« Public, privé, politique : Internet au 21ème siècle - Benjamin Bayart » : différence entre les versions

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'''Titre :''' Public, privé, politique : Internet au 21ème siècle
Publié [https://www.april.org/public-prive-politique-internet-au-21e-siecle-benjamin-bayart ici] - Août 2018
 
'''Intervenant :''' Benjamin Bayart
 
'''Lieu :''' Hack2g2 - Vannes
 
'''Date :''' mai 2017
 
'''Durée :''' 1 h 34 min
 
'''[https://www.youtube.com/watch?v=55U9UUO88uE Visionner la vidéo]'''
 
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]
 
'''NB :''' <em>transcription réalisée par nos soins. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas forcément celles de l'April.</em>
 
'''Statut :''' Transcrit MO
 
==Description==
 
Président de la Fédération des FAI associatifs, cofondateur de la Quadrature du Net (entre autres), Benjamin Bayart traitera le sujet des notions d'espaces public et privé, qui permettent de définir les contours de la vie de la cité ou, autrement dit, la politique. C'est la différenciation de ces espaces qui vont permettre l'apparition de nos démocraties modernes au 18e siècle. L'arrivée d'Internet, au 21e siècle entraîne la modification de ces notions d'espaces public et privé. Ce sujet sera aussi l'occasion d'explorer des questions liées à l'hyper-centralisation de nos services en ligne, la vie privée, le cloud ou encore le rôle des hackers pour faire et penser ces changements.
 
==Transcription==
 
Bienvenue à ceux qui nous ont rejoints depuis tout à l’heure. Là on va enchaîner avec monsieur Benjamin Bayart de la Fédération FDN et de La Quadrature du Net qui va nous parler de privé, public, politique : Internet au 21e siècle. L’intervenant suivant n’a pas pu venir, malheureusement, il a un petit problème donc la conférence va déborder sur l’heure, du coup on aura plus de Benjamin Bayart, une heure voire un peu plus pour les questions et après on reprendra, après la conférence avec le <em>workshop</em> de Sébastien, sur Burp. Donc il va pouvoir, ceux qui n’ont pas fini ou qui veulent reprendre le train en route c’est possible ; le village des assos sera encore là, il y aura encore <em>makerspace</em> et puis griffon(???), vous pourrez aller leur parler ; il y a du café, il y a des crêpes et on reprendra après vers 16 heures-16 heures 30 pour la dernière conférence du CIL sur le réseau Tor et Nos Oignons. Voilà.
 
<b>Benjamin Bayart : </b>On va laisser tranquillement le temps aux gens d’arriver. Quelques petites précisions avant de commencer : j’ai préparé mes diapos comme toujours à la dernière minute donc s’il y a des fautes d’orthographe j’assume, c’est de ma faute, tant pis. J’ai tout bien préparé pour comme si je faisais 45 minutes, c’est-à-dire où moi je parle 25 minutes et où après on discute ensemble 20 minutes, cependant j’ai suffisamment de choses dans la tête sur le sujet pour faire plus, donc il y a des risques que je déborde un petit peu. Alors comme pour une fois je ne vais pas en parler.
 
Donc je me présente, moi je m’appelle Benjamin Bayart, je suis président de la Fédération FDN depuis sa création en 2011 ; je suis membre cofondateur de La Quadrature du Net depuis que c’est devenu une association loi 1901 et non plus une association de fait ; je suis impliqué dans deux ou trois autres méfaits du même genre, mais je ne les ai pas tous mis parce qu’il n’y avait qu’une seule diapo et je ne vais pas du tout vous parler de technique et je ne vais pas du tout vous parlez de sécurité informatique. En revanche, je vais essayer de vous faire réfléchir sur un point précis et assez compliqué qui se résume assez bien en privé, public, politique ; vous allez voir, ce n’est pas l’angle habituel, ça va croiser plein d’angles que vous croisez déjà si vous réfléchissez un peu autour d’Internet et autour de l’informatique, mais ce n’est pas celui auquel vous êtes entraîné.
 
Le plan ne présente aucun intérêt puisqu’il reprend les trois mots et qu’il y a juste définition et conclusion à la fin donc il n’est pas drôle.
 
Si j’essaye de vous faire un résumé en quelques minutes de ce que je raconte d’habitude en conférence, en général j’explique ce que c’est qu’une société, j’explique qu’une société c’est la somme des interactions entre les individus que donc ce qui fait la société humaine c’est la somme des interactions entre les humains ; interactions, ça peut être se dire bonjour ou ça peut être se faire la guerre, tout ça ce sont des interactions entre êtres humains.
Internet change la façon dont les humains communiquent donc Internet change la société que nous faisons. En général, au bout d’une heure et demie d’explications, je vous explique que c’est le contraire. Ah oui ! Parce que si je dis Internet change la société, on suppose qu’il y a une société jolie, bien portante, posée genre façon de blob sur la table et puis que quelqu’un qui n’est pas dedans sort de sa poche un Internet, le pose sur la société et que ça la déforme. C’est qui ? Soit on accepte l’hypothèse divine – moi j’aime bien –, on suppose qu’Internet est envoyé par Dieu aux hommes pour les rendre meilleurs, vous voyez une espèce d’approche messianique du truc. Bon ! J’aime bien, je suis pas certain que scientifiquement ce soit super défendable. Sinon il faut bien admettre, Internet est l’outil dont nos sociétés se sont dotées pour changer. Ça c’est radicalement différent parce que ça, ça vous dit que lutter contre ça n’a pas de sens. Internet n’est pas un phénomène extérieur contre lequel on peut lutter, c’est un phénomène intérieur. Ce n’est pas parce qu’Internet arrive que nos sociétés changent, c’est parce que nos sociétés changent qu’Internet arrive. C’est bien dans cet ordre-là. Exactement – comme souvent je fais des parallèles avec l’imprimerie – ce n’est pas parce que Gutenberg s’est cogné un matin la tête et a inventé l’imprimerie que soudain, le lendemain matin, on commençait la Renaissance. C’est parce qu’il y avait une pression de la société à produire de la connaissance et à sortir du Moyen Âge, que les techniques en place ne le permettaient pas, que le premier qui a eu une idée pas complètement idiote, cette idée a été immédiatement adoptée et s’est propagée parce qu’elle était attendue. C’est bien dans cet ordre-là.
 
L’autre chose que j’explique régulièrement ça relève de ce que racontait Mac Luhan, alors pour vous aider à situer, le mec a théorisé ce que fait Internet, il est mort en 1980. OK ! Mac Luhan vous voyez tous qui c’est, évidemment. Non ! C c’est un monsieur qui s’est intéressé aux médias et il explique que le plus intéressant dans ce que fait un média, ce n’est pas le contenu, c’est le média lui-même. Le message c’est le média.
 
Si je caricature, l’oral définit une structure de société ; tant qu’il n’y a que l’oral, on a une structure de société, elle porte un nom, c’est la société d’avant l’écriture. Allez, on va tester les gens pour de la culture : une société d’avant l’écriture ça s’appelle ? Préhistorique, il y a un mot pour ça, c’est préhistorique. L’arrivée de l’écriture fait qu’on rentre dans ce qu’on appelle l’histoire ; c’est l’invention de l’État et c’est l’invention de la loi. L’existence de l’imprimerie change les choses puisque ça fait que la connaissance se diffuse, que tout le monde peut se mettre à avoir accès à des textes alors qu’avant seuls quelques très rares lettrés pouvaient y avoir accès. Aujourd’hui, si vous cherchez, quelque chose comme 85 à 90 % de la population française sait couramment lire. Ce n’est absolument pas le cas en 1500 quelque chose quand du Gutenberg se cogne la tête et invente l’imprimerie, 1400 quelque chose.
 
Le fait de changer le média, indépendamment du contenu, change la structure sociale qui en résulte. Internet fonctionne de manière différente de ce qu’était la télévision, de ce qu’était la radio, de ce qu’était l’imprimerie ou de ce qu’était l’oralité. Donc Internet va amener des structures sociales qui ne sont pas les mêmes et qui ne sont pas encore pensées parce qu’on ne sait pas ce que ça produit.
 
J’utilise souvent cette image en disant que ce que change Internet ce n’est pas la toile qu’on est en train de tisser pour faire la société, c’est le fil avec lequel on est en train de tisser la toile. Ce qu’on change est assez profond. Il y a un angle que je laisse toujours dans le noir dans mes conférences parce que c’est l’angle sur lequel je suis parfaitement incompétent ; je suis pas fou je ne vais pas vous exposer mes trous !
Quand je dis ça, quand je dis le ce que je change c’est le fil avec lequel on tisse la société qu’est-ce que je raconte ? Je dis, en fait, que parce qu’on a changé la façon dont les humains communiquent entre eux, on change la façon dont les humains fonctionnent. C’est un point de vue de psychiatre quelque part. Il y a forcément un effet sur le développement psychologique de cet engin-là puisqu’on ne structure pas la société de la même façon, les individus ne communiquent pas de la même façon, or la façon dont les individus communiquent ça les structure entièrement ; les gens qui vont bien ou qui ne vont pas bien ce sont des histoires toujours de comment ils interagissent avec les autres, rarement de comment ils interagissent avec les chaises, vous voyez. On a souvent plus de problèmes à régler en psychanalyse à cause de son père ou de sa mère qu’à cause de son berceau ; c’est toujours les interactions entre individus qui forment.
J’ai eu le plaisir il n’y a pas tout à fait un an de faire la conférence d’ouverture d’un congrès de psychiatres où j’ai pu constater qu’ils ne savent pas. Voilà ! Ils ne savent pas. On arrivait à faire émerger des éléments, on arrivait surtout à faire émerger des questions. Moi, ce qui m’a le plus frappé dans les échanges avec la salle à la fin, c’est une dame qui est pédopsychiatre, qui fait du soin clinique sur des gamins et qui dit que depuis quelques années on voit arriver des enfants, quand je dis des gamins ce n’est pas 20-25ans comme vous, ce sont des petits, à l’âge où ils sont encore gentils, on voit débarquer des gamins qui ont manifestement des troubles psys non répertoriés, dont on ne sait pas ce que c’est ; c’est extrêmement intéressant. Ça veut bien dire qu’il y a quelque chose dans le développement des personnes qui est en train de changer et on ne sait pas bien ce que c’est.
Donc ça c’est ce que je raconte d’habitude ; normalement ça, ça me fait deux heures et demie. Bien et ce n’est pas de ça que je vais vous parler, mais c’est pratique d’avoir rappelé ça parce que ça donne quelques bases sur pourquoi je suis en train de creuser ou est-ce que je creuse et pourquoi est ce que j'essaye de comprendre ça. Bien !
 
==10’ 36==
 
Qu’est-ce que c’est que la politique moderne ?

Dernière version du 13 août 2018 à 15:50


Publié ici - Août 2018