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| | | Publié [https://www.april.org/allons-nous-vers-une-cyber-dictature ici] |
| '''Titre :''' Allons-nous vers une Cyber-Dictature ?
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| '''Intervenants :''' Jérémie Zimmermann - Éric Filiol - Journaliste
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| '''Lieu :''' ThinkerView
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| '''Date :''' Janvier 2014
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| '''Durée :''' 16 min 08
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| '''Lien vers la vidéo :''' [http://thinkerview.com/interview/allons-nous-vers-cyber-dictature/]
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| ==00' ''transcrit MO'' ==
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| '''Journaliste :''' Messieurs bonjour. Je vous interviewe aujourd'hui pour un site internet qui s'appelle ThinkerView. J'aurais voulu avoir votre avis sur le concept de cyberguerre ou de cyber paix. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire là-dessus ?
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| '''Jérémie Zimmermann :''' Je peux commencer là-dessus. On s'est fait bassiner pendant des années avec ce concept de cyberguerre, qui correspond à une forme de militarisation de l'Internet : déploiement d’infrastructures, on pense joujoux d'Amésys, à la ''Deep Packet Inspection'', des dispositions législatives pour donner des pouvoirs offensifs en matière de cyberattaque, maintenant en France à l'ANSSI et à des institutions dans le monde entier. C'est la commande publique qui part avec des contrats à je ne sais combien de zéros pour les mêmes entreprises qui vendent des missiles et des chasseurs. Le problème c'est quand on parle de cyberguerre on parle d'Internet comme un champ de bataille, on parle de mouvements de troupes. On oublie juste un paramètre qui est le citoyen. Et pendant des années nous avons eu une vision de la sécurité, de la cybersécurité, qui s'appelait cyberguerre, dans laquelle on a juste oublié les citoyens. Et aujourd'hui on s'aperçoit, avec les révélations de Snowden, le programme ''Bull Run'' de la NSA qui vise à saboter activement, une par une, toutes les technologies commerciales de protection de nos données de communication, on s'aperçoit aujourd'hui qu'on a tous un espion dans la poche.
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| '''Journaliste :''' Est-ce que vous pouvez un petit peu nous développer le programme Lustre ?
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| '''Jérémie Zimmermann :''' Au-delà des différents programmes de la NSA, on constate l'échec des politiques de cybersécurité ; la seule chose à laquelle ça a servi c'est à des contrats, d'un complexe militaro industriel, qu'il va falloir renommer, je ne sais pas, militaro numérique ou quelque chose comme ça, alors que personne n'a pensé à développer la cyberpaix. La cyberpaix c'est basé sur la définition de la paix. La paix c'est un état dans lequel on est libre de la peur, de l'agression. Qu'est-ce que ça voudrait dire dans l'environnement numérique, être libre de la peur ou de l'agression ? Ça veut dire mettre le citoyen au cœur de la sécurité ; ça veut dire mettre le citoyen au cœur de la technologie ; ça veut dire rendre le contrôle de la technologie au citoyen. Eh bien, on aspire à des politiques publiques qui penseraient en termes de cyber paix plutôt qu'en termes de cyberguerre.
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| '''Journaliste :''' Éric Filiol est-ce que vous pouvez ?
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| '''Éric Filiol :''' Je crois que ce concept de cyberpaix et de cyberguerre, ne soit probablement que la plus grosse escroquerie intellectuelle de ces dernières années. Je vais me placer dans le plan purement opérationnel, je pense que la partie « cyber » qui est une dimension supplémentaire à la fin du 20ème siècle comme l'a été l'aviation au début du 20ème, ne jouera qu'un rôle marginal, d'appui ou de préparation, sur des conflits classiques. Il ne faut pas oublier que la guerre consiste à prendre la possession de réalités bien matérielles, que ce soit des territoires, que ce soit des ressources, mais c'est aussi des esprits. Il ne faut pas oublier que la finalité de la guerre c'est justement de prendre la main sur des réalités concrètes. Donc le « cyber », à mon avis, restera marginal. Ça ne veut pas dire qu'il faut le relativiser, ni le dédaigner, c'est une réalité qui s'impose à nous, mais elle n'a pas l’ampleur qu'on veut bien lui prêter et je suis d'accord que c'est beaucoup plus pour légitimer d'une part des dépenses pharaoniques dans le domaine, puisque je crois que surtout plus qu'une cyberguerre on est en train de mettre en place des cyberdictatures.
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| '''Journaliste :''' Vous pouvez développer ?
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| '''Éric Filiol :''' On s’aperçoit que le programma PRISM, et PRISM existe, a eu des antécédents, on s'aperçoit qu'il y a quand même, les principales démocraties ont tendance à se tourner en États policiers numériques. Moi ce qui me gêne, dans les évolutions récentes, c'est qu'on remplace la présomption d'innocence par la présomption de culpabilité. Quand on espionne toutes les personnes par défaut, pas seulement les communications téléphoniques parce que vous avez un contact avéré avec des terroristes corses ou des terroristes islamiques, quand on espionne en permanence vos moindres faits et gestes, il faut savoir qu'avec l'Internet connecté et notamment le ''CPL Outdoor'', c’est-à-dire de l'extérieur on peut savoir ce qui se passe dans votre maison, votre consommation électrique et les outils mathématiques de traitement de l'information vont le permettre, quand on espionne en permanence de manière aussi intime les gens, c'est qu'on part du principe c'est qu'ils sont, par défaut, coupables ou susceptibles de perpétrer des actes. On ne peut pas avoir un État fort, un État doit être fort, mais sans faire confiance aux citoyens, sans les laisser libres et sans les respecter. Et si on se méfie des citoyens, les citoyens se méfieront de l’État et on aura un État faible.
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| '''Journaliste :''' Récemment un cryptographe belge a annoncé que lui-même était piraté par la NSA, poutré dans le jargon. Qu'est-ce que vous en pensez ?
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| '''Éric Filiol :''' Ce qui me surprend c'est que ça surprenne encore des gens. C'est logique En plus ce cryptographe belge est bien connu pour avoir eu des activités mathématiques dans des domaines sensibles. C'est aussi quelqu’un qui, à une époque, n'a pas voulu aller dans les sens du contrôle de la cryptographie, notamment universitaire, par les milieux américains. Tout simplement c'est quelqu'un qui compte dans le domaine, qui a eu une production scientifique de tout premier plan ; qui a d'ailleurs eu des cahiers pillés à l'époque, parce qu'il faut savoir qu'il avait fait avec un autre cryptographe français, Guillou, le fameux protocole Guillou-Quisquater, qui a été pillé par une entreprise américaine, en violation directe des brevets. Sauf que trois avocats français contre cinquante avocats américains, la cause était vite entendue ! Ce n'est pas étonnant qu'il ait été espionné, mais encore une fois ce qui m'étonne c'est que ça étonne encore des gens.
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| '''Journaliste :''' Qu'est-ce que vous pouvez nous dire, un petit peu, sur la capacité que les gens eux-mêmes, le simple particulier a à se protéger de ce genre de pillage, d’infiltration dans son système ?
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| '''Jérémie Zimmermann :''' Il y a deux choses distinctes. La surveillance ciblée et la surveillance de masse. J'espère que les prochaines révélations de Snowden nous montreront d'une part comment on peut passer de l'une à l'autre Est-ce que le simple fait de ne pas utiliser Facebook, Google ou Apple ne remet pas immédiatement dans la catégorie surveillance ciblée, comme d'utiliser des logiciels libres ou Tor, et là ça fait de vous un potentiel terroriste. Mais il faut encore distinguer les deux. La surveillance ciblée, on le voit avec les dernières révélations sur les implants matériels et autres joujoux de la NSA, vous savez déjà qu'on ne peut pas y échapper. Ça c'est une réalité. La surveillance ciblée est légitime lorsque ecadrée par l'autorité judiciaire, lorsqu'il y a un rétro contrôle citoyen et démocratique des actions des services qui la pratiquent. Ce qui est véritablement intolérable, c'est la surveillance de masse, comme le disait Éric Filiol, c'est la présomption de culpabilité, ce sont des violations massives de nos libertés individuelles qui ne peuvent en aucun cas respecter le principe de proportionnalité. Or cette surveillance de masse, a priori, on peut y échapper.
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| ==07' 58==
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| '''Journaliste :''' Est-ce que vous allez dans le sens d'Eric Filiol
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