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| '''Titre :''' T'éduc - Numérique responsable
| | Publié [https://www.librealire.org/t-educ-numerique-responsable ici] - Septembre 2022 |
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| '''Intervenant·e·s :''' Louis Derrac - Vincent Courboulay -Isabelle Chabanon-Pouget -Stéphanie Giacchi - Ludovic Fournier - Marie-Catherine Mérat
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| '''Lieu :''' En ligne
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| '''Date :''' 22 décembre 2021
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| '''Durée :''' 1 h 8 min 8
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| '''[https://www.youtube.com/watch?v=hu_vIcQfbZQ Vidéo]'''
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| '''[https://www.cite-sciences.fr/fileadmin/fileadmin_CSI/fichiers/vous-etes/enseignant/CR_Teduc_NumeriqueResponsable_27-10-2021.pdf Compte-rendu]'''
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| '''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]
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| '''Illustration :''' À prévoir
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| '''NB :''' <em>transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/>
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| Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em>
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| ==Description==
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| À la rentrée scolaire 2020, 80% des élèves du second degré et 20% des élèves du premier degré bénéficiaient d’un espace numérique de travail, indique le site du ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports. Depuis, la pandémie est passée par là et la transformation numérique de l’école, mais aussi du secteur culturel, s’est accélérée. Cours en ligne, visioconférences, expositions virtuelles... Le numérique est partout. La crise Covid a aussi fortement accéléré la stratégie de communication digitale des entreprises. Sauf que le numérique n’est pas toujours vertueux, il a des impacts, notamment environnementaux. Il générerait 2,1 à 3,9% des émissions mondiales de CO2, selon une étude parue en septembre dernier dans la revue scientifique Patterns.<br/>
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| Face à cette transformation numérique, l’Assemblée nationale a adopté le 10 juin dernier, en première lecture, la proposition de loi Reen (acronyme de « Réduire l’empreinte environnementale du numérique »), qui prévoit une formation à la sobriété numérique dès le plus jeune âge à l’école ainsi qu’à l’entrée à l’université à la rentrée 2022. Mais comment mener cet enseignement ? Comment sensibiliser les publics à l’impact environnemental du numérique, comment éduquer à des usages plus responsables ?
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| ==Transcription==
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Bonjour à tous. J’espère que vous m’entendez bien. Bienvenue pour ce nouveau T’éduc consacré au numérique responsable. Certains d’entre vous sont certainement habitués à T’éduc, ce sont des évènements, des tables rondes, des webinaires proposés en ce moment en partenariat entre la Cité des sciences, Univercience et puis le CRAP -Cahiers pédagogiques.<br/>
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| D’emblée je vous invite à poster des questions, à poster des commentaires, à faire remonter vos besoins, vos réflexions, vos expériences dans le <em>chat</em>. Vous pouvez aussi lever la main au cours du webinaire si vous avez envie d’intervenir, ce serait vraiment un plaisir d’avoir vos retours sur ce thème du numérique responsable.</p>
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| Quelques éléments de contexte pour commencer.<br/>
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| À la rentrée scolaire de 2020, 80 % des élèves du second degré et 20 % des élèves du premier degré bénéficiaient d’un espace numérique de travail, nous apprend le site du ministère de l’Éducation nationale de la Jeunesse et des Sports. Depuis la pandémie est passée par là et la transformation numérique de l’école a été fortement accélérée. Un constat qui ne s’applique pas seulement à l’école puisque le secteur culturel a aussi massivement recours au numérique aujourd’hui avec les cours en ligne, les visioconférences, les expositions virtuelles, etc. La crise covid a aussi fortement accéléré la stratégie de communication digitale des entreprises.<br/>
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| Sauf que, évidemment, le numérique n’est pas toujours vertueux, il a des impacts notamment environnementaux, il générerait 2, 1 à 3,8 % des émissions mondiales de CO<sub>2</sub> selon une étude parue en septembre dernier dans la revue scientifique <em>Patterns</em>. Face à cette transformation numérique l’Assemblée nationale a adopté le 10 juin dernier, en première lecture, la proposition de loi Reen, acronyme de « Réduire l’empreinte environnementale du numérique », qui prévoit une formation à la sobriété numérique dès le plus jeune âge, à l’école, ainsi qu’à l’entrée à l’université, à la rentrée 2022.<br/>
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| Comment mener cet enseignement ? Comment sensibiliser les publics à l’impact environnemental du numérique ? Comment éduquer à des usages plus responsables et comment inviter à la réflexion sans tomber dans le catastrophisme ?<br/>
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| Pour en discuter nous avons le plaisir d’accueillir Louis Derrac. Vous êtes consultant, formateur et enseignant, spécialisé dans l’éducation et le numérique. Vous travaillez au sein du collectif Resnumerica. Bonjour.
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| <b>Louis Derrac : </b>Bonjour.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Isabelle Chabanon-Pouget, vous êtes chargée de projets événementiels au Carrefour numérique<sup>2</sup> de la Cité des sciences et de l’industrie. Bonjour.
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| <b>Isabelle Chabanon-Pouget : </b>Bonjour.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Vincent Courboulay, vous êtes directeur scientifique à l’Institut du numérique responsable que vous avez fondé en 2018, auteur du livre <em>Vers un numérique responsable – Repensons notre dépendance aux technologies digitales</em> chez Actes Sud paru en janvier de cette année. Bienvenue.
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| <b>Vincent Courboulay : </b>Bonjour.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Stéphanie Giacchi, j’espère bien prononcer votre nom, vous êtes chargée d’accessibilité numérique chez Universcience. Bonjour et bienvenue.
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| <b>Stéphanie Giacchi : </b>Bonjour.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Et enfin Ludovic Fournier, vous êtes chargé de médiation scientifique au Palais de la découverte et vous avez coanimé une médiation à distance autour de l’impact environnemental du numérique. Bonjour.
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| <b>Ludovic Fournier : </b>Bonjour.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Pour commencer, il me semble important de prendre la mesure de l’urgence et de donner quelques chiffres. Quel est aujourd’hui l’impact environnemental du numérique et quelles sont les principales sources d’impact ? J’ai envie de commencer avec vous Vincent Courboulay.
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| <b>Vincent Courboulay : </b>Merci beaucoup de l’invitation.<br/>
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| Effectivement le fait d’envisager le numérique comme un magnifique outil, je pense que nous en sommes tous d’accord, mais voir ce qui se cache derrière la vitrine et les néons c’est quand même très intéressant aussi.</p>
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| Vous avez cité ce chiffre de 4 % des émissions de gaz à effet de serre, aujourd’hui ça peut être assez surprenant. Il faut bien se dire que derrière l’immatérialité de ce tout petit objet que tout le monde a dans sa poche [Vincent Couboulay brandit un téléphone portable, NdT], on a tout un cycle de vie du produit qui est très impactant depuis l’extraction des matières premières – il y a à peu près une petite centaine de matériaux différents là-dedans –, donc de trous dans la planète, donc d’utilisation massive d’eau, d’énergie, de produits chimiques, et j’en passe et des meilleurs. L’empreinte environnementale de cet objet, de nos box, de nos ordinateurs, de nos télés est aujourd’hui à peu près pour trois quarts en amont de l’achat, c’est-à-dire avant même d’ouvrir le carton même s’il est recyclé, on a à peu près les trois quarts de l’empreinte environnementale qui se situent depuis l’extraction jusqu’à la fabrication. Ça c’est pour l’objet en lui-même.</p>
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| Si prend un tout petit peu de recul, prenons un exemple tout simple, cette visioconférence qui va durer une heure, ou une heure de vidéo Netflix, ce sont indirectement trois secteurs qui travaillent. Il y a le secteur <em>datacenter</em>, les fameuses fermes de données qui vont gérer les données, les stocker, les transmettre, s’assurer que tout se passe bien. Ensuite on a le réseau qui transporte la donnée et puis on est tous devant un ordinateur avec une webcam, peut-être un téléphone, que sais-je, des enceintes connectées, c’est le troisième tiers.<br/>
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| On a ces trois tiers qui doivent cohabiter. Juste pour démystifier, aujourd’hui le tiers le plus impactant ce ne sont sûrement pas les <em>datacenters</em>, les <em>datacenters</em> comptent pour à peu près 15 à 20 % de l’empreinte d’un service, une heure de vidéo par exemple ; à peu près pareil pour le réseau, le transport de la donnée. Ce qui va être le plus impactant aujourd’hui ce sont nos ordinateurs, nos smartphones. Pourquoi ? Parce qu’il y a quatre milliards et demi d’utilisateurs du numérique, donc nous sommes très nombreux à avoir plein de petits appareils individuels et toutes ces gouttes-là mises dans la piscine olympique des impacts environnementaux, vous voyez que ce sont ces petites gouttes d’eau qui font les grandes rivières.</p>
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| Donc un cycle de vie particulièrement impactant depuis l’extraction des matières premières, la fabrication avant même l’usage. Et si on considère l’usage des <em>datacenters</em>, des réseaux et beaucoup trop d’équipements, vous mettez tout ça ensemble et vous avez une petite bombinette environnementale.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>D’accord. Ludovic Fournier, on a discuté il n’y a pas longtemps. Quand on parle d’impact environnemental du numérique, on parle aussi d’énergie, l’énergie nécessaire pour produire un téléphone, un ordinateur. Quelle est cette énergie ? Vous avez travaillé sur la question récemment.
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| <b>Ludovic Fournier : </b>Oui effectivement. Je rejoins tout à fait ce qui a été dit jusqu’à présent par rapport à tous ces différents tiers et par rapport à toute cette énergie et aux matières premières qui sont nécessaires pour fabriquer les terminaux que ce soit les ordinateurs, que ce soit les téléphones. J’aime bien, pour comparer un petit peu l’ensemble, donner trois paramètres : à la fois la quantité de gaz à effet de serre qui est émise durant la fabrication, durant l’utilisation ; à la fois l’énergie qui est nécessaire à la fabrication et à l’utilisation de tout ce numérique ; et à la fois la matière qui est nécessaire pour fabriquer les différents terminaux.<br/>
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| Le gaz à effet de serre est une matière, on le voit bien, le dioxyde de carbone ; les matières premières nécessaires à la fabrication, on le voit bien aussi, il y a du cuivre, il y a du platine, il y a du pétrole, du plastique et ainsi de suite.<br/>
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| Souvent on parle de l’énergie qui est nécessaire à la fabrication et à l’utilisation. J’aime bien recoller cette énergie à de la matière derrière, parce que derrière ce terme « énergie » se cachent des matières qui sont principalement le pétrole qu’on va utiliser pour transporter les différents objets ; il faut savoir que quand on fabrique un ordinateur, un smartphone, les minerais sont extraits à un endroit, le raffinage est fait à un autre endroit, l’assemblage est fait encore à un autre endroit. On va devoir transporter par bateaux, par camions, tous ces objets. Il va également y avoir besoin de charbon derrière toute cette énergie qui va permettre, par exemple, de chauffer toutes les fonderies qui permettent d’obtenir les métaux, de raffiner les métaux, également pour produire de l’électricité ; il y a aussi besoin de gaz pour produire de l’électricité. L’uranium va également être utilisé dans les centrales nucléaires pour produire de l’électricité. On a une tout petite partie de la production d’énergie qui provient de l’éolien, qui provient également du solaire. On a aussi une petite partie de cette énergie qui provient des barrages hydrauliques avec de l’eau.<br/>
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| Quand on parle de l’énergie qui est nécessaire on a toutes ces matières premières qui sont derrière.</p>
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| Un autre point que j’aime bien montrer par rapport à tout cette phase, toute cette énergie qui est nécessaire à la fois pour produire et pour utiliser : si on prend l’énergie qui est nécessaire pour produire un ordinateur, on va prendre un ordinateur portable, classique, comme celui avec lequel je fais ce webinaire, c’est environ 1 850 kW/h selon les chiffres du Shitft Project ; si on devait pédaler pour fabriquer, pour produire cette énergie qui nous permet d’aller chercher des minerais, qui nous permet de les raffiner, qui nous permet de les assembler, qui nous permet de les transporter, pour produire notre ordinateur et l’utiliser, il faudrait pédaler pendant environ cinq ans et demi si on considère une semaine de 35 heures de travail.<br/>
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| Pour produire un téléphone, qu’on va utiliser environ deux ans, il faudrait pédaler sept mois rien que pour produire l’énergie qui est nécessaire à la fabrication du téléphone.<br/>
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| Ce qui est génial c’est qu’on ne pédale pendant cinq ans et demi pour un ordinateur, on ne pédale pas pendant sept mois pour fabriquer son téléphone, on utilise des matières premières et on ne voit pas que, finalement, on utilise peu de ces matières premières : c’est 250 kg de charbon pour produire l’ordinateur, 30 kg de charbon pour produire le téléphone. Ce que je veux dire par ce peu et qui est extraordinaire, c’est que grâce à ces matières avec lesquelles on produit de l’énergie, il faut de relativement faibles quantités de matière par rapport à l’énergie qui serait nécessaire de la part d’un humain.</p>
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| Et de même, dernier point de comparaison. Si on devait produire, en pédalant, l’énergie qui nous permet de regarder une vidéo dix minutes, il faudrait pédaler 30 minutes et pas pédaler à 10 km/h, pas en mode tranquille, il faudrait pédaler à 25/35 km/h, pendant 30 minutes, pour pouvoir regarder 10 minutes de vidéo.</p>
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| Voilà un petit peu ce qu’il en est par rapport à ces impacts et voilà ce qui se cache derrière le mot « énergie » que l’on retrouve souvent quand on fait des points de comparaison. Derrière il y a des matières, c’est important de le souligner, ce qui montre encore une fois, une fois de plus, que le numérique paraît dématérialisé, mais, en réalité, c’est très matérialisé. Derrière il y a de la matière, notamment dans l’énergie que l’on utilise à la fois pour produire et à la fois pour utiliser ces appareils.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>En vous écoutant on comprend bien l’importance du recours aux images pour faire comprendre, prendre conscience au grand public de l’impact environnemental du numérique.</p>
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| Isabelle Chabanon-Pouget vous êtes face au public, vous l’accompagnez dans cette culture numérique à Universcience et vous avez notamment proposé une médiation qui s’appelait « Voyage au cœur de nos téléphones intelligents ». Avez-vous l’impression que cette prise de conscience est déjà là ?
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| <b>Isabelle Chabanon-Pouget : </b>Petit à petit. Les personnes qui viennent voir la médiation « Voyage au cœur de nos téléphones intelligents » sont des gens qui sont déjà un peu sensibilisés.
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>Avez-vous recours, comme ça, à des images fortes pour essayer justement de les sensibiliser ?
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| <b>Isabelle Chabanon-Pouget : </b>Dans cette médiation on parle des deux premières étapes du cycle de vie de production d’un téléphone portable, on parle de l’extraction des matières premières et on parle de la consommation énergétique du numérique.</p>
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| Des images. On fait manipuler des objets sur une carte. Dans le numérique on a l’impression que tout est virtuel, mais, comme on l’a dit précédemment, en fait derrière tout est matériel. On a une carte et on prend des téléphones, des éléments de téléphone, des câbles et on essaye de les repositionner sur la carte pour montrer que tout est vraiment réel. Les câbles sous-marins sont représentés par des câbles pour que le public prenne vraiment conscience que derrière tout est matériel.
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| ==13’ 32==
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| <b>Marie-Catherine Mérat : </b>À vous écouter tous les trois
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