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| | transcription publiée : http://www.april.org/conference-de-veronique-bonnet-vers-un-espace-numerique-libre-une-lecture-philosophique |
| <li><strong>Titre</strong> : Vers un espace numérique libre ? Une lecture philosophique</li>
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| <li><strong>Intervenants</strong> : Véronique Bonnet</li>
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| <li><strong>Lieu</strong> : Médiathèque Jean Jeukens - Bar-Le-Duc - Sud Meuse</li>
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| <li><strong>Date</strong> : avril 2014</li>
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| <li><strong>Durée</strong> : 1h 26 min</li>
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| <li><strong>Média</strong> : [http://mediatheque.meusegrandsud.fr/EXPLOITATION/~~/EXPLOITATION/accueil-info-7.aspx]
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| <li><strong>Licence</strong> : CC-BY-SA</li>
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| == 00' Transcrit MO ==
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| Je commence par remercier beaucoup la médiathèque Jean-Jeukens et la Communauté de Communes pour son invitation et donc aujourd'hui je vais évoquer une approche philosophique et je vais intituler ma conférence « Vers un espace numérique libre ». Alors le « vers » peut paraître un peu déconcertant puisque quand on voit à quel point on peut accéder rapidement à des ressources collaboratives, aussi bien culturelles, aussi bien pratiques, de tous ordres, aussi bien esthétiques, des tableaux, des textes qui sont dans le domaine public, on peut se demander si l'espace numérique libre n'est pas déjà réalisé, si on ne va pas déjà de soi, et si donc l'humanité que nous constituons, par cette présence du numérique de plus en plus importante dans nos vies, aussi bien privées, aussi bien publiques, n'est pas le signe que les idées des Lumières sont en train de se réaliser, puisque cette humanité, cette totalité, créative et imaginative, se trouve rassemblée autour d’elle-même et va peut-être pouvoir, en liberté, constituer, ce qu'on pourrait appeler avec Kant, la société des sujets, la communauté des sujets, c’est-à-dire la communauté d’êtres autonomes tissant ensemble une manière d'exister.
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| Simplement pourquoi donc une lecture philosophique ? Il me semble, et l'outil philosophique est pratiqué par moi depuis un certain temps, il me semble que la philosophie a surtout pour enjeu de discerner des faux-semblants, de mettre en évidence des paradoxes, de repérer, assez justement, quelles sont les ambiguïtés qui peuvent se trouver dans certaines situations. Alors justement je prends ce titre "Vers un espace numérique libre", « vers » est-ce qu'on y est poussé ? Est-ce qu'il y a un contexte tel, aussi bien social, aussi bien économique, qui fait qu'on ne peut pas ne pas aller vers une certaine direction qui du coup est imposée, qui du coup est hétéronome. Est-ce qu'il faut prendre « vers » au sens d'un choix ? Est-ce que cette société, est-ce que cet espace numérique libre, on va déterminer quel il sera, quelles seront ses caractéristiques ? Avec quelles clauses faire intervenir l'informatique au-dedans pour préserver certaines dimensions humaines ? Donc ça c'est la deuxième possibilité, « vers » au sens d'un choix. Troisième possibilité, et il me semble que je vais surtout aujourd'hui étayer cette dernière, est-ce que ce « vers » n'est pas une direction qu'on s’imagine choisir, en étant en réalité contraint, qui serait d'autant plus préjudiciable qu'elle apparaîtrait comme anodine, comme allant de soi, avec une apparence d'ouverture, une apparence d'accueil, alors que peut-être elle serait fermée, sans même qu'on ne puisse en avoir l'idée.
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| Ce titre est un double hommage « Vers un espace numérique libre ». D'un part un hommage à un philosophe des Lumières qui s'appelle Emmanuel Kant qui, à la fin du 18ème, écrit un texte qui s'appelle « Vers la paix perpétuelle » où, avec l'outil philosophique, il essaye de montrer comment certains accords, comment certaines décisions d’arrêter les hostilités sont faites de faux-semblants ; il y a des clauses secrètes qui doivent surtout être ignorées des peuples, peuples, qui, s'il les connaissaient, pourraient éventuellement se révolter. Donc déjà un hommage à ce texte très fondamental de Kant « Vers la paix perpétuelle ». Hommage aussi, et là je tente une première analogie, avec un certain Richard Stallman, dont je parlerai surtout dans le troisième moment de ma conférence qui a, en septembre dernier, au moment des festivités autour des trente ans de son projet Gnu, qui donc proposé une conférence qui s'appelait « Vers une société numérique libre » à laquelle j'ai assisté. C’était la première fois que je l'entendais parler, hors de toutes les conférences que j'avais entendues en ligne. Et lui aussi il a dénoncé des faux-semblants, faux-semblants d'une technologie qui était apparemment docile, apparemment à notre service, ne proposant que des solutions et peut-être jamais des problèmes, mais une technologie dont les portes dérobées, dont les menottes numériques, dont le recueil de méta-données, donnent en réalité, de cet espace numérique, non pas du tout une image d'autonomie innocente mais peut-être de quelque chose, comme une violence symbolique dont j'aurai l'occasion de parler.
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| Que veut dire faire cette analogie ? Ça ne veut sûrement pas dire que les ambiguïtés auxquelles les philosophes des Lumières se sont mesurés sont de même ordre, pas du tout ; que les faux-semblants auxquels quelqu'un comme Richard Stallman, d'autres, se sont confrontés, mais peut-être que les dispositifs qui peuvent être opaques, qui peuvent être obscurs aussi bien au 18ème comme en notre temps sont, peut-être, à repérer, pour qu'un droit à régulation permettant des formes réfléchies, des formes autonomes comme s'affirmer, se mouvoir en liberté, avoir l'audace de faire usage de son propre entendement, ça c'est la devise des Lumières selon Kant, prendre en main non seulement son informatique mais ce à quoi l'informatique touche, c'est-à-dire prendre aussi en main sa vie, sont donc des combats à propos desquels je rapprocherais très volontiers les philosophes des Lumières et certains combats qui sont contemporains. Donc comment discerner, comment définir un espace numérique tel qu'il se présente factuellement à nos yeux pour examiner de quoi il est fait et comment y entrer, éventuellement avec des précautions.
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| Mon propos se donnera pour s'asseoir trois axes.
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| Premier axe, je parlerai de l'émancipation telle qu'elle est définie par les philosophes des Lumières et telle qu'elle requiert un certain espace, politique et culturel, que les philosophes des Lumières ont appelé patrimoine, que Hannah Arendt, prolongeant la lecture des Lumières, a appelé « le Commun » et il se trouve qu'actuellement la notion de communs, de biens communs est très attestée dans la question de l'espace numérique libre.
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| Deuxième axe, j’essaierai d'établir que l'espace numérique qui s'édifie est à la fois troublant et troublé. Troublant, au sens où il peut désorienter. Troublé, au sens où se jouent en lui des oppositions extrêmement fortes, extrêmement cruciales ; par exemple on parle maintenant de l'informatique après Snowden, on a parlé de l'avant- Snowden, on va parler de l'après Snowden, puisque ce lanceur d'alerte a fait basculer la perspective.
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| Et enfin dernier axe, je montrerai comment les propositions, dont on doit bien voir qu'elles sont à la fois éthiques et pratiques, donc du mouvement du Free Software, essaient de déterminer une forme, disons, d'émancipation avec des outils juridiques, avec des outils qui sont informatiques. J'évoquerai la figure de Richard Stallman et ensuite je me permettrai de suggérer quelques repères.
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| ==11'00 ==
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| Je vais donc essayer dans la mesure du possible de me référer à des textes fondamentaux de ce siècle des Lumières
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