Les étapes clefs de l'appropriation des solutions libres - Webinaire TNT

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Titre : Les étapes clefs de l'appropriation des solutions libres

Intervenants : Bastien Guerry - Pascal Kuczynski - Présentateur

Lieu : En ligne

Date : 7 avril 2022

Durée : 43 min 32

Vidéo

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.


Description

Les collectivités, de même que tout autre organisme public, doivent assurer la maîtrise, l'indépendance et la pérennité de leurs systèmes d'information : recourir à des logiciels libres peut y contribuer. Comment acheter des prestations autour de logiciels libres ? Pourquoi et comment publier les codes sources qu'une collectivité développe ou fait développer ? Où trouver de l'aide sur ces sujets ?

Transcription

Présentateur : Bonjour à tous et bienvenue pour ce huitième webinaire du programme TNT. Le sujet du jour ce sera les étapes clefs de l’appropriation de solutions libres et les réponses que l’on peut apporter à toutes les questions que vous vous posez sur ce sujet, ainsi que les ressources que vous pourriez mobiliser.
Pour tout cela on a la chance d’accueillir deux intervenants que l’on remercie grandement pour leur présence que je laisserai se présenter plus en avant un peu plus tard.
Je présente Bastien Guerry, responsable du Pôle logiciels libres au sein de la DINUM, et Pascal Kuczynski, délégué général de l’ADULLACT.
Je finis en vous indiquant qu’il y aura trois séquences dans ce webinaire. La présentation de Bastien sera suivie d’un échange d’une dizaine de minutes, la présentation sera suivie elle aussi d’un échange et enfin un échange commun en fin de séance pour vous permettre d’échanger avec nos intervenants.
Il me reste, Bastien, à te laisser la parole et à vous souhaiter à tous un bon webinaire.

Bastien Guerry : Tout d’abord un rapide focus sur deux produits auxquels nous contribuons.
Le premier c’est le catalogue GouvTech, qui est accessible, je vais mettre le lien, catalogue.numerique.gouv.fr. Ce catalogue rassemble des solutions libres et non libres, il est alimenté par les éditeurs de logiciels eux-mêmes et vous pouvez très facilement sélectionner dans ce catalogue des solutions libres. Elles sont maintenant un peu plus que 56, elles sont 67, le catalogue ne cesse de référencer de nouvelles solutions libres. À partir de simples critères vous pouvez essayer d’explorer des solutions qui sont libres, portées par des éditeurs français, déjà utilisées ou non dans l’administration. Le catalogue précise aussi si le logiciel est référencé dans le socle interministériel des logiciels libres.
Ce socle c’est celui dont je parle dans la deuxième partie de cette diapositive, le lien est www.data.gouv.fr/fr/datasets/socle-interministeriel-de-logiciels-libres/. C’est un produit historique qui est là depuis bientôt dix ans, qui est construit par les agents publics. Ce catalogue est un catalogue où l’administration donnera une expertise sur des logiciels libres qu’elle déploie. Ils sont déployés soit sur des postes des agents publics, on pense à LibreOffice qui est déployé dans plusieurs ministères ou opérateurs, on peut penser à d’autres solutions de bureautique, mais ce sont aussi des solutions, des outils métiers qui peuvent être déployés au sein des systèmes d’information.
Aujourd’hui on a plus de 200 solutions libres et on continue à en avoir de nouvelles.
La grande différence avec le catalogue GouvTech c’est que dans le SILL vous avez des solutions dont vous êtes sûr qu’elles sont utilisées dans l’administration, pour lesquelles vous pouvez contacter un référent qui a le plus souvent une expertise technique, c’est-à-dire qu’il peut répondre à des questions : comment avez-vous déployé cette solution, quels ont été les obstacles ? Ce produit continue d’évoluer. Il est porté par la DINUM, publié par la DINUM, il fait vraiment l’objet d’une expertise qui vient de plus d’une centaine d’agents publics ; vous avez aussi sur le site la liste des contributeurs.

Je vais me présenter ici, simplement pour vous dire que je suis développeur de formation et libriste de passion.

Rapidement parce que je suis rentré directement dans nos deux produis phares que vous pouvez peut-être déjà connaître.
Je pense qu’il faut dézoomer un tout petit peu et reparler du logiciel libre pour rappeler que c’est un mouvement qui est déjà très ancien, qui alerte depuis très longtemps sur le besoin de liberté des utilisateurs et ces utilisateurs ne sont pas seulement des citoyens ou des utilisateurs finaux, ce sont aussi des services publics, les administrations utilisatrices qui ont besoin d’être libres avec les logiciels qu’elles utilisent et quand elles font développer des logiciels elles ont besoin de pouvoir utiliser ce qu’elles payent en toute liberté pour le faire évoluer, pour en garder la maîtrise, pour pouvoir contribuer avec les codes sources qu’elles développent à l’écosystème général du logiciel libre.
Il faut savoir que tout ce qui est brique open source ou en logiciel libre est omniprésent dans tous les systèmes qu’on utilise. Une étude sortie l’année dernière estime que 92 % des logiciels utilisent des codes sources sous licence libre à divers degrés, souvent gratuitement, souvent en allant chercher des dépendances pour utiliser telle ou telle brique fonctionnelle, parfois en étant vigilants sur la sécurité de ces briques, savoir si elles sont bien maintenues, mais c’est vraiment toute une infrastructure. On a coutume de dire en informatique que le logiciel a mangé le monde. En fait l’open source, d’une certaine façon, a envahi complètement nos stacks logicielles.
En France c’est un écosystème d’entreprises qui est en croissance. On estime aujourd’hui à 10 % la part de l’informatique open source dans l’ensemble du marché de l’informatique et c’est une part qui va croissante avec l’écosystème de TPE, PME, ETI, qui est lui-même très dynamique.

Un point à noter parce que ce n’est pas toujours visible, c’est que dans cette dynamique économique on a beaucoup d’éditeurs. On n’est pas seulement face à des fournisseurs de services qui vous rendent des services sur des logiciels libres qui ne sont pas développés par eux. Bon nombre de ces entreprises, 57 % en France, sont éditrices à divers titres. Elles peuvent être éditrices de logiciels libres pour lesquelles elles vendent du support, de l’installation, de la documentation, de l’intégration. Elles peuvent aussi être éditrices de logiciels libres avec des modèles économiques qui s’appuient sur l’open core, c’est-à-dire on ouvre sous licence libre une partie du code source, mais on donne accès à des fonctionnalités qui, elles, sont refermées.
Se pose évidemment la question, pour un éditeur de logiciels, du modèle économique qu’on veut favoriser : si on est un pur player, jouant entièrement la carte de l’open source, est-ce qu’on est sûr de s’y retrouver face à des entreprises parfois plus grosses, intégrateurs, fournisseurs, qui profitent de ce qui est développé sans forcément contribuer en retour.

En France on a un contexte légal qui est très favorable. Il y a bien entendu la circulaire Ayrault qui date d’il y a 10 ans, qui inscrit le logiciel libre dans la feuille de route des usages ministériels. Il faut rappeler que ce sont des logiciels fiables. Pour mobiliser l’écosystème autour de besoins de repérage et de référencements le SILL, que j’ai évoqué tout à l’heure, est issu de cette loi Ayrault

On va avancer plus vite sur cet aspect-là, seulement citer la loi pour une République numérique qui continue d’encourager le recours au logiciel libre. Ce n’est pas une priorité, c’est un encouragement qui, entre autres aspects, demande aussi l’ouverture des codes sources, de les considérer comme des documents administratifs qui doivent faire l’objet d’une ouverture au même titre que les autres documents ouverts en open data.

8’ 23

Quand est-ce que je pose la question du logiciel libre ?
Au moment de l’expression du besoin, de l’exploration des solutions, au moment de la rédaction des clauses de marché, de la mise en œuvre de cette solution et éventuellement de la publication des codes sources spécifiques développés par les administrations quand elles achètent une solution. Elles peuvent acheter sur étagère une solution clef en main. Elles peuvent aussi acheter des services, dont une partie arrive clefs en main par le fournisseur ou le prestataire et dont une autre partie est développée. Je donne un exemple trivial : vous voulez acheter un site sous Drupal, vous avez besoin d’un module de newsletter, ceux qui se trouvent sur le marché ne correspondent pas à vos besoins, vous faites développer ce module et vous pouvez avoir envie de le partager au reste de l’écosystème administratif et au-delà, pour que tout le monde en profite.

L’expression des besoins est la phase critique du problème à résoudre et de l’investigation. C’est ici qu’on a tous les catalogues qui peuvent servir en se rappelant bien que derrière ces catalogues il y a à chaque fois de l’expertise humaine : les solutions du catalogue GouvTech et parmi elles les solutions open source ; les solutions du SILL et derrière ces solutions des gens qui peuvent vous aider. Je cite aussi, mais Pascal y reviendra, le Comptoir du Libre qui référence non seulement des solutions mais aussi tout le réseau de prestataires qui peuvent aider à apporter ces solutions.

Si vous êtes une administration, centrale ou non, vous pouvez vérifier que vous êtes éligible ou pas sur le marché du support et d’expertise logiciels libres. Sur le site communs.numeriques.gouv.fr, nous avons récemment publié de la documentation sur ce marché interministériel de support à l’expertise qui est ancien lui aussi, c’est son troisième renouvellement, que vous pouvez solliciter soit pour du support sur des logiciels libres qui ont été utilisés soit pour des développements via la partie expertise de ce marché.

Et enfin, évidemment, n’hésitez pas à vous tourner vers les communautés informelles qui réunissent des agents publics dans vos écosystèmes et qui fourmillent souvent de gens qui ont des connaissances à divers titres sur les logiciels libres qui sont omniprésents dans vos achats.

Steve, je compte sur toi pour me limiter dans le temps. Je vais essayer d’avancer plus vite. Il me reste dix minutes.

Une phase critique, celle de la rédaction des clauses de marché. À la fin le lien de cette présentation que vous parviendra en PDF, c’est une présentation de la mission d’appui au patrimoine immatériel de l’État qui présente la révision du CCAG-TICau 30 mars 2021. Je vous invite vraiment à suivre cette présentation qui est très simple, qui rappelle quels sont les points d’attention à vérifier quand on achète du logiciel de façon à bien connaître les connaissances antérieures qui seront réutilisées par vos prestataires, les développements spécifiques qui seront faits par votre prestataire et de quelle façon vous pouvez vous assurer de récupérer la propriété intellectuelle de l’ensemble de ces développements pour en garder la maîtrise et pour envisager aussi de publier telle ou telle partie d’un code source que vous avez fait développer.

Je mentionne un point important : dans un marché public vous n’avez pas le droit de commander une solution propriétaire. Vous ne pouvez pas mettre en concurrence le marché autour d’une solution propriétaire que vous exigez, ce serait fausser la concurrence, évidemment. Si votre expression de besoin aboutit au choix d’un logiciel libre, vous avez le droit, vous pouvez exiger ce logique libre et mettre en concurrence les prestataires sur ce logiciel libre. Le principe étant que le logiciel étant libre, il y a une égalité de traitement entre les prestataires qui peuvent tous s’emparer du code source pour en proposer du support, de l’intégration, le déploiement, voire des développements spécifiques.
Il faut bien faire attention quand on a un nom de produit – je pense à Firefox, à Nextcloud, à LibreOffice – de bien distinguer le nom du produit qui désigne le logiciel et qui n’est pas forcément associé à une marque, du nom d’une marque, les noms de marque sont largement utilisés dans le logiciel libre aussi. Firefox est un mauvais exemple puisque Firefox est une marque déposée de la Fondation Mozilla, mais vous pouvez demander le déploiement de Iceweasel qui n’est pas une marque déposée par Debian, qui est l’équivalent fonctionnel de Firefox.
On peut rappeler que le logiciel libre c’est aussi la liberté d’avoir conclu sur votre besoin pour demander tel ou tel logiciel.
Voilà tout pour cette slide, je pourrai revenir après sur les détails.

J’ai déjà évoqué le marché de support.
Ne pas hésiter non plus, même si ça peut être chronophage, à consulter les canaux de support communautaire.
Du côté du Pôle logiciels libres on a maintenant une audience assez large avec la communauté Blue hats pour qu’elle-même fonctionne comme une communauté pouvant apporter du support communautaire. On a récemment ouvert une liste de discussion publique, il y a aussi des canaux privés et des listes de discussion privées.
Je reviens aussi sur les différents espaces d’échange qu’on déploie sur ???. Ces gens-là peuvent fournir des expertises.

Un point sur lequel être très attentif dans l’évaluation de ce qui vous parvient comme propositions ce sont les liens effectifs d’une entreprise avec les communautés du Libre. Simplement, Il ne faut pas se laisser impressionner par une longue liste de références, il faut se renseigner de près : est-ce que c’est une entreprise qui est vraiment en maintenance du logiciel pour lequel elle propose des services ? Est-ce qu’elle est simplement une grosse contributrice de ce logiciel qu’elle connaît très bien ? Est-ce qu’elle a vraiment des contributeurs au logiciel parmi ses employés ? Est-ce qu’elle est simplement observatrice ??? et utilisatrice sans vraiment contribuer ? Ce sont tous des aspects importants dans la qualité du support.

Une fois que vous avez bien mis tout au carré et que vous vous êtes assuré de récupérer la propriété intellectuelle des codes sources que vous faites développer, vous pouvez les publier. Vous pouvez le faire a minima pour des enjeux de transparence ; vous pouvez le faire de façon plus ambitieuse en essayant vous-même de recevoir des contributions, des corrections de bugs sur ce que vous avez développé, sur ce que vous avez partagé.
On maintient le site code.gouv qui n’est pas une forge, les gens confondent souvent, il n’est pas en train d’héberger les projets et logiciels du secteur public sur code.gouv, c’est simplement un index qui pointe vers différentes forges, Github, Gitlab, des instances Gitlab, notamment l’instance de l’ADULLACT, et on y référence l’ensemble des projets du secteur public. Il y en a plus de 9000 aujourd’hui et on continue de faire évoluer ce site.

On recommande de prioriser l’ouverture des codes sources en fonction de savoir s’il y a des enjeux de transparence, il y a peut-être des obligations légales en termes d’algorithmes publics, ou si vous arrivez à mesurer un potentiel de réutilisation de ce que vous allez ouvrir en priorisant ce qui a un fort potentiel de ré-utilisabilité.
Je mentionne aussi rapidement dans cette slide l’AMUE, l’Agence de mutualisation des universités et établissements. Dans le lien que je mets à disposition, elle propose une méthodologie de priorisation des codes sources à ouvrir selon d’autres critères, mais, pour des grands producteurs de codes sources, c’est une méthodologie qui peut être pertinente et ne demande qu’à être expérimentée.

Je vous ai fait un décor à grands très traits. On peut discuter de tout le reste avec des questions. Le Pôle logiciel libre travaille avec la Mission LABEL qui porte le catalogue. Nous-mêmes avons une offre de services que je mets en lien dans la discussion si vous voulez explorer. Vous êtes bien entendu invités à tous les ateliers Blue hats, le prochain a lieu en visio demain à 11 heures ainsi que l’ensemble des communautés informelles qui portent le sujet du logiciel libre dans l’administration. Vous pouvez aussi solliciter la DAJ de Bercy, la mission pour le patrimoine immatériel, qui peut vous accompagner sur les enjeux juridiques au moment des achats en plus de la présentation que j’ai référencée.
J’arrête là et à votre disposition pour toutes les questions.

Présentateur : Merci beaucoup Bastien. Il y avait juste une question de Lionel : y a-t-il un espace de discussion quelque part qui regroupe les acteurs du développement des logiciels libres pour l’État, un forum, un Discord ou autre. Je pense que tu as en partie répondu à la question ???communautaire. Est-ce qu’il y a d’autres canaux ?

Bastien Guerry : Les canaux en temps réel ce sont les salons Tchap. Dans ces salons il y a en particulier le salon Blue hats, le salon SILL et le salon ??? libre qui peuvent être pertinents. C’est indiqué dans la page https://man.sr.ht/~etalab/logiciels-libres/espaces-communication-bluehats.md, C’est ici qu’on trouvera le plus de gens pour discuter en temps réel. On n’a pas de canal asynchrone privé. On a une liste de discussion publique, il faut se souvenir qu’elle est publique, ça veut dire qu’il n’y a pas que des agents publics, il faut l’utiliser avec modération pour tout ce qui concerne ce qui ne doit pas sortir de l’administration.
On a mis fin au forum qui était forum.gouv.etalab.fr pour des raisons de maintenance et de sécurité. On n’avait plus la possibilité de porter directement ce forum.
Il n’y a pas de Discord qui n’est pas libre. Il n’y a pas non plus de Rocket.Chat ou de Mattermost entièrement dédié. Il y a sur ???, porté par le pôle Eole de l’Éducation nationale, un Rocket.Chat de mémoire, je ne sais pas s’il est très utilisé, c’est plutôt Tchap qui est l’espace ??? et la liste que Pascal a mentionnée. Tchap n’est pas ouvert à tous. Il est potentiellement ouvert à tous les agents publics. S’il n’est pas ouvert pour votre nom de domaine, vous pouvez faire la demande d’ouverture à l’équipe de Tchap. On l’a fait récemment par exemple pour amue.org.

Présentateur : Super. Merci Bastien. S’il n’y a pas d’autres questions je vous propose qu’on avance avec la présentation de Pascal et on aura un temps d’échange de toute façon à la fin. Je vous invite à poser vos questions dans la discussion publique et nos intervenants y répondront.
Pascal, je te laisse la parole.

21’ 07

Pascal Kuczynski : Très bien. Merci de l’invitation