire des logiciels plus performants, plus conviviaux ou plus efficaces, son objectif c’est de changer le monde. Le logiciel libre est véritablement un projet dont l’ambition est de rendre aux utilisateurs de l’outil informatique la maîtrise sur leurs outils et leurs données. On reviendra sur ces aspects pour les approfondir un petit peu plus tard, mais vraiment avoir à l’esprit qu’on n’est pas du tout sur un questionnement technique, mais qu’on est sur un questionnement qui est politique et éthique et dont les organisations de la société civile ne peuvent pas s’affranchir malgré les contraintes, ça a été dit, financières et de ressources humaines auxquelles elles sont confrontées. Ce sont malheureusement des sujets trop essentiels pour les éluder d’où l’importance de moments comme ce webinaire aujourd’hui.
Johan, je te laisse.

27’ 22

Johan Richer : Merci Jean-Christophe