Différences entre les versions de « Émission Libre à vous ! diffusée mardi 24 mai 2022 sur radio Cause Commune »

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<b>Voix off : </b><em>Libre à vous !</em>, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
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<b>Voix off : </b><em>Libre à vous !</em>, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
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<b>Frédéric Couchet : </b>Bonjour à toutes. Bonjour à tous.<br/>
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En introduction à cette émission, je vais vous demander de penser au pire site web que vous avez visité dernièrement. Pas forcément le plus moche qui est une notion très subjective, mais celui qui vous a causé le plus de frustrations. C’est bon ! Vous l’avez en tête ? Espérons que ce ne soit las celui de la radio ou celui de l’April, évidemment. Nos invités pour le sujet principal travaillent pour éviter ces frustrations, travaillent dans la qualité web ou l’assurance qualité web, on verra la précision, travaillent à rendre le Web meilleur. On en parle dans une quinzaine de minutes. Avec également au programme la chronique et Lorette Costy intitulée « Suivi du bol alimentaire algorithmiquement traçant et observateur », titre un peu énigmatique, il sera question de Gmail et aussi de caca. Et enfin la chronique d’Isabella Vanni en fin d’émission sur le quiz de l’Expolibre.
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Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de <em>Libre à vous !</em>, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques.<br/>
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Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.
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Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou nous poser toute question.
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Nous sommes mardi 24 mai 2022, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
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Toujours avec précision elle réalise l’émission, c’est ma collègue Isabella Vanni. Bonjour Isa.
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<b>Isabella Vanni : </b>Bonjour Fred..
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<b>Frédéric Couchet : </b>Nous vous souhaitons une excellente écoute.
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==Chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy intitulée « Suivi du bol alimentaire algorithmiquement traçant et observateur »==
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<b>Frédéric Couchet : </b>Comprendre Internet et ses techniques pour mieux l’utiliser, en particulier avec des logiciels libres et services respectueux des utilisatrices et utilisateurs pour son propre bien être en particulier et celui de la société en général, c‘est la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent Costy, administrateur de l’April et de sa fille Lorette. Le titre de la chronique du jour « Suivi du bol alimentaire algorithmiquement traçant et observateur ».
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On se retrouve dans dix min utes
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<b>Lorette Costy : </b>Papa ! Au secours ! Je suis tombé sur un de tes camarades libristes en cherchant un taf estival et il s’est gentiment moqué de moi parce que j’avais une adresse Gmail !
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<b>Laurent Costy : </b>Rouloulou, ils sont coquins parfois ces libristes. J’espère qu’il t’a donné une raison quant à cette gentille moquerie et qu’il t’a proposé de t’offrir l’hébergement d’un mail ou, à minima, qu’il t’a filé l’adresse du site chatons.org !
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<b>Lorette Costy : </b>En fait non, il m’a juste proposé un travail ! Comme c’est ce que je cherchais, j’ai habilement et subtilement éludé la question du mail. Mais je veux bien comprendre pourquoi une adresse Gmail peut déclencher de la gentille moquerie.
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<b>Laurent Costy : </b>Tu veux une réponse politique, technique ou les deux ?
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<b>Lorette Costy : </b>Sur le plan politique, je vois déjà quelques éléments de réponse. Ne pas utiliser une adresse Gmail évite de renforcer une position largement dominante, logique ! Ceci étant, ne pas utiliser une adresse Gmail, c’est un peu comme soustraire une goutte de rhum d’une piscine olympique remplie de ce liquide euphorisant.
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<b>Laurent Costy : </b>Je vais cacher mes bouteilles. Je trouve que tu parles beaucoup de rhum en ce moment. Tu ne serais pas en train d’essayer d’oublier que tu passes des partiels en cette fin d’année ? Mais je comprends ton doute quant à l’efficacité d’une telle mesure. Les GAFAM sont trop puissants, cette raison-là peut sans doute déjà suffire pour agir mais sans se leurrer, effectivement, sur l’efficacité d’un tel acte.
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<b>Lorette Costy : </b>Il a dit aussi que Google lisait mes mails. Mais techniquement, ça me semble un peu compliqué de changer d’adresse mail. Et ça prend du temps. Il faut aussi que j’informe mes contacts toussa, c’st long !
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<b>Laurent Costy : </b>Sur le fait que Google lit les mails, si on en croit le <em>Journal du Geek</em> en 2018 qui croit leurs conditions générales d’utilisation, il semblerait que cette pratique ait cessé. Tu noteras que ça fait plein de conditionnel tout ça ! Bien sûr, on n’a aucun moyen, en tant qu’utilisateur et utilisatrice, d’en avoir la certitude.
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<b>Lorette Costy : </b>D’un autre côté, s’il fallait payer des gens pour lire les contenus des mails, étant donné le nombre de courriels qui voyagent sur Internet chaque minute, voire chaque seconde, il faudrait payer beaucoup de gens. Ce n’est pas l’argent qui manque chez eux, certes, mais comme ils croient d’abord en la machine avant de croire en l’être humain, j’imagine qu’il y a des algorithmes qui les remplacent pour cette fastidieuse tâche ?
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<b>Laurent Costy : </b>Mais carrément ! Je t’en parle après de ces algorithmes, mais, de toute façon, je suis convaincu qu’ils n’ont plus vraiment besoin de lire dans le détail le contenu des mails. Les métadonnées leur permettent déjà de nous identifier, de prédire nos comportements et de se faire des péta-centimes d’euros avec l’obscur système spéculatif sur lequel la publicité programmatique repose.
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<b>Lorette Costy : </b>Ah oui, le livre <em>Le grand krach de l’attention</em> de Tim Hwang parle de ça justement. Il a étudié le marché de la publicité programmatique.
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<b>Laurent Costy : </b>Toi, tu as encore fouillé dans mes tiroirs ! Je vois super bien ce que c’est la publicité programmatique mais tu peux, peut-être l’expliquer aux poditeuses et poditeurs pour lever toute ambiguïté et probablement des lièvres ?
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<b>Lorette Costy : </b>Je fais un peu ton boulot là, nan ? Ça fera deux caramels et un roudoudou. Déjà que je lis tes livres sérieux pendant que tu lis des bédés ! Bon, Bref ! La publicité programmatique c’est ce système d’enchères qui permet de vendre, en quelques millisecondes, des espaces publicitaires sur des sites internet en fonction de profils de personnes prédéfinies.
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<b>Laurent Costy : </b>Si je comprends bien, supposons que je sois pèdègè d’une startup qui vend des toilettes connectées. On appellerait ce merveilleux produit le « Cacaconnect ».
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<b>Lorette Costy : </b>Tu préfères pas S.C.AT.O pour Suivi du « Caca algorithmiquement traçant et Observateur ? » J’ai même le sous-titre, « S.C.A.T.O, des toilettes qui vous suivent à la trace ». C’est tout un art de vendre de la m..
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<b>Laurent Costy : </b>Va pour S.C.A.T.O ! Donc, pour faire de la publicité, je vais sur une plateforme qui offre ce service, je choisis mes critères, par exemple classe sociale ++ – désolé, les toilettes connectées, ça coûte cher –, tranche d’âge plutôt seniors mais aussi couple avec enfants car, pour certains parents, publier le premier caca dans le pot sur insta ne suffit plus, ils ont aussi besoin de suivre dans le temps l’évolution du caca mou de leur enfant. Et S.C.A.T.O le fait pour vous !
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<b>Lorette Costy : </b>C’est un peu simplifié mais ça donne une bonne idée !<br/>
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Donc, Tim Hwang, dans son livre, explique qu’il a analysé le marché de la publicité programmatique et qu’il retrouve des similitudes avec la crise des subprimes en 2008 par exemple. Il estime que l’on est à la veille de l’éclatement d’une bulle dans ce domaine.
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<b>Laurent Costy : </b>Étant donné l’obscurité qui règne dans le domaine et les structures impliquées, souvent juge et partie, son hypothèse est très probable finalement. Bref, bon bouquin donc ?
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<b>Lorette Costy : </b>Oui, à ceci près qu’il ne sait pas imaginer un Internet sans publicité, il n’y croit pas. À la fin de son livre il invente, pour les besoins de sa démonstration, un réseau social non adossé à la publicité alors qu’il y a tout le Fédiverse avec Mastodon, PeerTube, par exemple, qui existe et qui fonctionne très bien ! Ça montre une certaine ignorance de la part de l’auteur, mais il est américain et le Fédiverse n’est peut-être pas aussi promu qu’en Europe.
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<b>Laurent Costy : </b>OK, mais peut-on revenir à la lecture des mails par Google, jeune fille indisciplinée qui lorgne trop ma table de nuit ?
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<b>Lorette Costy : </b>Oui mais ça fera deux roudoudous supplémentaires. C’est comme ça, c’est pour t’apprendre à tenir ton podcast.
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<b>Laurent Costy : </b>D’accord miss morale. Il faut en fait distinguer la lecture automatique et la lecture par des yeux d’êtres humains. Google affirme que des yeux humains, sauf exception comme ils disent dans les  CGU, ne lisent pas les mails, mais ça ne veut pas dire que des robots ne le font pas. Un ponte de la NSA aurait dit un jour : « Un logiciel qui lit votre courrier, c’est comme un chien qui vous voit nu, ça ne compte pas ». Moi je dis que c’est pire parce qu’il arrive à lire dans les désirs profonds !
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<b>Lorette Costy : </b>Oui, et comme d’habitude, ils en font un argument de promotion et de défense de l’utilisateur et de l’utilisatrice : « Nos fonctionnalités de filtrage du spam optimisées par l'IA bloquent près de 10 millions d'e-mails indésirables par minute ! », c’est génial sauf que symétriquement à bas bruit, ils collectent et scannent automatiquement nos données.
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<b>Laurent Costy : </b>La meilleure preuve est peut-être les propos d’un autre géant du numérique qui excelle dans sa capacité à empapaouter les gens : Microsoft, pour ne pas le nommer. Il affirmait en 2012, je cite, c’est croustillant : « La messagerie Gmail peut toujours dire qu’elle «analyse» vos messages afin de vérifier qu’ils ne contiennent pas de spam, c’est bien votre vie privée qu’elle scrute.»
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<b>Lorette Costy : </b>Même si la différence entre une IA et un humain est qu’il n’y a pas de « jugement » dans le 1er cas, finalement le résultat est le même : très crade. Il s’agit toujours de ranger les gens dans des cases, pour toujours mieux profiler, vendre et dominer. Et puis, l’examen par un programme, ça peut aussi être l’étape préalable pour trier ce qu’un humain lira.
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<b>Laurent Costy : </b>En effet. Et d’ailleurs, quand on domine on fixe les règles. Et quand on fixe les règles, on décide qui diffuse des bons mails et qui diffuse des spams.
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<b>Lorette Costy : </b>Je le décrète ici, le spam est la 8e plaie d’Égypte de l’Internet des sauterelles. Si on reprend l’analogie de notre chronique précédente – au passage, chronique ayant reçu cinq étoiles sur cinq dans l’excellent « Observatoire des Hackers Vaillants » – si on reprend l’analogie c’est-à-dire 1 mail = 1/2 verre de rhum, alors, 600 millions d’indésirables par heure, ça fait plusieurs piscines olympiques de rhum gaspillé !
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<b>Laurent Costy : </b>C’est un des nombreux effets pervers de la publicité sur Internet qui a contribué à ce flot de spams continu, vomitif et énergivore. Les plateformes qui ont consolidé leur fortune colossale sur la publicité essaient de contrôler ce vomi produit mais rechignent à interroger et modifier le modèle en amont, car ce serait trop dangereux pour leurs profits et leur pouvoir.
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<b>Lorette Costy : </b>Tu parles de nombreux effets pervers ! Il y aurait d’autres ? En dehors aussi de la logique publicitaire globale qui doit toujours faire vendre plus, augmenter la croissance, donc accélérer le processus de dégradation de nos écosystèmes sociaux et environnementaux ? Tout ça, c’est déjà pas mal quand même !
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<b>Laurent Costy : </b>C’est cette capacité à décider pour les autres et à dominer. J’ai halluciné en échangeant avec mes petits camarades des systèmes d’information des Ceméa de voir à quel point la gestion d’un serveur de mail était devenu un métier à part entière. Il faut sans cesse surveiller les notes de « fiabilité » attribuée au serveur. Si une des boîtes mail gérées par le serveur a été hackée et qu’elle a diffusé du spam, c’est tout le serveur qui est blacklisté et il faut alors contacter les gros relayeurs de mails – laposte.net, Gmail, etc – pour montrer patte blanche et expliquer qu’on est gentil. C’est zéta-galère !
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<b>Lorette Costy : </b>Un peu comme si un facteur automatique lisait les lettres qui lui passent entre les doigts, détectait le mot « vendre et S.C.A.T.O » et qu’il gardait la lettre estimant que c’est de la pub alors que j’écrivais à mamie que je faisais une chronique avec toi pour vendre des S.C.A.T.O. On est suivi à la trace !
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<b>Laurent Costy : </b>Exactement ! Sans compter que les serveurs sont parfois bloqués suite à des faux positifs ou sans même que l’on puisse connaître les raisons profondes du blocage !
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<b>Lorette Costy : </b>Et pour mon mail du coup ? Tu m’as plutôt convaincue, en fait, que j’aurai moins de problèmes en restant chez les puissants !
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<b>Laurent Costy : </b>Ton côté rebelle est trop développé ! Je sais que tu as envie, au plus profond de toi, de contribuer aux changements pour le mieux, même si ça peut paraître insignifiant dans l’instant ! Donc il faut que l’on regarde deux aspects : d’abord choisir le fournisseur alternatif en fonction de tes besoins et se donner une stratégie de migration adaptée aussi à ces besoins.
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<b>Lorette Costy : </b>Tu n’avais pas un serveur de mails sur ta brique Internet commandée chez Neutrinet ?
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<b>Élie Sloïm : </b>Toutaffé ! Je vois que tu suis mes achats qui permettent de s’émanciper numériquement petit à petit. Néanmoins...
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<b>Lorette Costy : </b>Du coup, il faut aller à la maternité pour avoir un nouveau-né.
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<b>Laurent Costy : </b>Néanmoins quand même donc, je ne recommande pas cette solution. Ce serveur, étant donné mes compétences, est plutôt à considérer comme serveur expérimental. Je ne préfère pas garantir un service continu avec assistance 24/24. D’autant que je vais sans doute couper ce serveur la nuit pour des questions énergétiques. D’autres personnes utilisent cette brique internet avec Yunohost « en production » comme on dit, mais ils sont plus sûrs d’eux et compétents.
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<b>Lorette Costy : </b>Oh ! Mais tu as d’autres compétences mon Pezy papa. Comme celle de savoir clore une chronique avant qu’elle ne soit trop longue par exemple.
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<b>Laurent Costy : </b>C’est vrai, tu me connais bien ! On va donc se donner rendez-vous une prochaine fois pour voir ensemble comment changer d’adresse en douceur et s’émanciper dans la joie et la bonne humeur ! Je te pope un bisou sur le front !
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<b>Lorette Costy : </b>Imap-rend plein de choses mon Pezy papa, c’est cool. Plein de bisous chiffrés !
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[Virgule sonore]
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<b>Frédéric Couchet : </b>C’était la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy. On suivra sans doute en juin la suite de leurs aventures.
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Nous allons faire une pause musicale.
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<b>Frédéric Couchet : </b>Après cette pause nous parlerons de qualité web ou d’assurance qualité web nous verrons avec nos invités. En attendant nous allons écouter <em>Ilotana</em> par Zero Project. On se retrouve 3 minutes 30. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
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<b>Pause musicale : </b><em>Ilotana</em> par Zero Project.
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<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.
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<b>Frédéric Couchet : </b>Nous venons d’écouter <em>Ilotana</em> par Zero Project, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By. Occasion pour moi de rappeler que toutes nos pauses musicales sous des licences libres qui permettent de les partager librement avec vos proches, de les télécharger parfaitement légalement, de les remixer y compris pour des usages commerciaux. Tout à l’heure on parlera d’ailleurs d’un projet qui met en avant des musiques sous licence libres dans les médiathèques.
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<b>Frédéric Couchet : </b>Passons maintenant à notre sujet suivant.
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==La qualité web avec Élie Sloïm, fondateur et président de la société Opquast, et Delphine Malassingne responsable qualité chezEkino==
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<b>Frédéric Couchet : </b>Nous allons poursuivre par notre sujet principal

Version du 25 mai 2022 à 16:12


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 24 mai 2022 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : Lorette Costy - Laurent Costy - Frédéric Couchet - à la régie

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 24 Mai 2022

Durée : 1 h 30 min

[URL Podcast ]

[URL Références concernant l'émission]

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : Déjà prévue

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.


Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
En introduction à cette émission, je vais vous demander de penser au pire site web que vous avez visité dernièrement. Pas forcément le plus moche qui est une notion très subjective, mais celui qui vous a causé le plus de frustrations. C’est bon ! Vous l’avez en tête ? Espérons que ce ne soit las celui de la radio ou celui de l’April, évidemment. Nos invités pour le sujet principal travaillent pour éviter ces frustrations, travaillent dans la qualité web ou l’assurance qualité web, on verra la précision, travaillent à rendre le Web meilleur. On en parle dans une quinzaine de minutes. Avec également au programme la chronique et Lorette Costy intitulée « Suivi du bol alimentaire algorithmiquement traçant et observateur », titre un peu énigmatique, il sera question de Gmail et aussi de caca. Et enfin la chronique d’Isabella Vanni en fin d’émission sur le quiz de l’Expolibre.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques.
Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou nous poser toute question.

Nous sommes mardi 24 mai 2022, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

Toujours avec précision elle réalise l’émission, c’est ma collègue Isabella Vanni. Bonjour Isa.

Isabella Vanni : Bonjour Fred..

Frédéric Couchet : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

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Chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy intitulée « Suivi du bol alimentaire algorithmiquement traçant et observateur »

Frédéric Couchet : Comprendre Internet et ses techniques pour mieux l’utiliser, en particulier avec des logiciels libres et services respectueux des utilisatrices et utilisateurs pour son propre bien être en particulier et celui de la société en général, c‘est la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent Costy, administrateur de l’April et de sa fille Lorette. Le titre de la chronique du jour « Suivi du bol alimentaire algorithmiquement traçant et observateur ». On se retrouve dans dix min utes

Lorette Costy : Papa ! Au secours ! Je suis tombé sur un de tes camarades libristes en cherchant un taf estival et il s’est gentiment moqué de moi parce que j’avais une adresse Gmail !

Laurent Costy : Rouloulou, ils sont coquins parfois ces libristes. J’espère qu’il t’a donné une raison quant à cette gentille moquerie et qu’il t’a proposé de t’offrir l’hébergement d’un mail ou, à minima, qu’il t’a filé l’adresse du site chatons.org !

Lorette Costy : En fait non, il m’a juste proposé un travail ! Comme c’est ce que je cherchais, j’ai habilement et subtilement éludé la question du mail. Mais je veux bien comprendre pourquoi une adresse Gmail peut déclencher de la gentille moquerie.

Laurent Costy : Tu veux une réponse politique, technique ou les deux ?

Lorette Costy : Sur le plan politique, je vois déjà quelques éléments de réponse. Ne pas utiliser une adresse Gmail évite de renforcer une position largement dominante, logique ! Ceci étant, ne pas utiliser une adresse Gmail, c’est un peu comme soustraire une goutte de rhum d’une piscine olympique remplie de ce liquide euphorisant.

Laurent Costy : Je vais cacher mes bouteilles. Je trouve que tu parles beaucoup de rhum en ce moment. Tu ne serais pas en train d’essayer d’oublier que tu passes des partiels en cette fin d’année ? Mais je comprends ton doute quant à l’efficacité d’une telle mesure. Les GAFAM sont trop puissants, cette raison-là peut sans doute déjà suffire pour agir mais sans se leurrer, effectivement, sur l’efficacité d’un tel acte.

Lorette Costy : Il a dit aussi que Google lisait mes mails. Mais techniquement, ça me semble un peu compliqué de changer d’adresse mail. Et ça prend du temps. Il faut aussi que j’informe mes contacts toussa, c’st long !

Laurent Costy : Sur le fait que Google lit les mails, si on en croit le Journal du Geek en 2018 qui croit leurs conditions générales d’utilisation, il semblerait que cette pratique ait cessé. Tu noteras que ça fait plein de conditionnel tout ça ! Bien sûr, on n’a aucun moyen, en tant qu’utilisateur et utilisatrice, d’en avoir la certitude.

Lorette Costy : D’un autre côté, s’il fallait payer des gens pour lire les contenus des mails, étant donné le nombre de courriels qui voyagent sur Internet chaque minute, voire chaque seconde, il faudrait payer beaucoup de gens. Ce n’est pas l’argent qui manque chez eux, certes, mais comme ils croient d’abord en la machine avant de croire en l’être humain, j’imagine qu’il y a des algorithmes qui les remplacent pour cette fastidieuse tâche ?

Laurent Costy : Mais carrément ! Je t’en parle après de ces algorithmes, mais, de toute façon, je suis convaincu qu’ils n’ont plus vraiment besoin de lire dans le détail le contenu des mails. Les métadonnées leur permettent déjà de nous identifier, de prédire nos comportements et de se faire des péta-centimes d’euros avec l’obscur système spéculatif sur lequel la publicité programmatique repose.

Lorette Costy : Ah oui, le livre Le grand krach de l’attention de Tim Hwang parle de ça justement. Il a étudié le marché de la publicité programmatique.

Laurent Costy : Toi, tu as encore fouillé dans mes tiroirs ! Je vois super bien ce que c’est la publicité programmatique mais tu peux, peut-être l’expliquer aux poditeuses et poditeurs pour lever toute ambiguïté et probablement des lièvres ?

Lorette Costy : Je fais un peu ton boulot là, nan ? Ça fera deux caramels et un roudoudou. Déjà que je lis tes livres sérieux pendant que tu lis des bédés ! Bon, Bref ! La publicité programmatique c’est ce système d’enchères qui permet de vendre, en quelques millisecondes, des espaces publicitaires sur des sites internet en fonction de profils de personnes prédéfinies.

Laurent Costy : Si je comprends bien, supposons que je sois pèdègè d’une startup qui vend des toilettes connectées. On appellerait ce merveilleux produit le « Cacaconnect ».

Lorette Costy : Tu préfères pas S.C.AT.O pour Suivi du « Caca algorithmiquement traçant et Observateur ? » J’ai même le sous-titre, « S.C.A.T.O, des toilettes qui vous suivent à la trace ». C’est tout un art de vendre de la m..

Laurent Costy : Va pour S.C.A.T.O ! Donc, pour faire de la publicité, je vais sur une plateforme qui offre ce service, je choisis mes critères, par exemple classe sociale ++ – désolé, les toilettes connectées, ça coûte cher –, tranche d’âge plutôt seniors mais aussi couple avec enfants car, pour certains parents, publier le premier caca dans le pot sur insta ne suffit plus, ils ont aussi besoin de suivre dans le temps l’évolution du caca mou de leur enfant. Et S.C.A.T.O le fait pour vous !

Lorette Costy : C’est un peu simplifié mais ça donne une bonne idée !
Donc, Tim Hwang, dans son livre, explique qu’il a analysé le marché de la publicité programmatique et qu’il retrouve des similitudes avec la crise des subprimes en 2008 par exemple. Il estime que l’on est à la veille de l’éclatement d’une bulle dans ce domaine.

Laurent Costy : Étant donné l’obscurité qui règne dans le domaine et les structures impliquées, souvent juge et partie, son hypothèse est très probable finalement. Bref, bon bouquin donc ?

Lorette Costy : Oui, à ceci près qu’il ne sait pas imaginer un Internet sans publicité, il n’y croit pas. À la fin de son livre il invente, pour les besoins de sa démonstration, un réseau social non adossé à la publicité alors qu’il y a tout le Fédiverse avec Mastodon, PeerTube, par exemple, qui existe et qui fonctionne très bien ! Ça montre une certaine ignorance de la part de l’auteur, mais il est américain et le Fédiverse n’est peut-être pas aussi promu qu’en Europe.

Laurent Costy : OK, mais peut-on revenir à la lecture des mails par Google, jeune fille indisciplinée qui lorgne trop ma table de nuit ?

Lorette Costy : Oui mais ça fera deux roudoudous supplémentaires. C’est comme ça, c’est pour t’apprendre à tenir ton podcast.

Laurent Costy : D’accord miss morale. Il faut en fait distinguer la lecture automatique et la lecture par des yeux d’êtres humains. Google affirme que des yeux humains, sauf exception comme ils disent dans les CGU, ne lisent pas les mails, mais ça ne veut pas dire que des robots ne le font pas. Un ponte de la NSA aurait dit un jour : « Un logiciel qui lit votre courrier, c’est comme un chien qui vous voit nu, ça ne compte pas ». Moi je dis que c’est pire parce qu’il arrive à lire dans les désirs profonds !

Lorette Costy : Oui, et comme d’habitude, ils en font un argument de promotion et de défense de l’utilisateur et de l’utilisatrice : « Nos fonctionnalités de filtrage du spam optimisées par l'IA bloquent près de 10 millions d'e-mails indésirables par minute ! », c’est génial sauf que symétriquement à bas bruit, ils collectent et scannent automatiquement nos données.

Laurent Costy : La meilleure preuve est peut-être les propos d’un autre géant du numérique qui excelle dans sa capacité à empapaouter les gens : Microsoft, pour ne pas le nommer. Il affirmait en 2012, je cite, c’est croustillant : « La messagerie Gmail peut toujours dire qu’elle «analyse» vos messages afin de vérifier qu’ils ne contiennent pas de spam, c’est bien votre vie privée qu’elle scrute.»

Lorette Costy : Même si la différence entre une IA et un humain est qu’il n’y a pas de « jugement » dans le 1er cas, finalement le résultat est le même : très crade. Il s’agit toujours de ranger les gens dans des cases, pour toujours mieux profiler, vendre et dominer. Et puis, l’examen par un programme, ça peut aussi être l’étape préalable pour trier ce qu’un humain lira.

Laurent Costy : En effet. Et d’ailleurs, quand on domine on fixe les règles. Et quand on fixe les règles, on décide qui diffuse des bons mails et qui diffuse des spams.

Lorette Costy : Je le décrète ici, le spam est la 8e plaie d’Égypte de l’Internet des sauterelles. Si on reprend l’analogie de notre chronique précédente – au passage, chronique ayant reçu cinq étoiles sur cinq dans l’excellent « Observatoire des Hackers Vaillants » – si on reprend l’analogie c’est-à-dire 1 mail = 1/2 verre de rhum, alors, 600 millions d’indésirables par heure, ça fait plusieurs piscines olympiques de rhum gaspillé !

Laurent Costy : C’est un des nombreux effets pervers de la publicité sur Internet qui a contribué à ce flot de spams continu, vomitif et énergivore. Les plateformes qui ont consolidé leur fortune colossale sur la publicité essaient de contrôler ce vomi produit mais rechignent à interroger et modifier le modèle en amont, car ce serait trop dangereux pour leurs profits et leur pouvoir.

Lorette Costy : Tu parles de nombreux effets pervers ! Il y aurait d’autres ? En dehors aussi de la logique publicitaire globale qui doit toujours faire vendre plus, augmenter la croissance, donc accélérer le processus de dégradation de nos écosystèmes sociaux et environnementaux ? Tout ça, c’est déjà pas mal quand même !

Laurent Costy : C’est cette capacité à décider pour les autres et à dominer. J’ai halluciné en échangeant avec mes petits camarades des systèmes d’information des Ceméa de voir à quel point la gestion d’un serveur de mail était devenu un métier à part entière. Il faut sans cesse surveiller les notes de « fiabilité » attribuée au serveur. Si une des boîtes mail gérées par le serveur a été hackée et qu’elle a diffusé du spam, c’est tout le serveur qui est blacklisté et il faut alors contacter les gros relayeurs de mails – laposte.net, Gmail, etc – pour montrer patte blanche et expliquer qu’on est gentil. C’est zéta-galère !

Lorette Costy : Un peu comme si un facteur automatique lisait les lettres qui lui passent entre les doigts, détectait le mot « vendre et S.C.A.T.O » et qu’il gardait la lettre estimant que c’est de la pub alors que j’écrivais à mamie que je faisais une chronique avec toi pour vendre des S.C.A.T.O. On est suivi à la trace !

Laurent Costy : Exactement ! Sans compter que les serveurs sont parfois bloqués suite à des faux positifs ou sans même que l’on puisse connaître les raisons profondes du blocage !

Lorette Costy : Et pour mon mail du coup ? Tu m’as plutôt convaincue, en fait, que j’aurai moins de problèmes en restant chez les puissants !

Laurent Costy : Ton côté rebelle est trop développé ! Je sais que tu as envie, au plus profond de toi, de contribuer aux changements pour le mieux, même si ça peut paraître insignifiant dans l’instant ! Donc il faut que l’on regarde deux aspects : d’abord choisir le fournisseur alternatif en fonction de tes besoins et se donner une stratégie de migration adaptée aussi à ces besoins.

Lorette Costy : Tu n’avais pas un serveur de mails sur ta brique Internet commandée chez Neutrinet ?

Élie Sloïm : Toutaffé ! Je vois que tu suis mes achats qui permettent de s’émanciper numériquement petit à petit. Néanmoins...

Lorette Costy : Du coup, il faut aller à la maternité pour avoir un nouveau-né.

Laurent Costy : Néanmoins quand même donc, je ne recommande pas cette solution. Ce serveur, étant donné mes compétences, est plutôt à considérer comme serveur expérimental. Je ne préfère pas garantir un service continu avec assistance 24/24. D’autant que je vais sans doute couper ce serveur la nuit pour des questions énergétiques. D’autres personnes utilisent cette brique internet avec Yunohost « en production » comme on dit, mais ils sont plus sûrs d’eux et compétents.

Lorette Costy : Oh ! Mais tu as d’autres compétences mon Pezy papa. Comme celle de savoir clore une chronique avant qu’elle ne soit trop longue par exemple.

Laurent Costy : C’est vrai, tu me connais bien ! On va donc se donner rendez-vous une prochaine fois pour voir ensemble comment changer d’adresse en douceur et s’émanciper dans la joie et la bonne humeur ! Je te pope un bisou sur le front !

Lorette Costy : Imap-rend plein de choses mon Pezy papa, c’est cool. Plein de bisous chiffrés !

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : C’était la chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy. On suivra sans doute en juin la suite de leurs aventures. Nous allons faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Frédéric Couchet : Après cette pause nous parlerons de qualité web ou d’assurance qualité web nous verrons avec nos invités. En attendant nous allons écouter Ilotana par Zero Project. On se retrouve 3 minutes 30. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Ilotana par Zero Project.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Ilotana par Zero Project, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By. Occasion pour moi de rappeler que toutes nos pauses musicales sous des licences libres qui permettent de les partager librement avec vos proches, de les télécharger parfaitement légalement, de les remixer y compris pour des usages commerciaux. Tout à l’heure on parlera d’ailleurs d’un projet qui met en avant des musiques sous licence libres dans les médiathèques.

[Jingle]

Frédéric Couchet : Passons maintenant à notre sujet suivant.

[Virgule musicale]

La qualité web avec Élie Sloïm, fondateur et président de la société Opquast, et Delphine Malassingne responsable qualité chezEkino

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par notre sujet principal