En quoi la stratégie du numérique éducatif va impacter ma classe - Audran le Baron

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Titre : En quoi la stratégie du numérique éducatif va impacter ma classe

Intervenants : Audran Le Baron - Éric Fourcaud

Lieu : LUDOVIA#BE 2023 - Les podcasts de Ludomag

Date : 28 septembre 2023

Durée : 29 min

Podcast

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Éric Fourcaud : Bonjour et bienvenue dans Les Podcasts de Ludomag.
Je suis Éric Fourcaud rédacteur en chef de Ludomag, premier magazine en ligne de partage d'expériences d'enseignants francophones sur leurs pratiques pédagogiques en classe avec le numérique.
Chaque semaine, nous recevons des enseignants, formateurs, éditeurs, chercheurs et institutionnels qui ont quelque chose à dire ou proposent des solutions à utiliser en classe.
Les Podcasts de Ludomag, saison 4, « Des Projets dans ma Classe ».

Aujourd'hui nous recevons Audran Le Baron, directeur du numérique pour l'éducation au ministère de l'Éducation nationale avec qui nous allons parler de stratégie.
Bonjour Audran Le Baron.

Audran Le Baron : Bonjour Éric Fourcaud.

Éric Fourcaud : À l’heure de la rentrée, il était effectivement nécessaire de parler aussi de stratégie et de ce qui est mis en place par la direction du numérique pour l'éducation, la DNE pour les gens qui ont l'habitude de ces trois lettres, et peut-être aussi de ce qui est attendu pour 2024.
Comme on le sait, un nouveau ministre a été nommé au début de cet été, avec une équipe en partie renouvelée, j'imagine, autour de lui. Cela change-t-il la donne pour le numérique en éducation et sur les orientations de la DNE pour le moment, Audran Le Baron ?

Audran Le Baron : Est-ce que ça change quelque chose ? Bien sûr, toute arrivée d'un nouveau ministre change la donne. Au cas particulier, nous avons traduit, dans un document assez complet, une stratégie du numérique pour l'éducation avec le prédécesseur du ministre, Pap Ndiaye, en début d'année. Le nouveau ministre, Gabriel Attal, s'en est emparé et a déjà eu l'occasion d'ailleurs d'annoncer publiquement, dans une interview, qu'il faisait sienne cette stratégie, qu'il allait néanmoins prendre le temps de la regarder dans le détail, éventuellement d'y apporter quelques ajustements et qu'on le ferait posément, dans la concertation. C'est donc ce que l'on va probablement faire dans les prochaines semaines pour mettre à jour, le cas échéant, ce qui doit l'être avec l'ensemble des événements qui ont pu se dérouler depuis maintenant presque un an. Raison pour laquelle, à la date anniversaire de la publication de la stratégie, on pourrait effectivement faire une mise à jour mineure, mais qui sera issue de la concertation et de la volonté du ministre, que je veux souligner, d'avancer dans le sujet du numérique pour l'éducation. C'est un sujet qu'il souhaite porter, donc nous serons au rendez-vous.

Éric Fourcaud : Peut-on dire que la stratégie ou la méthode qui a déjà été mise en œuvre c'est d'abord et avant tout proposer une vision commune aux différents acteurs, qu'on appelle parfois la communauté du numérique éducatif – collectivités, enseignants, cadres, EdTech –, est-ce que c'est avant tout ça ou plus ?

Audran Le Baron : Merci de poser cette question dans ces termes. Souvent on me dit « la stratégie du ministère » et je réponds « non, ça n'est pas la stratégie du ministère, c'est la stratégie du numérique pour l'éducation », c'est donc une stratégie qui est le fruit d'une grande concertation avec l'ensemble des acteurs, que ce soit les acteurs institutionnels, l'État sous toutes ses formes, les collectivités territoriales et tous les niveaux de collectivités territoriales, les entreprises de l’EdTech, mais également tous ceux qui participent, les représentants des parents d'élèves, des professeurs, des élèves. Bref ! C’est vraiment tout ce travail de concertation qui a abouti à une vision largement partagée, je ne veux pas dire qu'on est d'accord sur tout, il y a évidemment toujours des choses que certains voudraient voir modifiées, amendées, etc., mais c'est globalement le fruit d'un consensus et c'est finalement ça la force de cette stratégie : elle est transpartisane, si j'ose dire, elle fédère l'ensemble de la communauté.

Éric Fourcaud : On rappelle qu'en 2020 il y a eu États Généraux de l’Éducation. Suite à cela il y a eu une réflexion menée sur cette stratégie, il y a eu l'organisation d'un colloque, en 2022, et puis la création d'un comité de dialogue entre les collectivités locales, territoriales, et le ministère ou le ministre.

Audran Le Baron : Absolument. Pour le coup, on a capitalisé sur des choses qui existaient déjà, pour être très honnête, mais un des premiers points que l'on pose dans la stratégie, ça correspond à l'essentiel du premier axe de la stratégie, c'est de travailler effectivement sur la gouvernance. Dans le numérique pour l'éducation, comme j'ai eu l'occasion de le dire à l'instant, il y a beaucoup d'acteurs qui participent – État, collectivités territoriales, entreprises, associations, communautés – et l'enjeu c’est de faire en sorte que l'ensemble des acteurs partage finalement un cap, une stratégie, une méthode, donc le sujet de la gouvernance est crucial là-dedans, notamment le suivi de la gouvernance entre l'État et les collectivités territoriales puisqu’on ne développe rien dans le numérique, dans l'éducation, sans le recours aux collectivités territoriales qui sont notamment à la manœuvre pour les équipements, mais pas que, et le ministère, lui, a évidemment sa part à jouer en matière de formation, en matière de disciplines, de compétences numériques, etc. Donc ça n'est qu'en parlant ensemble, en prévoyant ensemble la feuille de route qu’on arrivera à quelque chose. C'est un point fondamental.
On avait déjà, de longue date, un comité des partenaires au sein du ministère à mon niveau, qui se tient tous les mois, en lien avec l'ensemble des représentants des collectivités territoriales, communes, départements et régions, mais on a vraiment essayé d’avoir une instance réellement opérationnelle où on se dit les choses en transparence et de façon constructive et on a vraiment réussi à renouer un dialogue constructif, chaque mois, sur ces sujets-là avec une vraie relation de confiance ; si je me permets de le dire c'est que c'est le type de retour que j'ai eu. On a vraiment une instance qui fonctionne bien au niveau national de ce point de vue-là, à mon niveau. Il manquait une instance à un niveau plus politique, qui implique le ministre, non pas seulement sur le numérique éducatif, mais sur l'ensemble des politiques publiques liées à l'éducation. C'est quelque chose qui a été mis en place en septembre dernier par le ministre Pap Ndiaye, c'est également une instance sur laquelle notre nouveau notre ministre, Gabriel Attal, souhaite continuer parce qu’il voit tout le sens qu'il y a à maintenir ce dialogue politique, resserré, avec les collectivités territoriales. On a donc maintenant effectivement une gouvernance à la fois politique et puis plus technique, j'ai envie de dire, qui est opérationnelle au niveau national et qu'il s'agit de « décliner », entre guillemets, au niveau territorial. Il y a déjà beaucoup de choses qui existent. Là où il y a déjà une gouvernance qui marche il ne s'agit surtout pas de la modifier, on ne bouge pas quelque chose qui marche, mais de bien s'assurer que dans tous les territoires il y a bien une gouvernance à la fois à un niveau politique et à un niveau opérationnel qui fonctionne, notamment sur le sujet du numérique éducatif.

Éric Fourcaud : D’accord. Donc on s'est mis d'accord sur les responsabilités de chacun, sur les indicateurs partagés en commun, parce qu’on parle souvent d'évaluation des politiques publiques et les collectivités, à une époque, je me souviens, n'étaient pas totalement d'accord sur ce type d'évaluation, donc j'imagine que tout cela est bien coordonné aujourd'hui, une sorte de kit de gouvernance qui est mis en place.
Je voudrais parler maintenant de ce qui touche les enseignants puisque, dans notre dans notre saison 4, nous nous sommes intéressés aux projets dans les classes. Que propose cette stratégie du numérique éducatif pour les enseignants en matière de formation, en matière d'outils, de méthode ? Comment ça va fonctionner ou comment ça fonctionne déjà ?

Audran Le Baron : Peut-être de deux choses.
On insiste beaucoup dans la stratégie à la fois sur le fait qu’on doit progresser dans l'enseignement du numérique, là c’est plus en direction d'abord des élèves pour qu’ils puissent être formés à une citoyenneté numérique, c’est-à-dire connaître les codes du numérique, les possibilités qu'il offre mais également les risques et les limites du numérique, donc avoir toute cette connaissance sur le numérique, mais également les compétences plus pointues d'algorithmie, voire de codage. Là on va vers les sujets de spécialité NSI, notamment, en filière générale et technologique ou également des équivalents en filière professionnelle.
On a tout donc un enjeu de progresser là-dessus et de remonter également du lycée vers le collège pour, c'est le sens de ce que l'on est en train de faire en revoyant le programme de technologie de cycle 4 pour tenter d'y inclure plus de numérique.
Tout ce volet-là est important. On y travaille et ça commencera à porter ses fruits à partir de la rentrée suivante, donc je passe rapidement.

Pour ce qui concerne cette année on a, d'ores et déjà, des premiers éléments de stratégie qui arrivent sur, vous l'avez dit, la formation des professeurs : pour pouvoir enseigner le numérique ou enseigner avec le numérique, il s'agit d'accompagner les enseignants, en tout cas ceux qui sont volontaires pour y aller, dans ce sens. On prévoit d’insister sur deux choses qui vont arriver progressivement dans cette année scolaire.
La première chose. Vous avez entendu parler du dispositif Pix. Pix c'est bien connu des élèves et des professeurs qui l'accompagnent pour s’évaluer voire développer ses compétences numériques. Eh bien Pix arrive également pour les professeurs, pour les enseignants. C'est ce qu'on appelle le Pix+ Édu. Je ne vais pas décrire l'ensemble du processus, ce serait trop long. Ce que l'on met en place là, à la rentrée, dans les jours qui viennent, c'est ce qu'on appelle un parcours d'auto-positionnement Pix+ Édu. On va donner les codes d'un parcours à tous les enseignants pour qu'ils puissent, en deux heures, se tester sur leurs compétences numériques, à la fois les compétences numériques transversales qu'on utilise vous et moi au quotidien et les compétences propres au métier d'enseignant : comment on intègre le numérique dans sa pédagogie, dans son métier d'enseignant.
En deux heures ça permettra de se positionner, de savoir sur quelles compétences on est bon, sur lesquelles, en revanche, on pourrait progresser. Ça permettra ensuite, dans un dialogue avec les services, de proposer des formations qui vont permettre aux enseignants qui le veulent de progresser sur tel ou tel aspect et puis, pour ceux qui veulent vraiment s'investir dans cette direction-là potentiellement de pouvoir se certifier à un niveau élevé de compétences numériques que l'on pourra ensuite valoriser dans la carrière.
C'est tout ce dispositif qui a été annoncé dans la stratégie, que l'on démarre à la rentrée par ce parcours. C’est le premier point sur lequel je voulais insister.

Le deuxième. Je dis souvent « le numérique n'a rien de magique ». Ce que je veux dire avec cette formule c'est que, souvent, on a des fanatiques du numérique, des convaincus qui sont souvent assez peu audibles du grand public parce qu’ils sont convaincus que le numérique c'est formidable, que ça va tout révolutionner, que ça va permettre de rehausser le niveau général de tous les élèves, etc. Non, il n’y a rien de magique là-dedans. Ce n'est pas en mettant des tablettes dans toutes les mains des enfants que, par magie, tout va s'améliorer. En revanche, oui, le numérique peut apporter une plus-value dans l'enseignement, dans les apprentissages, encore faut-il qu'il soit utilisé à bon escient, dans les bonnes séquences de cours, avec des outils qui ont été correctement conçus et des enseignants qui ont été correctement formés à l'utilisation de ces outils.
Pour aller vers cette utilisation raisonnée du numérique, en ce moment nous travaillons, à la direction numérique pour l'éducation et avec la Dgesco, la direction générale de l'enseignement scolaire, sur un guide à l'usage des enseignants, un guide d'usage des outils numériques dans la pédagogie. L'idée c'est que vraiment par discipline, par niveau, on puisse indiquer aux enseignants « voilà des utilisations pertinentes du numérique » pour qu'il soit plus guidés. Ce n’est pas une référence absolue, obligatoire, etc., c'est un guide qui permet aux enseignants d'y voir clair sur des usages pertinents dans leur pédagogie selon les disciplines, selon les niveaux.

Éric Fourcaud : Ce n’est pas un manuel, on va dire, c’est un guide.

Audran Le Baron : Ce n'est pas un manuel, c'est vraiment une sorte de vade-mecum, je ne sais pas quel est le meilleur terme. Le numérique est difficile d'approche parce qu’il y a un foisonnement d'offres tel qu’on ne sait pas où donner de la tête. Ce guide est aussi là pour dire « concentrez-vous plutôt sur tel type d'outils dans la pédagogie, parce que c'est cela qui est particulièrement utile, et, au contraire n'utilisez pas ou mieux vaut écarter le numérique dans tel ou tel type d'apprentissage parce qu’il n'a jamais prouvé sa plus-value, voire, dans certains types de séquences pédagogiques, il peut même être contre-productif ».

15’ 18

Éric Fourcaud : D’accord.