Comprendre les enjeux du vote électronique - Chantal Enguehard.

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Titre : Comprendre les enjeux du vote électronique

Intervenante : Chantal Enguehard

Lieu : Café Citoyen - Restaurant L’Atelier - La Chapelle sur Erdre

Date : mai 2019 2020

Durée : 1 h 11 min 14

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Licence de la transcription : Verbatim

Illustration :

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcrit : MO

Description

Alors que nous rentrons dans des périodes électorales il vous est proposé de mieux connaître les mécanismes du vote électronique et les enjeux démocratiques afférents.
En France, lors des élections politiques, des dispositifs de vote électronique sont utilisés depuis plus de 15 ans. Des entreprises, et même l’État, organisent des élections professionnelles par Internet. Des pays étrangers fournissent aussi des exemples instructifs.
Il s’agit d’évaluer la pertinence de cette évolution au regard des qualités attendues d’une élection démocratique : secret du vote, transparence, sincérité des résultats.
En France, certaines organisations tentent de promouvoir le vote électronique. Lors de l’élection présidentielle de 2007, huit des douze candidats ont pris position pour un moratoire sur le vote électronique. Trois n’ont pas pris position et un seul a soutenu le vote électronique : Nicolas Sarkozy.
Plusieurs partis politiques émettent des doutes sur l’utilisation de ces machines. En 2007, certains d’entre eux voyaient un risque dans les machines à voter. Depuis, il semble que beaucoup aient changé d’avis, du moins pour les scrutins organisés au niveau de leur structure politique.
Voilà donc autant d’éléments qui devraient susciter le débat, après avoir pris connaissance des réalités du vote électronique grâce à Chantal Enguehard.

Transcription

Mon idée c’est de vous donner des connaissances que vous allez rassembler vous-mêmes pour comprendre qu’il y a des problèmes pour le vote électronique.
Voici à peu près le plan.
C’est un problème pluridisciplinaire, ce qui explique qu’il est mal compris, puisque chacun dans sa discipline n’arrive pas à comprendre.
Je donnerai quelques exemples d’usage. Les concepts qu’il est très important de bien comprendre ; ce sont ces concepts qui, mis ensemble, font une impossibilité. Une petite typologie parce qu’il y a plein de sortes de systèmes de vote électronique et puis la grosse partie ça va être en fait qu’est-ce qui se passe quand on passe du vote papier au voté électronique. Ensuite on va redescendre vers d’autres détails c’est-à-dire le bulletin de vote, puisque la dématérialisation pose des problèmes on s’est dit on va rematérialiser, donc finalement les recherches qui se développent en ce moment, les futurs systèmes de vote électronique et puis quelques textes qui tordent les concepts, c’est pour ça que j’ai appelé cela « opacifier la transparence » et quelques observations si on a le temps. En arriver là déjà ce ne sera pas mal.

Pluridisciplinarité

D’abord les élections c’est l’affaire des sciences politiques. Les sciences politiques, je ne suis pas politiste, je suis informaticienne, ingénieur en informatique, donc très ignorante, mais j’ai fini par apprendre un peu ces choses.là.
Les sciences politiques s’intéressent entre autres aux formes du pouvoir et une des formes du pouvoir c’est d’élire des représentants par les élections. Ce que nous apprennent les sciences politiques c’est que les élections c’est un moyen de prendre une décision qui n’est pas consensuelle sans se taper dessus. Imaginez si on devait choisir le prochain président de la République à la dispute, on ne s’en sortirait jamais. Alors que quand on fait des élections en une journée c’est plié, quelques semaines si vous voulez. Il y a une campagne et puis à la fin c’est plié. Et surtout, ce qui est important, c’est qu’il faut voir ça comme un dispositif de maintien de la paix au sens où les gens qui ont perdu l’élection, leur candidat a perdu l’élection, eh bien ils acceptent la défaite. Une élection ratée c’est une élection où les gens se battent dans la rue, c’est une élection où il y a des désordres publics, c’est-à-dire qu’il y a des soupçons de fraude, etc., des soupçons de triche, les gens n’acceptent pas la défaite. Donc une élection réussie c’est une élection où tout le monde accepte le résultat de l’élection.
Pour que les gens acceptent le résultat des élections il faut qu’ils aient des indices comme quoi ils peuvent avoir confiance dans la décision qui a été prise, dans le résultat électoral qui a été pris. Il faut qu’ils adhèrent au processus. Il faut qu’ils aient profondément conscience et confiance dans le fait que la personne qui a été désignée comme gagnante est effectivement celle qui a eu le plus de résultats, le plus de suffrages. Dans les pays où il y a des soupçons de fraude, il y a des émeutes dans la rue.

Ensuite on a une deuxième composante qui est le droit. Quand il y a des élections des fois il y a des fraudes, des fois il y a des gens qui rentrent avec des armes dans des bureaux de vote, des fois il y a des gens qui forcent les autres qu’ils ne passent pas par l’isoloir - je veux être sûr que tu vas voter pour machin ou machin. Dans ces cas-là c’est le droit qui va agir, c’est-à-dire qu’il va y avoir un contentieux électoral, une contestation du résultat électoral. Donc le droit agit. Il va y avoir des preuves, des témoignages. On va aller voir monsieur le juge, on dira « Monsieur le juge j’ai vu, dans tel bureau de vote il s’est passé ceci cela, etc. » Le juge peut annuler l’élection ou bien annuler quelques bureaux de vote. En général le juge évite parce que ça coûte cher d’organiser des élections. Il ne va pas annuler l’élection s’il y a eu une fraude sur dix enveloppes, sauf si la différence entre le candidat gagnant et son suivant est de moins de dix votes. Si vous avez une différence de 1500 voix entre deux candidats, soit vous apportez des témoignages disant qu’il y a a 2000 voix qui ont été fraudées et à ce moment-là il y a des chances que le juge annule ; si vous apportez des témoignages disant qu’il y a 200 voix - moi j’ai vu, ils ont rajout deux grosses enveloppes de 100 voix dans le dépouillement - eh bien 200 voix ça ne change pas l’élection, le juge ne touche rien même s’il y a eu faute, parce que des élections ça coûte cher, etc. C’est quand même le bon candidat qui a gagné, les 200 voix litigieuses n’auraient rien changé. En gros ça se règle comme ça, le juge fait bien ce qu’il veut.

Avec le vote électronique arrive une troisième discipline qui est l’informatique. Ni le politique ??? ni le droit ne comprennent rien à l’informatique et les informaticiens ne connaissent pas grand-chose au droit et aux sciences politiques non plus.
Ce qui est intéressant aussi c’est qu’avec l’informatique arrive le thème de la sécurité. Quand on parle de vote électronique, on parle tout le temps de sécurité. On n’en parle pas avec les autres élections. Vous voyez bien qu’avec les élections papier il n’y a pas le thème de la sécurité. On sait qu’il peut y avoir des fraudes et on sait comment les traiter : n recueille des preuves, on recueille des témoignages, on passe devant le juge ; on sait qu’il peut y avoir des trous de sécurité. Avec l’informatique on va nier le fait qu’il y a des trous de sécurité.
Comment un informaticien voit la question du vote ? Il dit « voilà un système, on a une fonction F, on a des entrées qui sont des votes, on a des résultats qui sont des résultats électoraux, on va collecter, on va additionner tous les votes et puis voilà, il faut se débrouiller pour qu’on respecte bien, qu’on compte bien, qu’on additionne bien ce qu’il faut ». Un informaticien dit « voilà, ça marche comme ça, c’est facile, on va compter les votes ». Il ne voit pas le problème.
Pourquoi il y a un problème ? C’est ce que je vais essayer de vous expliquer maintenant.

Les usages

Les usages, histoire de dépiler ça, parce que moi je le sais et vous vous ne savez pas et je sais que ça va vous interpeller tout le temps.
En France il y a des machines à voter qui sont utilisées pour à peu près un petit plus d’un million d’électeurs dans la région qui est la vôtre, il y en a Orvault, il y en a à Pornichet, il y en a à Coueron, il y en a à Blain en pleine campagne.
Il y a aussi du vote par Internet qui a été autorisé par le service civil pour les Français de l’étranger, pour les élections législatives, sachant que pour des problèmes de sécurité elles n’ont pas été autorisées aux dernières élections.
Et en revanche, pour les élections professionnelles, le vote par Internet est autorisé et de plus en plus utilisé dans l’indifférence générale, on peut le dire.
Après, on peut regarder un petit peu à l’international.
En Inde et au Brésil il y a des machines à voter depuis très longtemps.
Au Venezuela il y a des machines à voter dites vérifiables, j’en parlerai à la fin, avec émargement ??? c’est-à-dire que pour émarger on met son doigt, ça me pose question je me dis « tiens, on a recueilli les empreintes digitales de toute la population » !
En Estonie il y a du vote par Internet mais c’est optionnel, on peut choisir de voter papier. En revanche il y a un lien qui est gardé entre le vote électeur puisqu’on peut annuler son vote.
En Allemagne ils ont interdit les machines à voter.
En Hollande c’est le pays le plus avancé au monde, ils ont voté pendant 15 ans quasiment dans tout le pays avec des machines à voter et ils ont arrêté du jour au lendemain.
En Belgique ils sont en train de diminuer et après ça commence à gagner aussi en Afrique. Au RDC Congo, les dernières élections se sont faites avec des machines à voter qui ont été utilisées uniquement, enfin officiellement, pour imprimer les bulletins de vote, les choix des électeurs sur les bulletins de vote.

Les concepts

Je reviens maintenant sur les concepts.
Voici quelques principes qui sont associés à des élections qu’on va dire démocratiques, ce n’est probablement pas un mot qui conviendrait à des ???, mais tant pis.

D’abord l’unicité. L’unicité c’est une personne une voix. Là je vais expliquer par rapport au vote papier qu’on connaît tous bien, là c’est ??? par la liste d’émargement, une personne ne peut pas voter deux fois. Il y a d’autres pays où c’est ???, etc.

La confidentialité c’est le fait qu’on vote en secret. On voit bien qu’elle ne peut pas être respectée pour le vote à distance, quand on vote par correspondance à la maison personne ne peut s’assurer que vous êtes tout seul au moment où vous votez ; d’ailleurs on ne peut même pas s’assurer que c’est vous qui votez. Quand on est dans un bureau de vote, il y a l’isoloir qui va permettre de choisir votre bulletin tranquillement, il y a une enveloppe, on ne voit pas ce que vous avez choisi, et puis il y a environnement contrôlé. Le contrôle ce sont les membres du bureau de vote, c’est-à-dire que si jamais il y a quelqu’un qui vient vous embêter dans l’isoloir normalement il y a quelqu’un du bureau de vote qui va intervenir et qui va dire « non, vous n’avez pas le droit. »
Normalement, si deux personnes en âge de savoir ??? vont ensemble dans l’isoloir, les gens du bureau de vote vont intervenir en disant « non, vous n’avez pas le droit ». Dans les faits ce n’est pas toujours le fait. J’ai discuté avec des présidents de bureau de vote ils disent que quand il y a des gens très âgés qui viennent voter, qui sont aidés, c’est délicat, il y a des situations humaines qui sont compliquées. Bref ! Il y a la réalité.

L’anonymat c’est la rupture du lien entre l’électeur et le choix qu’il a exprimé. Par exemple dans un bureau de vote, quand on brasse les enveloppes, même si vous avez bien regardé l’enveloppe qu’a mise votre épouse dans l’urne pour savoir ce qu’elle vient de voter, ça va être dur de garder votre œil dessus jusqu’au dépouillement final. Je ne dis pas que c’est impossible, mais ce n’est pas gagné !

La sincérité, c’est un terme technique, je le dis, ça veut dire que c’est le bon candidat qui est déclaré gagnant. Ça ne veut pas dire que les comptes sont justes pile-poil, ça veut dire que c’est le bon qui est déclaré gagnant. La sincérité est assurée par le fait que le dépouillement est public et que les gens sont vigilants : on va faire attention à l’urne, on ne va pas laisser l’urne sans surveillance, on ne va autoriser que l’urne soit transportée pour être dépouillée ailleurs par exemple, ou bien il y a des ???, il y a des gens autour. Si vous n’avez jamais dépouillé, je vous encourage à le faire.

Et puis la transparence. C’est un terme intéressant parce qu’il n’est défini nulle part, il n’apparaît pas dans le code électoral, en fait c’est ce qui va permettre de faire les constats que les principes d’avant ne sont pas respectés. C’est grâce à la transparence qu’on va pouvoir voir que quelqu’un a glissé des enveloppes dans l’urne au moment du dépouillement. C’est la transparence qui va faire que j’ai vu donc je vais en apporter témoignage. Ou « Monsieur le président, il y a une porte qui a claqué et c’est bizarre, plein d’enveloppes dans l’urne n’étaient plus pareilles avant et après ». Depuis qu’il y a des urnes transparentes on ne fait plus la fraude qui consistait à échanger des urnes, qui était une fraude bien rodée.
C’est grâce à la transparence qu’on va pouvoir constater les atteintes aux principes et en apporter des preuves ou des témoignages.
C’est grâce à la transparence qu’on peut faire un contentieux électoral parce qu’un juge juge sur des témoignages ou des preuves. Il ne juge pas sur des statistiques ou quoi que ce soit ; il faut lui apporter du grain à moudre.
C’est grâce à la transparence que les électeurs vont avoir confiance dans le fait que c’est la bonne personne qui est déclarée gagnante à la fin de la journée. Tout le monde en est convaincu, on ne se bat pas dans les rues. On est sûr - on est déçu parfois – mais in est sûr que c’est elle qui a gagné et que les autres qui ont voté comme des cons ! Je suis filmée, pas dire ça !
Et cette confiance est absolument importante parce que c’est le fondement de la légitimité des élus. Quand il n’y a pas de confiance, quand les élections sont remises en cause, quand on pense qu’il y a eu fraude non seulement il y a des désordres dans la rue et des gens qui se battent, mais ensuite quand la personne élue veut pas gouverner on lui dit « mais toi tu n’as rien à faire là. Tu n’a pas été correctement élue, je ne te reconnais comme décideur ou comme mon directeur ou comme je ne sais pas qui ». Donc la personne n’est pas reconnue comme représentante de la volonté des électeurs, donc n’est pas légitime pour gouverner, et sans arrêt sa légitimité va être remise en cause, elle ne pourra pas travailler. Or il y a du boulot à faire ! La gestion d’un pays ou d’une organisation c’est du boulot.

Donc ce lien entre transparence, confiance et légitimité des élus est absolument fondamental pour les élections.

13’07

La transparence j’y reviens encore. Ça c’est une urne transparente.
La transparence c’est un continuum, ce n’est noir ou blanc. Là on a une belle urne transparente. D­epuis 1980 seulement on a des urnes transparentes en France.
Voilà une urne en bois, ce n’est pas mal une urne en bois mais c’est moins bien qu’une urne transparente, parce que si je veux être sûre qu’elle est vide, eh bien il faut que je l’ouvre et en plus il peut y avoir un double fond. Donc si c’est une urne en bois mais qu’on m’interdit de la toucher, je ne suis pas sûre qu’elle est vide ; ça c’est fait des urnes en bois avec double fond, c’est pour ça qu’on est passé aux urnes transparentes d’ailleurs.
Déjà on a perdu. Vous voyez, je ne peux pas toucher, donc je suis privée d’un des sens dont je dispose.
Il y a un troisième niveau, on vous dit « non, ce n’est pas vous qui allez voir. Il y a quelqu’un du bureau de vote qui va aller voir pour vous ». Vous allez demander à quelqu’un du bureau de vote le matin, avant le début de l’élection si l’urne est bien vide. Il va ouvrir l’urne, il va dire « oui, c’est bon », mais vous, vous n’avez pas vu. Vous voyez bien que ça commence à se dégrader.
Après il y a un ordinateur. Vous voyez que dans le troisième cas on a un intermédiaire qui est un intermédiaire humain et dans le quatrième cas on a un intermédiaire qui est un intermédiaire logiciel et matériel.
C’est ça la notion de transparence directe ou indirecte. Vos allez voir que le mot transparence est évidemment tordu pour lui faire dire autre chose.
Quand je parle de transparence c’est évidemment la transparence directe, celle qui s’exerce à l’aide de nos sens sans aucun intermédiaire matériel logiciel ou humain. Quand on va dans un bureau de vote on peut soi-même constater les choses, chaque électeur peut constater.
Et puis à l’intérieur c’est comme ça : à l’intérieur ce sont des circuits électroniques avec des électrons qui se déplacent et les électrons c’est tout petit et c’est très fragile.

Maintenant la notion de dématérialisation. On est dans un monde de plus en plus numérique et malheureusement c’est une notion qui n’est pas comprise.
Il y a ce tableau de Magritte Ceci n’est pas une pipe. Quand je l’ai vu enfant je ne comprenais pas. Je voyais bien que c’était une pipe ! Pourquoi c’est écrit Ceci n’est pas une pipe. En fait, je ne peux pas fumer de tabac avec ce tableau. En revanche je peux le rouler, je ne pourrais rouler une pipe, si je roule une pipe elle va être cassée.
Et puis les images de feu, je n’ai même pas peur, je ne me brûle pas, ce n’est pas un feu, c’est une image d’un feu. D’ailleurs je ne peux pas cuire des aliments avec. C’est une représentation d’un feu. Et là c’est une représentation d’une pipe.
D’ailleurs le tableau de Magritte s’appelle La trahison des images, il y a le mot trahison dedans, une représentation ça trahit quelque chose. Qu’est-ce que ça trahit ? Ça trahit qu’on a des propriétés physiques différentes. Avec une pipe je peux fumer du tabac , avec une représentation d’une pipe je ne peux pas fumer de tabac mais je peux la rouler et la photocopier, c’est juste pas la même chose, c’est autre chose.
Avec le vote électronique, on a la même chose : on a une représentation des objets du vote, avec des propriétés différentes qui vont poser des problèmes.
La difficulté qu’on a c’est que ni les juristes, ni les législateurs n’ont compris ce fondement de ce qu’est la dématérialisation. Donc la réalité ce n’est pas la représentation. C’est étonnant d’avoir à expliquer des choses comme ça en 2019, que les images ne sont pas des choses. C’est très étonnant !

Typologie

Voici une typologie assez rapide du vote électronique pour vous montrer qu’en fait il y a une myriade de dispositifs puisque ce sont des objets qui sont fabriqués par des industriels et chacun fait bien ce qu’il veut.
J’ai quand même mis trois axes.
Environnement contrôlé, c’est en bureau de vote.
Il y a le vote à distance. On peut faire du vote à distance par téléphone, par SMS, par Internet.
Vote hybride c’est quand on vote sur une carte qui va être dépouillée automatiquement par un scanner. Vous avez peut-être déjà voté comme ça dans le cadre professionnel ou pour des assurances.
Après il y a le cas où les bulletins de vote sont dématérialisés ou matérialisés. Par exemple stylo numérique ça c’est fait une fois mais on peut en parler quand même. Dans la plupart des pays on vote en cochant des cases sur un bulletin, la France est vraiment une exception avec le fait qu’on ait plusieurs bulletins, ça s’appelle du ???, je ne sais plus pourquoi, donc on coche des cases.
Quand on vote avec un stylo numérique, en fait dans le stylo il y a une caméra, il y a des repères, il y a des feuilles avec des repères, et à la fin ce sont les images de la caméra qui sont dépouillés qui vont permettre de savoir quelle case vous avez coché. Donc là vous avez un bulletin qui est matérialisé puisque vous avez coché une case. Par exemple le scanner aussi, le scanner sait que vous avez coché avec un stylo ??? et puis c’est dépouillé par scanner automatiquement. Il y a beaucoup ça aux États-Unis.

Ça c’est le deuxième axe et le troisième axe, le cercle, on a des systèmes qui vont gérer ou pas des émargements. Quand on vote par exemple dans un bureau de vote à Orvault où il y a des machines à voter, la machine à voter ne gère pas l’émargement, on émarge à côté : on rentre dans le bureau comme d’habitude, on va voter pas comme d’habitude sur sa machine à voter et ensuite on va signer le cahier comme d’habitude, donc c’est géré à part, c’est indépendant.
En revanche, quand on vote par Internet ou par téléphone, il faut d’abord se faire reconnaître de l’application, on a reçu au préalable identifiant et mot de passe et ensuite on vote. Donc on a l’application qui va gérer en même temps l’émargement, c’est-à-dire une fois que votre vote est enregistré, vous ne pourrez pas voter une deuxième fois avec le même mot de passe et ’identifiant. Maintenant si vous en avez reçu un du voisin… mais il ne faut pas le faire.

De vote en vote Électronique

Qu’est-ce qui se passe quand on passe du vote au vote électronique.
Tout à l’heure je vous ai expliqué que la transparence directe fonde la confiance. Bon ! La transparence directe c’est fini. Il n’y a plus de transparence avec le vote électronique ; ce sont des électrons, on ne peut pas les voir se déplacer il n’y a rien à faire. Donc c’est remplacé par des expertises.
On vous dit il n’y a pas de problème, il y a des experts, ils ont vérifié que tout va bien. Les experts, évidemment, ne peuvent pas tout vérifier, je reviendrai un petit peu là-dessus plus loin, et puis ce n’est pas direct puisque ce sont des experts. Par ailleurs, les expertises sont évidemment secrètes, partielles, partiales, etc. En tout cas il n’y a plus de transparence directe.
La deuxième conséquence. Je vais parler maintenant plus spécifiquement des machines à voter ou du vote par Internet, c’est ce qu’on a en France, on n’a plus de bulletin papier, on a une représentation numérique. Une représentation numérique, c’est quelque chose de très fugace et qui est transformé à plusieurs reprises, c’est ça qui est important. Quand on vote avec un bulletin papier, vous avez choisi votre bulletin papier, si tant est que l’urne a été bien surveillée, que, etc., que les membres du bureau de vote ont fait leur boulot, le bulletin qui est compté le soir au dépouillement c’est exactement le même que celui que vous avez mis dans l’enveloppe. Et à priori les bulletins sont payés par les candidats donc l’encre qui est dessus ne va pas bouger pour écrire le nom d’un autre candidat.
Il y a des propriétés physiques des bulletins papier. Ces propriétés ne sont pas reprises ou n’existent pas en ce qui concerne les représentations numériques. C’est le fameux truc du passage à la représentation.
Quand on vote sur une machine à voter ou par Internet, on fait un geste - soit appuie sur un bouton soit on clique -, ce geste est transformé en un petite impulsion électrique, cette impulsion électrique est transformée en un codage informatique ; ce codage va être lui-même transformé à de multiples reprises et à la fin on nous donne les résultats électoraux, mais ces transformations ne sont pas observables. Elles ne sont pas observables parce que si on les observait de bout en bout - on pourrait imaginer faire ça, il y a des usines où on fabrique des produits de haute technologie ou des médicaments par exemple où tout est tracé du début à la fin parce qu’il ne faut pas qu’il y ait de bugs, on peut tuer les gens - si on traçait du début à la fin on saurait qui a voté quoi. Donc le problème du vote est vraiment spécifique, c’est qu’en plus le vote doit être anonyme. On doit protéger le secret du vote. Donc on ne peut pas tracer. On a ce problème.
Quand on a dématérialisation et anonymat, ou dématérialisation et secret du vote, disons, eh bien on a forcément des résultats qui ne peuvent pas être vérifiés. Donc on est obligé d’accepter les résultats énoncés par le dispositif électronique sans être en mesure de les vérifier. Or, en tant qu’informaticien, on sait qu’il y a des bugs, je ne parle même pas de la fraude, en plus sur des défauts, parce que les élections ça se fraude il y a des enjeux. Mais les bugs suffisent.

On se dit qu’on ne peut pas vérifier, on va quand même essayer, on pourrait voir si les résultats sont à peu près justes ou pas.
On a une fonction, on a des entrées qui sont des votes, on a des résultats, est-ce que je peux prouver que les résultats sont bien conformes aux entrées qui ont été envoyées ? J’ ai exploré trois voies, si vous en voyez d’autres vous me le direz.
Vérification par approximation. On va se dire qu’on va regarder. Estimations statistiques concurrentes au vote, ça veut dire en même temps que le vote, ce vont les sondages en sortie d’urne. On va demander aux gens « vous avez voté quoi ? Vous avez voté quoi ? », on sait que c’est très fiable, sauf que si on dit qu’on va vérifier les résultats électoraux par rapport aux sondages de sortie d’urne, eh bien il ne faut plus faire d’élections, il faut faire des sondages ! Normalement on vérifie la justesse des sondages par rapport au résultat des élections. Donc ça, ça ne va pas ! Et puis ça ne marche pas de toute façon. Il y a eu aux États-Unis, au temps de Bush, des bureaux de vote où il y a eu des différences de 5 points entre les sondages de sortie d’urne et les résultats donnés par les machine à voter, ça, ça ne fait ni chaud ni froid au juge. Ce n’est pas une preuve, c’est un témoignage, ça ne veut rien dire.
Antérieures au vote, ça veut dire que les gens aiment voter à gauche donc ils vont continuer à voter à gauche, sauf que ça veut dire qu’on ne peut plus changer d’avis politique. L’alternance politique ça nourrit la vie démocratique, donc on ne pas dire que les gens vont voter pareil, ce n’est pas possible.
Donc les approximations ça ne marche pas.

Ensuite on peut se dire, c’est la tentation des expertises, on va dire que le système est immune de fautes, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de bug, on est sûr qu’il marche bien, donc on va le figer, parce qu’une fois qu’on a prouvé qu’il n’y a pas d’erreur, il ne faut plus qu’il bouge.
D’abord on ne sait pas faire des systèmes sans erreur, on sait faire les preuves de programme et sur des choses assez limitées. Si on veut prouver qu’une machine à voter est juste, ça coûte très cher, ce n’est pas du tout fait, il faudrait prouver aussi que le compilateur est bon, que le système est bon, après ça va loin si on veut tout prouver et ça serait un coût trop fort et surtout inaltérable. Inaltérable ça veut dire que si on change de mot de passe ce n’est plus tout à fait le même. D’ailleurs c’est pour ça qu’à Issy-les-Moulineaux, ils ont le même mot de passe depuis 15 ans, tout le monde connaît, c’est 2005, je peux même vous le dire, tout le monde le connaît parce qu’ils n’osent rien changer.
En tout cas, si on savait faire des systèmes immunes de fautes grand public, en tant qu’informaticienne je vous dis qu’il y a longtemps qu’il n’y aurait plus de bugs. Or maintenant tout le monde a des ordinateurs dans son téléphone et on voit bien que des fois ça marche et des fois ça ne marche pas. Les tests par exemple, des fois votre téléphone ne marche plus, puis il se remet à marcher et on ne sait pas toujours pourquoi. Les ordinateurs non plus. Les preuves techniques, on l’a dit tout à l’heure, on ne sait pas toujours et surtout ça se répare, on ne sait pas pourquoi et ça arrive tellement souvent qu’on ne cherche pas. Donc ce ne sont pas des systèmes très stables.
Et puis les informaticiens qui travaillent sur les systèmes critiques, c’est-à-dire les fusées, les avions, etc. connaissent les limites, c’est-à-dire qu’il y a huit couples, dix couples de processeurs qui sont mis en route qui ???, etc., c’est extrêmement compliqué et il y a quand même toujours des problèmes.
Les traitements on ne peut pas en être sûr.

Et puis encore un truc quand même , les électrons ce sont des choses fragiles. Il y a un cas très célèbre à Schaerbeek ??? en Belgique où il y a eu une machine à voter où il y a eu, c’est arrivé plusieurs fois, des candidats qui ont plus de voix que le nombre d’électeurs. Il y avait juste une erreur de 1024. Il y a eu enquête et il a été trouvé que c’était un rayonnement solaire qui avait fait changer un bit d’une position, qui avait basculé un bit du 0 vers le 1 ce qui fait 2014.
Ces problèmes ne sont pas connus depuis longtemps. C’est un chercheur américain qui était fondu d’escalade, qui faisait ses manips avec son ordinateur en allant faire de la montagne dans les Rocheuses, qui s’est rendu compte que ses programmes avaient plus d’erreurs quand il était en montagne qu’au niveau de la mer. Il n’y a pas très longtemps qu’on connaît, ça depuis les années 1970.
En tout cas voilà. La garantie apportée par les traitements ne suffit pas, c’est-à-dire que même un truc qui hyper-testé , même un truc dont on croit qu’il va marcher, peut-être qu’il va bugger.

Et puis maintenant la preuve du résultat c’est de dire on prend les entrées, on les compile et on regarde ce qu’on a à la sortie, c’est ce qui est fait dans les usines de médicaments, sauf qu’à cause de l’anonymat, sauf que quand le vote est secret on ne peut pas faire ça. On n’a pas les entrées. Si on avait les entrées, ce serait facile !

28’ 16

Donc à cause de la dématérialisation et du secret du vote, on ne peut pas savoir si les résultats sont justes, un peu justes, pas trop justes, pas du tout justes, on ne sait pas. Il faut faire confiance. Et j’ajoute que le recours à un tiers de confiance ou à des processus de confiance ne fait qu’ajouter un niveau de complexité, parce que vous pensez bien que cette situation ça a ouvert un marché formidable. Il y a tout un tas d’experts qui ont dit « moi c’est bon, je vais expertiser votre truc et je vais vous dire que ça marche ». De toute façon vous ne pourrez jamais le prendre en défaut ! Comme on ne peut pas prouver que les résultats sont justes, on ne peut pas prouver qu’ils sont faux non plus. En tout cas tout cela fait de l’argent, c’est un marché.

Maintenant mettons les pieds dans la réalité, la vraie réalité, parce tout tout ça c’est de la pensée, ici c’est de la réalité.
Nedap-France Election c’est l’entreprise qui équipe, qui vend des machines hollandaises, qui équipe 90 % des communes qui ont choisi le vote électronique en France, donc pour un million de personnes, un petit peu plus.
Voici leur réponse : c’est sur la liste faq leur site web.
« Peut-on vérifier les résultats fournis la une machine à voter ?
Les résultats fournis par la machine sont sûrs à 100 %, Ils n’ont donc pas besoin d’être vérifiés. »
Et toc ! C’est fini, le débat est fini ! Et vous voyez que cette confiance forcée, eh bien moi j’assimile ça souvent, il y a souvent ça avec le numérique, c’est une infantilisation, c’est-à-dire qu’on nous traite comme des enfants. il faut faire confiance sans aucune preuve. C’est une confiance aveugle, c’est-à-dire que c’est du registre de la foi. Alors que la confiance qu’on a lorsqu’on a du vote papier c’est une confiance éclairée. Certes, on ne pas surveiller soi-même tous les bureaux de vote, mais on sait qu’il y a d’autres gens qui le font et à priori il n’y a pas de raison ! S’il y avait une collusion entre des centaines de personnes ça finirait par se savoir. Là il n’y a même pas besoin de collusion, un bug suffit à changer les résultats.

Quand même, moi je me dis bon ! Aller ! Prenons-les au sérieux. Ils me disent qu’elles sont sûres à 100 % donc elles n’ont pas besoin d’être vérifiées. OK ! Prenons-les au mot. Est-ce qu’une sécurité totale pourrait compenser la disparition de la transparence ? Après tout je voulais une voiture rouge, on me vend une voiture quatre places, est-ce que ça fait l’affaire ? Eh bien il n’y a regarder ça.
Il y a deux composantes dans la sécurité.
Il y a la fiabilité. La fiabilité, c’est le fait qu’un système ne va pas tomber en panne. Le fait que la voiture démarre le matin, c’est ça la fiabilité. Donc les problèmes de fiabilité c’est ça ne démarre pas, il y a des pannes, il n’y a rien pour les non-voyants, il y a des différences entre les votes et les émargements, ça n’a pas bien marché quoi ! Ou bien il manque des candidats, c’est déjà arrivé aussi. Ou bien on ne peut pas voter, le bouton n’est pas là, enfin bref ! Tout peut se passer. Tout ça c’est du domaine de la fiabilité, ça ne marche pas bien.
Ensuite il y a la sûreté. La sûreté c’est le fait qu’il va y avoir une attaque. La sûreté c’est l’ensemble de tous les moyens qui sont mis en place pour éviter qu’il y ait une attaque. Il peut y avoir de la fraude interne et de la fraude externe. Généralement la fraude est interne, ce sont les candidats qui fraudent, ce sont les membres des bureaux de vote, ce ne sont pas les électeurs. Ce qui est intéressant c’est que le vote électronique est souvent présenté par les commerciaux comme un dispositif pouvant protéger contre la menace que représenteraient les électeurs. Ça c’est intéressant aussi, les électeurs perçus comme une menace. En fait, ce ne sont pas les électeurs qui fraudent, c’est quelqu’un qui est dans l’équipe d’un candidat et la meilleure place pour frauder c’est évidemment d’être membre du bureau de vote. Quoiqu’en France, depuis qu’il y a des urnes transparentes, quand on regarde les avis du Conseil constitutionnel, il n’y a quasiment plus de fraude. Vous avez entendu parler de la fraude à la chaussette à Perpignan il y a déjà pas mal d’années, on en a beaucoup parlé, alors que c’était tout petit, il n’y a plus rien à dire.
Voilà, moi je fais de la science donc il y a quatre cas possibles : soit on a la sécurité, oui, non, je n’ai pas fait le continuum ; soit on a la transparence, oui, non.

Si on a la sécurité et la transparence, c’est le cas numéro un, c’est nous qui avons ???. On est tous contents, il n’y a pas de problème, toute le monde. Maintenant, si on a la transparence et qu’on n’a pas la sécurité, eh bien c’est le vote papier habituel, on ne parle jamais de sécurité d’ailleurs. Voilà ! Des fois il se passe des trucs, on les voit et on va voir le juge, le juge annule, il n’annule pas. Bref, ça se règle. On recueille des témoignages, en tout cas on a une chance de voir et surtout on peut mesurer l’efficacité de la transparence : vous voyez s’il y a quelqu’un qui fraude une ou deux enveloppes, voilà !, c’est une ou deux enveloppes. Si il en fraude de 2000, ce n’est pas pareil ! C’est-à-dire est-ce que la fraude va pouvoir affecter un nombre de votes important sans se faire attraper, sans se faire voir ? Avec le papier, plus la quantité de suffrages est importante, plus ça va être difficile de passer inaperçu, y compris dans le vote par correspondance qui est pourtant très fraudable.

Maintenant si j’ai la sécurité et pas la transparence, eh bien il faut que je fasse confiance. On me dit qu’il y a la sécurité, mais je ne peux pas savoir si les résultats sont justes ou pas justes. Et la sécurité, on ne peut pas en faire la preuve, on ne peut pas me l’assurer quels que soient les experts. Il me semble que depuis les histoires des tests de voitures qui ont été fraudés en Allemagne on a été un petit peu échaudés sur cette histoire d’expertise.
Le problème c’est que s’il y a une sécurité totale et pas la transparence, eh bien ça ne va pas aboutir au résultat qui nous intéresse, c’est-à-dire d’avoir des élections dans lesquelles les gens ont confiance et qui fait qu’il n’y aura pas de rumeurs et qu’il n’y aura pas des gens qui se battent dans la rue. Le problème quand il n’y a pas de transparence c’est qu’il va y avoir des rumeurs. On en voit régulièrement aux États-Unis. J’ai voté pour machin et j’ai vu la flèche qui a bougé et ça a voté pour truc. Et on voit ces rumeurs naître.
En fait on s’aperçoit que le but des élections c’est un un but de de maintien de la paix. Il ne faut pas qu’il y est de désordre. Il ne faut pas que les gens se battent dans la rue, il ne faut pas qu’il y a ait des morts le soir des élections. C’est important. La promesse de sécurité ne permet pas d’atteindre ce but.

Évidemment, si on n’a ni sécurité ni transparence, c’est le pire du pire.

Donc on voit que ce n’est pas interchangeable, ce ne sont pas les mêmes dimensions, ce ne sont pas les mêmes qualité, donc la disparition de la transparence ne peut pas être compensée par la promesse de sécurité.
Moi en tant qu’informaticienne, chaque fois que j’ai à faire à des journalistes, on me pose des questions sur la sécurité. C’est intéressant, ça a été très bien joué par les industriels parce que la sécurité c’est un truc sans fin. Je vais leur dire « oui, ça ce n’est pas sécurisé ». Ils vont me dire « oui, mais là on a rajouté un bitoniau, c’est bon ! - Oui, mais après il y a ça ». Vous voyez que c’est un truc où on va toujours pouvoir dire « on fait mieux, regardez, on n’arrête pas de faire mieux ; c’était déjà sécurisé 100 % et pourtant on fait tout le temps mieux ». Ça a été très malin d’amener ce thème et la transparence a totalement disparu parce que c’est indéfendable et on n’arrive pas à tenir de conversations là-dessus avec des journalistes qui ramènent tout le temps sur la sécurité.

Il y a deux cas qui ne marchent pas et il y en a deux qui ne marchent pas mal quand même.
Donc la promesse de sécurité, vous avez compris.

Je reviens sur mon truc de tout à l’heure, maintenant on va ajouter l’unicité. L’unicité pas au sens où elle est vérifiée, au sens où c’est le système de vote qui vérifie. Ça pose un problème. Ça pose un problème qui nous vient des sciences politiques : la liberté de vote. La liberté de vote c’est essentiel. C’est le fait de pouvoir voter pour un parti nationaliste alors qu’on vient d’une famille qui est de tradition communiste. C’est le fait de pouvoir voter vert alors que son mari fabrique des produits polluants. C’est le fait de pouvoir voter différemment de son patron, de son syndicat, de ses enfants, de son mari. C’est le fait de voter en son âme et conscience et pour ça, il faut être absolument certain, jusqu’au bout des ongles, que le vote ne sera jamais dévoilé. La plupart des gens, enfin il y a beaucoup de gens, s’ils savent que leur vote risque d’être dévoilé, ils ne vont pas voter communiste s’ils sont dans une famille de droite, ils ne vont pas risquer de se faire déshériter. Je dis ça ou au contraire, voter à droite alors qu’on est dans une famille de gauche et qu’on risque de perdre l’amour de sa maman, c’est pareil, l’amour de sa famille. Qui va prendre un risque pareil pour un vote, pour une vox ? Si on veut que les gens votent en toute liberté, c’est ça la liberté du vote, en toute liberté, il faut absolument préserver le fait que les gens sont absolument convaincus que leur vote va rester secret.

Maintenant, quand on confie à un ordinateur en même temps Internet, d’abord on s’identifie, on donne son nom, son login/mot de passe, et après on donne son vote et puis on me dit « tout ça va bien rester séparé ». OK !On peut le croire mais on peut aussi douter. Donc du coup qu’est-ce qui se passe ? Les gens ne vont pas faire des manifs dans la rue, juste ils vont changer leur vote, ils vont voter un petit peu différemment, ils ne vont plus voter en toute liberté. C’est ce qui se passe et ça on ne le voit pas ; on ne peut pas le voir. C’est en son âme et conscience. Qui va crier je n’ai ??? voté communiste quand il est dans une famille de droite, ce n’est pas possible !

Maintenant les textes légaux. Ça c’est dur parce que la loi est faire par des législateurs et les législateurs ne comprennent rien au numérique, rien de rien. Donc ils ont calqué. Ils ont pris les représentations et ils leur ont calqués les propriétés des objets physiques, ils n’ont pas compris que c’était autre chose.
On a va regarder, observer deux textes quand même.
Ça c’est quand un a du vote papier. L’article 63 du code électoral : « L’urne électorale est transparente ». Il y a même une description, elle n’a « qu’une ouverture destinée à laisser passer l’enveloppe contenant le bulletin de vote ».
Maintenant pour le vote électronique : « le bureau de vote s’assure publiquement, avant le commencement du scrutin, que la machine fonctionne normalement ». Déjà là on est en plein délire ! Si les informaticiens savaient faire ça, ils le feraient. Pourquoi on ne le ferait pas ! Pourquoi on laisserait les personnes douter !Sachant qu’il n’y a aucune méthode, il se démerde : on ne nous dit pas comment faire, et il doit s’assurer « que tous les compteurs sont à la graduation zéro ». Ça c’est encore plus drôle parce que figurez-vous que cette loi date de 1969. À l’époque il y a des machines à voter mécaniques qui sont imposées dans la couronne parisienne, la couronne gauche parisienne, on soupçonne des communistes de tricher les élections en masse - ce qui est vrai ou ce qui est faux, peu importe - et puis en Corse. Donc les machines à voter sont imposées par le ministère de l’Intérieur à l’époque. Ce sont des machines à voter mécaniques avec des boutons, etc. C’est pour ça qu’il est écrit qu’il y a les compteurs. Il y a des compteurs un petit peu comme les compteurs de voiture, les anciennes voitures, c’est pour ça que le bureau de vote s’assure que les compteurs sont à la graduation zéro. Normalement il n’y a plus de compteurs sur les machines à voter ; d’ailleurs ce sont des ordinateurs de vote, ce ne sont plus des machines à voter, mais la loi est restée la même. Donc on s’aperçoit qu’on a des textes de loi complètement inapplicables. Il y a eu des actions en justice, le juge qui n’y comprend rien non plus, il dit « c’est pareil, c’est bon ! Prouvez- moi que c’est fraudé ! » On ne peut rien prouver, on ne peut rien faire, donc c’est bon !

Une autre.
Il y a un règlement technique fixant les conditions. C’est un truc qui a été fait par le ministère de l’Intérieur c’est le document que j’ai vu en premier, j’ai entendu parler des machines à voter, je suis tombée sur ce document et c’est après la lecture de ce document que je me suis dit je ne peux pas faire comme si je n’avais rien vu. Par exemple, dans les principes à respecter, il y a transparence : « le processus doit pouvoir être examiné et vérifié ». J’ai écrit plusieurs courriers au ministère de l’Intérieur, au Premier ministre qui était Fillon à l’époque pour lui demander « mais enfin, c’est quoi la procédure pour pouvoir examiner, vérifier, etc. ? Comment on vérifie que les résultats sont justes ? » On ne m’a jamais répondu, donc la seule procédure que j’ai pu imaginer c’est celle-ci : pour avoir des résultats, on appuie sur un bouton et la machine imprime ou affiche - normalement elle doit imprimer mais quand l’imprimante ne marche pas elle ne fait qu’afficher - des résultats. Bon ! Pour les vérifier, on appuie à nouveau sur le bouton, on a un deuxième ticket et on peut constater que les deux tickets portent des chiffres identiques. Voilà la procédure de vérification.

42’ 23

On avance un petit peu dans cette horreur.