Différences entre les versions de « Entretien avec Jean-Noël Barrot : la loi à l'épreuve de nos vies connectées »

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'''Titre :''' Entretien avec Jean-Noël Barrot : la loi à l'épreuve de nos vies connectées
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Publié [https://www.librealire.org/entretien-avec-jean-noel-barrot-la-loi-a-l-epreuve-de-nos-vies-connectees ici] - Novembre 2023
 
 
'''Intervenant·e·s :'''  Juliette Devaux - Jean-Noël Barrot - Bastien Le Querrec - Jean Massiet - Anne Cordier - John Perry Barlow - François Saltiel
 
 
 
'''Lieu :''' Émission <em>Le Meilleur des mondes</em> - France Culture
 
 
 
'''Date :''' 27 octobre 2023
 
 
 
'''Durée :''' 59 min 07
 
 
 
'''[https://rf.proxycast.org/c1805c4c-f866-4c27-a098-400631e24b95/22826-27.10.2023-ITEMA_23533179-2023C45296E0010-21.mp3 Podcast]
 
 
 
'''[https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-meilleur-des-mondes/entretien-avec-jean-noel-barrot-la-loi-a-l-epreuve-de-nos-vies-connectees-1046718 Présentation de l'émission]
 
 
 
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]
 
 
 
'''Illustration :''' À Prévoir
 
 
 
'''NB :''' <em>transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.<br/>
 
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.</em>
 
 
 
==Transcription==
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Bonsoir et bienvenue à toutes et à tous dans <em>Le Meilleur des mondes</em>, l'émission de France Culture qui s'intéresse aux bouleversements suscités par le numérique et les nouvelles technologies. Ce soir nous avons la chance de recevoir le ministre délégué chargé du Numérique dans notre studio, Jean-Noël Barrot, un ministre actif, très présent sur le plan législatif, nous pouvons évoquer la loi influence puis celle sur la majorité numérique et, dans l'actualité immédiate, la grande loi SREN qui vise à sécuriser et réguler l'espace numérique, lutte contre le cyberharcèlement, contre l'accès à la pornographie pour les mineurs ou encore contre la propagation de la haine en ligne ; une loi aux larges contours qui vient d'être adoptée le 17 octobre à l'Assemblée nationale, mais qui pose tout de même de nombreuses questions quant à son application technique et même éthique. Ce sera l'occasion d'y voir plus clair. La dialectique est classique : comment sécuriser sans restreindre nos libertés fondatrices de nos usages du numérique, comment réguler sans étouffer l'innovation nécessaire pour se faire entendre sur un marché mondialisé et hyper-concurrentiel, enfin, comment la France se place et s'inscrit-elle dans le grand mouvement de régulation européenne tel le DSA, le <em>Digital Services Act</em>, sachant qu'une Union européenne lui reproche parfois de faire cavalier seul, un cavalier qui entend faire respecter sa loi pour mettre fin au Far West numérique là où les cowboys de la Silicon Valley ont pour habitude de dégainer les premiers. Voilà. Le décor est planté place au <em>Meilleur des mondes</em>.<br/>
 
Jean-Noël Barrot, bonsoir.
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Bonsoir
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Vous êtes donc, depuis juillet 2022, ministre délégué chargé du Numérique, mais également vice-président du Modem et vous avez longtemps été député des Yvelines. Nous pourrons, ensemble, revenir sur votre parcours, notamment votre passage aux États-Unis, au MIT, aussi sur votre rapport personnel au numérique et, évidemment, sur les contours de la loi SREN en évoquant aussi les enjeux de souveraineté technologique. Vous aurez l'occasion de répondre à des questions d'entrepreneurs, de chercheuses ou de responsables d'associations de défense des droits.<br/>
 
Au programme, également, une chronique de Juliette Devaux qui nous rappellera la déclaration fondatrice du militant et poète John Perry Barlow et sa <em>Déclaration d'indépendance du cyberespace</em>, un peu en écho à nos sujets du soir.
 
 
 
<em>Le Meilleur des mondes</em> s'écoute en direct ou en podcast sur l'application Radio France et se regarde aussi sur la chaîne Twitch de France Culture.
 
 
 
<b>Diverses voix off : </b>Pour moi, c'est mettre des règles de droit dans un espace où le droit existe.<br/>
 
Depuis plusieurs mois, le nombre de plaintes pour des arnaques en ligne explose. Le gouvernement veut mettre en place un système de filtre.<br/>
 
Aujourd'hui, en France, environ un tiers des mineurs fréquente des sites pornos, c'est quasiment la même proportion que chez les adultes.<br/>
 
Le sentiment d'anonymat sur les réseaux sociaux développe un sentiment d'impunité.<br/>
 
Qu'est-ce qu'on peut faire ?<br/>
 
Signaler et se mettre à plusieurs pour bloquer, signaler tout ça.<br/>
 
Exactement ! Le signalement.<br/>
 
Sans être victimes, ils risquent tous d'être un jour témoins de cyberharcèlement.<br/>
 
Chaque personne sur Internet aurait un code unique. Cette identité numérique permettrait de remonter jusqu'à l'auteur de l'infraction en ligne, uniquement sur demande de la justice.<br/>
 
Sécuriser et réguler l'espace numérique, c'est très vaste comme ambition !<br/>
 
L'insécurité que nos concitoyens rencontrent chaque jour sur Internet sape leur confiance dans le numérique. Tous les Français sont concernés, notamment les plus vulnérables, je pense à nos enfants, et les plus fragiles.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Jean-Noël Barrot, pour apprendre déjà à mieux vous connaître, quel homme connecté êtes-vous ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Je crois que, comme tout le monde, j'ai invité le numérique dans mon quotidien. Je crois que la question que nous devons nous poser, à chaque étape de notre vie, c'est comment faire en sorte que le numérique améliore notre quotidien, c'est vrai à titre individuel, c'est vrai aussi dans nos vies professionnelles, dans les responsabilités qu'on exerce ou dans des responsabilités politiques. Dans le ministère qui m'a été confié, c'est la question qu'on se pose au quotidien : comment cet outil qu'est le numérique, comment cette technique, cette technologie-là, peut rendre le monde meilleur ? Ce n’est pas si simple, il faut trouver les bonnes solutions et il faut faire en sorte que chacun puisse en bénéficier.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Je vois justement, à côté de vous, un smartphone, c'est quoi comme smartphone ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>C’est un Samsung.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>C'est un Samsung. Diriez-vous que vous êtes plutôt quelqu'un de connecté ? Êtes-vous présent sur les réseaux sociaux ? Vous considérez-vous comme, je ne sais pas, un peu geek ou, au contraire, essayez-vous d'avoir une distance par rapport à cet outil ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Par la force des choses, je suis amené à travailler avec des outils numériques. Je suis chercheur de profession, mon outil de travail c'est un ordinateur, des logiciels de statistique et d'économétrie. Depuis que je me suis engagé en politique, les réseaux sociaux étant devenus, au fil des années, des espaces d'expression eh bien, évidemment, j'ai commencé à les utiliser pour m'exprimer et pour travailler.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Mais vous ne vous en sentez pas dépendant pour autant. Vous ne faites pas partie des gens qui se disent « j'y passe un peu trop de temps, il faut que je m'accorde un petit peu certaines pauses qui pourraient être salutaires » ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Je crois qu'il est toujours bon de faire des pauses, de faire des jeûnes de temps en temps pour se recentrer sur l'essentiel, c'est vrai quels que soient les outils qu'on emploie, quelle que soit son activité professionnelle, et c'est vrai des outils numériques.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Votre nomination au ministère en juillet 2022, je l'ai dit, a pu surprendre certains parce que vous aviez peut-être un profil un peu moins expert du numérique que certains de vos prédécesseurs, Cédric O, Mounir Mahjoubi plus longtemps avant ou même Axelle Lemaire si on remonte. Qu’est-ce que vous diriez du niveau de connaissance de nos élus sur les enjeux du numérique ? On a pu constater pendant un certain temps, enfin moi qui m'intéresse à cette question depuis quelques années maintenant, que parfois nos élus n'étaient pas toujours très conscients, très avertis, très informés, par rapport aux enjeux technologiques qui sont d’ailleurs, parfois, des enjeux complexes à comprendre on est d'accord, mais on pouvait sentir une forme de déconnexion par rapport à ces outils. Avez-vous l'impression que c'est en train de changer ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>C'est progressivement en train de changer, mais il reste des progrès à faire pour mieux maîtriser ce qui, dans le numérique, est vecteur d'épanouissement et d'émancipation de ce qui est vecteur plutôt d'aliénation ou de dépendance.<br/>
 
Le numérique a été, pendant longtemps, perçu comme un progrès qui allait, certes, provoquer quelques inconvénients qu'il fallait essayer de minimiser ou de résoudre, mais un consensus s'est globalement formé sur cette idée-là, ce qui, peut-être, a découragé certains responsables politiques de se saisir pleinement de ce sujet dans sa complexité.<br/>
 
Je crois qu’à l'avenir, avec le développement de la société de l'économie numérique, mais aussi avec l'apparition d'un certain nombre des inconvénients associés à la généralisation de cette technologie, les politiques vont se saisir de cette question-là et des clivages vont progressivement se former avec, d'un côté, ceux qui voudront toujours plus de technologie, de progrès technologique, de numérique autour de nous et dans nos vies, et ceux qui, au contraire, très méfiants des inconvénients en matière de coût pour l'équipement, la cybersécurité, etc., en matière d'empreinte environnementale ou en matière d'impact sur le débat public ou sur la sécurité du quotidien verront dans le numérique une technologie utile, mais dont il faut dépendre au minimum et non pas à maxima.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>On parle effectivement beaucoup de démocratie, les enjeux de manipulations d'opinion, etc.
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Je crois, au contraire, qu'il faut adopter une approche de ces questions-là, en matière de politique publique, qui s'écarte de l'une et l'autre de ces deux postures.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Sortir d'une forme de manichéisme.
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Oui et discerner à tout moment ce qui, dans les technologies numériques, est, une nouvelle fois, vecteur d'épanouissement de la personne humaine de ce qui peut être vecteur d'aliénation, de dépendance, de fragilité.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Précédemment, justement, concernant votre poste, c'était un secrétariat d'État là, vous êtes ministre chargé du Numérique. Est-ce aussi un signal politique qui est envoyé par rapport à ces prérogatives qui s'élargissent ? Est-ce une manière de dire, finalement, que le numérique est un enjeu crucial et qui transverse, d'ailleurs, de nombreuses problématiques ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Un enjeu de plus en plus important, avec la nécessité de conquérir une forme d'autonomie en matière numérique, c'est l'objet de la politique que je conduis pour soutenir l'innovation, les entreprises de forte croissance dans notre pays susceptibles de développer, en France et en Europe, ces technologies que nous mettons entre nos mains ; c’est un enjeu de sécurité, à la fois de santé publique, mais aussi d'ordre public et c'est tout l'effort de régulation qui a été initié, notamment par la France et le président de la République, au niveau européen et que nous poursuivons avec ce projet de loi vous évoquiez en introduction ; c'est aussi un enjeu de démocratisation puisqu'il y a, aujourd'hui, un tiers de nos concitoyens qui sont éloignés du numérique soit parce qu'ils ne sont pas internautes soit parce qu'ils ne sont pas compétents, ils ne se sentent pas compétents, et c'est absolument inacceptable. Il nous faut, évidemment, combler ces fractures pour éviter qu'elles ne viennent aggraver ou creuser les inégalités entre les Français.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Cette fracture numérique est un thème qui vous est cher, vous avez déjà beaucoup travaillé dessus. Pour terminer sur ce côté périmètre, pourquoi pas directement un ministère du Numérique qui ne soit pas, comme ici, rattaché à Bercy, mais directement à Matignon. Ça a d'ailleurs été le cas d'une proposition de certains candidats.
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Ça pourrait l'être. Il est vrai qu'on a déjà pas mal de travail, mais, à l'avenir, il pourrait être envisagé de rendre ce ministère encore plus interministériel en le plaçant directement sous la tutelle de Matignon et de la Première ministre. Ceci étant dit, je dois dire qu'avec Bruno Le Maire comme ministre de tutelle je travaille dans les meilleures conditions possible.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>N'est-ce pas, justement, un peu trop restrictif d'imaginer le numérique dans le giron du ministère de l'Économie ? C'est déjà une forme d'orientation, ça met peut-être un peu de côté ses autres aspects que vous avez d'ailleurs évoqués : les aspects sociaux, les aspects philosophiques. On voit que le numérique irrigue toute notre société.
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Ce n'est pas ce que je ressens au quotidien. J’ai la pleine confiance de Bruno Le Maire pour conduire ces politiques qui, il est vrai, ont parfois une dimension sociale, parfois une dimension régalienne comme celles qui ont une dimension plus proche, je dirais, des objectifs de politique publique de Bercy que sont le soutien de l'innovation, des entreprises, etc.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>On va justement commencer à entrer en détail sur cette loi SREN. Elle est large, on a donc choisi quelques points qui nous semblent peut-être les points les plus pertinents : celui de l'accès aux sites pornographiques sur la question des mineurs, donc réguler cet accès, interdire cet accès aux sites pornographiques aux mineurs. Il faut donc trouver des outils de vérification d'âge, qui respectent nos libertés. On a vu que d'autres pays ont tenté cette expérience avant la France, la Grande-Bretagne et l’Australie, les deux ont rebroussé chemin. Qu'est ce qui ferait que la France réussirait là où les autres ont échoué ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>D'abord, ce n'est pas tout à fait vrai que le Royaume-Uni et l’Australie ont rebroussé chemin.<br/>
 
Le Royaume-Uni a adopté le 19 septembre dernier, c'est-à-dire un tout petit mois avant l'adoption par l'Assemblée nationale du projet de loi que je porte, une loi qui prévoit exactement les mêmes dispositions que celles que j'ai inscrites dans mon texte. Quelles sont ces dispositions ? Elles partent du constat qu'il y a aujourd'hui, dans notre pays, deux millions d'enfants qui sont exposés chaque mois aux contenus pornographiques, à des âges extrêmement précoces puisqu'à 12 ans c'est la moitié des petits garçons, dans notre pays, qui sont exposés à ces contenus, chaque mois, avec des conséquences dramatiques.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Quand vous dites « petits garçons » c'est strictement « petits garçons » ou « petits garçons et petites filles » ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Pour les petites filles, la proportion est un peu moins grande, néanmoins elle est spectaculaire puisque on est de l'ordre du tiers, mais pour les petits garçons, à 12 ans c'est la moitié, chaque mois, avec des conséquences dramatiques pour leur santé, pour leur développement affectif. Si nous voulons éviter de sacrifier une nouvelle génération qui va subir les conséquences de cette exposition précoce à des contenus évidemment inappropriés, parfois aussi extrêmement violents.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Pardon ! « Sacrifier une génération », ce sont tout de même des termes qui sont forts !
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>C'est vrai, mais la littérature scientifique s'est accumulée pour démontrer que l'exposition précoce de nos enfants à la pornographie a des conséquences de long terme sur leur relation à l'autre, sur leurs pratiques sexuelles, sur leur santé mentale. Il y a donc, de toute évidence, le risque qu'une génération se trouve sacrifiée si nous ne faisons rien.<br/>
 
C'est la raison pour laquelle, comme le Royaume-Uni, nous avons décidé de confier à l'Arcom, qui est le gendarme de l'audiovisuel et des médias, le pouvoir d'ordonner le blocage des sites pornographiques qui ne vérifieront pas l'âge de leurs utilisateurs. Et nous avons proposé que l'Arcom rédige un référentiel, c'est-à-dire une liste d'exigences techniques minimales pour que cette vérification de l'âge soit à la fois fiable, qu'elle permette effectivement de discriminer les adultes des enfants, contrairement à ce qui existe aujourd'hui où une simple question est posée « Avez-vous plus ou moins 18 ans ? », évidemment que ça n'est pas fiable ! Et puis, d'autre part, qu'elle garantisse le respect des données personnelles et de la vie privée.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Oui, puisqu'il me semblait que c'était cela qui avait bloqué quand même.<br/>
 
Quand vous dites que ce n'est pas tout à fait vrai sur la Grande-Bretagne et l’Australie, ça veut dire qu'elles continuent à mettre en place, qu’elles vont continuer à mettre en place ces outils pour leur combat à faire fermer les sites pornographiques ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Absolument. Le Royaume-Uni a adopté un texte qui est quasiment identique à celui que nous sommes en train d'adopter en France et d'autres pays européens, j'ai pu le constater lundi dernier en Espagne où je rencontrais mes homologues, sont très intéressés par la piste ouverte par la France et souhaitent s’y engager à leur tour.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>L'enjeu, on le comprend, c'est que s’il faut vérifier l'âge des utilisateurs des sites pornographiques, cela veut dire qu’un adulte, pour prouver qu'il est adulte, doit par exemple donner des papiers d'identité et c'est là où ça pose des problèmes concernant la préservation de nos libertés et de circulation au sein de l'espace numérique qui est, je l'ai dit en introduction, dans les fondamentaux de notre culture du numérique.
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Absolument. Imposer un contrôle d'identité à l'entrée des sites pornographiques serait une obligation démesurée par rapport à la privation de liberté numérique que cette mesure suppose. C'est la raison pour laquelle, dans ses exigences techniques minimales que l'Arcom va publier, elle précisera un certain nombre de règles de base, d'abord, pour que cette vérification soit fiable et qu'elle soit respectueuse des données personnelles et de la vie privée.
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>Pardon, comment sera-t-elle respectueuse ?
 
 
 
<b>Jean-Noël Barrot : </b>Elle indiquera aux sites pornographiques, qui peuvent proposer diverses solutions qui répondent à ces critères minimaux, au moins une solution répondant à ce que l'on appelle le double anonymat. Qu'est-ce que c'est le double anonymat ? C'est un système qui garantit que l'organisme qui vous fournit une preuve anonyme de votre majorité – ce peut être votre banque, ce peut être votre opérateur télécoms qui va transférer sur une application téléchargée sur votre téléphone une preuve anonyme de majorité – ne sait pas ce pour quoi elle sera utilisée. Et le site réservé aux adultes qui va solliciter de votre part, au moment de votre connexion, la preuve anonyme de majorité, ne saura pas qui vous êtes.<br/>
 
Autrement dit le fournisseur de la preuve anonyme de majorité est aveugle sur la destination de cette preuve et le site pornographique est aveugle sur l'identité de l'utilisateur. Voilà pourquoi on appelle cela un double anonymat.<br/>
 
L’Arcom demandera aux sites à ce qu'au moins une des solutions proposées par les sites respecte ce principe-là qui garantit la protection absolue de la vie privée, mais libre aussi aux sites qui le souhaitent de proposer d'autres solutions un peu moins protectrices et libre aux utilisateurs de choisir la solution qui leur va.
 
 
 
==16’ 04==
 
 
 
<b>François Saltiel : </b>S’il faut photographier
 

Dernière version du 16 novembre 2023 à 16:44


Publié ici - Novembre 2023