Différences entre les versions de « Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 10 octobre 2023 »

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<b>Benjamin Bellamy : </b>Carine parlait à l'instant de patrimoine et de « je suis podcasteur, j'ai fini un podcast, comment est-ce que je fais pour le garder en ligne si je n'ai pas envie de continuer à payer dix euros par mois ? ». C'est une des raisons pour lesquelles on a développé Castopod, castopod.org, qui est une plateforme d'hébergement de podcasts. Nous n’avons pas été très originaux dans le sens où on a pris un modèle qui nous semblait fonctionner plutôt pas mal qui était celui de Wordpress. Wordpress permet de publier des sites internet de contenus mais spécifique au podcast.<br/>
 
<b>Benjamin Bellamy : </b>Carine parlait à l'instant de patrimoine et de « je suis podcasteur, j'ai fini un podcast, comment est-ce que je fais pour le garder en ligne si je n'ai pas envie de continuer à payer dix euros par mois ? ». C'est une des raisons pour lesquelles on a développé Castopod, castopod.org, qui est une plateforme d'hébergement de podcasts. Nous n’avons pas été très originaux dans le sens où on a pris un modèle qui nous semblait fonctionner plutôt pas mal qui était celui de Wordpress. Wordpress permet de publier des sites internet de contenus mais spécifique au podcast.<br/>
 
Castopod permet à n'importe qui de télécharger la solution et d'auto-héberger son podcast, pour le coup à un coût vraiment réduit, voire gratuit si on a déjà son serveur.<br/>
 
Castopod permet à n'importe qui de télécharger la solution et d'auto-héberger son podcast, pour le coup à un coût vraiment réduit, voire gratuit si on a déjà son serveur.<br/>
On l'a dit, je ne sais pas si c'était très clair, mais la technologie du podcast date des années 90, elle n'a pas évolué depuis, ou très peu, et, dans les années 90, le Web était totalement décentralisé, il n'y avait pas de plateformes fermées comme il y a aujourd'hui : on est sur Facebook, eh bien on est dans Facebook, on n’est pas sur Internet, on est sur une plateforme fermée. Quand on est sur YouTube on est enfermé sur YouTube, c'est-à-dire que Google est le seul qui décide quel est le contenu qui a le droit d'être là, quel est le contenu qui va être visible, qui va être recommandé. Sur le podcast, on n'a pas ça du tout parce qu'on peut choisir son hébergeur. Carine en a cité quelques-uns. Il y en a d’autres. Je citerai ??? [1 h 7 min 50] parce qu’ils sont très sympas, ils sont aussi très bons, et ce sont des sociétés françaises, tout à fait.<br/>
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On l'a dit, je ne sais pas si c'était très clair, mais la technologie du podcast date des années 90, elle n'a pas évolué depuis, ou très peu, et, dans les années 90, le Web était totalement décentralisé, il n'y avait pas de plateformes fermées comme il y a aujourd'hui : on est sur Facebook, eh bien on est dans Facebook, on n’est pas sur Internet, on est sur une plateforme fermée. Quand on est sur YouTube on est enfermé sur YouTube, c'est-à-dire que Google est le seul qui décide quel est le contenu qui a le droit d'être là, quel est le contenu qui va être visible, qui va être recommandé. Sur le podcast, on n'a pas ça du tout parce qu'on peut choisir son hébergeur. Carine en a cité quelques-uns. Il y en a d’autres. Je citerai podCloud et Vodio parce qu’ils sont très sympas, ils sont aussi très bons, et ce sont des sociétés françaises, tout à fait.<br/>
 
On peut choisir sa plateforme d'hébergement, donc, potentiellement, si on se fait supprimer son podcast d'une plateforme d'hébergement, on peut très bien aller chez une autre sans perdre son audience. Ses auditeurs peuvent aller sur une plateforme d'écoute, on a cité Apple et Spotify parce que, aujourd'hui, ce sont ceux qui ont de l'argent, mais il y en a plein d’autres.
 
On peut choisir sa plateforme d'hébergement, donc, potentiellement, si on se fait supprimer son podcast d'une plateforme d'hébergement, on peut très bien aller chez une autre sans perdre son audience. Ses auditeurs peuvent aller sur une plateforme d'écoute, on a cité Apple et Spotify parce que, aujourd'hui, ce sont ceux qui ont de l'argent, mais il y en a plein d’autres.
  
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<b>Frédéric Couchet : </b>Parfait. Je pense qu'on fera une nouvelle émission, ne serait-ce que pour parler de Podcasting 2.0.<br/>
 
<b>Frédéric Couchet : </b>Parfait. Je pense qu'on fera une nouvelle émission, ne serait-ce que pour parler de Podcasting 2.0.<br/>
J'indique aux personnes qui sont intéressées au podcast et qui sont en région parisienne, qu’elles peuvent aller au Paris Podcast Festival les 13 et 14 octobre 2023 à la Gaîté Lyrique. Bientôt il y aura aussi pod castres???[1 H 12 min 52] à Castres, dans le Tarn, où Benjamin Bellamy sera. Est-ce que tu as des dates en tête Benjamin ?
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J'indique aux personnes qui sont intéressées au podcast et qui sont en région parisienne, qu’elles peuvent aller au Paris Podcast Festival les 13 et 14 octobre 2023 à la Gaîté Lyrique. Bientôt il y aura aussi PodCastres à Castres, dans le Tarn, où Benjamin Bellamy sera. Est-ce que tu as des dates en tête Benjamin ?
  
 
<b>Benjamin Bellamy : </b>28 et 29 octobre.
 
<b>Benjamin Bellamy : </b>28 et 29 octobre.

Version du 11 octobre 2023 à 15:36


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 10 octobre 2023 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : à la régie

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 10 octobre 2023

Durée : 1 h 30 min

Podcast PROVISOIRE

Page de présentation de l'émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : Déjà prévue

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous dans Libre à vous !. C’est le moment que vous avez choisi pour vous offrir 1 heure 30 d’informations et d’échanges sur les libertés informatiques et également de la musique libre.
Le podcasting ou baladodiffusion, c’est le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme la chronique d’Antanak en début d’émission dont on découvrira le thème et aussi, en fin d’émission, une interview de Cécilia Bossard, membre de Duchess France.

Cette émission est proposée par l’April l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’émission c’est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 10 octobre 2023, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

À la réalisation de l’émission du jour, c’est sa première. Elle est fondatrice de l’agence Parisweb.art dédiée à la culture et aux arts et elle donne du temps bénévole pour être à la régie de l’émission aujourd’hui, c’est Julie Chaumard. Bonjour Julie.

Julie Chaumard : Bonjour. Bonne émission.

Frédéric Couchet : Merci. Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » par Isabelle Carrère d’Antanak

Frédéric Couchet : « Que libérer d’autre que du logiciel », la chronique d’Antanak








Frédéric Couchet : On va faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Frédéric Couchet : Après la pause musicale nous parlerons de podcasting.
En attendant nous allons écouter, et c’est le choix d’un de nos invités, en l’occurrence Benjamin Bellamy, You Will Be Wild par John Lopker. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : You Will Be Wild par John Lopker.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter You Will Be Wild par John Lopker, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By.

[Jingle]

Frédéric Couchet : Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Le podcasting avec Carine Fillot et Benjamin Bellamy 14 min 10

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par notre sujet principal qui va porter sur le podcasting avec nos invités : Carine Fillot, fondatrice d’Elson et Benjamin Bellamy, fondateur et dirigeant de la société Ad Aures et de Castopod dont on parlera tout à l’heure. Je vais les laisser se présenter un peu plus au début, évidemment.
N’hésitez pas à participer à notre conversation sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat » salon #libreavous.
Première question, une petite présentation rapide pour que les gens vous découvrent. Carine Fillot

Carine Fillot : Bonjour. Ça me fait toujours plaisir de venir dans un studio de radio, déjà, puisque j’ai commencé la radio quand j’étais ado. Aujourd’hui, après un long parcours notamment à Radio France, j’entreprends dans ce qui n’est pas complètement de la radio, mais c’est aussi de la radio, c’est le podcast. Aujourd’hui Elson est à la fois une société qui est un organisme de formation . on accompagne des particuliers, mais aussi des entreprises, à concevoir, produire et diffuser des podcasts. On a une aussi une activité avec des entreprises ou des organisations autour de la production. Et puis on s’intéresse de près, en expérimentant pas mal de choses avec aussi un prototype autour de ça, à une forme de découvrabilité des contenus : comment recommander des contenus pas uniquement de manière algorithmique mais aussi éditoriale. Ces dernières années on a passé beaucoup de temps à ausculter les contenus de la radio diffusés en podcast et, à la fois, ce qu’on appelle les podcasts natifs, c’est-à-dire les podcasts issus de créateurs qui diffusent sur Internet et pas dans une radio traditionnelle FM.

Frédéric Couchet : Merci Carine. Deuxième invité Benjamin Bellamy.

Benjamin Bellamy : Bonjour.
Je suis un libriste convaincu depuis un peu plus d’une vingtaine d’années, auditeur de podcast depuis un peu moins d’une vingtaine d’années. En 2020, j’ai créé la société Ad Aures qui développe des outils libres pour créer des écosystèmes équitables et durables pour toutes les podcasteuses et tous les podcasteurs.
Qu’est-ce que ça veut dire en deux mots ? On développe des solutions informatiques qui permettent de mettre à disposition, c’est-à-dire d’héberger des podcasts, mais aussi de les rendre découvrables, de les transcrire et de les monétiser.

Frédéric Couchet : Des concepts dont on va parler tout l’heure : découvrabilité, c’est important.
On a fait à faire à deux personnes expertes dont l’une a une très grosse expérience radio.
Beaucoup de gens qui nous écoutent nous écoutent surtout souvent en podcast, même si on a évidemment des auditrices et des auditeurs sur la bande FM. Peut-être que ces personnes-là ont une idée de ce qu’est un podcast, mais on va quand mème commencer par expliquer ce qu’est un podcast, le concept de podcasting. Qu’est-ce que c’est concrètement ? Qui veut commencer ? Carine.

Carine Fillot : Aujourd’hui c’est un mot qu’on utilise à plein de sauces pour décrire plein de réalités en fait. On va dire que si on doit partir de son origine, d’abord c’est la contraction de deux mots : « pod », on va le comprendre après, qui vient beaucoup, au départ, de l’écosystème d’Apple et de l’iPod puisque, dans les années 90, on n’avait pas de smartphone et pour réécouter ou même écouter de la musique, des MP3, on utilisait souvent ce baladeur numérique et de cast, diffusion en anglais. C’est donc un mot valise, podcast, qui a émergé notamment au moment où la plateforme iTunes d’Apple agrège – on est, Benjamin pourra repréciser, en 2005/2006, à un moment où, en fait on est dans l’adoption de ce baladeur numérique. Quand on parle de podcast, on parle souvent d’agrégation et on commence, du coup, à agréger des podcasts.
Derrière ce mot il y a une technologie, une très vieille technologie du Web qui s’appelle le flux RSS, qui est un format d’indexation de contenus. Benjamin, peut-être peux-tu rebondir dessus, si tu veux en parler d’une manière un peu plus technique ? Je finirai juste par dire que « podcast », aujourd’hui, c’est aussi du contenu, c’est une manière de dire « je fais un contenu qui n’est pas de la radio, un contenu sonore qui a un ADN un peu différent et qui est donc distribué à ce mode de distribution sous-jacent, du coup, aux flux RSS.

Benjamin Bellamy : Tout à fait. La première chose qu’il faut bien comprendre quand on parle de podcast, et pour lever toute ambiguïté, c’est qu’on ne peut pas lever l’ambiguïté. En fait, il n’y a pas de définition officielle du podcast, il n’y en a jamais eu et il n’y en aura probablement jamais, donc tout le monde met un peu ce qu’il veut derrière ce mot valise qui date de 2004. C’est Ben Hammersley, journaliste au Guardian qui l’a utilisé pour la première fois, on parle aussi d’audio blogging à l’époque. Chacun met un peu ce qu’il veut derrière le podcast.
Moi qui suis ingénieur de formation, j’ai tendance à voir des définitions qui sont plutôt d’ordre technique. Ma définition du podcast c’est que c’est un contenu multimédia, en général un fichier MP3 sonore, qui est dans un flux RSS . Le flux RSS que tu as évoqué, qui date de 1995, c’est juste un moyen de partager des informations, à l’époque on parlait surtout de blogs, et de manière totalement décentralisée, c’est-à-dire que chacun peut s’abonner avec le logiciel de son choix.
En 2000 – je pense que c’est important de noter parce qu’on fait un peu trop de French bashing en ce moment –, on doit l’invention technique du podcast à un Français qui s’appelle Tristan Louis, qui est le premier qui a eu l’idée de mettre un fichier MP3 dans un flux RSS. C’était surtout utilisé par ce qu’on appelle les geeks. En 2003, Adam Curry, un podcasteur de la première heure qui avait déjà eu une carrière sur MTV en tant que vidéo-jockey, a, le premier créé un petit programme qui permettait de télécharger tous ces flux RSS – à l'époque ça ne s'appelait pas encore podcast, le mot podcast a été créé après – sur son iPod. En fait, le premier device qui a permis de consommer des podcasts c'était l'iPod. On comprend, du coup, tout de suite pourquoi on a appelé ça podcast.
Pour l'anecdote, que personnellement je trouve assez truculente, il se trouve qu’en 2005, donc deux ans après que Adam Curry eut créé ce petit script qui permettait d'écouter ses podcasts sur son iPod, il a reçu un appel de Eddy Cue qui travaillait chez Apple et qui lui a dit « est-ce que tu peux venir à San Francisco rencontrer Steve Jobs ? » Il s'est retrouvé un matin à San Francisco face à Steve Jobs qui lui a dit « ton truc m'intéresse et j'ai vu que tu as un petit index avec pas mal de podcasts, est-ce que tu veux bien nous le filer pour qu’on le mette en avant ? ». Adam Curry était très content que ce truc-là prenne de l'importance et que Apple s'y intéresse, donc il a dit oui. Et l'après-midi même, Steve Jobs, dans sa keynote, a annoncé ce qu'on appelle aujourd'hui Apple Podcasts qui, à l'époque, était à iTunes Podcasts. En 2005, donc un an après l'invention du mot et deux ans après l'usage sur les iPod, on a eu l’explosion du podcast, en tout cas la première parce qu'il y en a eu plusieurs, qui a rendu ça visible pour tout le monde. Ce n'était plus une affaire de geeks, c'était vraiment un outil de mass media j'ai envie de dire.

Carine Fillot : À cette époque-là, un petit peu après, aux alentours de 2006, je revois un de mes boss franchir la porte du bureau et me dire « le PDG de Radio France, à l'époque Jean-Paul Cluzel, a décidé que dans moins de deux/trois mois toutes les émissions de Radio France serait disponible en podcast ». C'est une vraie révolution. Avant on diffusait tout juste sur Internet, mais on ne découpait pas les émissions de radio. En réalité, une radio est déjà découpée virtuellement, ça s'appelle une grille de programmes. La radio était numérisée aussi depuis peu. Donc, en gros, il fallait organiser un peu tout ça pour que chaque émission délivre un MP3, puisque un podcast c'est quoi ?, c’est un fichier MP3 mis dans un fichier texte.
Pour revenir sur cette notion du RSS, j'accompagne beaucoup d'apprenants et d'apprenantes dans le podcast et c'est vrai que pour eux c'est toujours un peu obscur cette histoire : que faut-il pour faire un podcast ? Pour revenir dessus, que faut-il techniquement ? Un fichier MP3, mais un podcast ce n’est pas la promesse d'un seul fichier MP3, c'est la promesse d'une récurrence, comme une émission de radio finalement. Il faut, comme si on faisait un site internet, une sorte de serveur, on appelle ça un hébergeur de podcasts, et pendant longtemps les hébergeurs de podcasts, qu'on connaît beaucoup aujourd'hui en France – Castopod en fait partie, il y en a d'autres, Ausha, Podcastics, etc. –, vous mettent à disposition les moyens de générer ce fameux fichier RSS qui est, en fait, un fichier texte qui se met à jour. Ce fichier texte n'est pas un langage de code barbare pour qui ne connaîtrait pas le code, c'est un langage de balises. Ces balises ont été faites, à cette époque-là, 2005/2006, par Apple. Ça dit ce qu’est ce podcast : le titre du podcast, puis la promesse ça va être quoi ? On décrit cette récurrence d'épisodes. Ensuite, il y a un en-tête dans ce fichier : on dit qui est l'auteur, on dit qui est le visuel du podcast. Ensuite on descend : un podcast c'est un flux, c'est une pile. Ensuite on va avoir les épisodes, donc un épisode a un titre, a une description et il a une adresse sur Internet, sur un serveur de fichiers MP3.
Quand on s'abonne à un podcast, quand on s'abonne à travers une interface, qui est la plupart du temps une application d’agrégation de podcasts, qui sont, aujourd'hui, toujours Apple Podcasts ou bien Spotify, etc., en fait on s'abonne à ce fichier qui se met à jour et à travers l'interface d'un player, on vient écouter à chaque fois qu'il y a une mise à jour.
Donc commence à se développer à partir de 2006 et dans les années qui vont suivre, un usage du podcast, celui de beaucoup de réécoutes de la radio. Évidemment, à ce moment-là les grandes radios comme RTL, comme Europe 1 et comme le groupe Radio France se saisissent de ce nouveau mode de diffusion en comprenant qu’elles vont pouvoir adresser de nouveaux usages, de nouveaux besoins : la réécoute de la radio en temps et en heure, où on veut, sur un support mobile. C'est comme cela que les premiers auditeurs de podcasts, et on en trouve encore la trace aujourd'hui dans les statistiques, ne sont pas ceux qui sont très représentés, ce ne sont pas forcément des jeunes, ça va être aussi des gens qui, à l'époque, avaient un Mac, un iPod, qui ont donc commencé à rentrer dans l'univers podcast par la réécoute de la radio.

Frédéric Couchet : Benjamin.

Benjamin Bellamy : Je voulais juste m’offusquer violemment contre un détail que tu viens de dire. Apple n'a pas inventé le podcast, pas du tout ! Apple l'a mis en lumière.

Carine Fillot : C’est ce que je voulais dire.

Benjamin Bellamy : Ça a contribué énormément à son développement parce qu’Apple a porté le podcast à bout de bras, sans modèle économique, pendant plus de 15 ans, mais techniquement Apple n’a absolument rien inventé !
Après, ils ont dit « si vous voulez qu'un podcast existe il faut qu'il ait une image carrée, 1400 pixels, il faut tout un tas de choses », ils ont normalisé, d'une certaine manière, ce qui était plutôt une bonne chose, mais techniquement ils n’ont rien inventé.

Carine Fillot : Comme tu le disais, le flux RSS existait depuis très longtemps.

Benjamin Bellamy : Toute la techno existait déjà, d'ailleurs toutes ces technos existaient déjà dans les années 90. On peut leur savoir gré d’avoir mis ça en lumière.

Carine Fillot : En tout cas, ils ont inventé Apple Podcasts qui, finalement, a été le premier outil sur lequel les gens allaient pouvoir le faire, parce qu'à ce moment-là, souvenez-vous, en 2006, il n’y avait pas encore YouTube, il n’y avait pas encore Spotify, Deezer était en train de naître. On était dans un moment où, en fait, le seul acteur capable de générer du ??? [26 min 05] c'était celui-là.

Frédéric Couchet : Je vais te repasser la parole, Benjamin. Je vais quand même juste apporter deux précisions : une première sur le format de fichier audio. Tu as beaucoup cité MP3 parce que c'est notamment le format, l'un des rares formats que sait traiter Apple, mais on peut mettre n'importe quel type de format audio, il y en a plusieurs. Par exemple, dans le cas du podcast de Libre à vous ! il y a le format MP3, le format ogg, il y en a plusieurs.
Tu as cité Apple Podcasts, Spotify. I y a aussi des applications libres qui permettent des lectures de podcast. On va en suggérer un très simple en exemple, si les gens veulent le découvrir, c’est AntennaPod, un outil qui permet de s'abonner à des podcasts, soit en les découvrant, en mettant des mots-clés dans le moteur de recherche, soit en mettant effectivement le lien quand on va sur une page web. On prend un exemple concret : si vous nous écoutez actuellement, que vous avez soit un téléphone soit un ordinateur, vous allez sur libreavous.org et vous allez voir, il y a marqué « S’abonner au podcast ». Ça va vous donner un lien et, si votre ordinateur est bien configuré, ça va vous ouvrir automatiquement une application pour vous abonner. Ensuite vous pourrez, à la demande, écouter les épisodes, ceux que vous voulez ou tous, n vous encourage, évidemment, à tous les écouter.
On reviendra tout à l’heure sur le rôle d’Apple et des autres acteurs.
Juste une petite question. Tu viens de la radio, nous nous faisons de la radio. Tout à l'heure tu as employé un terme qui est important c'est « podcast natif ». Pouvez-vous expliquer, peut-être toi Carine, la différence qu'il y a entre un podcast qui est une réécoute d'une émission de radio, par exemple, et un podcast natif. Qu'est-ce que ça change à la fois pour la personne qui fait et pour la personne qui écoute ?

Carine Fillot : Avant, on peut peut-être dire que c'est très franco-français !

Benjamin Bellamy : J'allais le dire, mais tu as lu dans mes yeux.

Carine Fillot : On en a parlé ensemble avec Benjamin, on échange beaucoup sur le sujet du podcast, pourquoi, en fait, fait-on cette distinction ? À mon sens, il faut le comparer aux autres écosystèmes. En France, on a une radio qui est forte et on le voit ici, on est dans une radio associative. En France, il y a un bon nombre de radios associatives et des catégories A, B, C, D, etc., il y a des radios de service public, il y a des grandes radios nationales, etc. ; il y a de la diffusion FM sur un territoire, même si, effectivement, on peut peut-être regretter qu’à des endroits il n’y ait pas assez d’émetteurs, de diversité de radios, malgré tout il y a ça. Donc, quand les acteurs du podcast francophone émergent, quand on parle de 2006, comme l'adoption des usages est en train de se faire, on a un fossé entre ces années 2006/2007 et l'arrivée de ce qu'on appelle le podcast natif, même s'il y a effectivement toujours eu, depuis l'invention, depuis cette possibilité, des podcasteurs. Moi-même, en 2007, je faisais une webradio ; on faisait du streaming et on faisait du podcast. On voyait bien que oui, certes, il y avait des gens qui téléchargeaient nos podcasts, mais c'était des geeks, on n'avait pas encore un usage massif de cela.
À un moment, en tout cas en France ces dernières années, un secteur s'est structuré et c'est là aussi que ce terme de « podcast natif » est apparu. Ce sont aujourd'hui des studios de podcast qui sont assez connus – Louie Média, Binge, Bababam, des pure players comme Slate – qui, du coup, sont arrivés avec des propositions éditoriales nouvelles puisqu'en fait, avec le podcast, on s'affranchit de la grille radio. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu’on peut faire des formats différents avec des durées qui ne sont pas homogènes, avec des épisodes. On peut s'approprier la radio, mais on peut créer ses propres formats, et surtout il y a souvent un positionnement stratégique, mais parfois ça part d'une intention très personnelle et très naturelle : je veux porter un sujet d'expertise, un sujet de niche, beaucoup un sujet sociétal, du coup je peux le faire, la radio m’est quand même assez accessible. On a connu un passage au do it yourself, « faites-le vous-même », dans toutes les autres industries créatives et culturelles – la musique, le studio, le home studio pour les musiciens – le fait de faire soi-même, on n’est plus à la pellicule, on est avec le numérique, etc., donc le podcast reste aujourd'hui accessible. Le coût même d'investissement dans un micro, un enregistreur, un abonnement à un hébergeur de podcast c'est accessible. Du coup, ça ouvre la porte à ces nouvelles voix, à des gens qui portent un discours singulier. Ça ne veut pas dire qu'on n'a pas les mêmes à la radio, ça veut dire qu'ils passent par un chemin différent. Depuis on est aussi nourri des réseaux sociaux, du personal branding, des figures comme ça des influenceurs, même si on ne trouve pas l'ADN de l'influenceur dans le milieu du podcast, en tout cas à la marge, donc on a des gens qui veulent aussi se singulariser, dire « nous on n'est pas la radio ». Ce n’est pas pour se mettre en différence par rapport à la radio, c'est pour réussir à exister, alors que aujourd'hui, en France le podcast, de replay, le podcast de réécoute de la radio, c'est quand même celui qui est le plus consommé de toute l'historique qu'ont les radios, de tout le mass media que représente la radio.
Ce terme de podcast natif permet dire « en fait on est un peu les nouveaux podcasts, on est un peu les nouvelles tendances, on est un peu les nouveaux sujets. On n'est pas diffusé à la radio. » Par contre, ceux-là sont obligés de faire aussi la promo de cet usage du podcast.
Je pense que c'est pour cela qu'en France on a un peu cette volonté de différencier les deux termes pour se singulariser et pour exister.

Benjamin Bellamy : Pour compléter, Carine lit dans mes pensées, elle disait que cette notion de différence, de dichotomie entre le podcast natif et le podcast de replay c'est très franco-français. Aux États-Unis ça n’existe pas du tout. Pour l'anecdote, on travaille beaucoup avec un mouvement qui s'appelle Podcasting 2.0, qui a pour vocation d'enrichir fonctionnellement le podcast en rajoutant de la transcription, tout un tas de choses comme ça. On leur a demandé de rajouter la possibilité d'avoir un tag qui permet de dire si ce podcast est un podcast natif, c'est-à-dire si c'est un contenu original qui a d'abord été créé en podcast, ou bien si c'est un contenu qui a été publié quelque part ailleurs, avant. On parle de radio, mais il n’y a pas que de la radio. Typiquement, est-ce que le podcast de HugoDécrypte est un podcast natif ou pas, parce qu'il a été publié avant sur YouTube ? C'est une question qu'on peut se poser.
On voit bien que tout cela est très culturel. Je ne suis pas convaincu par cette différence. Si les Anglo-Saxons ne la font pas, il y a bien une raison. Sur la vidéo, on voit bien qu’on est passé d'une vision linéaire à une vision délinéarisée et il va probablement se passer la même chose sur de l'audio. On appelle ça du podcast, on appelle ça ce qu'on veut, peu importe, en tout cas c'est une question d'usage. Après, est-ce que le contenu que j'écoute en podcast a été publié quelque part avant ?, j’ai envie de dire que c'est presque secondaire.

Carine Fillot : C’est un peu dans l'écosystème du podcast qu'on différencie ces deux termes.

Frédéric Couchet : OK, d'accord, mais je vois quand même une différence importante dans la façon dont les gens qui font ces émissions, soit de radio pour diffuser, soit le podcast, se comportent. Tout à l’heure tu as employé un terme « public de niche », « ils ont quelque chose à dire ». Moi j'écoute beaucoup de podcasts et une chose que je vois tout le temps sur les podcasts, sur la plupart, c'est du jargon à fond ! On écoute un podcast sur lequel on est tombè parce qu'on s'est intéressé à ce sujet-là – j'en écoutais encore ce matin, je m’intéresse au marketing.

Carine Fillot : Franchement, je pense que le marketing c'est le top du top du top !

Frédéric Couchet : Je passe une partie de mon temps à essayer de comprendre ce jargon-là et je pense que l'une des différences principales, justement, c'est l'adresse. Nous, quand nous faisons de la radio, nous nous adressons d'abord à la personne qui écoute la bande FM, on fait donc un effort de vulgarisation, de compréhension, alors que les gens qui font du podcast natif s'adressent souvent à une niche et ne pensent pas aux gens qui, par hasard, vont les découvrir, donc, en fait, qui vont devoir s'accrocher pour comprendre. Je ne sais pas quel est votre avis là-dessus.

Carine Fillot : Je suis absolument d'accord avec toi. Je tiens ce discours aux gens que je forme au podcast, forcément ! Tu l'as compris, mon ADN vient de la radio, tu vois. Il y a quand même beaucoup de gens qui le font par mimétisme. Je pense qu'on va parler de la monétisation après, mais quand je forme des gens je leur dis, d'ailleurs, dans nos formations, on leur explique comme ça : les savoir-faire de la radio au bénéfice d'un projet de podcast. Après, c'est aux gens de choisir s'ils veulent faire quelque chose de très pointu. De la même manière que des gens veulent faire de la radio associative toute leur vie, il y a des gens qui veulent se professionnaliser, etc.
Pour l'audience, on ne va pas se mentir, sur certaines thématiques et sujets c'est hyper-porteur d'être dans une niche et de créer une communauté. Mais effectivement, tu as raison, ça crée de l'entre-soi et je dis souvent aux gens « pensez à enlever ces mots de jargon, arrêtez de parler de KPI, parlez d'indicateur clé de performance, faites cet effort de pédagogie ». Effectivement, je suis d'accord, vous allez rassembler beaucoup plus. Après c'est à chacun d'essayer de trouver ce dosage pour montrer une expertise. Effectivement dans le marketing et dans beaucoup de métiers, en général même dans toutes les entreprises françaises, on a cette tendance un peu au jargon et à l'entre-soi et la radio n'a pas cet ADN : il y a un côté beaucoup plus inclusif avec l'approche de la radio et beaucoup plus exclusif avec l'approche du podcast. Si votre stratégie c'est d'être dans l'exclusivité, dans ce cas-là assumez-le à fond, mais ça veut dire que vous allez laisser des gens à la porte ; la barrière d'entrée est élevée. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des gens qui feront l'effort comme ils le font sur d'autres supports de « je vais écouter, me former ; je vais écouter un podcast, en même temps j'ai Internet pour comprendre », mais vous allez laisser des gens derrière vous. Et comme l’ADN de la radio c'est d’être un émetteur FM, le fait de ne pas savoir, de sentir, de comprendre – il y a évidemment des sondages, des études – mais c'est se dire qu'il y a toujours aussi cette magie un peu de « on tourne le bouton – même si on ne le tourne plus beaucoup aujourd'hui mais encore – sur l'autoradio et on peut tomber aussi sur une surprise, sur quelque chose qu'après on peut transformer en en faisant une habitude d'écoute, etc. Il y a toujours deux communautés dans l'audience de la radio : il y a ceux qui sont déjà acquis et il y a ceux qui sont là autour. La radio a cette adresse beaucoup plus large, je suis complètement d'accord.

Benjamin Bellamy : Il y a évidemment une grosse différence en termes de formation. À priori, quelqu'un qui passe par la radio, va être formaté, va être prévenu et va être prévenant.

Carine Fillot : Qu’est-ce que tu entends par formaté ?

Benjamin Bellamy : Ne pas s'adresser à un auditeur n'importe comment.
Pour autant, on parlait tout à l'heure de liberté, ce qui est bien aussi dans le podcast, c'est que c’est un peu foutraque. Il y a des gens qui ne sont pas du tout formés à faire ça, qui se lancent, qui apprennent sur le tas. Du coup l'indice de qualité, je ne sais pas si on peut parler d'indice de qualité, en tout cas il y a beaucoup plus de choses et ça génère aussi beaucoup plus de diversité, une uniformisation qui est nettement moindre dans le podcast, qui fait que ça crée la richesse aussi du podcast.

Carine Fillot : Je suis tout à fait d'accord avec ça. En tout cas le propos que j'avais en tête c'est celui de quelque chose qui est un jargon technique et des choses qui resserrent un peu.
Par contre, effectivement, parfois on retrouve les marqueurs de la radio associative. Dans une radio associative le cadre est parfois beaucoup moins formel que dans une radio privée, etc., il y a donc ce truc de dire « je peux le faire moi-même, je peux le faire à mon image », donc c’est intéressant.
Chez Elson on a mené pas mal de curations, on écoutait plein de podcasts qui se lançaient, des podcasts amateurs, des podcasts un peu plus pros. Quand on les passait en comité d'écoute d’une vingtaine de personnes, il y avait parfois des trucs qui étaient frappants : la voix d'une personne qui a un regard singulier sur un sujet et ça ne trompe pas, mais comme souvent à la radio ; bien souvent la voix ça ne trompe pas.
Des gens demandent souvent pourquoi on ne fait pas beaucoup de coaching vocal dans nos formations. Je dis souvent que l'esthétique de la voix n’est plus un sujet, à moins d'avoir un problème d'élocution, etc., qui peut se travailler avec un orthophoniste ou autre, en fait, aujourd'hui, on n'a plus ce code de l'esthétique de la voix. La voix c'est la personne qui s'exprime et si une personne est alignée avec ce qu'elle dit, il n’y a plus de mauvaise voix. On parle souvent des nouvelles voix du podcast, mais le podcast révèle cette chose-là.
Ce qu’il est aussi intéressant de voir, c'est le chemin que font certains de ces podcasteurs et de ces podcasteuses : au départ on se lance, on essaye, on retente autre chose, etc., on essaye de ne pas s'arrêter en chemin parce que c'est ingrat, en plus, d'être son propre média. Les gens vont essayer de fabriquer un objet, en plus il faut faire de la communication autour, etc. mais ça chemine et ce qui est intéressant c'est de voir comment quelqu'un passe de « je fais » à « est-ce que je deviens podcasteur » ou « est-ce que je deviens auteur et autrice aussi ». On est dans cet écosystème à un moment où, en plus, on interroge cette question-là, notamment vis-à-vis du financement de certains créateurs. Et qu'est-ce que c'est qu'être un auteur ou une autrice de podcast ou de radio ? C'est une question qui se pose aujourd'hui.

Frédéric Couchet : On va en parler. Je voulais juste préciser que je ne faisais pas une critique du podcast parce que je suis un très gros consommateur de podcasts et je suis totalement aligné avec ce que vient de dire Carine, il y a vraiment des voix et je ne parle pas de la voix qu'on entend, mais des positionnements.

Carine Fillot : L’expression singulière et particulière des personnes.

Frédéric Couchet : Aux gens qu’on invite à l'émission de radio et qui disent « je ne suis pas à l’aise, je vais bafouiller, etc. », on leur dit « ne vous inquiétez pas, vous allez parler de votre expérience, de votre vécu, de ce qui compte pour vous, de votre histoire et c'est ça qui va intéresser les gens ». Ce n’était donc pas une critique sur le podcast, c'était juste un constat sur un certain nombre de podcasts qui ciblent des particuliers et qui ne pensent pas aux autres.
Avant la pause musicale, on va commencer un petit peu à parler justement des acteurs du podcast, donc des personnes qui créent, des personnes qui écoutent. Un truc vachement bien dans le podcast, je crois que tu l'as dit tout à l'heure Benjamin, c'est qu'effectivement on prend un micro, un outil d'enregistrement, on prend une plateforme, on peut même se créer son site web, pour se lancer dans le podcast. En tout cas, d'un point de vue technique, c'est très simple de se lancer dans le podcast, ce n'est pas un gros investissement, il n’y a pas de barrière à l'entrée.

Benjamin Bellamy : Aujourd'hui il n’y a pas de a barrière à l'entrée puisqu'il suffit d'avoir un téléphone portable

Frédéric Couchet : C’est vrai qu’avec le téléphone, c’est encore plus simple. Carine n'est pas forcément tout à fait d'accord mais elle le dira après. Vas-y Benjamin.

Benjamin Bellamy : Je sais qu'elle n’est pas du tout d'accord, mais comme elle est très polie elle ne me coupe pas la parole.
Aujourd'hui des podcasts sont créés avec un téléphone portable. On utilise parfois les kits piéton ou des choses comme ça pour que, qualitativement, ce ne soit pas trop pourri, mais avec un téléphone portable c'est tout à fait possible et on peut faire plein de choses

Carine Fillot : Un téléphone portable plus un accessoire !

Benjamin Bellamy : Plus un accessoire, d'accord.

Frédéric Couchet : Quel accessoire ?

Carine Fillot : La question qui se pose c'est : est-ce qu'on fait son podcast tout seul où on parle soi et on n’interviewe personne ou est-ce qu'on interviewe quelqu'un ? Il y a effectivement pas mal d'accessoires qui sont développés pour mettre sur un téléphone. J’ai quand même besoin de faire ce geste : je parle, tu parles et approcher le micro de la bouche.

Benjamin Bellamy : Si on fait un podcast d'interview, mais ce n'est pas nécessaire. On peut aussi faire un podcast de monologue où on parle tout seul, où on raconte sa vie.

Carine Fillot : Bien sûr, complètement, mais il n’y en a pas beaucoup, ce n’est pas le plus commun des podcasts, mais oui, c'est possible. Après c'est toujours pareil, c'est comme avec n'importe quel outil, encore faut-il savoir le placer, l'utiliser, comment transférer les fichiers de son téléphone, etc. En tout cas, ce n’est pas le kit le plus commun pour un podcasteur. La plupart du temps on va plutôt investir dans un enregistreur numérique, peut-être un micro additionnel avec un enregistreur numérique, mais on est quand même sur des prix, même avec un kit comme ça, avec enregistreur/micro, qui ne vont pas dépasser 450 euros, ça reste quand même raisonnable

Benjamin Bellamy : 450 euros, c'est déjà très qualitatif.

Frédéric Couchet : C’est quand même un budget !

Benjamin Bellamy : Aujourd’hui, pour 50 euros, tu as un enregistreur ou tu as un micro qui va faire un gap significatif en termes de qualité.

Carine Fillot : Là je parle de quelqu'un qui veut se lancer soit dans un podcast en extérieur, il y a aussi cette question-là, soit un podcast d'interviews et qui aurait un projet un peu au long cours. Ce n'est pas la première chose qu'on fait. En formation on dit : « Pour l'instant n'achetez pas de matériel, vous ne savez pas quel va être votre projet, comment vous allez le réaliser, dans quelles conditions, si vous n'allez pas faire vos interviews à distance, auquel cas est-ce que c'est un téléphone, est-ce que votre ordinateur, est-ce que c'est un micro USB ? ». Il y a plein de configurations possibles. On peut faire ses premiers essais avec un smartphone, évidemment, et à partir du moment où on veut une meilleure qualité de son, un meilleur confort aussi pour réaliser, on peut se tourner vers un kit un peu de base.
Évidemment, pour chacun il y a un il peut y avoir un coût financier, mais ce n'est pas l'essentiel. En tout cas pour réussir à trouver un peu une audience quel est l’essentiel ? De quoi on parle-t-on ? C'est quoi ce podcast ? Quelle va être cette proposition éditoriale ? Quel est le sujet ? Quelle est la promesse ? La technique, c'est l'outil qui va permettre, qui va même sublimer peut-être le podcast, peut-être même que ça fait des rebonds sur le concept même du fait des choix techniques qu'on fera, etc., mais, avant tout, ça reste : quel va être le propos ?

Benjamin Bellamy : Mais même, sur la promesse, on a le droit de changer d'avis. Le podcast c'est vraiment le médium de la liberté : je peux faire ce que je veux, je peux changer de format, je peux changer de durée, je peux changer de fréquence, je peux changer de sujet, je peux faire absolument tout ce que je veux, je peux changer de micro bien évidemment.

Carine Fillot : Bien sûr !

Frédéric Couchet : On va faire une pause musicale sinon on va dépasser le temps. En plus c’est une pause musicale choisie par Benjamin. Elle est même issue de nos archives, c’est un morceau que j’aime beaucoup. Nous allons écouter Last Dance par Zero Project. On se retrouve dans environ trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Last Dance par Zero Project.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Last Dance par Zero Project, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By.

[Jingle]

Deuxième partie

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre notre discussion, qui s’est poursuivie pendant la pause, sur le thème du podcasting, avec nos invités : Carine Fillot, fondatrice d’Elson, et Benjamin Bellamy, fondateur et dirigeant de la société Ad Aures et de Castopod dont on parlera tout à l'heure, bien sûr.
Juste avant la pause musicale on parlait des personnes qui créent les contenus, qui créent les podcasts et de la barrière technique à l'entrée. Carine rappelait l'importance du projet, de la voix qu'on veut porter.

Carine Fillot : La voix des autres, aussi.

Frédéric Couchet : Ou la voix des voix des autres, effectivement. On va continuer là-dessus. On va aussi parler de la question de la découvrabilité des podcasts, c'est un enjeu qui a sans doute évolué aujourd'hui : trouver un podcast qui nous intéresse ou se faire connaître, et puis la question aussi de la monétisation parce que, jusqu'à présent, on a on n'a pas parlé de cet aspect-là, mais il y a des gens qui font des podcasts aussi pour les monétiser, pour gagner un peu d'argent, ce qui n'est sans doute pas la majorité des gens, en tout cas c’est mon intuition.
Sur cette première partie, sur le travail des gens qui créent des podcasts, trouver leur voie, trouver la voix des autres, quels conseils donneriez-vous ? Quelles astuces, quel cheminement ces personnes doivent-elles faire quand elles se lancent dans une idée de podcast ?

Carine Fillot : Il y a souvent deux manières de voir la conception du podcast : soit ça part de l'envie personnelle – quelle est votre intention personnelle ? On arrive souvent à croiser ça avec une thématique, des sujets – soit on est dans une approche journalistique, donc de sujet on passe à ce qu'on appelle un angle, donc une manière précise d'aborder le sujet, souvent on croise ça avec un casting, avec des personnes. Dans un podcast très répandu, qu'on va appeler le podcast d’interview, par exemple le podcast d'entretien, la personne qu'on interviewe est souvent notre matière, on le voit même ici, au sein de cette émission. Souvent on croise ça et on se dit « c'est avant tout ça qui compte et puis on verra qui on trouve en chemin en termes d’audience ».
Une autre option est de dire « je pars de la fin de l'entonnoir que est la communauté d'audience que je veux viser », donc je décris, comme on le ferait en bon marketing, des personnes : qui sont ces personnes, comment j'imagine leurs centres d'intérêt, etc. ? Là, en fait, on va piloter plutôt la conception du podcast par la stratégie des publics, qui est souvent liée à un thème ou à un sujet. C'est donc là où on aborde un peu plus la question de la niche, sachant que les deux peuvent se croiser et qu'à un instant t un sujet qui peut être de niche, peut devenir dans le temps un sujet beaucoup plus mainstream. On le voit bien : les podcasts qui ont émergé sur la question du féminisme, même sur beaucoup de sujets, je pense à la géopolitique ou à la stratégie de défense, des podcasts qui existent parfois, pour certains, depuis longtemps, je pense au Collimateur qui aujourd'hui, avec toute l'actualité de la géopolitique, etc., devient un podcast assez en vue et assez écouté.
Est-ce que je vais me lasser aussi, quelle est la taille du sujet ? Est-ce qu'à un moment donné j'ai fait le tour aussi ?

Frédéric Couchet : Et aussi la récurrence : est-ce que c'est un podcast mensuel, hebdo ?

Carine Fillot : Exactement. Ça c'est la fréquence. Après il y a la récurrence, ça va aussi avec la fréquence de diffusion. À nos apprenants et apprenantes j'aime bien leur dire : posez-vous cette question : votre podcast a-t-il une fin et qui perdra l'appétit en premier, vous ou l'auditeur ?
En fait, il y a deux formes de podcasts. Il peut y avoir un podcast de flux, et c'est plus porteur, un peu comme une émission de radio : on a rendez-vous régulièrement, donc ne sait pas forcément quand ça va s'arrêter, en plus, quand on se lance, ce n'est pas pour imaginer s'arrêter. Ou alors il peut y avoir un podcast avec un ADN un peu plus patrimonial : là on va décider peut-être d’un certain chapitrage, d’un certain nombre d'épisodes, d’une certaine histoire et il y a des histoires qui se terminent à un moment donné, des sujets, des documentaires, etc. Là ce sont d'autres formes de podcasts, peut-être d'autres formats aussi, et ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas enchaîner peut-être une série patrimoniale à une autre, dans un même flux de podcasts, etc.
Je leur dis ça parce que le fait de pas voir la fin fait qu’on n'arrive pas, parfois, à voir quel est le premier objectif. Peut-être que le premier objectif, quand on se lance, c'est de faire une maquette.
Ce qui est sûr c'est que le podcast de flux, avec une promesse récurrente, est beaucoup plus porteur pour l'audience comme podcast patrimonial.

Benjamin Bellamy : D’ailleurs, cette question était présente à la création du podcast, dès le début, dans les métadonnées des podcasts. Dans les métadonnées il y a le titre, ce qu'on appelle shownotes c'est-à-dire la description, le résumé, il y a un champ spécifique qui dit si le podcast est épisodique ou sériel, serial en anglais. La raison première de ce champ c'était de dire : est-ce je vais commencer par le dernier podcast parce qu’il y a pas d'intérêt à remonter un peu dans le temps, parce que c'est une revue de presse ou quelque chose qui est vraiment construit dans la durée et sans fin, comme tu viens de le dire. Ou bien est-ce que je raconte une histoire avec un début, un milieu et peut-être une fin et, dans ce cas-là, il faut que je puisse commencer par le début. Il y avait donc cette nécessité d'expliquer, de dire aux applications d'écoute : affichez le tout premier épisode, c'est-à-dire le plus ancien en premier, ou bien affichez le dernier parce que c'est le plus récent qui est le plus pertinent.

Carine Fillot : Aujourd'hui, on est bien embêté avec cette question à moins d'être une marque ou un média très fort qui arrive à faire exister un podcast alors qu'il s'est arrêté. Comprenez qu’une fois que les gens sont abonnés à un podcast, donc qu’ils reçoivent sur leur téléphone une notification sur l'application de leur choix qui leur dit « il y a un nouvel épisode, etc. », ce chemin est déjà long pour arriver dans le podcast, donc si vous faites un flux et qu’il s'arrête au bout d'un moment, si vous n'avez pas la force de frappe pour médiatiser votre podcast, c'est compliqué. Aujourd'hui, même certains gros studios se demandent comment ils peuvent essayer de créer un gros chapeau, c'est-à-dire un titre de podcast très large, sur lequel, finalement, adresser quand même des sujets ou des séries qui vont avoir un ADN un peu commun, mais qui peuvent être très différents parce qu’on capitalise sur le même flux RSS, comment rendre ça lisible. C'est pour cela qu'aujourd'hui la question de ce qu’on appelle la titraille, le fait de titrer des épisodes, etc., de rendre lisible, est hyper-importante. Que font les gens la première fois qu’ils tombent face à un podcast ? Ils le regardent avant de l'écouter. Donc la lisibilité du titre, du chapitrage, etc., va être importante pour comprendre ce à quoi on a à faire, dans ces différents contenus, dans ces séries parce que c'est effectivement plus porteur d'avoir quelque chose qui se poursuit.
Du coup, c'est très embêtant quand on est créateur, en ce moment je suis cette problématique-là : c'est très porteur de faire une série documentaire et forcément, à la fin, une série documentaire, au bout d’un certain nombre d’épisodes ça s'arrête.
Il y a peut-être des pistes aussi autour du multi format. Même si on le dit, et je suis entièrement d'accord, je dis souvent ça : le podcast est un espace de liberté. Vous n'avez pas les contraintes de la radio, donc si vous avez envie de faire plusieurs séries dans un flux, si vous voulez faire du multi-format, si vous voulez faire un billet court et, la semaine suivante, un entretien, à partir du moment où vous ne trahissez pas la promesse générale et aussi qui vous êtes, ça n'a pas d'importance. Il y a cette liberté-là : le multi-format d'épisodes, peut-être même plusieurs podcasteurs dans un même podcast, qui sait, peut-être qu'ensemble on est plus fort, il y a encore des choses à créer. Comme aujourd'hui on est dans, finalement, ce qui est à la fois porteur, on va y venir, il y a un écosystème ouvert grâce à ce flux RSS, mais, en même temps, quand on est podcasteur, qu'on est tout seul dans son flux et qu'il faut produire et qu'on est obligé de produire pour alimenter le flux, c'est aussi compliqué.

Frédéric Couchet : Juste avant de te laisser la parole Benjamin, il y a quand même un truc que j’apprécie dans les podcasts, c'est la durée qui est à peu près toujours la même sur un podcast, comme ça, je vais pouvoir le choisir. Par exemple, quand je vais faire de la course à pied, je vais choisir un podcast dont je sais que la durée va être entre 50 minutes et une heure parce que ça va correspondre à mon entraînement. J'aime bien et j'ai remarqué que la plupart des podcasts respectent ça, respectent la durée.

Carine Fillot : Tu aimes bien être rassuré !

Frédéric Couchet : Voilà, j’aime bien être rassuré sur ce fait de la durée. C’est un point personnel.

Carine Fillot : C’est vrai. Après, à moins d'être dans un podcast où c'est déjà très resserré en termes de sujet, c’est quand même souvent le titre qui est porteur, c'est le sujet. Quand on arrive, à un instant t, face à une liste d'épisodes et qu'on en a l'embarras du choix, souvent c'est quand même le titre, parfois c'est le nom de la personne qui dans le titre.

Frédéric Couchet : Benjamin, je te laisse réagir et après on parle de la découvrabilité justement.

Benjamin Bellamy : Il faut éviter d'appeler son podcast « mon podcast hebdomadaire » parce que, en général, ça ne garantit pas une bonne découvrabilité.
Je voulais en profiter pour rebondir et revenir faire la découvrabilité. On a parlé de différence entre les podcasts en série et les podcasts épisodiques. Il faut bien comprendre, par rapport à ce qu'on a dit tout à l'heure, c'est que pendant 15 ans les podcasts ont été portés par Apple Podcasts et, du coup, c'est un peu Apple Podcasts qui était le seul moteur de découvrabilité. C'est un peu Apple, c'est même totalement Apple qui a décidé ce qu'était un podcast découvrable, ce qui faisait qu'un podcast pouvait être vu, ce qui faisait qu'un podcast était dans son top 100. Apple a imposé ses conditions à tout le monde et tout le monde les a acceptées sans rechigner : c'était avoir une belle image, bien carrée, je le disais de 1400 pixels et avoir une régularité sans faille.
Aujourd'hui, le discours unanime de tous les gens qui bossent dans le podcast, le premier conseil c'est de dire : il faut que vous soyez régulier, ce en quoi je m'inscris en faux. Je dis non, faites ce que vous voulez, ne trahissez pas votre audience certes, mais à l'origine, ce besoin de régularité c'est quand même Apple qui l'a imposé à tout le monde et qui a dit « si vous n'avez rien publié depuis un mois, vous n'existez plus ». Aujourd'hui on a quand même un truc qui est incroyable : il y a une richesse phénoménale dans le podcast, il y a énormément de podcasts, en particulier ceux de type série qui sont passés dans les oubliettes, qu'on ne voit plus du tout, parce qu’Apple a décidé qu'un podcast qui ne publiait plus depuis plus d'un mois n'avait plus le droit de cité et n'était plus visible. Comme Apple n’a jamais été très fort en moteur de recherche, on les voit pas, on ne les trouve plus du tout.
Ça a changé depuis cinq ans parce qu’on a un buzz du podcast depuis à peu près cinq ans et il s'est passé beaucoup de choses. Je pense que le point de départ c'était le podcast Serial qui a fait 230 millions de téléchargements et qui a un peu rebattu toutes les cartes. Toujours est-il qu’aujourd'hui Apple Podcasts, on regardait ce matin avec Carine, c'est en gros 37 % de parts d’écoute, ça parait énorme, sauf qu’il y a cinq ans c'était 100 % ou quasiment 100 %.

Carine Fillot : Ça a vachement baissé.

Benjamin Bellamy : Donc aujourd'hui, continuer à obéir aux règles d'Apple, ça ne paraît pas être forcément la meilleure stratégie, en tout cas ce n'est pas la seule.
La deuxième plateforme aujourd'hui c'est Spotify, je ne suis pas un grand admirateur de Spotify, mais pour le coup, en termes de découvrabilité, je trouve, de mon point de vue personnel, qu’ils bossent beaucoup mieux qu’Apple puisqu’ils sont capables d'aller chercher des contenus un peu plus anciens et de faire des recommandations un peu plus poussées que de dire dans le top dix de cette semaine vous avez Les Grosses Têtes, Guillaume Meurice, Choses à savoir, After foot, HugoDécrypte et voilà ! En fait, je n'ai rien découvert, c'est la découvrabilité niveau zéro.

Carine Fillot : Je voulais juste préciser sur Apple. Il y a sans doute ce discours autour du fait qu’Apple a des indices qui font que ça fait baisser s’il y a pas de régularité. J'en parlais plutôt du point de vue du podcasteur avec son audience. De toute manière, la plupart du temps c'est quelque chose qu'on auto-produit, qu'on fait soi-même. Alors attention, quand on parle de régularité, ça ne veut pas dire forcément faire une émission chaque semaine, c'est se dire qu’en étant juste présent sur son flux RSS avec ce contenu, en fait la promesse elle est réitérée et on crée ce lien. C'est plutôt un rapport de lien avec une audience et ça impose aussi, du coup, un certain rythme de production. Je dis souvent « si vous ne vous sentez pas, 15 jours c'est déjà pas mal. Caser une émission, un podcast, en épisodes de 15 jours ce n'est pas évident, mais commencez par un mois, essayez d'arriver à trois semaines et puis, en fonction aussi de vos sujets, si le podcast est facile à produire ou pas, si vous êtes dépendant d'autres personnes pour le fabriquer ou même interviewer », c'est plutôt dans ce rapport-là en fait. Dire qu’au moins, si vous êtes présent juste avec votre épisode, avec une certaine régularité, vous maintenez le lien et vous n'êtes pas obligé de faire tout un tas de communication de présence sur les réseaux sociaux. Vous êtes déjà là dans votre flux RSS et ça peut suffire. Mais au moins ce lien est établi.
De la même manière, je leur dis souvent, pour maintenir ce lien, arrêtez de parler à la fin : il faut mettre des étoiles, des machins, s'abonner. Je leur dis « si vous avez un appel à l'action à faire, peut-être que c'est une newsletter, votre page internet, créer un truc à côté, mais vous êtes en direct avec votre audience ».

Benjamin Bellamy : Si on parle de lien, on ne parle plus vraiment de découvrabilité. Si on a gardé le lien, les gens n’ont plus besoin de nous découvrir, ils nous connaissent déjà.
En termes de découvrabilité, c'est-à-dire aller trouver de nouveaux auditeurs et, en particulier pour un podcast de série qui s'est terminé, j'aime bien la métaphore de James Cridland, un journaliste spécialisé dans le podcast, qui a une newsletter quotidienne qui s'appelle Podnews, que vous retrouvez sur podnews.net, qui dit qu’on a quand même un paradoxe dans le monde du podcast, c'est que Apple a créé un écosystème où c'est comme si on avait une bibliothèque dans laquelle on va retrouver tous les livres qui ont été édités et sortis depuis deux mois et tous ceux qui ont plus de deux mois ont été passés au pilon parce qu’ils ne sont plus intéressants. Il y a une richesse incroyable dans le podcast et ce n'est pas parce qu'un podcast ne publie plus et, entre guillemets, « est mort » qu'il a qu'il a pas d'intérêt et qu’il n'a pas de valeur, au contraire.
Pour nous, l'enjeu de la découvrabilité est aussi là : c’est se dire « je suis intéressé par un sujet », il y a des podcasts sur tout parce que la décentralisation du podcast et le fait que ce soit un média très ouvert fait qu’il n'y a pas d'algorithme, il n’y a pas de censure, il y a donc des podcasts qui parlent vraiment de tout et aujourd'hui c'est compliqué d’aller trouver un podcast qui m'intéresse et l'enjeu est là, il est vraiment là. C'est comment est-ce que je vais trouver un podcast qui m'intéresse, dans ma langue, sur une durée particulière, sur un sujet qui a été évoqué.

Frédéric Couchet : Très rapidement Carine.

Carine Fillot : Le départ du projet Elson c'est celui-là. C'est le fait de dire que des podcasts tombent dans l'oubli, que des podcasts sortent aussi du Web parce que, au bout d'un moment, on va payer son flux RSS pour un podcast qui a vécu, etc., mais ça a de la valeur. Ça a de la valeur notamment de découvrir des objets patrimoniaux mais pas que. Il fallait justement trouver cet équilibre.
Quand on a lancé le premier prototype d’Elson qui réunissait 2000 utilisateurs, on avait en parallèle un comité d'écoute. Les gens nous suggéraient des podcasts, on faisait de la curation humaine, on testait cette curation sur notre site avec un player, les gens s'inscrivaient et recevaient une newsletter de recommandations, le son du jour pour ceux qui voulaient découvrir un podcast chaque jour, une playlist pour essayer de faire croiser aussi, finalement essayer d'amener de la transversalité entre ces flux RSS, en ayant aussi cette connaissance de la radio pour dire : qu'est-ce qu'ils ont en commun, qu'est-ce qu'ils ont de différent ? Quand on fait une curation sur une playlist de podcasts ou une playlist d'épisodes de podcasts est-ce qu'on parle du plus pointu d'abord, du plus général, etc. ? Qu'est-ce que c'est que cette expérience d'écoute et de découverte des podcasts ? Ça veut dire que ça nécessite, au bout d'un moment, d'arriver à pouvoir qualifier, sourcer, et la curation humaine, à un moment donné, rend compte de cette découvrabilité qu'on peut faire d'une certaine manière. Mais, au bout d'un moment, on a cette barrière qui est une barrière du coup plus technologique, celle aussi de la masse, du corpus de podcasts, même si on est loin des chiffres des États-Unis, il y a quand même beaucoup de podcasts francophones. Ce sont les problématiques communes qu'on a avec Benjamin. En début d'émission on parlait aussi de transcription. Il y a donc cet enjeu-là : arriver, à un moment donné, à trouver les ressorts qui vont faire que, par la technologie du transcript, de l'analyse sémantique, on va pouvoir savoir de quoi ça parle en fait, de quoi parlent ces contenus et aussi essayer de délivrer une expérience d'écoute pour les auditeurs. Comme le disait Benjamin, l'expérience d'écoute d'Apple est conditionnée au bon vouloir d'Apple et de ses règles, Spotify c'est la même chose, etc.
Il y a encore la place, aujourd'hui sans doute, pour une plateforme de découvrabilité des podcasts, qui joue avec d'autres codes, d'autres règles, qui prenne en compte à la fois les contenus et les usages des auditeurs.

Frédéric Couchet : Avant de te laisser réagir parce qu'il reste cinq minutes avant les questions finales, donc on ne va pas parler de monétisation. Par contre, on est quand même une émission qui parle de libertés informatiques, on vient de nous parler d'Apple, de Spotify, et je le comprends entièrement, mais Benjamin je veux qu'on enchaîne, et ça va être relativement court, malheureusement, sur écosystème versus écosystème ouvert et surtout quelle est place des solutions libres et des plateformes libres dans le podcasting ? Ça va être très court j'en suis désolé. On refera peut-être plus en détail dans une seconde émission. Vas-y.

Benjamin Bellamy : Carine parlait à l'instant de patrimoine et de « je suis podcasteur, j'ai fini un podcast, comment est-ce que je fais pour le garder en ligne si je n'ai pas envie de continuer à payer dix euros par mois ? ». C'est une des raisons pour lesquelles on a développé Castopod, castopod.org, qui est une plateforme d'hébergement de podcasts. Nous n’avons pas été très originaux dans le sens où on a pris un modèle qui nous semblait fonctionner plutôt pas mal qui était celui de Wordpress. Wordpress permet de publier des sites internet de contenus mais spécifique au podcast.
Castopod permet à n'importe qui de télécharger la solution et d'auto-héberger son podcast, pour le coup à un coût vraiment réduit, voire gratuit si on a déjà son serveur.
On l'a dit, je ne sais pas si c'était très clair, mais la technologie du podcast date des années 90, elle n'a pas évolué depuis, ou très peu, et, dans les années 90, le Web était totalement décentralisé, il n'y avait pas de plateformes fermées comme il y a aujourd'hui : on est sur Facebook, eh bien on est dans Facebook, on n’est pas sur Internet, on est sur une plateforme fermée. Quand on est sur YouTube on est enfermé sur YouTube, c'est-à-dire que Google est le seul qui décide quel est le contenu qui a le droit d'être là, quel est le contenu qui va être visible, qui va être recommandé. Sur le podcast, on n'a pas ça du tout parce qu'on peut choisir son hébergeur. Carine en a cité quelques-uns. Il y en a d’autres. Je citerai podCloud et Vodio parce qu’ils sont très sympas, ils sont aussi très bons, et ce sont des sociétés françaises, tout à fait.
On peut choisir sa plateforme d'hébergement, donc, potentiellement, si on se fait supprimer son podcast d'une plateforme d'hébergement, on peut très bien aller chez une autre sans perdre son audience. Ses auditeurs peuvent aller sur une plateforme d'écoute, on a cité Apple et Spotify parce que, aujourd'hui, ce sont ceux qui ont de l'argent, mais il y en a plein d’autres.

Carine Fillot : Podcast Addict fait par un Français.

Benjamin Bellamy : Il y a Pocket Casts

Carine Fillot : Podcast Republic, il y en a toute une flopée.

Frédéric Couchet : AntennaPod.

Benjamin Bellamy : Il y en a plein. Il y en a des <em<open source, il y en a pour téléphone, il y en a vraiment plein. Du coup, le fait que ce soit décentralisé, c'est-à-dire qu’il n'y a pas une plateforme unique où on peut écouter des podcasts et que, en tant que créateur de contenus, en tant qu'auditeur/auditrice, on peut changer, fait qu’on a une liberté de ton, une liberté de parole qui est finalement devenue assez rare aujourd'hui sur Internet. Le simple fait de ne pas avoir d’algo de recommandation dans le podcast, en tout cas d'algo unique, pour moi c'est une richesse incroyable.

Carine Fillot : C'est pour cela qu'on fait souvent le parallèle avec les blogs. On va dire que ce serait les blogs faits par des créateurs, sans qu'on passe dessus un algorithme ou un moteur de recherche à la Google. Ils sont là, ils existent, ils ont leur hébergeur, ils ont leur prise de parole, et si on les cherche on peut les trouver.
Aujourd'hui, cet enjeu autour de la découvrabilité c'est une problématique qui est attaquée par plein d'acteurs, évidemment des plus gros aux plus petits, aux services publics, un peu moins aujourd'hui les radios parce que, étant souvent les radios des marques fortes, elles ont moins cet enjeu-là, elles ont plus souvent un enjeu de marque et de positionnement stratégique sur les audiences, mais c'est aujourd'hui clé. Quiconque se lance, ne serait-ce que dans l'écoute d'un podcast, essaye de trouver un sujet, il y a encore beaucoup de freins et il faut souvent investir beaucoup de temps pour trouver le podcast qu'on cherche. Par contre, une fois qu'on l'a trouvé, on peut y être complètement accro.

Frédéric Couchet : Merci. On refera une émission parce qu'il y a des sujets qu'on n'a pas abordés et on a abordé trop rapidement la dernière partie, mais vous étiez passionnant et passionnante.
Dernière question, vraiment en deux minutes max chacun et chacune, si vous le souhaitez : quels sont les éléments clés vous aimeriez faire passer aux personnes qui écoutent en deux minutes max. On va commencer par Benjamin.

Benjamin Bellamy : Déjà nous sommes très contents d'être ici et ce n'est pas un hasard si on est dans l'émission Libre à vous ! parce que, encore une fois, l'écosystème du podcast est libre et, pour nous, c'est important et il faut le défendre. J'invite en particulier toutes les podcasteuses et tous les podcasteurs à cesser de dire « mettez-nous des étoiles sur Apple Podcasts », Carine il l'a dit, pourquoi ? Parce que, déjà, c’est mettre tous ses œufs dans le même panier et puis c'est confier son audience, ses contenus, à un GAFAM et, stratégiquement, on voit où ça a mené sur d'autres types de contenus. En tout cas, ce n’est pas le conseil que je donnerais.
C'est compliqué et c'est pour cela qu’on y travaille d'arrache-pied.
On a pas du tout parlé de Podcast 2.0 qui, pour moi, est l'enjeu majeur des mois et des années qui viennent qui est : c'est très gentil de dire oui, il faut utiliser des logiciels libres et open source et ne pas faire confiance systématiquement aux GAFAM, mais on fait quoi ? Podcast 2.0 est une des réponses possibles à ça. Si vous allez sur newpodcastapps.com [1 h 11 min 42], vous aurez accès à des applications, pas toutes open source, mais, en tout cas, qui sont décentralisées.

Carine Fillot : Moi je dirais n’opposez pas radio et podcast, en fait c'est hyper-complémentaire. Je pense que la radio a des talents, le podcast a des talents et, en fait, les deux ont vraiment des raisons de se rapprocher. Peut-être que je dis ça parce que je viens de la radio associative, j'ai commencé par là, mais aussi parce que je vois qu’il y a quand même une grande différence : la radio FM est régulée avec un Arcom, anciennement CSA, etc. De l'autre côté le Web c'est effectivement un écosystème qui est complètement ouvert, mais les deux ont des intérêts.
Aujourd'hui, pour se professionnaliser, c'est intéressant de penser à ça. Quand on est à la radio on peut potentiellement avoir un statut d'auteur, on peut aussi se professionnaliser avec d'autres personnes et ne pas être tout seul dans son coin. En même temps, le podcast amène une nouvelle fraîcheur, de nouveaux ADN sur les contenus sonores. C'est donc intéressant et c'est intéressant que les gens se croisent, c’est pour cela que je suis aussi ravie d'être ici.

Frédéric Couchet : Parfait. Je pense qu'on fera une nouvelle émission, ne serait-ce que pour parler de Podcasting 2.0.
J'indique aux personnes qui sont intéressées au podcast et qui sont en région parisienne, qu’elles peuvent aller au Paris Podcast Festival les 13 et 14 octobre 2023 à la Gaîté Lyrique. Bientôt il y aura aussi PodCastres à Castres, dans le Tarn, où Benjamin Bellamy sera. Est-ce que tu as des dates en tête Benjamin ?

Benjamin Bellamy : 28 et 29 octobre.

Frédéric Couchet : 28 et 29 octobre 2023. Vous pourrez rencontrer Benjamin et bien sûr ils reviendront.
C'était Carine Fillot, figure fondatrice d’Elson, et Benjamin Bellamy fondateur et dirigeant de la société Ad Aures et de Castopod.
Je vous souhaite une belle fin de journée et à bientôt

Carine Fillot : Merci.

Benjamin Bellamy : Merci. Vous aussi.

Frédéric Couchet : Je suis désolé, Julie, on ne va pas faire de pause musicale, on va passer directement au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Interview de Cécilia Bossard, membre de Duchess France, consultante chez Shodo Nantes 1 h 13 min 25

Frédéric Couchet : Nous allons passer au sujet suivant.