Logiciels et services libres pour reprendre le contrôle

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Titre : Logiciels et services libres pour reprendre le contrôle

Intervenant·e·s : Yves Caniou - Angie Gaudion

Lieu : En distanciel sur BigBlueButton

Date : 20 janvier 2022

Durée : 1 h 12 min 14

Évènement : Cycle de conférence du Disrupt Campus

Vidéo

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.


Présentation de Yves Caniou

Commençons.
Comme ça a été mentionné, je suis maître de conférences à l’UCBL [Université Claude Bernard Lyon 1]. Je suis aussi membre de l’équipe projet Inria Avalon au laboratoire informatique et du parallélisme à l’École normale supérieure.
Je suis surtout utilisateur de FLOSS depuis 1997. FLOSS c’est Free/Libre open source Software. Je reviendrai dessus juste après.
J’ai monté un partenariat avec le Linux Professional Institute qui met en place des certifications Linux, donc j’ai organisé des passages de certification LPI aux Journées du Logiciel Libre et au Campus du Libre. Je mets surtout ces données-là un petit peu plus pour faire de la pub qu’autre chose. Les prochaines journées du Logiciel Libre ce sera le week-end du 2 et 3 avril. Ce sont deux jours absolument formidables, ils font un travail de malade. Il y a des exposés du niveau de celui qui est vraiment non informaticien à beaucoup plus expert. Je vous conseille réellement de regarder ce qu’il en est.
Enfin je coordonne, coorganise le Campus du Libre depuis 2018. En ce moment on est déjà en train de regarder pour la prochaine édition qui aura lieu en novembre.

Contexte global

Vous le savez tous, nous sommes dans un monde connecté avec de l’informatique partout. Présentation très générale, on a des ordinateurs partout, des téléphones, des smartphones avec également des services en ligne qui vont être utilisés pour obtenir des informations par exemple auprès de sa mairie sur ce qui se passe, tout ce qui est PLU Plan Local d'Urbanisme], consultations, donc il y a des démarches citoyennes qui peuvent être mises en place comme ça.
Il y a naturellement ce que tout le monde connaît peut-être un petit plus, hélas, le commerce en ligne.
On a aussi tout ce qui est micro-espion dans la rue, les caméras de surveillance, la reconnaissance faciale à gogo, tout ce qui est appelé le capitalisme de surveillance qui sera développé, à priori, dans la présentation d’après.
Quand on a tous ces matériels avec de l’informatique dedans, on est quand même en droit de se poser la question qu’est-ce qui tourne, qu’est-ce qui est exécuté, qu’est-ce qui est récolté, qu’est-ce qui est fait de ces données, etc. ?
Selon un sondage réalisé en 2018 auprès de 1200 professionnels de l’informatique, plus de 9 applications sur 10 contiennent des fragments de programmes qui sont issus du monde du Libre.
Ici on a un sondage, on a des statistiques. On voit que 80 % des entreprises utilisent des logiciels libres. En France on voit que 10 % du marché global de l’informatique c’est du Libre. Bref ! On a partout du Libre, on en a plein, et pourtant on ne sait pas forcément trop ce qu’il en est.
Pour finir, en France toujours, l’ANSSI, L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information a été créée en 2009. Son rôle est de « faciliter une prise en compte coordonnée ambitieuse et volontariste des questions de cybersécurité en France pour préserver notre souveraineté, notre autonomie de décision et l’action dans les domaines politique, diplomatique et militaires et de protéger l’ensemble de nos infrastructures critiques ». L’ANSSI recommande l’utilisation des FLOSS, non seulement elle le recommande, mais elle fournit également une liste de logiciels. Ici j’ai mis le lien vers le Socle interministériel des logiciels libre qui est la liste des logiciels qui sont recommandés par les services de l’État.
Dans tout ça on parle de logiciel libre, on parle d’open source donc qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce qu’il en est ?
Avant d’aller plus loin, je mets quelques références ici. Je vous conseillerais vivement de regarder le documentaire La bataille du Libre de Philippe Borrel et Disparaître - Sous les radars des algorithmes. Le premier a été libéré, donc vous pouvez le trouver sur le Net. Le deuxième est actuellement visible, à disposition sur Arte jusqu’à peut-être mi-février. D’ici deux semaines le lien ne fonctionnera plus.
Au passage je remercie Angie parce que je lui ai piqué pas mal de slides pour faire cette présentation.

Dans un premier temps je vais parler historique, les propriétés du logiciel libre et des licences. Ensuite je parlerai d’utilisation des logiciels, d’initiatives et de communautés. Enfin je terminerai en discutant un petit peu de l’évolution et voir si jamais il n’y aurait pas quelques problèmes qui se profilent par rapport à la façon dont ça se passe actuellement, en conclusion assez brève.

Le début

Au début, ça se passe en 1970, les vendeurs d’ordinateurs et les éditeurs de logiciels commencent à facturer à leurs clients les licences des programmes. Ils imposent des restrictions légales sur les nouveaux développements de logiciels au moyen de droits d’auteur, de marques déposées, de contrats de leasing. Avant le code source des logiciels était fourni, ce qui était réellement vendu, en fait, c’était vraiment le matériel.
Richard Stallman, qui travaille au MIT, se voit refuser l’accès au code source du logiciel de l’imprimante qu’il voulait modifier pour pouvoir avoir, on va dire, du monitoring sur le bon fonctionnement de l’imprimante, en l’occurrence si jamais l’imprimante faisait du bourrage, c’est une opération qu’il avait déjà faite quelques années auparavant. Comme il se voit refuser l’accès, c’est le début d’un combat qui prend place. C’est le point de départ de la culture du Libre.
Concrètement, entre 1983 et 1985, il y a la création de la Free Software Foundation et du projet GNU. On va voir une licence de logiciel libre qui apparaît, la GNU GPL, qui a été amendée et qui existe maintenant en GPL 2, GPL 3. On va en parler un petit peu par la suite.

Logiciel libre

Concrètement le logiciel libre, d’après Stallman et il le dit en français, puisqu’il parle français : « Je peux définir le logiciel libre en trois mots liberté, égalité, fraternité. »
La liberté parce que vous faites ce que vous voulez avec le programme et pas ce que le développeur a décidé pour vous.
L’égalité car chacun possède les mêmes libertés face au logiciel, le développeur n’est pas tout puissant. Et enfin la fraternité car le logiciel libre encourage la collaboration entre les utilisateurs. On a une possibilité d’échanger et de partager.
On voit ici les propriétés du logiciel libre qui apparaissent.
Le logiciel libre est en opposition au logiciel propriétaire qui est un logiciel privateur par défaut, dont le pouvoir appartient aux développeurs et aux décideurs, c‘est-à-dire qu’il y a une centralisation du pouvoir, c’est anti-démocratique, c’est non émancipateur, au contraire même, donc ça crée une injustice. Il y a un potentiel de contrôle des utilisateurs qui sont vus comme des consommateurs.
On a ici les quatre libertés que le logiciel libre permet d’assurer qui sont la liberté d’utiliser le logiciel libre, de l’étudier, de le distribuer et de l’améliorer.
Concrètement la liberté d’utiliser ça va être pour quelque usage que ce soit et pas juste pour la fonctionnalité qui est pensée à la base.
La deuxième liberté c’est la liberté d’étudier le programme. Vous comprendrez qu’en tant qu’enseignant-chercheur c’est quelque chose qui est incroyable puisqu’on en a besoin, on en est très dépendant pour les cours, pour les étudiants, pour les enseignants-chercheurs eux-mêmes puisqu’ils vont apprendre d’autres compétences qu’ils vont pouvoir éventuellement signer par la suite. D’un point de vue recherche l’accès au code source va permettre tout simplement de reproduire des expériences, c’est le thème sexy, le thème à la mode en ce moment, la reproduction des expériences et l’accès aux données.
La liberté 3 c’est la liberté de créer, de redistribuer des copies. Par rapport à un logiciel propriétaire que vous avez à priori acheté et que vous n’avez pas le droit de copier et de donner,, pour le logiciel libre c’est, par contre, l’inverse. En fait vous avez non seulement le droit de le créer et de le redistribuer, mais c’est même encouragé. C’est-à-dire que quand vous avez un logiciel libre, on vous demande même d’en parler autour de vous et justement de prêcher cette bonne parole.
La liberté 4 enfin, c’est la liberté d’améliorer le programme, de l’adapter aux usages, ça va être ajouter des fonctionnalités, etc. Vous êtes libre de garder ces améliorations pour vous, en privé, sinon vous pouvez en faire profiter toute la communauté ce qui est bien mieux naturellement.

La différence entre logiciel et open source c’est surtout une différence de philosophie. Le logiciel libre insiste davantage sur le concept de liberté au sens philosophique et socio-politique, il y a toute une vision sociétale qui est derrière.
Le logiciel open source se concentre beaucoup plus sur les aspects techniques et pratiques. C’est tout ce qui est l’intérêt, l’intérêt immédiat dont on peut profiter, dont on peut bénéficier par le développement ouvert et collectif.

Libre ne veut pas dire gratuit. Ici j’ai mis un exemple, Qt. Qt est une bibliothèque développée à la base par Trolltech, une bibliothèque qui est utilisée pour gérer des fenêtres, elle fournit de nombreux ???. Si jamais vous êtes quelqu’un qui va travailler, que vous souhaitez utiliser cette bibliothèque pour développer un logiciel qui va être propriétaire, qui va priver les autres d’améliorations possibles, il y a des licences qui sont mises en place. C’est valable pour les enseignants, mais c’est valable également pour celui qui va utiliser cette bibliothèque pour un logiciel libre, la licence sera, en fait, une licence libre qui pourra s’appliquer. Qt dispose de deux licences en fonction de l’utilité qui est faite de ses programmes.
On voit ici un autre exemple que j’ai pris d’Angie qui est non pas du logiciel mais de la musique libre. On voit ici, en vert, qu’on peut acheter l’album numérique et que le prix est laissé au choix de la personne. Chacun fait en fonction de ses besoins.

Modèle économique du logiciel libre

Il y a un modèle économique du Libre.
Ça fonctionne généralement par la vente de logiciels qui sont proposés comme des services, c’est du Software as a Service.
On va avoir la vente de services de compilation, d’empaquetage.
On peut avoir la vente de prestations de conseil.
On peut avoir la vente de formations sur l’utilisation d’un logiciel en particulier, certains logiciels sont particulièrement costauds et demandent énormément de configuration, ils demandent beaucoup d’expertise, voire de pratique, d’empirisme, donc les formations sont une source de revenus.
Il va y avoir également la vente de support technique, ça peut être pour la correction de bugs, c’est-à-dire que c’est pour faire passer telle ou telle erreur de fonctionnalité en priorité par rapport à d’autres parce que, par exemple, votre propre projet en dépend.
Ça peut être la demande de nouvelles fonctionnalités ou l’utilisation de modules payants, ce qui était utilisé notamment par ownCloud.
On va avoir également la possibilité d’abonnements pour avoir accès à des ressources partagées par la communauté. C’est le cas de Blender qui est un logiciel de construction 3D, j’en parlerai un petit peu par la suite.
Il peut y avoir la vente de marchandises, tout ce qui est goodies, mugs, tee-shirts, etc.
On va avoir enfin des subventions, des bourses, des fonds privés et l’appel aux dons qui est le moyen de fonctionnement de beaucoup de personnes. On verra que ça ne suffit pas forcément.

Intérêt des logiciels libres

L’intérêt des logiciels libres, vous l’avez compris, on ne dépend d’un seul fournisseur ;
les formats utilisés sont majoritairement des standards ouverts qui favorisent l’interopérabilité ;
il est possible d’adapter un logiciel pour des besoins spécifiques ;
on profite des contributions de la communauté ;
on peut même contribuer soi-même que ce soit sur de la traduction, de la correction orthographe/grammaire ; si on est un petit plus doué en informatique ça va être l’amélioration de code ;
le logiciel offre potentiellement plus de sécurité, il y a moins de pistage. Ce n’est pas le seul truc ;
le code est public, plusieurs sources vont pouvoir regarder dedans, regarder comment c’est codé, proposer des améliorations ;
ça coûte moins cher d’un point de vue économique et environnemental et c’est tellement vrai que beaucoup d’entreprises achètent par exemple des vieux serveurs pour pouvoir faire tourner dessus typiquement du GNU/Linux, des logiciels libres. Ça permet de pouvoir utiliser des machines qui ne sont pas récentes et ça fonctionne bien ;
on n’est pas victime de l’obsolescence programmée, même tout simplement de l’obsolescence de certaines ressources.

Exemples de logiciels libres : GNU

Parmi les exemples de logiciels libres dont vous avez peut-être entendu parler, il y a ce qu’on appelle le GNU. GNU est un jeu de mots d’informaticien, c’est GNU is Not Unix-, on a une récursivité dans le nom, finalement ce n’est jamais réellement défini.
GNU est un projet de système d’exploitation qui a été initié en 1983. L’idée de ce projet vient de Richard Stallman, la Free Software Foundation est venue derrière.
L’idée de ce système d’exploitation c’est d’avoir un système s’exploitation compatible Unix, qui répond à certaines normes, je ne vais pas trop rentrer dans les détails, qui est composé d’une suite logicielle libre, ça veut dire vraiment de nombreux logiciels. On va avoir des éditeurs, on va avoir des compilateurs qui sont d’ailleurs encore utilisés actuellement, pour ceux qui connaissent il y a GCC, G++ par exemple, et un noyau qui s’appelle le Hurd, qui est initié beaucoup plus tard, en 1990.
On va avoir également le noyau Linux, donc vous avez entendu parler au moins parce que j’en ai parlé il y a trois minutes. Le noyau Linux c’est un projet d’étudiant. À l’époque Linus Torvalds était en bac + 2 et il s’intéressait aux systèmes d’exploitation. Il écrit un petit système à côté et il le met accessible en libre téléchargement sur le Net avec la licence GPL. À son grand étonnement beaucoup de personnes sont intéressées par son projet, vont même lui proposer des améliorations, des corrections, des portions complètes de code. Au fur et à mesure de plus en plus de développeurs participent et les modifications finales sont supervisées par Linus Torvalds.
Depuis beaucoup de temps est passé, beaucoup de choses ont été développées. Linux tourne sur de très nombreuses architectures et dispose de très nombreux drivers.
Au passage, quand vous installez quelque chose par exemple sur Microsoft, un driver sur Microsoft, il faut rebooter la machine, leurs tentatives de remédier à ça a été Vista. Quand je parle de Vista avec mes étudiants généralement ça les fait rire, rire un peu jaune parce que visiblement beaucoup d’entre eux ont été impactés par la mauvaise fonctionnalité du système.
Quand on ajoute un driver dans Linux ça se fait de façon complètement transparente, il n’y aucune perturbation sur le système, c’est juste magique.
Linux est maintenant hébergé par la Fondation Linux, ce n’est plus un projet d’étudiant, naturellement.
Il faut savoir que le système d’exploitation Linux est le système d’exploitation qui tourne sur 100 % des supers computers actuellement sur la planète.

Quand on merge GNU et Linux on obtient les fameuses distributions GNU/Linux. Une distribution GNU/Linux qu’est-ce que c’est ? Ça réunit une base logicielle et un noyau. L’objectif de la distribution c’est de faciliter l’installation, la maintenance des logiciels, ça va fournir des paquets. Quand vous voulez installer quelque chose sur la machine, vous n’allez pas chercher des choses par vous-même avec Firefox, vous avez directement la petite centrale, un petit programme à l’intérieur de votre machine et vous dites « je voudrais ça, je voudrais ça », avec naturellement des fonctionnalités de recherche parmi les packages pour avoir ce que vous voulez installer ou ce qui pourrait vous intéresser.
Finalement un package qu’est-ce que c’est ? C’est ni plus ni moins qu’en ensemble d’exécutables, de scripts, de la documentation, éventuellement des bibliothèques qui sont installées sur la machine et qui font que tout fonctionne parfaitement.
Il y a de très nombreuses distributions. J’ai mis sur la droite un schéma que vous pouvez retrouver sur Wikipédia, qui vous donne la base-line, l’historique des distributions GNU/Linux. Vous voyez que ça fait plein de ramifications au fur et à mesure qu’on va sur la droite. C’est ce qu’on appelle des forks, des projets qui sont nés en prenant ce qui est fait dans un autre projet à un instant donné et après le nouveau projet va vivre sa vie en parallèle des autres. Je ne suis même pas sûr, si jamais je mettais cette frise-là sur l’ensemble de mes transparents, que j’aie assez de transparents alors que pourtant j’en ai un petit peu trop aujourd’hui.
Si vous voulez vous initier au logiciel libre, je vous conseille de commencer par une distribution qui s’appelle Kubuntu ou Linux Mint ; Linux Mint c’est bien pour débuter.

Au-delà des FLOSS, la culture du Libre

Je vais aller très rapidement.
Au-delà du logiciel on a la culture du Libre. La culture du Libre c’est tout ce qui est biens communs. Une communauté va émettre des règles pour pouvoir gérer des ressources, l’objectif étant d’avoir plus de personnes qui s’impliquent, que ça intéresse de plus en plus de personnes.
Parmi les exemples, on a Wikipédia, on a OpenStreetMap. OpenStreetMap est fantastique. Vous pouvez télécharger l’ensemble de Wikipédia. À l’époque, quand j’avais regardé, c’était moins de 20 gigas. Vous pouviez mettre ça sur la carte SD de votre téléphone. Vous pouviez, comme ça, consulter les articles de Wikipédia sans même être connecté sur le Net, c’est fantastique.
On a des choses qui vont un petit plus loin. On a Dogmazic pour la musique libre, Open Food Facts pour tout ce qui est la composition des aliments. C’est une initiative absolument géniale.
Kokopelli est une initiative open source pour tout ce qui est semences. Le combat contre les semenciers puisqu’en fait il y a une privatisation des semences qui appartiennent normalement à la culture, qui appartiennent au bien commun.

Du droit d’auteur aux licences libres

J’ai parlé de logiciels libres. Plusieurs licences qui vont être possibles. Quand on a d’autres objets, de la musique ou même des graines, les licences qui sont propres aux logiciels libres ne vont pas forcément s’appliquer. Il va y avoir d’autres licences qui se sont inspirées de la licence GPL.

Pourquoi des licences ? On a un droit d’auteur qui est du copyright avec du « Tous droits réservés », il va y avoir toute une législation derrière avec des demandes, des autorisations, etc. Les licences libres vont, au contraire, permettre à priori tout ce que vous allez faire, par contre vous allez mettre certains droits réservés derrière, avec certains logos que vous verrez sur la première page du diaporama d’Angie tout à l’heure.
Ce qui m’intéresse ici c’est la partie copyleft..
On va avoir en fait un copyleft fort : tous les dérivés d’un projet ne peuvent garder que la licence initiale libre, il ne peut pas y avoir de modifications, alors qu’avec le copyleft standard on va avoir la possibilité d’ajouter des fonctionnalités sous d’autres licences, éventuellement propriétaires. On va voir que la copyleft peut créer justement un problème. On verra ça dans la conclusion.

Ceci est un petit tableau sur l’ensemble des licences libres qui sont disponibles.

Utilisations des logiciels libres, initiatives et communautés

Je vais présenter des initiatives.
En 2011 l’État français se munit d’une Direction interministérielle des systèmes d’information et de communication. Il y a des fusions,etc. Ce qui est intéressant, c’est l’émission d’un référentiel général d’interopérabilité. C’est un cadre de « recommandations qui référence des normes et des standards qui favorisent des normes d’interopérabilité au sein des systèmes d’information de l’administration. » Le standard par défaut c’est le standard utilisé par défaut par LibreOffice, tout simplement.

Les logiciels libres sont utilisés dans l’administration. Les valeurs du Libre rejoignent, dans une large mesure, celles du service public : travail communautaire, service de l’intérêt général, transparence, juste prix. Le système des licences propriétaires met les administrations dans une situation de client captif.
Concrètement il y a une philosophie non mercantile qui veut que le profit n’est pas la première des motivations. C’est basé sur le partage et le travail en communauté. Ici le DSI de la commune de Fontaines.
Par contre ça peut demander un certain travail pour basculer du monde propriétaire vers le monde du Libre. Il y a un travail qui peut être technique, mais ce n’est pas forcément ça. C’est que toute modification d’habitudes comportementales nécessite un travail et tout au début on trouvera toujours que c’est moins bien.

En 2004, par exemple, il y a eu migration de la Gendarmerie vers des solutions libres. Ils sont passés sur le système d’exploitation Ubuntu et ils utilisaient, derrière, Firefox pour la navigation sur le Net, Thunderbird comme client mail, etc.

On va avoir des initiatives qui sont récentes.
On va avoir le Plan d’action logiciels libres et communs numériques en avril 2021. L’objectif de ce plan c’est « de mieux connaître et d’utiliser les logiciels libres et les communs numériques dans l’administration, de développer et d’accompagner la libération et l’ouverture de ses codes sources et de s’appuyer sur ses logiciels libres et open source pour renforcer l’attractivité de l’État-employeur auprès des talents numériques, notamment en valorisant les contributions publiques aux projets et communautés concernés ». C’est tout un programme.
D’autres choses existent : « Ouvrir la science » donc « agir pour une recherche scientifique ouverte et partagée ».
Il y a plusieurs d’expertise. L’un des groupes d’expertise s’appelle « Logiciels libres et open source ». Ils écrivent que « le logiciel libre est devenu aujourd’hui indispensable dans tous les domaines de la recherche scientifique, à la fois comme outil pour la recherche, comme produit de la recherche et comme objet de la recherche ». D’ailleurs, en cours de création, il y a un collège « Codes sources et logiciels » qui a vocation de pérenniser et élargir les missions du groupe d’expertise« Logiciels libres et open source ».
En parallèle, toujours dans « Ouvrir la science », il y a tout un travail qui concerne la publication de la production scientifique en France. L’objectif c’est de fournir l’ensemble de la production scientifique d’ici 2030 en libre accès, par exemple sur une plateforme comme Hal, qui est mise en place par l’Inria.
Il y a toute une ouverture qui se fait sur les données, sur le code source.

Ici quelque chose qui a démarré en 2016, Software Heritage, une volonté de l’Unesco et de l’Inria de préserver le patrimoine logiciel. Ça nécessite « de collecter, de préserver et de partager tous les logiciels disponibles publiquement sous forme de code source ». Ça veut dire non seulement le code source lui-même mais également l’évolution du code source, puisque certains choix de direction peuvent changer complètement des fonctionnalités et il peut y avoir une perte de compatibilité des nouvelles versions par rapport aux anciennes, généralement elles sont assumées mais l’idée c’est vraiment de conserver le patrimoine. Si vous allez sur cette page aujourd’hui vous allez voir qu’il y a actuellement 11 millions de projets qui ont été soumis, ça représente 12 milliards de fichiers, c’est énorme !

Au niveau européen plusieurs choses existent.
Joinup est une plateforme pour réutiliser des solutions au niveau européen. C’est une évolution de quelque chose qui existait déjà depuis 2004/2006, je crois, qui a évolué il y a quelques années.
On trouve également des actualités assez intéressantes. Par exemple, en 2021, la Commission européenne formalise ses intentions et ses pratiques « sur l’octroi des licences open source et la réutilisation des logiciels de la Commission ». C’est un document important puisqu’il engage la Commission, donc ça lui est opposable du point de vue légal.
On a également la DINUM qui s’est exprimée et qui a organisé il n’y a pas longtemps, un concours de pitchs, de projets numériques de services publics numériques en majorité open source, de 11 pays, en vue de réplicabilité.
Il y a toutes ces initiatives.

Il y a du Libre également dans les entreprises.
On va avoir le CNLL, qui est l’Union des entreprises du logiciel libre et du numérique ouvert.
On va avoir PLOSS-RA. Ce sont nos interlocuteurs, nos partenaires dans l’organisation du Campus du Libre. Nous sommes quelques universitaires de Lyon 1, de l’Insa, de Lyon 2 à le mettre en place. On espère que d’autres personnes, éventuellement d’autres instituts, qui vont venir nous aider. PLOSS-RA vient et organise le village associatif des entreprises du Libre.

On va avoir le Libre dans l’enseignement. Je suis obligé d’en parler, forcément. Comme je vous l’ai dit tout à l’heure on est très demandeur, par contre il ne faut pas penser que les enseignants-chercheurs sont forcément tous supporters du logiciel libre, bizarrement c’est assez étonnant. Par contre si on utilise des outils externes, ce sont les outils publics, on va avoir des outils internes qui ont été publiés, qui ont été développés en interne. On a par exemple Tomuss qui est utilisé, qui est devenu une application métier et Quenlig qui est super intéressant pour les étudiants puisque ça leur permet de travailler en complète autonomie.
Il y a des formations. L’un des collègues de Lyon 2 est justement responsable des licences professionnelles métiers de la communication en lien avec le Libre. Ici, pour les trucs personnels, je vous ai mis des exemples. Je les ai mis exprès pour que vous puissiez regarder et découvrir des choses par vous-même si jamais vous le souhaitez.

Évolution et problèmes

Je vais terminer sur l’évolution et les problèmes.

Pour conclure, est-ce qu’il faut s’inquiéter de certaines choses ?
Par exemple on a des logiciels qui sont achetés par des grands groupes.
CUPS, qui est un gestionnaire d’impression, a été racheté par Apple en 2007.
GitHub, qui est une plateforme de développement collaborative, rachetée par Microsoft en 2018 pour 7,5 milliards de dollars, c’est monstrueux.
Audacity a été racheté par Muse Group en 2021.
Quelle direction peut justifier de tels achats ?
Certaines choses peuvent aller dans le sens. Par contre, clairement, on peut aussi avoir peur parce que c’est forcément toute une communauté qui est prise en otage.

Pour finir, un article très intéressant que je vous conseille de lire dans le dernier Monde diplomatique de janvier, ça tombait bien, qui s’intitule « Le pillage de la communauté des logiciels libres ». Ils écrivent qu’ils estiment que depuis le début du logiciel libre l’écosystème a été coopté et trahi par les mastodontes de l’industrie. Typiquement les grands groupes ne jouent pas le jeu de payer des services, de rétribuer les personnes. Ça a été vrai notamment avec des failles de sécurité dans des logiciels qui sont cruciaux au centre de beaucoup d’applications, qui sont maintenus seulement par un ou deux contributeurs et sur leur temps libre. Il faudrait quand même se poser la question de la reconnaissance des contributions.
Angie je suis désolé, j’ai été beaucoup trop long.

Présentation de Angie Gaudion

Angie Gaudion : </>Aucun souci,