Différences entre les versions de « Les communs, la recherche et le libre accès - Pablo Rauzy - PSES2018 »

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Et en fait, ce qui se passe quand on fait ça,
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En fait, ce qui se passe quand on fait ça, c’est peut-être un peu tiré par les cheveux, mais en quelque sorte un chercheur ou une chercheuse ça produit du savoir. Donc le moyen de production de ce savoir principal c’est la diffusion du savoir ; le savoir sinon il est complètement inutile s’il n’est pas diffusé. Finalement ce à quoi on a assisté historiquement c’est une espèce de « prolétarisation » – je le mets vraiment entre guillemets parce qu’on est quand même dans des conditions qui ne sont pas celles d’ouvriers en usine quand on fait de la recherche, mais une espèce de prolétarisation de la recherche – puisqu’on est dépossédés de nos moyens de production. C’est-à-dire que les moyens de production qui sont les revues, qui, à la base étaient gérés par des chercheurs dans des sociétés savantes ou des choses comme ça, se sont fait racheter systématiquement par des grosses maisons d’édition qui les possèdent et font de la marchandisation avec. Et finalement on occupe presque des emplois fictifs en fait. C’est-à-dire qu’on est rémunérés par une université, enfin on est rémunérés même par l’État, et on fait gagner de l’argent à des sociétés privées. C’est exactement ça les emplois fictifs. Les emplois fictifs ce n’est pas que les gens ne travaillent pas. Les emplois fictifs c’est que, à la mairie de Paris, il y a des gens qui bossent pour le RPR et qui sont payés par des emplois de la mairie. C’est ça les emplois fictifs.
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Donc là on est un peu dans cette situation-là. Et en plus on a une espèce d’aliénation qui va avec où les gens cherchent de plus en plus à publier et leur but ce n’est pas de trouver un nouveau résultat c’est d’avoir une nouvelle publication. Donc c’est une aliénation au sens où on n’a plus le sens de ce qu’on fait, on a juste des petites étapes comme ça.
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Je vous ai parlé de beaucoup de choses, mais j’avais commencé à vous parler de combien ça coûte à la société tout ça, de combien d’argent public on dépense plusieurs fois donc pour le même travail. Mais finalement ce coût en euros, surtout pour nous, on est dans un pays riche, c’est un symptôme plus qu’un vrai problème. Le vrai problème fondamental, c’est l’accès citoyen à cette recherche. Quand moi je développe un nouvel algorithme ou je ne sais pas quoi les gens s’en foutent, quoique ! il y a peut-être quelques start-ups que ça pourrait intéresser, mais surtout, en médecine, en biologie, il y a des choses qu’il pourrait être très utile d’avoir sur les maladies rares, des choses comme ça, où c’est important que les citoyens puissent y accéder ; et aujourd’hui ce n’est pas du tout possible parce qu’un papier ça s’appuie sur plein d’autres et quand on a quelqu’un dans la famille qui est déjà atteint d’une maladie qui coûte très cher on ne peut pas, en plus, se payer le luxe de prendre des abonnements à toutes les revues qui vont être utiles pour ça.
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Évidemment pour l’égalité entre les étudiants, les chercheurs et dans les universités du monde entier. Ça c’est déjà vrai en France. Moi je suis à Paris 8, à Saint-Denis dans le 9-3, je suis dans un département d’informatique eh bien on n’est abonnés à aucune revue d’informatique. Il n’y a pas les sous. Voilà ! Ce n’est pas grave parce qu’on a genre ???, etc., donc de toutes façons on arrive à y accéder ; ??? c’est un système de piratage de publications donc c’est bon, ça marche quoi ! Mais on n’est pas abonnés et les étudiants ils n’y ont pas officiellement accès à toute cette connaissance. Alors que dans d’autres universités plus riches, par exemple à Sorbonne Université, eh bien il y a ces abonnements. Là je vous parle de juste en région parisienne, mais imaginez ce que c’est entre la France et les pays émergents. Ça veut dire que dans les pays émergents, on a peut-être des gens qui essayent de faire de la recherche et on passe à côté de découvertes phénoménales parce qu’ils n’ont pas le matériel de base. Donc ça c’est très problématique. Il y a plein d’opportunités manquées. Après ci vous êtes dans cette ambiance-là, ce n’est pas trop mon cas, mais on peut penser à toutes les start-ups qui pourraient utiliser ces choses-là pour faire du business et qui ne peuvent pas du coup.
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En réaction à ça, ce dont je viens vous parler, le libre accès.
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Le libre accès c’est quoi ? C’est la mise à disposition des publications et des données de la recherche en accès libre, gratuit, et illimité sur Internet sans restriction de paiement, d’abonnement pris auprès d’éditeurs ou de sociétés savantes.
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C’est une définition sur laquelle à peu près tout le monde est d’accord. Le problème c’est que c’est une définition très large. Ça veut dire qu’il y a plein de façons de faire du libre accès qui va correspondre à ça. Je vais vous présenter trois voies, les trois voies principales qui existent aujourd’hui.
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Il y a de qu’on appelle la voie verte ou l’auto-archivage. Là c’est qu’en fait on continue d’utiliser le circuit de publication normal mais les chercheurs, les auteurs des articles et les autrices des articles vont aussi déposer dans des dépôts soit institutionnels, soit nationaux, soit de leur université, soit disciplinaires, vont mettre leur travail en accès libre. Par exemple vous avez un nouvel article qui est accepté vous allez aussi le mettre sur, je ne sais pas, une archive d’articles de vote discipline à laquelle les gens peuvent accéder et là ça va être disponible en libre accès en plus de là.
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Évidemment les éditeurs ne sont pas très contents de ce genre de chose là, donc ils mettent des périodes d’embargo. Par exemple ça a été pendant longtemps 48 mois chez Elsevier avant qu’on ait le droit de mettre l’article en ligne gratuitement ; avec des exceptions genre si c’est sur votre page web et que comme ça les gens n’arrivent pas à le trouver, c’est bon.
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En France on a la chance depuis la loi République numérique que maintenant le délai d’embargo est maximisé par la loi à six mois pour les sciences inhumaines et asociales et 12 mois pour les autres disciplines. Donc ça c’est assez cool.
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Par contre c’est assez flou dans le texte de la loi sur ce qui est concerné par ça. Ça concerne les périodiques publiés au moins une fois par an. Typiquement les monographies, donc les livres, ce n’est pas inclus alors qu’il y a plein de livres qui sont écrits par des chercheurs, surtout en sciences humaines et sociales ils publient beaucoup comme ça, et puis nous, en informatique, on publie beaucoup dans des conférences. Alors les conférences ce sont effectivement des publications qui sont tous les ans, mais c’est chaque conférence. Par exemple c’est truc machin 2017, truc machin 2018, truc machin 2019, du coup ce n’est pas un périodique qui est publié tous les ans ce n’est pas le journal <em>of</em> truc machin et du coup ce n’est peut-être pas couvert. Il faudrait essayer de l’utiliser, d’attendre qu’il y ait un éditeur qui porte plainte et de faire une jurisprudence pour voir comment le juge interprète la loi. Mais bon ! En pratique les gens je pense, ceux qui le font, qui font comme si ça marchait et qui le faisaient déjà avant quand ils n’avaient pas le droit, il n’y a pas trop de problèmes. Ça arrive que les éditeurs poursuivent des institutions ou des individus, mais c’est assez rare parce que ça leur ferait quand même une assez mauvaise presse.
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Donc ça c’est la voie verte, c’est l’auto-archivage.
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Sur ça il faut faire attention, il y a des start-ups là Academia.edu et ???, dont certains d’entre vous ont peut-être entendu parler, ce ne sont pas des dépôts pérennes. Ce sont des gens qui cherchent un business modèle, qui peuvent se faire racheter à tout moment, ce n’est pas du dépôt voie verte. C’est du réseau social, c’est, je ne sais pas, c’est comme si vous mettiez des posts sur Facebook sauf que c’est un truc soi-disant dédié à la recherche.
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Il y a déjà SSRN donc Social Science Research Network qui s’est fait racheter, Mendeley aussi et l’éditeur qui l’a racheté du jour au lendemain a supprimé tous les articles qui étaient de chez lui, pas les autres par exemple. Donc ce n’est pas du tout un truc pérenne, ça ne compte pas comme du libre accès pour moi.
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Ensuite on a ce qu’on a appelé la voie dorée, où là l’idée c’était de dire on publie dans le journal et directement c’est en libre accès sur le site de l’éditeur. Ça c’était bien et donc on a appelé ça doré parce que c’est stylé. Le problème c’est que les éditeurs ont dit « oui, d’accord, mais alors ce sont les auteurs qui payent ». Et du coup il y a beaucoup de gens qui confondent <em>open access</em> et « je paye pour publier ». Ils ont réussi ce coup-là parce qu’évidemment vous pensez bien qu’avec tous leurs millions d’euros il faut bien qu’ils fassent quelque chose et ils font notamment beaucoup de lobbying. Vous avez par exemple dans le financement de la recherche qui, malheureusement, se fait de plus en plus par projets et non plus sur financement pérenne dans les labos, ça veut dire qu’on perd beaucoup de temps à faire des projets et la plupart du temps ça échoue, enfin bref ! Mais dans les financements par projet de la recherche, par exemple au niveau européen qui distribue des énormes bourses de plusieurs millions d’euros parfois de recherche, eh bien maintenant, grâce au lobbying des maisons d’édition, il y a une partie de cet argent qui est fléché pour payer les charges liées à la publication, pour que ce soit en libre accès, parce que tout le monde est d’accord qu’il faut faire du libre accès ; tout le monde est qu’il faut que les articles soient en libre accès. C’est juste que les maisons d’éditions vont expliquer « mais nous ça nous coûte beaucoup d’arpent. Comment on va faire pour faire gagner à nos actionnaires ? » , ils ne disent pas ça comme ça, ils disent « comment on va tenir le taux de profit de nos actionnaires ? » Maintenant ça veut dire qu’il faut que les auteurs payent.
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Ça, ça a été un peu dévoyé. Finalement ça coûte trop cher en fait cette méthode-là. On pourrait dire même dans un pays comme la France on a assez d’argent ; on va le faire, ce n’est pas grave, allez, on paye comme ça. En fait, le CNRS produit tellement de papiers que s’il devait payer ! Parce que c’est cher, 3000 euros, 5000 euros pour publier un papier. Un papier qui coûtait 30 euros avant individuellement et qui va peut-être être lu dix fois dans sa vie, et encore ça c’est un papier qui a du succès déjà. C’est très cher et ça ne serait pas vivable pour des institutions qui publient beaucoup.
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Donc, en réponse à ça, il y a une certaine mouvance dont je fais partie qui propose ce qu’on appelle la voie diamant, il y a des gens qui parlent aussi de voie platinium ou de <em>fair open access</em> où là l’idée c’est de faire de la recherche un commun, les communs dont je vous parlais tout à l’heure. Là les auteurs ne payent plus, les lecteurs ne payent plus et on essaye de gérer ça en commun avec des ressources publiques. OK ? Quand je dis publiques, ça peut-être des ressources communes pas forcément publiques au sens de « étatiques ».
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Là c’est quand même beaucoup plus précis ce qu’on veut faire. Ce n’est plus sur le libre accès c’est « on veut faire de la recherche un commun ».
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Qu’est-ce que ça veut dire de faire de la recherche un commun ? Ça veut dire qu’on se dirige vers une abolition de la propriété lucrative de la connaissance, en tout cas de cette connaissance-là, et, en même temps, du coup ce n’est pas juste ça, c’est aussi qu’on va faire en sorte que les chercheurs et les chercheuses se réapproprient leurs moyens de production, c’est-à-dire les outils de diffusion de la connaissance. C’est ça leur cœur de métier.
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On va voir comment ça marche. Tout simplement en faisant un exercice. Je vous ai dit un commun ce sont trois choses : c’est une ressource, un mode d’accès, des règles de partage et une gouvernance.
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La ressource c’est quoi ? Ce sont les résultats de la recherche, donc des articles, des données, des logiciels. Ça peut être des données brutes, ça peut être des données traitées, ça peut être des images, des traductions ; ça peut être plein de choses.
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Le mode d’accès. Eh bien ce n’est pas parfait mais c’est ce qu’on fait de mieux, accès via Internet c’est ce qu’on a de plus universel, ce n’est pas complètement universel mais c’est comme ça qu’on s’en rapproche le plus, sachant qu’il y a plein de problèmes de barrière de langue, etc., parce que par exemple on publie en anglais ; ce n’est pas parfait, je ne dis pas que c’est parfait. Mais si on utilise des licences libres les gens auront le droit de traduire, ce qu’ils n’ont pas le droit de faire actuellement. On utilise des logiciels et des licences libres, évidemment, parce que ça ne sert à rien de sortir d’une cage pour rentrer dans une autre.
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Et la gouvernance c’est quoi ? Là le principe ça va être que les auteurs et les autrices conservent leur doit d’auteur ou leur copyright dans la législation. Pourquoi on fait ça ? Parce qu’en fait le but, quand moi je publie un article, l’article peut être vendu genre un million de fois, je ne touche pas un centime de plus. Mon salaire est fixe, il est payé par l’État sur une grille de fonctionnaires : je suis échelon 3, maître de conférences classe normale, je touche 2 000 euros par mois, un peu plus, c’est comme ça. Je peux produire autant d’articles que je veux ou ne rien publier, je suis payé pareil. OK ! Donc ça veut dire que moi mon intérêt quand je produis un article c’est juste qu’il soit lu. Si j’écris un article et que je me fatigue à le faire publier, à le mettre en forme, à faire la recherche qui va permettre d’y aboutir, etc., c’est que je pense que c’est important et mon intérêt en tant que chercheur c’est que mon article soit lu, c’est qu’il soit disponible le plus possible. Ça veut dire qu’en gros mes intérêts personnels sur cet article sont alignés avec ceux de la communauté. Donc ça veut dire qu’en gros, la gouvernance d’un commun pour la recherche, ce qu’elle dirait c’est que les auteurs conservent leurs droits d’auteurs, leur copyright. Ils ne les cèdent plus parce que ce sont eux qui vont dire c’est moi qui décide pour cet article et il est disponible. Forcément ! Ils n’ont aucun intérêt à le rendre privé.
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Les comités éditoriaux détiennent les revues.

Version du 16 juillet 2018 à 16:15


Titre : Les communs, la recherche et le libre accès

Intervenant : Pablo Rauzy

Lieu : Choisy-le-Roi - Pas Sage En Seine 2018

Date : juillet 2018

Durée : 1 h 05 min 42

Écouter ou télécharger le podcast

Licence de la transcription : Verbatim

NB : transcription réalisée par nos soins. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas forcément celles de l'April.

Statut : Transcrit MO

Transcription

Bonjour à tous et à toutes. Je me présente ; je suis Pablo. Il y en a qui m’ont déjà vu il y a deux jours, donc c’est re moi. Je suis toujours maître de conférences à Paris 8 et cette fois-ci je ne viens pas du tout vous parler de ma recherche, je viens vous parler d’un truc sur lequel je milite, qui est en rapport avec la recherche mais pas avec ma recherche.

Je viens vous parler de libre accès à la recherche et je vais vous expliquer un petit peu ce que c’est, quel est le but, comment on peut le faire et pourquoi il y a cette problématique qui se pose. Mais je vais commencer pour la suite à vous parler de communs.

Les communs qu’est-ce que c’est ? Un commun c’est un faisceau de trois choses :

  • c’est une ressource partagée ; cette ressource peut être matérielle ou immatérielle. Je reviendrai après là-dessus ;
  • c’est un mode d’accès, les règles de partage de cette ressource
  • et c’est une gouvernance de la ressource. Le rôle de la gouvernance, et c’est important qu’elle existe sinon on n’appelle pas ça un commun, c’est d’assurer la pérennité de la ressource et son existence dans le temps.

Un exemple de commun, matériel cette fois-ci, ça va être un verger dans un village. Là la ressource ce sont des pommes. OK ! Le mode d’accès ça pourrait être les gens vont se servir quand ils veulent des pommes, mais il y a des règles de partage c’est-à-dire qu’on ne peut pas venir et prendre toutes les pommes, on doit se limiter à, je ne sais pas, une pomme par jour par personne par exemple, histoire que tout le monde puisse en profiter et qu’il n’y ait pas des gens qui se disent OK, ça ne sert à rien, il y a juste telle personne du village qui récupère tout, qui fait de la compote et qui la vend au marché ; ça ne sert à rien… Je refuse de payer des charges communales, par exemple, pour arroser le verger ou pour payer le salaire de quelqu’un qui s’en occuperait.

Donc les règles de partage ça pourrait être aussi quelque chose de différent. Ça pourrait être aussi que, par exemple, tout le monde s’en occupe un petit peu. Quelque chose qui va vraiment marcher en commun, qui va être autogéré, etc.

Il y a plein de types de communs différents, mais ce sont ces trois choses-là qui font que c’est un commun.

La gouvernance ça pourrait être une association ; ça existe par exemple avec des potagers urbains ou des jardins partagés, des choses comme ça ; ou ça pourrait être le conseil municipal du village qui décide et puis, à ce moment-là, la gestion du commun, les grosses décisions se prendraient pendant les élections par exemple, pourquoi pas. En tout cas le but de la gouvernance c’est d’empêcher l’épuisement du commun ; par exemple qu’il n’y ait pas quelqu’un pendant l’hiver qui vienne et qui coupe les pommiers pour se chauffer chez lui.

Ça c’est un exemple de commun matériel.

Un exemple de commun immatériel, en fait il y a en un que vous connaissez tous, Wikipédia. Là la ressource c’est quoi ? C’est du savoir encyclopédique. On y accède par copie. C’est immatériel donc on peut récupérer des données et c’est comme si on prenait une pomme mais qu’elle était encore dans l’arbre. C’est ça qui est assez cool avec les choses immatérielles. Le principe d’accès à Wikipédia c’est qu’on y accède en copiant la page, c’est-à-dire que quand vous accédez avec votre navigateur en fait votre navigateur télécharge une copie des données et les affiche par Internet. Les règles, eh bien il y a une licence Creative Commons sur Wikipédia qui dit que vous pouvez faire plus ou moins ce que vous voulez avec le texte du moment que vous citez que ça vient de Wikipédia, en gros, et que vous le partagez sous cette même licence. Et la gouvernance eh bien là elle a des formes multiples. C’est ce que je vous disais tout à l’heure que la gouvernance peut être complexe. Sur Wikipédia, d’une part on a la Fondation Wikimedia ; vous avez déjà dû voir passer des appels au don avec la tête de Jimbo [Jimbo Wales] qui prend un tiers de l’écran en haut de Wikipédia. La fondation Wikimedia assure la pérennité des serveurs et de la bande passante derrière. C’est pour ça qu’ils font des appels au don régulièrement. Mais ce n’est pas la seule gestion, ce n’est pas la seule gouvernance qu’il y a sur Wikipédia. Chaque encyclopédie, les encyclopédies dans Wikipédia ce sont les langues, a son monde de fonctionnement propre. Donc il y a des petites langues où il va y avoir un ou deux admins qui vont avoir un peu des super pouvoirs et puis il y a des langues où ce sont des grosses encyclopédies où il y a des modérateurs, des opérateurs, différents types d’utilisateurs qui vont permettre de régler les conflits, par exemple, ou qui vont surveiller. Il y a des langues aussi ou certains portails, par exemple tel domaine scientifique, eh bien il y a quelques personnes qui s’y connaissent assez bien et qui surveillent régulièrement les mises à jour de ces pages-là pour vérifier qu’il n’y a pas une bêtise qui a été mise. Ensuite, de manière beaucoup plus décentralisée, chaque page Wikipédia a une page de discussion qui permet de prendre des décisions collectivement sur qu’est-ce qui doit aller ou non dans cette page, pour que ça reste de qualité. Et donc là c’est une gouvernance encore plus décentralisée sur des petits morceaux du commun.

Il y a un truc avec les communs que des gens, je vais vous expliquer pourquoi, ont appelé la « tragédie des communs » c’est que s’il y a un tricheur, il est gagnant. Si on reprend l’exemple du verger, je vous avais dit si quelqu’un vient et récupère toutes les pommes et après fait de la compote et la vend au marché, par exemple, ou vient couper le bois, eh bien le commun est asséché et il y a quelqu’un qui a gagné beaucoup. Ça veut dire que si on applique une stratégie très individualiste ce qui va se passer c’est que le commun va mourir. Ce n’est pas un truc qui est pérenne, c’est une espèce d’équilibre comme ça.

Les gens qui ont fait ça, qui ont appelé ça « tragédie des communs » ce sont des économistes plutôt libéraux, donc qui ont une espèce de modélisation de l’économie où chaque acteur agit comme une espèce de robot qui maximise son intérêt personnel au détriment de tout le reste. Évidemment ce sont des modèles qui ne tiennent absolument pas la route dans le monde réel, qui nous amènent dans le mur régulièrement. Et donc ce n’est pas du tout une tragédie. Il y a plein de communs qui continuent très bien de fonctionner parce que, en vérité, les gens ne pensent pas qu’à leur gueule. Du coup quand il y a un commun et qu’ils aiment ce truc-là en fait ils font en sorte que ça continue d’exister et ils préfèrent avoir des pommes pendant des années et des années plutôt que gagner plein de sous d’un coup maintenant tout de suite. Et ça ce sont des choses que leurs modèles économiques ne prennent pas en compte c’est pour ça qu’ils ont appelé ça « tragédie des communs » comme si c’était un truc inévitable. En fait ce n’est pas du tout inévitable, il y a plein de communs qui perdurent pendant des années et des années ; par exemple Wikipédia.

Un truc qu’on peut se dire c’est est-ce que cette « tragédie des communs » peut arriver sur les communs immatériels où il n’y a pas quelqu’un qui peut venir et tout prendre ? Parce qu’à chaque fois qu’il prend tout, en fait juste il utilise de la bande passante. Sur Wikipédia, par exemple, les articles restent là même si je les prends plein de fois. En fait oui ça peut. Je vais vous donner un exemple et puis j’en prendrai d’autres peut-être après, je pense qu’il y a le temps.

Je vais vous montrer dans un univers alternatif où on a un autre Wikip€dia – vous voyez j’ai appelé ça Wikip€dia avec un € euro – où ça marche à peu près pareil c’est-à-dire que tout le monde peut rédiger des articles et de temps en temps on doit tous un peu en corriger ; ça fait partie : le truc c’est que quand on lit quelque chose et qu’on voit des erreurs eh bien on doit un peu aussi participer à corriger ; ça fait partie du contrat qu’on a. Mais pour lire un article il faut payer. Donc là on doit payer 30 euros, par exemple, pour lire un article sachant qu’avant on n’a que le titre et peut-être le premier paragraphe qu’il y a avant le sommaire donc une espèce de résumé de l’article. Et basé sur ça, déjà on doit payer si on veut le voir.

Le problème c’est qu’évidemment, quand on lit un article Wikip€dia il y a toujours des liens vers plein d’autres articles qui sont utiles pour comprendre le contenu de l’article qu’on est en train de lire. Du coup il faut lire plein d’articles. Ce ne sont pas des gens qui veulent vous arnaquer trop non plus, donc il y a la possibilité de prendre des abonnements et vous gagnez plein de sous en prenant des abonnements vu que vous payez beaucoup moins que si vous payez 30 euros par article. Par exemple des abonnements personnels au niveau des institutions où vous avez, pour 5 000 euros par un an, un accès en illimité à Wikip€dia. Si vous faites la division, vous pouvez regarder plein d’articles par jour et ça vous revient beaucoup moins cher.

C’est quelque chose qui vous semble complètement absurde mais en vérité c’est possible de mettre en place un système comme ça dans notre société actuelle. D’une part c’est mis en place dans la recherche, je vous le montrerai tout à l’heure, et d’autre part faire une encyclopédie qui fonctionnerait sur ce modèle, c’est autorisé. Pourquoi c’est autorisé ? Parce qu’on a un truc qui s’appelle la propriété intellectuelle qui existe et qu’on n’a pas encore aboli la propriété lucrative, donc y compris pas la propriété intellectuelle lucrative. Ça, ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’on peut s’approprier quelque chose qui a été créé en commun et en faire quelque chose qui va être profitable. Pourquoi ça devient profitable ? Parce qu’on crée artificiellement de la rareté. En fait on a un commun immatériel, on a une ressource immatérielle où c’est comme si on avait un pommier où quand on prend une pomme elle est encore dans l’arbre pour que quelqu’un puisse la prendre et là, artificiellement, par des jeux de licence, de droits de propriété privée lucrative, on va dire que non, finalement, on va artificiellement détruire la pomme quand quelqu’un la prend pour qu’il y en ait un nombre limité et qu’on puisse faire du commerce avec.

Ça vous semble complètement stupide et vous dites pourquoi quelqu’un voudrait faire ça ? Parce qu’il y a des gens qui pensent effectivement comme ces économistes libéraux. Et en fait c’est comme ça que ça se passe dans la recherche.

Comme je suppose que vous n’est pas tous et toutes complètement familiers-familières avec comment fonctionne la recherche, je vais vous expliquer très rapidement comment ça se passe.

C’est très schématique et des gens qui sont dans un domaine précis ne vont pas forcément y retrouver exactement ça, mais j’essaye de faire quelque chose qui marche pour un peu tout le monde, donc autant les sciences humaines que les sciences qu’on dit dures souvent, mais je préfère dire inhumaines et asociales puisque les autres sont des sciences humaines et sociales ; c’est ce que je fais, des sciences inhumaines et asociales, je fais de l’informatique.

Donc comment ça marche la recherche ?

  • D’abord on cherche une question. C’est déjà une première étape, c’est que la question n’est pas toujours là dès le début. C’est-à-dire qu’il y a des problèmes qui sont là, mais il faut déjà bien formuler la question et c’est une bonne partie du boulot.
  • Une fois qu’on a une question, on a compris quelle était la bonne prochaine petite étape à faire dans notre domaine, sur lequel on fait de la recherche, eh bien on cherche une réponse. Ça peut être plein de choses différences : ça peut être écrire du logiciel, faire des expériences, faire des stats, rédiger, traduire quelque chose, enfin bon ! Ça peut être plein de choses différentes.
  • Et puis, à un moment donné, on a des résultats. Alors ces résultats ce n’est pas forcement ceux qu’on attendait, mais il y a un moment donné où on a quelque chose qu’on a envie de communiquer avec la communauté parce qu’on pense que ça fait un peu avancer le schmilblick.
  • Donc ce qu’on fait, la communication scientifique aujourd’hui, elle est principalement par le biais de journaux ou de conférences. Mais je vais parler juste de journaux ou de revues dans le reste de la présentation, mais sachez que ça peut aussi être des workshops, des conférences, enfin ça peut être plein de choses différentes, mais la communication, la forme de communication est plus ou moins tout le temps la même : on rédige un article ; il y a des normes de rédaction d’article selon les journaux, les conférences, etc.
  • Et puis, une fois qu’on a rédigé l’article qui présente les résultats, eh bien on soumet cet article donc à une revue.
  • Cette revue ce n’est pas un truc qui n’existe pas, comme ça, qui est dans les terres, c’est un ensemble d’autres personnes, d’autres chercheurs et chercheuses qui se sont mis ensemble, qui ont formé un comité éditorial, qui vont réceptionner votre article, qui vont le relire ou le faire relire à des experts de votre domaine, qu’on appelle vos pairs, et qui vont juger de la qualité de l’article au sens de est-ce que c’est effectivement nouveau ? Est-ce que ce n’est pas quelque chose que la personne ou les personnes qui ont rédigé l’article ont raté, qui existait déjà par ailleurs ? Est-ce que c’est rigoureux ? Est-ce qu’il n’y a pas d’erreurs manifestes dedans, etc. ? Et est-ce que, aussi, ça correspond bien au sujet de la revue ou de la conférence ? À ce moment-là on va accepter l’article si on n’a pas atteint la limite et que les autres ne sont pas meilleurs que lui. Meilleur dans un sens absolument pas objectif évidemment, parce que c’est très difficile de juger de choses qui n’ont rien à voir les une avec les autres et que c’est souvent ça.
  • À ce moment-là, une fois que l’évaluation par les pairs est faite, cette évaluation par les pairs elle peut faire des allers-retours aussi avec les auteurs. Il peut y avoir des « on va vous accepter, mais il faut d’abord faire ces corrections-là » ou « on voudrait cette expérience en plus pour confirmer ce résultat », etc., avant d’être acceptée et ensuite on a la « publication » de l’article. Publication je l’ai mis entre guillemets parce que vous allez voir que ce n’est pas si simple que ça. Le truc c’est qu’en fait, souvent, la publication de l’article ça consiste à dire il y a une grosse maison d’édition qui possède la revue et elle va dire « OK je diffuse ton article et je le mets dans ma revue mais en échange tu me cèdes tes droits d’auteur ». OK ? Donc on a les chercheurs qui ont fait le travail, ils cèdent leurs droits d’auteur à la revue et la revue, du coup, va pouvoir distribuer c’est-à-dire vendre cet article-là. C’est là où on va se retrouver avec une page web où il y aura le titre et l’abstract, donc le résumé de l’article, et il faudra, pour accéder à un PDF de, je ne sais, pas six ou dix pages, payer 30 euros, 40 euros, 60 euros. Voilà ! Donc ça c’est ce qui se passe. C’est pour ça que j’appelle ça « publication » parce que publication ça veut dire rendre public mais là on voit que c’est un peu plus compliqué que rendre public ; ce n’est pas tout à fait public !

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En fait on est dans une situation où on a un coût qui est public et des bénéfices qui sont privés. Parce qu’on est exactement dans la situation dont je vous parlais tout à l’heure où on a une appropriation privée d’un travail commun, collectif et public, c’est-à-dire-dire que la recherche c’est financé sur argent public, en France très majoritairement mais même aux États-Unis où les universités sont pour beaucoup privées, en fait elles sont vachement financées par les États, pas l’État fédéral mais les États.

La situation c’est quoi ? Donc on a de l’argent d’un public qui finance la recherche, les résultats qui sont privatisés et ensuite ils ont rachetés par de l’argent public. Parce qu’évidemment, pour faire de la recherche, on a besoin d’avoir les papiers des autres chercheurs. Du coup on a des labos publics qui financent de la recherche ; des maisons d’édition qui privatisent ces résultats et qui les revendent aux labos publics. D’accord ? Et c’est comme ça que ça se passe pour de vrai.

Pour vous donner un ordre d’idée de à quel point c’est choquant…

Un autre truc que j’ai oublié de vous dire c’est qu’il y a de la recherche dans le privé, ça existe, mais en fait, si on regarde par exemple les mécanismes genre en France qu’on a pour financer de genre de choses-là, il y a le crédit impôt recherche, je ne sais pas si vous en avez déjà entendu parler. En gros déjà, le crédit impôt recherche c’est majoritairement accaparé par des grosses boîtes du CAC 40 qui ne font pas du tout de la recherche avec, qui ont juste des bons avocats qui leur permettent de récupérer ça. Et quand c’est dans des PME, en fait il faut savoir que c’est conditionné souvent, alors pas que mais c’est souvent le bon critère pour l’avoir, c’est que quelqu’un soit docteur dans l’entreprise, donc quelqu’un qui a fait une thèse, qui a passé son doctorat, et en fait le crédit impôt recherche va quasiment rembourser le salaire de cette personne-là à l’entreprise. Ça veut dire que même quand c’est de la recherche qui vient de l’industrie en fait c’est très majoritairement financé par de l’argent public. C’était juste pour préciser ça.

Quelques chiffres que j’ai pu récupérer au fur et à mesure de ma carrière académique.

À l’ENS [École nationale supérieure], par exemple en 2011, j’avais réussi à récupérer les chiffres ; depuis les chiffres sont un peu plus compliqués à récupérer parce qu’il y a un consortium qui achète pour tout le monde et donc c’est plus compliqué à récupérer. Il y a un autre truc aussi c’est qu’évidemment les contrats avec les maisons d’édition sont secrets. Donc il y a des clauses dans ces contrats qui interdisent aux bibliothécaires de révéler les montants. Mais bon ! J’avais réussi à me procurer quelques documents en étant dans des conseils administration ou des choses comme. Pour l’année 2011, les dépenses documentaires de l’ENS c’est environ 1 million d’euros. L’ENS c’est tout petit en termes de taille et en plus ils ont plein de labos qui sont ce qu’on appelle des UMR, des unités mixtes de recherche, où ils profitent en fait des abonnements aussi pris par les autres universités, par exemple Jussieu, etc., Paris 6. Paris 6, par exemple un million d’euros c’est juste pour Elsevier, donc le plus gros éditeur. Ils ont d’autres abonnements à côté. Le CNRS en 2013 c’était plus de 30 millions d’euros, c’était 36, mais les autres années c’est environ 30 ; la première année où je l’ai vu c’était 36 ; donc c’est environ 30 millions d’euros par an de dépenses documentaires au CNRS. D’accord ?

Je ne sais pas si vous imaginez le nombre de bourses de thèses qu’on pourrait financer avec cet argent-là chaque année, le nombre d’infrastructures qu’on pourrait payer, le nombre de choses qu’on pourrait faire avec cet argent-là et qui, en fait, est juste de l’argent public qui est donné à du privé pour un service rendu qui est très minime. Je vais vous parler un peu plus de ça après, et puis d’autres exemples pour vous montrer comment ça évolue dans le temps.

À Télécom ParisTech, là où j’ai fait ma thèse, entre 2009 et 2014, comme c’était trop cher, la bibliothèque universitaire ne pouvait plus payer tous les abonnements, eh bien ils ont divisé plus que par deux la quantité d’abonnements papier qu’ils ont récupérés. Et en échange, pour que les gens puisent continuer aux choses, ils se sont abonnés électroniquement donc en accès par Internet, mais ils n’ont pas tout repris ; ils ont fait plus un tiers, à peu près, d’abonnements électroniques ; c’était trop cher de tout reprendre en version électronique.

Eh bien pendant ce temps-là, on a moins d’abonnements, eh bien sur cette période-là le coût de l’abonnement Reed Elsevier a monté de 21 % celui de Springer de 32 et l’IEEE [Institute of Electrical and Electronics Engineers] carrément de 61 %, l’abonnement. Comment ils justifient ça ? Officieusement c’est « nos actionnaires en veulent plus et il faut maintenir leurs profits » et officiellement c’est « eh bien oui mais vous avez publié plus de papiers au niveau mondial, on a plus de choses dans notre offre donc il faut payer plus cher ». Ce n’est jamais rentabilisé assez des choses qu’ils n’ont pas produites eux.

En face de ça il y a la ruine des bibliothèques universitaires d’un côté et, en écho à ça évidemment, eh bien vous voyez par exemple Reed Elsevier, les chiffres d’affaires en milliards de dollars au niveau mondial. Ça c’est le chiffre d’affaires, donc c’est tout l’argent qui rentre ; ça ce sont les bénéfices. Évidemment quand on vend des choses qu’on ne produit pas eh bien les bénéfices sont assez colossaux. Et vous avez des magazines, il y avait un magazine américain qui s’appelle The Economist ou un truc comme ça, pas un truc de gauchistes vous avez compris, qui disait en gros que en fait les meilleurs placements c’est dans les éditeurs scientifiques qu’on peut les faire parce qu’ils ont des taux et on ne peut avoir ces taux-là que dans genre les business illégaux type drogue, etc. de retour sur rentabilité parce qu’en fait ils décident combien leurs clients doivent payer ; ils n’ont pas à acheter la matière première, c’est le client qui l’a fournie et ensuite le client est obligé de payer ça parce qu’il ne peut pas s’en passer. Et on a un truc où c’est de l’argent public, mais il n’y a pas de marché public puisque, avec la propriété intellectuelle, les articles ne sont que chez un éditeur. Donc si on veut accéder à cet article on est obligé de prendre l’abonnement de cet éditeur. Et si on veut accéder à un article d’un autre éditeur, il faut aussi prendre l’abonnement de l’autre éditeur. On ne peut pas dire on va prendre le moins cher. Donc il n’y a pas d’appel d’offres, etc., comme ça peut se faire pour certains autres trucs.

Le rôle des maisons d’édition c’est quoi ? Historiquement il y avait :

  • la mise en page des articles mais ça c’est de moins en moins vrai aujourd’hui avec des outils comme LaTeX ou même LibreOffice ou la suite Office de Microsoft, il y a des choses qui sont assez puissantes pour que les éditeurs nous fournissent juste un modèle de fichier, un template, et on n’a plus qu’à remplir et tout se passe bien ;
  • distribuer le plus largement possible les articles : ça c’était un vrai travail comme la mise en page des articles, surtout à l’époque où il n’y avait pas Internet. Ça veut dire que votre article il fallait l’imprimer et l’amener dans toutes les BU du monde, donc dans toutes les bibliothèques universitaires du monde ; ça, ça avait un vrai coût. D’accord ! Et c’est comme ça que l’inertie date de cette espèce de schmilblick, s’est mis en route. C’était pour ce service-là ;
  • gagner de l’argent. Ce sont des entreprises privées, c’est toujours ça ;
  • et puis faire connaître les chercheurs puisque ce sont eux qui diffusent leurs résultats, il y a ce rôle-là, on va voir que c’est assez problématique.

La mise en page des articles, je vous ai dit aujourd’hui les chercheurs font ce travail eux-mêmes.

Distribuer le plus largement possible : aujourd’hui avec Internet c’est assez trivial. Héberger un PDF ça ne coûte pas beaucoup d’argent. OK !

Gagner de l’argent, bon eh bien ça vous avez vu ça se passe assez bien c’est bon, on ne va pas trop en parler.

Et puis faire connaître les chercheurs, alors là il y a un petit souci dont je voudrais aussi vous parler. Pour ça, en fait, il faudrait un petit peu peut-être faire un petit détour historique, mais je ne sais pas si j’ai le temps.

En gros, on va dire que dans la recherche comme ailleurs, on a une espèce de tendance à faire rentrer du néolibéralisme dedans, c’est-à-dire du management par les chiffres. Donc on va avoir des petites chefs qui doivent pouvoir mesurer est-ce que ce chercheur ou cette équipe est efficace ou pas ? Déjà qu’évaluer de la recherche c’est très compliqué ; ce n’est pas pour rien que la revue par les pairs est un processus long, etc. Donc ces gens-là veulent des indicateurs. Tout à l’heure on parlait du ???, eh bien c’est un peu le même délire, cette espèce de « vouloir avoir des chiffres sur tout » ; alors ce n’est pas toujours possible. Donc typiquement ils ont inventé, enfin ils ont réutilisé des trucs de bibliométrie.

À la base la bibliométrie ça a été inventé justement parce que ça commençait à coûter trop cher les abonnements, ce sont les bibliothécaires qui ont dit : « On va essayer de mesurer quelles sont les revues auxquelles il faut qu’on s’abonne parce que, effectivement nos chercheurs les lisent. » Comment ils ont fait ça ? Ils se sont dit genre bon ! il y a des revues qu’ils lisent beaucoup, on voit que c’est beaucoup accédé, ils nous les demandent beaucoup, mais finalement peut-être que ça ne leur sert à rien ; à chaque fois ils sont déçus. Donc ils ont dit, les bibliothécaires, on va essayer de trouver une autre mesure et en fait, finalement, ils ont pris le nombre de fois où un papier est cité dans d’autres articles. Ça veut dire que ce papier a effectivement été utilisé, est utile, peut-être en négatif mais au moins il est utile pour un autre article. En fait il y avait une mesure comme ça qui existait toute faite et du coup les néo-managers se sont dit on peut réutiliser ça ; c’est super ! Maintenant ils évaluent les gens et donc, dès qu’il y a une bureaucratie comme ça qui se met en place, on a un système qui est complètement dénaturé et maintenant ce qu’il faut c’est avoir beaucoup de publications, pas des publications de qualité, il faut avoir beaucoup de publications. C’est ça qui va compter plus qu’autre chose.

Du coup les équipes, les labos, les chercheurs et les chercheuses, sont jugés sur, grosso modo, quelque chose qui correspond à leur nombre de publications, ce qui encourage à saucissonner les articles, c’est-à-dire prendre un résultat et dire on va couper : ce sous-résultat on va le publier là, ce sous-résultat on va le publier là, etc., ce qui, évidemment, n’est pas du tout scientifiquement valable, mais en plus donne plein de dérives. J’en parlerai un petit peu après des dérives.

Évidemment cette bibliométrie, du coup, ça fait aussi qu’on regarde où est-ce qu’on a publié parce qu’il y a des revues qui sont plus prestigieuses que d’autres ; elles sont plus anciennes, il y a plus de résultats, elles ont été beaucoup citées, du coup elles sont beaucoup achetées, du coup beaucoup lues. D’accord ! Du coup c’est plus la classe d’avoir publié là-dedans que ailleurs. Le problème c’est comme ce sont les maisons d’édition qui détiennent les revues, et pas les chercheurs, eh bien on se retrouve dans une situation où ça arrange les maisons d’édition d’avoir cette bibliométrie et de détenir des revues qui sont très « classe » et où les gens veulent publier puisque du coup ça va être plus acheté.

Donc ce qui se passe c’est que ce sont les maisons d’édition qui font en sorte qu’on pousse à fond la bibliométrie donc l’évaluation des chercheurs, l’évaluation quantitative des chercheurs. Par exemple on a des outils qui sont vendus par les maisons d’édition, donc ??? et des choses comme ça, qui sont en fait des outils de marketing pour elles mais qui servent aux agences de moyens, aux agences de notation, etc., à évaluer les chercheurs et qui sont en fait, au final, détournés pour être des outils qui ne sont que utiles au marketing des maisons d’édition.

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En fait, ce qui se passe quand on fait ça, c’est peut-être un peu tiré par les cheveux, mais en quelque sorte un chercheur ou une chercheuse ça produit du savoir. Donc le moyen de production de ce savoir principal c’est la diffusion du savoir ; le savoir sinon il est complètement inutile s’il n’est pas diffusé. Finalement ce à quoi on a assisté historiquement c’est une espèce de « prolétarisation » – je le mets vraiment entre guillemets parce qu’on est quand même dans des conditions qui ne sont pas celles d’ouvriers en usine quand on fait de la recherche, mais une espèce de prolétarisation de la recherche – puisqu’on est dépossédés de nos moyens de production. C’est-à-dire que les moyens de production qui sont les revues, qui, à la base étaient gérés par des chercheurs dans des sociétés savantes ou des choses comme ça, se sont fait racheter systématiquement par des grosses maisons d’édition qui les possèdent et font de la marchandisation avec. Et finalement on occupe presque des emplois fictifs en fait. C’est-à-dire qu’on est rémunérés par une université, enfin on est rémunérés même par l’État, et on fait gagner de l’argent à des sociétés privées. C’est exactement ça les emplois fictifs. Les emplois fictifs ce n’est pas que les gens ne travaillent pas. Les emplois fictifs c’est que, à la mairie de Paris, il y a des gens qui bossent pour le RPR et qui sont payés par des emplois de la mairie. C’est ça les emplois fictifs.

Donc là on est un peu dans cette situation-là. Et en plus on a une espèce d’aliénation qui va avec où les gens cherchent de plus en plus à publier et leur but ce n’est pas de trouver un nouveau résultat c’est d’avoir une nouvelle publication. Donc c’est une aliénation au sens où on n’a plus le sens de ce qu’on fait, on a juste des petites étapes comme ça.

Je vous ai parlé de beaucoup de choses, mais j’avais commencé à vous parler de combien ça coûte à la société tout ça, de combien d’argent public on dépense plusieurs fois donc pour le même travail. Mais finalement ce coût en euros, surtout pour nous, on est dans un pays riche, c’est un symptôme plus qu’un vrai problème. Le vrai problème fondamental, c’est l’accès citoyen à cette recherche. Quand moi je développe un nouvel algorithme ou je ne sais pas quoi les gens s’en foutent, quoique ! il y a peut-être quelques start-ups que ça pourrait intéresser, mais surtout, en médecine, en biologie, il y a des choses qu’il pourrait être très utile d’avoir sur les maladies rares, des choses comme ça, où c’est important que les citoyens puissent y accéder ; et aujourd’hui ce n’est pas du tout possible parce qu’un papier ça s’appuie sur plein d’autres et quand on a quelqu’un dans la famille qui est déjà atteint d’une maladie qui coûte très cher on ne peut pas, en plus, se payer le luxe de prendre des abonnements à toutes les revues qui vont être utiles pour ça.

Évidemment pour l’égalité entre les étudiants, les chercheurs et dans les universités du monde entier. Ça c’est déjà vrai en France. Moi je suis à Paris 8, à Saint-Denis dans le 9-3, je suis dans un département d’informatique eh bien on n’est abonnés à aucune revue d’informatique. Il n’y a pas les sous. Voilà ! Ce n’est pas grave parce qu’on a genre ???, etc., donc de toutes façons on arrive à y accéder ; ??? c’est un système de piratage de publications donc c’est bon, ça marche quoi ! Mais on n’est pas abonnés et les étudiants ils n’y ont pas officiellement accès à toute cette connaissance. Alors que dans d’autres universités plus riches, par exemple à Sorbonne Université, eh bien il y a ces abonnements. Là je vous parle de juste en région parisienne, mais imaginez ce que c’est entre la France et les pays émergents. Ça veut dire que dans les pays émergents, on a peut-être des gens qui essayent de faire de la recherche et on passe à côté de découvertes phénoménales parce qu’ils n’ont pas le matériel de base. Donc ça c’est très problématique. Il y a plein d’opportunités manquées. Après ci vous êtes dans cette ambiance-là, ce n’est pas trop mon cas, mais on peut penser à toutes les start-ups qui pourraient utiliser ces choses-là pour faire du business et qui ne peuvent pas du coup.

En réaction à ça, ce dont je viens vous parler, le libre accès.

Le libre accès c’est quoi ? C’est la mise à disposition des publications et des données de la recherche en accès libre, gratuit, et illimité sur Internet sans restriction de paiement, d’abonnement pris auprès d’éditeurs ou de sociétés savantes.

C’est une définition sur laquelle à peu près tout le monde est d’accord. Le problème c’est que c’est une définition très large. Ça veut dire qu’il y a plein de façons de faire du libre accès qui va correspondre à ça. Je vais vous présenter trois voies, les trois voies principales qui existent aujourd’hui.

Il y a de qu’on appelle la voie verte ou l’auto-archivage. Là c’est qu’en fait on continue d’utiliser le circuit de publication normal mais les chercheurs, les auteurs des articles et les autrices des articles vont aussi déposer dans des dépôts soit institutionnels, soit nationaux, soit de leur université, soit disciplinaires, vont mettre leur travail en accès libre. Par exemple vous avez un nouvel article qui est accepté vous allez aussi le mettre sur, je ne sais pas, une archive d’articles de vote discipline à laquelle les gens peuvent accéder et là ça va être disponible en libre accès en plus de là. Évidemment les éditeurs ne sont pas très contents de ce genre de chose là, donc ils mettent des périodes d’embargo. Par exemple ça a été pendant longtemps 48 mois chez Elsevier avant qu’on ait le droit de mettre l’article en ligne gratuitement ; avec des exceptions genre si c’est sur votre page web et que comme ça les gens n’arrivent pas à le trouver, c’est bon. En France on a la chance depuis la loi République numérique que maintenant le délai d’embargo est maximisé par la loi à six mois pour les sciences inhumaines et asociales et 12 mois pour les autres disciplines. Donc ça c’est assez cool. Par contre c’est assez flou dans le texte de la loi sur ce qui est concerné par ça. Ça concerne les périodiques publiés au moins une fois par an. Typiquement les monographies, donc les livres, ce n’est pas inclus alors qu’il y a plein de livres qui sont écrits par des chercheurs, surtout en sciences humaines et sociales ils publient beaucoup comme ça, et puis nous, en informatique, on publie beaucoup dans des conférences. Alors les conférences ce sont effectivement des publications qui sont tous les ans, mais c’est chaque conférence. Par exemple c’est truc machin 2017, truc machin 2018, truc machin 2019, du coup ce n’est pas un périodique qui est publié tous les ans ce n’est pas le journal of truc machin et du coup ce n’est peut-être pas couvert. Il faudrait essayer de l’utiliser, d’attendre qu’il y ait un éditeur qui porte plainte et de faire une jurisprudence pour voir comment le juge interprète la loi. Mais bon ! En pratique les gens je pense, ceux qui le font, qui font comme si ça marchait et qui le faisaient déjà avant quand ils n’avaient pas le droit, il n’y a pas trop de problèmes. Ça arrive que les éditeurs poursuivent des institutions ou des individus, mais c’est assez rare parce que ça leur ferait quand même une assez mauvaise presse. Donc ça c’est la voie verte, c’est l’auto-archivage.

Sur ça il faut faire attention, il y a des start-ups là Academia.edu et ???, dont certains d’entre vous ont peut-être entendu parler, ce ne sont pas des dépôts pérennes. Ce sont des gens qui cherchent un business modèle, qui peuvent se faire racheter à tout moment, ce n’est pas du dépôt voie verte. C’est du réseau social, c’est, je ne sais pas, c’est comme si vous mettiez des posts sur Facebook sauf que c’est un truc soi-disant dédié à la recherche.

Il y a déjà SSRN donc Social Science Research Network qui s’est fait racheter, Mendeley aussi et l’éditeur qui l’a racheté du jour au lendemain a supprimé tous les articles qui étaient de chez lui, pas les autres par exemple. Donc ce n’est pas du tout un truc pérenne, ça ne compte pas comme du libre accès pour moi.

Ensuite on a ce qu’on a appelé la voie dorée, où là l’idée c’était de dire on publie dans le journal et directement c’est en libre accès sur le site de l’éditeur. Ça c’était bien et donc on a appelé ça doré parce que c’est stylé. Le problème c’est que les éditeurs ont dit « oui, d’accord, mais alors ce sont les auteurs qui payent ». Et du coup il y a beaucoup de gens qui confondent open access et « je paye pour publier ». Ils ont réussi ce coup-là parce qu’évidemment vous pensez bien qu’avec tous leurs millions d’euros il faut bien qu’ils fassent quelque chose et ils font notamment beaucoup de lobbying. Vous avez par exemple dans le financement de la recherche qui, malheureusement, se fait de plus en plus par projets et non plus sur financement pérenne dans les labos, ça veut dire qu’on perd beaucoup de temps à faire des projets et la plupart du temps ça échoue, enfin bref ! Mais dans les financements par projet de la recherche, par exemple au niveau européen qui distribue des énormes bourses de plusieurs millions d’euros parfois de recherche, eh bien maintenant, grâce au lobbying des maisons d’édition, il y a une partie de cet argent qui est fléché pour payer les charges liées à la publication, pour que ce soit en libre accès, parce que tout le monde est d’accord qu’il faut faire du libre accès ; tout le monde est qu’il faut que les articles soient en libre accès. C’est juste que les maisons d’éditions vont expliquer « mais nous ça nous coûte beaucoup d’arpent. Comment on va faire pour faire gagner à nos actionnaires ? » , ils ne disent pas ça comme ça, ils disent « comment on va tenir le taux de profit de nos actionnaires ? » Maintenant ça veut dire qu’il faut que les auteurs payent.

Ça, ça a été un peu dévoyé. Finalement ça coûte trop cher en fait cette méthode-là. On pourrait dire même dans un pays comme la France on a assez d’argent ; on va le faire, ce n’est pas grave, allez, on paye comme ça. En fait, le CNRS produit tellement de papiers que s’il devait payer ! Parce que c’est cher, 3000 euros, 5000 euros pour publier un papier. Un papier qui coûtait 30 euros avant individuellement et qui va peut-être être lu dix fois dans sa vie, et encore ça c’est un papier qui a du succès déjà. C’est très cher et ça ne serait pas vivable pour des institutions qui publient beaucoup.

Donc, en réponse à ça, il y a une certaine mouvance dont je fais partie qui propose ce qu’on appelle la voie diamant, il y a des gens qui parlent aussi de voie platinium ou de fair open access où là l’idée c’est de faire de la recherche un commun, les communs dont je vous parlais tout à l’heure. Là les auteurs ne payent plus, les lecteurs ne payent plus et on essaye de gérer ça en commun avec des ressources publiques. OK ? Quand je dis publiques, ça peut-être des ressources communes pas forcément publiques au sens de « étatiques ».

Là c’est quand même beaucoup plus précis ce qu’on veut faire. Ce n’est plus sur le libre accès c’est « on veut faire de la recherche un commun ».

Qu’est-ce que ça veut dire de faire de la recherche un commun ? Ça veut dire qu’on se dirige vers une abolition de la propriété lucrative de la connaissance, en tout cas de cette connaissance-là, et, en même temps, du coup ce n’est pas juste ça, c’est aussi qu’on va faire en sorte que les chercheurs et les chercheuses se réapproprient leurs moyens de production, c’est-à-dire les outils de diffusion de la connaissance. C’est ça leur cœur de métier.

On va voir comment ça marche. Tout simplement en faisant un exercice. Je vous ai dit un commun ce sont trois choses : c’est une ressource, un mode d’accès, des règles de partage et une gouvernance.

La ressource c’est quoi ? Ce sont les résultats de la recherche, donc des articles, des données, des logiciels. Ça peut être des données brutes, ça peut être des données traitées, ça peut être des images, des traductions ; ça peut être plein de choses.

Le mode d’accès. Eh bien ce n’est pas parfait mais c’est ce qu’on fait de mieux, accès via Internet c’est ce qu’on a de plus universel, ce n’est pas complètement universel mais c’est comme ça qu’on s’en rapproche le plus, sachant qu’il y a plein de problèmes de barrière de langue, etc., parce que par exemple on publie en anglais ; ce n’est pas parfait, je ne dis pas que c’est parfait. Mais si on utilise des licences libres les gens auront le droit de traduire, ce qu’ils n’ont pas le droit de faire actuellement. On utilise des logiciels et des licences libres, évidemment, parce que ça ne sert à rien de sortir d’une cage pour rentrer dans une autre.

Et la gouvernance c’est quoi ? Là le principe ça va être que les auteurs et les autrices conservent leur doit d’auteur ou leur copyright dans la législation. Pourquoi on fait ça ? Parce qu’en fait le but, quand moi je publie un article, l’article peut être vendu genre un million de fois, je ne touche pas un centime de plus. Mon salaire est fixe, il est payé par l’État sur une grille de fonctionnaires : je suis échelon 3, maître de conférences classe normale, je touche 2 000 euros par mois, un peu plus, c’est comme ça. Je peux produire autant d’articles que je veux ou ne rien publier, je suis payé pareil. OK ! Donc ça veut dire que moi mon intérêt quand je produis un article c’est juste qu’il soit lu. Si j’écris un article et que je me fatigue à le faire publier, à le mettre en forme, à faire la recherche qui va permettre d’y aboutir, etc., c’est que je pense que c’est important et mon intérêt en tant que chercheur c’est que mon article soit lu, c’est qu’il soit disponible le plus possible. Ça veut dire qu’en gros mes intérêts personnels sur cet article sont alignés avec ceux de la communauté. Donc ça veut dire qu’en gros, la gouvernance d’un commun pour la recherche, ce qu’elle dirait c’est que les auteurs conservent leurs droits d’auteurs, leur copyright. Ils ne les cèdent plus parce que ce sont eux qui vont dire c’est moi qui décide pour cet article et il est disponible. Forcément ! Ils n’ont aucun intérêt à le rendre privé.

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Les comités éditoriaux détiennent les revues.