Logiciel libre révolution le mouv 25 11 Aka Broca
Titre : Le logiciel libre, nouvelle révolution ?
Intervenants : Alexis Kauffmann, Sébastien Broca
Lieu : Émission La Matinale du Mouv' du
Date : 25 novembre 2013
Durée : 12 min
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00' Marie-Odile
Journaliste : Il est sept quarante et une. On entre maintenant dans l'univers du libre, du logiciel libre.
Voix de Richard Stallman : Qu'est-ce que ça veut dire le logiciel libre ? C'est le logiciel qui respecte la liberté de l'utilisateur. Il ne s'agit pas de la gratuité. Ça devrait être plus clair en français parce que libre et gratuit sont des mots distincts mais il paraît que ce n'est pas toujours clair. Beaucoup de gens pensent que le logiciel libre est une question de payer ou pas. Mais ce n'est qu'un détail. Il s'agit d’avoir de la liberté ou pas.
Thomas Rozec, journaliste : Alors libre ce n'est pas gratuit et gratuit ce n'est pas libre ! C’était Richard Stallman, vous l'avez peut-être reconnu, un des pères du logiciel libre lors d'une récente conférence sur le Libre dont il va être question ce matin. Bonjour Sébastien Broca.
Sébastien Broca : Bonjour.
Journaliste : Vous êtes sociologue à la Sorbonne, au Centre d'Étude des Techniques, des Connaissances et des Pratiques, de la Sorbonne, et vous publiez, aux Éditions du Passager clandestin, Utopie du logiciel libre - Du bricolage informatique à la réinvention sociale. Et bonjour Alexis Kauffmann.
Alexis Kauffmann : Bonjour.
Journaliste : Fondateur de Framasoft, réseau de promotion du logiciel libre. On va détailler dans un instant. Cette confusion dont on parlait à l'instant, on entendait Richard Stallman, entre liberté et gratuité, qui vient peut-être d'ailleurs du passage de l’anglais au français, free ça veut dire à la fois libre et gratuit, cette confusion et cette mise au point nous offrent un point de départ pour cette discussion autour de ce libre, de ce livre, c'est quoi un logiciel libre, Sébastien Broca ? Il est encore utile de le définir, il ne faut pas confondre avec un freeware, notamment.
Sébastien Broca : Tout à fait. Alors pour reprendre ce que disait Richard Stallman, lui il dit souvent il ne faut pas confondre free beer et free speech. Il dit que le logiciel libre c'est une question de liberté d'expression et pas voila, bière gratuite, free speech, ce n'est pas la même chose. Donc ce qui définit un logiciel libre ce n'est pas qu'il soit gratuit, c'est qu'il donne à tous ses utilisateurs quatre libertés, c'est-à-dire liberté de l’utiliser, de le modifier, de le copier et d'en distribuer des versions modifiées. Donc pour Richard Stallman, vraiment, c'est une question de défense, c'est un monde de libertés pour les utilisateurs d'informatique. C'est ça qui définit le Libre.
Journaliste : On va continuer cette définition. Je précise, pour commencer, que ce livre que vous publiez n'est pas un livre sur les logiciels libres mais sur ce qu'ils peuvent apporter dans notre société, l'idéologie du Libre, qui est bien plus large que les univers numérique et informatique, peut apporter à la société.
Sébastien Broca : Tout à fait.
Journaliste : Le logiciel libre est un pivot en fait dans votre livre.
Sébastien Broca : Oui. Alors l'argument du livre, c'est un peu de montrer comment un mouvement qui est né en fait dans le domaine informatique, donc un mouvement de hackers, on reviendra peut-être sur ce terme, s'est peu à peu étendu, de différentes manières en fait, par exemple en inspirant Wikipedia par ces grandes collaborations entre informaticiens sur internet, en s'étendant maintenant à ce qu'on appelle le hardware, donc à la fabrication avec tout ce qui s'appelle l'open hardware, ou aussi en donnant naissance à toute une forme d'activismes sur les questions liées à la propriété intellectuelle. Ce sont des sujets sur lesquels les libristes, comme on les appelle, sont très engagés.
Journaliste : On a un libriste justement, juste ici dans notre studio, Alexis Kauffmann, de Framasoft. En deux mots Framasoft dont vous êtes le fondateur.
Alexis Kauffmann : Framasoft est un réseau de promotion et diffusion du logiciel libre, autour, aujourd'hui, d'une vingtaine de projets divers et variés.
Journaliste : Des logiciels libres et de l'idéologie du Libre aussi ?
Alexis Kauffmann : Oui et puis aussi également de la culture du libre. On a fini par appeler ça le Libre, avec un l majuscule. D'ailleurs Sébastien reprend le terme et je l'en félicite, pour montrer que ça va au-delà. On a un blog, ouvert en 2006. Sur le fronton du blog, on peut lire que ce serait l'une des plus grandes opportunités manquées de notre époque si jamais le logiciel libre ne libérait rien d’autre que du code.
Journaliste : C'est-à-dire que voila on n'est pas dans du domaine uniquement informatique. C'est une bonne définition comme le dit André ???, Sébastien Broca ?
Sébastien Broca : Oui, tout à fait.
Journaliste : Ce matin on ne va pas parler que de code informatique.
Sébastien Broca : Ben non. Ce qui est intéressant c'est de voir comment les valeurs de ces informaticiens, alors ces valeurs, on pourrait peut-être commencer à en parler un petit peu. Ce sont des gens qui défendent la publicité du savoir, le partage de l'information, la collaboration et puis aussi le fait d'avoir un rapport, un autre rapport à nos objets techniques, essayer de comprendre comment ça marche l'informatique, d'ouvrir le capot de nos objets, toutes ces choses-là. C'est à travers ces valeurs, finalement, que le Libre peut acquérir une portée supérieure.
Journaliste : Stallman considère le mouvement des logiciels libres comme un mouvement social. Est-ce que vous êtes d'accord avec ça ?
Sébastien Broca : Oui. Alexis dira ensuite. Moi je suis d'accord avec ça. C'est tout à fait important il me semble. Il a créé ce mouvement au début des années quatre vingts et il a toujours dit que c’était in mouvement social, c'est-à-dire que c'était un mouvement qui défend certaines valeurs, certains principes, qui défend le fait que les utilisateurs d'informatique doivent avoir des libertés, et ce n'est pas simplement une idée de faire les meilleurs logiciels possible ou d'avoir des succès économiques, c'est vraiment une question de principes et de valeurs. Ça c'est très important pour Stallman.
Journaliste : Donc c'est un mouvement de contestation Alexis Kauffmann ?
Alexis Kauffmann : Pas forcément de contestation, mais c'est un mouvement pour défendre nos libertés. C'est un mouvement qui donne des droits et des libertés aux utilisateurs et non pas une protection aux auteurs.
Journaliste : Oui mais il s'est installé en réaction, par rapport à quelque chose ! C'est un refus d'un modèle qui est arrivé au début des années quatre vingts.
Alexis Kauffmann : Oui historiquement il s'est installé en résistance. Tout d'un coup, dans les universités américaines, autour des débuts de l'informatique dans les années soixante, soixante-dix, en fait le code informatique se partageait comme les mathématiques. Il faut imaginer l'informatique comme les mathématiques à l'université. Alors les mathématiques, il n'y a pas de copyright sur les théorèmes par exemple. C'est heureux pour les scientifiques sinon ce serait vite compliqué s'il fallait payer des royalties à chaque fois qu'on utilise le théorème de Pythagore.
Bon, le code se partageait et puis tout d'un coup certains se mis à fermer le code. Ça a donné un coup de génie économique, j'ai envie de dire, pour les Steve Jobs, les Bill Gates, etc.
Journaliste : Qui ont largement prospéré sur les brevets qu'ils ont pu instaurer sur les codes !
Alexis Kauffmann : Et Stallman lui, il a voulu résister, un petit peu comme dans Star Wars on résiste à l'empire. Il a dit « Non, non, moi je veux continuer à pourvoir partager le code » et c'est là qu'il a fondé le mouvement du logiciel libre.
Sébastien Broca : Pour compléter ce que vient de dire Alexis qui est important, il faut savoir que ce qui se passe dans les années quatre vingts, quand apparaît le logiciel libre, c'est qu’il y a le micro ordinateur qui arrive et donc il se crée un marché de l'informatique gigantesque, donc c'est là que naissent les éditeurs Microsoft et d'autres, qui vont prospérer sur le fait de fermer le code, alors qu'auparavant, dans les années soixante-dix, qu'avait connues Stallman notamment au MIT, la grande université américaine où il était, c’était vraiment une informatique qui se développait dans les institutions publiques, dans les universités, sur la base du partage du savoir, la collaboration entre informaticiens et c'est ça qui change dans les quatre vingts et c'est ce contre quoi il entreprend de résister à ce moment-là.
06' 23
Journaliste : A ce point de la discussion, on a l'impression qu'on parle d'un reve