Décryptualité du 25 septembre 2017
Titre : Décryptualité du 25 septembre 2017
Intervenants : Luc - Manu - Nico
Lieu : Studio d'enregistrement April
Date : Septembre 2017
Durée : 15 min
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Revue de presse de l'April pour la semaine 38 de l'année 2017
Licence de la transcription : Verbatim
Statut : Transcrit MO
Transcription
Luc : Décryptualité.
Nico : Le podcast qui décrypte l’actualité des libertés numériques.
Luc : Semaine 38. Salut Manu.
Manu : Salut Nico.
Nico : Salut Luc.
Luc : Pas de Mag cette semaine.
Manu : Non, elle est fatiguée.
Luc : Très bien. Notre revue de presse semaine 38, de quoi s’agit-il ?
Manu : Petite revue de presse. On a cinq thèmes principaux à mettre en avant.
Luc : Le Monde.fr, « Lawrence Lessig : Internet est la meilleure et la pire des technologies », un article de Claire Legros.
Manu : Je propose qu’on parle juste après, c’est assez intéressant.
Luc : C’est un sujet intéressant. Liberté Algérie, « Il y a un manque de culture numérique en Algérie », un article de Mohamed-Chérif Lachichi.
Manu : Plutôt pas mal. Ça parle d’un activiste, président de Root66, association de la région parisienne, qui s’appelle ZenZla et qui parle de son association et des rapports qu’il a avec l’Algérie parce qu’il vient de par là-bas.
Luc : Les Echos, « Licences logicielles : la grogne monte », un article de Jean-Paul Argudo.
Manu : Ah ! Je kiffe ce genre d’article quand les grosses entreprises françaises se rendent compte qu’elles se font avoir par une grosse entreprise américaine qui leur vend trop cher du logiciel propriétaire et qu’il existe des alternatives. Eh oui ! Les grosses entreprises voient cela aussi.
Luc : Numerama, « L’EFF claque la porte du W3C pour protester contre l’arrivée des DRM dans les standards du web », un article de Julien Lausson.
Manu : Ils ont claqué la porte, mais pas assez fort ! La maison est encore en place et les DRM s’installent dans le Web.
Luc : Voilà. On rappelle c’est pour, essentiellement, lire la vidéo, donc contrôler la lecture des vidéos. Dans les années qui viennent vous pouvez vous attendre à avoir des trucs où vous ne pourrez plus regarder ce que vous voulez sur Internet. 20minutes.fr, « Comment Rennes va économiser 500 000 euros en se séparant de Microsoft », un article de la rédaction.
Manu : Il faut qu’ils discutent avec les grosses entreprises françaises. Il y a un truc à faire, une combinaison. En attendant, ils gagnent de l’argent et de l’indépendance en se débarrassant de Microsoft.
Luc : Et ça fait plaisir parce qu’il y a un gros sujet qui a duré pendant des années, avec une ville allemande, Stuttgart, je crois.
Manu : Munich.
Luc : Munich, qui à la suite d’un changement de majorité était revenue vers Microsoft, ce qui nous a fait très mal après avoir développé plein de trucs. Et donc là, contre-exemple, Rennes y va et donc c’est cool. Le sujet dont on voulait parler, il y a pas mal de sujet intéressants cette semaine, c’est une belle semaine, c’est Lawrence Lessig, Nicolas, tu peux dire ?
Nico : Hou là, l à ! Il a fait beaucoup de choses. C’était un juriste qui a sorti pas mal de textes philosophiques sur le Net et le Web en général, le fameux Code is Law, c’est lui qui l’a sorti.
Manu : Le code est la loi.
Nico : Le code est la loi et il s’est aussi présenté aux élections américaines en 2015. Malheureusement il s’est fait éjecter. Il a pas mal de positions intéressantes à droite et à gauche, en particulier là, sur Internet. Il a une vision assez pessimiste du monde.
Luc : C’est un type extrêmement brillant. Code is Law, donc il a dû dire ça il y a quinze ou vingt ans, au moins.
Manu : Au moins !
Luc : Donc c’est cette idée dans laquelle on est aujourd’hui complètement. On parle régulièrement des algorithmes — par exemple APB pour l’affectation post-bac — et c’est cette idée que dès lors qu’on a des logiciels, de l’informatique qui va régir notre vie, c’est la façon dont le logiciel va tourner qui va décider. Quand on a un logiciel fermé, obscur, dont on ne sait pas comment il fonctionne, qui décide où les gamins vont être affectés, c’est lui qui décide, donc c’est la loi ! Et c’est extrêmement brillant de sa part de voir ça il y a vingt ans ou plus.
Manu : Il est aussi l’initiateur des communs créatifs, les Creative Commons, qui sont un mouvement assez important pour la diffusion de la connaissance sous des licences intéressantes.
Nico : Malheureusement, là où il n’a pas été très visionnaire, c’est sur . Là il fait le constat que Internet a un peu échappé à ses créateurs et qu’aujourd’hui on a pas mal de problèmes dans le réseau, en particulier avec les fake news, donc les fameuses nouvelles, les mensonges, qui circulent un peu trop facilement sur les réseaux. On l’a vu avec l’élection de Trump, avec le Brexit, les faux certificats de naissance d’Obama ou des choses comme ça ou même les théories des complots qui circulent énormément. Et c’est vrai qu’aujourd’hui, sur le Web, il y a quand même beaucoup de ces choses-là qui circulent.
Luc : Le contexte, les raisons pour lesquelles il y a cet article, c’était qu’il était invité dans un festival organisé par Le Monde et il a été interrogé par une journaliste sur cette question de « peut-on, faut-il réguler Internet ? » Évidemment, son sujet a beaucoup tourné autour de cette question des fake news qui ont joué un rôle très important dans la victoire de Trump aux États-Unis et donc, du coup, il l’a plutôt mauvaise.
Manu : Il met en avant pas mal de mécanismes qu’il essaie d’entrapercevoir là-dedans : le laisser-aller, le capitalisme et il met ça un petit là-dessus, le marché, la loi du marché.
Luc : En quoi la loi du marché ?
Manu : Vraisemblablement, c’est que les entreprises en profitent et profitent de tout cela. Les fake news sont un mécanisme parmi d’autres pour produire.
Luc : En fait oui, tous ces trucs de clics, quand on clique et qu’on voit des pubs, ça fait de l’argent.
Manu : Ils sont remontés à certains auteurs de fake news, qui habiteraient en Europe Centrale ou Europe de l’Est, et qui écrivaient des faux articles, à destination surtout des électeurs de Trump par exemple, parce que ça rapportait de l’argent. Et quand ils faisaient la même chose pour les électeurs de Hillary Clinton, ça ne marchait pas, ça marchait moins bien. Donc ils se sont orientés par l’intérêt de l’argent.
Luc : Donc là-dedans, tous les réseaux sociaux, finalement c’était une affaire rentable pour eux. Aujourd’hui ils ne sont pas mal mis sur le grill en leur disant « vous avez laissé n’importe quoi circuler ! »
Manu : Ils sont peut-être même un peu embêtés, parce que Trump ce n’est pas forcément leur premier choix !
Nico : Et puis aujourd’hui ils sont emmerdés parce qu’ils ne savent pas, en fait, comment bloquer ça. C’est la question, d’ailleurs, que pose Lawrence Lessig : comment on fait pour mettre un arbitre là-dedans qui soit lui-même un peu neutre et qui n’ait pas de parti pris ? Et du coup, c’est très compliqué de dire comment est-ce qu’on va entre guillemets « censurer » le réseau pour bloquer ça. Est-ce qu’on laisse passer ? Est-ce qu’on ne laisse pas passer ? Ça va dépendre de nos avis, de nos positions.
Manu : Ça serait choquant, quand même, que Lawrence propose la censure du Net ! Quoi !
Luc : Ce n’est pas ça qu’il propose. OK, il part de ce constat qu’il y a vraiment, aux États-Unis, en tout cas pour le cas américain, une coupure en deux et qui dépasse Internet. Il parle d’un grand média. Il dit voilà, Trump, quand on en parle dans le New-York Times, ce n’est pas la même chose quand on en parle sur Fox News ou ailleurs. Donc il y a cette question de l’unité. Moi je trouve que cet article est un peu court et que ses réponses ne sont pas hyper engageantes. Parce qu’au final il dit : « La jeune génération comprend qu’on leur ment et, du coup, elles ne vont pas se laisser avoir !
Manu : Et tu n’es pas convaincu, toi, que la jeune génération elle, elle voit le mensonge ?
Nico : C’est vrai que c’est surprenant de voir, aujourd’hui, les dégâts des fake news et les propensions que ça a à exploser, alors que Lawrence Lessig dit plutôt qu’effectivement les jeunes ont l’impression de connaître, enfin d’avoir les moyens scientifiques ou en tout cas de réflexion pour les détecter et éviter de les propager. Je crois qu’il est un petit peu trop optimiste là-dessus.
Luc : Je ne suis pas convaincu. Pour moi la foi dans la jeunesse c’est le côté limite de l’âge d’or. C’est-à-dire avant c’était vachement mieux, je n’y crois pas ; et dire « les jeunes vont tout résoudre » je n’y crois pas non plus. Ce sont des gens, comme tout le monde, et on va avoir des gens géniaux dedans et on va avoir des gros cons. C’est inratable.
Manu : Moi j’ai un optimisme, mais c’est mon optimisme naturel, c’est qu’on sophistique la population et les gens, les jeunes notamment mais nous aussi, on se rend un peu mieux compte avec le temps qu’on s’est fait avoir et donc il y a une sorte de co-construction du principe. C’est un petit peu, vous connaissez l’idée de la souris et de l’attrape-souris : les deux vont s’améliorer, l’un en suivant l’autre.
Luc : C’est la course aux armements.
Manu : Il y a une course, exactement. Et donc on se sophistique face aux fake news qui doivent devenir de plus en plus fines, de plus en plus réfléchies, utiliser des ressorts de plus en plus intéressants. Donc je pense qu’on n’est pas perdants là-dedans.
Nico : Pourtant, quand on regarde les théories du complot aujourd’hui, la terre plate ou les créationnistes ou autres, ils ont quand même le vent en poupe. Il y a encore eu des parts d’audience dans les divers sondages et autres, et ça n’arrive pas à réguler.
Luc : Pour moi, il y a vraiment deux trucs : c’est qu’il y a des gens qui sont dans un délire total. Il y a de la manipulation avec un vrai projet politique, c’est-à-dire que quand les Russes font des fake news et vont pirater des systèmes, etc., ils sont vraiment dans le projet de déstabiliser les États-Unis, de créer une fracture et que les gens se rentrent dedans. Les gros médias comme Fox News également, ils ont un vrai agenda politique. Ils sont là pour essayer de prendre le pouvoir et instaurer un pouvoir dur, hyper réactionnaire, hyper bourrin, enfin voilà, et ça marche ! Et on sait historiquement, il y a plein d’exemples, où on voit qu’au-delà de la question du pognon, il y a un vrai agenda politique, historiquement on a plein qui montrent que ça fonctionne et que ça peut nous emmener dans des situations vraiment merdiques.
Manu : Peut-être qu’à un moment donné, effectivement les fake news se rapprochent des rumeurs et que les rumeurs elles sont créées parfois par intérêt et elles sont diffusées souvent par intérêt et que cette diffusion c’est peut-être le même mécanisme qu’on est en train de découvrir, que les fake news.
7’ 50
Luc : Effectivement.