Différences entre les versions de « Défendre le libre par une lutte sectorielle - J.P. Mengual »

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'''Titre :''' Défendre le libre par une lutte sectorielle : l’exemple de la déficience visuelle
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Publié [https://www.april.org/defendre-le-libre-par-une-lutte-sectorielle-l-exemple-de-la-deficience-visuelle-jp-mengual ici] - Septembre 2017
 
 
'''Intervenant :''' Jean-Philippe MENGUAL
 
 
 
'''Lieu :''' Rencontres Mondiales du Logiciel Libre
 
 
 
'''Date :''' Juillet 2017
 
 
 
'''Durée :''' 19 min
 
 
 
'''[https://rmll.ubicast.tv/videos/lutte_sectorielle_69322/ Visionner la vidéo]'''
 
 
 
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]
 
 
 
'''Statut :''' Transcrit MO
 
 
 
==Description==
 
 
 
Envoyer le logiciel libre face aux grands majors du logiciel privateur est une lutte presqu’impossible : puissance marketting des majors, qualité design inférieure, même des millions d’euros peuvent ne pas suffire.
 
 
 
Mais défendre une approche par secteur, comme l’a fait Framasoft, semble plus appropriée. Encore faut-il définir le secteur, ce qui le traverse (sociologiquement, psychologiquement, politiquement). C’est le moyen le plus sûr de développer un discours et une démarche adaptée, de déterminer les profils recherchés en matière de ressources bénévoles ou salariales, etc.
 
 
 
Ainsi, la promotion du libre auprès des déficients visuels, en action depuis 2004, a atteint un plafond de verre. Pourquoi ? Comment changer les choses ? C’est cette nouvelle approche, fruit de 2 ans de travail intensif, que cette conférence se propose de présenter.
 
 
 
 
 
==Transcription==
 
 
 
Bonjour à tous. Merci d’être là.
 
 
 
Donc aujourd’hui on va effectivement essayer de se demander si le déploiement du logiciel libre et son développement et la défense en faveur du logiciel libre, surtout dans le grand public et au niveau du poste de travail, ne pourrait pas avoir une vraie chance à partir de ce que j’appelle une lutte sectorielle. C’est-à-dire pour faire un effet viral en partant par un petit groupe de personnes potentiellement concernées, pour ensuite arriver à généraliser, petit à petit, par cercles pour finir par en faire une tendance plus globale.
 
 
 
Pour introduire ce propos, je pense qu’on peut effectivement partir du constat, qui me paraît assez consensuel, que l’une des difficultés du Libre aujourd’hui c’est qu’il lutte contre des mastodontes, évidemment, en matière d’informatique grand public, avec une puissance tout à fait considérable et une vraie difficulté à pénétrer, par définition, l’informatique des utilisateurs lambda, pour des raisons à la fois techniques, qui sont objectives, explicables, effectivement liées à l’interopérabilité, liées peut-être au <em>design</em>, liées à des petites choses comme ça ; mais aussi et peut-être surtout parce que dès qu’un effort est fait il est immédiatement anéanti par des politiques tout à fait de dumping, pratiquées par des grands groupes. En 2010, par exemple, il y avait des machines qui étaient sorties avec GNU/Linux en système d’exploitation pré-installé et ces machines avaient été immédiatement concurrencées par des machines quasiment gratuites, avec des systèmes Windows à l’intérieur, donc évidemment le modèle n’a pas vraiment fonctionné ; pour d’autres raisons aussi, mais évidemment, on voit bien la puissance de frappe d’une firme qui est capable de faire de la vente à perte en toute illégalité face à des gens qui essayent d’innover un petit peu et de créer des alternatives.
 
 
 
Je pense que la lutte économique, en pratique, elle n’est pas très réaliste, puisqu’on parle de milliardaires d’euros et multimilliardaires face à des millionnaires en euros. Et donc c’est assez peu réaliste de dire qu’on va gagner par la lutte économique. Par contre, par la lutte idéologique on peut se dire qu’on peut aller plus loin, mais on voit bien le temps que ça prend. Il suffit de voir un petit peu l’évolution des différents évènements libristes, des gens qui y participent et l’impact de la prise de conscience du public en matière d’informatique pour comprendre que la lutte idéologique là-dessus sera assez longue.
 
 
 
Et la question qui se pose dès lors, c’est est-ce qu’on peut tenter un approche par secteurs pour créer un mouvement plus viral et un mouvement qui, par cercles concentriques, atteindra son objectif ?
 
 
 
Le secteur que je vais prendre ici pour illustrer c’est le secteur de l’accessibilité, on verra pourquoi, mais on est face à des gens qui, potentiellement, peuvent en avoir un bénéfice immédiat, alternatif à ce qui peut se faire dans les technologies propriétaires. Et, par définition, ce secteur peut, lui, commencer à s’équiper avec un intérêt immédiatement perceptible, pour ensuite se généraliser à autre chose.
 
 
 
Déjà on peut tout à fait dire que le secteur, il y a déjà en fait, dans l’informatique, une répartition sectorielle, mais dont le potentiel est négligé. Pourquoi il y a une répartition sectorielle ? Parce que, quand on y réfléchit, Windows et Mac sont déjà conçus pour un « secteur » entre guillemets. Puisque, en fait, quand on y réfléchit, ils sont conçus pour à peu près couvrir 75 % des usages. À peu près. Ce qui veut dire implicitement que ces 75 % qui sont, en fait, ceux qui fonctionnent à l’intuitif, qui arrivent à se débrouiller, les jeunes cadres dynamiques, on va dire, qui réussissent ; ceux qui aiment aussi le flashy, le produit fini, qui aiment aussi des choses qui clignotent un peu partout, des gens comme ça, et qui sont capables de s’adapter plus ou moins, en grognant un peu, mais qui sont capables de s’adapter aux différentes mises à jour permanentes, aux ergonomies nouvelles, parce que c’est neuf, ce n’est pas forcément mieux, mais c’est neuf, donc c’est bien ! Donc ce public-là, qui représente à peu près 75 % des usages, je dis bien des usages et pas forcément des usagers, déjà, voilà, ce public-là peut être facilement attiré, et on le voit, par Windows et par Mac, sans aller jusqu’aux Apple addicts où là on est encore sur autre chose, mais on voit bien que ce public-là est déjà finalement assez cadré.
 
 
 
Et puis en face on a, pour tous les autres, c’est-à-dire les 25 % d’usages restants, qui concerne quand même une part de la population négligeable, pour ces gens-là on a des modèles qui existent, évidemment marginaux, mais pas forcément non plus négligeables, qui sont d’ordre spécialisé et qui conçoivent des technologies malheureusement qui, du coup, ont le problème d’être enfermantes. Je pense par exemple à des logiciels qui permettent à des personnes âgées d’accéder à l’informatique et qui sont, par exemple, des surcouches, des logiciels qu’on installe dans Windows, qui absorbent la couche de complexité d’un système d’exploitation comme Windows et qui le simplifient pour faire en sorte que la personne pour ouvrir ses mails tape 1, pour ouvrir son Word tape 2, etc.
 
 
 
Même chose dans d’autres écosystèmes. Ordissimo, par exemple ou Ordimemo, sont des ordinateurs dédiés, pour ces personnes, de façon à ce qu’elles aient un accès facilité à l’informatique.
 
 
 
Et le Libre, quant à lui, il se construit autour d’une pensée alternative et, évidemment, un peu plus marginale, mais qui existe aussi d’un point de vue sectoriel, encore une fois. C’est-à-dire que cette dimension segmentée existe déjà.
 
 
 
Ceux qui vont dans le Libre aujourd’hui, c’est qui ? Des gens qui ont une certaine prise de conscience de l’importance de la protection des données ; de l’importance de la maîtrise de ses programmes informatiques. Bon ! Là aussi il faut le dire, d’un point de vue un peu sociologique, c’est une population assez marquée à gauche et une population assez attirée par l’informatique, soit ce qu’on pourrait appeler les geeks, carrément, soit des gens plutôt attirés par le réseau et qui le font de façon un peu plus professionnalisée. Bon ! Là encore, quand on y réfléchit, il y a déjà une approche sectorielle. C’est-à-dire que le Libre a déjà, un peu, son public. Mac et Windows ont leur public et les publics en marge de tout ça ont d’autres systèmes qui leur sont dédiés, mais qui sont enfermants et qui ne leur permettent pas de progresser pour aller vers quelque chose de plus standard.
 
 
 
On remarque, par contre là c’est beaucoup plus intéressant, c’est que dans le Libre, même des personnes qui pourraient y adhérer pour des raisons de valeurs, pour des raisons idéologiques. Objectivement je pense qu’entre la pensée du logiciel libre telle qu’elle est vécue dans le partage, dans l’horizontalité comme on peut le faire dans des distributions comme Debian ou des choses comme ça, des gens comme des gens du Parti communiste par exemple, d’extrême gauche, ou des gens plus à tendance écologiste pour le coup, pourraient adhérer au Libre et pourtant eux n’y adhérent pas. Par contre, du coup, eux se lancent dans un autre phénomène qui est la techno-phobie c’est-à-dire qu’ils finissent par dire la techno c’est le mal du monde et on finit par dire il y trop de techno, trop de déshumanisation trop de, trop de, et ils ne vont pas vers le Libre. Ce qui montre bien, là encore, que c’est tout à fait paradoxal parce que ces gens-là, pour le coup, pourraient tout à fait être les premiers acteurs du Libre, en réalité.
 
 
 
À la fête de l’Humanité quand on y va régulièrement, par exemple en septembre sur Paris, on voit bien que ce n’est pas complètement simple et ça pose aussi un certain nombre de questions au regard de tout ce qu’on vient de dire.
 
 
 
Le résultat on le connaît. C’est que GNU/Linux couvre aujourd’hui entre 1 et 2 % du grand public. Les solutions spécialisées comme Ordissimo, aujourd’hui, elles revendiquent 70 000 utilisateurs. Bon ! Et puis l’inclusion, aujourd’hui, reste quand même partielle puisque, en 2011, un rapport du Conseil d’analyse stratégique montrait qu’il y avait une véritable fracture, des fossés numériques, c’était le titre du rapport
 
et il identifiait une fracture importante qui était ce qu’il appelle la fracture secondaire. C’est-à-dire qu’aujourd’hui ce n’est plus un problème de celui qui a ou n’a pas d’ordinateur, mais c’est celui qui le maîtrise ou qui ne le maîtrise pas. Et ça, ça crée une claire fracture numérique aujourd’hui dans nos sociétés qui était tout à fait vraie en 2011, à laquelle on tente de remédier par des médiations numériques et autres choses de cette nature, mais à l’arrivée en fait, on se rend compte très rapidement que cette fracture, bien qu’en diminution, elle existe encore.
 
 
 
Et surtout cette segmentation est un symptôme de cette nouvelle fracture.
 
 
 
==08’ 48==
 
 
 
Alors comment faire ?
 

Dernière version du 9 septembre 2017 à 15:11


Publié ici - Septembre 2017