Soirée 20 ans April - Radio Libre à Toi

De April MediaWiki
Aller à la navigationAller à la recherche


Titre : Soirée 20 ans de l'April

Intervenants : Emmanuel Grégoire, adjoint à la maire de Paris - OliCat - Clara - Frédéric Coucher - Isabella Vanni -

Lieu : Le Petit Bain - Paris

Date : 26 janvier 2017

Durée : 2 h 32 min 17

Écouter l'enregistrement de Radio Libre à Toi

Licence de la transcription : Verbatim

Statut : Transcrit MO


Libre à Toi en direct du Petit Bain pour les 20 ans de l’April, avec OliCat, Clara et Christian.

[Bavardages en attendant le début de la soirée]

07’ 50

OliCat : Pour info on devrait avoir en interview Emmanuel Grégoire qui représente la mairie de Paris, je pense qu’il ne représente pas que lui-même aujourd’hui, à cette soirée. Il y aura un représentant d’Enercoop, son directeur en l’occurrence, c’est Julien Noé qui est un tout nouveau adhérent à l’April. Claire Besson sera également présente, de la Fondation du Crédit coopératif et puis Matthieu Ploquin du Sgen-CFDT, syndicat Éducation nationale. J’espère qu’on va réussir à le choper Matthieu parce que je pense qu’on a plein de choses à lui demander, ainsi que Claire, Julien ou encore Emmanuel. Pour les autres on verra, on improvisera en fonction de qui veut bien causer dans le micro.

Clara: Et puis peut-être qu’on aura le président de l’April aussi, Fred ?

OliCat : Alors c’est le directeur général.

Clara: Je mélange toujours président, directeur général, les associations…

OliCat : C’est toujours compliqué. Surtout que les assos font un peu ce qu’elles veulent. Il y a des directeurs, des présidents. Bon !

Clara: Donc lui c’est le directeur !

OliCat : C’est le directeur général

Clara: Je savais bien que c’est la tête.

OliCat : Absolument. En tout cas il est des fondateurs de l’April.

[Bavardages]

OliCat : Ah ça commence.

Clara: Ça y est.

OliCat : OK. Ça va partir.

Frédéric Couchet : On va bientôt commencer. Ne soyez pas timides, elle n’est pas dangereuse, c’est la mienne qui est au milieu, là. Elle ne va pas vous manger. Vous pouvez y aller, vous approcher. C’est une salle de concert, on peut même ??? à la fin. Non, pas pendant le discours, quand même pas.

Nous avons le plaisir que la séance d’introduction soit faite par M. Emmanuel Grégoire qui est l’adjoint à la maire de Paris en charge des ressources humaines, des services publics, de la modernisation de l’administration, et qui va nous expliquer l’engagement de la ville de Paris autour du logiciel libre qui est de longue date. Et ensuite Isabella, ma collègue, et moi-même, on fera un petit point d’organisation de la soirée pour que tout se passe bien, jusqu’au bout de la nuit. Je laisse d’abord la parole à M. Emmanuel Grégoire.

Emmanuel Grégoire : Merci beaucoup. Merci de m’avoir invité à vous dire quelques mots. Je voulais d’abord vous souhaiter la bienvenue comme c’est l’usage quand il y a des événements importants dans la ville, nous essayons les élus d’être présents parce que vous représentez le tissu riche d’associations qui animent la vie de notre belle cité. Mais au-delà de ça, effectivement, et en résonance avec la délégation qui est la mienne, vous expliquer l’intérêt que la ville de Paris a eu à travailler avec l’April et ce que, au-delà de ça, à titre citoyen, on peut attendre d’une association comme la vôtre, comme la nôtre, puisque, très modestement, j’en suis membre comme représentant de la ville de Paris.

D’abord pour dire que l’engagement de la ville de Paris en faveur du logiciel libre, il est ancien. Je tiens à saluer, d’ailleurs, l’équipe Lutèce qui est là, je l’ai vue, ils sont où ? Voilà. L’équipe Lutèce, parce que vous les savez, enfin beaucoup d’entre vous le savent, et beaucoup d’entre vous beaucoup mieux que moi, le logiciel libre a pris une part croissante, une part stratégique dans le système d’information de la ville de Paris, et ça pour plusieurs raisons. Des raisons qui sont connues, attachées à l’image qu’a le logiciel libre. C’est d’abord un sujet de souveraineté, être capable de maîtriser l’outil, de maîtriser ses évolutions, de ne pas être dépendant d’un tiers qui, quand bien même il le fait avec une grande qualité, mais vous vend une prestation et donc, à un moment, peut ne plus le faire ou ne plus pouvoir le faire.

Le deuxième sujet est un sujet important, et je l’assume très cruellement dans les fonctions qui sont les miennes, c’est que le contexte budgétaire n’est pas simple et que donc le logiciel libre est aussi un levier extraordinairement puissant pour les collectivités territoriales, pour l’État, pour la puissance publique, de développer des systèmes robustes dans des conditions financières soutenables, là où le mode SaaS, qui est à la mode, est souvent parfois plus compliqué pour les budgets de fonctionnement qui sont les nôtres.

Et enfin parce que c’est une philosophie qui nous va bien. C’est une philosophie du partage, de la communauté et nous sommes très heureux d’y contribuer à travers l’April, à travers l’Aful, à travers Lutèce et peut-être certains d’entre vous ont eu l’occasion de développer des choses sous Lutèce.

Et au-delà, je voudrais finir mon propos que je ne veux pas trop long, par le rôle qui est celui de l’April et du contexte compliqué dans lequel nous vivons collectivement. Je lis souvent les positions, comme on dit, de l’association. Parfois j’ai des nuances par rapport à ce qui est dit, mais ce qui est très important, c’est que vous gardiez ce rôle de contre-pouvoir, au sens positif du mot, qui est de contrôler le producteur de la norme qui est notamment le législateur. Notamment dans ce contexte sécuritaire qui conduit à une inflation de contrôles qui pose un problème démocratique et ce n’est pas à vous que je vais le dire. J’imagine que beaucoup d’entre vous en sont convaincus.

On vit une période difficile, où il y a une demande sociale de sécurité, une demande sociale de liberté, parfois beaucoup de difficultés à articuler les deux. Et, un peu en France malheureusement, mais dans, malheureusement, beaucoup d’autres pays de façon très brutale, on observe un développement de systèmes de contrôle qui sont incontestablement extrêmement problématiques, beaucoup plus problématiques que ne le croit l’opinion publique actuellement, et dont les effets pervers se feront, je le crains, douloureusement ressentir dans quelques semaines, y compris de l’autre côté de l’Atlantique.

Et donc, pour ça, c’est très important le travail d’éducation que fait l’April, le travail de sensibilisation, de formation des élus, des fonctionnaires, des agents publics parce que toutes sont traversées par un très puissant mouvement de transformation numérique. Là aussi on essaye, parfois c’est lent parce que la maison est très grande, très complexe, on essaye d’accompagner la transformation numérique de l’administration, la transformation numérique des politiques publiques. Ce qui soulève des questions importantes en matière de protection des données personnelles, en matière d’interopérabilité, en matière d’usages, en matière de lutte contre la fracture numérique. Et là aussi, le logiciel libre a une part extrêmement importante à y prendre.

Donc voilà, je suis très heureux d’être avec vous ce soir, de vous témoigner notre reconnaissance, la reconnaissance de la ville de Paris. On est des tout jeunes membres dans l’association puisque, vous qui existez depuis 1996, nous on n’en est membre que depuis deux ans, de mémoire.

D’ailleurs je profite de l’occasion pour dire que c’est un élu du conseil de Paris qui m’a suggéré d’adhérer à l’April, il s’appelle Jérôme Gleizes, c’est un militant du libre, un militant écologiste, avec lequel j’ai beaucoup de combats et de centres d’intérêt communs. Donc je voulais lui rendre hommage, parce que c’est lui qui a attiré mon attention sur l’association et très vite je me suis dit « oui, c’est une bonne idée allons-y ! » Y compris pour faire la pub de Lutèce et de l’équipe qui bosse très bien sur cette plateforme.

D’ailleurs je dis que cette année nous avons fait un choix très important pour moi politiquement, pour la maire de Paris, c’est que dans le programme de mandature, il y a un truc qui est banal dans le monde commun, mais complexe à la ville de par son histoire, c’est l’idée d’un compte parisien pour ceux d’entre vous qui sont des usagers de la ville de Paris. C’est l’idée que, très simplement, nous ayons un accès numérique unique à l’ensemble des téléservices municipaux et une relation numérique à la ville facilitée, dans une histoire marquée par une organisation en silo, très verticalisée et on essaye, très modestement, de casser un petit peu ces barrières. Et donc on a engagé un grand programme autour de l’identité numérique des usagers et autour de la gestion de la relation usager qui est la forme démocratie citoyenne de ce que, vulgairement, on appellerait le CRM [Customer Relationship Management, NdT] dans le privé. Mais c’est l’idée d’adapter les services publics aux besoins des usagers. Et après de longues réflexions j’ai été convaincu, avec les gens qui devaient prendre cette décision, que développer en logiciel libre était le seul moyen d’avoir quelque chose qui correspondait vraiment à nos attentes, de le faire dans des enveloppes budgétaires soutenables et surtout avec une capacité d’évolution et de mutualisation sur laquelle je compte beaucoup. Donc nous-mêmes on essaie de faire de la pub auprès des collectivités territoriales pour partager tout ça avec elles.

Donc merci à tous pour votre engagement. Merci à l’April pour ce que vous faites avec nous. Dites-nous quand on fait les choses bien. Alertez-nous quand vous pensez qu’on les fait moins bien ; je sais très bien que vous n’hésiterez pas. Merci à tous et je vous souhaite une très bonne soirée.

Applaudissements

17’ 13

Frédéric Couchet : Merci. Je vais passer la parole à Isabella Vann, ma collègue, et je terminerai à la fin – tu as des fans ? Ah c’est Gibus ! – notamment pour quelques points d’organisations pour cette soirée. Parce que nous ne sommes pas là par hasard à Petit Bain et puis le buffet n’est pas organisé comme ça , avec un traiteur, n’importe comment quoi !

Isabella Vanni : Bonsoir à tous et à toutes. Merci d’être là et de fêter avec nous les 20 ans de l’April. Donc vous êtes là, je ne sais pas si vous connaissiez déjà le Petit Bain. On a choisi cet endroit parce qu’il nous semblait que ça correspondait à nos valeurs. C’est une coopérative qui fait aussi de la réinsertion sociale, qui organise des concerts, qui accueille des associations comme nous.

Vous aurez peut-être noté, à l’entrée, il y a un accueil avec quelques goodies, stickers de l’association. Il y a aussi un livre d’or que vous êtes priés de remplir à la fin de la soirée, ça nous fera beaucoup, beaucoup plaisir, avec quelques mots.

La fête, la soirée se déroulera ici, donc dans la salle de concert du Petit Bain. Vous avez un stand avec les tee-shirts, les mugs, nos marchandises, qui est juste là, en face du bar. Vous avez un petit stand avec des décalcomanies. C’est une grosse nouveauté, donc n’hésitez pas à vous faire des petits tattoos et à poser devant notre photographe de la soirée, Emmanuel Savidan, que je remercie d’être là. Il y a aussi une exposition des tee-shirts April qui ont été réalisés pendant toutes ces dernières années.

Et puis, pour ce qui concerne le buffet en fait, attention parce que c’est un buffet, comment dire, c’est le fruit du travail d’une équipe formidable de bénévoles, qui a participé à un atelier de cuisine ici, dans la cuisine de Petit Bain, toute la journée. L’atelier de cuisine a été organisé et animé par l’association Altrimenti qui est une association, qui lutte contre le gaspillage alimentaire et qui donne une deuxième vie, en fait, aux aliments invendus, déclassés, pour en faire des recettes populaires et gourmandes. L’équipe de bénévoles était composée par des bénévoles de l’April, qui ont répondu présent à l’appel, ils étaient nombreux, par des bénévoles de l’association Altrimenti et par des amis, aussi, qui répondent présent à l’appel. Comment ?

Frédéric Couchet : Et les permanents !

Isabella Vanni : Les permanents, bien sûr. Non, mais vraiment quoi ! Et donc j’espère que vous apprécierez. Il y a aussi de la doc, doc de communication sur l’association, donc servez-vous.

Après, pour ce qui concerne les photos, tu vas le faire, voilà. Et donc du coup il ne me reste que vous dire « profitez de la soirée. Célébrez avec nous et passez un bon moment avec nous ! » Merci d’être là.

Applaudissements

Frédéric Couchet : Je vais essayer de ne pas être très long parce que je sais que certains m’ont déjà reproché de ne pas dire au barman que le bar était ouvert, mais quand même. Il y aura une deuxième sans doute intervention après, juste avant le gâteau, quand il y aura un peu plus de monde parce que le froid a fait que finalement les gens ont décalé.

Déjà je voulais remercier Emmanuel Grégoire d’être intervenu. Le remercier aussi pour le contenu de son intervention, notamment sur l’aspect sécuritaire. Aussi sur la référence à Jérôme Gleizes qui effectivement est un élu vert, qui est ami de longue date. Et initialement, effectivement, c’était un vœu du groupe des Verts, qui a ensuite été, effectivement, soutenu par Emmanuel Grégoire. Je voulais en profiter pour saluer une fois de plus, alors je suis désolé, les amis de Lutece, on va dire qu’on ne parle que de vous. Mais notamment l’équipe Lutece et en particulier mon ami Pierre Levy que j’ai rencontré en 2002, à Montréal, sur une présentation de Lutece. Je rappelle quand même que Lutece c’est la première délibération d’une collectivité qui libérait un logiciel (libre). C’était en septembre 2002. Quelques jours après et je veux saluer, je ne sais pas où il est, Loïc Dayot, il s’est planqué quelque part, ah il est derrière. Quelques jours avant, la mairie de Pierrefitte, qui libérait EPNadmin, qui est un outil de gestion d’espace public numérique. Donc Paris et Pierrefitte ont été vraiment précurseurs de point de vue-là.

Je voulais juste dire, quand même, que 20 ans, je ne vais pas vous faire un historique de toutes les actions. Derrière moi il y a juste le slogan de l’April et le logo, on ne va pas faire toutes les actions qu’on a faites. Par contre il y a aura des photos qui vont diffuser tout au long de la soirée qui vous montreront des gens qui ont été actifs, ensuite qui ont disparu, des gens qui sont encore actifs.

L’essence de l’April c’est vraiment le fait d’être une vraie association, à la fois avec des permanents, c’est vrai, alors aujourd’hui on est trois permanents, il y a quelques anciens permanents qui vont arriver tout à l’heure sans doute. Mais aussi, surtout, effectivement, des bénévoles, des membres et qui sont de plus en plus représentatifs de la diversité du logiciel libre. L’April a été créée il y a 20 ans, on était 5 informaticiens. Aujourd’hui, majoritairement, les gens qui adhèrent ne sont pas informaticiens. Par curiosité, j’ai regardé les dernières adhésions, c’est biochimiste, infirmière, enseignant, étudiant, etc. Et au niveau des personnes morales, c’est aussi l’élargissement. Évidemment on a beaucoup d’entreprises membres de l’April, on a quelques collectivités. Récemment on a, par exemple, eu Enercoop, le fournisseur d’énergie renouvelable. On a eu le Sgen- CFDT, donc qui nous a beaucoup soutenu sur la partie éducation, Je crois qu’il y a Matthieu Ploquin, qui est ic,i qui est là-bas. Il y a la ville de Digne-les-Bains et aussi un syndicat de collectivités du côté de la mairie de Grenoble. Donc voilà ce sont des adhésions qui montrent la diversité de l’April et aussi la force de l’April. Donc c’est vraiment grâce à vous, grâce aux membres, grâce aux soutiens qu’on est là.

D’un point de vue organisationnel, il y a un point important : les photos. Des gens ne souhaitent pas forcément être pris en photos. Vous savez qu’à l’April, les photos qu’on prend on les met sur notre site, sous licence libre. OK ! Ceux qui ne veulent pas être pris en photos, ils ne s’en vont pas, ils sont les bienvenus, parce que tout le monde est évidemment le bienvenu. Il y a simplement un petit protocole, il y a une petite signalétique « No photo » que vous posez là et vous vous signalez à notre photographe officiel qui est Manu, qui est là, il est facile à reconnaître, c’est le seul qui en rouge. Il ne prendra pas de vous de photo et nous on fera évidemment une vérification avant la mise en ligne. Donc c’est important, on respecte cet aspect-là et on demande aux autres photographes de faire la même chose évidemment.

Autre point d’organisation sur les bières. Il y a deux bières spéciales. Je sais que c’est important. On a fait un gros effort sur les bières, croyez-moi ça a été très compliqué. Commander à des professionnels quand on est une association, le manque de confiance de ces gens-là envers les associations est quand même ! Mais bon ! On a quand même réussi à s’en sortir. Je voulais simplement dire il y a deux bières différentes. Il y a une Delirium Tremens. Delirium Tremens, c’est une bière blonde, forte, un peu sucrée, 9 degrés d’alcool. Et il y a une Chouffe Houblon qui est une bière forte, blonde, amère, florale, 8 degrés 5. Ça c’est pour vous donner la différence des deux bières et le degré d’alcool. Je vous encourage à ne pas abuser parce que ça fait mal à la tête à la fin, sachant qu’il y a aussi du vin, il y a des jus de fruits, etc. Donc voilà, il y a deux types de bière qui permettent de combler normalement tout le monde de ce point de vue-là, donc c’est auprès des barmans.

Et je vérifie juste que je n’ai rien oublié sur cette partie-là. Eh oui, si, s’il y a nos amis de Libre à toi qui sont là-bas derrière la régie, voilà ils font coucou, qui diffusent en direct sur Internet, en fait, eh bien cette session de présentation. On sait qu’on a au moins une personne qui écoute, c’est Marie-Odile depuis l’Italie, notre adhérente qui n’a pas pu venir. Elle nous a dit : « On va écouter sur Libre à Toi ». Je vous dis ça aussi parce que l’équipe va faire quelques petites interviews de membres, ceux qui veulent, en direct, ce n’est pas enregistré donc faites attention à ce que vous dites, vous assumez. Donc n’hésitez pas à aller voir l’équipe, là-bas, si vous voulez faire des petites interviews avec ça.

J’en profite pour dire que Libre à Toi va bientôt avoir besoin de soutiens. Je peux l’annoncer ou pas ? Voilà ! Parce qu’ils ont déposé un dossier auprès du CSA pour avoir une fréquence partagée sur la bande FM qui vient d’être ouverte. Ils sont acceptables dans la liste des quinze candidatures, je crois, donc je pense qu’ils vont avoir bientôt besoin de soutiens pour faire un peu de sensibilisation auprès du CSA, pour dire qu’une radio sur les communs, parce que c’est le projet de Libre à Toi, serait important sur la bande FM et pas simplement, effectivement, sur Internet.

Et je voudrais juste finir par un énorme remerciement. Alors je vais vous demander de vous lever et de venir par ici, tous les bénévoles et permanents qui ont participé à l’atelier de cuisine parce que c’est quand même aussi la force de cette association. Je voudrais vous remercier : Samantha, tes bénévoles. Il y a une quinzaine de personnes qui ont travaillé aujourd’hui. Il y en a certaines qui sont parties. Il y a Isabella, aussi. Il y a Benj.

Je finis là-dessus parce qu’on a choisi de faire cet évènement à Petit Bain, pas simplement parce que c’est bien placé, parce qu’est une salle de concert. Non ! Parce que Petit Bain a aussi des valeurs. Vous allez voir sur le site, c’est une entreprise d’insertion, ils ont beaucoup de choses qui sont vraiment en résonance avec nous. On a fait vraiment volontairement ça ici. En plus, c’est vraiment super. Et sur le buffet, effectivement, on a fait le choix aussi de faire une démarche à la fois participative, inclusive, et aussi ce qui nous garantit des plats végés, ce qui, évidemment, est un avantage pour beaucoup de gens. Il n’y a que les bières où on a fait appel à des gens extérieurs, parce qu’on s’est dit si on fait faire brasser des bières, peut-être qu’elles ne seront peut-être pas à la hauteur et on connaît l’exigence des geeks sur les bières. Donc voilà !

Je voulais vraiment les remercier et dans le courant de la soirée, il y aura peut-être quelques petites surprises, il y aura peut-être une séance où on vous appellera sur scène pour montrer vos talents. Il y aura, évidemment, bien sûr un gâteau tout à l’heure, mais c’est d’ici une heure ou deux le gâteau. En tout cas, le buffet est ouvert, le bar est ouvert. Passez une bonne soirée et surtout pro-fi-tez !

Applaudissements

27’17

OliCat : Comme promis au Petit Bain en direct pour les 20 ans de l’April après trois quarts d’heure de retard nos intervenants passent à notre table. Clara est avec moi, Christian est derrière les manettes et c’est Claire Besson que nous accueillons dans ce plateau improvisé de Libre à Toi. Alors Claire Besson, vous n’êtes pas intervenue dans le cadre du discours d’ouverture. Vous faites partie, pourtant, des gens et là, vous, vous représentez la Fondation ?

Claire Besson : Crédit Coopératif.

OliCat : Crédit coopératif. Quelle est votre position à la Fondation ?

Claire Besson : Je suis la secrétaire générale de la Fondation Crédit Coopératif.

OliCat : Très bien.

Clara : Alors la Fondation Crédit Coopératif, j’ai cherché un petit peu ce qu’elle faisait et j’ai vu qu’elle a trois missions principales, pour lesquelles j’avais envie, peut-être, de vous faire discuter. C’était donc faire reconnaître et reconnaître l’ESS.

Claire Besson : Tout à fait. Premier axe.

Clara : Premier axe. Soutenir un développement durable, deuxième axe, et troisième axe, améliorer la cohésion sociale. En fait, c’était sur le premier axe que j’avais envie de vous demander parce que sur l’économie sociale et solidaire, on entend un peu tout et n’importe quoi. La Fondation Crédit Coopératif, comme une fondation, finance des projets en économie sociale et solidaire. Sur quels critères vous vous basez pour reconnaître les vraies entreprises de l’économie sociale et solidaire ?

Claire Besson : À vrai dire, nous avons effectivement plusieurs critères parce que nous avons plusieurs modes d’intervention sur cet axe-là. Ce qu’il fait savoir c’est que l’axe connaissance et reconnaissance de l’économie social et sociale, c’est notre premier axe parce que c’est notre axe principal, mais c’est également notre axe depuis l’origine. En fait, la Fondation Crédit Coopératif est une fondation d’entreprises, créée par le Crédit Coopératif, depuis plus de trente ans maintenant. Donc c’est vraiment une des doyennes des fondations d’entreprises et c’est depuis l’origine que la Fondation Crédit Coopératif soutient toutes les actions de promotion de l’économie sociale et solidaire. Pourquoi ? Tout simplement parce que créée par le Crédit Coopératif.

Clara : Ah, on n’entend plus rien ! On a fait une petite interruption. Donc pourquoi ?

Claire Besson : Créée par le Crédit Coopératif, qui est une banque, mais la banque de l’économie sociale et solidaire, c’est-à-dire la banque des acteurs de l’économie sociale et solidaire – les associations, les coopératives maintenant les entreprises d’utilité sociale. Mais le Crédit Coopératif est lui-même un acteur de l’ESS, puisque le Crédit Coopératif est lui-même une coopérative.

Clara : Mais encore ! On n’entend plus rien.

OliCat : C’est bon, c’est revenu. C’est très curieux !

Clara : C’est vraiment bizarre.

OliCat : Il n’y a que nous qui sommes coupés en fait. Les auditeurs continuent de vous entendre et c’est nous qui ne nous entendons plus.

Clara : Donc désolée pour les interruptions de ce dialogue à chaque fois tout à fait involontaires.

Claire Besson : Donc quand le Crédit Coopératif a créé sa fondation forcément, il lui a demandé de travailler là-dessus, sur la promotion de l’ESS. C’était vraiment dans les gènes à la fois du Crédit Coop et de sa fondation.

Clara : Excusez-moi i y a un rapport avec la Nef ?

Claire Besson : Il y a un rapport entre le Crédit Coopératif et la Nef. Tout à fait, effectivement. Puisque la Nef, jusqu’à une époque récente, n’était pas encore un établissement de plein exercice donc il avait besoin, je dirais, du Crédit Coopératif pour l’accueillir. Et puis la Nef est en train de prendre son indépendance. Voilà.

Par contre, nous, nous sommes une fondation avec des actions de mécénat. Alors comment faisons-nous ? Sous deux modes je dirais. Il y a les partenariats nationaux et là, la Fondation Crédit Coopératif soutient des travaux de recherche, vraiment des travaux fondamentaux sur l’économie sociale et solidaire. Des travaux aussi de connaissance, par exemple la Fondation Crédit Coopératif soutient les travaux de Viviane Tchernonog pour connaître statistiquement le monde des associations. Donc ça c’est un exemple de nos actions au niveau national. Et puis la Fondation Crédit Coopératif soutient aussi effectivement des projets qui eux, là, sont choisis au plus près des territoires, par les représentants des sociétaires du Crédit Coopératif et la Fondation, par contre, donc finance ces projets. Ce sont les Prix et Trophée de l’initiative en économie sociale qui se déroulent en ce moment jusqu’au 13 février. Les structures de l’économie sociale et solidaire peuvent présenter leurs projets à ce concours, Prix et Trophée de l’initiative en économie sociale.

OliCat : Et là, du coup, c’est véritablement le statut même de la société ou de l’entreprise, de la structure, qui va déterminer leur capacité, leur aptitude, à jouer le jeu de vous déposer un dossier ? Ou une SAS standard, par exemple, qui aurait un objet qui relève du bien commun ou, en tout cas, de l’utilité publique et générale qui peut être considérée comme une structure de l’ESS, peut jouer aussi ?

Claire Besson : Alors oui et non. Oui elle peut jouer et ça c’est grâce à la loi sur l’économie sociale et solidaire de juillet 2014 qui, effectivement, définit l’économie sociale étant certes composée d’acteurs, certes au statut comme précédemment, statut coopératif, mutualisation.

OliCat : Voilà : Scic, Scop, etc.

Claire Besson : Voilà les Scic, les Scop, etc. Mais depuis juillet 2014 sont également acteurs de l’économie sociale et solidaire des entreprises tout à fait classiques, des SARL, des SAS, etc., dès lors qu’elles cherchent à devenir entreprises solidaires d’utilité sociale. Donc là, ça n’est plus un statut c’est un agrément et, effectivement, tout ce que vous venez de citer, agir pour les communs est potentiellement, effectivement, tout à fait relevable, redevable de ce nouveau statut, enfin statut, ce n’est pas statut, mais ce nouveau critère.

OliCat : Alors c’est vrai on ne va pas rentrer dans ce débat, mais, en effet, ce n’était pas tout à fait innocent si nous on vous posait la question, c’est que nous on a remarqué, pour travailler avec beaucoup de structures de l’économie sociale, que cette loi de 2014, justement, elle a quand même ouvert les vannes, des vannes assez opportunistes de structures cherchant, ce que vous avez dit être un agrément et pas un label, pour justement prétendre à certaines ouvertures financières qu’elles n’auraient pas eues si elles n’avaient pas eu cet agrément ou autre.

Claire Besson : Oui, c’est tout à fait ça.

OliCat : Nous, on l’a vu, on en a croisé énormément. Mais on imagine parce que ce n’est pas depuis deux ans que la fondation existe que vous savez plus ou moins à qui vous avez à faire. Alors revenons précisément sur l’April.

Claire Besson : Bien sûr.

OliCat : Alors la Fondation Macif, je ne sais pourquoi je dis la fondation Macif, la Fondation Crédit Coopératif.

Claire Besson : Ça va, ce sont des collègues, on s’entend bien avec eux, il n’y a pas de souci.

OliCat : Je l’imagine. La Fondation Crédit Coopératif a permis à l’April de publier en 2012, si je ne me trompe pas de date, un guide.

Claire Besson : C’est ça. Dix mille exemplaires.

OliCat : Dix mille exemplaires d’un guide qui permettait aux administrations d’avoir un catalogue de logiciels libres.

Claire Besson : Aux associations.

OliCat : Aux associations, pardon, aux associations d’avoir un catalogue de logiciels libres. Alors pourquoi ? Qu’est-ce qui a fait que la Fondation Crédit Coopératif, dans le cadre des missions que vous nous avez décrites et des trois axes sur lesquels vous déployez vos interventions, s’est intéressée à ce guide ?

Claire Besson : Alors pourquoi ? Effectivement pour deux raisons, je dirais. D’une part, pourquoi est-ce que nous nous sommes rencontrés ? D’abord il y a eu, effectivement, une sollicitation qui est arrivée par le Crédit Coopératif et par la direction qui s’occupe du développement des petites et moyennes associations au Crédit Coopératif ; donc c’est arrivé comme ça à la Fondation. Et pourquoi est-ce que la Fondation a répondu positivement ? Pour deux raisons : la première raison c’est, effectivement, c’est une communauté de valeurs entre l’April et la Fondation Crédit Coopératif et entre les logiciels libres et ce que cherche à faire la Fondation Crédit Coopératif, puisqu’effectivement, la communauté de valeurs c’est le partage, c’est la solidarité, c’est le militantisme et puis c’est la liberté, tout simplement, puisque, effectivement, les logiciels libres eh bien par définition sont libres ! Et là, en l’occurrence, l’action qui était à soutenir c’était donc la diffusion d’un guide pour les associations et par définition les associations ont toute liberté de création.

Donc il y avait d’une part cette communauté de valeurs. Nous étions très fiers de soutenir cette entreprise, très heureux de voir que l’April avait déjà, depuis plusieurs années, créé un groupe de travail pour travailler sur les logiciels libres pour les associations. C’est donner vraiment les outils de faire de la pédagogie, ça c’était très intéressant. Et donc, ce qui m’amène à la deuxième raison pour laquelle nous avons soutenu ce projet, c’est parce que tout simplement nous aimons les choses pragmatiques, nous aimons les choses utiles aux acteurs de l’ESS. Donc là c’était, effectivement, d’une utilité formidable, je dirais, pour les associations, très directe, très pédagogique, et parce que, effectivement, on avait constaté à l’époque et j’imagine que c’est encore le cas, même si peut-être un peu moins, on avait constaté à l’époque qu’il y avait beaucoup de freins pour que les associations utilisent des logiciels libres et là, ce guide, c’était à la fois parler des logiciels libres et puis donner une sélection de logiciels utiles aux associations.

Clara : Juste, petite question. Pour conclure parce qu’on a Emmanuel Grégoire juste après vous, j’imagine qu’à la Fondation Crédit Coopératif tout le monde est au logiciel libre !

OliCat : Bon, eh bien c’était la question que je voulais poser. Vous en êtes où à la Fondation ?

Claire Besson : Alors pas tout le monde et pas entièrement parce que, effectivement, nous dépendons de systèmes informatiques qui font que nous-mêmes nous faisons partie des gens à convaincre et maintenant peut être faut-il un guide, un guide logiciels libres et fondations.

OliCat : Mais du coup la Fondation est-elle adhérente de l’April ? Ou même le Crédit Coopératif ?

Claire Besson : C’est une bonne question. J’avoue que je n’ai pas vérifié l’adhésion.

OliCat : Vous remplirez le bulletin d’adhésion !

Claire Besson : C’est une très bonne question. C’est vrai que nous avons été très fiers de soutenir l’April en 2012. Nous avons été très fiers aussi de voir que ce guide avait une réelle utilité puisqu’il a été réédité en 2014 et c’est peut-être pour ça que vous avez parlé de la Fondation Macif tout à l’heure, parce que la Fondation Macif a soutenu la réédition du guide.

OliCat : C’est probable !

Claire Besson : Et bon, ça c’est un guide papier, effectivement. Il ne sera sans doute pas réédité comme ça. Mais je suis très heureuse aussi de voir qu’en 2016 il a été donc réédité sous forme dématérialisée avec Framasoft et moi je trouve ça formidable, c’est vraiment la preuve que ce guide est très utile et que nous avons bien fait de le soutenir !

OliCat : Claire Besson merci.

Clara : Merci

OliCat : A bientôt

Claire Besson : A bientôt.

38’ 52

OliCat : Vous êtes à l’écoute Libre à Toi, la radio. Sur le chat c’est en direct https://chat.libre-a-toi.org/. On est au Petit Bain. Clara est toujours à mes côtés, qui est debout cette fois.

Clara : Eh bien oui, je fais Radio debout !

OliCat : Absolument. Tu es Radio debout. Emmanuel Grégoire, lui, qu’on vous avait promis parmi les personnalités éminentes qu’on allait recevoir ce soir. Non je plaisante !

Emmanuel Grégoire: Personnalité éminente !

OliCat : Vous êtes peut-être éminent.

Emmanuel Grégoire: Mais personne ne le sait !

OliCat : Peut-être qu’une fois que je vous connaîtrai, je vous trouverai effectivement éminent. Emmanuel Grégoire, merci d’être passé au studio improvisé de Libre à Toi

OliCat : Merci à vous.

OliCat : Je suis désolé, je n’ai pas retenu votre carte de visite parce qu’elle est assez impressionnante. Alors vous représentez la mairie de Paris aujourd’hui ici.

Emmanuel Grégoire : Oui. Je suis adjoint d’Anne Hidalgo.

OliCat : Voilà, vous êtes adjoint d’Anne Hidalgo. Vous avez notamment dans vos missions, vos prérogatives, la modernisation de l’administration, et plein d’autres trucs. Je pense que c’est plutôt au titre de la modernisation de l’administration qui vous représentez, aujourd’hui, la mairie auprès de l’April. D’abord, effectivement, vous l’avez dit dans votre discours d’ouverture, le logiciel libre et la mairie de Paris c’est une histoire d’amour qui date.

Emmanuel Grégoire : Absolument.

OliCat : Pour autant, pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les faits, les choses que la mairie de Paris, dans ses différentes administrations, met en œuvre qui seraient effectivement en accord avec les combats de l’April aujourd’hui.

Emmanuel Grégoire : Oui. Alors écoutez, simplement, c’est une histoire d’amour ancienne parce que ça a été dit depuis longtemps, la ville de Paris a développé des applicatifs, des téléservices en logiciel libre autour d’une plateforme qui s’appelle Lutece et qui comprend de nombreuses briques applicatives. Et pour vous donner un exemple, à la ville de Paris il y a, grosso modo, à peu près 400 applications métier. La ville de Paris est une grande maison, puisque c’est à la fois une commune et un département, donc c’est un champ très vaste qui va du sport, de l’enfance, mais surtout aux compétences départementales, donc tout ce qui est l’action sociale, le développement économique, l’innovation, etc. Sur ces 400 applications métier, un peu plus de 200 sont en logiciel libre, c’est-à-dire autour de cette brique qui s’appelle Lutece, de ce grand système d’information qui s’appelle Lutece. Et, pour être encore plus précis, pour l’accélération de cette dynamique à la faveur du logiciel libre, depuis le début de la mandature, pour prendre des exemples très concrets qui font écho, sans doute, à des choses que les gens connaissent, eh bien le budget participatif, tout a été développé en libre, la quasi-intégralité des téléservices nouveaux sont développés en logiciel libre et pour la grande innovation de la mandature qui est le compte parisien ; le compte parisien c’est à la fois la convergence de l’ensemble des services numériques de la ville de Paris autour d’un identifiant usager unique, mais aussi derrière un back office de gestion de la relation usager, eh bien c’est développé intégralement sous Lutece et je crois que c’est inédit dans le monde que, la GRU, ce qu’on appelle, je le disais tout à l’heure un peu plus vulgairement la CRM [Customer Relationship Management, NdT], est développée en logiciel libre et donc à la disposition des partenaires qui souhaiteront reprendre les éléments.

Donc c’est un engagement technique, financier et philosophique très fort de la ville de Paris.

Clara : Et de longue date aussi ?

Emmanuel Grégoire : Oui, de longue date, puisque c’est dès le début des années 2000 que la ville de Paris a commencé à libérer ses logiciels (libres), parce qu’on faisait du développement en propre, mais a fait le choix philosophique – c’est Bertrand Delanoë qui l’a initié dès le début des années 2000 – de partager ça, et c’est bien l’esprit, de partager pour en bénéficier collectivement. C’est un bien commun et je crois que c’est quelque chose qui vous importe.

OliCat : Absolument. Alors une petite question très directe concernant Lutece et les différents modules ou téléservices que vous développez en libre, ça veut dire que là, aujourd’hui, n’importe qui peut accéder au code source des ces applications, les télécharger et les modifier, et les redistribuer et les utiliser.

Emmanuel Grégoire : Oui, absolument.

OliCat : Et vous avez une plateforme dédiée

Emmanuel Grégoire : Il y a une plateforme dédiée qui est accessible. Je laisse aux techniciens et aux informaticiens les subtilités d’accès à ce type de service. Et c’est d’ailleurs moi, à titre personnel, même une priorité, j’ai souhaité qu’on puisse accélérer la population de Lutece pour que la communauté de développement soit la plus large possible. Et, par exemple, pour vous citer des partenaires qui travaillent sous Lutece, qui est un nom du coup impropre puisque l’intérêt va au-delà de Paris : Météo-France, la ville de Marseille, la ville de Lyon, ont pris Lutece, mais ont eux-mêmes développé des choses et reversé au pot commun des briques que nous-mêmes, derrière, nous récupérons pour en bénéficier.

OliCat : Là on est d’accord, la stratégie est d’essaimer, de faire en sorte que cette dynamique en faveur de la libération du code et du développement de logiciels libres ne se restreignent pas à Paris. Est-ce qu’il existe, justement, des suprastructures qui permettent entre les différentes collectivités de pouvoir échanger sur ces questions ?

Emmanuel Grégoire : Non. Paradoxalement, pas tellement.

OliCat : Et que font les développeurs de Lutece ?

Emmanuel Grégoire : Mais du coup, paradoxalement, c’est l’April qui joue en partie ce rôle en favorisant les contacts avec la communauté. Il faut bien comprendre que la raison stratégique de l’engagement de la ville de Paris en faveur du logiciel libre, elle est triple. La première c’est une question de souveraineté. C’est-à-dire que quand on est un acteur public, que ce soit l’État ou une grande collectivité comme la ville de Paris, nous ne voulons pas, ou éviter autant que possible, de nous retrouver pieds et poings liés avec un éditeur, parce qu’il y en a beaucoup de grande qualité.

OliCat : Mais le jour où il ferme les portes, voilà

Emmanuel Grégoire : Promouvoir le logiciel libre, ça ne veut pas dire critiquer, les éditeurs ; il y a aussi des éditeurs de grande qualité.

OliCat : Oui, tout à fait, absolument.

Emmanuel Grégoire : Mais simplement, autant que possible, sur ce qui est la partie stratégique de nos systèmes d’information, nous souhaitons rester aussi indépendants que possible. La deuxième raison est financière. C’est qu’on fait à chaque fois l’étude et autant que possible, dès lors que c’est le plus intéressant, nous promouvons l’utilisation du logiciel libre. Et la dernière, c’est une question philosophique et c’est aussi une question d’intérêt, c’est l’idée que, en promouvant le logiciel libre, on promeut une communauté de développement. On partage ce qu’on fait et on bénéficie collectivement de ce partage. Et donc, c’est pour ça que, notamment sur la GRU qui est la brique la plus innovante en matière de développement récent à la ville de Paris, nous souhaitons, le plus vite possible, la partager avec le plus grand nombre de collectivités territoriales.

OliCat : OK ! Non, mais je m’attendais à ce qu’il y ait une plateforme commune !

Emmanuel Grégoire : Moi souvent je leur dis. Comment on fait plus de pub, parce que moi, vous savez, je suis un méchant, moi je suis un élu.

OliCat : Forcément ! Là on vous voit.

Emmanuel Grégoire : Je leur dis : « Vous comprenez il faut qu’on soit le plus de développeurs possibles sur Lutece et donc faites de la pub. Faites de la pub pour qu’il y ait le plus de gens possibles. » Donc il y a une plateforme accessible sur Lutece, elle est connue des gens de la communauté qui utilisent déjà Lutece. Mais c’est vrai qu’on peut sans doute faire mieux en termes de communication sur la disponibilité de ces outils-là et l’April y joue un grand rôle.

OliCat : Très bien. Je vous ai entendu parler, dans le cadre de votre discours d’ouverture, de la lutte contre la fracture numérique. Effectivement, il y a 20 ans, on pouvait parler de fracture numérique, aujourd’hui on parle plutôt de fracture des usages, puisque accéder au numérique aujourd’hui est assez aisé ou en tout cas, ça s’est popularisé. On sait qu’il existe des structures publiques, les EPN [Espace Public Numérique, NdT] – ça a été cité d’ailleurs par Frédéric Couchet – qui, parce qu’on a eu l’occasion dans le cadre des activités de Libre à Toi de travailler avec certains d’entre eux, sont aujourd’hui en difficulté. À Paris on avait des chiffres, mais je ne les ai plus en tête tu te souviens Clara ?

Clara : Il me semble qu’il y avait 20 EPN, et qu’il n’y en avait plus que 16 et que la moitié des EPN allait encore disparaître. Il n’en resterait plus que 7.

OliCat : Là sur 2017 ?

Clara : Sur 2017, il devrait en rester moins de 10, peut-être même…

Emmanuel Grégoire : Moi je ne sais pas, je n’ai pas les chiffres précis en tête, parce qu’il ne s’agit pas d’acteurs publics en réalité, il s’agit d’acteurs, pour la plupart associatifs, et donc beaucoup d’entre eux relèvent de la Fédération nationale des centres sociaux.

OliCat : En tout cas dont la création a été initiée.

Emmanuel Grégoire : Absolument. Et il y a eu, en fait, une évolution du besoin. D’abord ce sont des acteurs très importants qui occupent une place centrale et qui ont occupé une place centrale dans le développement, la popularisation des outils numériques.

OliCat : Informatiques, oui.

Emmanuel Grégoire : Simplement on est face à une difficulté qui, du coup, par répercussion, peut avoir des conséquences difficiles pour ces structures. D’abord, moi je considère que quand on est une collectivité territoriale, pour ce qui relève de la fracture numérique et de la médiation numérique, on doit aussi assumer nos responsabilités. Et donc nous avons souhaité à la ville de Paris monter en gamme, on va dire ça comme ça, autour de la facilitation numérique pour accompagner les usagers, notamment ceux qui sont les plus exclus de ces usages numériques. D’ailleurs, pour être très franc, on retrouve les mêmes populations que celles qui avaient déjà du mal à accéder aux services publics physiques.

OliCat : Absolument !

Emmanuel Grégoire : C’est-à-dire on trouve une barrière culturelle, linguistique, des personnes en situation de handicap, qui avaient des problèmes pour accéder aux services publics, en général, et pas plus ou pas moins aux services numériques. Et donc, notamment, on a développé à la ville de Paris, tout un service public de facilitation numérique qui a été expérimenté dans plusieurs mairies, dans quatre, dans lequel nous avons testé plusieurs choses, à la fois des dispositifs techniques – qu’est-ce qu’il est le plus satisfaisant pour aider les usagers à utiliser nos propres téléservices, nos services numériques ? Deuxièmement, à organiser physiquement l’accueil des usagers pour permettre ça, parce qu’il y a à la fois le besoin d’être accompagné, mais aussi un besoin de confidentialité, donc on a testé des choses. Et troisièmement quelle est la formation qu’on doit donner à nos agents pour accompagner ça.

Après il y a le vrai sujet que vous évoquez et c’est vrai qu’il crée des difficultés parce que le contexte budgétaire est complexe, etc., qui est celui de l’inclusion numérique. L’inclusion numérique c’est, au-delà de aider les usagers à utiliser nos services numériques, c’est plutôt la mission citoyenne d’un acteur public qui est la ville de Paris. Comment a ville de Paris aide les usagers à mieux s’adapter à cette transformation numérique de la société ?

OliCat : Oui, parce qu’aujourd’hui les services publics sont dématérialisés.

Emmanuel Grégoire : Exactement. Mais même pas que les services publics. C’est évidemment chercher du boulot et ne sont pas concernés que les acteurs publics. Chercher du boulot, chercher une maison, les vacances.

OliCat : Absolument, c’est la CAF.

Emmanuel Grégoire : C’est la CAF.

Clara : Sur le travail toutes les agences Pôle emploi ont des ordinateurs à disposition, c’est vrai que…

Emmanuel Grégoire : Absolument. Même faire ses courses, acheter. Voilà il y a plein de sujets. Et pour ça les EPN ont rempli une place essentielle, à nos yeux un peu moins récemment, mais certains d’entre eux pourront avoir une place centrale. Et hier même, avec ma collègue Dominique Versini, puisque c’est Dominique Versini au titre de la dimension sociale de sa délégation qui travaille là-dessus avec moi, nous avons lancé le premier temps de la construction d’un schéma stratégique pour l’inclusion numérique, dans lequel, en discutant avec les acteurs, nous allons essayer de définir les meilleurs outils, les meilleures méthodes pour favoriser l’inclusion numérique. Et pour vous donner un exemple très précis sur les EPN, hier j’ai répondu, sans doute un peu rapidement, à une question qui m’avait été posée par un EPN, qui me disait : « Est-ce vous envisagez le chèque numérique ? » J’avais déjà réfléchi à cette question. J’étais plutôt sur le non, parce que, pour moi, le chèque numérique a un défaut c’est que c’est une nouvelle forme de financement et ça veut dire qu’on se préoccupe d’abord du financement avant de se préoccuper de l’usager et de ce qu’on doit faire. Or, je dis que j’ai répondu un peu vite, parce que j’y ai re réfléchi hier soir – parce qu’on a toujours des moments où on peut réfléchir un peu plus – je me suis que ça méritait peut-être qu’on en discute un peu plus parce que ça au moins un avantage, le chèque numérique, c’est que ça cible très précisément la prestation que l’on veut donner à quelqu’un en particulier. On en a rediscuté avec Dominique Versini, ça fait partie du champ de possibles que nous allons évoquer. Oui, c’est vrai, les EPN ont besoin d’être réassurés dans leurs missions, dans leurs modes de financement. Évidemment les décisions que nous avons prises sont difficiles, je le regrette mais le contexte est difficile. Mais nous allons discuter avec eux.

OliCat : Mais ils s’exprimaient politiquent. On nous expliquait que, à la mairie de Paris en l’occurrence, puisqu’il était question d’EPN parisiens, d’abord il y avait un élu qui était consacré, enfin qui se consacrait à la gestion des EPN et puis, pendant une mandature, il a complètement disparu et puis, à la mandature suivante, il y a eu quelqu’un qui pouvait avoir dans le champ de ses compétences la gestion de ces EPN. En fait, ils ont eu l’impression d’être complètement abandonnés. Mais ce que j’entends aussi dans ce que vous dites…

Clara : Surtout qu’il y a un point qu’on n’a pas abordé, quand même, par rapport aux EPN, c’est la mission d’intégration sociale.

OliCat : Mais c’est ça, justement, c’est ce que j’allais dire.

Emmanuel Grégoire : Ils ne la remplissent pas, vous le savez aussi, ils ne la remplissent pas du tout de la même façon, parce qu’ils n’ont pas tous exactement la même vocation historique.

OliCat : Absolument.

Emmanuel Grégoire : Le même type d’usagers qui les fréquentent. Je les connais bien les EPN. Vous avez raison il y a eu un petit glissement qui traduit aussi des priorités, qui traduit aussi l’air du temps. Les EPN, avant, étaient dans le secteur social, avant 2008. À partir de2008, c’est Jean-Louis Missika, au titre de la délégation innovation universités recherche, qui s’en est occupé, je le sais, j’y étais très impliqué. E pendant cette mandature, en 2014, on retrouve une priorisation sociale, puisque c’est ma collègue Colombe Brossel, au titre de la politique de la ville qui a récupéré la supervision des EPN.

Il faut aussi comprendre, et ça nous on l’assume et parfois c’est difficile, que par moments nous identifions des priorités. La priorité 2008/2014 c’était accélérer la transformation numérique de la société. Aujourd’hui, il nous semble que la priorité c’est plutôt les grands exclus de l’accès aux services numériques et donc ça nous impose un peu de tâtonnement pour l’instant. Hier, je vous dis, on a lancé les travaux sur ce schéma stratégique. Je m’excuse que ça prend toujours un peu de temps. On prend du temps parce que tout ça coûte de l’argent et donc on veut être sûrs que ça remplisse les objectifs politiques qu’on se fixe collectivement. Mais clairement, aujourd’hui, notre priorité c’est deux choses : c’est l’inclusion c’est-à-dire pour toutes les populations qui sont les plus exclues socialement et la facilitation numérique, parce que nous accélérons la transformation numérique de la ville de Paris, c’est notre devoir d’accompagner les citoyens pour ne pas les laisser au bord de la route en termes d’accès aux services publics parisiens.

54’ 58

OliCat : Mais là, malheureusement, on est sur une vraie volonté, une vraie dynamique, moi je suis tout à fait enclin à vous croire et j’entends parfaitement votre propos et je comprends aussi que les EPN se sont peut-être endormis sur leur mission initiale et n’ont pas, non plus, bien géré et voilà. Mais on est à Paris, là. Comment ça se passe dans les autres villes ? Comment cet accès et cette résorption de cette fracture véritable des usages dans le cadre d’une citoyenneté de plus en plus dématérialisée – aujourd’hui exister, avoir un compte Pôle emploi, enfin voilà, être au chômage ou travailler ou, comme vous disiez, faire ses courses ça implique, alors vous, je sais, vous êtes élu municipal, vous êtes élu parisien, je ne vais pas vous interroger sur la politique globale – mais comment vous imaginez que l’ensemble puisse devenir cohérent ?

Emmanuel Grégoire : Si vous voulez c’est aussi une bonne nouvelle. C’est qu’il y a beaucoup d’acteurs. Pendant longtemps les EPN ont eu un rôle quasiment exclusif en termes d’inclusion numérique. Et la bonne nouvelle c’est que beaucoup d’acteurs se sont rendu compte qu’ils devaient aussi faire ça. Je vais vous citer plusieurs exemples, mais la ville de Paris a développé « Ma mairie Mobile » qui est un bus dans lequel on va le plus proche possible des populations qu’on considère exclues pour les accompagner là-dessus. Il y a les PIMMS qui ont pris un rôle croissant en matière d’inclusion numérique.

Clara : Qu’est-ce que c’est les PIMMS ?

Emmanuel Grégoire : Les PIMMS, c’est le point d’information médiation multiservices, c’est une association qui regroupe l’assurance maladie, la CAF, EDF, la Poste, la ville de Paris, dans lequel on essaye de prendre un usager dans le sens transversal pour l’aider sur les problèmes qu’il peut avoir avec l’administration et, notamment, sur la médiation numérique, remplir les dossiers.

Clara : Donc c’est une prise en charge globalisée, globale d’une personne.

Emmanuel Grégoire : Globale. Absolument. Moi je crois beaucoup que les acteurs publics doivent s’adapter aux usagers et donc en matière de médiation, pas que numérique d’ailleurs, mais en matière de médiation sociale, pour les populations les plus exclues, ils doivent faire des guichets qui sont capables de répondre à la globalité de leurs problèmes, parce que si on continue à les envoyer au guichet municipal, au guichet social, au guichet, parce que le département avait des guichets particuliers, à la Poste, à la médiation de l’assurance maladie, etc., ça ne peut pas fonctionner. Et puis aussi parce que des grands acteurs des politiques sociales, de l’accompagnement social, je vais prendre un exemple parmi tant d’autres Emmaüs Connect, beaucoup ont développé des services d’accompagnement numérique et donc nous, on essaye, toujours imparfaitement, je le reconnais, mais on essaye d’accompagner l’évolution de l’écosystème et en se posant la question, en essayant des choses, parfois en faisant des erreurs, de trouver la meilleure solution pour ce qui nous semble être la priorité. Et la priorité, en ce moment, c’est l’inclusion des grands exclus en matière de numérique.

Clara : Alors Marie-Odile avait deux questions sur le chat.

Emmanuel Grégoire : Bonjour Marie-Odile.

OliCat : Marie-Odile, c’est une fervente de l’April.

Clara : Et donc le ne pouvait pas venir vu qu’elle est en Italie, ai-je compris. Donc les questions qu’elle avait c’était de revenir plus en détail sur le chèque numérique. Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce que ça recouvre ? Comment ça se présenterait si ça se mettait en place ? Et puis, la deuxième question, c’était aussi par rapport aux écoles de la ville de Paris.

OliCat : C’est marrant, parce que ça c’est une question que j’allais poser.

Clara : Comment se mettait en place le logiciel libre dans les écoles. Moi j’avais une autre question, qui était un peu similaire, sur les bibliothèques municipales. Est-ce que la ville de Paris a contribué à mettre en place la plateforme ?

Emmanuel Grégoire : Oui. Enfin je vais répondre dans le désordre, alors. La bibliothèque oui, pour une raison simple, c’est que c’est intégralement des services publics municipaux. Donc évidemment ! Et c’est un service dont on est très fiers parce que je crois qu’il y a eu, ces dernières années, une montée en gamme importante en termes de qualité pour les usagers et les agents. On a beaucoup simplifié le système, c’est devenu assez simple.

OliCat : C’est génial !

Emmanuel Grégoire : Les retours qualité sont plutôt sympas

OliCat : Je suis d’accord. C’est vraiment très bien.

Emmanuel Grégoire : Sur les écoles. Je vais finir par les écoles parce que c’est sujet le plus complexe. Le chèque, pour être très clair, il y a différentes formes qui existent. Mais globalement ça consiste à cibler une aide publique financière, sous forme de chèque à valeur monétaire, mais dont on dit : « On ne vous donne pas de l’argent et vous en faites de ce que vous voulez », c’est « on vous donne un potentiel d’achat pour une prestation qui, en l’occurrence, est de l’accompagnement, de la formation, etc ». Et l’intérêt c’est que, ce que je disais tout à l’heure, c’est que vous êtes sûr que vous ciblez l’aide sur un segment particulier dont vous considérez que c’est un besoin social. Et c’est aussi, je le crois, c’est pour ça que beaucoup de structures associatives sont intéressées, elles voient un moyen de relais de financement basé sur l’activité qu’elles mettraient en œuvre pour faire ça, à une époque où beaucoup de ces structures fonctionnaient à la subvention.

OliCat : Ce n’est plus trop la mode, là.

Emmanuel Grégoire : Ce n’est plus trop la mode, parce qu’il y avait des glissements, c’est-à-dire que des acteurs faisaient plein de choses, et vous donniez des subventions, et quand vous financiez un nouveau programme eh bien vous observiez, deux ans après, que tout l’argent que vous aviez mis sur ce nouveau programme n’était pas forcément mobilisé pour ça. Bref, c’est un problème inhérent à toutes les structures financées de cette façon, avec des avantages et des inconvénients, mais le chèque, voilà. Je n’étais pas fan, à priori. Je souhaite qu’à la ville de Paris on y réfléchisse un petit peu plus.

Clara : Mais ce serait des montants variables selon les besoins ?

Emmanuel Grégoire : Oui en fonction des besoins, des lieux, des publics, etc.

OliCat : C’est un travail avec les EPN, en fonction, justement de ce qu’ils sont.

Emmanuel Grégoire : Pas que les EPN.

OliCat : Ça peut aussi se travailler avec les EPN.

Clara : Ça veut dire aussi que les associations peuvent chiffrer les services qu’elles rendent et ce n’est pas toujours facile.

Emmanuel Grégoire : Absolument. Il faut que les associations puissent avoir des justes financements de leurs coûts de structure. C’est une évidence. Parce que la baisse des subventions, les conduit sinon mécaniquement à des impasses budgétaires que chacun comprend bien.

Sur l’école, c’est plus compliqué parce, que l’école, comme vous le savez, est sous double responsabilité historiquement : une responsabilité Éducation nationale pour, grosso modo, tout ce qui touche à la pédagogie et à la prise en charge des personnels de l’Éducation nationale. Et la ville, les villes historiquement, avaient une mission c’était de construire les écoles et les entretenir. Voilà.

OliCat : Les structures.

Emmanuel Grégoire : Exactement, les structures. Ça a beaucoup évolué, suite à la réforme des rythmes scolaires, parce que, via la mise en place de l’aménagement des rythmes éducatifs, eh bien les villes ont été amenées, à la fois parce qu’elles devaient gérer du temps périscolaire en plus, mais aussi parce qu’il y avait une demande des parents d’un service public de qualité à s’intéresser un peu à des domaines qui ne touchent pas la pédagogie – je n’oserais pas dire ça, sinon je me ferais tirer les oreilles – mais qui touchent en tout cas à des domaines un peu lus intéressants que construire des murs et les peindre ensuite. Et notamment, évidemment, le numérique a une place centrale. Moi je vais être très franc je trouve que l’Éducation nationale, malgré les efforts considérables qui ont été faits ces dix dernières années, a un retard stratosphérique en matière de pédagogie de transformation numérique sur les méthodes d’enseignement, sur les niveaux d’équipements, parce que c’est bien gentil de demander aux profs de faire de l’enseignement à la transformation numérique, etc., mais enfin on ne leur donne juste pas d’ordinateurs, etc.

OliCat : C’est ça.

Emmanuel Grégoire : Évidemment, si on veut leur demander ça, il faut aussi y mettre les moyens conséquents. Mais bon, l’Éducation nationale a mis en place des plans d’investissement numérique avec des appels à projet, il y a plein d’appels à projets sur les équipements en classe, comment utiliser la tablette. Il y a par ailleurs des vraies interrogations de fond et je suis totalement incompétent sur la question, sur quelle est la juste place du numérique en matière d’enseignement. Est-ce que, en gros, on doit prendre acte que tous les enfants ont accès à des portables et donc basculer là-dessus ? Ou est-ce que le rôle de l’école ce n’est pas, un peu, de tempérer ça et de garder, quand même, certains un garde-fous par rapport à la surexposition des enfants aux écrans.

OliCat : Aux écrans.

Emmanuel Grégoire : Qui est un vrai problème de santé publique et peut-être même un problème cognitif. Et la ville a souhaité engager aussi des moyens en matière de numérique. D’abord nous entretenons le parc informatique de la plupart des écoles avec des dotations en ordinateurs, pas assez, c’est vrai, mais ma collègue Alexandra Cordebard qui s’occupe de tout ça, a présenté un plan d’accélération des équipements, de renouvellement des équipements, et là-dessus quelle est la place du libre ?

OliCat : C’est ça, parce que, au-delà de l’équipement, il y a ce qu’il y a dedans !

Emmanuel Grégoire : Absolument. L’équipement, si vous voulez, c’est toujours le truc ! Les parents d’élèves vous disent : « Eh bien moi je vous donne mon ordinateur, j’ai un ordinateur dans ma cave, il ne sert plus ». Le problème c’est que s’il est dans la cave, c’est bien généralement parce qu’il est un peu vieux et donc il n’y a pas de raison que nous on s’en serve beaucoup mieux qu’eux s’ils y ont renoncé, donc ce n’est pas toujours la bonne solution. Mais, incontestablement, dans les équipements des ordinateurs, on a cette réflexion en permanence, on a le souci d’essayer d’éduquer les enfants à d’autres standards que uniquement les big??? comme on dit, avec lesquels ils sont familiers. Sans non plus les couper parce que sinon ça les éloignerait un peu de la vraie vie, parce que la réalité…

OliCat : C’est un peu compliqué parce les enseignants, eux-mêmes, grâce au contrat entre l’Éducation nationale et Microsoft, sont éduqués, enfin biberonnent du logiciel propriétaire, donc c’est compliqué de transmettre autre chose quand même, non ?

Emmanuel Grégoire : Absolument. Après, si vous voulez, moi je pourrais vous faire croire que je condamne le truc, etc., ce serait facile en étant à cette soirée. Ce n’est pas ça que je pense parce la réalité c’est qu’une fois qu’on a pris des positions de principe il faut aussi développer tout ça. Si vous mettez un Ubuntu, un Linux devant quelqu’un qui n’a jamais été formé à ça, il va juste vous regarder en vous disant : « Mais qu’est-ce que tu fais là ! » Donc derrière le développement des logiciels libres…

Clara : Vous exagérez un peu peut-être !

Emmanuel Grégoire : Non ! Mais Je vous le dis !

OliCat : C’était vrai il y a quelques années, ça l’est beaucoup moins.

Clara : C’est quand même clefs en main. On allume un ordinateur sous Ubuntu, c’est comme s’il était sous Windows ou sous Mac ! Il ne faut pas…

Emmanuel Grégoire : Non ! Je vous assure, ce n’est malheureusement pas aussi simple que ça. Et pour vous donner un exemple précis, à la ville de Paris, on a trente mille ordinateurs avec une suite bureautique que vous connaissez très bien, je n’ai même pas besoin de la citer.

Clara : Avec Office ?

Emmanuel Grégoire : Voilà, avec Office connu.

Clara : 2011 ou 2015 ?

Emmanuel Grégoire : Non, non un vieux justement.

Clara : Un vieux ? 2007 ?

Emmanuel Grégoire : Et donc la question va être de le renouveler et j’ai demandé à ma DSI d’explorer le champ des possibles. Moi je n’ai aucun a priori, je vais vous dire je, suis quelqu’un de très ouvert, si on me convainc que ça fonctionne, etc. Simplement on s’alerte collectivement.

OliCat : La gendarmerie l’a fait.

Clara : L’Assemblée nationale aussi. Non, mais l’Assemblée nationale aussi, ils sont passés…

Emmanuel Grégoire : Oh j’ai dû voir quelques postes à l’Assemblée nationale et je suis familier du lieu, qui n’étaient pas tous sur d’autres OS que celui auquel on pense.

OliCat : Donc allez-y, excusez-nous. Je vous écoute.

Emmanuel Grégoire : Simplement, quand on fait des migrations sur d’autres suites logicielles, que ce soit d’ailleurs des suites propriétaires ou des suites libres, ça demande de la préparation, de l’anticipation et de la formation.

OliCat : Il y a de la conduite de changement, c’est évident.

Emmanuel Grégoire : Exactement. Et donc il faut faire de la formation, de la popularisation, c’est d’ailleurs la mission de l’April de le faire, expliquer aux administrations. Parce que, si vous voulez, l’un des écueils, quand même, parfois, du choix du libre quand il est formulé, notamment par certaines administrations centrales, c’est qu’il n’est pas fait pour faire du libre, il est fait pour que ça coûte moins cher. Et je ne suis pas convaincu que ce soit toujours une très bonne idée.

OliCat : Et c’est une erreur, en fait. Mais absolument, c’est une erreur.

Emmanuel Grégoire : Moi j’ai plutôt un tropisme pro libre philosophique, mais après, il faut que ça se fasse dans des conditions organisationnelles, opérationnelles, qui soient soutenables pour la continuité des services en général et du service public en particulier. Mais oui, et notamment c’est une mission de l’April, d’essayer de faire découvrir tout ça aux agents publics, aux administrations, pour les rassurer. Et moi je suis convaincu que oui, dans la suite bureautique dont a besoin quelqu’un qui a une mission de secrétariat, peut-être que l’intégralité des fonctionnalités et de développement en VBA ne s’impose pas.

OliCat : Non, absolument !

Emmanuel Grégoire : Et que justifier, centrer, mettre en gras et en italique peut suffire. Quand on sait que, par ailleurs, il y a des logiciels de bureautique libres qui ont des puissances extrêmement importantes.

Clara : LibreOffice, c’est beaucoup plus stable, d’ailleurs.

Emmanuel Grégoire : Moi je suis un client, donc je n’ai pas d’avis. Mais c’est incontestablement une voie qu’il faut explorer et on le fera dans les mois et années à venir.

OliCat : Vous nous assurez que la dynamique est là, en tout cas.

Emmanuel Grégoire : Oui, elle est réelle.

Clara : Juste pour chiffrer sur le parc informatique de la ville de Paris, trente mille postes, ils sont tous, donc, en Windows ? C’est ça ?

Emmanuel Grégoire : 100 % moins deux postes.

OliCat : Dont le vôtre.

Emmanuel Grégoire : Par contre, ce n’est pas le cas sur les serveurs. Par exemple, sur les serveurs, on est à deux tiers, deux tiers des serveurs fonctionnent en logiciel libre, ce qui est déjà pas mal dans une administration.

OliCat : Non, non, effectivement, mais c’est un peu ça. Dans le monde deux tiers des serveurs sont sous logciel libre.

Emmanuel Grégoire : On est juste moyens !

OliCat : Merci Emmanuel Grégoire.

Emmanuel Grégoire : Merci à vous.

OliCat : J’espère qu’on ne vous a pas trop ennuyés.

Emmanuel Grégoire : Non, non, c’est très bien vous êtes là pour ça.

OliCat : Et très belle soirée à vous.

Emmanuel Grégoire : Merci à vous.

OliCat : À bientôt.

1 h 09’ 24

OliCat : Vous êtes à l’écoute de Libre à Toi, la radio. Tu vas mettre un casque. Tu vas prendre un micro. Bonjour à toi. Qui es-tu ?

Ludovic Dubost : Je suis Ludovic.

OliCat : Ludovic. On est, Ludovic, avec toi, à cette soirée d’anniversaire, ce sont les 20 ans de l’April que nous fêtons ce soir au Petit Bain. Alors tu fais quoi toi, Ludovic ?

Ludovic Dubost : En fait, je suis donc Ludovic Dubost et je suis président-fondateur de XWiki.

OliCat : Ah ! Mais ça veut dire que nous avons une éminente personne avec nous ce soir.

Ludovic Dubost : C’est vite dit !

OliCat : C’est vite dit ! Alors explique-nous. C’est quoi ta structure, d’ailleurs. Je ne la connais pas.

Ludovic Dubost : XWiki c’est un éditeur de logiciels libres, qui existe depuis douze ans et qui fait, comme son nom l’indique un petit peu…

OliCat : Du wiki.

Ludovic Dubost : Un wiki et un wiki pour les entreprises, donc 100 % libre. C’est une entreprise qui fait quand même 35 personnes aujourd’hui, donc qui a un peu de poids et qui a des utilisateurs dans le monde entier.

OliCat : Pourquoi l’April ? Vous êtes adhérent ?

Ludovic Dubost : On est adhérents et on sponsorise l’April depuis assez longtemps, au moins cinq ans depuis qu’on a un peu de sous, depuis qu’on a les moyens. D’abord parce que oui, l’April défend nos intérêts, défend l’intérêt du logiciel libre et donc c’est quelque chose qui, pour nous, est important. Parce que le logiciel libre c’est un engagement aussi de notre côté. Déjà c’est quelque chose quand j’ai créé XWiki, je l’ai créé sous forme de logiciel libre dès le début. Donc c’était un projet d’entreprise et un projet d’entreprise libre en même temps.

OliCat : Ce qui est intéressant c’est que du coup avec toi, Ludovic, on va pouvoir aborder l’économie du logiciel libre. Pourquoi déjà te transformer en société et quel type de société tu as fondé autour de la production de ce logiciel libre ? Et quel est le modèle économique que tu as retenu ? Est-ce que c’est le classique qui consiste à donner le code et à vendre du service autour, du support notamment, de l’installation, du développement à la demande de modules ? Est-ce que, si c’est le modèle que vous avez retenu, ces modules sont eux aussi reversés dans le logiciel libre ou restent privatisés à l’entreprise pour laquelle vous les avez développés ? Bref, des thèmes intéressants qu’on va pouvoir évoquer, Ludovic.

Ludovic Dubost : Effectivement ce sont des thèmes assez intéressants. En fait, quand j’ai créé Xwiki, je n’avais pas forcément d’à priori. Finalement, je ne connaissais pas assez. C’est-à-dire que j’ai découvert en marchant.

OliCat : Comme beaucoup. Nous aussi on découvre en marchant.

Ludovic Dubost : Et donc d’abord je l’ai fait libre par conviction que le libre changeait quelque chose.

OliCat : En quelle année d’année d’ailleurs ?

Ludovic Dubost : En 2004. J’ai commencé le logiciel en 2003 et j’ai créé la société en 2004. Déjà, pour moi c’était une évidence, parce que déjà les wikis c’était une invention du libre. Et les wikis me passionnaient, je les ai utilisés en tant qu’ingénieur, directeur technique d’une boîte, et c’était un peu une évidence de dire je vais prendre des idées du libre, il faut peut-être que je le fasse en libre. D’ailleurs au début je me disais le collaboratif m’intéresse, les problématiques collaboratives m’intéressent, on va le faire en libre, c’était aussi ça. Après, finalement, c’était de dire faire notre propre logiciel c’est venu assez rapidement derrière. Mais au départ, en fait, je m’étais posé la question de, je suis un peu perdu dans ce que je voulais dire, je l’ai oublié, je l’avais en tête, je l’ai oublié. Donc au début, j’ai mis le logiciel en libre sur l’aspect wiki. Et je voulais voir un peu déjà si ça intéressait les gens. Et en fait pourquoi le libre aussi ? C’est parce que j’avais vu des sociétés comme Red Hat se monter, des sociétés comme JBoss se monter et en tant que personne qui utilisait des logiciels en fait, j’avais été dans une société qui avait vécu cinq ans et on avait fait des choix techniques au début de ces cinq ans et j’avais regardé, à la fin des cinq ans, est-ce qu’on aurait fait des choix différents. Et finalement la seule qui aurait changé dans ces choix techniques, c’était le libre. C’est-à-dire que tous les choix qu’on avait fait cinq ans avant, eh bien si on les avait refaits cinq ans plus tard, on n’aurait pas mis du Oracle on aurait mis du MySQL, on n’aurait pas mis du Sun, on aurait mis du Linux, etc.

OliCat : Au bout des cinq la société aurait peut-être vécu, c’est ça ?

Ludovic Dubost : Non, ça n’aurait peut-être pas changé forcément grand-chose.

OliCat : Tu ne sais pas.

Ludovic Dubost : Mais en tout cas on aurait fait différemment

OliCat : Ç’aurait été des orientations

Ludovic Dubost : Ç’aurait été des orientations techniques différentes, Ça n’aurait pas forcément changé son business pour autant. On faisait des statistiques, nous, en fait la société où j’étais avant, et elle a fini chez Nielsen dans une boîte de statistiques. Et donc je m’étais dit il y a quand même quelque chose qui se passe au niveau déjà technologique. Et donc ça m’a amené à le faire en libre. Après j’ai fait le logiciel et après on faisait un logiciel applicatif, et ça c’est différent. C’est-à-dire qu’il ne s’agit pas de technologie libre, il s’agit d’une application libre. Et ça c’est un métier qui est différent et d’ailleurs, les logiciels libres ils gagnent beaucoup typiquement, Linux, etc. Bon, après tout le monde n’en vit pas forcément. Tous les gens qui ont créé ces logiciels libres, la Fondation Apache, tous les modules qu’on peut trouver chez la Fondation Apache, il n’y a pas forcément des entreprises derrière à chaque fois, qui sont derrière chacun des logiciels. Maintenant, sur un applicatif, on est encore sur autre chose. On est sur quelque chose qui va être mis dans les mains des utilisateurs. On n’est pas sur une brique logicielle utilisée par les autres éditeurs de logiciels. Nous on s’adresse directement à un utilisateur final. Et alors ça a été un challenge. On a développé en libre. C’était un modèle de développement et d’interaction avec les utilisateurs et les autres développeurs pour comprendre si on faisait un bon logiciel.

OliCat : Et la communauté donc du coup, qui pouvait émerger autour de ce logiciel.

Ludovic Dubost : Ça, ça a bien marché dès le début et j’ai eu des contributions, j’ai eu des gens qui m’ont aidé. Des gens trouvaient ça intéressant, ont dit : « Je peux aider, je peux faire un bout du logiciel. » Au début j’ai eu beaucoup d’aide et ça a doublé, triplé les capacités de développement des premières années. Après quand j’allais face au client, la problématique libre, n’était pas…

OliCat : Tu vas trop vite. Parce que là tu passes déjà au moment où tu avais créé la société autour de ce logiciel. Quel type de société ?

Ludovic Dubost : Une société normale : SA, SAS, à l’époque SARL ; maintenant c’est une SAS. Société normale m’appartenant, voilà !

OliCat : Avec quelle cible en fait ? Les entreprises ? Les particuliers ?

Ludovic Dubost : L’entreprise. Nous c’est une cible vraiment entreprise. J’avais regardé un peu est-ce qu’on peut faire des wikis publics sur Internet et j’avais éliminé, un peu, cette possibilité.

OliCat : Il se passe quelque chose là. Parenthèse. Eh bien oui ce sont les 20 ans de l’April, normalement on va être interrompus.

1 h 16 55

Gâteau d'anniversaire

1 h 24 19