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Version du 6 décembre 2012 à 07:22
Cette page présente une proposition de l'April en cours de réalisation.
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Les Propositions de l'April
1. Mettre un terme à la subvention de logiciels privateurs afin d'améliorer l'accessibilité pour tous
Actuellement, les subventions publiques pour le développement de technologies d'assistance aux personnes handicapées sont principalement destinées à des logiciels privateurs. De ce fait, les personnes handicapées sont largement contraintes d'utiliser ces solutions. Il s'agit d'une entrave à la concurrence qui pénalise l'utilisateur : il n'a pas le choix du produit ;et la personne publique qui met à disposition ces solutions : ces logiciels sont souvent onéreux car les entreprises qui les développent ont un quasi-monopole. Il est nécessaire de mettre un terme à cette pratique injuste et de rééquilibrer le financement des offres logiciels en la matière.
Mettre en place un financement public via les Maisons départementales de personnes handicapées (MDPH) de technologies d'assistance libres et de mises à jour d'outils libres afin de fournir une alternative à certains logiciels et permettre l'émergence d'une concurrence.
Remédier au manque d'informations concernant les solutions libres alternatives aux technologies d'assistance privatrices tant auprès des collectivités que des utilisateurs.
Définir au niveau national une politique de financement des aides aux personnes handicapées pour économiser l'argent public et favoriser l'accessibilité pour tous. Cette politique doit encourager le déploiement de technologies d'assistance libre.
2. Interdire la condamnation pour atteinte au droit d'auteur de propriétaires de sites web
L'article L 222-5 7°du Code de la propriété intellectuelle établit une exception au droit d'auteur afin de procéder à des reproductions et des représentations d'oeuvres pour en permettre l'accès à des personnes handicapées. Or il est prévu que seuls des organismes « habilités conjointement par le ministre chargé de la culture et le ministre chargé chargé des personnes handicapées » peuvent procéder aux modifications. Ces contraintes rendent la mise en accessibilité de contenus web peu aisée et ce au détriment des personnes handicapées alors même que l'exception au droit d'auteur a été conçue pour leurs besoins. Des mesures doivent être prises.
Ouvrir l'exception au droit d'auteur en faveur des personnes handicapées à des entreprises privées sans agrément préalable de la part d'administrations afin qu'elles ne puissent être poursuivies pour atteinte au droit d'auteur lorsqu'elles souhaitent rendre des œuvres accessibles aux personnes handicapées.
3. Imposer une obligation d'accessibilité au secteur privé
Les progrès en termes d'accessibilité sont impulsés par des lois qui permettent une réelle prise de conscience chez les acteurs concernés. Ainsi à titre d'exemple, la loi du 11 février 2005 impose au secteur public de rendre leur communication en ligne accessible aux personnes handicapées. Cette loi a largement contribué à accroître les efforts du secteur public pour développer l'accessibilité de
leurs services. Cependant les textes doivent aller plus loin pour généraliser cette démarche.
Créer une nouvelle disposition faisant de l'accessibilité numérique une obligation pour le secteur privé.
4. Faciliter et améliorer la diffusion du référentiel général d'accessibilité pour les administrations
Il existe aujourd'hui un Référentiel général d'accessibilité pour les administrations (RGAA) visant à permettre aux ressources numériques de l'administration d'être accessibles. Ce référentiel est un vecteur potentiel d'amélioration de l'accessibilité. Malheureusement, sa diffusion est beaucoup trop confidentielle et ce en raison d'une politique de diffusion absurde : l'utilisation commerciale du référentiel est interdite, empêchant de fait des entreprises privées de s'en saisir pour proposer des formations ; la mise à disposition d'un lien renvoyant au référentiel est soumise à l'autorisation du webmestre de la DGME ajoutant ainsi une lourdeur administrative nocive à l'utilisation généralisée du RGAA.
Autoriser l'utilisation commerciale du RGAA afin de permettre à des entreprises privés de proposer des formations en la matière en se servant du référentiel comme support.
Supprimer l'obligation d'écrire un message électronique au webmestre du site de la DGME pour pouvoir mettre à disposition un lien renvoyant au référentiel général d'accessibilité pour les administrations entrave inutilement sa diffusions.
Le RGAA doit être mis à jour régulièrement afin de permettre son application en conformité avec les évolutions technologiques et la référence internationale elle-même mouvante.
Développements
L'accessibilité est la possibilité offerte à toute personne, quels que soient ses moyens, ses outils et sa situation, d'accéder à un contenu ou à une structure. En matière d'informatique, l'accessibilité est entravée par de nombreuses pratiques que seule une volonté politique claire peut remettre en cause, soutenue par une exemplarité des pratiques des décideurs eux-mêmes. L'accessibilité numérique consiste à rendre l'outil informatique accessible à tous, quel que soit le mode d'utilisation (souris, clavier, technologies d'assistance, tablette, smartphone...). Ainsi, bien que l'accessibilité soit d'abord une nécessité pour les personnes en situation de handicap, elle s'adresse à tous. Avec le développement du numérique et la dématérialisation des contenus et services, l'accessibilité devrait être une préoccupation majeure pour permettre à tous les citoyens de profiter de ces services. Or, ce qui devrait être une source de facilitation des démarches et d'inclusion constitue une source supplémentaire de discrimination.
Subvention publique de logiciels privateurs au détriment de l'accessibilité pour tous
Les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), sous la responsabilité du conseil général, financent prioritairement des solutions commerciales privatrices. Or, leurs prix les conduisent à sélectionner les demandes en fonction de leurs contraintes budgétaires, ce qui aboutit de plus en plus souvent à des délais d'attente pouvant dépasser un an. Un tel délai est peu propice à l'embauche d'une personne handicapée et à l'acceptation de son handicap, ainsi qu'à sa réinsertion sociale. Cette situation résulte d'un déficit d'informations des décideurs, notamment des membres des Commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Cette situation n'en reste pas moins incompatible avec le droit de la concurrence, les engagements européens de la France, l'objectif d'efficience des budgets publics (qui financent à haut prix des solutions non pérennes et coûteuses, à renouveler régulièrement pour remplir leur tâche), l'innovation et l'amélioration de la concrétisation de l'accessibilité.
En France, ce sont les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), sous la responsabilité des conseils généraux, qui décident des aides allouées aux personnes en situation de handicap, finançant notamment l'acquisition et la formation aux technologies d'assistance. Ces technologies d'assistance peuvent être du matériel ou des logiciels rendant l'utilisation de l'ordinateur possible par les personnes handicapées en venant compenser leur handicap en le suppléant. Ainsi, il peut s'agir par exemple d'un pointeur laser permettant d'utiliser son ordinateur sans les mains, d'un logiciel de lecture d'écran qui va restituer vocalement ou avec une plage Braille le contenu visuel de ce qui s'affiche pour les personnes aveugles ou malvoyantes...
Ce financement public oriente donc le choix des utilisateurs en situation de handicap, organisant un quasi-monopole de certains éditeurs de logiciels qui en profitent pour vendre leurs produits à des prix prohibitifs que peu de gens pourraient acquérir sans l'aide de la collectivité. Or, des technologies d'assistance libres existent mais sont souvent méconnues, et rares sont les financements de formations pour du logiciel libre par les MDPH. Par ailleurs, avec ce système, l'aide publique ne couvre souvent que l'acquisition du matériel ou du logiciel, pas l'achat des mises à jour également onéreuses alors que l'informatique, et Internet en particulier, évolue très vite.
Cette situation pose plusieurs problèmes :
- Concurrence faussée, et donc absence de liberté de choix pour l'utilisateur, en raison du monopole organisé par les aides publiques : par le financement ainsi accordé pour une solution unique, alors que d'autres gratuites existent et sont utilisables moyennant le paiement du service de formation et d'installation, la France pratique des aides d'État injustifiées, ce qu'interdit l'article 106 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Elle pourrait être, à ce titre, condamnée par la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE).
- Un coût extrêmement élevé pour la collectivité du fait du monopole, sans justification technique à cela : il s'agit d'un abus de position dominante, interdit par le droit de l'Union européenne (article 102 du TFUE). La France pourrait donc faire l'objet d'une condamnation par la CJUE.
- Utilisateurs contraints d'utiliser le logiciel pour lequel ils ont été formés, mais incapables de se payer les mises à jour nécessaires à une utilisation moderne de l'informatique tant les prix sont élevés ;
- Utilisateurs enfermés dans une certaine utilisation de l'informatique totalement contrôlée par des entreprises privées qui, en ne diffusant pas le code source de leurs logiciels, empêchent une interopérabilité optimale garante d'une accessibilité réelle pour tous.
Accessibilité et droit d'auteur
Pour permettre à toute personne d'accéder à des contenus, il peut être nécessaire d'y adjoindre une adaptation : transcription braille, sous-titrage, etc. Or, ces pratiques sont considérées comme des modifications de l’œuvre et s'opposent au droit d'auteur. Le droit d'auteur vient donc s'opposer à l'obligation d'accessibilité des documents publics prévue par la loi du 11 février 2005. Elle contraint des associations à privilégier un aspect de la loi en se plaçant en illégalité par rapport à d'autres dispositions. Ce paradoxe pourrait être dépassé par une adaptation de la législation.
L'article 47 de la loi 2005-102 du 11 février 20051 impose au secteur public de rendre leur communication en ligne accessible aux personnes handicapées. Or, il existe aujourd'hui un conflit entre cette obligation d'accessibilité d'une part, renforcée par l'article 225-2 du Code pénal2 définissant la discrimination lorsque est refusée la fourniture d'un bien ou d'un service, et le droit d'auteur d'autre part, qui interdit la modification d'une œuvre protégée en dehors de l'exception au droit d'auteur en faveur des personnes handicapées3 qui indique que seuls des organismes « habilités conjointement par le ministre chargé de la culture et le ministre chargé des personnes handicapées » peuvent faire des transcriptions, et seulement « en vue d'une consultation strictement personnelle par les personnes atteintes d'un handicap ».
La mise en accessibilité de contenus web suppose de modifier le code source, lui-même propriété de la société qui a développé le site en dehors de dispositions contractuelles contraires4, de modifier éventuellement les contrastes de couleurs, propriété du graphiste, de transcrire – et sous-titrer pour les vidéos – les médias sonores... Or, il est matériellement impossible de demander à un nombre restreint d'organismes agréés, qui ne seraient sans doute pas compétents pour traiter la question du code, de faire ces modifications.
Ainsi, un propriétaire de site web qui aurait la volonté de rendre ses contenus accessibles se trouverait confronté à une insécurité juridique puisque tiraillé entre son obligation de mise en accessibilité, et son interdiction de modifier un contenu dont il n'a pas les droits pour le rendre accessible.
Accessibilité numérique, une volonté politique
Les aménagements législatifs, réglementaires et la sensibilisation des acteurs publics et privés à l'accessibilité passent par une volonté politique claire. L'exemple de la loi du 11 février 2005 le montre : l'effort d'accessibilité et la prise de conscience se sont accrus, notamment du fait de l'imposition de délais de mise aux normes des structures et des infrastructures. Donc la situation actuelle n'est pas une fatalité mais relève d'une orientation politique. Or, la France est très en retard dans ce domaine.
Aujourd'hui, le numérique et le Web vont bien au-delà d'un ordinateur : télévision connectée, smartphone, tablette tactile... Quel que soit le support, la question de l'accessibilité reste essentielle et rarement abordée.
Une étude commandée par la Commission européenne pour mesurer les progrès de l'accessibilité numérique en Europe (2006-2008)5 montre à la fois le grand retard des pays européens en matière d'accessibilité numérique, mais également le lien qui existe entre les lois adoptées et les progrès de la prise en compte de l'accessibilité. La loi agit donc comme un outil de sensibilisation.
La signature, le 8 octobre 2010, du Twenty-First Century Communications and Video Accessibility Act of 20106 par l'administration Obama est à l'origine de la première conférence des opérateurs de téléphonie mobile à Washington, appelée M-Enabling Summit, pour prendre en compte l'accessibilité7.
Cela prouve une fois de plus qu'une volonté politique forte peut faire progresser l'accessibilité.
La France est très en retard dans ce domaine. L'article 47 de la loi du 11 février 20058 ne s'adresse qu'au secteur public, il ne vise pour l'instant que l'accessibilité des contenus web, aucun moyen n'est donné pour le contrôle de son application, rien n'est prévu pour mettre à jour le Référentiel général d'accessibilité pour les administrations (RGAA)9, et aucune politique de sensibilisation n'a été entreprise, alors que le délai de mise en conformité était arrêté à mai 2011 pour les services de communication publique en ligne de l'État et des établissements publics qui en dépendent, et que ce même délai est fixé à mai 2012 pour les collectivités territoriales et les établissements publics qui en dépendent.
Or, depuis la publication de la loi en février 2005, les progrès en matière d'accessibilité du Web sont extrêmement minimes, une large méconnaissance de ce qu'est l'accessibilité numérique et des obligations des administrations et collectivités restant la norme. Et malgré le non respect de la loi, aucune solution n'a été apportée, pas même la mise en œuvre de la sanction prévoyant la publication d'une « liste de services de communication publique en ligne non conformes publiée par voie électronique par le ministre chargé des personnes handicapées passé six mois après mise en demeure »10.
Référentiel général d'accessibilité pour les administrations (RGAA)
Le Référentiel général d'accessibilité pour les administrations (RGAA) vise à permettre aux ressources numériques de l'administration d'être accessibles. Il peut placer l'administration en exemple pour les acteurs privés. Mais il est encadré par un régime juridique qui limite sa diffusion: obligation d'en informer les webmasters, utilisation non commerciale (ce qui inclut une très grande variété de situations apparemment anodines)... La solution à ce problème passe par un aménagement du régime encadrant ce document afin de l'ouvrir pour que ses ressources deviennent une référence pour tous.
Le décret 2009-546 du 14 mai 200911 décrit l'obligation de recourir à un référentiel pour vérifier l'accessibilité numérique aux personnes handicapées. Ce référentiel a été défini dans l'arrêté ministériel du 20 octobre 2009 relatif au référentiel général d'accessibilité pour les administrations (RGAA)12.
Alors que l'article 6 du décret13 demande aux administrations d'inclure « dans le contenu de la formation continue de leurs personnels intervenant sur les services de communication publique en ligne un enseignement théorique et pratique sur l'accessibilité des services de communication publique en ligne aux personnes handicapées et sur la conformité aux règles et standards nationaux et internationaux en cette matière », deux problèmes se posent pour permettre une diffusion massive du RGAA.
Conditions d'utilisation : interdiction d'un usage commercial
Alors que le RGAA est imposé par décret, il est indiqué dans le même temps une utilisation restrictive dans les conditions d'utilisation : « La reproduction de contenus figurant sur ce site est autorisée pour un usage non commercial à condition d'en indiquer la source »14. Il est ainsi interdit de faire un usage commercial de ce document, alors qu'il est dans le même temps demandé aux agents de se former. Or, les centres de formation professionnelle capables de dispenser cette formation ne devraient pas distribuer le RGAA si elle le font de le cadre d'une formation elle-même payante. De même, une association qui aurait fait un document imprimé du RGAA et qui souhaiterait le vendre dans le cadre d'une manifestation de sensibilisation n'en aurait pas le droit. Il est par ailleurs demandé d' « informer par courriel d'une éventuelle reproduction ou pose de liens en écrivant au webmestre ». Ainsi, le moindre renvoi au RGAA sur un site de sensibilisation ou dans un message électronique devrait faire l'objet d'un message au webmestre. Outre l'absurdité de cette demande, cette lourdeur administrative tend encore à compliquer le partage de l'information et à dissuader les bonnes volontés.
Mise à jour du RGAA et contrôle de son application
Rendu officiel en octobre 2008, le RGAA est composé de plusieurs documents, dont une annexe technique15 répertoriant des tests censés garantir une évaluation des règles internationales d'accessibilité des contenus web16 auxquelles la loi fait référence au sein de l'article 47 de la loi du 11 février 200517. Or, alors que les règles internationales évoluent pour s'adapter aux évolutions technologiques, le RGAA est figé, rien n'ayant été prévu pour le maintenir et le mettre à jour.
Par ailleurs, les moyens nécessaires pour le contrôle du respect de la loi sont dérisoires au regard de la tâche, le nombre de sites publics étant très important.