Différences entre les versions de « Améliorer la diversité en luttant contre les discriminations - Raphael Isla »

De April MediaWiki
Aller à la navigationAller à la recherche
(Contenu remplacé par « Catégorie:Transcriptions Publié [https://www.librealire.org/ameliorer-la-diversite-en-luttant-contre-les-discriminations ici] - Mars 2024 »)
Balise : Contenu remplacé
 
(23 versions intermédiaires par 2 utilisateurs non affichées)
Ligne 1 : Ligne 1 :
 
[[Catégorie:Transcriptions]]
 
[[Catégorie:Transcriptions]]
  
'''Titre :''' Améliorer la diversité en luttant contre les discriminations
+
Publié [https://www.librealire.org/ameliorer-la-diversite-en-luttant-contre-les-discriminations ici] - Mars 2024
 
 
'''Intervenant :''' Raphael Isla
 
 
 
'''Lieu :''' École nationale supérieure d'électrotechnique, d'électronique, d'informatique, d'hydraulique et des télécommunications Toulouse - Capitole du Libre 2023
 
 
 
'''Date :''' 18 novembre 2023
 
 
 
'''Durée :''' 46 min 48
 
 
 
'''[https://www.youtube.com/watch?v=yW4Huq9byu0&list=PLU8kgF3be3rQByaL3UBArjy0E0SO7EZvK&index=82 Vidéo]'''
 
 
 
'''[https://www.famille-isla.net/raphael/docs/20231118-Support_de_conf-Capitole_du_libre-Discriminations.pdf Diaporama support de la conférence]'''
 
 
 
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]
 
 
 
'''Illustration :''' À prévoir
 
 
 
'''NB :''' <em>transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/>
 
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em>
 
 
 
==Description==
 
 
 
Le logiciel libre et l'open source se veulent tous les deux des mouvements éthiques, se basant sur le partage à autrui et/ou la collaboration. Basées sur ces deux buts, les communautés liées à ces mouvements se disent souvent prêtes à annoncer lutter contre les discriminations, accepter les autres, être ouvertes. Mais en réalité, qu'en est-il vraiment ? Comment fonctionne la discrimination ? Comment vraiment lutter contre ?
 
 
 
==Transcription==
 
 
 
Bonjour. Merci d'être là.<br/>
 
Je suis Raphael Isla, informaticien de métier et je lutte contre les discriminations sur mon temps libre, dans le cadre de mon bénévolat à la fondation Le Refuge. Je fais des interventions auprès des élèves de collège et lycée et je me suis dit que ce que je présentais aux élèves de collège et de lycée c'était bien aussi de le présenter à d'autres personnes, en particulier dans le milieu professionnel. Du coup, j'ai un peu adapté la formation avec ce que j'ai rencontré, ce que j'ai expliqué, ce sur quoi on m’a formé.
 
 
 
Petit plan en plusieurs parties :<br/>
 
comment on reconnaît, on détecte une discrimination ; <br/>
 
comment on la reproduit pas ;<br/>
 
comment participe : surtout ne pas se taire ;<br/>
 
comment on est proactif : pourquoi on lutte contre les discriminations, il y a des gens qui se posent la question, ce n’est pas si évident que ça ;<br/>
 
et après on verra si vous avez des questions.
 
 
 
==Reconnaître et détecter==
 
 
 
Donc reconnaître et détecter, parce que, en fait, ce n'est pas si simple. ;<br/>
 
Une discrimination se base sur certaines causes : ;<br/>
 
on a l'inconnu, quelque chose qu'on ne connaît pas, on a peur, on ne sait pas comment réagir et, parfois, ça amène une discrimination;<br/>
 
la différence : ce n'est pas quelqu'un qui est comme moi, je ne vais pas me comporter pareil, je ne vais pas avoir des bons comportements ;<br/>
 
le regard des autres : les autres personnes sont discriminantes, pour me fondre dans le moule je vais les suivre ; ou alors, les autres personnes traitent telle personne comme ça et je ne veux pas être traité pareil alors, je vais, moi aussi, reporter cette discrimination ;<br/>
 
les religions : est-ce que j'ai vraiment à expliquer en quoi les religions sont discriminantes ? On a des exemples tout au long de l'histoire, je pense que ce n'est pas nécessaire ;<br/>
 
l'éducation au sens large : ce qu'on reçoit de nos parents, de nos familles, du système scolaire ;<br/>
 
la société au sens large : les médias, les politiques, en tant que personnes et en tant que concepts. ;<br/>
 
Tout cela participe à mettre en nous des bases pour nous pousser à discriminer et on n'est pas forcément conscient de tout ça. C'est un bagage qu'on a dont on ne se rend pas forcément compte.
 
 
 
Du coup, quand on a ce bagage, on peut être amené à être discriminant.<br/>
 
Comment ça se passe : des violences verbales, des violences physiques, des violences morales et psychologiques – moqueries, persécution –, du harcèlement, rejet et mise à l'écart, de l'agressivité verbale ou physique, de la réduction de possibilités, on n'y pense pas forcément, mais une discrimination à l'embauche, par exemple, c'est une réduction de possibilités ; une discrimination sur un dossier scolaire, un dossier universitaire, c’est une réduction de possibilités, encore une fois.
 
 
 
Après causes et actions, forcément les conséquences.<br/>
 
Là on parle du point de vue de la personne qui discrimine [causes] et, là, du point de vue de la personne qui est discriminée [conséquences].<br/>
 
Isolement et repli sur soi, culpabilité, remise en cause de soi, perte de chances, qui va avec réduction des possibilités, bien sûr, déni de soi-même, conduites addictives au sens très large, ça peut être des troubles du comportement alimentaire, ça peut être de l'alcoolisme, de la consommation de drogues, des relations sexuelles non protégées, ce genre de chose, dépression mal-être, scarifications, mutilations et suicide. J’ai mis un peu par ordre d'importance.<br/>
 
Quand je fais cette présentation auprès d'élèves de collège et de lycée, je remplis tableau avec eux ; le tableau est vide et je leur demande ce qu'ils voient. La première chose qui remonte là-dedans, c'est le suicide. Quand on parle des discriminations à des jeunes, le premier impact qu'ils voient c'est le suicide. Ils savent ce que c'est, ils savent jusqu'où ça peut aller.
 
 
 
En général, je fais cette présentation dans un cadre de lutte contre les discriminations LGBT. Là, je vous présente globalement, mais quand on parle de lutte contre les discriminations LGBT, on insiste sur certaines choses par exemple le déni de soi. Quand on est discriminé parce qu’on est LGBT, on a tendance à dire « non, en fait je suis hétéro, je suis cisgenre, je vais essayer d'avoir des relations conformes à ce que la société attend de moi. » C'est très difficile. Le déni de soi est un peu vers le milieu mais c'est quand même quelque chose de très prenant.
 
 
 
Comme je l'ai dit tout à l'heure, les causes c'est un bagage qu'on a et dont on n'est pas forcément conscient. Du coup, j'insiste sur l'inconscient de l’instinct, avec une citation d'un auteur français, je sais pas si vous connaissez Gilles Roussel, scénariste et dessinateur de BD, qui a dit : « Les préjugés c'est comme les boutons d'acné : quand on croit en avoir fini avec, on s'en trouve un énorme juste sous son nez. » Il a raconté qu’un jour il est sorti de chez lui, à Paris, et, dans le hall de son immeuble, il a croisé deux femmes d'âge mûr en train de discuter, à qui il a dit bonjour sans aucun problème. Et en sortant, dans la rue, il croise deux hommes, pareil, en train de discuter, peau noire, des bonnets sur la tête, et il a un moment de recul en se disant « j'espère qu'ils ne vont pas faire chier les petites dames, quand même ça serait dommage ». Il part faire ses courses, il revient et il retombe sur les mêmes personnes et là il se rend compte que les deux hommes sont en train de regarder des photos disant « c'est ta fille, comme elle est mignonne, elle a les yeux de son père, c'est trop choupi, machin ». Le premier préjugé qu'il avait est en train de se détruire et, en rentrant dans son hall d’'immeuble, il retombe sur les deux femmes qui avaient des discours très racistes et très discriminants. Il avait donc deux points de vue sur deux situations où il était complètement opposé, ce qui lui a inspiré cette phrase juste après, en revenant de ses courses.
 
 
 
Moi aussi je l'ai vécu. Ça fait un petit moment que je suis sur Toulouse dans la vie associative, je participe à des événements et, un jour je devais aller à un événement qui avait lieu à la médiathèque à la Reynerie. Je me suis dit « la Reynerie, ça craint, c’est un quartier ! C'est la banlieue, tout ça, comment ça va se passer, si je mets mon véhicule à côté je vais le retrouver » et, en fait, c'est complètement con. Je n’ai jamais eu aucun problème. J'ai étudié à la fac du Mirail, actuellement Université Jean Jaurès, je n'ai jamais eu un seul problème. Je suis allé plusieurs fois à la Reynerie à Basso Cambo pour divers événements, la galette et les vœux de monsieur le maire, etc., je n’ai jamais eu de problèmes. On a des à priori, on se dit machin. Pourquoi ?Parce que la société, l'éducation et tout ça.<br/>
 
Donc, quand on a un truc, on doit se demander si c'est basé sur des faits ou si c'est un inconscient, un préjugé.
 
 
 
Autre point à surveiller : qui ai-je en face ? Est-ce que c'est important de savoir à qui je m'adresse ? Et là, la réponse est oui et non.<br/>
 
En théorie, je devrais m'adresser à n'importe qui de la même manière. Si j'avais un discours non discriminant, je pourrais m'adresser à n'importe qui de la même manière. En réalité, étant donné la société dans laquelle on est et les préjugés que moi je porte, je dois faire attention à la personne que j'ai en face, parce que, dans certaines remarques, je peux blesser quelqu'un sans le savoir. Donc, je me dis, normalement, il faudrait qu'on puisse adresser à n'importe qui de la même manière et, en fait, on ne peut pas le faire pour diverses raisons.<br/>
 
On utilise des expressions « mais tu es sourd ou quoi » ou « mais tu es complètement malade », qui sont, en fait, des discriminations envers des personnes qui ont des problèmes d'audition ou des personnes qui ont des problèmes psychologiques et on s'en sert pour décrire d'autres personnes qui ne sont pas forcément concernées, ou qui peuvent l'être, et on ne le sait pas.<br/>
 
Ce qui m'amène au point suivant, un point auquel il faut aussi faire attention, c'est le handicap invisible.<br/>
 
On parle de discrimination, on a tendance à parler racisme, sexisme, LGBTphobie, validisme, grossophobie, etc. Ce sont des choses qui, globalement, se voient sur les gens qu'on a en face ; je dis globalement parce que, dans certains cas, ça ne se voit pas forcément. Mais il y a plein de handicaps invisibles, physiques ou psychologiques, qu'on ne voit pas et qui font qu’on peut se retrouver à blesser quelqu'un, la personne à qui on s'adresse ou quelqu'un qui est à côté ou quelqu'un qui n'est pas là et qui va avoir vent de ce qui s'est passé.
 
 
 
==Ne pas reproduire==
 
 
 
Du coup, une fois qu'on a pu reconnaître les causes, les conséquences des actions d'une discrimination, les points sur lesquels insister, on ne va pas les reproduire.<br/>
 
Plusieurs façons de faire : premièrement le jugement et sa suspension.<br/>
 
Dans un de mes premiers boulots sur Toulouse, en 2006, un de mes chefs disait : « Il ne faut pas juger les gens. » OK, mais c'est difficile de ne pas juger les gens. Je suis désolé, intérieurement j'ai l'impression de juger tout le temps. Par contre, ce qui est facile, c'est de le garder en soi et de ne pas se baser sur ce jugement pour échanger, pour se comporter avec les personnes qu'on a en face.<br/>
 
Pour moi, avec tout ce qu'on a reçu, avec toutes les causes que je vous ai montrées, le jugement sera toujours présent en nous. Actuellement, nous en tant que société, nous sommes dans le jugement, donc, il faut apprendre à le suspendre. OK. « La personne que j'ai en face, je considère que… » Ça peut-être un jugement positif, c'est quelqu'un qui a une expérience, qui a des talents, j'adore vraiment, machin, je vais m'adresser avec obséquiosité peut-être, pas forcément, on va se remettre au niveau. Ou alors c’est un Noir et moi je suis raciste. Eh bien non, même si c’est un jugement raciste, on le garde en interne et on ne se base pas dessus pour échanger avec une personne ou se comporter.
 
 
 
C'est clair ce que je raconte ? Je ne dis pas de grosses bêtises ? Vous m'arrêtez si je dis une grosse bêtise. Normalement non.
 
 
 
L'exemple de <em>Cyrano de Bergerac</em>. Vous connaissez <em>Cyrano de Bergerac</em>, la fameuse tirade du nez dans la pièce, parce que je ne connais pas tant que ça le personnage historique. Dans la pièce <em>Cyrano de Bergerac</em>, le personnage se fait insulter à cause de son nez et il fait une grande tirade en disant : « Il y a plein de choses à dire sur mon nez », mais il finit par dire, tout ce que j’ai dit « Je me les sers moi-même, avec assez de verve, mais je ne permets pas qu’un autre me les serve. » Et, en fait, c'est ça. Certaines personnes ont tendance à se moquer d'elle-mêmes, certaines personnes ont tendance à utiliser des termes discriminants pour parler d'elle-mêmes. Ça ne vous donne pas l'autorisation d'utiliser ces mêmes termes pour parler d'elles.<br/>
 
Les personnes LGBT ont récupéré l'expression « pédé », ont récupéré l'expression « pédale » entre elles. D'accord. Ça ne permet pas, ça ne donne pas l'autorisation aux personnes hétéros de l’utiliser.
 
 
 
Autre citation d'un artiste français : « On peut rire de tout, mais pas avec tout le monde. ». Desproges est plus proche de nous que Cyrano de Bergerac et, effectivement, beaucoup de gens disent « mais non, ce n'est pas du sexisme, c'est une blague ! ». J'ai eu l'exemple ce week-end, chez moi. Quelqu'un qui était de passage nous a dit « j'ai trouvé ce message sur Facebook, c'est rigolo ça dit « on a trouvé une femme avec des super-pouvoirs, elle transforme l'argent en tickets de caisse », et là je dis « oui, mais ça fait 30 ans qu'on entend cette même blague sexiste ! — Mais non, ce n'est pas sexiste, c'est de l'humour, on ne peut plus rien dire ! ». Chez moi, dans mon salon ! J'étais un peu énervé, mais je n'ai pas insisté parce que, voilà !<br/>
 
Oui, on peut rire de tout, on peut encore raconter des blagues, mais ça dépend avec qui, ça dépend dans quel cadre, ça dépend qui est concerné et qui est présent ou pas.
 
 
 
Petite illustration d'un dessinateur [Matthieu Garcia Marin] où, effectivement, on peut rire de tout mais pas forcément avec tout le monde. Cette illustration a été faite dans le cadre du livre qui s'appelait projet 17 mai ??? [15 min 08], qui est un recueil d'images de lutte contre les LGBTphobies. On voit un groupe de personnes qui se moquent censément des personnes homosexuelles qui se tiennent comme ça. On voit, derrière, qu’il y en a une qui rigole mais pas tout à fait quand même.<br/>
 
Le dessinateur est un Toulousain que j'ai contacté. Il était très content que je présente ce dessin sur Toulouse.
 
 
 
==Ne pas se taire 15’ 40==
 
 
 
Quand on est
 

Dernière version du 16 mars 2024 à 13:26


Publié ici - Mars 2024