Différences entre les versions de « Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 17 octobre 2023 »

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(Page créée avec « Catégorie:Transcriptions '''Titre :''' Émission Libre à vous ! diffusée mardi 17 octobre 2023 sur radio Cause Commune '''Intervenant·e·s :''' Xavier Berne... »)
 
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<b>Étienne Gonnu : </b>
 
<b>Étienne Gonnu : </b>
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== « Graine de libriste », préparé et animé par Rémi Robilliard et avec Charlotte Thomas, étudiante en licence 3 à l’ISTIC de Rennes==
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<b>Étienne Gonnu : </b>Nous allons poursuivre par notre sujet principal, une émission « Graine de libriste » où on laisse la parole à des jeunes personnes qui s'engagent pour le logiciel libre et les libertés informatiques. À cette occasion, je vais avoir le plaisir à laisser la parole à Rémi Robilliard, avec moi en studio, développeur fraîchement diplômé de l’ISTIC la faculté d'informatique de Rennes, également contributeur à des projets libres, notamment OpenStreetMap. Rémi Robilliard, échangera avec Charlotte Thomas, étudiante en licence 3 à l’ISTIC.<br/>
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N'hésitez pas à participer à notre conversation au zéro 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l'émission sur le site causecomme.fm, bouton « chat ».<br/>
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Bonjour Rémi.
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<b> Rémi Robilliard : </b>Bonjour Étienne.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Tu as accepté d'animer cet échange, dans cette thématique « Graine de libriste ». On te remercie de nous avoir rejoints en studio pour cela et je te laisse la parole.
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<b> Rémi Robilliard : </b>Merci beaucoup.<br/>
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J'aimerais en premier remercier l'April de m'avoir donné l’occasion de venir faire cette émission pour parler du Libre au sein de l'université qui n’est pas forcément quelque chose auquel on peut penser tout de suite quand on pense au Libre, vu qu’on va parfois plutôt penser à des vieux barbus, dans leur cave, à utiliser leur ordinateur comme ça. Mais, avant d'être un vieux barbu, il faut planter la graine du Libre et, avant d’avoir les cheveux grisonnants et une barbe d'environ 27 mètres, cela se fait souvent à l'université. Excusez-moi, je me perds dans mes notes.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Relaxe. C’est déjà une très belle intro déjà, tu nous as vraiment mis l'eau à la bouche pour cet échange.
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<b> Rémi Robilliard : </b>Le Libre est en effet né à l'université, notamment avec le projet GNU. Cette philosophie du partage est d'ailleurs quelque chose qu’on ne va pas forcément retrouver dans l'entreprise ou c'est même plutôt la concurrence qui va primer, on va essayer de cacher son code là où, à l’université on partage son savoir et ses compétences. D'ailleurs, si on regarde les plus gros acteurs du monde libre, comme je l'ai dit GNU, ils viennent souvent des bancs de l'école. GNU a été créé par Stallman, dans les années 80, qui est enseignant au MIT. On peut aussi penser à Linux qui a été développé par un jeune étudiant finlandais, qui avait fait un projet sans prétention, qui devenu le monstre que l'on connaît aujourd'hui. Et si on veut être un peu chauvin, on peut citer Framasoft qui a été créé par des professeurs de mathématiques et de français, ou encore l'association qui anime cette émission, l'April qui a été créée en 96, à Paris 8, par des étudiants en informatique. On peut aussi parler des chatons, des pléthores de chatons faits par des étudiants. Rapidement, que sont les chatons ? Ce sont des fournisseurs de services comme du <em><em>cloud</em></em>, de l'édition de documents en ligne. Je peux citer La Contre-Voie qui a été créée par des étudiants de 42, Kaz par des enseignants de l’IUT de vannes ou encore ??? [16 min 57] qui a été créé par plusieurs étudiants de différentes écoles.<br/>
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Bref, le milieu étudiant est intimement lié au Libre et, dans ses études en informatique, qui n'a jamais effleuré cette notion ? D'ailleurs cette notion peut devenir une passion dévorante, comme pour cet étudiant polonais qui a réussi à avoir son diplôme en 2021 sans toucher à un seul logiciel propriétaire, comme Teams, en pleine pandémie. Il a bien réussi son coup.<br/>
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D'autres fois on veut juste partager ce qu'on a appris sous licence libre pour que tout le monde puisse avoir ces connaissances, un peu comme a fait Charlotte qui est avec moi pour cette émission.<br/> Bonjour Charlotte.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Bonjour Rémi.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Étienne t’a présentée rapidement en début d’émission. Est-ce que tu veux rajouter quelque chose ou pas ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>Je suis étudiante à l’ISTIC, c'est tout ce que je fais, présidente d’association maintenant mais c'est tout.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Très bien. Je vais commencer par te poser quelques petites questions de base, par exemple comment as-tu connu le logiciel libre, en quelque sorte comment cette graine a-t-elle été plantée au début ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>Elle a été plantée beaucoup plus tôt qu’à l'université. C'est mon père qui a planté la graine du Libre depuis que je suis toute petite. En effet, j'avais un ordinateur avant même de pouvoir marcher. Il était programmé pour que quand j'appuie sur une touche du clavier ça fasse un son, j'avais littéralement un clavier. À cette époque-là, tous mes ordinateurs ont tourné sur Ubuntu ou sur d'autres distributions Linux.<br/>
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C'est donc mon père qui m'a donné goût au logiciel libre au fil du temps, en m’apprenant comment développer au début, même si j'ai commencé à apprendre d'autres langages que lui, en m’apprenant ce qu’est l'administration système, ce qu'il faisait aux impôts avant, il était administrateur système. C'est lui qui m'a appris comment on utilise un Linux, comment on administre un Linux, comment on administre les différentes applications, genre MySQL, genre PHP ou Apache, tous ces logiciels. Dont oui, c’est mon père que a planté la graine du Libre en moi et, depuis, je trouve qu'elle a bien grandi !
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<b>Rémi Robilliard : </b>D'accord. Très bien. Du coup, tu as continué aussi, toi-même, à alimenter cette graine même jusqu'à continuer, lors de tes études, à faire du logiciel libre. Pourquoi aimes-tu ça ? Pourquoi veux-tu continuer à l'utiliser, à le promouvoir ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>Pour moi le logiciel libre c’est important, c'est rentré dans le cœur de mes valeurs. Je suis très pour le logiciel libre parce que je crois en la liberté d'information : tout le monde a un droit fondamental à l’information, c'est important pour moi. Donc je partage tous mes logiciels , tout ce que je fais en licence GPLv3, donc tout le code que je fais est en licence libre, la GNU GPL, la <em>GNU General Public License</em>.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Nous allons reparler juste après de cette licence.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Je ne fais pas beaucoup d'art, donc je n'utilise pas beaucoup de Creative Commons, mais je fais beaucoup de code et tous mes codes sont en GPL parce que j'aime les informations et, pour moi, elles doivent être publiques, c’est pour cela que tout est <em>open source</em>, tout est libre.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Très bien. On va revenir rapidement cette notion de GPL. Une licence c'est un contrat qui va définir comment utiliser le logiciel. La GPL va demander à tous les utilisateurs du logiciel de redistribuer ce programme avec cette licence-là. Certaines licences ne demandent pas ça par, exemple à la licence BSD, entre autres, dit juste qu’on peut utiliser le logiciel et, si jamais on souhaite fermer le code derrière, c'est possible. Je préfère préciser un petit peu, pour ceux qui ne sont pas forcément au courant ou initiés dans ce milieu-là.<br/>
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As-tu un projet en particulier à présenter, un projet qui te tient vraiment à cœur, que tu as mis sous licence libre et que t'as envie de partager comme ça ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>Bien sûr. Mon projet qui me tient le plus à cœur c’est Baguette Sharp. Qu'est-ce que c'est Baguette Sharp ? C'est un langage de programmation ésotérique, ça fait très peur. En fait c'est juste un langage de programmation qui est fait exprès pour être horrible. Il est développé et c'est un langage qui n’utilise que des pâtisseries françaises et un peu de pâtisseries alsaciennes/germaniques. En fait, tout se code avec des pâtisseries : « Print » c’est « Croissant » pour afficher quelque chose.<br/>
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C'est le projet qui me tient le plus à cœur, il est en GPLv3 disponible sur GitHub et bientôt sur mon git forge quand j'aurai un serveur pour l'héberger. C’est un projet qui m'a ouvert beaucoup de portes. Il m'a ouvert les portes d'un stage, l’année dernière, à l'Inria de Rennes. Il m’a ouvert les portes de Pas Sage en Seine où j'ai fait une présentation de 30 minutes dessus. Il m’a ouvert les portes de la Journée du Libre Éducatif, grâce à Alexis Kauffmann, où j'ai fait une petite présentation flash dessus.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Pour venir rapidement l'Inria est un laboratoire d'informatique basé en Bretagne.
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<b>Charlotte Thomas : </b>L’Inria c’est national.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Je confonds toujours, c’est Irisa qui est en Bretagne.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Irisa c’est en Bretagne.???[22 min 40]
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<b>Rémi Robilliard : </b>Les noms sont assez voisins, donc je confonds toujours ; Pas Sage en Seine, ce sont trois jours de conférences, et ça a lieu à Choisy-le-Roi tous les ans en juillet ; Alexis Kauffmann est un des cofondateurs de Framasoft et il travaille maintenant au ministère de l'Éducation, il essaye de pousser un petit peu cette philosophie du Libre. Vous pouvez d’ailleurs retrouver une super conférence de sa part à Pas Sage en Seine où il explique un peu les actions qu'ils entreprennent au sein du ministère pour mettre en avant le Libre.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Je vais me permettre. Il est même intervenu dans une émission de septembre dernier dans <em>Libre à vous !</em>, une autre occasion de l'entendre. C’est effectivement quelqu'un de très intéressant à écouter.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Merci Étienne pour cette petite précision toujours bonne à prendre.<br/>
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Parmi toutes ces portes qui t’ont été ouvertes, est-ce qu'il y en a une qui t'a permis d'avoir des échanges en plus, par exemple ton stage au sein du laboratoire de recherche ? Est-ce que tu as pu voir des personnes qui connaissent un petit peu, on va dire, ce milieu du développement un peu plus poussé ? Est-ce que tu as pu avoir des échanges intéressants ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>Effectivement. Quand je suis rentrée au laboratoire, donc à l'équipe PACAP à Rennes, s’ils m’écoutent un jour, ils sont dans mon cœur, voilà ! J'ai connu plein de gens qui m'ont appris beaucoup de logiciels libres, par exemple Gnuplot pour faire des graphiques au lieu d'utiliser Matplotlib sur Python ou d’utiliser, surtout pas, un truc sur un tableur, non c'est Gnuplot qu'on utilise. C'est un logiciel qui se fait par ligne de commande pour afficher des graphiques et c'est, bien sûr, sous licence GPL, puisque c'est un logiciel de GNU.<br/>
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J'ai donc découvert ça, j'ai découvert plein d'outils qu'on a fait à Inria, qui sont ouverts pour tout le monde, quelques outils. Par exemple j'ai appris à l’Inria de Rennes que André Seznec a inventé la prédiction de branchement sur les processeurs. J'ai donc appris beaucoup de choses quand j'étais à Inria, beaucoup de choses en libre. J'ai fait du code qui n’est pas encore libre puisque c'est du code qui attend d’être publié. En tout cas, j'ai appris beaucoup de logiciels libres pour pouvoir coder. Par exemple, mon rapport est fait en LaTeX, un logiciel construit sur une technologie qui a 40 ans pour faire des documents et qui est sous licence libre. J'ai utilisé Gnuplot qui est sous licence libre. J’ai utilisé aussi LibreOffice qui est sous licence libre. Donc j'utilisais beaucoup de logiciels libres.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Très bien. On va on va sortir un petit peu de ce cadre de recherche. Est-ce qu’il y a encore d'autres logiciels libres que tu utilises au sein de tes études, par exemple des éditeurs de code libre ou autre chose ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>On ne le dira jamais assez mais Gimp m'a sauvé la vie. Merci à Gimp ou « jimp », je ne sais pas comment on dit.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Je crois que c’est un petit débat dans la communauté.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Personne ne sait !
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<b>Charlotte Thomas : </b>Ça m'a sauvé la vie plusieurs fois, ça édite tous les PDF, au cas où, Ça ma beaucoup aidée.<br/>
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Je commence à me mettre à utiliser Emacs, c’est un peu long, je sors de VSCodium pour utiliser Emacs, petit à petit
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<b>Rémi Robilliard : </b>Pour nos auditeurs qui ne sont pas développeurs, Emacs et VSCodium sont des outils pour pouvoir écrire du code.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Emacs c'est celui de GNU donc sous licence GPL et libre ; VSCodium est fait par Microsoft.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Aussi sous licence libre, il faut le préciser. Les grands GAFAM ont parfois une petite bonté et font du logiciel libre.
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<b>Charlotte Thomas : </b>C'est la version privatisée de VSCode en fait.<br/>
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J’utilise LibreOffice tous les jours.<br/>
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Pour prendre des notes Typist, de plus en plus, au lieu de LaTeX. C'est un logiciel un peu comme du Markdown pour prendre des notes, c'est rapide pour faire plein de choses, c'est très puissant, c’est un peu comme du Python niveau programmation, c’est fait en Rust, un langage programmation libre aussi et  Typist est un logiciel libre.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Donc beaucoup de logiciels libres qui font vraiment un écosystème qui permet d'étudier librement, un peu comme nous l'étudiant polonais que j'ai pu citer un peu plus tôt.<br/>
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Je vais aussi raconter un petit peu, rapidement, ce que j'ai pu lors de mes études pour le Libre. J’ai tout de suite utilisé, comme a dit Charlotte, VSCodium et VSCode qui sont des éditeurs de code libre. J'ai aussi utilisé Linux, Firefox, tous ces outils-là, qui sont des outils que vous utilisez sans savoir qu’ils sont libres comme LibreOffice, Gimp et tant d'autres, et c’est caché à vos yeux.
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<b>Charlotte Thomas : </b>GeoGebra.
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<b>Rémi Robilliard : </b>GeoGebra aussi pour les collégiens qui nous écoutent peut-être, un logiciel pour faire de la géométrie, entre autres, et des maths, qui est aussi sous licence libre et qui français, si je ne dis pas de bêtises.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Je précise. Vous citez énormément de logiciels libres, de ressources libres, je les note au fur et à mesure et on mettra à jour rapidement les références sur la page de l'émission pour les personnes qui souhaitent effectivement aller y jeter un œil.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Comme ça tout le monde peut utiliser ces logiciels libres.
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<b>Rémi Robilliard : </b>C'est toujours intéressant de rajouter un nouveau logiciel qui peut parfois être un peu plus performant que le précédent dans son flux de travail.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Et il ne faut pas oublier le côté sécurité des logiciels libres
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<b>Rémi Robilliard : </b>Oui. Les logiciels propriétaires, qui ont fermé leur code, vont mettre en avant la sécurité par l'obscurité. Ça veut dire que si personne ne peut voir le code ça ne peut pas être cassé. On a eu plusieurs démonstrations que si, en effet, il y a des petites failles à droite à gauche, là où avec le logiciel libre, comme tout le monde peut lire le code, tout le monde peut trouver des failles, donc tout le monde peut les remonter beaucoup plus rapidement.
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<b>Charlotte Thomas : </b>C'est comme cela que plusieurs failles ont été sécurisées dans Linux, très rapidement.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Je vais reprendre un peu mon fil des questions parce qu'on a un peu dévié.<br/>
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Pour revenir sur ton projet que tu as mis sous licence GPL. Pourquoi utiliser cette licence précisément ? Est-ce que c'est parce que, comme je l'ai expliqué un peu plus tôt, si jamais quelqu'un veut modifier le code, il est obligé de garder cette licence pour garder le savoir ou c’est pour une autre raison particulière ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>C'est effectivement bien pour le fait que ça reste dans le Libre. Je ne voudrais pas, comme pour les logiciels qui sont sous licence MIT, une autre licence qui, elle, permet de fermer le code plus tard. La GPL est une licence qui permet que ça reste dans le domaine ouvert. Même s’il y a des modifications sur mon logiciel – ce que j'attends, si quelqu'un veut modifier mon logiciel pour faire d’autres choses à la place des pâtisseries qu'il le fasse ! J'attends juste que ça arrive ! Donc si quelqu'un veut modifier mon logiciel ça doit rester dans le domaine public. C'est donc ce côté copyleft, à l'opposé de copyright, qui m'intéressait beaucoup dans la GPL, c'est pour cela que j'ai finalement passé tous mes projets en GPL.
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<b>Rémi Robilliard : </b>D’accord. Je vais aussi reprendre. Le copyleft c'est juste pour dire qu’on est obligé de redistribuer sous la même licence. Le MIT n'a pas de copyleft, c'est pour cela qu'on peut changer la licence en cours de route.<br/>
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On a vu un petit peu le Libre dans le milieu des études avec les logiciels qu'on utilise pour travailler, les logiciels qu'on utilise aussi pour communiquer, Matrix par exemple.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Mattermost.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Mattermost qui est utilisé au sein de l’Irisa et de l'Inria, si je ne dis pas de bêtises.
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<b>Charlotte Thomas : </b>C’est le cas.
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<b>Rémi Robilliard : </b>On peut maintenant sortir de ce cadre scolaire et voir un petit peu le Libre dans le monde du travail, en tant qu'étudiant on finit toujours par sortir de l'école pour aller travailler. Comment vois-tu le Libre dans ton métier après les études ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>C'est une très bonne question parce qu’après mes études, même pendant, parce que le concours est dans un mois, je compte passer le concours d’inspectrice des finances publiques, ils appellent ça « en qualité de programmeur système d'exploitation », PSE, c'est pour dire que c'est admin-system, donc je vais administrer des systèmes en Linux. Ce sera donc très important dans mon travail parce que tous les logiciels qu'on utilise à la DGFiP, et à l'État en plus général, sont des logiciels libres. C’est même très important et ce n’est pas une question : on utilise des logiciels libres obligatoirement, il faut une dérogation spéciale pour utiliser genre Microsoft Office, sinon tout le monde utilise LibreOffice et tous les serveurs sont sous Linux. On peut citer, par exemple, le <em>cloud</em> interministériel qu’a fait la DGFiP, qui permet de garder les données en France ; au moins toutes les données de la DGFiP sont stockées en France par la DGFiP, c’est elle qui a la souveraineté des données et en licence libre parce que ce <em>cloud</em> utilise des logiciels libres pour se construire.<br/>
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En tout cas, à la DGFiP, là où j'ai travaillé, là où je vais travailler plus tard, le logiciel libre occupe une place très importante puisque tout est en logiciel libre, obligatoirement, sauf dérogation spéciale.
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<b>Rémi Robilliard : </b>On peut peut-être regretter le fait que ce soient les impôts qui utilisent beaucoup le logiciel libre et pas le ministère de l'Éducation avec notamment les licences Oracle ou encore Office.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Oui. Malheureusement c'est plus difficile de faire bouger l'Éducation que les impôts là-dessus, bizarrement, mais j’espère bien que l'Éducation va passer du côté libre de la force un jour.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Tu parlais d'Alexis Kauffmann qui est donc au ministère de l'Éducation nationale, plus spécifiquement à la Direction du numérique. C’est la difficulté : ces ministères sont tellement grands, il y a de super initiatives libristes qui se développent au sein du ministère l'Éducation nationale, mais de manière systémique et c'est là où réside le problème. D'ailleurs, même le ministère des Finances n'est pas exempt, malheureusement, de défauts. Heureusement on voit des initiatives, il y a des libristes au sein de ces administrations qui font vivre le Libre, qui, projet après projet, permettent son développement. Mais c'est sûr qu'il y a du chemin à faire côté Éducation nationale.
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<b>Rémi Robilliard : </b>En effet, « la route est longue mais la voie est libre ».
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<b>Charlotte Thomas : </b>J'ai deux choses à dire sur ça.<br/>
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Un. En fait, aux impôts on a en tout 100 000 agents. À l'Éducation nationale plus Supérieur c'est un million, ce n’est donc pas la même masse à bouger. Oui, on essaye de bouger aux impôts, on essaye de bouger vers le Libre. C'est pour cela que la Journée du Libre Éducatif a été instaurée par Alexis Kauffman, c'est pour présenter tous ces projets faits des profs ou des étudiants, 'ai présenté mon projet en tant qu’étudiant, mais il n’y en avait pas beaucoup. Ce sont des projets faits par des profs libristes et, du coup, c'est un moment pour montrer ces projets en Libre, par exemple montrer qu'on a participé à OpenStreetMap, montrer ce qu'on a créé. Je me souviens d'une application qui permettait de s'entraîner sur des oraux en français par exemple, pour les premières qui passent leur examen, le bac.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Si tu retrouves le nom, ça peut peut-être intéresser certains auditeurs.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Oui, si je retrouve le nom. J’essaye de retrouver le nom et je te l'enverrai par mail au pire.
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<b>Étienne Gonnu : </b>On fait comme ça. On rajoutera à la liste des nombreuses ressources que vous avez déjà partagées.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Ce logiciel était très intéressant, il m'a marquée pendant ces journées.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Comme quoi, encore une fois, le Libre c'est vraiment le partage de connaissances afin d'apprendre et de mieux comprendre, que ce soit le monde ou les études, que ce soit dans cette journée où on peut présenter les différents projets. Encore une fois, c'est vraiment donc le corps enseignant ou le corps étudiant qui va travailler là-dessus.
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<b>Charlotte Thomas : </b>On ne s'en rend pas compte mais, surtout la fac, il y a énormément d'initiatives étudiantes, spontanées, sur créer un nouveau logiciel. C'est très commun. Dans ma promo il y a aussi deux autres projets, des petits projets, je ne les connais pas, je ne sais pas ce qu’ils font. Par exemple, une de mes amies a développé, pour s'entraîner, un solveur d'équations logiques et il est entièrement libre, disponible sur son git et <em>selfhost</em> aussi.<br/>
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Donc le Libre ce ne sont pas que certaines personnes dans les facs, ça touche vraiment tout le monde. Les étudiants font leur projet, le mettent à disposition de tout le monde, par exemple pour s'entraîner à utiliser du Haskell - Haskellest un langage de programmation fonctionnel, désolée – pour s'entraîner à utiliser un langage, ils font un projet et après ils le mettent en libre. Il y a, comme ça, énormément de projets libres disponibles, faits par les étudiants et par le corps en enseignant aussi, il ne faut pas oublier.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Comme j'ai pu citer un peu plus tôt, comme Linus Torvalds qui a fait, pour s'entraîner, le système d'exploitation Linux, qui l'a mis en ligne comme ça, sans trop savoir, en disant juste « c’est un petit projet, un petit hobby » qui, au final, est devenu un des OS les plus utilisés sur les serveurs. Quand vous connectez à votre site internet peut-être que vous êtes sur un noyau Linux.
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<b>Charlotte Thomas : </b>C’est un des noyaux les plus utilisés.
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<b>Rémi Robilliard : </b>On va éviter de faire des trucs trop pointus dans cette émission.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Peut-être préciser ce qu'est un noyau. Souvent nous disons GNU/Linux pour rappeler, effectivement qu’il y a ce noyau et tout le système, aussi, qui se construit autour. C'est peut-être intéressant aussi de savoir ce qu'est un noyau informatique, puisqu'on parle de graine de libriste, c'est aussi une forme de graine à l’intérieur du système. C’est quoi le noyau ?
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<b>Charlotte Thomas : </b>Le système c'est toi qui connais.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Je vais simplifier, les puristes, ne me tapez pas, s'il vous plaît !<br/>
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Le noyau c'est le tout premier programme qui va se lancer au démarrage de l'ordinateur et qui va permettre de faire communiquer votre matériel, votre souris avec votre écran. Quand vous allez bouger la souris, donc le curseur, il va passer par le noyau qui va interpréter les signaux et qui va les renvoyer pour l'écran. Ça c’est Linux et la surcouche GNU c'est un ensemble d'outils développés par, encore une fois, le projet GNU, toujours eux, qui, en fait, contient plein d'outils qui permettent d'utiliser le noyau Linux plus facilement.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Il existe des OS qui sont Linux mais sans la surcouche GNU. Par exemple Android tourne sur Linux comme noyau, une vieille version de Linux je crois.
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<b>Rémi Robilliard : </b>J'ai un petit doute là-dessus. Je sais par contre que Alpine Linux, par exemple, utilise un autre système que GNU, mais majoritairement c’est la surcouche GNU qui est encore utilisée actuellement.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Elle est utilisée quasiment sur tous les OS qu'on appelle Linux ; quand on fait un gros amalgame « Linux », la majorité sont des noyaux Linux avec une surcouche GNU.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Les noyaux c'est aussi quelque chose qu'on va étudier à l’université, je pense notamment à un projet que j'ai pu avoir lors de mon master où on a dû manipuler un noyau, là aussi libre, ??? [ 39 min 33] qui est sous BSD ou Apache, je ne sais plus, encore des licences ; ce sont des précisions pour ceux qui aiment bien ça, il y en a beaucoup, il y a énormément de licences. On a donc pu modifier ce noyau, ???, grâce à ces licences libres, on a pu étudier son comportement, donc le porter sur une nouvelle base de code beaucoup plus récente, là aussi sous licence libre. Encore une fois, le Libre permet d'apprendre et de partager des connaissances comme ça.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Tu peux dire le nom, c'est assez drôle !
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<b>Rémi Robilliard : </b>On a essayé de rester dans le thème de la cuisine mexicaine avec notamment Burritos.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Je vais me permettre une question avant de faire une pause musicale, si ça te va, Rémi. Tu as dit que tu étais aussi étudiant à l’ISTIC, c'est le cas de Charlotte encore en ce moment. Charlotte, tu disais que tu avais des camarades de promo qui avaient des projets libres, toi tu disais que tu avais étudié sur un OS libre. Est-ce qu’une place importante est donnée au Libre dans cette faculté ? Ça peut être intéressant. Est-ce que vous pensez que c'est une exception par rapport à d'autres facultés informatiques ? Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'échanger avec des étudiants et étudiantes d'autres facultés en France. À quel point est-ce une exception ou plutôt une norme ? Quel est votre ressenti là-dessus ?
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<b>Rémi Robilliard : </b>Tu veux commencer Charlotte.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Avant d'être en licence j'ai fait une prépa à Bordeaux, donc j'étais effectivement inscrite à l'université de Bordeaux. De ce que j'ai vu sur le guide de la faculté d'informatique de Bordeaux, UF Informatique, il y avait beaucoup moins de projets étudiants. Par contre, je n'ai pas beaucoup parlé à des étudiants et, en prépa, même avec l'option informatique, on ne faisait que deux heures de vraie info, du coup j'étais la seule avec des projets assez gros.
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<b>Rémi Robilliard : </b>Je vais parler un peu plus de la faculté parce que j'ai fait ma licence et mon master là-bas ; j’ai aussi fait un IUT avant, je pourrai peut-être revenir sur l'aspect libre de cet IUT un peu plus tard. À l’ISTIC ce n'est pas vraiment poussé, mais si on veut utiliser du Libre, on peut utiliser du Libre, mais il y a toujours des solutions un peu propriétaires comme Teams, même si j'aurais préféré Mattermost, qui est utilisé laboratoire auquel est rattaché l’ISTIC, ce qui est un peu paradoxal parfois. On utilise aussi Moodle, une plateforme libre aussi, pour gérer les devoirs, un peu comme Pronote. Souvent nos enseignants ne vont pas forcément promouvoir ce logiciel libre.
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Par contre, à mon unité de Vannes, on avait un enseignant qui a cofondé Kaz, le chaton que j’ai cité un peu plus tôt, donc monsieur Merciol, si vous nous écoutez, je vous salue. Il nous expliquait ce qu’est le Libre, il essayait de nous donner cette petite graine qui n’a pas forcément germé chez tout le monde, en tout cas chez moi elle a bien grandi. Je pense qu'on fait partie quand même des universités qui sont assez ouvertes là-dessus. Si on peut utiliser du Libre, ça ne leur pose pas de souci. Je connais notamment certaines écoles d'ingénieurs où c'est beaucoup plus fermé.
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<b>Charlotte Thomas : </b>Pour avoir été en prépa, je connais beaucoup de gens en école d'ingénieur actuellement et le Libre ce n'est vraiment pas un truc qu’ils connaissent. Ils sont tous sur Windows, ils sont tous à utiliser Microsoft Office. Voilà !
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<b>Rémi Robilliard : </b>Bien sûr, ça varie selon les écoles d'ingénieurs, on ne vise pas tout le monde, il y a les bonnes et les mauvaises écoles d'ingénieurs.
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<b>Étienne Gonnu : </b>On laissera chacun méditer sur la différence entre les deux. Je vous propose de faire une pause musicale avant de continuer cet échange. Je vous propose d'écouter <em>Nigth</em> par Cloudkicker. On se retrouve dans environ deux minutes. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
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<b>Pause musicale : </b><em>Nigth</em> par Cloudkicker.
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<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.
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<b>Étienne Gonnu : </b>Nous venons d’écouter <em>Nigth</em> par Cloudkicker, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By.
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==Deuxième partie 46’==
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<b>Étienne Gonnu : </b>Nous avons le plaisir,

Version du 18 octobre 2023 à 14:05


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 17 octobre 2023 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : Xavier Berne -

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 17 octobre 2023

Durée : 1 h 30 min

Podcast PROVISOIRE

Page de présentation de l'émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : Déjà prévue

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Étienne Gonnu : Bonjour à toutes, bonjour à tous.
« Graine de libriste », la parole aux jeunes qui œuvrent pour le logiciel libre et les libertés informatiques. Aujourd’hui nous aurons le plaisir d’entendre une étudiante et un ancien étudiant fraîchement diplômé de l’ISTIC, la faculté informatique de Rennes. C’est le sujet principal de l’émission du jour. Également au programme « Les fracturés du numérique » et une nouvelle chronique de Xavier Berne pour découvrir le droit d’accès aux documents administratifs, aujourd’hui « Comment rendre transparents les marchés publics ». Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Étienne Gonnu de l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 17 octobre 2023, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

À la réalisation de l’émission Thierry Holleville. Salut Thierry.

Thierry HollevilleBonjour à tous.

Étienne Gonnu : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique de Xavier Berne, « Découvrez le droit d’accès aux documents administratifs », sur la transparence des marchés publics

Étienne Gonnu :







 « Graine de libriste », préparé et animé par Rémi Robilliard et avec Charlotte Thomas, étudiante en licence 3 à l’ISTIC de Rennes

Étienne Gonnu : Nous allons poursuivre par notre sujet principal, une émission « Graine de libriste » où on laisse la parole à des jeunes personnes qui s'engagent pour le logiciel libre et les libertés informatiques. À cette occasion, je vais avoir le plaisir à laisser la parole à Rémi Robilliard, avec moi en studio, développeur fraîchement diplômé de l’ISTIC la faculté d'informatique de Rennes, également contributeur à des projets libres, notamment OpenStreetMap. Rémi Robilliard, échangera avec Charlotte Thomas, étudiante en licence 3 à l’ISTIC.
N'hésitez pas à participer à notre conversation au zéro 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l'émission sur le site causecomme.fm, bouton « chat ».
Bonjour Rémi.

Rémi Robilliard : Bonjour Étienne.

Étienne Gonnu : Tu as accepté d'animer cet échange, dans cette thématique « Graine de libriste ». On te remercie de nous avoir rejoints en studio pour cela et je te laisse la parole.

Rémi Robilliard : Merci beaucoup.
J'aimerais en premier remercier l'April de m'avoir donné l’occasion de venir faire cette émission pour parler du Libre au sein de l'université qui n’est pas forcément quelque chose auquel on peut penser tout de suite quand on pense au Libre, vu qu’on va parfois plutôt penser à des vieux barbus, dans leur cave, à utiliser leur ordinateur comme ça. Mais, avant d'être un vieux barbu, il faut planter la graine du Libre et, avant d’avoir les cheveux grisonnants et une barbe d'environ 27 mètres, cela se fait souvent à l'université. Excusez-moi, je me perds dans mes notes.

Étienne Gonnu : Relaxe. C’est déjà une très belle intro déjà, tu nous as vraiment mis l'eau à la bouche pour cet échange.

Rémi Robilliard : Le Libre est en effet né à l'université, notamment avec le projet GNU. Cette philosophie du partage est d'ailleurs quelque chose qu’on ne va pas forcément retrouver dans l'entreprise ou c'est même plutôt la concurrence qui va primer, on va essayer de cacher son code là où, à l’université on partage son savoir et ses compétences. D'ailleurs, si on regarde les plus gros acteurs du monde libre, comme je l'ai dit GNU, ils viennent souvent des bancs de l'école. GNU a été créé par Stallman, dans les années 80, qui est enseignant au MIT. On peut aussi penser à Linux qui a été développé par un jeune étudiant finlandais, qui avait fait un projet sans prétention, qui devenu le monstre que l'on connaît aujourd'hui. Et si on veut être un peu chauvin, on peut citer Framasoft qui a été créé par des professeurs de mathématiques et de français, ou encore l'association qui anime cette émission, l'April qui a été créée en 96, à Paris 8, par des étudiants en informatique. On peut aussi parler des chatons, des pléthores de chatons faits par des étudiants. Rapidement, que sont les chatons ? Ce sont des fournisseurs de services comme du cloud, de l'édition de documents en ligne. Je peux citer La Contre-Voie qui a été créée par des étudiants de 42, Kaz par des enseignants de l’IUT de vannes ou encore ??? [16 min 57] qui a été créé par plusieurs étudiants de différentes écoles.
Bref, le milieu étudiant est intimement lié au Libre et, dans ses études en informatique, qui n'a jamais effleuré cette notion ? D'ailleurs cette notion peut devenir une passion dévorante, comme pour cet étudiant polonais qui a réussi à avoir son diplôme en 2021 sans toucher à un seul logiciel propriétaire, comme Teams, en pleine pandémie. Il a bien réussi son coup.
D'autres fois on veut juste partager ce qu'on a appris sous licence libre pour que tout le monde puisse avoir ces connaissances, un peu comme a fait Charlotte qui est avec moi pour cette émission.
Bonjour Charlotte.

Charlotte Thomas : Bonjour Rémi.

Rémi Robilliard : Étienne t’a présentée rapidement en début d’émission. Est-ce que tu veux rajouter quelque chose ou pas ?

Charlotte Thomas : Je suis étudiante à l’ISTIC, c'est tout ce que je fais, présidente d’association maintenant mais c'est tout.

Rémi Robilliard : Très bien. Je vais commencer par te poser quelques petites questions de base, par exemple comment as-tu connu le logiciel libre, en quelque sorte comment cette graine a-t-elle été plantée au début ?

Charlotte Thomas : Elle a été plantée beaucoup plus tôt qu’à l'université. C'est mon père qui a planté la graine du Libre depuis que je suis toute petite. En effet, j'avais un ordinateur avant même de pouvoir marcher. Il était programmé pour que quand j'appuie sur une touche du clavier ça fasse un son, j'avais littéralement un clavier. À cette époque-là, tous mes ordinateurs ont tourné sur Ubuntu ou sur d'autres distributions Linux.
C'est donc mon père qui m'a donné goût au logiciel libre au fil du temps, en m’apprenant comment développer au début, même si j'ai commencé à apprendre d'autres langages que lui, en m’apprenant ce qu’est l'administration système, ce qu'il faisait aux impôts avant, il était administrateur système. C'est lui qui m'a appris comment on utilise un Linux, comment on administre un Linux, comment on administre les différentes applications, genre MySQL, genre PHP ou Apache, tous ces logiciels. Dont oui, c’est mon père que a planté la graine du Libre en moi et, depuis, je trouve qu'elle a bien grandi !

Rémi Robilliard : D'accord. Très bien. Du coup, tu as continué aussi, toi-même, à alimenter cette graine même jusqu'à continuer, lors de tes études, à faire du logiciel libre. Pourquoi aimes-tu ça ? Pourquoi veux-tu continuer à l'utiliser, à le promouvoir ?

Charlotte Thomas : Pour moi le logiciel libre c’est important, c'est rentré dans le cœur de mes valeurs. Je suis très pour le logiciel libre parce que je crois en la liberté d'information : tout le monde a un droit fondamental à l’information, c'est important pour moi. Donc je partage tous mes logiciels , tout ce que je fais en licence GPLv3, donc tout le code que je fais est en licence libre, la GNU GPL, la GNU General Public License.

Rémi Robilliard : Nous allons reparler juste après de cette licence.

Charlotte Thomas : Je ne fais pas beaucoup d'art, donc je n'utilise pas beaucoup de Creative Commons, mais je fais beaucoup de code et tous mes codes sont en GPL parce que j'aime les informations et, pour moi, elles doivent être publiques, c’est pour cela que tout est open source, tout est libre.

Rémi Robilliard : Très bien. On va revenir rapidement cette notion de GPL. Une licence c'est un contrat qui va définir comment utiliser le logiciel. La GPL va demander à tous les utilisateurs du logiciel de redistribuer ce programme avec cette licence-là. Certaines licences ne demandent pas ça par, exemple à la licence BSD, entre autres, dit juste qu’on peut utiliser le logiciel et, si jamais on souhaite fermer le code derrière, c'est possible. Je préfère préciser un petit peu, pour ceux qui ne sont pas forcément au courant ou initiés dans ce milieu-là.
As-tu un projet en particulier à présenter, un projet qui te tient vraiment à cœur, que tu as mis sous licence libre et que t'as envie de partager comme ça ?

Charlotte Thomas : Bien sûr. Mon projet qui me tient le plus à cœur c’est Baguette Sharp. Qu'est-ce que c'est Baguette Sharp ? C'est un langage de programmation ésotérique, ça fait très peur. En fait c'est juste un langage de programmation qui est fait exprès pour être horrible. Il est développé et c'est un langage qui n’utilise que des pâtisseries françaises et un peu de pâtisseries alsaciennes/germaniques. En fait, tout se code avec des pâtisseries : « Print » c’est « Croissant » pour afficher quelque chose.
C'est le projet qui me tient le plus à cœur, il est en GPLv3 disponible sur GitHub et bientôt sur mon git forge quand j'aurai un serveur pour l'héberger. C’est un projet qui m'a ouvert beaucoup de portes. Il m'a ouvert les portes d'un stage, l’année dernière, à l'Inria de Rennes. Il m’a ouvert les portes de Pas Sage en Seine où j'ai fait une présentation de 30 minutes dessus. Il m’a ouvert les portes de la Journée du Libre Éducatif, grâce à Alexis Kauffmann, où j'ai fait une petite présentation flash dessus.

Rémi Robilliard : Pour venir rapidement l'Inria est un laboratoire d'informatique basé en Bretagne.

Charlotte Thomas : L’Inria c’est national.

Rémi Robilliard : Je confonds toujours, c’est Irisa qui est en Bretagne.

Charlotte Thomas : Irisa c’est en Bretagne.???[22 min 40]

Rémi Robilliard : Les noms sont assez voisins, donc je confonds toujours ; Pas Sage en Seine, ce sont trois jours de conférences, et ça a lieu à Choisy-le-Roi tous les ans en juillet ; Alexis Kauffmann est un des cofondateurs de Framasoft et il travaille maintenant au ministère de l'Éducation, il essaye de pousser un petit peu cette philosophie du Libre. Vous pouvez d’ailleurs retrouver une super conférence de sa part à Pas Sage en Seine où il explique un peu les actions qu'ils entreprennent au sein du ministère pour mettre en avant le Libre.

Étienne Gonnu : Je vais me permettre. Il est même intervenu dans une émission de septembre dernier dans Libre à vous !, une autre occasion de l'entendre. C’est effectivement quelqu'un de très intéressant à écouter.

Rémi Robilliard : Merci Étienne pour cette petite précision toujours bonne à prendre.
Parmi toutes ces portes qui t’ont été ouvertes, est-ce qu'il y en a une qui t'a permis d'avoir des échanges en plus, par exemple ton stage au sein du laboratoire de recherche ? Est-ce que tu as pu voir des personnes qui connaissent un petit peu, on va dire, ce milieu du développement un peu plus poussé ? Est-ce que tu as pu avoir des échanges intéressants ?

Charlotte Thomas : Effectivement. Quand je suis rentrée au laboratoire, donc à l'équipe PACAP à Rennes, s’ils m’écoutent un jour, ils sont dans mon cœur, voilà ! J'ai connu plein de gens qui m'ont appris beaucoup de logiciels libres, par exemple Gnuplot pour faire des graphiques au lieu d'utiliser Matplotlib sur Python ou d’utiliser, surtout pas, un truc sur un tableur, non c'est Gnuplot qu'on utilise. C'est un logiciel qui se fait par ligne de commande pour afficher des graphiques et c'est, bien sûr, sous licence GPL, puisque c'est un logiciel de GNU.
J'ai donc découvert ça, j'ai découvert plein d'outils qu'on a fait à Inria, qui sont ouverts pour tout le monde, quelques outils. Par exemple j'ai appris à l’Inria de Rennes que André Seznec a inventé la prédiction de branchement sur les processeurs. J'ai donc appris beaucoup de choses quand j'étais à Inria, beaucoup de choses en libre. J'ai fait du code qui n’est pas encore libre puisque c'est du code qui attend d’être publié. En tout cas, j'ai appris beaucoup de logiciels libres pour pouvoir coder. Par exemple, mon rapport est fait en LaTeX, un logiciel construit sur une technologie qui a 40 ans pour faire des documents et qui est sous licence libre. J'ai utilisé Gnuplot qui est sous licence libre. J’ai utilisé aussi LibreOffice qui est sous licence libre. Donc j'utilisais beaucoup de logiciels libres.

Rémi Robilliard : Très bien. On va on va sortir un petit peu de ce cadre de recherche. Est-ce qu’il y a encore d'autres logiciels libres que tu utilises au sein de tes études, par exemple des éditeurs de code libre ou autre chose ?

Charlotte Thomas : On ne le dira jamais assez mais Gimp m'a sauvé la vie. Merci à Gimp ou « jimp », je ne sais pas comment on dit.

Rémi Robilliard : Je crois que c’est un petit débat dans la communauté.

Étienne Gonnu : Personne ne sait !

Charlotte Thomas : Ça m'a sauvé la vie plusieurs fois, ça édite tous les PDF, au cas où, Ça ma beaucoup aidée.
Je commence à me mettre à utiliser Emacs, c’est un peu long, je sors de VSCodium pour utiliser Emacs, petit à petit

Rémi Robilliard : Pour nos auditeurs qui ne sont pas développeurs, Emacs et VSCodium sont des outils pour pouvoir écrire du code.

Charlotte Thomas : Emacs c'est celui de GNU donc sous licence GPL et libre ; VSCodium est fait par Microsoft.

Rémi Robilliard : Aussi sous licence libre, il faut le préciser. Les grands GAFAM ont parfois une petite bonté et font du logiciel libre.

Charlotte Thomas : C'est la version privatisée de VSCode en fait.
J’utilise LibreOffice tous les jours.
Pour prendre des notes Typist, de plus en plus, au lieu de LaTeX. C'est un logiciel un peu comme du Markdown pour prendre des notes, c'est rapide pour faire plein de choses, c'est très puissant, c’est un peu comme du Python niveau programmation, c’est fait en Rust, un langage programmation libre aussi et  Typist est un logiciel libre.

Rémi Robilliard : Donc beaucoup de logiciels libres qui font vraiment un écosystème qui permet d'étudier librement, un peu comme nous l'étudiant polonais que j'ai pu citer un peu plus tôt.
Je vais aussi raconter un petit peu, rapidement, ce que j'ai pu lors de mes études pour le Libre. J’ai tout de suite utilisé, comme a dit Charlotte, VSCodium et VSCode qui sont des éditeurs de code libre. J'ai aussi utilisé Linux, Firefox, tous ces outils-là, qui sont des outils que vous utilisez sans savoir qu’ils sont libres comme LibreOffice, Gimp et tant d'autres, et c’est caché à vos yeux.

Charlotte Thomas : GeoGebra.

Rémi Robilliard : GeoGebra aussi pour les collégiens qui nous écoutent peut-être, un logiciel pour faire de la géométrie, entre autres, et des maths, qui est aussi sous licence libre et qui français, si je ne dis pas de bêtises.

Étienne Gonnu : Je précise. Vous citez énormément de logiciels libres, de ressources libres, je les note au fur et à mesure et on mettra à jour rapidement les références sur la page de l'émission pour les personnes qui souhaitent effectivement aller y jeter un œil.

Charlotte Thomas : Comme ça tout le monde peut utiliser ces logiciels libres.

Rémi Robilliard : C'est toujours intéressant de rajouter un nouveau logiciel qui peut parfois être un peu plus performant que le précédent dans son flux de travail.

Charlotte Thomas : Et il ne faut pas oublier le côté sécurité des logiciels libres

Rémi Robilliard : Oui. Les logiciels propriétaires, qui ont fermé leur code, vont mettre en avant la sécurité par l'obscurité. Ça veut dire que si personne ne peut voir le code ça ne peut pas être cassé. On a eu plusieurs démonstrations que si, en effet, il y a des petites failles à droite à gauche, là où avec le logiciel libre, comme tout le monde peut lire le code, tout le monde peut trouver des failles, donc tout le monde peut les remonter beaucoup plus rapidement.

Charlotte Thomas : C'est comme cela que plusieurs failles ont été sécurisées dans Linux, très rapidement.

Rémi Robilliard : Je vais reprendre un peu mon fil des questions parce qu'on a un peu dévié.
Pour revenir sur ton projet que tu as mis sous licence GPL. Pourquoi utiliser cette licence précisément ? Est-ce que c'est parce que, comme je l'ai expliqué un peu plus tôt, si jamais quelqu'un veut modifier le code, il est obligé de garder cette licence pour garder le savoir ou c’est pour une autre raison particulière ?

Charlotte Thomas : C'est effectivement bien pour le fait que ça reste dans le Libre. Je ne voudrais pas, comme pour les logiciels qui sont sous licence MIT, une autre licence qui, elle, permet de fermer le code plus tard. La GPL est une licence qui permet que ça reste dans le domaine ouvert. Même s’il y a des modifications sur mon logiciel – ce que j'attends, si quelqu'un veut modifier mon logiciel pour faire d’autres choses à la place des pâtisseries qu'il le fasse ! J'attends juste que ça arrive ! Donc si quelqu'un veut modifier mon logiciel ça doit rester dans le domaine public. C'est donc ce côté copyleft, à l'opposé de copyright, qui m'intéressait beaucoup dans la GPL, c'est pour cela que j'ai finalement passé tous mes projets en GPL.

Rémi Robilliard : D’accord. Je vais aussi reprendre. Le copyleft c'est juste pour dire qu’on est obligé de redistribuer sous la même licence. Le MIT n'a pas de copyleft, c'est pour cela qu'on peut changer la licence en cours de route.
On a vu un petit peu le Libre dans le milieu des études avec les logiciels qu'on utilise pour travailler, les logiciels qu'on utilise aussi pour communiquer, Matrix par exemple.

Charlotte Thomas : Mattermost.

Rémi Robilliard : Mattermost qui est utilisé au sein de l’Irisa et de l'Inria, si je ne dis pas de bêtises.

Charlotte Thomas : C’est le cas.

Rémi Robilliard : On peut maintenant sortir de ce cadre scolaire et voir un petit peu le Libre dans le monde du travail, en tant qu'étudiant on finit toujours par sortir de l'école pour aller travailler. Comment vois-tu le Libre dans ton métier après les études ?

Charlotte Thomas : C'est une très bonne question parce qu’après mes études, même pendant, parce que le concours est dans un mois, je compte passer le concours d’inspectrice des finances publiques, ils appellent ça « en qualité de programmeur système d'exploitation », PSE, c'est pour dire que c'est admin-system, donc je vais administrer des systèmes en Linux. Ce sera donc très important dans mon travail parce que tous les logiciels qu'on utilise à la DGFiP, et à l'État en plus général, sont des logiciels libres. C’est même très important et ce n’est pas une question : on utilise des logiciels libres obligatoirement, il faut une dérogation spéciale pour utiliser genre Microsoft Office, sinon tout le monde utilise LibreOffice et tous les serveurs sont sous Linux. On peut citer, par exemple, le cloud interministériel qu’a fait la DGFiP, qui permet de garder les données en France ; au moins toutes les données de la DGFiP sont stockées en France par la DGFiP, c’est elle qui a la souveraineté des données et en licence libre parce que ce cloud utilise des logiciels libres pour se construire.
En tout cas, à la DGFiP, là où j'ai travaillé, là où je vais travailler plus tard, le logiciel libre occupe une place très importante puisque tout est en logiciel libre, obligatoirement, sauf dérogation spéciale.

Rémi Robilliard : On peut peut-être regretter le fait que ce soient les impôts qui utilisent beaucoup le logiciel libre et pas le ministère de l'Éducation avec notamment les licences Oracle ou encore Office.

Charlotte Thomas : Oui. Malheureusement c'est plus difficile de faire bouger l'Éducation que les impôts là-dessus, bizarrement, mais j’espère bien que l'Éducation va passer du côté libre de la force un jour.

Étienne Gonnu : Tu parlais d'Alexis Kauffmann qui est donc au ministère de l'Éducation nationale, plus spécifiquement à la Direction du numérique. C’est la difficulté : ces ministères sont tellement grands, il y a de super initiatives libristes qui se développent au sein du ministère l'Éducation nationale, mais de manière systémique et c'est là où réside le problème. D'ailleurs, même le ministère des Finances n'est pas exempt, malheureusement, de défauts. Heureusement on voit des initiatives, il y a des libristes au sein de ces administrations qui font vivre le Libre, qui, projet après projet, permettent son développement. Mais c'est sûr qu'il y a du chemin à faire côté Éducation nationale.

Rémi Robilliard : En effet, « la route est longue mais la voie est libre ».

Charlotte Thomas : J'ai deux choses à dire sur ça.
Un. En fait, aux impôts on a en tout 100 000 agents. À l'Éducation nationale plus Supérieur c'est un million, ce n’est donc pas la même masse à bouger. Oui, on essaye de bouger aux impôts, on essaye de bouger vers le Libre. C'est pour cela que la Journée du Libre Éducatif a été instaurée par Alexis Kauffman, c'est pour présenter tous ces projets faits des profs ou des étudiants, 'ai présenté mon projet en tant qu’étudiant, mais il n’y en avait pas beaucoup. Ce sont des projets faits par des profs libristes et, du coup, c'est un moment pour montrer ces projets en Libre, par exemple montrer qu'on a participé à OpenStreetMap, montrer ce qu'on a créé. Je me souviens d'une application qui permettait de s'entraîner sur des oraux en français par exemple, pour les premières qui passent leur examen, le bac.

Rémi Robilliard : Si tu retrouves le nom, ça peut peut-être intéresser certains auditeurs.

Charlotte Thomas : Oui, si je retrouve le nom. J’essaye de retrouver le nom et je te l'enverrai par mail au pire.

Étienne Gonnu : On fait comme ça. On rajoutera à la liste des nombreuses ressources que vous avez déjà partagées.

Charlotte Thomas : Ce logiciel était très intéressant, il m'a marquée pendant ces journées.

Rémi Robilliard : Comme quoi, encore une fois, le Libre c'est vraiment le partage de connaissances afin d'apprendre et de mieux comprendre, que ce soit le monde ou les études, que ce soit dans cette journée où on peut présenter les différents projets. Encore une fois, c'est vraiment donc le corps enseignant ou le corps étudiant qui va travailler là-dessus.

Charlotte Thomas : On ne s'en rend pas compte mais, surtout la fac, il y a énormément d'initiatives étudiantes, spontanées, sur créer un nouveau logiciel. C'est très commun. Dans ma promo il y a aussi deux autres projets, des petits projets, je ne les connais pas, je ne sais pas ce qu’ils font. Par exemple, une de mes amies a développé, pour s'entraîner, un solveur d'équations logiques et il est entièrement libre, disponible sur son git et selfhost aussi.
Donc le Libre ce ne sont pas que certaines personnes dans les facs, ça touche vraiment tout le monde. Les étudiants font leur projet, le mettent à disposition de tout le monde, par exemple pour s'entraîner à utiliser du Haskell - Haskellest un langage de programmation fonctionnel, désolée – pour s'entraîner à utiliser un langage, ils font un projet et après ils le mettent en libre. Il y a, comme ça, énormément de projets libres disponibles, faits par les étudiants et par le corps en enseignant aussi, il ne faut pas oublier.

Rémi Robilliard : Comme j'ai pu citer un peu plus tôt, comme Linus Torvalds qui a fait, pour s'entraîner, le système d'exploitation Linux, qui l'a mis en ligne comme ça, sans trop savoir, en disant juste « c’est un petit projet, un petit hobby » qui, au final, est devenu un des OS les plus utilisés sur les serveurs. Quand vous connectez à votre site internet peut-être que vous êtes sur un noyau Linux.

Charlotte Thomas : C’est un des noyaux les plus utilisés.

Rémi Robilliard : On va éviter de faire des trucs trop pointus dans cette émission.

Étienne Gonnu : Peut-être préciser ce qu'est un noyau. Souvent nous disons GNU/Linux pour rappeler, effectivement qu’il y a ce noyau et tout le système, aussi, qui se construit autour. C'est peut-être intéressant aussi de savoir ce qu'est un noyau informatique, puisqu'on parle de graine de libriste, c'est aussi une forme de graine à l’intérieur du système. C’est quoi le noyau ?

Charlotte Thomas : Le système c'est toi qui connais.

Rémi Robilliard : Je vais simplifier, les puristes, ne me tapez pas, s'il vous plaît !
Le noyau c'est le tout premier programme qui va se lancer au démarrage de l'ordinateur et qui va permettre de faire communiquer votre matériel, votre souris avec votre écran. Quand vous allez bouger la souris, donc le curseur, il va passer par le noyau qui va interpréter les signaux et qui va les renvoyer pour l'écran. Ça c’est Linux et la surcouche GNU c'est un ensemble d'outils développés par, encore une fois, le projet GNU, toujours eux, qui, en fait, contient plein d'outils qui permettent d'utiliser le noyau Linux plus facilement.

Charlotte Thomas : Il existe des OS qui sont Linux mais sans la surcouche GNU. Par exemple Android tourne sur Linux comme noyau, une vieille version de Linux je crois.

Rémi Robilliard : J'ai un petit doute là-dessus. Je sais par contre que Alpine Linux, par exemple, utilise un autre système que GNU, mais majoritairement c’est la surcouche GNU qui est encore utilisée actuellement.

Charlotte Thomas : Elle est utilisée quasiment sur tous les OS qu'on appelle Linux ; quand on fait un gros amalgame « Linux », la majorité sont des noyaux Linux avec une surcouche GNU.

Rémi Robilliard : Les noyaux c'est aussi quelque chose qu'on va étudier à l’université, je pense notamment à un projet que j'ai pu avoir lors de mon master où on a dû manipuler un noyau, là aussi libre, ??? [ 39 min 33] qui est sous BSD ou Apache, je ne sais plus, encore des licences ; ce sont des précisions pour ceux qui aiment bien ça, il y en a beaucoup, il y a énormément de licences. On a donc pu modifier ce noyau, ???, grâce à ces licences libres, on a pu étudier son comportement, donc le porter sur une nouvelle base de code beaucoup plus récente, là aussi sous licence libre. Encore une fois, le Libre permet d'apprendre et de partager des connaissances comme ça.

Charlotte Thomas : Tu peux dire le nom, c'est assez drôle !

Rémi Robilliard : On a essayé de rester dans le thème de la cuisine mexicaine avec notamment Burritos.

Étienne Gonnu : Je vais me permettre une question avant de faire une pause musicale, si ça te va, Rémi. Tu as dit que tu étais aussi étudiant à l’ISTIC, c'est le cas de Charlotte encore en ce moment. Charlotte, tu disais que tu avais des camarades de promo qui avaient des projets libres, toi tu disais que tu avais étudié sur un OS libre. Est-ce qu’une place importante est donnée au Libre dans cette faculté ? Ça peut être intéressant. Est-ce que vous pensez que c'est une exception par rapport à d'autres facultés informatiques ? Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'échanger avec des étudiants et étudiantes d'autres facultés en France. À quel point est-ce une exception ou plutôt une norme ? Quel est votre ressenti là-dessus ?

Rémi Robilliard : Tu veux commencer Charlotte.

Charlotte Thomas : Avant d'être en licence j'ai fait une prépa à Bordeaux, donc j'étais effectivement inscrite à l'université de Bordeaux. De ce que j'ai vu sur le guide de la faculté d'informatique de Bordeaux, UF Informatique, il y avait beaucoup moins de projets étudiants. Par contre, je n'ai pas beaucoup parlé à des étudiants et, en prépa, même avec l'option informatique, on ne faisait que deux heures de vraie info, du coup j'étais la seule avec des projets assez gros.

Rémi Robilliard : Je vais parler un peu plus de la faculté parce que j'ai fait ma licence et mon master là-bas ; j’ai aussi fait un IUT avant, je pourrai peut-être revenir sur l'aspect libre de cet IUT un peu plus tard. À l’ISTIC ce n'est pas vraiment poussé, mais si on veut utiliser du Libre, on peut utiliser du Libre, mais il y a toujours des solutions un peu propriétaires comme Teams, même si j'aurais préféré Mattermost, qui est utilisé laboratoire auquel est rattaché l’ISTIC, ce qui est un peu paradoxal parfois. On utilise aussi Moodle, une plateforme libre aussi, pour gérer les devoirs, un peu comme Pronote. Souvent nos enseignants ne vont pas forcément promouvoir ce logiciel libre. Par contre, à mon unité de Vannes, on avait un enseignant qui a cofondé Kaz, le chaton que j’ai cité un peu plus tôt, donc monsieur Merciol, si vous nous écoutez, je vous salue. Il nous expliquait ce qu’est le Libre, il essayait de nous donner cette petite graine qui n’a pas forcément germé chez tout le monde, en tout cas chez moi elle a bien grandi. Je pense qu'on fait partie quand même des universités qui sont assez ouvertes là-dessus. Si on peut utiliser du Libre, ça ne leur pose pas de souci. Je connais notamment certaines écoles d'ingénieurs où c'est beaucoup plus fermé.

Charlotte Thomas : Pour avoir été en prépa, je connais beaucoup de gens en école d'ingénieur actuellement et le Libre ce n'est vraiment pas un truc qu’ils connaissent. Ils sont tous sur Windows, ils sont tous à utiliser Microsoft Office. Voilà !

Rémi Robilliard : Bien sûr, ça varie selon les écoles d'ingénieurs, on ne vise pas tout le monde, il y a les bonnes et les mauvaises écoles d'ingénieurs.

Étienne Gonnu : On laissera chacun méditer sur la différence entre les deux. Je vous propose de faire une pause musicale avant de continuer cet échange. Je vous propose d'écouter Nigth par Cloudkicker. On se retrouve dans environ deux minutes. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Nigth par Cloudkicker.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Étienne Gonnu : Nous venons d’écouter Nigth par Cloudkicker, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By.

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Deuxième partie 46’

Étienne Gonnu : Nous avons le plaisir,