Différences entre les versions de « Dégooglisons internet : 3 ans de campagne - Pierre-Yves Gosset »

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À côté de ça on voyait bien qu’il y avait un véritable problème avec la centralisation d’Internet, ce qu’on a plus ou moins résumé dans ce qu’on appelle la tripe domination :
 
À côté de ça on voyait bien qu’il y avait un véritable problème avec la centralisation d’Internet, ce qu’on a plus ou moins résumé dans ce qu’on appelle la tripe domination :
 
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<li>une domination technique avec ces GAFAM, donc Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft ; la domination technique ne s’exerce pas uniquement sur Internet, elle s’exerce aussi dans l’intelligence artificielle, dans les voitures autonomes, dans les objets connectés, dans vos téléphones, etc. Donc ça c’était quelque chose d’assez évident. Ce sur quoi on voulait mettre la lumière c’était deux autres types de domination ;<li>  
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<li>une domination technique avec ces GAFAM, donc Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft ; la domination technique ne s’exerce pas uniquement sur Internet, elle s’exerce aussi dans l’intelligence artificielle, dans les voitures autonomes, dans les objets connectés, dans vos téléphones, etc. Donc ça c’était quelque chose d’assez évident. Ce sur quoi on voulait mettre la lumière c’était deux autres types de domination ;</li>
<li>une domination économique que les gens ne percevaient pas forcément en 2014 et ensuite encore plus en 2016. Là vous avez un graphique qui représente les cinq plus grosses capitalisations boursières mondiales. On voit bien – vous ne voyez peut-être pas forcément l’écran –, mais en 2001 il n’y avait que Microsoft qui faisait partie du Top 5 ; en 2016, les cinq plus grosses capitalisations boursières mondiales sont Apple, Alphabet donc Google, Microsoft, Amazon et Facebook ;<li>
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<li>une domination économique que les gens ne percevaient pas forcément en 2014 et ensuite encore plus en 2016. Là vous avez un graphique qui représente les cinq plus grosses capitalisations boursières mondiales. On voit bien – vous ne voyez peut-être pas forcément l’écran –, mais en 2001 il n’y avait que Microsoft qui faisait partie du Top 5 ; en 2016, les cinq plus grosses capitalisations boursières mondiales sont Apple, Alphabet donc Google, Microsoft, Amazon et Facebook ;</li>
<li>l’autre type de domination sur lequel on est intervenus un petit peu plus tard, là aussi on a un petit peu creusé les argumentaires, c’était la domination culturelle et politique ; c’est, en gros, comment ces entreprises ont réinventé un post-capitalisme qui s’appelle le capitalisme de surveillance, qui est assez bien décrit par une économiste germano-américaine qui s’appelle Shoshana Zuboff. Ce capitalisme de surveillance joue sur différentes choses. Il joue évidemment sur le fait qu’on est surveillés en permanence, que l’extraction des données se fait en permanence, mais aussi sur des changements, des disruptions nous dirait notre président ! Typiquement Uber qui arrive donc la désintermédiation, mais c’est aussi le fait qu’aujourd’hui, en travaillant notamment ce qu’on appelle l’économie de l’attention, le fait que vous scrolliez pendant une demi-heure avant de vous coucher sur des vidéos de chats plutôt que de lire un bon bouquin, c’est quelque chose qui est pensé, c’est quelque chose qui est souhaité, c’est quelque chose qui est voulu et c’est quelque chose qui veut être entretenu. Et donc qu’est-ce que ça pose comme problématiques à moyen et à long terme ?<li>
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<li>l’autre type de domination sur lequel on est intervenus un petit peu plus tard, là aussi on a un petit peu creusé les argumentaires, c’était la domination culturelle et politique ; c’est, en gros, comment ces entreprises ont réinventé un post-capitalisme qui s’appelle le capitalisme de surveillance, qui est assez bien décrit par une économiste germano-américaine qui s’appelle Shoshana Zuboff. Ce capitalisme de surveillance joue sur différentes choses. Il joue évidemment sur le fait qu’on est surveillés en permanence, que l’extraction des données se fait en permanence, mais aussi sur des changements, des disruptions nous dirait notre président ! Typiquement Uber qui arrive donc la désintermédiation, mais c’est aussi le fait qu’aujourd’hui, en travaillant notamment ce qu’on appelle l’économie de l’attention, le fait que vous scrolliez pendant une demi-heure avant de vous coucher sur des vidéos de chats plutôt que de lire un bon bouquin, c’est quelque chose qui est pensé, c’est quelque chose qui est souhaité, c’est quelque chose qui est voulu et c’est quelque chose qui veut être entretenu. Et donc qu’est-ce que ça pose comme problématiques à moyen et à long terme ?</li>
 
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Version du 27 août 2018 à 07:57


Titre : Dégooglisons internet : 3 ans de campagne ou 3 ans ⅔ de « Dégooglisation » : bilan, impact et perspectives.

Intervenant : Pierre-Yves Gosset

Lieu : Rencontres mondiales du logiciel libre 2018 - Strasbourg

Date : juillet 2018

Durée : 1 h 01 min 12

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Licence de la transcription : Verbatim

NB : transcription réalisée par nos soins. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas forcément celles de l'April.

Statut : Transcrit MO

Description

On fait le bilan, calmement.
Aux RMLL 2014, Framasoft annonçait sa volonté de vouloir agir contre les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). D'octobre 2014 à octobre 2017, l'association a donc menée la campagne "Dégooglisons Internet". Cela s'est traduit par une sorte d'escalade de l'Himalaya, mais en tongs. Quels étaient les enjeux essentiels ? Comment s'y prendre ? Quelle(s) route(s) suivre ? Comment sortir 10 services grands publics par an ? Comment financer une telle expédition ? Avec quels moyens humains ? Et si on atteignait le sommet... comment redescendre ?
Cette conférence, qui prendra le temps de rappeler les enjeux, s'attachera à lever un coin de voile sur une campagne plutôt réussie, mais menée de façon très empirique. Enfin, nous essaierons, ensemble, d'en faire le bilan.

Transcription

Bonjour à tous et à toutes. Je m’appelle Pierre-Yves Gosset, je suis directeur et délégué général d’une association qui s’appelle Framasoft.
Cette conférence est la première partie d’une conférence qui, en fait, tient en deux heures. Donc je l’ai coupée en deux, un petit peu au milieu, puisqu’à 17 heures je commence ici même la deuxième conférence qui, elle, sera beaucoup plus politique et sur le bilan post-dégooglisons. Mais puisqu’on avait une campagne qui s’appelait, mais qui s’appelle toujours « Dégooglisons Internet », on voulait au moins marquer le coup de finir cette campagne et de célébrer cette petite victoire avec vous et puis, peut-être, interroger ce que vous vous en pensez, quelles ont été les ratés, etc. Ensuite à 17 heures on fera une deuxième partie un petit peu plus complexe, un petit peu plus politique derrière.

Titre chiant (mais qui fait sérieux;-) )

Je ne savais comment l’appeler donc j’ai pris un titre un peu chiant qui s’appelle 3 ans ⅔ de « Dégooglisation » : bilan, impact et perspectives.

C’est quoi « Dégooglisons Internet » ?

Je vais essayer peut-être de rappeler avant tout c’est quoi « Dégooglisons Internet ». Donc là vous m’avez moi en photo, c’était aux RMLL 2014, avec probablement une trentaine de kilos de moins et qui présentais le projet qui n’existait pas encore vu qu’on l’a sorti en octobre 2014. Un projet qui allait s’appeler « Dégooglisons Internet ». Et c’est quoi « Dégooglisons Internet » ? L’objectif était triple :

  • il était de sensibiliser le public à la centralisation du web ;
  • il était de démontrer que le logiciel libre était une solution ;
  • et il était, dès le départ, on ne l’a pas rajouté en cours de route même si ça nous aurait beaucoup ressemblé, on avait dès le départ dans l’idée d’essaimer notre démarche.

Donc pour un petit peu mieux comprendre ce à quoi visait « Dégooglisons Internet », on avait fait une petite carte inspirée de la carte d’Astérix avec le petit village gaulois qui résiste en face à tous les camps romains qui sont Google docs, Trello, Slack, Facebook, Google Books, etc.

Je vais aller assez vite sur ce qui nous a motivés à lancer ça. Le facteur déclenchant c’était très probablement les révélations d’Edward Snowden, lanceur d’alerte américain, qui annonce et montre la collusion entre les États et non seulement les GAFAM, enfin neuf entreprises : les services de renseignement américain d’un côté, donc la NSA et d’autres, et neuf entreprises du numérique américaines à savoir Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, Cisco, Yahoo et quelques autres. Ça nous met une certaine claque et on se dit qu’effectivement il faut trouver une parade à cette problématique-là.

À côté de ça on voyait bien qu’il y avait un véritable problème avec la centralisation d’Internet, ce qu’on a plus ou moins résumé dans ce qu’on appelle la tripe domination :

  • une domination technique avec ces GAFAM, donc Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft ; la domination technique ne s’exerce pas uniquement sur Internet, elle s’exerce aussi dans l’intelligence artificielle, dans les voitures autonomes, dans les objets connectés, dans vos téléphones, etc. Donc ça c’était quelque chose d’assez évident. Ce sur quoi on voulait mettre la lumière c’était deux autres types de domination ;
  • une domination économique que les gens ne percevaient pas forcément en 2014 et ensuite encore plus en 2016. Là vous avez un graphique qui représente les cinq plus grosses capitalisations boursières mondiales. On voit bien – vous ne voyez peut-être pas forcément l’écran –, mais en 2001 il n’y avait que Microsoft qui faisait partie du Top 5 ; en 2016, les cinq plus grosses capitalisations boursières mondiales sont Apple, Alphabet donc Google, Microsoft, Amazon et Facebook ;
  • l’autre type de domination sur lequel on est intervenus un petit peu plus tard, là aussi on a un petit peu creusé les argumentaires, c’était la domination culturelle et politique ; c’est, en gros, comment ces entreprises ont réinventé un post-capitalisme qui s’appelle le capitalisme de surveillance, qui est assez bien décrit par une économiste germano-américaine qui s’appelle Shoshana Zuboff. Ce capitalisme de surveillance joue sur différentes choses. Il joue évidemment sur le fait qu’on est surveillés en permanence, que l’extraction des données se fait en permanence, mais aussi sur des changements, des disruptions nous dirait notre président ! Typiquement Uber qui arrive donc la désintermédiation, mais c’est aussi le fait qu’aujourd’hui, en travaillant notamment ce qu’on appelle l’économie de l’attention, le fait que vous scrolliez pendant une demi-heure avant de vous coucher sur des vidéos de chats plutôt que de lire un bon bouquin, c’est quelque chose qui est pensé, c’est quelque chose qui est souhaité, c’est quelque chose qui est voulu et c’est quelque chose qui veut être entretenu. Et donc qu’est-ce que ça pose comme problématiques à moyen et à long terme ?

Bilan « Démonstration »

Donc je ne reviens pas parce que j’ai fait cette conférence sur la triple domination des dizaines et des dizaines de fois ; l’objectif, là, c’était plutôt de faire un bilan sur ce qu’on a fait, finalement, ces dernières années.

Donc le bilan de cet aspect démonstration c’est que, d’abord, on a sorti une trentaine de services qui sont libres, éthiques, décentralisés et solidaires, je pourrai revenir dessus si vous voulez. Là je vais les passer rapidement en revue, mais j’ai voulu tous les mettre tout simplement parce que je voulais qu’on prenne conscience du travail qui avait été effectué. Donc c’est un peu du frottage de ventre, mais il faut quand même célébrer un petit peu ça. Et donc c’est parti. Vous retrouverez la liste évidemment sur degooglisons-internet.org/fr/list/ :

  • Framapad alternative à Google docs ;
  • Framacalc alternative toute pourrie mais malgré tout existante à Google Spreadsheet ;
  • Farmabag alternative à Pocket, Pocket racheté par Mozilla aujourd’hui mais le fait est que là on a un produit qui est 100 % libre alors que Pocket ne l’est toujours pas ;
  • Framadate alternative à Doodle, plus d’un million de sondages aujourd’hui ;
  • Framindmap alternative à Mindmaps ;
  • Framanews alternative au défunt Google Reader ;
  • Framasphère alternative, là encore plutôt à la ramasse, mais on fait ce qu’on peut à Facebook et Twitter. Quand je dis « on » ce sont les communautés du Libre, ce n’est pas nous Framasoft ;
  • Framabin alternative à Pastebin ;
  • Huit.re ou Frama.link alternative à bit.ly au futur défunt Goo.gl, eh oui ! 
  • Framapic alternative img.ur ;
  • git.framasoft.org ou Framagit alternative à Github ou au défunt Google Code. Vous noterez le nombre de défunts quand même en quelques années ;
  • Framabee alternative, là encore un peu pourrie, alias Tonton Roger pour ceux qui préfèrent, alternative à Google Search ;
  • Framabookin alternative, là aussi à la ramasse, mais il y a plein d’idées à travailler dessus, alternative à Google Books ;
  • Framagames, pas vraiment d’alternative, mais il faut bien rigoler de temps en temps ;
  • Framadrive alternative à Dropbox ;
  • Mypads qui a été un logiciel qu’on a développé pour améliorer Etherpad donc on va dire alternative, là encore une fois, plutôt côté Google Docs ;
  • Framaboard alternative un peu pourrie mais plus puissante mais moins jolie à Trello ;
  • Framadrop alternative à WeTransfer ;
  • Framacarte alternative à Google Maps on va dire au fait de mettre des points sur Google Maps, l’alternative à Google Maps, en tant que telle, c’est plutôt OpenStreeMap. Framacarte est basé sur uMap qui est une surcouche à OpenStreetMap qui permet de faire des tracés et autres ;
  • Framateam alternative au groupe Facebook ou à Slack ;
  • Framavox prise de décision ;
  • Framinetest alternative à Minecraft Edu là aussi c’était plutôt pour rigoler mais ça marche plutôt bien ;
  • Framalistes alternative à Google Groups, qui envoie plus de 100 000 mails par jour ;
  • Framanotes alternative à Evernotes, là aussi pourrie, mais les communautés du Libre travaillent autant qu’elles le peuvent et  aussi vite qu’elles le peuvent ;
  • Framagenda alternative à Google Agenda ;
  • Framaform alternative à Google Forms ;
  • Framatalk alternative à Skype ;
  • MyFrama alternative à del.icio.us ;
  • Framaestro alternative à rien du tout puisque ça n’existait pas et ça reste bien trop méconnu à mon goût ;
  • Framaslides alternative à Google Slides ;
  • et, en 2018, on a sorti aussi Frama.site et Framatube qui va arriver au mois d’octobre.

Voilà ! Hou ! Je peux reprendre ma respiration.

Donc on a commencé en octobre 2014 et si je reprends la carte de tout à l’heure, eh bien on peut dire qu’on est arrivés quasiment au bout. Là la carte d’octobre 2016 mais depuis on a fait Google Slides enfin alternative à Google Slides, alternative à Blogger et alternative à YouTube qui est en cours ; des alternatives à Change, à ??? et Meetup sont aussi en cours pour les années ou les mois, même, à venir.

On l’avait mis sur la Corse ; il n’y aurait pas d’alternative à Gmail chez Framasoft. Je reviendrai dessus tout à l’heure.

Évaluation

Donc l’évaluation finalement qu’on peut faire de tout ça. Qu’est-ce qu’on peut dire ?
Déjà que le Libre ça marche. Aujourd’hui même la DINSIC, je m’en suis aperçu relativement récemment, donc la direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication de l’État recommande, par exemple, l’utilisation de Framagit ce qui fait qu’on se retrouve avec Parcoursup hébergé chez nous. Évidemment projet dont on ne partage pas les valeurs et les objectifs mais au moins voilà une forme de reconnaissance. Donc le Libre ça marche.

On peut dire, ce qui n’était pas du tout notre cas avant qu’on lance cette initiative « Dégooglisons Internet » que Framasoft est devenu un petit peu éditeur et mainteneur de logiciels sachant que sur les 34 existants, il y en avait 12 sans réelle alternative libre donc qu’on a développés en interne et il y en a 7 qui ne sont pas des logiciels Framasoft mais sur lesquels Framasoft est devenu quasiment mainteneur principal ou, en tout cas, un des plus gros contributeurs, je pense notamment à Ethercalc. Vous allez rire parce que forcément Ethercalc est un peu pourri. Pour ceux qui ne voient pas, Framacalc, notre alternative à Google Spreadsheet, le fait est que la développeuse initiale a complètement lâché l’affaire et, du coup, c’est Luc, qui intervenait juste avant dans cette même salle, qui se retrouve mainteneur, enfin admin sur le dépôt de Ethercalc aujourd’hui.

Donc on a des logiciels comme ça sur lesquels on se retrouve à faire du développement upstream c’est-à-dire à faire du développement sur le logiciel qu’on avait juste copié au départ mais, en fait, on y apporte des améliorations et du coup, on se retrouve un petit peu en interaction forte avec ces logiciels-là. Je rebois un coup.

12’ 05

Dommage, il n’y a pas de ???.