Santé et souveraineté : La mémoire en héritage - Trench Tech

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Titre : Santé et souveraineté : La mémoire en héritage

Intervenants : Dominique Pon - Cyrille Chaudoit - Mick Levy - Gérald Holubowicz - Serge Tisseron, voix off - Thibaut le Masne

Lieu : Trench Tech

Date : 23 avril 2023

Durée :

Podcast

Page de présentation du podcast

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Mick Levy : Les gars, je suis tout excité par l’épisode du jour. Je me suis pris véritablement une claque sur la session de préparation qu’on a eue avec Dominique Plon. Une vraie rencontre.

Cyrille Chaudoit : Je n’arrête pas d’y penser. Ça m’obsède.

Mick Levy : Un être exceptionnel. C’est ce que je me suis dit en raccrochant d’avec lui.

Cyrille Chaudoit : Mais vraiment. Son histoire de traces numériques, l’histoire de l’après.

Thibaut le Masne : C’est exceptionnel. Eternesia, c’est ça ?

Cyrille Chaudoit : Franchement, ça me marque beaucoup.

Thibaut le Masne : C’est surtout l’approche qu’il veut en avoir, c’est-à-dire en faire un droit inaliénable, fondamental, au même titre que les droits de l’homme.

Cyrille Chaudoit : Patrimoine mondial de l’humanité.

Mick Levy : Chaque vie humaine est une œuvre d’art. Et tu vois que toute sa carrière ets dictée par ses valeurs, etc. C’est vraiment magnifique !

Thibaut le Masne : En fait, il les incarne.

Voix off : Trench Tech. Esprits Critiques pour Tech Éthique.

Thibaut le Masne : Bienvenue dans Trench Tech. Le podcast qui aiguise votre esprit critique sur les impacts de la tech dans notre société. Thibaut pour vous accueillir aujourd’hui et toujours aussi bien entouré. Salut Mick, comment ça va aujourd’hui ?

Mick Levy : Salut Thibaut. Ça va super. Salut Cyrille.

Thibaut le Masne : Salut Cyrille. La forme ?

Cyrille Chaudoit : Oui, c’est la grande forme. Salut Mick. Salut Thibaut.

Thibaut le Masne : Super top.
Primum non nocere. Premièrement, ne pas nuire. C’est le premier principe de prudence appris aux étudiants en médecine. 2001, une première mondiale devait changer profondément le monde de la santé, l’opération Lindbergh. Il s’agit de la première opération cardiaque réalisée à distance entre un chirurgien situé à New-York et une patiente qui est à Strasbourg. Oui, le numérique était porteur d’espoir et on voulait révolutionner le monde de la santé : détecter les cancers au plus tôt, faciliter l’administration de nos soignants, améliorer notre connaissance du génome humain, découvrir de nouveaux vaccins. Oui, ce numérique voulait aider. Mais, avec le temps, il semblerait que cette promesse se soit quelque peu effritée et que sur le chemin du tout numérique, nous avons oublié d’intégrer au moins un ingrédient clef : l’humain.
2014, une cyberattaque paralyse l’hôpital pour enfants de Boston, générant un manque à gagner de plus de 300 000 dollars.
Depuis 2017, en France, ce ne sont pas moins de 478 incidents liés à la cybersécurité qui ont été signalés à l’Agence des systèmes d’information partagés de la santé. La fréquence et la virulence des attaques est en augmentation chaque année et elles font la une de plus en plus de journaux.

Secondum cavere. Deuxièmement prendre soin.
C’est ce temps que nous allons prendre avec notre invité du jour, Dominique Pon, avec qui nous allons faire le point sur la situation sur le numérique dans la santé, puis nous allons revenir sur la dimension humaine nécessaire à la santé et au numérique et, enfin, à l’ère du tout numérique, nous allons nous questionner sur la gestion de l’après, le grand après.

Tertium sanare. Troisièmement soigner. C’est le temps que nous prendrons, juste entre vous et nous, pour rassembler les idées clefs de cet épisode.
Bien entendu, durant cet épisode nous n’oublierons de prendre deux chroniques en comprimé : « On refait la tech » de Gérald Holubowicz et « Un moment d’égarement » de Laurent Guérin, afin de souffler un peu dans notre convalescence.
Cyrille, Mick, je crois que c’est le moment d’accueillir Dominique Pon.

Mick Levy : Je crois qu’il nous attend.

Thibaut le Masne : Bonjour Dominique.

Dominique Pon : Bonjour.

Thibaut le Masne : Dominique, on se tutoie ?

Dominique Pon : Oui, bien sûr, avec plaisir.

Thibaut le Masne : Super.
En regardant ta bio, certains pourraient dire que tu as eu une carrière atypique, mais, en l’observant de plus près, on s’aperçoit que c’est surtout une histoire d’amour. En effet, tu es ingénieur Télécom SudParis, promo 92, tu as commencé par le secteur de l’aéronautique avant de bifurquer dans le traitement d’images et du signal chez Schlumberger. Mais ta vie de cœur te manque et tu décides donc de rejoindre le groupe Vinci, à Toulouse, où tu deviens chez d’entreprise. Durant cette expérience, tu croises la route du monde hospitalier et tu observes toutes les difficultés numériques de ce secteur.
Tu décides de quitter ton poste de chef d’entreprise, tu divises ton salaire par quatre, et tu redeviens informaticien dans un hôpital. Petit à petit tu montes pour devenir directeur général de cet hôpital qui n’est autre que la clinique Pasteur à Toulouse.
En 2018, tu es appelé par le gouvernement pour piloter tout le secteur de la santé numérique en France, ce que tu fais pendant quatre ans. Aujourd’hui, tu es directeur général adjoint chez Docaposte. Tout est juste ?

Dominique Pon : Oui, exactement.

Thibaut le Masne : Super. Lançons notre première séquence : le numérique et la santé. On fait le point sur la situation.

Voix off : Trench Tech. Esprits Critiques pour Tech Éthique.

Cyrille Chaudoit : Le numérique en santé c’est une grande histoire. D’un côté, des applications de ouf qui font rêver, Thibaut tu en as cité quelques-unes : la chirurgie à distance, la détection du cancer avant même que le cancer ne puisse être détectable par un œil humain et, d’un côté, un symptôme d’information qui est attaqué de toutes parts, c’est le cas de le dire, avec les cyberattaques et qui semble plus que jamais à bout de souffle.
Dominique, toi qui étais responsable de la Délégation ministérielle au Numérique en Santé, la DNS, il y a encore un an, tu as quitté ces fonctions en avril 2002, tu vas pouvoir nous éclairer, nous aider à y voir clair : quelle est la santé du système numérique de santé en France, finalement ?

Dominique Pon : En gros, pour se le représenter, ça fait 20 ans que le numérique en santé en France est un bazar indescriptible. Des logiciels ont fleuri partout, chez les médecins, dans les hôpitaux, dans les labos de biologie, sans règles communes, sans normes communes. Ces logiciels ne communiquent pas entre eux donc, dans le cas des parcours de soin des gens, il y a toujours une information qui manque parce que les logiciels ne sont pas connectés les uns aux autres, parce qu’aucune règle n’avait été réellement posée par l’État. Ça fait donc des professionnels de santé qui pètent les plombs parce que ça ne marche pas bien. Ensuite nous, les Français, nous n’avons toujours pas nos données de santé.
Depuis en gros trois/quatre ans, une vraie dynamique a été posée au niveau gouvernemental en lien avec les professionnels de santé, les syndicats de professionnels et les industriels pour dire « ce n’est plus possible ». Des nouvelles règles ont été fixées pour que les logiciels soient développés d’une certaine façon, pour que ça communique mieux, et surtout qu’on restitue aux Français leurs données de santé dans un carnet numérique qui s’appelle Mon espace santé. Mais avant que les gens voient vraiment le résultat concret, il y en a encore pour deux/trois ans, en gros. Mais, pour moi, on est sur le bon chemin.

Cyrille Chaudoit : On va revenir ensemble sur la partie Mon espace santé. Mais déjà sur ce qui pose le système d’information de santé, j’ai entendu dire qu’à l’échelle d’un hôpital il y a plusieurs milliers d’applications qui sont, du coup, à maintenir, pas toujours toutes aux normes, qui laissent aussi un certain nombre de failles de sécurité et que c’est ça qui est en partie responsable de toutes les cyberattaques qu’on voit, qui se multiplient, et qui continuent d’ailleurs de se multiplier un peu partout dans le monde, en particulier en France.

Dominique Pon : Il y a ça. Il y a le fait qu’il y a une fragmentation extrême des logiciels au sein des hôpitaux, mais il y a surtout le fait qu’il n’y a pas de maturité par rapport à ces sujets de sécurité. Concrètement, il n’y a pas eu d’investissements depuis des années sur les sujets de cybersécurité, mais pas non plus d’interopérabilité, c’est-à-dire la capacité des logiciels à communiquer entre eux. Donc il y a double problème : il y a la sécurité qui est très médiatisée, mais quotidien des professionnels ce ne sont pas les cyberattaques, c’est le fait qu’on n’a pas accès à l’information au bon moment.

Cyrille Chaudoit : Du coup, ça amène des difficultés, j’imagine, un petit peu partout, dans chaque processus de l’hôpital, dans chaque opération que doit faire un médecin, ça complique la vie partout. C’est ça ?

Dominique Pon : En fait, la communication d’informations entre les professionnels de santé ne marche pas super. Tu as du mal à récupérer un résultat de biologie qui vient d’un laboratoire extérieur, tu as du mal à récupérer de façon très fluide l’image qui va venir d’un centre de radiologie extérieur, tout cela parce que ça n’a pas été cadré à la base avec des règles. Au-delà de ça, en plus de ça, comme il n’y a pas eu d’investissements sur les sujets de sécurité, de cybersécurité, on paye maintenant le fait que pendant des années et des années on n’a pas bossé là-dessus.

Thibaut le Masne : Si je dois faire un parallèle, le monde très siloté que tu as l’air de dépeindre d’un hôpital, des hôpitaux, on va dire, en règle générale, c’est une peu le monde siloté qu’on avait dans les entreprises, ce qui reste toujours encore un peu le cas, dans les années 2010. Ce besoin de dé-siloter vient souvent de l’entreprise elle-même qui dit il faut qu’on fonctionne différemment.
Comment se fait-il que ce besoin-là n’ait pas été pressenti au sein des hôpitaux pour essayer de faire grandir quelque chose ou essayer d’uniformiser ?

Dominique Pon : Pour avoir bossé aussi dans l’industrie, je peux te dire qu’en termes de gouvernance, de complexité des métiers, d’administration par la puissance publique, de corporatisme, de fragmentation extrême du système, tu n’as pas mieux que la santé, peut-être l’éducation ! Cette complexité fait que les résultats des outils, des doctrines, des politiques publiques sont ultra-complexes et jamais très cohérentes.

Mick Levy : Comment peut-on remettre le numérique au service de la santé ? Que faut-il faire pour que le numérique redevienne une solution pour la santé globalement des Français en fait ?

Dominique Pon : Mon prisme c’est que, depuis 20 ans, on navigue dans le secteur de la santé entre le fantasme et la frustration. Il faut sortir de ça. On fantasme des trucs fabuleux et on n’est pas capable de s’envoyer un bête PDF d’un médecin généraliste à un professeur de cardiologie.
Ça mérite juste de l’humilité, du pragmatisme et de tenir bon sur la durée. Là, je pense que les choses ont été reprises par le bon bout. Des règles ont été fixées et ont été imposées aux industriels. L’État finance la mise aux normes de tous les logiciels de santé, il y a encore pour trois ans. Des mécanismes de sécurité ont été posés avec des infrastructures nationales de messagerie sécurisée, des annuaires communs à tout le monde, à tous les médecins, tout bêtement des annuaires. Il n’y avait même pas une identité numérique unique en France pour chaque Français. Tu n’avais pas le droit d’utiliser le numéro de sécu pour référencer des données de santé. Tous ces trucs ont été posés et maintenant c’est un petit peu le boulot qui aurait dû être fait il y a 15 ans, qu’on a démarré il y a trois/quatre ans. Si on persiste humblement et de façon déterminée, ça va le faire.

Thibaut le Masne : Juste pour être sûr de bien comprendre, si je me place du côté de là où je suis, c’est-à-dire un patient potentiel ou réel, quelle est l’incidence réelle de tout ce que tu nous décris là sur la vie des patients ? Est-ce que c’est juste une expérience utilisateur comme l’expérience client en moins, si on refait le parallèle avec le monde de l’entreprise plus classique, donc c’est un petit désagréable, ça ralentit les processus, etc., ou est-ce que ça a vraiment des enjeux sur la qualité des soins qu’on peut nous prodiguer, donc, in fine, sur notre santé ?

Dominique Pon : Dans le secteur de la santé, l’expérience client c’est l’expérience patient. L’expérience patient quand les soins sont mal coordonnés, eh bien ça craint ! C’est aussi bête que ça. Pour moi il y a deux gros sujets. Il y a le fait que ce n’est pas encore totalement fluide, mais ça s’améliore, sur la coordination des professionnels de santé quand ils veulent te soigner. Quand tu as un pépin de santé tu as plein d’intervenants. S’ils sont mieux coordonnés, ça va améliorer la qualité des soins. C’est le premier enjeu ; avec le numérique on va y arriver petit à petit.
Le deuxième enjeu, tout bête, c’est que tu aies accès toi-même à tes données de santé. Tu n’as pas tes données de santé encore aujourd’hui sur ton smartphone. Tu es toi-même dépossédé de ton information médicale. Tu en as un bout chez ton pharmacien, un bout chez ton ophtalmo, un bout dans ton hôpital, un bout chez ton médecin généraliste. Donc, pour moi, ce qui est en train d’être lancé là c’est déjà le fait de restituer aux gens leurs données de santé pour que eux-mêmes deviennent acteurs de leur santé. Pour moi c’est ça l’avenir du numérique.

Thibaut le Masne : C’est effectivement un enjeu qu’on abordera notamment quand on va parler de mon passeport santé.

Dominique Pon : Mon espace santé.

Mick Levy : Tu ne vas pas commencer à nous fâcher, Dominique, avec les mauvais noms.

Thibaut le Masne : C’est une peu comme un passeport !, dit le mec qui essaie de se raccrocher aux branches.

Mick Levy : On parlait justement de la place de l’humain dans la santé et de la place avec le numérique. Notre précédent inventé était Serge Tisseron, éminent psychiatrie et psychanalyste que tu dois peut-être connaître personnellement, je ne sais pas Dominique, en tout cas il nous a laissé une question pour toi que je te fais écouter, à laquelle on a hâte d’avoir ta réponse.

Serge Tisseron, voix off : Bonjour. Ma question porte sur ce qu’on appelle maintenant la médecine computationnelle. Mon inquiétude porte précisément sur la façon dont ces pratiques médicales nouvelles, qui laissent peu de place au contact entre le médecin et le patient, risquent d’éloigner de la médecine ceux qui ont les compétences empathiques et le désir de proximité physique avec le malade n’est plus important.

Dominique Pon : Je te donne mon avis par rapport à cette question-là. Dans le soin, la clef c’est la relation humaine, indépendamment de la qualité technique de ton interlocuteur. Le jour où tu as un cancer, tu as besoin d’avoir un humain à côté de toi qui te tient la main, qui te rassure, etc. Clairement la médecine, et ce n’est pas que la faute de la technologie, les professions médicales se sont éloignées de cette relation humaine. Pour moi, le numérique n’est pas responsable de cela.
En revanche, je crois que si on concentre notre projet de santé, le projet de soin, que soit enseigné dès l’école que ce qui compte c’est la relation humaine, à ce moment-là c’est naturel qu’on puisse utiliser sans difficulté des algos d’intelligence artificielle qui vont améliorer les capacités de diagnostic et c‘est comme ça que ça va se passer.
Plutôt que de lutter contre ça, je pense qu’il faut recentrer les professions de soin sur la relation humaine et être accompagnés par de la technologie. On a tous un petit peu abandonné ça ces derrière années. Ce n’est pas la faute du numérique si nous avons abandonné ça, c’est nous-mêmes qui l’avons abandonné.

Mick Levy : Avec cette fameuse médecine computationnelle, tu trouves que ça prend le bon chemin ? On ne risque pas d’aller top loin à force ?

Dominique Pon : Si, tu auras des bugs, mais aujourd’hui tu as des bugs aussi. Tu as plein de moments où on ne met pas à disposition le maximum de la technologie pour être diagnostiqué. Tu dois connaître dans ton entourage des gens qui ont été mal diagnostiqués, diagnostiqués trop tard avec des pertes de chances. Avoir aujourd’hui à disposition la techno qui te permet d’être bien diagnostiqué, ça compte quand même .

Cyrille Chaudoit : Si on ne peut être que d’accord sur la notion d’accompagner, la technique est là pour accompagner l’humain c’est tout à fait logique et tout à fait cohérent, et c’est vrai qu’on oublie un peu ce focal. N’y a-t-il pas aussi un risque ? Toutes ces données de santé, c’est mon médecin qui me connaît et mon médecin est censé mieux me connaître. Mais aujourd’hui, avec la montée des technologies, on aurait plutôt tendance à dire que ce sont les Big Tech qui ont une meilleure connaissance de mon état de santé. N’a-t-on pas un risque en essayant de tout interopérabiliser ? On l’a vu avec le Health Data Hub, on est parti très vite chez les Big Tech. Est-ce qu’on n’aurait pas un risque en essayant de tout vouloir centraliser de partir assez vite changer eux parce que, finalement, ce sont eux qui savent mieux le faire ?

Dominique Pon : En tout cas moi j’ai défendu une vision totalement souveraine, donc par rapport à cela, je suis un mec à l’ancienne, je crois à la souveraineté française, européenne.

Cyrille Chaudoit : C’est pour ça que je te cherche là-dessus !

Mick Levy : Tu crois que la souveraineté c’est une idée d’un mec à l’ancienne ? C’est amusant !

Dominique Pon : Franchement oui. Quand je défendais ça il y a 20 ans ce n’était pas du tout à la mode. Aujourd’hui c’est devenu fashion, mais quand je faisais ça au début on me disait «  la souveraineté c’est un truc ringard ! ». Moi je crois à la souveraineté pour une question toute simple : c’est être maître de son destin sur des sujets en dehors de la technologie de l’information qui ont été l’écriture, l’invention de l’écrire, de l’imprimerie, aujourd’hui du numérique. C’est la tradition de penser ta culture qui passe par là. Tu dois être maître de ton destin si tu veux préserver ta culture et ta tradition de pensée, chez nous humaniste.
J’ai milité. Tout ce que j’ai fait en quatre ans au gouvernement, tout ce que j’ai fait dans ma vie professionnelle, ça a toujours été autour de la souveraineté pour préserver un cadre de valeurs et des principes humanistes. Je ne crois qu’à ça : si tu veux maîtriser ton destin, il faut maîtriser la technologie qui va avec, c’est aussi simple que ça.

Cyrille Chaudoit : Il n’empêche qu’aujourd’hui l’essentiel de nos données, comme le rappelait Thibaut, est quand même chez les GAFAM, notamment avec tout l’Internet of things, le fait de mesurer ses pas, ses machins, etc., tous les capteurs. Qu’en penses-tu ? Est-ce possible de rapatrier, d’une certaine façon, ses données, de les centraliser au niveau, ou on est quand même maintenant un peu pieds et poings liés à ces acteurs ?

Dominique Pon : Dans les capteurs, franchement tu n’as rien d’intéressant ; à date, ce n’est pas ça qui fait les données de santé. Les vraies analyses médicales notamment hospitalières, dans les labos, les labos d’anatomopathologie, les labos de biologie, de génomique, on a encore les données chez nous. On a encore vraiment un énorme champ pour construire ce qu’on appelle les entrepôts de données de santé avec les règles qui vont avec. On a la meilleure base de données au monde, qu’on appelle le SNDS, le Système National des Données de Santé, une super base que tous les pays nous envient. On est dans le matche. Il faut juste ne pas se disperser, être pragmatique et continuer à construire sur ce capital-là, sans se laisser enfumer par les Cassandre qui te disent que c’est déjà plié, qu’on finira chez les GAFAM. il faut rester déter.

==Chronique « On refait la tech » de Gérald Holubowicz. « Automatiser l’info »==

Mick Levy : Restons déter.