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Territoire Numérique Libre. Vous connaissez les grands critères~: stratégie et mutualisation~; bonnes pratique numériques~; logiciels et systèmes libres~; communication et écosystème libre~; gestion des données. Ce qui est intéressant dans un label, il y a évidemment la portée communication, etc., mais il y a aussi une structure qui s’interroge et puis l’accompagnement. Je ne connais pas exactement bien les rouages, mais je sais que ça a été fait très sérieusement, les critères ont été bien pesés, avec différents niveaux, il y a un jury, ce n’est pas uniquement l’ADULLACT qui va choisir les lauréats, etc., et je trouve ça très intéressant.


Territoire Numérique Libre.
Donc qu’est-ce qui est commun à ce que pourrait être un établissement scolaire labellisé École Numérique Libre, qu’est-ce qui est un peu différent~?
 
Je vous disais qu’on a beaucoup de labels. Dans l’académie de Montpellier, ici, ils ont des labels numériques – label numérique école, label numérique collège, label numérique lycée –, avec quatre familles de critères~: le pilotage de l’établissement~; les infrastructures et les équipements~; le numérique en tant que levier des usages pédagogiques – c’est vraiment la spécificité des établissements~; l’accompagnement et la formation des enseignants.<br/>
On va se laisser un temps de questions, mais l’idée c’est~: que pourriez-vous attendre de l’éducation dans le cadre de votre travail~? Si, globalement, les gens étaient mieux formés ou si on avait aussi des informaticiens de talent, je pense que ça pourrait être intéressant. Je pense que dans les temps de question c’est~: que pourriez-vous attendre de l’éducation en matière de Libre, Libre éducatif au sens large~? Je suis vraiment sur trois actes~: l’acculturation, les usages et la contribution et aussi comment outiller les communautés d’enseignants qui veulent travailler ensemble, puisque quand on veut travailler ensemble et partager c’est quand même plus simple de le faire quand c’est ouvert que quand c’est fermé, je caricature mais c’est un peu ça.
 
Ce qui est intéressant avec les critères de l’Occitanie c’est que si vous avez le label, alors la région et l’académie s’engagent, notamment par la dotation gratuite d’ordinateurs portables à l’ensemble des élèves de seconde. Je peux vous dire que c’est incitatif ~! Il y a du concret, du coup ça marche~! Le label comme une sorte de médaille, j’ai envie de dire, mais là ça s’accompagne de moyens, donc c'est d’autant plus incitatif pour les personnels de direction.
 
Je ne vais vous embêter avec une liste de critères. Je vais prendre un établissement scolaire dans le Nord. Je présente mes excuses parce que ça va être des copies d’écrans de fils Twitter, pour vous montrer un peu un établissement.<br/>
Je vous parlais du professeur un peu passionné, geek, qui installe du Libre dans sa salle informatique et puis c’est tout. Là, vous allez voir que c’est quand même un projet multidimensionnel dans l’établissement, qui pourrait se rapprocher d’un établissement numérique libre non pas idéal, en tout cas qui va dans la bonne direction. J’ai été contacté.
 
D’abord c’est piloté par deux enseignants, de sciences, c’est vrai, mais avec le soutien fort de leur proviseur, on est dans un lycée, à Bruay dans les Hauts-de France. Ce sont des professeurs de NSI [Numérique et sciences informatiques], une des nouveautés de la réforme du lycée ; dans la réforme du lycée il y a l’informatique. Nous sommes un certain nombre à avoir voulu que l’informatique ne soit pas uniquement un outil transversal, mais discipline à part entière dès le secondaire. Ce professeur de NSI souligne que des élèves ont fait des projets sur du GNU/Linux avec des outils – VLC, Gimp Firefox, etc., – du Raspberry Pi aussi, vous voyez les belles boîtes, en soulignant la pédagogie inclusive.<br/>
Ils ont aussi testé des solutions pour le primaire, PrimTux qui est une distribution optimisée pour cet usage, qui arrive avec plein d’applications pédagogiques pour les enfants et qui fonctionne sur une Raspberry Pi. Sur une Raspberry Pi avec une distribution légère, il y a un beau potentiel. Ce que je trouve intéressant aussi c’est qu’ils soulignent que le Raspberry Pi consomme quand même beaucoup moins qu’une grosse boîte, une grosse machine, un gros portable. Il y a cette dimension-là, on revient à l’intervention d’hier sur la frugalité numérique.
 
On invite l’équipe pédagogique à tester tout ça, à en parler à se former, donc la professeure de philo, professeur de lettres, donc une dimension intéressante, on n’est pas tout seul.
 
Les élèves reconditionnement les vieux ordis dans l’armoire pour les mettre en salle des profs, mais aussi pour les donner aux familles dans le besoin au moment de la crise, etc., donc chose vraiment intéressante. Mais ils se sont heurtés au serveur de l’établissement, c’est la région qui avait installé ce serveur-là, qui le contrôlait avec des solutions comme KoXo sous Windows, je ne connais pas bien, mais c’est un serveur Windows, c‘était compliqué, ils n’avaient pas la main dessus, donc ils ont un peu remué ciel et terre pour avoir davantage de liberté, d’autonomie au sein de leur établissement, notamment en ce qui concerne ce serveur. Ils ont vraiment envoyé des lettres partout, c’est d’ailleurs comme ça que je les ai connus, notamment à un député, Philippe Latombe, qui a été rapporteur d’une étude, un rapport sur la souveraineté. Le député Latombe a parlé de la souveraineté, toujours est-il qu’ils l’ont mobilisé et que Philippe Latombe a fait un communiqué de presse que je trouve assez intéressant~: je vais vous lire ce que j’ai souligné~: «~Alors qu’une tendance avait été amorcée dans ce sens dans les établissements scolaires, s’est développé depuis quelques années, sous couvert de rationalisation des pratiques et de limitation des coûts, la tentation pour les communes, regroupements de communes, conseils départementaux et régionaux finançant les équipements informatiques de vouloir centraliser la gestion des équipements des établissements scolaires en la confiant à leurs propres directions des systèmes d’information. Or, ces dernières s’orientent presque toutes, par ignorance et souci de facilité, vers des architectures similaires à celles déjà utilisées dans leurs administrations. En un mot, une monoculture basée sur les logiciels édités sur Microsoft.~»<br/>
 
Peut-être que ça peut vous parler. J’ai essayé de prendre des exemples qui sont convergents avec mon public d’aujourd’hui. On pourra en discuter dans les questions, si je laisse du temps pour les questions.
 
Donc me voici au ministère de l’Éducation nationale avec cette idée, en fait, de structurer et fédérer ce qui se fait déjà. Je ne suis pas du tout là pour… Ça fait 20~ans que çà et là, de manière un peu éparse, pas forcément coordonnée, il y a du Libre. Ça a commencé par les serveurs, serveurs GNU/Linux. Un petit peu structurer, fédérer, peut être valoriser. L’’Éducation nationale ce sont 800~000 enseignants à bac + 5. Vous imaginez si on arrive à les faire travailler ensemble en mode collaboratif, ces 800~000 professeurs à bac + 5 ! Ce serait extraordinaire, il y a un potentiel énorme~!
 
Je vous montre deux projets. Il y a en un auquel je suis assez attaché. J’ai ajouté ces projets-là en écoutant les uns et les autres depuis deux jours.
 
Vous savez que je pousse pour installer une force, une instance GitLab, pour les professeurs et les élèves. Pourquoi~? D’abord les forges ont évolué, la barrière d’entrée s’est abaissée et on ne partage pas que du langage de programmation en fait. On partage maintenant du texte avec du Markdown, etc.<br/>
Là vous avez un prof de philo – j’aime bien prendre des exemples aussi hors prof de sciences et c’est aussi un petit clin d’œil, évidemment, à votre président – avec un cours structuré en mode site web, etc. Le cours est ce qu’il est, mais il est sur GitHub, en tout cas il est sur une forge et le professeur peut inviter à commiter avec lui, <em>pull requests</em>, <em>issues</em>, ce que vous voulez, vous voyez ce que je veux dire. Imaginez que les enseignants aient de plus en plus d’aisance avec ce genre d’outil~! On peut vraiment collaborer de manière fine. Après c’est sur GitHub, donc serveur américain, by Microsoft, RGPD, etc. C’est aussi pour ça que je pousse pour qu’on ait notre forge souveraine, à nous.
 
D’autres usages pour montrer un peu comment les enseignants peuvent s’approprier une forge de façon vraiment différente de celle des développeurs. Vous avez aussi du texte et ce texte comme ça, dans un environnement avec du Node.js, etc., mais, ensuite, il n’y a plus qu’à pousser et ça donne une carte mentale~: texte, carte mentale.<br/>
Vous voyez en haut un petit code, vous le glissez à l’intérieur même de l’URL, du texte que vous mettez dans l’URL, et hop~!, vous avez un petit quiz très rapidement, tout ça à partir de texte, donc c’est vraiment intéressant. <br/>
Pour l’instant, tous les enseignants ne sont pas familiarisés avec cet outil, mais je constate qu’il y en a et ce serait dommage de ne pas les fédérer, structurer, leur proposer un hébergement. Et si on est tous ensemble sur une même instance, on peut aussi découvrir les projets de uns et des autres, etc.
 
On peut aussi faire tourner, exécuter du code, des scripts Python, etc. Ce qui est intéressant également c’est que c’est du texte, c’est du hors connexion, c’est aussi une logique de «~on en va pas réinventer la roue~», donc tout ça reparle au numérique responsable.
 
Vous avez aussi des élèves. Aujourd’hui on a à la spécialité NSI, Numérique et sciences informatiques, quatre heures en première et six heures en terminale par semaine, pour ceux qui suivent, sur deux ans, c’est solide, en plus ce sont des pédagogies de projet. Donc vous avez des élèves qui font des trucs vraiment intéressants. Là vous avez quatre élèves, quatre contributeurs, qui sont aussi sur GitHub, malheureusement, dans un projet Pytris, ce n’est pas mal de faire un Tetris à ce niveau, à 16/17~ans, en plus on peut s’aider de tout Internet, donc c’est magique.
 
Je voulais pointer la forge, puisqu’on a parlé des forges en tout début de congrès, et puis un projet dont vous avez entendu parler, qui s’appelle apps.education.fr, qui me semble intéressant, qui est d’ailleurs une sorte de chaton de l’Éducation nationale. On va prendre des briques, pas forcément 100~% libres, mais majoritairement <em>open source</em>, pour proposer quelque chose d’intégré – c’est important aussi que l’authentification soit unique, c’est un vrai enjeu –, un ensemble de services où on a identifié des solutions libres qui fonctionnent, on les intègre dans un portail, par exemple BigBlueButton, que vous connaissez peut-être ou certainement.
 
Ce qui est intéressant avec BigBlueButton, c’est que non seulement on favorise l’utilisation, mais, et c’est nouveau et franchement je suis content d’arriver au ministère à ce moment-là, on contribue au développement de BigBlueButton. Cette année on a vraiment fait tout un retour d’expérience. On a demandé aux enseignants, aux élèves, de nous dire ce qui va, ce qui ne va pas, ce qu’ils souhaiteraient, etc. On a listé les priorités et on va financer, on est en train de le faire, on finance de l’ajout de fonctionnalités en relation avec la gouvernance du logiciel, ce qui n’est pas évident pour un ministère qui est habitué aux marchés publics, à des trucs hyper-cadrés~; là il faut bosser avec une communauté. En plus, chaque logiciel libre a sa propre gouvernance, ça peut être très communautaire ou ça peut être relativement fermé pour celui qui va <em>committer</em> à la fin, dans le <em>core</em> comme on dit. Là, en l’occurrence, c’est une boîte canadienne qui pilote le logiciel.<br/>
C’est intéressant de travailler ainsi. On se retrouve avec un ministère qui contribue, <em>public money, public code</em>, comme on dit. On contribue parce que ça répond à nos besoins et c’est versé dans le pot commun, donc c’est une belle idée. Ça c’est avec BigBlueButton.
 
Pour l’instant, ce portail est encore en phase de rodage, il sera annoncé officiellement à la rentrée. C’est pour tous les enseignants, pour les 800~000 profs et vous rajoutez les agents, donc c’est 1 million 200~000 agents auxquels on offre ce service.
 
Il y a aussi un espace Nextcloud, donc on offre aux enseignants un <em>drive</em>. Vous connaissez Nextcloud j’imagine, donc un dépôt de fichiers qui est couplé à de la collaboration avec LibreOffice Online, ce n’est pas Collabora, c’est LibreOffice Online. Donc vous avez des enseignants qui sont tout contents, on leur offre 100 gigas et hop~!, ils partagent.
 
Un blog aussi, donc chacun peut écrire des articles.
 
Ce n’est pas rien tout ça, c’est à l’échelle nationale et les enseignants n’ont qu’à pousser un bouton pour partager, pour rédiger, pour publier. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de modération à priori. Dans l’Éducation nationale je peux vous dire qu’il y a d’habitude un circuit~: il faut que le truc pédagogique soit tamponné par l’inspecteur, machin, etc. Là, tout d’un coup, on va leur faire confiance et ils vont partager. Évidemment, plein de questions se posent~: qu’est-ce qu’on partage~?, l’indexation, le contrôle qualité, etc. N’empêche que pour la première fois, à cette échelle-là, les enseignants ont différents canaux pour déposer, pour partager, même pour collaborer. Il y a aussi un pad, on leur propose un pad et puis la collaboration via LibreOffice Online. C’est vraiment nouveau, c’est vraiment intéressant.
 
Aussi un espace pour partager les vidéos sur PeerTube, alternative libre à YouTube. Peertube m’est cher parce que c’est Framasoft qui est derrière, c’est Framasoft qui pilote PeerTube, donc on se retrouve avec le ministère qui travaille avec Framasoft, qui participe au développement. La dernière version de PeerTube c’était avec des fonctionnalités d’édition de vidéo, c’est-à-dire pour ajouter un insert avant un <em>cut</em>, avant, après, on peut ajouter une petite image et ça a été financé par nous en collaboration avec Framasoft, donc la boucle est un peu refermée pour moi.
 
La question que je me pose aussi c’est comment me positionner, comment faire avancer tout ça.
 
On a organisé la première Journée du Libre Éducatif à Lyon, le premier avril dernier, François Élie, Nicolas Vivant, quelques autres aussi, quelques-uns parmi vous y étaient. Mon directeur a fait un vibrant discours, en commençant d’abord par réexpliquer ce qu’est le logiciel libre, les quatre libertés, etc., disant que le Libre et l’éducation sont à 200~% compatibles, etc., quelque chose d’impressionnant, que je voulais vous faire écouter, tant pis. Ça mesure un peu le chemin parcouru. Ce sont des paroles, il y a les paroles et les actes, comme on dit. Prudence~! L’histoire nous a appris que~! Il n’empêche que c’est vraiment une séquence favorable. Ça fait 20~ans qu’on est là, ça finit par infuser. Si mon directeur a pu faire un tel discours, c’est un peu grâce au travail de nous toutes et tous, notamment l’ADULLACT.
 
Merci beaucoup pour votre attention et je suis à l’écoute de vos questions.
 
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Version du 21 décembre 2022 à 10:08


Titre : Conférence Alexis Kauffmann - Congrès ADULLACT 2022

Intervenants : Alexis Kauffmann -

Lieu : Montpellier - Congrès ADULLACT 2022

Date : 17 juin 2022

Durée : 56 min 33

Vidéo

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

C’est vraiment un plaisir et un honneur d’être parmi vous.
Pour la petite histoire, comment ça a commencé.
Je suis arrivé au ministère de l’Éducation nationale, rue de Grenelle, en septembre, j’y reviendrai par la suite. En arrivant, la première chose c’est rencontrer différentes personnes, notamment l’ADULLACT. J’ai rencontré Pascal qui m’a parlé du label Territoire Numérique Libre en me disant qu’il y a des écoles qui ont postulé, une ou deux, et évidemment ce n’est pas prévu pour les écoles, ça ne rentrait pas les cases. Je me suis demandé ce que ça pourrait être que rentrer dans les cases pour une école, ce que pourrait être un label École Numérique Libre. Ça a commencé comme ça.
J’étais un peu naïf en arrivant au ministère et je pensais que créer un label École Numérique Libre ça pouvait être jouable. Après, j’ai découvert qu’il y a pléthore de labels à l’Éducation nationale, sur le développement durable, l’égalité filles-garçons, les langues, il y a plein de langues,~??? [1~min 15] international, etc., et que le processus de labellisation prendrait à peu près deux/trois ans, à mon avis, au ministère. Donc, pour l’instant, un label École Numérique Libre ça reste un peu un sujet d’étude, comme on dit, c’est plutôt pour discuter de ce que ça pourrait être.
En tout cas ce qui nous semble intéressant c’est que ce soit à l’échelle de l’établissement scolaire. J’ai vu des professeurs passionnés, faire des choses passionnantes dans leur salle informatique, mais c’était vraiment restreint à leur salle et puis, quand ils s’en allaient, tout partait également avec eux, tout ce qu’ils avaient monté à base de logiciels libres.

Puisqu’il faut meubler, je vais faire juste un petit peu d’histoire.
Quand on célèbre ses 20~ans c’est évidemment pour se projeter dans l’avenir, j’imagine que c’est ce que vous avez hier en assemblée, mais c’est également un petit aussi le temps de regarder en arrière, de faire le bilan.

Moi je suis aussi arrivé dans le Libre il y a 20~ans. C’est intéressant de voir ce qui a pu se dire ou s’écrire à ce moment-là. Je ne vais pas vous embêter, mais j’ai découvert le logiciel libre avec un article d’un professeur de l’université de littérature comparée au Québec, Jean-Claude Guédon, qui avait écrit une lettre ouverte à sa ministre de l’Éducation au Québec, en 1998, en lui suggérant d’informatiser les écoles avec Linux, disait-il, nous seulement dans l’outillage mais également comme objet d’étude, tout ce que ça pouvait apporter aussi aux élèves parce qu’on pouvait en soulever le capot, qu’on était potentiellement contributeur, auteur, autonome, etc.
Si vous lisez, je ne vais pas le lire, en tout cas en 1998, «~en utilisant le logiciel libre non seulement on effectuait des économies spectaculaires sur le matériel, non seulement on se libère des logiques que tentent d’imposer les grandes multinationales – les grandes multinationales de l’informatique étaient déjà là –, mais, en plus on se met en relation avec un des foyers les plus vivants de la société qui est en train de se créer, celle de l’intelligence distribuée – le terme est un peu tombé en désuétude, mais on voit bien ce que c’est –, qui ne fait que commencer à faire sentir ses effets et ils vont être malheurs~». Wikipédia ou Netflix n’étaient pas là, en tout cas dans c’était en germe son esprit. «~De grandes surprises attendent les instances politiques et commerciales qui ne vont pas bien en saisir les enjeux~». On est bien d’accord~!

Quand j’ai découvert ce texte, et que j’ai commencé, en tant que jeune professeur de mathématique, avec le numérique qui arrivait dans les années 90, tout d’un coup j’ai découvert qu’il y avait une distinction entre logiciel gratuit, libre, etc. Cette sorte de révélation m’a passionné, «~bon sang, bien sûr~», c’est une lumière qui s’allume comme rarement dans sa vie j’ai envie de dire. Je me suis dit «~il y a quelque chose qui va bien au-delà de l’informatique, Free Software, Free Society, comme dirait l’autre. Je ne vais pas dire que c’est trop important pour être laissé aux seuls informaticiens, en tout cas les informaticiens n’avaient pas forcément le temps de communiquer, de faire de la pédagogie, etc., et puis, en théorie, c’est le cœur de métier des enseignants. Donc voilà comment Framasoft a commencé.

Je l’ai appris plus tard, mais au même moment, en 1998, premier accord-cadre entre une association, l’Aful [Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres], l’Association francophone des utilisateurs – à l’époque ce n’était que de Linux et après ils ont ajouté le logiciel libre, c’est aussi une évolution intéressante dans le temps – et le ministère. Je trouve que le préambule est intéressant~: «~l’Aful apporte son soutien en développement de l’usage du numérique auprès de l’ensemble des établissements d’enseignement français et des enseignants en ce qui concerne l’emploi des ressources informatiques libres et la disponibilité des ressources commerciales liées à l’informatique libre.~». Je trouve que c'est intéressant de le libeller comme ça. Par rapport à ce que vous faites, ça m’a frappé et on est en 1998.

Framasoft a aussi fêté ses 20~ans. Je ne sais pas comment vous avez daté votre histoire, c’est peut-être la création de l’association~? Ça doit être ça pour l’ADULLACT. Comme ça a démarré d’abord avec un projet personnel quand j’étais dans un collège à Bobigny, c’est le dépôt du nom de domaine, framasoft.net en l’occurrence, c’était en novembre 2001. On a fêté les 20~ans il n’y a pas très longtemps.

Voilà à quoi ressemblait Framasoft au début. Je suis aussi allé rechercher à quoi ressemblait l’ADULLACT au début, ça m’a amusé.

On a «~des logiciels libres par tous et pour tous~», c’est le slogan. Déjà François nous fait un article «~Les logiciels libres pour les hommes libres~» avec conviction et emphase comme on le connaît. C’est intéressant parce que je vois, par exemple, «~ce qui est à moi n’est pas toujours pour moi~», dit François, c’est vrai que c’est intéressant. Et puis sur la droite, si vous voyez, il y a écrit «~fichier propriétaire attaché~», c’était il y a 20~ans. Moi, depuis que je suis au ministère, cette problématique des fichiers propriétaires attachés n’a pas disparu~; je peux vous dire que les fichiers attachés .docx, c’est vraiment mon cauchemar~! C’est enregistré~? Ce n’est pas grave~!

L’évolution de Framasoft est peut-être aussi intéressante dans le sens où c’est d’abord un annuaire de logiciels libres et gratuits pour Windows, ça commence comme ça. Après ce n’est plus qu’un annuaire de logiciels libres pour Windows, après ce n’est plus qu’un annuaire de logiciels libres et puis ça devient un annuaire collaboratif, c’est-à-dire que je ne suis plus tout seul, ça devient une petite communauté.

Je vous ai mis cette slide d’abord parce que je suis très immodeste et pour montrer que j’ai fait une conférence TEDx, mais vous voyez l’image, il y a un pingouin qui visite un musée, voit un téléphone filaire qui, évidemment n’est plus. À l’époque on pensait que Windows allait peut-être rejoindre rapidement le musée~; ce n’est pas le cas aujourd’hui, mais c’est intéressant.

J’ai aussi rajouté une slide en retrouvant Richard Stallman il y a deux jours, je ne l’avais pas vu depuis très longtemps. Ce TEDx c’était il y a une dizaine d’années à Genève. Petite anecdote, les conférences TED sont très normées. On se retrouve la veille, on répète les uns devant les autres, c’est quasiment du texte appris par cœur, dix minutes~; c’est toujours en mode projet porté par une personne, entre story stelling et projet, mais surtout, il faut des slides, une dizaine de slides, pas plus pas moins. Et Stallman n’a jamais fait une conférence avec des slides. C’est la seule et unique fois où il a dû faire une conférence avec des slides~! Donc il arrive et il n’a pas de slides. L’organisation, l’association, ça se passe en Suisse, lui trouve deux jeunes graphistes, designers, etc. La veille au soir je les vois, ils sont dans une pièce~; Stallman dirige, dit «~voilà ce que je voudrais~». À un moment donné, je vois qu’il part dans une colère folle, j’étais loin, moi-même j’étais en train de préparer, je n’ai pas suivi, mais je vois qu’il s’énerve. Il ne faut jamais énerver Stallman, vous le savez bien~! Je rentre, je me couche, je savais que j’avais une grosse journée. Je fais mon intervention et Stallman intervient juste après moi. Je vous explique pourquoi il s’est énervé, parce que quand il a parlé de non pas Linux, évidemment, de GNU/Linux, regardez ce que ça donne~: ça c’est GNU/Linux selon Richard Stallman [GNU énorme, Linux tout petit, NdT] et, en fait, les jeunes avaient 50~% GNU et 50~% Linux, ce qui avait énervé Stallman. L’OS libre selon Stallman, voyez la place de GNU et la place de Linux, je trouve ça assez amusant.

Framasoft donc annuaire. On a ensuite senti rapidement que ça allait se déplacer dans le cloud, donc attention aux données personnelles. Il y a eu l’étape de ce qu’on appelle «~Dégooglisons Internet~», il y a une dizaine d’années, en posant des services web alternatifs. Au départ on prenait du Libre existant, Etherpad/Framapad, etc., et on montrait, en les posant directement, que ça pouvait être intéressant, utile. En fait on posait des services vitrines avec l’idée que les gens allaient s’en emparer. Finalement les gens ne s’en sont pas forcément emparé. Comme on a posé une trentaine de services alternatifs à d’autres services, on est aussi devenu une grosse machine. Ensuite est arrivé le moment de dire qu’on voulait simplement que les gens s’en emparent, les installe et ça ne s’est pas fait. On a une trentaine de services, on n’a pas les capacités pour. Après il y a eu le mouvement quasiment de «~Déframasoftisons Internet~». Je ne sais plus dans l’association, mais aujourd’hui c’est vraiment la logique des chatons, on re-décentralise, l’image c’est souvent l’archipel. Les chatons sont donc des structures qui vont installer les services – PeerTube, Nextcloud, etc. – pour retrouver un peu de décentralisation.

L’évolution est intéressante~: un annuaire, ensuite un service web et puis on re-décentralise.

En tout cas je me suis fait connaître d’abord parce que, évidemment, j’étais dans l’Éducation, parce que ayant fondé Framasoft, l’ayant présidée, etc.
Il y a eu toujours eu beaucoup d’enseignants à Framasoft, on a souvent frappé à la porte du ministère, d’ailleurs on nous a parfois reçus~: «~Oui, c’est intéressant ce que vous faites, on vous écrira~», en gros c’est un peu ça. Quand même peu d’écoute, ce qui fait que du coup, je n’y étais plus, à un moment donné l’équipe s’est un peu énervée et a écrit un article assez lapidaire «~Pourquoi Framasoft n’ira plus prendre le thé au ministère de l’Éducation Nationale~», qui a fait beaucoup de bruit, certains s’en souviennent encore au ministère. Donc des relations pas toujours faciles entre l’association, le Libre en général, et le ministère de l’Éducation nationale.

Toujours est-il qu’il y a eu une énième concertation. À la suite du premier confinement, où il y a une quelques ratés techniques chez nous à l’Éducation, je ne reviens pas là-dessus et, pour un petit peu calmer les esprits, c’est souvent la grande concertation. Ça ne débouche pas forcément sur grand-chose, parfois ça peut-être pour noyer le poisson, mais là non, en l’occurrence. En tout cas, il y en a qui se sont exprimés, beaucoup d’enseignants du terrain ont souhaité qu’on utilise davantage de logiciels et ressources libres. Parmi les 40 propositions qui émanaient de cette concertation, qui s’appelait États Généraux du Numérique, il y en a une, texto, c’§était «~favoriser l’utilisation de logiciels et ressources éducatives libres~».

Dans le cadre de la mise en action on m’a contacté, j’étais en Italie à l’époque, «~Alexis, veux-tu bien…~». J’étais en fin de contrat, j’ai dit banco. Déjà, symboliquement, je trouve que c’est intéressant. Du coup me voici avec ce titre~: chef de projet logiciels et ressources éducatives libres, au sein de la structure qui pilote le numérique éducatif qui s’appelle la Direction numérique pour l’éducation. Symboliquement en soi, c’est déjà assez intéressant, c’est aussi intéressant de m’avoir pris alors que j’avais été très critique publiquement en tant que président de Framasoft, assez courageux, je dirais. Après, le problème c’est que je n’ai pas que des amis dans la structure, on ne va pas se le cacher.

J’ai une deuxième casquette, la mixité dans les filières du numérique, faire qu’il y ait davantage de filles qui s’orientent dans le numérique. Il y aurait pu avoir plus de femmes sur l’estrade pendant ces trois jours, mais je sais ce que c’est, j’organise aussi des évènements, c’est un challenge pour nous tous. Je ferme la parenthèse. Grosse digression.

14’ 33

Territoire Numérique Libre. Vous connaissez les grands critères~: stratégie et mutualisation~; bonnes pratique numériques~; logiciels et systèmes libres~; communication et écosystème libre~; gestion des données. Ce qui est intéressant dans un label, il y a évidemment la portée communication, etc., mais il y a aussi une structure qui s’interroge et puis l’accompagnement. Je ne connais pas exactement bien les rouages, mais je sais que ça a été fait très sérieusement, les critères ont été bien pesés, avec différents niveaux, il y a un jury, ce n’est pas uniquement l’ADULLACT qui va choisir les lauréats, etc., et je trouve ça très intéressant.

Donc qu’est-ce qui est commun à ce que pourrait être un établissement scolaire labellisé École Numérique Libre, qu’est-ce qui est un peu différent~?

Je vous disais qu’on a beaucoup de labels. Dans l’académie de Montpellier, ici, ils ont des labels numériques – label numérique école, label numérique collège, label numérique lycée –, avec quatre familles de critères~: le pilotage de l’établissement~; les infrastructures et les équipements~; le numérique en tant que levier des usages pédagogiques – c’est vraiment la spécificité des établissements~; l’accompagnement et la formation des enseignants.
On va se laisser un temps de questions, mais l’idée c’est~: que pourriez-vous attendre de l’éducation dans le cadre de votre travail~? Si, globalement, les gens étaient mieux formés ou si on avait aussi des informaticiens de talent, je pense que ça pourrait être intéressant. Je pense que dans les temps de question c’est~: que pourriez-vous attendre de l’éducation en matière de Libre, Libre éducatif au sens large~? Je suis vraiment sur trois actes~: l’acculturation, les usages et la contribution et aussi comment outiller les communautés d’enseignants qui veulent travailler ensemble, puisque quand on veut travailler ensemble et partager c’est quand même plus simple de le faire quand c’est ouvert que quand c’est fermé, je caricature mais c’est un peu ça.

Ce qui est intéressant avec les critères de l’Occitanie c’est que si vous avez le label, alors la région et l’académie s’engagent, notamment par la dotation gratuite d’ordinateurs portables à l’ensemble des élèves de seconde. Je peux vous dire que c’est incitatif ~! Il y a du concret, du coup ça marche~! Le label comme une sorte de médaille, j’ai envie de dire, mais là ça s’accompagne de moyens, donc c'est d’autant plus incitatif pour les personnels de direction.

Je ne vais vous embêter avec une liste de critères. Je vais prendre un établissement scolaire dans le Nord. Je présente mes excuses parce que ça va être des copies d’écrans de fils Twitter, pour vous montrer un peu un établissement.
Je vous parlais du professeur un peu passionné, geek, qui installe du Libre dans sa salle informatique et puis c’est tout. Là, vous allez voir que c’est quand même un projet multidimensionnel dans l’établissement, qui pourrait se rapprocher d’un établissement numérique libre non pas idéal, en tout cas qui va dans la bonne direction. J’ai été contacté.

D’abord c’est piloté par deux enseignants, de sciences, c’est vrai, mais avec le soutien fort de leur proviseur, on est dans un lycée, à Bruay dans les Hauts-de France. Ce sont des professeurs de NSI [Numérique et sciences informatiques], une des nouveautés de la réforme du lycée ; dans la réforme du lycée il y a l’informatique. Nous sommes un certain nombre à avoir voulu que l’informatique ne soit pas uniquement un outil transversal, mais discipline à part entière dès le secondaire. Ce professeur de NSI souligne que des élèves ont fait des projets sur du GNU/Linux avec des outils – VLC, Gimp Firefox, etc., – du Raspberry Pi aussi, vous voyez les belles boîtes, en soulignant la pédagogie inclusive.
Ils ont aussi testé des solutions pour le primaire, PrimTux qui est une distribution optimisée pour cet usage, qui arrive avec plein d’applications pédagogiques pour les enfants et qui fonctionne sur une Raspberry Pi. Sur une Raspberry Pi avec une distribution légère, il y a un beau potentiel. Ce que je trouve intéressant aussi c’est qu’ils soulignent que le Raspberry Pi consomme quand même beaucoup moins qu’une grosse boîte, une grosse machine, un gros portable. Il y a cette dimension-là, on revient à l’intervention d’hier sur la frugalité numérique.

On invite l’équipe pédagogique à tester tout ça, à en parler à se former, donc la professeure de philo, professeur de lettres, donc une dimension intéressante, on n’est pas tout seul.

Les élèves reconditionnement les vieux ordis dans l’armoire pour les mettre en salle des profs, mais aussi pour les donner aux familles dans le besoin au moment de la crise, etc., donc chose vraiment intéressante. Mais ils se sont heurtés au serveur de l’établissement, c’est la région qui avait installé ce serveur-là, qui le contrôlait avec des solutions comme KoXo sous Windows, je ne connais pas bien, mais c’est un serveur Windows, c‘était compliqué, ils n’avaient pas la main dessus, donc ils ont un peu remué ciel et terre pour avoir davantage de liberté, d’autonomie au sein de leur établissement, notamment en ce qui concerne ce serveur. Ils ont vraiment envoyé des lettres partout, c’est d’ailleurs comme ça que je les ai connus, notamment à un député, Philippe Latombe, qui a été rapporteur d’une étude, un rapport sur la souveraineté. Le député Latombe a parlé de la souveraineté, toujours est-il qu’ils l’ont mobilisé et que Philippe Latombe a fait un communiqué de presse que je trouve assez intéressant~: je vais vous lire ce que j’ai souligné~: «~Alors qu’une tendance avait été amorcée dans ce sens dans les établissements scolaires, s’est développé depuis quelques années, sous couvert de rationalisation des pratiques et de limitation des coûts, la tentation pour les communes, regroupements de communes, conseils départementaux et régionaux finançant les équipements informatiques de vouloir centraliser la gestion des équipements des établissements scolaires en la confiant à leurs propres directions des systèmes d’information. Or, ces dernières s’orientent presque toutes, par ignorance et souci de facilité, vers des architectures similaires à celles déjà utilisées dans leurs administrations. En un mot, une monoculture basée sur les logiciels édités sur Microsoft.~»

Peut-être que ça peut vous parler. J’ai essayé de prendre des exemples qui sont convergents avec mon public d’aujourd’hui. On pourra en discuter dans les questions, si je laisse du temps pour les questions.

Donc me voici au ministère de l’Éducation nationale avec cette idée, en fait, de structurer et fédérer ce qui se fait déjà. Je ne suis pas du tout là pour… Ça fait 20~ans que çà et là, de manière un peu éparse, pas forcément coordonnée, il y a du Libre. Ça a commencé par les serveurs, serveurs GNU/Linux. Un petit peu structurer, fédérer, peut être valoriser. L’’Éducation nationale ce sont 800~000 enseignants à bac + 5. Vous imaginez si on arrive à les faire travailler ensemble en mode collaboratif, ces 800~000 professeurs à bac + 5 ! Ce serait extraordinaire, il y a un potentiel énorme~!

Je vous montre deux projets. Il y a en un auquel je suis assez attaché. J’ai ajouté ces projets-là en écoutant les uns et les autres depuis deux jours.

Vous savez que je pousse pour installer une force, une instance GitLab, pour les professeurs et les élèves. Pourquoi~? D’abord les forges ont évolué, la barrière d’entrée s’est abaissée et on ne partage pas que du langage de programmation en fait. On partage maintenant du texte avec du Markdown, etc.
Là vous avez un prof de philo – j’aime bien prendre des exemples aussi hors prof de sciences et c’est aussi un petit clin d’œil, évidemment, à votre président – avec un cours structuré en mode site web, etc. Le cours est ce qu’il est, mais il est sur GitHub, en tout cas il est sur une forge et le professeur peut inviter à commiter avec lui, pull requests, issues, ce que vous voulez, vous voyez ce que je veux dire. Imaginez que les enseignants aient de plus en plus d’aisance avec ce genre d’outil~! On peut vraiment collaborer de manière fine. Après c’est sur GitHub, donc serveur américain, by Microsoft, RGPD, etc. C’est aussi pour ça que je pousse pour qu’on ait notre forge souveraine, à nous.

D’autres usages pour montrer un peu comment les enseignants peuvent s’approprier une forge de façon vraiment différente de celle des développeurs. Vous avez aussi du texte et ce texte comme ça, dans un environnement avec du Node.js, etc., mais, ensuite, il n’y a plus qu’à pousser et ça donne une carte mentale~: texte, carte mentale.
Vous voyez en haut un petit code, vous le glissez à l’intérieur même de l’URL, du texte que vous mettez dans l’URL, et hop~!, vous avez un petit quiz très rapidement, tout ça à partir de texte, donc c’est vraiment intéressant.
Pour l’instant, tous les enseignants ne sont pas familiarisés avec cet outil, mais je constate qu’il y en a et ce serait dommage de ne pas les fédérer, structurer, leur proposer un hébergement. Et si on est tous ensemble sur une même instance, on peut aussi découvrir les projets de uns et des autres, etc.

On peut aussi faire tourner, exécuter du code, des scripts Python, etc. Ce qui est intéressant également c’est que c’est du texte, c’est du hors connexion, c’est aussi une logique de «~on en va pas réinventer la roue~», donc tout ça reparle au numérique responsable.

Vous avez aussi des élèves. Aujourd’hui on a à la spécialité NSI, Numérique et sciences informatiques, quatre heures en première et six heures en terminale par semaine, pour ceux qui suivent, sur deux ans, c’est solide, en plus ce sont des pédagogies de projet. Donc vous avez des élèves qui font des trucs vraiment intéressants. Là vous avez quatre élèves, quatre contributeurs, qui sont aussi sur GitHub, malheureusement, dans un projet Pytris, ce n’est pas mal de faire un Tetris à ce niveau, à 16/17~ans, en plus on peut s’aider de tout Internet, donc c’est magique.

Je voulais pointer la forge, puisqu’on a parlé des forges en tout début de congrès, et puis un projet dont vous avez entendu parler, qui s’appelle apps.education.fr, qui me semble intéressant, qui est d’ailleurs une sorte de chaton de l’Éducation nationale. On va prendre des briques, pas forcément 100~% libres, mais majoritairement open source, pour proposer quelque chose d’intégré – c’est important aussi que l’authentification soit unique, c’est un vrai enjeu –, un ensemble de services où on a identifié des solutions libres qui fonctionnent, on les intègre dans un portail, par exemple BigBlueButton, que vous connaissez peut-être ou certainement.

Ce qui est intéressant avec BigBlueButton, c’est que non seulement on favorise l’utilisation, mais, et c’est nouveau et franchement je suis content d’arriver au ministère à ce moment-là, on contribue au développement de BigBlueButton. Cette année on a vraiment fait tout un retour d’expérience. On a demandé aux enseignants, aux élèves, de nous dire ce qui va, ce qui ne va pas, ce qu’ils souhaiteraient, etc. On a listé les priorités et on va financer, on est en train de le faire, on finance de l’ajout de fonctionnalités en relation avec la gouvernance du logiciel, ce qui n’est pas évident pour un ministère qui est habitué aux marchés publics, à des trucs hyper-cadrés~; là il faut bosser avec une communauté. En plus, chaque logiciel libre a sa propre gouvernance, ça peut être très communautaire ou ça peut être relativement fermé pour celui qui va committer à la fin, dans le core comme on dit. Là, en l’occurrence, c’est une boîte canadienne qui pilote le logiciel.
C’est intéressant de travailler ainsi. On se retrouve avec un ministère qui contribue, public money, public code, comme on dit. On contribue parce que ça répond à nos besoins et c’est versé dans le pot commun, donc c’est une belle idée. Ça c’est avec BigBlueButton.

Pour l’instant, ce portail est encore en phase de rodage, il sera annoncé officiellement à la rentrée. C’est pour tous les enseignants, pour les 800~000 profs et vous rajoutez les agents, donc c’est 1 million 200~000 agents auxquels on offre ce service.

Il y a aussi un espace Nextcloud, donc on offre aux enseignants un drive. Vous connaissez Nextcloud j’imagine, donc un dépôt de fichiers qui est couplé à de la collaboration avec LibreOffice Online, ce n’est pas Collabora, c’est LibreOffice Online. Donc vous avez des enseignants qui sont tout contents, on leur offre 100 gigas et hop~!, ils partagent.

Un blog aussi, donc chacun peut écrire des articles.

Ce n’est pas rien tout ça, c’est à l’échelle nationale et les enseignants n’ont qu’à pousser un bouton pour partager, pour rédiger, pour publier. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de modération à priori. Dans l’Éducation nationale je peux vous dire qu’il y a d’habitude un circuit~: il faut que le truc pédagogique soit tamponné par l’inspecteur, machin, etc. Là, tout d’un coup, on va leur faire confiance et ils vont partager. Évidemment, plein de questions se posent~: qu’est-ce qu’on partage~?, l’indexation, le contrôle qualité, etc. N’empêche que pour la première fois, à cette échelle-là, les enseignants ont différents canaux pour déposer, pour partager, même pour collaborer. Il y a aussi un pad, on leur propose un pad et puis la collaboration via LibreOffice Online. C’est vraiment nouveau, c’est vraiment intéressant.

Aussi un espace pour partager les vidéos sur PeerTube, alternative libre à YouTube. Peertube m’est cher parce que c’est Framasoft qui est derrière, c’est Framasoft qui pilote PeerTube, donc on se retrouve avec le ministère qui travaille avec Framasoft, qui participe au développement. La dernière version de PeerTube c’était avec des fonctionnalités d’édition de vidéo, c’est-à-dire pour ajouter un insert avant un cut, avant, après, on peut ajouter une petite image et ça a été financé par nous en collaboration avec Framasoft, donc la boucle est un peu refermée pour moi.

La question que je me pose aussi c’est comment me positionner, comment faire avancer tout ça.

On a organisé la première Journée du Libre Éducatif à Lyon, le premier avril dernier, François Élie, Nicolas Vivant, quelques autres aussi, quelques-uns parmi vous y étaient. Mon directeur a fait un vibrant discours, en commençant d’abord par réexpliquer ce qu’est le logiciel libre, les quatre libertés, etc., disant que le Libre et l’éducation sont à 200~% compatibles, etc., quelque chose d’impressionnant, que je voulais vous faire écouter, tant pis. Ça mesure un peu le chemin parcouru. Ce sont des paroles, il y a les paroles et les actes, comme on dit. Prudence~! L’histoire nous a appris que~! Il n’empêche que c’est vraiment une séquence favorable. Ça fait 20~ans qu’on est là, ça finit par infuser. Si mon directeur a pu faire un tel discours, c’est un peu grâce au travail de nous toutes et tous, notamment l’ADULLACT.

Merci beaucoup pour votre attention et je suis à l’écoute de vos questions.

33’ 05

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