Logiciel libre et consommation responsable

De April MediaWiki
Révision datée du 25 février 2013 à 14:30 par Vic (discussion | contributions) (Première version du texte)
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à la navigationAller à la recherche

Cette page a pour but de présenter un argumentaire pour promouvoir le logiciel libre auprès d'acteurs impliqués dans le domaine de la consommation responsable. Il commence par un rappel sur ce qu'est la consommation responsable.

Le concept de la consommation responsable[modifier]

Dans sa page sur le commerce responsable, Solecopedia (encyclopédie pour l'économie sociale et solidaire) propose cette définition courte de la consommation responsable : « La consommation responsable est l'acte de réfléchir sur les conséquences environnementales et sociales de son acte d'achat. Le consommateur engagé, responsable et réfléchi n'est plus un simple consommateur mais un véritable consom'acteur. ». Pour saisir l'ampleur du phénomène, lee site Mes courses pour ma planète propose un rapport en chiffre de la consommation responsable. Et vous pourrez trouver des ressources documentaires sur le sujet via le mot-clé « commerce responsable » sur le site socioeco.org.

L'idée d'agir par la consommation n'est pas nouvelle. Après tout, le terme « boycott » est né au XIXème siècle du nom d'un propriétaire irlandais mis en quarantaine. Le boycott est l'action la plus simple puisqu'il s'agit de ne pas consommer tel ou tel produit et c'est un mode d'action encore largement utilisé. Cependant, pour qu'il soit efficace, encore faut-il que des alternatives existent. La consommation responsable est plus exigeante que le boycott puisque d'une part, il faut mettre en place des filières de production de produits alternatifs et, d'autre part, cela implique la plupart du temps un surcout pour le consommateur à l'achat.

La consommation responsable prend de nombreuses formes. C'est, au fond, un terme générique qui chapeaute des actions nées dans des milieux militants très variés.

Par exemple, le commerce équitable est né dans le monde de la solidarité internationale. C'est une réponse à la dénonciation des agissements des multinationales (en particulier United Fruit Company à l'origine de l'expression « république bananière »). Ce n'est pas un hasard si le café est le produit emblèmatique du commerce équitable : c'est un des produits alimentaires les plus soumis aux fluctuations des cours mondiaux et à la spéculation.

Autre exmple, l'agriculture biologique qui, du fait des ses exigences de production, a des prix plus élevés que l'agriculture conventionnelle s'est basé sur la consommation responsable pour assurer son développement économique. Les associations de maintien de l'agriculture paysanne (AMAP) sont une des expressions de cette consommation responsable où est particulièrement valorisé le rapport entre producteurs et consommateurs.

Incontestablement, ce sont les scandales sanitaires liés à l'alimentation (vache folle et plus récemment la viande de cheval passée pour du bœuf) qui ont mis sur le devant de la scène les questions de traçabilité qui ont donné une large audience à la consommation responsable en tant qu'alternative. Traçabilité et réduction de la facture énergétique sont également à l'origine du thème des « circuits courts » qui est très à la mode en ce moment.

La plus grande part de la consommation responsable est liée au secteur de l'alimentation, ce n'est pas un hasard puisque c'est un acte de consommation quotidien et que cela touche à notre santé. D'autres secteurs sont cependant concernés comme l'habillement (en particulier le textile car le coton est aussi un produit internationalisé soumis aux rapports de forces commerciaux mondiaux). Cela touche également les services avec le tourisme solidaire ou l'investissement responsable. Le sommaire du rapport en chiffres de la consommation responsable (cité plus haut) donne un bon aperçu :

  • I. L’alimentation (Les produits du commerce équitable, Les produits issus de l’agriculture biologique, Les produits laitiers, Les oeufs, Les produits de la mer, La viande de volaille, Les paniers de légumes, Les produits végétariens, La restauration collective, L’eau)
  • II. L’énergie et l’habitat (Les consommations volontaires d’énergie renouvelable, Le photovoltaïque, Le chauffage au bois, Les pompes à chaleur, L’éolien, L’électroménager classe A+, A++ et A+++)
  • III. Les transports (Les voitures propres, Les transports en commun, Les solutions de mobilité partagée)
  • IV. Les produits de consommation courante (Les produits eco-labellisés, Les cosmetiques naturels et biologiques, Les fleurs et les plantes, Les vêtements en coton équitable, Le tourisme responsable, L’investissement socialement responsable, Le livret de développement durable, L’épargne solidaire, Le don)
  • VI. La récupération et le recyclage (Le recyclage et la valorisation, Le papier, Le réemploi)

Comme on pouvait s'en douter, le logiciel libre n'est pas dans cette liste. Peut-on espérer qu'il y figure un jour ?


Utiliser le logiciel libre, un acte de consommation responsable ?[modifier]

Parler de consommation pour l'utilisation d'un logiciel libre peut paraitre étonnant au premier abord : il n'y a pas d'acte d'achat ni destruction ou usage exclusif d'un bien. Cependant dans la mesure où l'utilisation d'un logiciel libre est souvent en concurrence avec l'utilisation d'un logiciel propriétaire pour lequel il y a bien acte d'achat et usage exclusif, il semble pertinent d'associer utilisation de logiciel à consommation. Un des combats auquel participe l'April, la vente liée, relève d'ailleurs du droit de la consommation. Par ailleurs, la tendance lourde de l'informatique est d'identifier le logiciel à un service plutôt qu'à un bien (SAAS : software as a service).

Si, donc, on accepte le postulat que l'utilisation d'un logiciel est un acte de consommation, il nous semble possible et fructeux de montrer que le logiciel libre est, dans le domaine de l'informatique, l'équivalent de ce qu'est le café équitable dans le domaine de l'alimentation.

Traçabilité[modifier]

Comme on l'a vu précédemment, l'exigence de traçabilité est un des moteurs de la consommation responsable. En matière de logiciel, l'unique traçabilité possible, c'est la deuxième liberté du logiciel libre : la possibilité d'étudier le code source. Un logiciel qui ne donne pas accès à son code source, c'est comme un plat de lasagnes sans étiquette, personne ne sait ce qu'il y a dedans.

Un consommateur-acteur[modifier]

Une des ambitions de la consommation responsable, c'est que le consommateur sorte de sa passivité et devienne acteur. Cette possibilité est offerte par les deux dernières libertés du logiciel libre : possibilité de modifier et de diffuser ces modifications. Certes, ces deux libertés demandent un bagage technique non négligeable. Cependant, de nombreux logiciels libres ont donnés naissance à de véritables communautés dans lesquelles toutes les compétences sont les bienvenues (documentation, traduction, etc.). Sans être un spécialiste, un consommateur de logiciel libre peut rapidement devenir un « utilisateur averti » qui va pouvoir aider les nouveaux utilisateurs et assurer la diffusion du logiciel dans son propre réseau.

Équilibre producteur-consommateur[modifier]

Les logiciels propriétaires mettent les consommateurs en situation de dépendance. Cette dépendance s'illustre parfaitement au moment des mises à jour où l'éditeur impose un nouvel acte d'achat en ne maintenant plus les versions précédentes. Le logiciel libre rééquilibre cette relation entre producteur et consommateur car il offre la possibilité d'une dérivation (fork), c'est à dire de ne pas suivre l'évolution imposée par le producteur principal mais de suivre son propre chemin de développement.

Soutien des petits producteurs[modifier]

Commerce équitable et AMAP ont mis en avant le soutien des petits producteurs face aux grands groupes. L'informatique est tout aussi touché par ce phénomène de main-mise des grands groupes : Apple, Microsoft, Google ont une puissance financière considérable. Apple a montré avec son magasin d'applications en ligne qu'il comptait contrôler qui avait le droit de programmer pour son système d'application. Sans logiciel libre, sans standard, sans format ouvert, les droits d'entrée de l'informatique seraient exorbitants et les petits producteurs (dans le cas du logiciel, les développeurs indépendants) seraient complètement soumis aux impératifs des grands groupes, dans un même rapport de dépendance que les paysans face aux groupes de l'agroindustrie.


Apport du concept de consommation responsable[modifier]

Même si la consommation responsable est un phénomène minoritaire dans le monde de la consommation, il n'est pas non plus marginal. Inscrire le logiciel libre dans ce phénomène pourrait représenter un gain non négligeable en termes d'audience et de reconnaissance. Ce serait un moyen de sortir l'informatique de son isolement dans lequel il est rapidement renvoyé du fait de la technicité du sujet.

Par ailleurs, les réflexions autour de la consommation responsable peuvent utilement alimenter celles sur le logiciel libre.

Un des apports fondamentaux de la consommation responsable est celle de l'acceptation du surcout. La consommation responsable assume que le produit soit plus cher que le produit concurrent. Il l'assume parce qu'il explique pourquoi il l'est et notamment à quel prix social et environnemental le produit voisin est moins cher.

On pourrait dire que dans le cas du logiciel libre, la question du surcout ne se pose pas puisque la gratuité est souvent le corolaire à la liberté du logiciel. En fait, elle se pose mais pas en termes financiers : la plus forte résistance à l'adoption d'un logiciel libre, c'est le cout de la migration : cout en temps, en réapprentissage, en changement d'habitude.

Inscrire le logiciel libre dans la consommation responsable, c'est aussi assumer que le logiciel libre a un cout (« libre ne veut pas dire gratuit ») et démontrer au consommateur que ce cout en vaut la peine car il inscrit son acte de consommation dans une démarche plus globale d'alternative au modèle privateur dominant dans l'informatique.