Émission Libre à vous ! 10 septembre 2024
Titre : Émission Libre à vous ! diffusée sur Radio Cause Commune le mardi 10 septembre 2024
Intervenant·es : Isabelle Carrère - Amelaye - Tuxayo - Laurent Costy - Jean-Christophe Becquet- Étienne Gonnu - Isabella Vanni à la régie
Lieu : Radio Cause Commune
Date : 10 septembre 2024
Durée : 1 h 30 min
Licence de la transcription : Verbatim
Illustration : Déjà prévue
NB : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·es mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Transcription
Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Étienne Gonnu : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
Nous allons parler jeux vidéo libres aujourd’hui avec Minetest, « l’autre pays du minage ». C’est le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme la pratique du double système d’exploitation avec Antanak et une nouvelle Pépite libre de Jean-Christophe Becquet, L’Accueillette, un outil d’auto-diagnostic de lieux d’accueil.
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.
Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous ! l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Étienne Gonnu, chargé de mission affaires publiques pour l’April.
Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.
Nous sommes mardi 10 septembre 2024, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
À la réalisation de l’émission, ma collègue Isabella Vanni. Salut Isa.
Isabella Vanni : Bonjour à tout le monde. Bonne émission.
Étienne Gonnu : Nous vous souhaitons une excellente écoute.
[Jingle]
Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » d’Antanak – La pratique du double système d’exploitation
Étienne Gonnu : Nous allons commencer par la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec l’association Antanak qui partage avec nous des situations très concrètes et/ou des pensées mises en actes et en pratiques au sein du collectif : le reconditionnement, la baisse des déchets, l’entraide sur les logiciels libres, l’appropriation du numérique par tous et toutes, etc.
J’accueille avec plaisir aujourd’hui Isabelle, avec nous au studio, pour cette deuxième émission depuis la rentrée.
Isabelle Carrère : Salut Étienne.
Étienne Gonnu : Salut Isabelle, ça va ?
Isabelle Carrère : Oui, ça va bien. La deuxième émission, mais la première pour Antanak, c’est la première de la rentrée.
Étienne Gonnu : Oui, ça reste la rentrée.
Isabelle Carrère : Ça reste la rentrée. Du coup, pour la rentrée, j’ai choisi un petit sujet de rentrée dans le sens de nos pratiques. Tu l’as dit, la pratique du double SE, du double système d’exploitation. On dit aussi souvent double boot ou dual-boot, boot comme démarrage, to boot pour démarrer, en anglais dans le texte.
De quoi s’agit-il ? En fait, il s’agit d’avoir, sur un même ordinateur, plusieurs systèmes d’exploitation sur lesquels démarrer selon ses envies, ses besoins de telle ou telle fonctionnalité, de tel ou tel logiciel.
Parfois, des personnes ont plusieurs distributions GNU/Linux sur leur ordi par exemple une Debian ou une Linux Mint. Souvent, c’est pour tester une distribution, pour choisir, voir les évolutions, etc. Mais très souvent, à Antanak, nous voyons des partitions Windows et une distribution Linux à côté.
Pourquoi nous, à Antanak, sommes-nous confrontés à ça, puisque nous sommes quand même et avant tout des libristes ? Eh bien uniquement parce que des personnes, notamment des étudiants et étudiantes, nous indiquent avoir besoin, être dans l’obligation, pour leurs études, d’utiliser des applications qui ne tournent que sous Windows. On a calculé que c’est presque un étudiant sur deux, une étudiante sur deux, qui nous demande ça. Souvent on discute, on leur prouve que ce n’est pas indispensable, mais, parfois, on y va quand même à contrecœur.
AutoCAD est l’exemple que je prends très souvent. Les étudiants/étudiantes pourraient bien sûr utiliser LibreCAD ou bien FreeCAD ou encore QCAD, voire, j’ai vu qu’il y a une application, un logiciel qui s’appelle tirage au sort ??? [3 min 45], je ne sais pas quel rapport ça a avec AutoCAD, apparemment c’est quelque chose de bien, sauf qu’elle est payante et même cher. Je ne la connais pas, je ne sais pas si quelqu’un la connaît.
Étienne Gonnu : Est-ce que tu peux nous rappeler ce qu’est AutoCAD ? À quel usage ça répond ?
Isabelle Carrère : J’allais y venir. AutoCAD, et toutes les autres que j’ai citées dans le monde du Libre, est une application qui permet de faire de la 3D. Les étudiants et étudiantes, notamment en architecture, s’en servent beaucoup pour faire comme des maquettes sur ordinateur. C’est un mélange de CAO [Conception Assistée par Ordinateur], PAO [Publication Assistée par Ordinateur], etc., donc conception et autres outils sur ordinateur. Ce qui se passe c’est que bien souvent, malheureusement, ce sont les professeurs/professeurEs, qui n’acceptent pas toujours qu’ils et elles utilisent ces applications libres, qui, donc, obligent à une utilisation là, dans mon exemple, d’AutoCAD. Du coup, ces personnes en parcours d’architecte nous demandent un ordinateur sur lequel il est possible d’installer AutoCAD.
Pour nous, en interne à Antanak, ce n’est pas du tout simple. D’abord, parce que la solution de Wine, qui permet à des systèmes d’exploitation Linux d’utiliser des applications tournant sous Windows nativement, n’est pas toujours la bonne solution parce que c’est très gourmand en mémoire RAM, mémoire vive, et ça requiert un processeur un peu puissant pour pouvoir le faire tourner. Du coup, on opte pour la mise en place de deux systèmes.
Des tas d’entreprises nous donnent des ordinateurs qu’elles ont réinitialisés et sur lesquelles elles ont réinstallé une version de Windows, actuellement la 10 ou la 11. Du coup, dans ces cas-là, on garde quelques ordinateurs, on garde la version de Windows au lieu de l’écraser et on la pousse un peu pour faire de la place et installer une autre distribution à côté, une distribution GNU/Linux.
Donc, vous êtes en train de penser « tout va bien, où est le problème ? De quoi nous parle-t-elle ? C’est clair ». En fait, en termes de pensée libriste, c’est quand même très limité parce que, à Antanak, nous ne sommes pas dupes. Quid de la réalité, de l’utilisation, par les personnes qui reçoivent un tel ordi avec deux systèmes d’exploitation ? On se demande si, pour de vrai, elles vont aller utiliser la partition sous Linux, on est pas sûr de ça. On essaye d’expliquer les cas de figure : pour te servir d’AutoCAD, tu vas sur Windows, mais, le reste du temps, pour tes mails, pour, etc., mais je ne suis pas certaine que les gens le font de cette manière-là. Du coup on n’a pas gagné grand-chose !
Ensuite, c’est beaucoup plus long pour nous, moins simple à automatiser, entre guillemets à « industrialiser », or, on a plein d’installations à faire, donc ce n’est pas vraiment satisfaisant. Mais que faire d’autre et comment répondre à la demande de ces personnes sans jouer les censeurs, censeuses ? Je ne sais pas comment on dit au féminin, un censeur, une censeuse ? Je ne sais pas.
Étienne Gonnu : J’essaie de me renseigner.
Isabelle Carrère : Tu te renseignes ? Merci Étienne. En fait, on ne peut pas dire aux gens « non, tu n’en as pas besoin, on ne va pas le faire, nous sommes des libristes purs et durs ».
Par contre, ce qui est étonnant c’est que, dernièrement, à la mi-août, on a eu un souci spécial et peut-être que certains/certaines ont déjà rencontré cela. On a laissé faire une mise à jour de Windows sur certains postes et elle a bloqué le démarrage de Linux, notamment sur des postes en double système. Ça a été répertorié, ça a été pas mal discuté sur des forums, des blogs, des articles sur le Net, peut-être en avez-vous vu, et même sur le site gouvernemental, le CERT [Computer Emergency Response Team], le Centre d’alerte et de réaction aux attaques informatiques ils en ont parlé. Le nom de l’affaire c’est CVE-2022-2601, c’est beau ! CVE veut dire Common Vulnerabilities and Exposures, on est bien avancé ! Ça m’a l’air d’être comme un recensement des attaques et des problématiques. Microsoft a reconnu avoir eu ce souci-là sur leur mise à jour du mois d’août.
OK ! Que Windows, que Microsoft fasse ce qu’il veut sur sa partie, on peut le comprendre, sauf que là, ce qui nous embêtait c’est que ça voulait dire qu’ils ont intégré de force, sur les machines, un paramètre que nous, généralement, nous enlevons, qui s’appelle le secure boot, qui voudrait dire démarrage sécurisé en français. C’est, en fait, un petit paramètre, une fonctionnalité qui permet de s’assurer qu’un ordinateur démarre bien en utilisant uniquement les logiciels approuvés par le fabricant. Le terme « fabricant » est intéressant. Qui est ce fabricant ? Parle-t-on de HP, Dell, Lenovo, Asus ? Non, en fait on parle de celui qui a, de force, intégré la majorité des ordinateurs, donc Microsoft, mais ce n’est pas lui le fabricant. Bref ! Ça veut dire que Microsoft a réussi à faire une mise à jour par laquelle il peut s’insinuer subrepticement jusqu’au BIOS, jusqu’à l’UEFI, en tout cas tous ceux qui n’ont pas de mot de passe, pour aller réactiver quelque chose que nous avons désactivé pour installer Linux. Et là, on s’est demandé comment faire. Déjà qu’on n’était pas très ravis et enchantés d’avoir à faire ces doubles systèmes, là, du coup, ça a quand même rajouté quelque chose. Que Microsoft fasse ce qu’il veut dans sa partie, OK très bien ! Sauf s’il y a quelque chose qu’on n’a pas bien compris – et, si des gens qui nous écoutent, des auditeurices ont quelque chose à dire là-dessus je suis preneuse d’informations –, en tout cas nous nous sommes demandé « est-ce que ça veut dire qu’on va laisser tomber complètement ? ». J’ai vu qu’il y a quand même pas mal de distributions libres qui, désormais, sont installables avec le secure boot activé, le démarrage sécurisé activé, ça veut dire qu’ils ont joué le jeu, eux aussi, de ce que fait Microsoft. Est-ce que toutes les distributions vont le faire dans ce sens-là ?, je ne sais pas. En tout cas, on n’a pas trop aimé cette une prise de contrôle là, donc on sait pas. Si vous avez des idées, nous sommes tout à fait preneurs, preneuses pour cette rentrée.
Étienne Gonnu : Je crois que ce secure boot est un problème ancien. À l’April, par le passé, on a essayé de réfléchir à des amendements et, quand l’occasion se présentera à nouveau, je pense qu’on essaiera de trouver une manière d’interdire ou de cadrer davantage ces mesures techniques qui limitent, en réalité, la liberté d’installer les systèmes qu’on veut.
Isabelle Carrère : C’est un problème ancien oui et non, parce que, jusqu’à présent, on pouvait sans problème, l’enlever nous-mêmes de l’UEFI et faire notre installation. Ce qui est nouveau depuis 2023, c’est que Microsoft, dans sa version 11, empêche, c’est-à-dire que si tu désactives le secure boot, que tu veux installer ton Microsoft version 11, tu ne pourras pas l’installer. Je suis d’accord sur le fait que c’est une vieille affaire, depuis que l’UEFI existe, on avait ces affaires de Legacy, UEFI, secure boot activé, désactivé, on avait tous ces machins-là, sauf que là ce qui est nouveau c’est qu’il y a comme un empêchement de faire.
Étienne Gonnu : On sent que c’est vraiment un terrain politique et un champ de luttes.
Pour répondre à ta question, selon le Wiktionnaire, je lui fais confiance, on dit et une censeur ou une censeuse.
Isabelle Carrère : Une censeuse ! Voilà ! Je ne veux pas être une censeuse, mais, quand même, je voudrais pouvoir faire les choses tranquillement.
Étienne Gonnu : tu es plus proche du lanceur d’alerte que de la censeuse.
Merci beaucoup Isabelle pour cette première chronique de la saison 8 et au mois prochain pour la prochaine chronique « Que libérer d’autre que du logiciel ».
Isabelle Carrère : Absolument. À bientôt. Merci. Bonne émission.
Étienne Gonnu : À bientôt.
Nous allons à présent faire une pause musicale.
[Virgule musicale]
Étienne Gonnu : Après la pause musicale, nous parlerons de Minetest, l’autre pays du minage. Avant cela, nous allons écouter Sous Contrôle par Les gueules noires. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
Pause musicale : Sous Contrôle par Les gueules noires.
Voix off : Cause Commune, 93.1.
Étienne Gonnu : Nous venons d’écouter Sous Contrôle par Les gueules noires, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution CC By.
[Jingle]
Étienne Gonnu : Passons maintenant à notre sujet principal.
[Virgule musicale]
« Minetest : l’autre pays du minage »
Chronique « Pépites libres » de Jean-Christophe Becquet, vice-président de l’April – « L’Accueillette : un outil d’autodiagnostic de lieux d’accueil »
Étienne Gonnu : Nous allons poursuivre avec la chronique