Décryptualité du 11 septembre 2017

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Titre : Décryptualité du 11 septembre 2017

Intervenants : Luc - Magali - Manu - Nico

Lieu : Studio d'enregistrement April

Date : Septembre 2017

Durée : 15 min 16

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Revue de presse de l'April pour la semaine 36 de l'année 2017

Licence de la transcription : Verbatim

Statut : Transcrit MO

Description

Au programme une courte revue de presse de l’April et des questions sur la confiance sur Internet : désinformation et manipulation automatisées, bénéficiant d’une connaissance considérable sur les individus. Comme garder confiance ?

Transcription

Luc : Décryptualité.

Nico : Le podcast qui décrypte l’actualité des libertés numériques.

Luc : Décryptualité. C’est la rentrée de septembre 2017. Salut Manu.

Manu : Salut Mag.

Magali : Salut Nico.

Nico : Salut Luc.

Luc : On va continuer sur nos bonnes habitudes d’avant l’été. Une petite revue de presse rapide et, après, un sujet.

Manu : Seulement quatre articles cette semaine, on sent que c'est le démarrage, ça démarre en douceur, mais il y a des sujets quand même intéressants, notamment Les Inrocks qui font un article.

Luc : « Nothing to Hide, pourquoi ce docu sur la surveillance de masse nous concerne-t-il tous ? » Donc un documentaire, Nothing to Hide, Rien à cacher.

Manu : Documentaire qui est en train de sortir au cinéma, qui a l’air d’être particulièrement intéressant. Il va falloir qu’on aille jeter un œil.

Luc : Je ne l’ai pas vu.

Manu : Ça parle de la collecte des données, des agences de renseignement et les Les Inrocks ont l’air de penser qu’il faut aller le voir. Je pense qu’il faut aller le voir.

Luc : On va y aller. On est obéissants !

Magali : Ça sort quand ?

Manu : Je ne sais pas. Il faut revoir l’article. C’est dans l’article.

Nico : C’est sorti la semaine dernière, de mémoire.

Manu : D’accord. Eh bien voilà ! Donc en cours. Il faut trouver le bon cinéma qui le passe, le bon de cinéma de quartier qui passe ce genre de films.

Luc : Nothing to Hide. Le Monde.fr, « Après Irma, des internautes mobilisés pour cartographier en urgence les zones dévastées », c’est un article de la rédaction. Donc c’est quelque chose qui revient à chaque fois qu’il y a une catastrophe, et c’est bien d’en parler. Ça veut dire que ça continue à marcher.

Manu : Exactement. C’est OpenStreetMap[1] et la communauté qui est autour de tout cela qui se mobilise, à chaque fois, pour aider les secours, en cartographiant notamment.

Luc : À base de photos aériennes.

Manu : De survol, peut-être aussi un peu d’images satellites, au cas par cas. Il y a des institutions qui leur transfèrent des données et ensuite, à partir de là, grâce à OpenStreetMap, ils essayent d’organiser, de montrer où les gens se sont déportés parce qu’ils sont sortis de chez eux, quand il n’y a plus de maisons, et il faut aller les aider.

Luc : ZDNet France, « Firefox s’essaie au nu intégral sur les données et la vie privée », un article de Christophe Auffray.

Manu : Firefox[2] qu’on adore, parce que c’est un super navigateur et effectivement, la vie privée, la confidentialité, ils mettent en avant de la clarté, de la transparence, sur ce qu’ils font avec les données ; donc c’est peut-être intéressant d’aller jeter un œil.

Luc : Le Monde Informatique, « L’improbable abandon du contrôle de Java SE par Oracle », un article de Paul Krill.

Manu : Java, c’est un langage de programmation, mais c’est aussi et surtout une sorte de gros environnement informatique et Oracle c’est une très grosse boîte, richissime, qui contrôle cet environnement-là en partie. Donc il est question qu’ils abandonnent ce contrôle ; ce serait étonnant ; ce n’est pas encore fait et on peut espérer que ce soit fait à un moment donné, sachant que c’est un langage libre avec des API libres derrière et des librairies libres.

Luc : Peut-être une grande nouvelle, en tout cas importante, à l’horizon. Très bien. Il y a un sujet qui n’est pas couvert par les articles de cette semaine, en tout cas pas ceux de la revue de presse, mais il y a pas mal de choses que j’ai lues à droite, à gauche cet été, qui m’ont fait penser à ça, qu’on a déjà traitées directement, indirectement ou par d’autres biais, qui est cette question de la confiance et de cette relation qu’on peut avoir à la réalité. Donc il y a pas mal de choses, que ce soit techniquement ou socialement, qui font qu’on est sur Internet notamment et dans notre vie informatique, de plus en plus on a conscience qu’on est face à des acteurs ou des phénomènes, des services, etc., qui ne sont pas nécessairement très loyaux, qui ne sont pas nécessairement très fiables, qui essayent de nous manipuler, de nous emmener à droite, à gauche et on ne sait pas si, en face, on a une personne sincère ou si on a quelqu’un qui essaye de nous manipuler, etc.

J’avais relevé quelques cas que j’avais trouvés intéressants. Déjà on l’a tous vu, en tout cas ceux qui sont allés voir les Star Wars. On a un acteur mort depuis longtemps qui est dans un film et il y a des Allemands qui ont fait une démonstration où ils arrivent en temps réel, alors aujourd’hui c’est un petit peu moche, mais à faire dire quelque chose à Vladimir Poutine en animant son visage. D’ici quelques années, on peut s’attendre à ce qu’on soit en mesure de faire des faux qu’on n’arrivera plus à repérer. Ce qui veut dire que l’image va totalement perdre de sa validité, de sa valeur de preuve.

Nico : Quand on voit déjà aujourd’hui les fake news, les effets que ça peut avoir alors qu’on n’a même pas encore ces technos-là, ça peut faire peur dans le futur. Parce qu’aujourd’hui on arrive encore à contrôler, à avoir les sources, voir les documents d’origine. Mais si on en arrive à ce niveau de détail, avec des vidéos complètement en temps réel, de faire dire ce qu’on veut !

Luc : Dans quelques années, Nicolas, tu feras l’apologie de Windows 10 sur Internet !

Nico : Parce que je ne le fais pas déjà ?

Manu : Je rappellerai quelque chose. Dans une cour de justice, une vidéo toute seule ne sert pas à grand-chose. Il faut un témoin. Il faut quelqu’un qui soit derrière et qui mette en avant la validité de la vidéo. Ça permet de rassurer sur le fait que cette problématique a déjà été prise en compte quelque part. Une vidéo, une bande son, ça peut être monté et ça a déjà été le cas dans le passé ; et juste un montage, c’est déjà une falsification par plein de points. Et donc, on s’attend à ce qu’il y ait quelqu’un derrière qui dise : « Non, non cette vidéo est valide. J’étais là, je l’ai écoutée. Je vous garantis que c’est quelque chose de réel ! » Et dans ces cas-là, c’est plutôt le témoin que l’on peut juger en cas de faux, parce qu’au final la vidéo, le son lui-même ! Oui, si on prend n’importe quoi de n’importe qui, ça ne veut plus dire grand-chose.

Luc : Devant un tribunal. Mais en tout cas, ça pointe cette importance de la relation de confiance à un individu.

Manu : Et la chaîne de confiance ! Parce qu’en fin de compte, il y a une forme de chaîne de confiance qu’on doit avoir entre ce que l’on a comme preuve et d’où elle vient. Et si cette chaîne est perdue ou si elle ne passe pas par des agents de confiance, eh bien on a des gros problèmes. Je crois même que certaines preuves peuvent être rejetées dans un tribunal de justice.

Nico : Si on n’en est pas sûr, oui. Le juge peut toujours écarter une preuve qu’il considère pas fiable. Après, c’est vrai que ça va être des fois compliqué, ça peut être parole contre parole ; enfin il y a plein de questions comme ça à se poser.

Luc : Après, le truc, c’est que sur Internet on voit énormément de choses, notamment des vidéos truquées. Ça m’est déjà arrivé de tomber dans le panneau, sur des vidéos bien truquées et je pense qu’il y a plein de gens qui croient toute une série de choses totalement fausses et ce n’est pas près de s’arranger.

Magali : Je crois que le plus simple, c’est de ne pas avoir confiance du tout.

Luc : Oui, c’est une option.

Magali : Être en mode parano et se poser toujours les bonnes questions ; aller vérifier les sources si possible. Et en tout cas être critique face à ce qu’on voit, surtout sur Internet.

Luc : Le problème des sources, c’est aussi à qui tu peux faire confiance. Il y a un autre sujet que je trouve intéressant. Tu parlais des fake news Nicolas, c’est le dialogue qu’il y entre fake news d’un côté et les grands médias français notamment, enfin ceux qu’on voit le plus fréquemment, qui appartiennent tous à des intérêts d’argent. Peut-être qu’ils ne sont peut-être pas aussi pourris que les trucs des Russes, etc.

Magali : Mais si !

Luc : Toi, Magali, tu n’as confiance en personne ! Mais du coup, je trouve que ça c’est assez intéressant parce que finalement, dans leurs critiques des fake news en disant « ouais, ils vont chercher à créer des émotions, etc. », or la télévision ne fait que ça, « et à manipuler les gens », or les grands médias qui appartiennent à quelques rares familles, en plus, en France, ils manipulent aussi pas mal. Et donc finalement, dans leur combat en disant « mais non, nous c’est la vérité et les autres ce sont des menteurs », ils risquent de perdre un certain nombre de plumes.

Luc : De toutes façons, il n’y a pas vraiment de médias neutres, puisque chaque média a son orientation, va être plutôt de droite, plutôt de gauche, va traiter les sujets différemment.

Luc : Oui. Après tu as la question de la « fiabilité » entre guillemets. Un truc assez rigolo, c’est Macron qui a tapé sur Le Figaro en disant Le Figaro entretient des relations malsaines avec les entreprises de défense. Et c’est sans doute vrai.

Manu : Parce que Le Figaro appartient à Dassault.

Luc : Voilà. Et Dassault ne soutient pas Macron. Mais du coup Le Figaro aura beau jeu de dire « regardez, tous les autres soutiennent Macron et ce sont aussi des intérêts d’argent, et ce sont aussi des relations malsaines. » Et du coup, par rapport à ta question de la parano, Mag, c’est OK, voir les sources, mais comment on s’assure que les sources soient vraies et que ce soient vraiment les bonnes sources ? Comment on fait confiance ?

7’14

Manu : Moi je pense qu’on peut revenir sur des solutions ou sur des phénomènes qu’on connaît déjà, centralisation/décentralisation. Les sources qui sont centralisées et qu’on ne peut vérifier que parce que ça passe par un acteur donné, on est peut-être un peu bloqué.

Magali : Par principe, tu ne fais pas confiance, quelle que soit la source !

Luc : Dans ce cas-là, tu es coincée. Après tu ne fais plus rien !

Nico : Après tu essaies de recroiser les informations. Si tu trouves les mêmes informations par plusieurs biais différents, c’est quand même plus fiable que si on a un seul point.

Magali : Exactement.

Luc : On sait que sur Internet, tu as tous les sites qui font des copier-coller de tout ce qu’il faut pour essayer de nous ???

Magali : Ça se voit quand c’est un copier-coller.

Nico : Et puis surtout, dans le cas des fake news, il y a déjà eu des analyses de faites où ils mettent bien que les fake news tournent dans un petit nombre restreint. Ce sont toujours les mêmes sites qui se pompent les uns les autres, alors que les news vraiment officielles et sérieuses vont venir de plusieurs médias, plusieurs sources différentes ; il n’y a pas de lien direct entre les uns…

Luc : Aujourd’hui !

Nico : Aujourd’hui. Ça sera peut-être plus difficile demain.

Luc : On a vu avec l’élection de Trump et le Brexit, avec toutes les manipulations qui ont été faites à base des données récoltées sur Facebook, on a fait une émission là-dessus avant l’été. Ils ont réussi à porter la manipulation à un niveau assez élevé et ça n’est qu’un début. Donc on peut imaginer avoir des choses assez importantes en face. Il y avait également un autre truc que je trouve intéressant, qui sort de cette question politique, j’ai lu un article où ils disaient qu’ils avaient fait un logiciel — alors ils disent intelligence artificielle, parce qu’aujourd’hui n’importe quel logiciel devient une intelligence artificielle, c’est le mot à la mode — qui était capable de rédiger des avis dans les sites marchands et qui étaient convaincants dans 90 ou 95 % des cas. Même plus je crois.

Manu : Ils étaient considérés comme utiles par les internautes.

Luc : Comme utiles. Voilà, tout à fait. Et donc du coup, parallèlement à ça, Amazon par exemple, j’ai lu un article qui disait qu’ils ont plein de marques Amazon, qui appartiennent à Amazon mais qui ne se présentent pas comme telles. C’est-à-dire que ce n’est pas Amazon ceci, Amazon cela, ce sont des marques qui se présentent comme complètement hors d’Amazon, mais qui, en fait, appartiennent au groupe. Et donc du coup, ils sont en train de verticaliser leur activité.

Magali : Tu vas acheter des trucs sur Amazon ?

Luc : Non ! Je sais que je vais me faire péter la gueule par toi si je fais ça ! Mais l’idée c’est que voilà ! Les gens vont sur Amazon pour acheter des trucs, ils ont l’impression d’être sur une grande boutique en ligne, mais Amazon leur présente ce qu’il a bien envie de présenter, et potentiellement des marques qui lui appartiennent, sans dire que ce sont ses marques.

Magali : Et tout en les favorisant par rapport à d’autres marques !

Luc : Tout à fait. Et potentiellement en faisant un prix à la tête du client en fonction de sa navigation ou ce genre de choses.

Manu : Ils deviennent ou redeviennent ce que font les grands supermarchés, depuis très longtemps, parce qu’à un moment donné, ce sont des mécaniques qu’on connaissait déjà.

Luc : Oui, tout à fait. Et on a toute cette question aussi. Dans la grande distribution toutes les marques qu’on a, vous avez peut-être déjà vu ce diagramme, il tourne pas mal sur Internet, où on dit telle et telle marque que vous avez dans le supermarché, c’est tel groupe qui est derrière. On s’aperçoit que derrière il y a une poignée de grands groupes de l’agroalimentaire et de la lessive, etc. Et fondamentalement, notre argent va à peu près toujours aux mêmes.

Et dernier point que je trouve intéressant, sur Reddit qui est une sorte de gros forum mondial avec beaucoup de gens, il y a des trucs qui sont passés avec des gens qui ont pointé le fait qu’ils ont réussi à prouver qu’il y a des gens qui sont payés pour orienter les opinions. Et notamment, une marque de grande distribution américaine qui paye les gens pour aller dire sur les forums, etc., sur les réseaux sociaux, dire « non, mon produit est bon Mais non vous dites ça, mais en fait ce n’est pas prouvé, etc. »

Magali : Eh puis il y a des fois des qui le font sans être payés !

Luc : En plus, il y en a qui le font sans être payés, effectivement. Donc du coup, quand on est face à quelqu’un qui donne un avis et qu’on est sur un truc un peu polémique, où il y a des intérêts financiers ou des choses comme ça, ou politiques, comment on fait pour avoir confiance et s’y retrouver là-dedans ? Je pense que ça va être un enjeu important dans les années à venir.

Nico : C’est vrai que ça peut beaucoup bouger. On l’a vu surtout avec les impacts que ça peut avoir avec Trump ou le Brexit ou des choses comme ça. Ça peut aller très loin au niveau géopolitique d’avoir des biais sur tout ce qui va nous entourer. C’est vrai que ça va être très difficile de pouvoir s’en défaire, de pouvoir détecter ce genre de choses. Il faut vraiment passer beaucoup de temps pour recroiser les sources. Justement, même sur Amazon, il va falloir aller regarder tous les articles les uns après les autres, aller regarder les équivalents d'un extrait Kbis [Note : document officiel attestant l'existence juridique d'une entreprise commerciale ou d'une société en France] ou autres. C’est inabordable, c’est inaccessible pour le commun des mortels. Ça demande un boulot de malade, ça demande de bosser à plusieurs ; ça peut après peut-être avoir des bases de données type Wikipédia ou autres qui soient des communs.

Luc : Là-dessus il y a un truc qui existe déjà, qui est vachement intéressant, qui est Open Food Facts et Open Beauty Facts, qui est donc une initiative de libristes où on a une base de données. Mag, tu les connais bien.

Magali : Oui. En fait, ils ont mis en place une plateforme d’aliments ou de produits de beauté où ils nous permettent de découvrir ce qu’il y a dedans, si c’est bien, si c’est mal, mais toujours en restant très objectifs. Ce n’est pas à eux de juger. Ils ont un petit algorithme qui permet quand même de mettre une sorte de note de A à E pour tout ce qui est nourriture, mais c’est informatif. Et effectivement, quand on commence à faire ses courses avec cette application dans la poche…

Luc : En fait, on scanne le code barres et il sort la fiche du produit.

Magali : Exactement. On met beaucoup plus de temps à faire ses courses, mais on achète beaucoup mieux.

Luc : Et on pourrait imaginer de développer tout ça, en disant, si ma démarche est politique, je ne veux pas de produits qui viennent de tel ou tel pays ou qui viennent de tel groupe parce que j’ai décidé de les boycotter, alors ce genre d’appli serait super cool, l’appli et les données derrière. Et donc ces données sont alimentées par les utilisateurs qui vont, quand le produit n’est pas dans la base, renseigner la base et, effectivement, construire une connaissance qui est vraiment très utile.

Luc : Et ça passera forcément par ce genre d’outil, de boulot collaboratif ou autre, parce que sinon c’est impossible en étant tout seul dans son coin, on va de toutes façons être perdu dans la masse.

Magali : Non seulement c’est impossible tout seul dans son coin, mais attention, si ça commence à être payé par des entreprises, on n’est plus sûr de pouvoir avoir confiance, puisque les plateformes payées par ces entreprises risquent de dire du bien des produits de l’entreprise et non plus d’être objectives.

Luc : Il y un autre truc, qui est un peu mort aujourd’hui, mais que je trouvais quand même intéressant dans la démarche chez les libristes, qui était la clef GPG. À une époque c’était super à la mode chez les libristes.

Manu : Nicolas, tu n’as pas l’air enchanté !

Nico : C’est compliqué ! Terrain glissant là !

Luc : C’est compliqué, mais le principe, l’idée derrière est vachement intéressante.

Magali : C’est vrai que c’était à la mode !

Nico : C’était très à la mode.

Luc : Il faut peut-être expliquer en quoi ça consiste.

Nico : Les clefs GPG, c’est une clef qu’on génère avec notre PC, ce sont juste des nombres, des chiffres issus de la machine et ça permettait d’identifier une personne de manière assez forte, puisque après les personnes se les échangeaient avec présentation de la carte d’identité. Il y avait tout un cérémonial autour de ce truc-là.

Luc : L’idée c’était je croise quelqu’un en vrai, que je n’ai croisé que sur Internet. Il dit : « Coucou, je suis untel sur Internet » et il a sa clef informatique qui permet de le prouver.

Nico : Sa clef informatique avec la carte d’identité qui permet de prouver vraiment qui il est.

Luc : Et avec la vraie carte d’identité. Et moi je regarde et je dis « OK tu es bien Nicolas comme tu prétends l’être et donc je te donne ma clef en échange. »

Nico : La clef. Et après il y a des mécanismes de signature, comme ça on a un cercle de confiance qui se met en œuvre qui dit :  « Je te connais ou je connais untel, en passant par telle personne », et du coup on peut avoir de plus en plus confiance comme ça en les gens. Et plus on a de signatures envers la personne, plus on est confiant en cette personne.

Luc : C’est-à-dire que si moi je te croise sur Internet et qu’on ne s’est jamais vus, mais que je vois que ta clef GPG a été signée par Manu, par Magali et par dix autres personnes que je connais et en qui j’ai confiance je me dis bon !

Nico : Ça devrait être moi.

Luc : Ça doit être lui. Et potentiellement, on pourrait imaginer que c’est un bon gars ou des choses comme ça.

Nico : Mais même là-dedans, moi j’ai eu des fake news. Il y en a qui se sont amusés à faire des fausses clefs, à se les signer, à répliquer les cercles de confiance qu’il y avait sur des vraies clefs vers des fausses clefs. C’était assez fun ! Après c’est vrai que c’est compliqué. Après il y a la problématique aussi du pseudonymat. Par exemple, moi je suis plutôt connu sous mon pseudonyme, quand je mettais ma carte d’identité, c’était compliqué de prouver justement que j’étais légitime et qu’on pouvait avoir confiance en moi ! Ça devient compliqué dans certains cas.

Luc : Après on pourrait avoir plusieurs identités. Ce n’est pas interdit. Mais en tout cas je trouvais que c’est intéressant de voir que cette question de la confiance s’est posée super tôt chez les libristes. Le logiciel, par ailleurs, était super compliqué, c’est toi qui le dis. J’aime bien cette image où tu dis : « C’est trop facile de se tirer une balle dans le pied ! »

Nico : C’est ça. Mais après on en avait besoin. C’était le problème que quand on distribuait un logiciel, comment on pouvait avoir confiance dans le logiciel qu’on récupérait, que ce n’était pas une version backdoorée, vérolée ou pourrie. Et donc la signature ! Avec ces clefs-là on pouvait signer, on avait confiance dans le logiciel qu’on téléchargeait et on savait que c’était le Firefox de Mozilla et pas celui de Microsoft ou d’un pirate ou autre. Et c’était pour ça que ça a paru.

Luc : Et du coup, du côté du propriétaire, du privateur, il y a Facebook qui insiste dans ses conditions d’utilisation, pour que les gens n’aient qu’une seule identité qui soit leur identité publique. Et le fait qu’elle soit utilisable pour s’identifier partout c’est hyper pratique. Mais en même temps, c’est une façon pour eux de jouer ce rôle-là et on voit que ce rôle, en fait, est super important, il apporte énormément de pouvoir, énormément de maîtrise.

Magali : Et il peut vraiment nuire aux utilisateurs qui vont réellement mettre leur identité, leur nom, leur prénom, qui pourront être récupérés. Typiquement s’ils cherchent du travail, s’ils postulent pour une école, on pourra avoir accès à toutes leurs données.

Luc : Tout simplement, on peut tout simplement bien les contrôler, bien les maîtriser et les faire entrer dans un système de contrôle. On arrive à la fin de notre temps. Merci. On se retrouve la semaine prochaine.

Manu : Eh bien à la semaine prochaine.

Magali : À bientôt.

Nico : Bonne semaine à tous.