Différences entre les versions de « La 5G va-t-elle tous nous rendre fous - Débat de midi »

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<b>Laure de la Raudière : </b>C’est un mauvais débat.
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<b>Laure de la Raudière : </b>C’est un mauvais débat. Tous ceux qui suivent les travaux que j’ai faits à l’Assemblée nationale savent que mon combat politique c’est le très haut débit pour tous et partout. Moi aussi je vis en milieu rural et je sais très bien ce que vous vivez. Lorsque la ligne téléphonique fixe est coupée, aujourd’hui les délais de rétablissement sont devenus astronomiques. Ce qui montre aussi l’importance pour tous les citoyens d’avoir un accès numérique de qualité à très haut débit.
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<b>Camille Crosnier : </b>Mais ça n’est pas le cas aujourd’hui !
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<b>Laure de la Raudière : </b>La politique du gouvernement là-dessus a été nouvelle, a changé depuis 2018 avec la mise en place du <em>new deal mobile</em>. C’est plus 5000 antennes.
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<b>Camille Crosnier : </b>Florence nous écrit : « Ne pensez-vous pas qu’il faudrait qu’il n’y ait plus de zones blanches avant de penser à la 5G ? »
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<b>Laure de la Raudière : </b>Je suis convaincue de ça. Ce que je veux dire par là c’est qu’il y a une décision qui a été prise en 2018, qui est en cours de déploiement, qui est plus de 5000 antennes en zone rurale par opérateur d’ici fin 2026. Ce projet est cours. Je comprends l’insatisfaction de cette auditrice.
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<b>Camille Crosnier : </b>De plein d’autres. C’est une réalité encore une fois.
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<b>Laure de la Raudière : </b>Ce que je veux dire par là c’est que cette décision est prise et la déclinaison du programme <em>new deal</em> est en cours. Progressivement, et on le voit quand même, il y a une amélioration de la couverture numérique mobile en 4G dans les zones rurales. Il y a encore des zones blanches, je le sais bien, mais la décision a été prise.<br/>
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Maintenant on a une autre décision à prendre. Celle-là est prise, on la déroulera, et il y aura une couverture de toute la population d’ici 2026/2027. Il y a une autre décision à prendre c’est : est-ce qu’on dote la France du réseau 5G pour être présents dans la bataille industrielle de demain ? C’est ça la question centrale. Si on prend du retard, on ne pourra pas rattraper le retard par rapport à l’Allemagne.
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<b>Camille Crosnier : </b>Ce que vous dites avec monsieur Moulin, je suis désolée, l’essentiel c’est pas d’être en retard par rapport au monde, finalement. Mais les citoyens français ?
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<b>Laure de la Raudière : </b>C’est important de rappeler qu’on est dans une économie mondialisée, qu’on le veuille ou non, c’est un fait. Toute décision qui nous fait prendre du retard dans le domaine industriel c’est moins d’emplois demain, donc c’est la misère dans un pays. C’est tout ! !l faut le dire.
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<b>Camille Crosnier : </b>Message sur Twitter : « Je me demande non pas si la 5G nous rendra fous, mais à quoi elle sert vraiment dans un contexte de changement climatique tel qu’il faudrait au contraire freiner absolument non consommations. Vous êtes en train de nous dire que c’est l’économie qui justifie la 5G, Stephen Kerckhove ?
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<b>Laure de la Raudière : </b>Mais elle contribue. Les objets connectés permettront de réduire la dépense énergétique.
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<b>Stephen Kerckhove : </b>Je ne sais pas si c’est un mauvais débat, par contre c’est un faux débat dans le sens où l’Arcep, je le répète, les obligations de couverture ce sont les principales zones urbaines et les principaux axes routiers d’ici en 2025. En 2025 on sera à la 6G, 7G, 8G. Arrêtons de croire que globalement une ambulance qui circulera en zone rurale pourra se connecter pour faire de la chirurgie à distance ! Ça ne marchera pas, il y aura une coupure de réseau et vous prendrez des risques considérables.<br/>
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Après, savoir si on est en avance ou si on est en retard ! Si on est avance pour se précipiter dans le mur climatique, je ne suis pas sûr que ça soit une avancée.
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<b>Camille Crosnier : </b>Jacques Moulin.
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<b>Jacques Moulin : </b>Juste un point par rapport à ce qui vient d’être dit. La 5G ne va pas être mise en place au moment où la 4G devra être mise partout sur le territoire, ce n’est pas le sujet. Le <em>new deal</em>, comme l’a expliqué Laure de la Raudière, est lui mis en place pour assurer une couverture mobile. Effectivement, ça demande des investissements, effectivement ça demande du temps. Par ailleurs, ça demande aussi des compétences. Il appartient notamment aux programmes éducatifs de former suffisamment de jeunes pour être en capacité, justement, à aller faire les travaux qui sont nécessaires. Si nous ne commençons pas les expérimentations sur la 5G, si nous ne commençons à préparer l’industrie, c’est effectivement l’emploi de demain, nous serons très assurément un dominion soit d’un modèle américain, soit d’un modèle asiatique ou chinois qui eux ont déjà déployé la 5G – il suffit de regarder ce qui se passe effectivement en Chine où on est sur plus de 100 millions.
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<b>Camille Crosnier : </b>Encore une fois, je vous interromps, on est encore dedans, mais on s’est pris un confinement pour la moitié de l’humanité, on parlait du monde d’après en disant c’est un monde qui va trop vite, c’est un monde trop connecté, c’est ça qui a aussi été l’une des causes de la pandémie, cette ultra-connectivité du monde, aujourd’hui on est en train de dire qu’il faut aller encore plus vite, Yaël Benayoun ?
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<b>Jacques Moulin : </b>Parlons-en justement.
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<b>Camille Crosnier : </b>Je voudrais savoir si ce n’est pas juste à l’opposé de ce vers quoi on pensait aller pendant le confinement
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<b>Jacques Moulin : </b>Pas du tout ! Ce qui a permis de maintenir l’économie, toutes les entreprises peuvent le dire, toutes les universités peuvent le dire, ça a été justement la connectivité.
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<b>Camille Crosnier : </b>Le numérique.
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<b>Jacques Moulin : </b>Et juste un point, je voudrais préciser, on est en train de prendre une photo sur une 5G alors que l’on sait que les technologies nativement évoluent et qu’elles sont de moins en moins énergivores. C’est un point où tout le monde s’accorde.
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<b>Camille Crosnier : </b>Yaël Benayoun, on va vous laisser répondre.
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<b>Yaël Benayoun : </b>Si elles sont multipliées par dix ça va être un peu compliqué.<br/>
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Je pense qu’il y a quand même un sujet qu’on n’a pas traité qui est juste pour quels usages. Effectivement c’est la question qui a été posée par les auditeurs. En fait aujourd’hui la quasi-totalité des usages numériques qui sont, je ne sais pas, lire un article enligne, prendre un billet de train sur Internet ou quoi, se fait très bien et même de manière optimale avec la 4G. Donc déjà peut-être déployons la 4G et voyons ce que ça fait.
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<b>Jacques Moulin : </b>Parlons du sujet.
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<b>Yaël Benayoun : </b>Nous allons y venir. Là j’ai la liste des usages prévus par l’Arcep.
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<b>Camille Crosnier : </b>L’autorité des télécoms, je le rappelle.
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<b>Yaël Benayoun : </b>Le régulateur des télécoms en France. C’est bien sûr du streaming vidéo, de la réalité virtuelle, de la connectivité à faible latence entre véhicules et infrastructure, véhicules entre eux, en fait c’est vraiment un boulevard pour la <em>Smart City</em> ; c’est la multitude des capteurs connectés dont on parlait tout à l’heure, donc ce sont les 100 milliards d’objets connectés. La vraie question, si on ne prend ne serait-ce que le streaming vidéo parce que là, pour le coup, il y a des études qui sont sorties dessus donc on sait à peu près ce que ça coûte et c’est extrêmement énergivore : en 2018 ça représentait déjà l’équivalent de la consommation énergétique d’un pays comme l’Espagne et il est prévu que ça représente 80 % du trafic mobile l’année prochaine. Donc effectivement on imagine que ce n’est pas soutenable et comme le disait, je finis juste là-dessus, monsieur Kerckhove tout à l’heure, normalement on devrait réduire, en fait, la consommation du secteur numérique qui aujourd’hui est celui qui est le plus en croissance de tous les secteurs industriels.
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<b>Camille Crosnier : </b>Je vais laisser Laure de la Raudière vous répondre dans un instant. D’abord le message de Baptiste : « Intéressante la phrase de votre intervenante : la 5G servira à répondre à de nouveaux besoins que l’on saura créer ». C’est donc bien l’objectif : créer des besoins au détriment de la planète.
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<b>Pause musicale : </b><em>Fou</em> par l’Impératrice.
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<b>Camille Crosnier : </b><em>Fou</em>, c’était l’Impératrice sur France Inter.
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<b>Voix off : </b>France Inter, <em>Le débat du midi</em>, Camille Crosnier
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<b>Camille Crosnier : </b>Nous parlons 5G aujourd’hui dans <em>Le débat du midi</em>

Version du 10 août 2020 à 14:56


Titre : La 5G va-t-elle tous nous rendre fous ?

Intervenant·e·s : Yaël Benayoun - Laure de la Raudière - Stephen Kerckhove - Jacques Moulin - Camille Crosnier

Lieu : Le débat de midi - France Inter

Date : juillet 2020

Durée : 55 min

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Site de présentation de l'épisode

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration :

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcrit : MO

Description

Nos vies en mode turbo : le déploiement de la cinquième génération de réseau mobile commencera à la fin de l’année en France. Une révolution technologique qui inquiète et déchaîne les passions, aussi bien pour l’environnement que pour notre santé. Alors, la 5G va-t-elle tous nous rendre fous ?

Transcription

Camille Crosnier : Bonjour tout le monde. Bienvenue à la Table du débat de midi où ça devrait fuser aujourd’hui puisqu’on passe en mode ultra haut débit avec la 5G. Cinquième génération de réseau mobile, 30 ans après l’apparition des premiers téléphones portatifs, on disait comme ça à l’époque, dont le déploiement devrait commencer à la fin de l’année en France. Devrait, car certains essayent de stopper ce turbo technologique et demandent un moratoire, inquiets de l’impact environnemental, de potentiels risques sanitaires et posant cette question presque philosophique : a-t-on vraiment besoin d’aller encore et toujours plus vite ? La 5G nous promet un monde ultra-connecté, fluidifié, avec des voitures autonomes, des vidéos téléchargées en quelques secondes, des systèmes innovants pour l’industrie et des prouesses pour la télémédecine. Un atout pour la compétitivité, donc l’économie, même pour la planète disent ses partisans sans convaincre les opposants qui vont, pour certains, mettre le feu à des dizaines d’antennes relais en Europe.
La 5G va-t-elle tous nous rendre fous ? On en débat jusqu’à 13 heures, venez à table.

Voix off : Camille Crosnier. Le débat de midi sur France Inter.

Camille Crosnier : Impeccable parité autour de la table aujourd’hui.
Bonjour Yaël Benayoun.

Yaël Benayoun : Bonjour.

Camille Crosnier : Vous êtes cofondatrice et présidente de l’association Le Mouton Numérique qui participe à la réflexion sur l’usage du numérique.
En face de vous Stephen Kerckhove. Bonjour.

Stephen Kerckhove : Bonjour.

Camille Crosnier : Vous êtes délégué général de l’association Agir pour l’Environnement qui a déposé des recours pour obtenir un moratoire. On en parlera bien sûr.
Bonjour à Laure de la Raudière.

Laure de la Raudière : Bonjour.

Camille Crosnier : Vous êtes députée d’Eure-et-Loir, vice-présidente du groupe Agir à l’Assemblée. Vous êtes beaucoup engagée sur les enjeux du numérique.
Et enfin bonjour Jacques Moulin.

Jacques Moulin : Bonjour.

Camille Crosnier : Vous êtes directeur général d’IDate DigiWorld, on le prononce comme ça, qui se présente comme un thing tank pionnier, reconnu comme référence internationale dans le domaine du numérique. C’est la classe à priori !
On va déjà expliquer s’il vous plaît, je m’adresse à tous les quatre, simplement, clairement, et avant de voir les questions, les inquiétudes, juste ce qu’est la 5G qui peut paraître assez obscure, pas très concrète pour certains. Jacques Moulin, qu’est-ce que la 5G ?

Jacques Moulin : La 5G, comme son nom l’indique, est la cinquième génération pour les réseaux mobiles. C’est un petit peu plus, en fait, qu’une évolution technologique. Pour faire rapide et peut-être pour bien repréciser pour les auditeurs, on caractérise la 1G comme étant celle qui a permis de transporter la voix sur le mobile ; la 2G permettant de faire des SMS ; la 3G en ayant accès finalement au Web mobile ; la 4G a permis des débits beaucoup plus rapides, beaucoup plus interactifs et beaucoup plus denses.

Camille Crosnier : Que l’on a actuellement.

Jacques Moulin : Que l’on a actuellement absolument. Et la 5G est une évolution mais c’est aussi une révolution parce qu’ avec la 5G on va franchir, on peut dire, une sorte de saut quantique qui va permettre par un niveau de latence, c’est-à-dire le moment, le temps qui est demandé pour la transmission du signal.

Camille Crosnier : Le petit décalage.

Jacques Moulin : Exactement, le décalage. On peut prendre l’exemple du robinet : vous ouvrez votre robinet, l’eau coule au bout d’un certain temps, là c’est pareil. Qui va permettre de réduire ce temps de latence de façon absolument extraordinaire parce que nous sommes avec la 4G à du 0,27 seconde et on sera à du 0, 01 seconde.

Camille Crosnier : Quasiment rien.

Jacques Moulin : Quasiment rien. Ça peut paraître un détail, mais ce n’est pas un détail parce que notamment dans des applications et dans le cadre de la voiture autonome on voit bien que si on met un petit peu de temps avant de déclencher le signal du frein, il y aura problème.
Le deuxième point c’est la densification, la densité. Il y a une possibilité, effectivement, de connexion plus large avec la 5G de l’ensemble des outils connectés. C’est, bien évidemment aussi, la rapidité. On est sur une transmission qui va dix fois plus vite que la 4G et enfin, et non des moindres, c’est aussi une qualité supérieure, une qualité et on va dire, d’une certaine façon, un sans défaut supérieur par rapport à la 4G.

Camille Crosnier : Donc déploiement, normalement, à partir de la fin de l’année, Laure de la Raudière, dans neuf villes de France métropolitaine avec un objectif de remplacer à quelle échéance la 4G ?

Laure de la Raudière : Oui, vous avez raison, c’est l’attribution des fréquences à la rentrée pour les opérateurs, avec un déploiement sur neuf villes et puis une couverture progressive de l’ensemble des territoires.

Camille Crosnier : Horizon quoi ? 2030 pour que tout soit couvert ?

Laure de la Raudière : Je crois que c’est 2028/2030, donc il y a du délai. L’objectif est aussi de couvrir assez rapidement, en parallèle à certaines villes, des zones industrielles, ldes zones d’activité parce que l’enjeu, comme l’a très bien expliqué Jacques Moulin, c’est finalement le développement des nouveaux usages et ces nouveaux usages sont des usages industriels. C’est-à-dire que c’est important d’avoir la 5G dans les développements des objets connectés pour l’industrie, dans le développement des robots industriels qui va révolutionner, finalement, la façon de produire et la possibilité pour la France de relocaliser des activités industrielles, donc de maintenir ou de créer des emplois industriels.

Camille Crosnier : C’est, je le précise, déjà présent la 5G, notamment évidemment en Asie côté Chine et Corée du Sud, premiers pays à l’avoir déployée. En Europe également, Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Espagne ou Suisse par exemple.
Stephen Kerckhove, très factuellement encore une fois, je voudrais qu’on comprenne bien de quoi on parle avant vraiment d’entrer dans le débat, de quelles antennes, quelles fréquences va-t-on avoir besoin pour utiliser la 5G ?

Stephen Kerckhove : J’ai eu peur, j’ai cru que vous alliez me demander de défendre la 5G. Je ne suis pas sûr d’être le meilleur avocat.

Camille Crosnier : C’est pour ça que je vous dis qu’on va en débattre.

Stephen Kerckhove : Il n’y a pas de problème. La 5G va utiliser trois types de fréquences : 700 mégahertz qui est déjà utilisé ; 3,4 gigahertz à 3,8 gigahertz et éventuellement 26 gigahertz. Ce sont des fréquences qui n’ont jamais été utilisées par la téléphonie mobile. C’est notamment ces gammes de fréquences.

Laure de la Raudière : 26 gigahertz, les autres fréquences sont utilisées, juste pour être précis.

Stephen Kerckhove : Oui, tout à fait. Pour la 5G, en l’occurrence, ce sont ces fréquences-là. Les obligations de couverture proposées aujourd’hui par l’Arcep [Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse], c’est une ville avant la fin de l’année et d’ici 2025 les principales zones urbaines et les principaux axes routiers. Donc on voit qu’il y a aussi un gap entre ce qui est attendu, c’est-à-dire une couverture nationale, et les obligations de couverture qui restent relativement anecdotiques d’ici 2025.

Camille Crosnier : Vu que ce sont des fréquences qui ne sont pas toutes utilisées pour l´instant, il va falloir, Yaël Benyaoun, mettre plein de nouvelles antennes partout, en particulier les 26 gigahertz, je crois, n’aiment pas trop les murs et la pluie, donc il va falloir en mettre.

Yaël Benayoun : Oui, c’est ça. En fait, si on regarde vraiment en termes de sites, il va falloir multiplier par trois le nombre d’équipements pour couvrir le réseau. Ce qui me semble aussi intéressant et qui n’a pas peut-être pas été dit jusque-là c’est que bien évidement ça vient avec des nouveaux usages, mais derrière, ce qui est attendu en termes d’objets connectés, c’est quand même un doublement des équipements d’ici 2025 pour arriver à 125 milliards d’objets connectés ce qui représente, grosso modo, entre huit et dix équipements connectés par personne dans le monde d’ici 2030. Derrière c’est bien un projet de société aussi qui arrive avec la 5G.

Camille Crosnier : On va parler de la 5G dans Le débat de midi. N’hésitez pas, vous qui vous nous écoutez, à régir, poser des questions sur l’application sur France Inter et sur Twitter le mot clef #débatdemidi, logique. Émission réalisée par Valérie Ayestaray, préparée par Nathan Gallo avec Jules Thomas, Pauline Laverdure à la console et bien sûr téléphone pour nous accompagner.

Pause musicale : Hygiaphone de Téléphone.

10’ 27

Camille Crosnier : C’était l’été 1977 Hygiaphone de Téléphone pour être raccord avec le thème du jour : la 5G va-t-elle tous nous rendre fous ? C’est la question qu’on se pose. Le sujet déchaîne les passions, ça n’a pas été de parler pendant le disque. Je leur ai dit « « stop, le débat va commencer ». Hier encore c’était en Une du Parisien en France qui titrait « Doit-on avoir peur de la 5G ? ». C’est avant tout l’impact sur la planète qui fait débat, Stephen Kerckhove, d’Agir pour l’Environnement je le rappelle. Qu’est-ce que vous reprochez à la 5G de ce point de vue-là ?

Stephen Kerckhove : On reproche surtout au gouvernement de mélanger vitesse et précipitation. Développer ou déployer la 5G et valider les fréquences à partir de septembre sans avoir mené à bien une étude d’impact.

Camille Crosnier : Pourquoi vous dites que c’est potentiellement mauvais pour la planète ?

Stephen Kerckhove : C’est potentiellement mauvais pour la planète, encore faut-il mener des études, des essais aux agences, notamment l’ADEME, l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie le soin de menée ces études d’impact. Il faut du temps, donc autant menée correctement ces études et éventuellement développer par la suite.
Ce qu’on a constaté et on le regarde aujourd’hui c’est que l’impact du numérique en 2019 c’était 3,7 % des émissions de gaz à effet de serre et on évalue aujourd’hui pour 2025 l’impact à 7,5. Si on veut respecter les accords de Paris et limiter l’augmentation de la température à 1,5 degré, il faudrait réduire de 5 % là où chaque année on augmente de 8 %. Ça veut dire qu’aujourd’hui le numérique et notamment la 5G vont avoir un impact significatif sur les émissions de gaz à effet de serre, ça va consommer énormément d’électricité en supplément.

Camille Crosnier : En utilisation.

Stephen Kerckhove : En utilisation et en fabrication.

Camille Crosnier : Et en fabrication. C’est ça qui est en dessous. Je voudrais savoir, ce que vous disiez Yaël Benayoun, il va y avoir de nouveaux équipements à fabriquer, ce qu’on appelle l’énergie grise, c’est ça ? On va devoir fabriquer des antennes, des téléphones.

Yaël Benayoun : Oui. Justement sur cette question et le fait qu’on n’ait pas d’études systématiques sur la question est intéressant. On disait effectivement que les antennes 4G pourront être utilisées, en tout cas au début, pour déployer la 5G, mais, ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que ça s’empile en fait sur la 3G, la 4G, la 5G. Chaque antenne va devoir produire plus d’électricité, ce qui fait qu’on observe déjà aujourd’hui qu’il va falloir mettre des équipements de production énergétique locale sur chaque antenne dont le coût doit aussi être prévu. Aujourd’hui ce sont des panneaux solaires, ce sont des éoliennes. Quand on parle du coût énergétique de la 5G, il faut bien prendre effectivement la consommation énergétique du réseau en lui-même, mais les infrastructures qui sont déployées, les antennes, les infrastructures qui permettent que ces infrastructures fonctionnement et, en même temps, la fabrication de tous les équipements, donc des milliards dont j’ai parlé avant.

Camille Crosnier : Vous le sortez d’où le chiffre que vous nous avez donné sur l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, Stephen Kerckhove ?

Yaël Benayoun : C’est le chiffre Project ???.

Stephen Kerckhove : Oui.

Camille Crosnier : C’est le chiffre project. D’accord.
Laure de la Raudière, est-ce que vous les entendez ces arguments ?

Laure de la Raudière : J’entends tous les arguments.

Camille Crosnier : Sur votre compte Twitter vous parlez d’ « écologisme », écologiste par pur populisme. Vous y allez fort ! Vous l’avez twitté, vous l’avez écrit.

Laure de la Raudière : Je n’ai pas si ça de mes interlocuteurs d’aujourd’hui et je pense que le débat est nécessaire parce que c’est un débat de société. Ça a fait la Une, je crois, du Parisien d’hier, la Une ! La 5G a fait la Une du Parisien d’hier.

Camille Crosnier : C’est ce que je disais, « Doit-on en avoir peur ? »

Laure de la Raudière : Il y a un vrai débat de société donc ce débat est nécessaire. Simplement il faut aussi remettre des infos importantes. Dans la consommation énergétique du numérique que vous avez citée, vous avez cité les réseaux, c’est peanuts. Donc l’augmentation de peanuts ça ne fait pas beaucoup. Excusez-moi, c’est juste un fait. La consommation énergétique dans le numérique, il y a un rapport sénatorial qui a été publié la semaine dernière qui arrive aux mêmes conclusions que toutes les études, c’est d’abord les ordinateurs et les terminaux. Donc si on veut vraiment réduire la consommation énergétique dans le domaine du numérique il faut agir sur la fabrication des terminaux et des PC. D’ailleurs c’est très intéressant. La semaine dernière aussi Apple a dit que d’ici à 2030, ils seraient à la neutralité carbone. 2030, c’est demain pour une grande entreprise du numérique. Ça veut dire que toutes les grandes entreprises du numérique sont très conscientes de ces enjeux, donc il va y avoir des améliorations dans ce domaine-là. Ça c’est vraiment important de le rappeler par rapport à la consommation énergétique.

Camille Crosnier : Il va falloir fabriquer ; vous l’entendez quand même que les équipements n’existent pas. Vous parlez d’Apple, aujourd’hui les iPhones ne peuvent pas prendre en charge la 5G. Ça veut dire qu’il va falloir gaspiller, l’enjeu de la 5G aujourd’hui ça veut dire les mettre dans un tiroir et en racheter de nouveaux ?

Laure de la Raudière : L’enjeu de la 5G n’est pas de remplacer son terminal son terminal  G par un terminal 5G. L’enjeu de la 5G c’est la capacité qu’on va avoir à développer de nouveaux usages et ce n’est pas le téléphone ou, comme l’a dit un maire écolo, d’aller regarder du porno dans un ascenseur. Ce n’est pas ça !

Camille Crosnier : C’est le maire de Grenoble.

Laure de la Raudière : Ce n’est pas ça l’enjeu de la 5G. L’enjeu de la 5G ce n’est pas aller regarder du porno dans l’ascenseur.

Camille Crosnier : On va pouvoir télécharger des vidéos très rapidement, ce sont des arguments aussi, qu’elle que soit la vidéo.

Laure de la Raudière : Quand on parlera de l’ambulance connectée où vous aurez un ambulancier qui est capable d’avoir à distance un chirurgien et de faire les premiers soins exactement calibrés par rapport à un outil robotisé avec le délai de latence, qui a été cité par Jacques Moulin, réduit, là on est dans un usage concret, intéressant pour la population.

Camille Crosnier : Je laisserai Stephen Kerckhove vous répondre.

Laure de la Raudière : Quand on est sur la mise en place de voitures autonomes en milieu rural pour pouvoir faire des déplacements sur des personnes âgées pour leur maintien à domicile, dans leur commune, dans leur maison, ce sont des enjeux vraiment intéressants.

Camille Crosnier : Stephen Kerckhove, je vous vois lever les yeux au ciel.

Stephen Kerckhove : Oui. Il se trouve que j’habite une petite commune rurale.

Laure de la Raudière : Vous avez de la chance, moi aussi.

Stephen Kerckhove : J’ai une immense chance et tous les jours je me le dis. Si ce n’est que le 15 décembre il y a eu une tempête, depuis je n’ai plus de ligne fixe.

Camille Crosnier : Il y a encore aujourd’hui des zones blanches en France. Il y a aussi ça !

Stephen Kerckhove : Ce n’est pas même une zone blanche ce n’est pas même pas 4G, 3G c’est la ligne fixe aujourd’hui. À force de conduire les opérateurs à investir, surinvestir dans les zones urbaines sur des nouvelles technologies et en ajoutant et en empilant des nouvelles technologies, on oublie de maintenir un réseau filaire à niveau, ce qui amène aujourd’hui à une dépendance au tout numérique. Ça c’est une vraie question.
Vous parliez tout à l’heure du rapport de la mission d’information du Sénat, le Sénat ne dit absolument pas que le numérique n’a pas d’impact sur le carbone. Je vais lire la phrase, la mission du Sénat demande que la 5G fasse enfin l’objet d’une étude d’impact complète intégrant les effets de la technologie sur la consommation énergétique des opérateurs. C’est ça qui est demandé aujourd’hui.

Camille Crosnier : Sur ce sujet-là l’Arcep, l’Autorité de régulation des télécoms, qui n’a pas répondu favorablement à notre invitation, je le précise, comme l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, assure que tout est conçu pour optimiser la consommation d’énergie et qu’il y aura même un baromètre vert pour les opérateurs. Miracle, Jacques Moulin !

Jacques Moulin : Absolument. Déjà il y a un point qui me semble important. On parle 5G, d’ailleurs le plateau est assez illustratif, nous n’avons pas d’industriel.

Camille Crosnier : Ils n’ont pas voulu.

Jacques Moulin : Or le sujet c’est que justement dans un premier temps, c’est bien sur ce que l’on appelle dans notre jargon le B to B [business to business, c’est bien effectivement sur le segment de l’industrie que va se poser l’utilisation et l’application de la 5G. C’est un élément très important parce qu’on part tout de suite sur une logique du citoyen, et c’est un point fort, il a été évoqué la fracture numérique qui existe, il faut reconnaître aussi qu’il y a des plans qui sont mis en œuvre, le plan du très haut débit. Je vous incite d’ailleurs à regarder tous les travaux que nous faisons avec InfraNum pour justement regarder comment le territoire permet d’être connecté avec de la fibre ou du haut débit.

Camille Crosnier : Sur les inquiétudes par rapport à la consommation énergétique, qu’est-ce que vous répondez ?

Jacques Moulin : Deux choses : la première chose c’est qu’effectivement il y a besoin d’études et nous, au sein d’IDate, nous avons décidé de lancer justement un groupe de travail, une commission, avec des collectivités territoriales, avec effectivement des intégrateurs, avec des opérateurs, avec aussi des représentants du CNRS puisque nous avons la chance d’avoir le CNRS en tant que membre de l’ IDate pour poser les choses et pour avoir une démarche scientifique, pour ne pas avoir une démarche qui part peut-être sur des peurs. J’ai lu et je trouve que c’est assez bien vu que l’on pouvait comparer la 5G peut-être à la découverte des vaccins par Pasteur, c’est-à-dire qu’après on met tout un tas de phobies et d’inquiétudes derrière ce point sans véritablement le travailler.
Il y a un élément qui me semble essentiel et qu’il faut prendre en compte, c’est que si elle n’est pas dotée de la 5G, l’industrie, l’industrie européenne va prendre du retard et l’industrie française va prendre du retard.

Camille Crosnier : Donc c’est toujours pour se mettre dans cette course effrénée à aller toujours plus vite, ce que je disais tout à l’heure.

Jacques Moulin : Ce n’est pas une course effrénée.

Camille Crosnier : Yaël Benyaoun, par rapport à ça, il y a justement une question philosophique peut-être derrière tout ça. On prône aujourd’hui la sobriété, notamment la sobriété énergétique, c’est inscrit dans la loi, c’est à l’inverse de la sobriété la 5G ?

Yaël Benyaoun : Et je vais peut-être même revenir sur un cas un peu économique déjà pour commencer qui est le modèle économique des opérateurs. Le cas français est un peu particulier. Les opérateurs télécoms achètent des fréquences à l’État. En fait, il y a un enjeu de rentabilité.

Camille Crosnier : Ça coûte plus de deux milliards d’euros, je crois, une licence pour un opérateur de la 5G.

Yaël Benyaoun : C’est ça. D’ailleurs il y a même une étude du cabinet McKinsey qui chiffrait que les coûts d’infrastructures pour les opérateurs, s’ils déployaient la 5G, allaient augmenter entre 60 et 300 %. En fait il y a un enjeu de rentabilité derrière tout en sachant, comme ça a déjà été dit, que la 4G n’est pas rentable aujourd’hui pour nos opérateurs et que certains départements ne sont pas couverts. Ce qui pose quand même deux questions, enfin on va dire que ça drive un peu dans un sens, c’est que oui, il y a peut-être des emplois localisés qui seront intéressants, mais en fait pour que ce soit rentable pour les opérateurs, forcément on va aller sur un déploiement massif de la 5G qui va, bien sûr, concerner le citoyen.
Il y a une étude du cabinet Gartner qui montre que la première année du déploiement de la 5G c’est 70 % des équipements qui vont être connectés au réseau qui seront des caméras de surveillance, donc ça ce n’est pas lié directement à l’industrie, en tout cas ce n’est pas le premier emploi. Les cinq premières années ça sera le premier marché sur le réseau.
Du coup, juste pour aller là-dessus, il faut bien comprendre, en tout cas dans le cas français, que la 5G va peu, en tout cas clairement pas à court terme, à moyen terme c’est encore moins sûr et à long terme là on verra, se déployer en zone rurale.

Camille Crosnier : On a beaucoup de messages à ce sujet. Beaucoup d’auditeurs nous envoient des messages : « Avant de parler de la 5G, moi j’aimerais bien avoir de la 3G. » Il y en beaucoup qui nous écrivent, je ne vais tous les citer.

Yaël Benyaoun : Juste là-dessus parce que ça va avec le modèle économique et je pense que c’est important pour bien cerner le débat : au Royaume-Uni, 79 % des investissements qui ont été faits par les opérateurs en termes d’infrastructure concernaient justement la couverture des zones rurales. On comprend bien que dans une logique où vous avez des opérateurs privés qui, en fait, doivent être rentables, ils ne vont pas déployer majoritairement en zone rurale en sachant que le budget des ménages est quand même en train de se rétracter et que les forfaits ne peuvent pas augmenter de manière illimitée.

Camille Crosnier : C’est ça. Laure de la Raudière, est-ce que ça ne va pas accélérer ou augmenter une fracture déjà territoriale et sociale ?

21’ 56

Laure de la Raudière : C’est un mauvais débat. Tous ceux qui suivent les travaux que j’ai faits à l’Assemblée nationale savent que mon combat politique c’est le très haut débit pour tous et partout. Moi aussi je vis en milieu rural et je sais très bien ce que vous vivez. Lorsque la ligne téléphonique fixe est coupée, aujourd’hui les délais de rétablissement sont devenus astronomiques. Ce qui montre aussi l’importance pour tous les citoyens d’avoir un accès numérique de qualité à très haut débit.

Camille Crosnier : Mais ça n’est pas le cas aujourd’hui !

Laure de la Raudière : La politique du gouvernement là-dessus a été nouvelle, a changé depuis 2018 avec la mise en place du new deal mobile. C’est plus 5000 antennes.

Camille Crosnier : Florence nous écrit : « Ne pensez-vous pas qu’il faudrait qu’il n’y ait plus de zones blanches avant de penser à la 5G ? »

Laure de la Raudière : Je suis convaincue de ça. Ce que je veux dire par là c’est qu’il y a une décision qui a été prise en 2018, qui est en cours de déploiement, qui est plus de 5000 antennes en zone rurale par opérateur d’ici fin 2026. Ce projet est cours. Je comprends l’insatisfaction de cette auditrice.

Camille Crosnier : De plein d’autres. C’est une réalité encore une fois.

Laure de la Raudière : Ce que je veux dire par là c’est que cette décision est prise et la déclinaison du programme new deal est en cours. Progressivement, et on le voit quand même, il y a une amélioration de la couverture numérique mobile en 4G dans les zones rurales. Il y a encore des zones blanches, je le sais bien, mais la décision a été prise.
Maintenant on a une autre décision à prendre. Celle-là est prise, on la déroulera, et il y aura une couverture de toute la population d’ici 2026/2027. Il y a une autre décision à prendre c’est : est-ce qu’on dote la France du réseau 5G pour être présents dans la bataille industrielle de demain ? C’est ça la question centrale. Si on prend du retard, on ne pourra pas rattraper le retard par rapport à l’Allemagne.

Camille Crosnier : Ce que vous dites avec monsieur Moulin, je suis désolée, l’essentiel c’est pas d’être en retard par rapport au monde, finalement. Mais les citoyens français ?

Laure de la Raudière : C’est important de rappeler qu’on est dans une économie mondialisée, qu’on le veuille ou non, c’est un fait. Toute décision qui nous fait prendre du retard dans le domaine industriel c’est moins d’emplois demain, donc c’est la misère dans un pays. C’est tout ! !l faut le dire.

Camille Crosnier : Message sur Twitter : « Je me demande non pas si la 5G nous rendra fous, mais à quoi elle sert vraiment dans un contexte de changement climatique tel qu’il faudrait au contraire freiner absolument non consommations. Vous êtes en train de nous dire que c’est l’économie qui justifie la 5G, Stephen Kerckhove ?

Laure de la Raudière : Mais elle contribue. Les objets connectés permettront de réduire la dépense énergétique.

Stephen Kerckhove : Je ne sais pas si c’est un mauvais débat, par contre c’est un faux débat dans le sens où l’Arcep, je le répète, les obligations de couverture ce sont les principales zones urbaines et les principaux axes routiers d’ici en 2025. En 2025 on sera à la 6G, 7G, 8G. Arrêtons de croire que globalement une ambulance qui circulera en zone rurale pourra se connecter pour faire de la chirurgie à distance ! Ça ne marchera pas, il y aura une coupure de réseau et vous prendrez des risques considérables.
Après, savoir si on est en avance ou si on est en retard ! Si on est avance pour se précipiter dans le mur climatique, je ne suis pas sûr que ça soit une avancée.

Camille Crosnier : Jacques Moulin.

Jacques Moulin : Juste un point par rapport à ce qui vient d’être dit. La 5G ne va pas être mise en place au moment où la 4G devra être mise partout sur le territoire, ce n’est pas le sujet. Le new deal, comme l’a expliqué Laure de la Raudière, est lui mis en place pour assurer une couverture mobile. Effectivement, ça demande des investissements, effectivement ça demande du temps. Par ailleurs, ça demande aussi des compétences. Il appartient notamment aux programmes éducatifs de former suffisamment de jeunes pour être en capacité, justement, à aller faire les travaux qui sont nécessaires. Si nous ne commençons pas les expérimentations sur la 5G, si nous ne commençons à préparer l’industrie, c’est effectivement l’emploi de demain, nous serons très assurément un dominion soit d’un modèle américain, soit d’un modèle asiatique ou chinois qui eux ont déjà déployé la 5G – il suffit de regarder ce qui se passe effectivement en Chine où on est sur plus de 100 millions.

Camille Crosnier : Encore une fois, je vous interromps, on est encore dedans, mais on s’est pris un confinement pour la moitié de l’humanité, on parlait du monde d’après en disant c’est un monde qui va trop vite, c’est un monde trop connecté, c’est ça qui a aussi été l’une des causes de la pandémie, cette ultra-connectivité du monde, aujourd’hui on est en train de dire qu’il faut aller encore plus vite, Yaël Benayoun ?

Jacques Moulin : Parlons-en justement.

Camille Crosnier : Je voudrais savoir si ce n’est pas juste à l’opposé de ce vers quoi on pensait aller pendant le confinement

Jacques Moulin : Pas du tout ! Ce qui a permis de maintenir l’économie, toutes les entreprises peuvent le dire, toutes les universités peuvent le dire, ça a été justement la connectivité.

Camille Crosnier : Le numérique.

Jacques Moulin : Et juste un point, je voudrais préciser, on est en train de prendre une photo sur une 5G alors que l’on sait que les technologies nativement évoluent et qu’elles sont de moins en moins énergivores. C’est un point où tout le monde s’accorde.

Camille Crosnier : Yaël Benayoun, on va vous laisser répondre.

Yaël Benayoun : Si elles sont multipliées par dix ça va être un peu compliqué.
Je pense qu’il y a quand même un sujet qu’on n’a pas traité qui est juste pour quels usages. Effectivement c’est la question qui a été posée par les auditeurs. En fait aujourd’hui la quasi-totalité des usages numériques qui sont, je ne sais pas, lire un article enligne, prendre un billet de train sur Internet ou quoi, se fait très bien et même de manière optimale avec la 4G. Donc déjà peut-être déployons la 4G et voyons ce que ça fait.

Jacques Moulin : Parlons du sujet.

Yaël Benayoun : Nous allons y venir. Là j’ai la liste des usages prévus par l’Arcep.

Camille Crosnier : L’autorité des télécoms, je le rappelle.

Yaël Benayoun : Le régulateur des télécoms en France. C’est bien sûr du streaming vidéo, de la réalité virtuelle, de la connectivité à faible latence entre véhicules et infrastructure, véhicules entre eux, en fait c’est vraiment un boulevard pour la Smart City ; c’est la multitude des capteurs connectés dont on parlait tout à l’heure, donc ce sont les 100 milliards d’objets connectés. La vraie question, si on ne prend ne serait-ce que le streaming vidéo parce que là, pour le coup, il y a des études qui sont sorties dessus donc on sait à peu près ce que ça coûte et c’est extrêmement énergivore : en 2018 ça représentait déjà l’équivalent de la consommation énergétique d’un pays comme l’Espagne et il est prévu que ça représente 80 % du trafic mobile l’année prochaine. Donc effectivement on imagine que ce n’est pas soutenable et comme le disait, je finis juste là-dessus, monsieur Kerckhove tout à l’heure, normalement on devrait réduire, en fait, la consommation du secteur numérique qui aujourd’hui est celui qui est le plus en croissance de tous les secteurs industriels.

Camille Crosnier : Je vais laisser Laure de la Raudière vous répondre dans un instant. D’abord le message de Baptiste : « Intéressante la phrase de votre intervenante : la 5G servira à répondre à de nouveaux besoins que l’on saura créer ». C’est donc bien l’objectif : créer des besoins au détriment de la planète.

Pause musicale : Fou par l’Impératrice.

Camille Crosnier : Fou, c’était l’Impératrice sur France Inter.

Voix off : France Inter, Le débat du midi, Camille Crosnier

30’ 51

Camille Crosnier : Nous parlons 5G aujourd’hui dans Le débat du midi