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'''Éric Léandri :''' Son intérêt à lui : le ??? d' Axel Springer est la personne qui a fait l'article expliquant que maintenant il commençait à avoir vraiment peur de Google. Et quelle est sa peur ? Sa peur est très simple. Aujourd’hui vous avez chez Google une envie de verticaliser. C'est-à-dire que quand Google fait Google Shopping, il détruit des milliers de sites qui faisaient du classement pour le shopping. Quand ils font du Google Travel, ils détruisent les sites qui faisaient tout simplement du classement pour vos voyages, comme TripAdvisor ou d'autres. Donc aujourd'hui quand Google commence à faire des niches, quand Google commence à être concurrent des propres sites qui sont sur l'Internet, ça commence à être très difficile de jouer contre le numéro un.
 
'''Éric Léandri :''' Son intérêt à lui : le ??? d' Axel Springer est la personne qui a fait l'article expliquant que maintenant il commençait à avoir vraiment peur de Google. Et quelle est sa peur ? Sa peur est très simple. Aujourd’hui vous avez chez Google une envie de verticaliser. C'est-à-dire que quand Google fait Google Shopping, il détruit des milliers de sites qui faisaient du classement pour le shopping. Quand ils font du Google Travel, ils détruisent les sites qui faisaient tout simplement du classement pour vos voyages, comme TripAdvisor ou d'autres. Donc aujourd'hui quand Google commence à faire des niches, quand Google commence à être concurrent des propres sites qui sont sur l'Internet, ça commence à être très difficile de jouer contre le numéro un.
  
'''Guillaume Erner :''' C'est le premier danger de Google le fait qu'aujourd'hui sa position de monopole absolu sur Internet peut lui permettre, effectivement, de tuer tous les autres acteurs et donc d'atteindre une taille telle qu'il deviendrait, peut-être, l'une des sociétés les plus puissantes qui n’ait jamais existé. Et puis il y a la question de la vie prive. La question de la vie privée elle n'est absolument pas abstraite, elle est même très concrète. Si on fouille dans ces conditions d'utilisation des services internet, c'est-à-dire quelque chose qu'on ne fait évidemment jamais, mais que vous, vous avez fait pour nous, Stanilas Sabatier, fondateur de Mailden.
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'''Guillaume Erner :''' C'est le premier danger de Google le fait qu'aujourd'hui sa position de monopole absolu sur Internet peut lui permettre, effectivement, de tuer tous les autres acteurs et donc d'atteindre une taille telle qu'il deviendrait, peut-être, l'une des sociétés les plus puissantes qui n’ait jamais existé. Et puis il y a la question de la vie prive. La question de la vie privée elle n'est absolument pas abstraite, elle est même très concrète. Si on fouille dans ces conditions d'utilisation des services internet, c'est-à-dire quelque chose qu'on ne fait évidemment jamais, mais que vous, vous avez fait pour nous, Stanislas Sabatier, fondateur de Mailden.
  
 
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'''Stanislas Sabatier :''' Oui, par exemple si on regarde
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'''Stanislas Sabatier :''' Oui, par exemple, si on regarde les conditions générales d'utilisation de Google, vous pouvez voir marqué, noir sur blanc, « nos systèmes automatisés analysent vos contenus, y compris les e-mails. Cette analyse aura lieu lors de l'envoi, de la réception et du stockage des contenus. Vous accordez à Google une licence, dans le monde entier, d'utilisation, etc. ». On peut faire la même chose chez Yahoo. Yahoo analyse votre courrier électronique ; c'est dans les conditions générales d'utilisation de ses services.
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'''Guillaume Erner :''' Pourquoi analysent-ils notre courrier électronique ? Qu’est-ce qu'ils font de toutes ces données qui, aujourd'hui, sont récupérées par les moteurs de recherche ou les fournisseurs d'adresses e-mail ?
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'''Stanislas Sabatier :''' En fait c'est leur modèle économique. Ils vendent de la publicité, donc ils ont besoin de récolter le plus d'informations possibles sur les utilisateurs de leurs services. Donc plus ils vont fournir de services, plus ils vont pouvoir récolter de données. C'est pour ça qu'ils se lancent dans les voyages, dans ceci, dans cela. Et quel est le service qui vous donne le plus d'informations sur vos utilisateurs, eh bien c'est le mail, parce que quand vous ouvrez tous les e-mails, toutes les pièces jointes et que vous scannez tout et que vous gardez une copie de tous ces éléments-là pour pouvoir faire du profilage marketing, vous avez le plus d'informations possibles sur les personnes que vous hébergez.
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'''Guillaume Erner :''' Google gagne de l'argent et il en gagne énormément. Il gagne de l'argent en mettant de la publicité évidemment sur Internet, de la publicité qui est associée à vos goûts, c'est-à-dire que quand vous cherchez poussette une fois sur Google eh bien vous aurez beaucoup de publicités de poussettes ensuite quand vous naviguerez.
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'''Stanislas Sabatier :''' C''est même plus vicieux. C'est même plus vicieux parce qu'il suffit que vous discutiez avec vos proches, dans des e-mails, que vous disiez que untel attend un enfant, machin, que c'est bientôt son anniversaire, qu'est-ce qu'on pourrait lui faire comme cadeau, etc, comme par hasard, vous allez avoir des publicités ciblées, qui vont apparaître, et peut-être des publicités de poussettes, sans même que vous ayez pensé le mot poussette. Donc c'est ça le risque.
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'''Guillaume Erner :''' Et puis l'autre modèle économique de Google, toujours sur le même mode, on va dire, eh bien ce mode consiste à analyser ces données et à les vendre à d'autres sociétés.
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'''Stanislas Sabatier :''' À les vendre il s’en défendent, donc on ne veut pas savoir exactement ce qu'ils en font. Le problème c'est qu'on ne sait pas ce qu'ils en font et qu'ensuite le problème du numérique c'est qu'à partir du moment où vous avez d'énormes bases de données d'informations personnelles, eh bien un jour ou l'autre ces informations personnelles vont se retrouver sur Internet. Et donc ces masses de données sur vous-même, vous n'avez jamais la garantie qu'à un moment ou un autre elles ne vont pas se retrouver dans les mains d'une agence gouvernementale, d'une autre entreprise commerciale, de je ne sais qui d'autre.
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'''Guillaume Erner :''' Alors il y a donc ce risque-là avec les moteurs de recherche. On se dit que lorsqu’on achète un traitement de texte à Microsoft, on n'a plus ce risque et pourtant on ne sait pas si ce risque n'existe pas, Lionel Allorge, on ne sait pas ce qui se passe quand on utilise un traitement de texte Microsoft, expliquez-nous pourquoi.
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'''Lionel Allorge :''' Parce que ce n'est pas un logiciel libre, donc ça veut dire que c'est une sorte de boîte noire. On y entre des données, des données en ressortent, mais on ne sait pas comment c'est traité à l'intérieur et on n'a pas le droit d'aller voir. Donc le gros intérêt des logiciel libres c'est de proposer des alternatives où des gens compétents, bien sûr, pas l'utilisateur lambda, mais des gens qui ont un petit peu d'expérience informatique, vont pouvoir aller vérifier que le logiciel fait bien ce qu'il prétend faire.
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'''Guillaume Erner :''' Ce qu'il y a d'un peu effrayant, et aussi d’extrêmement utile dans l'informatique c'est que lorsque vous travaillez sur votre ordinateur vous savez ce que vous faites, mais vous ne savez pas ce que l'ordinateur fait.
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'''Lionel Allorge :''' Voilà. Sauf à installer un système complet de logiciels libres, ce qui est aujourd'hui très facile à faire et ce qui permet, à ce moment-là, de garder la maîtrise de son informatique.
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'''Guillaume Erner :''' Nous avons un auditeur au 0145247000, Félix, qui nous appelle de Paris. Bonjour Félix.
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'''Auditeur Félix :''' Bonjour France Inter.
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'''Guillaume Erner :''' Nous vous écoutons Félix, vous allez parler librement.
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'''Auditeur Félix :''' D'accord.  Alors moi ce qui m’énervait un petit peu c'est, notamment quand on circule sur Internet, avec les vidéos, c'est-à-dire que depuis quelques années, notamment via YouTube, mais d'autres, on nous impose entre quinze à vingt secondes de publicité, de messages, etc, et qu'on n'a pas moyen, à part installer des, comment dire, des extensions d’autres logiciels, de bloquer justement ces publicités. Et ça, franchement, je ne comprends pas comment on a réussi à se laisser imposer ces quinze secondes ou vingt secondes de pubs obligatoires.
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'''Guillaume Erner :''' Comment a t-on réussi à imposer cela aux internautes Stanislas Sabatier ?
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'''Stanislas Sabatier :''' Tout simplement parce que c'est un service gratuit. Il faut bien que ce service soit payé par quelqu’un. Fournir des vidéos, entretenir des serveurs de vidéos ??, c'est un coût énorme. Donc le seul moyen de financer ces services-là c'est de faire via la publicité. Si vous ne voulez pas la publicité, il faut aller vers des modèles alternatifs et pas uniquement des modèles publicitaires.
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'''Guillaume Erner :''' C'est effectivement très important d'insister là-dessus : la gratuité ça n'existe pas. Si quelqu'un vous propose un service gratuit cela signifie que quelqu'un paye.
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'''Éric Léandri :''' Non. Le monsieur en face vient de nous prouver exactement l'inverse. Linux c'est gratuit, c'est totalement gratuit et vous n’êtes pas le service. Qwant c'est gratuit, c'est totalement gratuit et vous n’êtes pas le service. Ça c'est encore la bonne nouvelle histoire pour nous servir une nouvelle sauce.
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'''Guillaume Erner :''' Alors, attendez parce que si on essaye de reprendre cette notion de gratuité, ce qui est fait avec le logiciel libre, Lionel Allorge, c'est tout simplement qu'il y a des bénévoles qui, en quelque sorte, payent de leur temps eux-mêmes pour développer ces logiciels.
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'''Lionel Allorge :''' Il n'y a pas que des bénévoles, c'est une des manières de développer le logiciel libre, mais il y a aussi beaucoup des structures qui payent des salariés, des professionnels, des informaticiens qui vont développer ces logiciels. Ça peut être des associations, ça peut être des fondations, par exemple, donc qui font appel à des dons pour financer ce qu'ils font, notamment la fondation Mozilla qui fait Firefox dont on parlait tout à l'heure, fonctionne sur ce modèle-là.
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'''Guillaume Erner :'''  Et Qwant ? Quel est le modèle économique ?
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'''Éric Léandri :''' Qwant c'est très simple le modèle économique. On va revenir il y a cinq ans en arrière, on va revenir à l'époque où rajouter des cookies, vous traquez absolument partout sur Internet.
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'''Guillaume Erner :''' Les cookies ce sont les petits programmes qui viennent se glisser sur votre ordinateur.
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'''Stanislas Sabatier :''' Ce sont des tout petits fichiers, qui viennent se mettre sur votre ordinateur, dans lesquels on va remplir tout ce que vous êtes en train de faire, au fur et à mesure de votre navigation sur Internet. Mais encore une fois le cookie, c'est encore un mauvais mot. On utilise des cookies c'est juste pour changer la couleur en haut dans Qwant, et chez nos amis de chez Google, par exemple, j’appelle ça des cheesecakes, parce qu'ils sont tellement pleins de tout ce que vous faites ???
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'''Guillaume Erner :''' Des gros cookies.
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'''Éric Léandri :''' Exactement, d'énormes cookies et c'est très différent. Donc en fait le cookie c’était un système technique qui aidait à améliorer votre navigation et c'est devenu un tracker. A côté de ça il y a cinq ans, personne ne vous trackait comme aujourd'hui. Personne. Et pourtant, ces géants de l'Internet valaient déjà des centaines de milliards, Ils sont juste passés à tracker tout pour valoir encore plus d'argent. Il y a cinq ans c’était de la filiation. Vous cliquiez sur un lien comme du shopping, et si jamais vous achetiez quelque chose ou un voyage, on vous reversait un peu d'argent. On est resté sur ces vieux modèles qui ont fait leurs preuves et sur lesquels les gens font déjà énormément d’argent.
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'''Guillaume Erner :''' On écoute M, Monde Virtuel, un disque choisi par Thierry Dupin, avec Stéphanie Texier à la réalisation.
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''Musique''
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'''Voix masculine :''' C'est la mode Facebook :

Version du 26 janvier 2015 à 11:48


Titre : Un autre Internet est-il possible ? Naviguer sans Google, g-mails, Microsoft et consorts.

Intervenant : Adrienne Charmet-Alix - Eric Léandri - Lionel Allorge - Stanislas Sabatier - Guillaume Erner

Lieu : France Inter - Émission Service public

Date : Octobre 2014

Durée : 52 min

Lien vers la vidéo : [1]

00' transcrit MO

Guillaume Erner : Laetitia, on va tout vous expliquer, on va vous expliquer comment vous allez pouvoir surfer sur Internet en vous passant des géants du net, car vous savez que ceux-ci sont dangereux et représentent une menace pour votre vie privée et quelle vie privée !

Laetitia : Et donc vous pensez que je suis la seule. D'accord, super, merci.

Guillaume Erner : On vous retrouve à 11 heures pour une autre page d'informations et pendant ce temps-là, on va parler du net, des logiciels libres, des boîtes mails qui ne sont pas forcément sur Gmail ou sur Hotmail, avec vos questions et vos témoignages au 014524700, sur le site internet de France Inter, franceinter.fr et sur Twitter, car oui, nous sommes sur Twitter nous nous appelons service public FI.

Musique

01'05

Guillaume Erner : L’accident de Michael Schumacher révèle une nouvelle fois l’état catastrophique des médias. Vous vous demandez quel lien peut bien exister entre l’accident de ski du champion automobile et l’information que l’on nous sert. Eh bien voilà : depuis cette chute de ski, personne ne comprend comment un choc a priori peu violent, en tout cas en apparence, a pu provoquer un traumatisme crânien, et plonger le pilote de F1 dans un coma aussi profond. Or aujourd’hui, quelques mois après le drame, une hypothèse surgit mezza voce : le cerveau de Schumacher n’aurait pas été endommagé par la chute directement, il n'aurait été endommagé qu’indirectement par cette chute. La pierre, initialement montrée du doigt, ne serait pas l’unique coupable. C’est la caméra qu’il portait sur son casque, une Go Pro, et même plus précisément le pilier de la Go Pro, le petit tube de métal qui maintient la caméra sur le casque, qui aurait causé le traumatisme. Alors je suis évidemment incapable de vous dire si la Go Pro est effectivement responsable de l’état actuel du champion. Mais ce que je sais, c’est que les journaux se sont bien gardés de l’écrire. Et pour une bonne raison : Go Pro est aujourd’hui un gros annonceur ; enquêter sur les dommages causés par la caméra aurait fait désordre, et ce d’autant plus que Go Pro a été introduit en bourse en juin dernier, soit trois mois après le drame. Attention, je ne dis pas qu’un complot Go Pro existe, mon hypothèse est bien plus pessimiste que cela : les médias du monde entier se sont autocensurés pour ne pas s’aliéner un gros annonceur. Tout cela pour vous dire que si un jour, un homme meurt parce qu’il a avalé son Iphone, ou bien devient idiot à cause de Netflix, nous ne le saurons jamais. Comme dans le cas de Schumacher, on accusera les pierres, parce que, pour l’instant, aucun gros acteur du marché publicitaire ne vend des pierres.

France Inter – Service public – Guillaume Erner

Musique

Guillaume Erner : Un autre internet est-il possible ? Peut-on naviguer sans Google, Gmail, Microsoft et consorts ? Pour en parler je suis en compagnie tout d'abord d’Éric Léandri. Bonjour.

Éric Léandri : Bonjour.

Guillaume Erner : Éric Léandri vous êtes cofondateur de qwant.com, un moteur de recherche européen alternatif, qui ne vous traque pas, alternatif évidemment à Google. Vous nous expliquerez comment ça fonctionne, comment vous vivez et quels sont les bénéfices que l'on peut attendre, donc, d'utiliser Qwant plutôt que Google. En face de vous Stanislas Sabatier. Bonjour.

Stanislas Sabatier : Bonjour.

Guillaume Erner : Vous êtes fondateur de Mailden, une société qui commercialise des comptes e-mails sécurisés et privés, sécurisés et privés pour que l'on conserve donc une vie privée, et, en échange de quoi, vous ne vivez pas de la publicité mais des sommes que l'on vous verse. Là aussi vous nous expliquerez comment tout ceci fonctionne. Lionel Allorge vous êtes président de l’association April qui fait de la promotion et de la défense du Logiciel libre.

Lionel Allorge : Bonjour.

Guillaume Erner : Un logiciel libre, c'est la preuve que finalement on peut surfer, on peut travailler sur un ordinateur sans avoir recours aux produits Microsoft ? C'est ça ?

Lionel Allorge : Voilà, tout à fait. Les logiciels libres proposent une vaste alternative de logiciels qui sont respectueux des libertés des utilisateurs.

Guillaume Erner : Ces logiciels sont par exemple un traitement de texte, un tableur ?

Lionel Allorge : Tout à fait. Vos auditeurs connaissent peut-être Firefox qui est un navigateur sur Internet. On peut citer aussi VLC qui est un lecteur de fichiers audio et vidéo, qui est assez réputé, et tout ça ce sont des logiciels libres.

Guillaume Erner : Donc ils sont gratuits et on peut à la fois les utiliser lorsqu'on est un néophyte évidemment, ils sont accessibles, il ne faut pas être informaticien pour les utiliser. Et il est également possible de les améliorer là, cette fois-ci, si on est informaticien, tout le monde peut participer à l’élaboration de ces logiciels libres.

Lionel Allorge : Voilà, tout à fait. Ce sont des logiciels qui permettent aux utilisateurs de s'impliquer dans le développement des logiciels et, a minima, de vérifier ce que font les logiciels, donc ce qui est important pour ce qui nous concerne aujourd'hui.

Guillaume Erner : Et puis au cœur de tout cela,il y a évidemment la notion même de vie privée, puisque ce que l'on peut d'abord reprocher à Google, Facebook et consorts, c'est d'utiliser la vie privée des individus dans la manière donc dont ils se servent de leur boîte mail, de leurs messages Facebook. La vie privée est-ce si important que cela ? Bonjour Adrienne Charmet-Alix. Vous êtes coordinatrice des campagnes de la Quadrature du net, association de défense des libertés numériques. Si on n'est pas un terroriste, en quoi a t-on à redouter ce que Google ou ce que Facebook font de nos données privées ?

Adrienne Charmet : Bonjour. Alors il n'y a pas besoin d’être un terroriste pour avoir envie et besoin d'avoir une vie privée. Ça semble être une notion élémentaire. Vous ne vivez pas avec un appartement avec des murs en verre, vous avez envie d'avoir votre intimité, vous n'avez pas envie que votre facteur ouvre votre courrier, vous n'avez pas forcément envie qu'on vous propose. Imaginez, si vous avancez dans la rue, et en permanence, suivant ce que vous avez dans la tête ou les conversations que vous avez eues avec des gens précédemment on vous envoie des pubs ciblées en permanence, et on analyse tout ce que vous pensez, tout ce que vous écoutez comme musique, etc. La vie privée c'est simplement avoir sa part de tranquillité, d'intimité, et on n'a pas besoin d'avoir quelque chose à cacher pour avoir le droit à ça.

Guillaume Erner : Avez-vous l'impression que ce combat, votre combat puis que c'est celui que vous menez à la Quadrature du net, est un combat qui commence à se diffuser dans l’opinion ? Ou bien a t-on encore tendance à croire qu'il faut être, encore une fois, Ben Laden pour avoir quelque chose à cacher ?

Adrienne Charmet : Non, je pense qu'un des avantages paradoxaux de l'affaire Snowden,

Guillaume Erner : L'affaire Snowden, donc cet homme,

Adrienne Charmet : Cet homme qui a révélé l'importance et le côté très massif des écoutes des services secrets américains sur les internautes du monde entier.

Guillaume Erner : Dévoilant qu'il y avait une collaboration étroite entre ces grandes entreprises du net et des services de renseignement.

Adrienne Charmet : Voilà, qui avaient accès, de manière directe, aux services de Google, aux services de Microsoft, etc, selon la loi américaine. Paradoxalement, cette affaire-là, qui semble assez lointaine, a fait prendre conscience aux gens, de manière massive, qu'ils avaient beaucoup de données qui intéressaient beaucoup de gens et qu'il fallait peut-être réfléchir à ce qu'on allait en faire.

Guillaume Erner : Eh bien figurez-vous qu'on a justement un extrait d'un message diffusé par Edward Snowden, c’était en Noël dernier. Voici la voix d'Edward Snowden.

Voix d'Edward Snowden : A child born today will grow up with no conception of privacy allow. He will never know what it means to have a private moment for himself, an unrecorded an unanalyzed record. And that's a problem because privacy is major. Privacy is what allows us to determine who we are and who we want to be.

Guillaume Erner : Que dit Snowden dans ce message ? Il dit : « Un enfant qui naît aujourd'hui grandira sans aucune notion de vie privée. Il ne saura jamais ce que signifie d'avoir un moment privé pour lui-même, une pensée non enregistrée et non analysée . Et c'est un problème parce que la confidentialité est importante. La vie privée est ce qui nous permet de déterminer qui nous sommes et qui nous voulons être ». Il y a la vie privée par rapport aux pouvoirs publics, il y a la vie privée par rapport aux multinationales et on peut se battre, peut-être faut-il même se battre pour la conserver. On écoute ??? dans New-York et tout de suite après on continue à évoquer les possibilités qui nous sont offertes pour surfer sans le secours des géants du net.

Musique

11' 15

Guillaume Erner : Service public sur France Inter. Comment continuer à surfer sur Internet sans le secours des géants d'Internet ? Comment protéger sa vie privée ? Comment aussi protéger son porte-monnaie ? Nous sommes en compagnie de plusieurs acteurs de ce mouvement. Tout d'abord Lionel Allorge, président de l’association April qui milite pour le Logiciel libre, Éric Léandri cofondateur de Qwant, Qwant est un moteur de recherche qui concurrence Google, Stanislas Sabatier, fondateur Mailden, une société qui vous propose un e-mail sécurisé et privé. Et puis enfin, Adrienne Charmet-Alix de la Quadrature du net, une association qui combat pour les libertés sur le net. Et pour vous montrer que tout ceci est très simple, on a fait un test, on a pris quelqu'un que vous connaissez bien, que nous connaissons bien, Louis Bozon et on lui a montré comment on se servait de Qwant pour montrer que tout le monde pouvait se servir de Qwant, même quand on n'a pas toujours l'habitude d'Internet. C’est le test du jour dans Service public.

Musique

Voix féminine : Un deux, un deux. J'ai testé pour vous la pilule nobab, je ne peux rien dire encore, mais il n'est pas impossible qu'il faille la prendre deux fois par jour. Un deux, un deux.

Voix masculine :' Nous allons maintenant faire le test de capacité à l'autorégulation thermique, mettez vos casques.

Musique

Guillaume Erner : Bonjour Lenora.

Lenora Krief : Bonjour Guillaume.

Guillaume Erner : Alors comment ça c'est passé avec Louis Bozon ? Vous l’avez fait surfer.

Lenora Krief : Tout à fait. je l'ai fait surfer sur le net. Louis Bozon qui anima durant 13 ans sur notre station « Le jeu des mille euros » et qui fait aujourd’hui partie de la bande originale de Nagui, a donc accepté de se lancer dans cette aventure informatique. Louis Bozon a un usage modéré d'Internet, il préfère la lecture papier au numérique et surtout ne souhaite pas y passer trop de temps. Sur la toile il recherche avant tout la simplicité. Avec votre collègue Yannick Hillair, responsable marketing de Qwant, nous sommes allés chez lui pour installer ce moteur de recherche sur son ordinateur. Est-ce que vous compterez bientôt Louis Bozon dans vos nouveaux utilisateurs ? La réponse dans ce reportage.

Toc-toc

Louis Bozon : Entrez.

Lenora Krief : Bonjour monsieur Bozon.

Louis Bozon : Entrez bonjour.

Lenora Krief : C'est un service à domicile pour rendre votre ordinateur libre et indépendant.

Louis Bozon : Eh bien écoutez je n'attends que ça. Bonjour.

Yannick Hillair : Bonjour monsieur Bozon.

Louis Bozon : Entrez par là. Alors moi, Internet, je m'en sers pour tout ce qui est évidemment mail, e-mail. J'écris mes livres là-dessus, je consulte Wikipédia, tout ce qui est renseignement, la bande originale de Nagui. Il faut toujours que j'ai une information qui m'est passionnée dans la semaine. Je cherche. Voila comment j'utilise mon ordinateur.

Lenora Krief : Est-ce que vous utilisez Google pour faire vos recherches ?

Louis Bozon : Oui, oui, c'est vraiment le principe pour moi, je suis Google incontestablement.

Lenora Krief : Vous utilisez Google et vous avez même Google Chrome comme navigateur

Louis Bozon : À dire vrai, tout ça, je joue avec ça sans trop savoir ce que j'utilise.

Yannick Hillair : La boite mail.

Lenora Krief : La boite de messagerie c'est Gmail. C'est la boîte de messagerie de Google.

Louis Bozon : Voilà exactement.

Lenora Krief : Alors qu'est-ce que vous en pensez, justement, Yannick ?

Yannick Hillair : Qu'est-ce que j'en pense ? En fait, en réalité, ce sont souvent des choses qui sont installées par défaut. Mais en général, quand on clique et que ça apparaît tout de suite, c’est qu'il y a peut-être quelque chose de caché derrière.

Louis Bozon : C'est même sûr !

Lenora Krief : Et c'est pour cela que nous avons lancé notre moteur de recherche qwant.com qui est à notre sens une brique, une solution pour permettre aux utilisateurs, aux gens, de pouvoir se protéger au quotidien.

Lenora Krief : Justement vous allez nous montrer à quoi ressemble ce moteur de recherche Qwant.

Yannick Hillair : Avec grand plaisir, je vais vous entrer l'adresse Q,W,A,N,T, point com.

Louis Bozon : Q,W,A,N,T, point com.

Lenora Krief : Nous y voici. On fait un test ?

Louis Bozon : Faisons un test.

Lenora Krief : Tapons par exemple prix Nobel.

Louis Bozon : Je le tape.

Yannick Hillair : Ici, dans la barre de recherche,

Louis Bozon : Prix Nobel alors ?

Lenora Krief : Eh bien on tape prix Nobel

Louis Bozon : Qu'est-ce qui apparaît ?

Yannick Hillair : On arrive ici sur ce qu'on appelle la vue colonne, parce que nous avons choisi de séparer le web en cinq, comme je vous l'ai dit. D'une part vous avez le web classique avec les sites institutionnels. Vous avez l'actualité. Tout ce qui est dit dans la presse, dans les médias, remonte ici.

Louis Bozon : Très utile.

Yannick Hillair : Nous avons le social, toutes les mentions du terme prix Nobel dans les réseaux sociaux remontent là.

Lenora Krief : Donc il y a une colonne réservée aux réseaux sociaux.

Yannick Hillair : Tout à fait.

Lenora Krief : Vous tweetez monsieur Bozon ?

Louis Bozon : Non je ne tweete pas. Je ne suis pas à Facebook. Là encore, ça ne m'intéresse pas du tout, ce n'est pas la peine. J'ai mes rapports quotidiens avec mon monde. Non, je ne sais pas. Alors disons que je ne suis pas du tout, je suis en marge d'une société, incontestablement.

Lenora Krief : Alors cette colonne, réseaux sociaux, n’intéresserait pas monsieur Bozon.

Yannick Hillair : Oui et non.

Louis Bozon : Je pourrais m'y mettre, je pourrais m'y mettre, mais bon pourquoi pas ?

Lenora Krief : On a des vidéos aussi sur Qwant ?

Yannick Hillair : Exact. Un nom, un artiste qui vous plairait ?

Louis Bozon : Alors Schubert ; Allez, on met Schubert. Schubert

Musique de Schubert

Louis Bozon : C'est bien Schubert. Je ne sais pas si j'écouterais. Je recherche plutôt des documentations plutôt que d'écouter de la musique ; j'ai des disques. Eh bien, c'est bien, c'est très vivant.

Yannick Hillair : Pour terminer on ferme et on retourne à la page de Qwant,

Lenora Krief : Est-ce que ça vous plaît justement qu'on sépare en cinq colonnes ?

Louis Bozon : Je vais m'y habituer. C'est plus vivant, c'est beaucoup plus vivant. Écoutez, très sincèrement, moi je suis assez fermé, je suis assez victime d'habitudes comme tout le monde, mais là ça ne me fait pas peur du tout, ça me fait plaisir, vraiment. Qu'est-ce qu'il faut je fasse moi pour utiliser Qwant ? Parce que je me l'ai pas Qwant. Il faut que j'adapte quelque chose à mon ordinateur ?

Yannick Hillair : Du tout. Vous avez accès sur tous les navigateurs, qwant.com, quand vous le tapez de n'importe où, ça fonctionne.

Lenora Krief : Même Google accepte ?

Yannick Hillair : Même Google accepte Qwant.

Louis Bozon : Il aurait pu le refuser.

Yannick Hillair : Il aurait pu le refuser.

Louis Bozon : Il ne se protège pas bien finalement. Mais alors quand je me sers de Qwant, quand j'envoie mes e-mails, ils seront plus protégés parce que je me sers de Qwant ?

Yannick Hillair : Du tout. Qwant c'est un moteur de recherche. Gmail envoie des mails.

Louis Bozon : Je suis encore le seul dans la nature.

Yannick Hillair : Mais justement c'est de là que vient la curiosité de se dire quelles sont les alternatives à Gmail par exemple.

Lenora Krief : Bientôt Qwant aura sa messagerie.

Yannick Hillair : Tout à fait.

Lenora Krief : Et vous pourrez passer de Gmail à Qwant mail.

Yannick Hillair : Tout à fait.

Louis Bozon : Écoutez je vais me lancer. Si vous entendez des hurlements demain matin, vous ne serez pas là, tant mieux pour vous.

Musique

Guillaume Erner : Merci Louis Bozon, merci Lenora Krief. Maintenant, grâce à vous Lenora, Louis Bozon a appris à se servir de Qwant. Qwant c'est donc ce moteur de recherche alternatif à Google. Comment ça fonction Éric Léandri ? Quels sont les capitaux que vous avez utilisés pour monter ce moteur de recherche ?

Éric Léandri : On a utilisé plusieurs millions d'euros. En fait d'abord français pour la plupart et ensuite internationaux et aujourd'hui on a rajouté encore plusieurs millions d'euros, on va mettre dans la dizaine, pour continuer l'aventure avec des capitaux cette fois venant d'Allemagne.

Guillaume Erner : Mais ces millions ils viennent d'où ? De qui ?

Éric Léandri : Ils viennent d'investisseurs privés, tous privés, tout ça c'est de l'argent privé.

Guillaume Erner : On est tous privés à un moment ou à un autre.

Éric Léandri : Oui, sauf l'argent public, mais pour le reste, on est tous privés. Donc ces investisseurs.

Guillaume Erner : Qui nous dit qu'il n'y a pas derrière Qwant un autre géant du net qui ne voudrait pas se faire connaître ?

Éric Léandri : Deux choses. Et une des choses qui est la plus intéressante c'est le dernier investisseur, Axel Springer, qui lui est très connu, qui est un grand groupe de médias allemands, nous a obligés, et on en est très heureux, on l'a signé des deux mains, à écrire dans son investissement que tant qu'on préservait la tranquillité de nos internautes, tant qu'on préservait la vie privée de nos internautes, il serait au capital. Si jamais on changeait de politique, si jamais on changeait notre politique générale depuis le début, ils sortiraient du capital et ils arrêteraient de nous aider et de nous financer.

Guillaume Erner : Et quel est son intérêt à lui ?

Éric Léandri : Son intérêt à lui : le ??? d' Axel Springer est la personne qui a fait l'article expliquant que maintenant il commençait à avoir vraiment peur de Google. Et quelle est sa peur ? Sa peur est très simple. Aujourd’hui vous avez chez Google une envie de verticaliser. C'est-à-dire que quand Google fait Google Shopping, il détruit des milliers de sites qui faisaient du classement pour le shopping. Quand ils font du Google Travel, ils détruisent les sites qui faisaient tout simplement du classement pour vos voyages, comme TripAdvisor ou d'autres. Donc aujourd'hui quand Google commence à faire des niches, quand Google commence à être concurrent des propres sites qui sont sur l'Internet, ça commence à être très difficile de jouer contre le numéro un.

Guillaume Erner : C'est le premier danger de Google le fait qu'aujourd'hui sa position de monopole absolu sur Internet peut lui permettre, effectivement, de tuer tous les autres acteurs et donc d'atteindre une taille telle qu'il deviendrait, peut-être, l'une des sociétés les plus puissantes qui n’ait jamais existé. Et puis il y a la question de la vie prive. La question de la vie privée elle n'est absolument pas abstraite, elle est même très concrète. Si on fouille dans ces conditions d'utilisation des services internet, c'est-à-dire quelque chose qu'on ne fait évidemment jamais, mais que vous, vous avez fait pour nous, Stanislas Sabatier, fondateur de Mailden.

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Stanislas Sabatier : Oui, par exemple, si on regarde les conditions générales d'utilisation de Google, vous pouvez voir marqué, noir sur blanc, « nos systèmes automatisés analysent vos contenus, y compris les e-mails. Cette analyse aura lieu lors de l'envoi, de la réception et du stockage des contenus. Vous accordez à Google une licence, dans le monde entier, d'utilisation, etc. ». On peut faire la même chose chez Yahoo. Yahoo analyse votre courrier électronique ; c'est dans les conditions générales d'utilisation de ses services.

Guillaume Erner : Pourquoi analysent-ils notre courrier électronique ? Qu’est-ce qu'ils font de toutes ces données qui, aujourd'hui, sont récupérées par les moteurs de recherche ou les fournisseurs d'adresses e-mail ?

Stanislas Sabatier : En fait c'est leur modèle économique. Ils vendent de la publicité, donc ils ont besoin de récolter le plus d'informations possibles sur les utilisateurs de leurs services. Donc plus ils vont fournir de services, plus ils vont pouvoir récolter de données. C'est pour ça qu'ils se lancent dans les voyages, dans ceci, dans cela. Et quel est le service qui vous donne le plus d'informations sur vos utilisateurs, eh bien c'est le mail, parce que quand vous ouvrez tous les e-mails, toutes les pièces jointes et que vous scannez tout et que vous gardez une copie de tous ces éléments-là pour pouvoir faire du profilage marketing, vous avez le plus d'informations possibles sur les personnes que vous hébergez.

Guillaume Erner : Google gagne de l'argent et il en gagne énormément. Il gagne de l'argent en mettant de la publicité évidemment sur Internet, de la publicité qui est associée à vos goûts, c'est-à-dire que quand vous cherchez poussette une fois sur Google eh bien vous aurez beaucoup de publicités de poussettes ensuite quand vous naviguerez.

Stanislas Sabatier : Cest même plus vicieux. C'est même plus vicieux parce qu'il suffit que vous discutiez avec vos proches, dans des e-mails, que vous disiez que untel attend un enfant, machin, que c'est bientôt son anniversaire, qu'est-ce qu'on pourrait lui faire comme cadeau, etc, comme par hasard, vous allez avoir des publicités ciblées, qui vont apparaître, et peut-être des publicités de poussettes, sans même que vous ayez pensé le mot poussette. Donc c'est ça le risque.

Guillaume Erner : Et puis l'autre modèle économique de Google, toujours sur le même mode, on va dire, eh bien ce mode consiste à analyser ces données et à les vendre à d'autres sociétés.

Stanislas Sabatier : À les vendre il s’en défendent, donc on ne veut pas savoir exactement ce qu'ils en font. Le problème c'est qu'on ne sait pas ce qu'ils en font et qu'ensuite le problème du numérique c'est qu'à partir du moment où vous avez d'énormes bases de données d'informations personnelles, eh bien un jour ou l'autre ces informations personnelles vont se retrouver sur Internet. Et donc ces masses de données sur vous-même, vous n'avez jamais la garantie qu'à un moment ou un autre elles ne vont pas se retrouver dans les mains d'une agence gouvernementale, d'une autre entreprise commerciale, de je ne sais qui d'autre.

Guillaume Erner : Alors il y a donc ce risque-là avec les moteurs de recherche. On se dit que lorsqu’on achète un traitement de texte à Microsoft, on n'a plus ce risque et pourtant on ne sait pas si ce risque n'existe pas, Lionel Allorge, on ne sait pas ce qui se passe quand on utilise un traitement de texte Microsoft, expliquez-nous pourquoi.

Lionel Allorge : Parce que ce n'est pas un logiciel libre, donc ça veut dire que c'est une sorte de boîte noire. On y entre des données, des données en ressortent, mais on ne sait pas comment c'est traité à l'intérieur et on n'a pas le droit d'aller voir. Donc le gros intérêt des logiciel libres c'est de proposer des alternatives où des gens compétents, bien sûr, pas l'utilisateur lambda, mais des gens qui ont un petit peu d'expérience informatique, vont pouvoir aller vérifier que le logiciel fait bien ce qu'il prétend faire.

Guillaume Erner : Ce qu'il y a d'un peu effrayant, et aussi d’extrêmement utile dans l'informatique c'est que lorsque vous travaillez sur votre ordinateur vous savez ce que vous faites, mais vous ne savez pas ce que l'ordinateur fait.

Lionel Allorge : Voilà. Sauf à installer un système complet de logiciels libres, ce qui est aujourd'hui très facile à faire et ce qui permet, à ce moment-là, de garder la maîtrise de son informatique.

Guillaume Erner : Nous avons un auditeur au 0145247000, Félix, qui nous appelle de Paris. Bonjour Félix.

Auditeur Félix : Bonjour France Inter.

Guillaume Erner : Nous vous écoutons Félix, vous allez parler librement.

Auditeur Félix : D'accord. Alors moi ce qui m’énervait un petit peu c'est, notamment quand on circule sur Internet, avec les vidéos, c'est-à-dire que depuis quelques années, notamment via YouTube, mais d'autres, on nous impose entre quinze à vingt secondes de publicité, de messages, etc, et qu'on n'a pas moyen, à part installer des, comment dire, des extensions d’autres logiciels, de bloquer justement ces publicités. Et ça, franchement, je ne comprends pas comment on a réussi à se laisser imposer ces quinze secondes ou vingt secondes de pubs obligatoires.

Guillaume Erner : Comment a t-on réussi à imposer cela aux internautes Stanislas Sabatier ?

Stanislas Sabatier : Tout simplement parce que c'est un service gratuit. Il faut bien que ce service soit payé par quelqu’un. Fournir des vidéos, entretenir des serveurs de vidéos ??, c'est un coût énorme. Donc le seul moyen de financer ces services-là c'est de faire via la publicité. Si vous ne voulez pas la publicité, il faut aller vers des modèles alternatifs et pas uniquement des modèles publicitaires.

Guillaume Erner : C'est effectivement très important d'insister là-dessus : la gratuité ça n'existe pas. Si quelqu'un vous propose un service gratuit cela signifie que quelqu'un paye.

Éric Léandri : Non. Le monsieur en face vient de nous prouver exactement l'inverse. Linux c'est gratuit, c'est totalement gratuit et vous n’êtes pas le service. Qwant c'est gratuit, c'est totalement gratuit et vous n’êtes pas le service. Ça c'est encore la bonne nouvelle histoire pour nous servir une nouvelle sauce.

Guillaume Erner : Alors, attendez parce que si on essaye de reprendre cette notion de gratuité, ce qui est fait avec le logiciel libre, Lionel Allorge, c'est tout simplement qu'il y a des bénévoles qui, en quelque sorte, payent de leur temps eux-mêmes pour développer ces logiciels.

Lionel Allorge : Il n'y a pas que des bénévoles, c'est une des manières de développer le logiciel libre, mais il y a aussi beaucoup des structures qui payent des salariés, des professionnels, des informaticiens qui vont développer ces logiciels. Ça peut être des associations, ça peut être des fondations, par exemple, donc qui font appel à des dons pour financer ce qu'ils font, notamment la fondation Mozilla qui fait Firefox dont on parlait tout à l'heure, fonctionne sur ce modèle-là.

Guillaume Erner : Et Qwant ? Quel est le modèle économique ?

Éric Léandri : Qwant c'est très simple le modèle économique. On va revenir il y a cinq ans en arrière, on va revenir à l'époque où rajouter des cookies, vous traquez absolument partout sur Internet.

Guillaume Erner : Les cookies ce sont les petits programmes qui viennent se glisser sur votre ordinateur.

Stanislas Sabatier : Ce sont des tout petits fichiers, qui viennent se mettre sur votre ordinateur, dans lesquels on va remplir tout ce que vous êtes en train de faire, au fur et à mesure de votre navigation sur Internet. Mais encore une fois le cookie, c'est encore un mauvais mot. On utilise des cookies c'est juste pour changer la couleur en haut dans Qwant, et chez nos amis de chez Google, par exemple, j’appelle ça des cheesecakes, parce qu'ils sont tellement pleins de tout ce que vous faites ???

Guillaume Erner : Des gros cookies.

Éric Léandri : Exactement, d'énormes cookies et c'est très différent. Donc en fait le cookie c’était un système technique qui aidait à améliorer votre navigation et c'est devenu un tracker. A côté de ça il y a cinq ans, personne ne vous trackait comme aujourd'hui. Personne. Et pourtant, ces géants de l'Internet valaient déjà des centaines de milliards, Ils sont juste passés à tracker tout pour valoir encore plus d'argent. Il y a cinq ans c’était de la filiation. Vous cliquiez sur un lien comme du shopping, et si jamais vous achetiez quelque chose ou un voyage, on vous reversait un peu d'argent. On est resté sur ces vieux modèles qui ont fait leurs preuves et sur lesquels les gens font déjà énormément d’argent.

Guillaume Erner : On écoute M, Monde Virtuel, un disque choisi par Thierry Dupin, avec Stéphanie Texier à la réalisation.

Musique

30' 38

Voix masculine : C'est la mode Facebook :