Différences entre les versions de « Renouveler la démocratie avec internet et Open Data »

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'''Titre :''' Renouveler la démocratie avec Internet et l’Open Data
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Publié [https://www.april.org/renouveler-la-democratie-avec-internet-et-lopen-data-alexandre-quintard-kaigre ici]
 
 
'''Orateur :''' Alexandre Quintard Kaigre
 
 
 
'''Lieu :''' Paris, Open World Forum
 
 
 
'''Date :''' Octobre 2013
 
 
 
'''Durée :''' 34 min 52
 
 
 
'''Lien vers la vidéo :''' [http://openworldforum.tv/video/owf13-renouveler-la-democratie-avec-internet-et-lopen-data/]
 
 
 
==00' transcrit Marie-Odile ==
 
 
 
La conviction que je voulais partager avec vous ce matin, ce que j'appelle mais très modestement renouveler la démocratie c'est quelque chose que je vois et j'ai vu dans mes différentes fonctions puisque je dirige depuis 3 ans bientôt les affaires publiques et juridiques [http://www.etalab.gouv.fr/ d'Etalab], la petite mission chargée de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Donn%C3%A9es_ouvertes l'Open Data] au niveau du gouvernement. J'ai eu l'occasion d'exercer avant et concrètement on voit que notre démocratie parfois s'essouffle un peu et a des pratiques qui sont certes traditionnelles mais qui ne correspondent pas aux attentes et à ce qu'on peut espérer de notre démocratie au XXIe siècle. Je l'avais exprimé il y a 3 ans à peu près, dans une conférence aussi, quand on parlait de l'interdiction du cumul des mandats dans le temps. Je suis absolument convaincu que c'est une nécessité.
 
L'Open Data et comprendre les usages de l'internet, de la même manière pour la gouvernance des institutions, c'est aussi un de ces moyens au même titre que l'interdiction du cumul des mandats dans le temps, par exemple, pour renouveler, pour essayer d’insuffler un nouvel air et un peu plus de démocratie dans nos institutions. Pourquoi ? Simplement parce que nous voulons savoir. On veut savoir ce qui se passe derrière les portes de l’Assemblée, derrière les portes des ministères, ce qui se passe dans les réunions interministérielles ou ce qui se passe dans les collectivités territoriales. Nous sommes intéressés par la politique. C'est souvent quelque chose qui revient ; les Français, même s'il n'ont pas forcément confiance dans leurs élus, sont quasiment aux trois quarts, en tout cas plus des deux tiers, intéressés par ce qui se passe, par la chose publique, par la politique. Nous ne le faisons pas par curiosité malsaine, puisqu'on veut comprendre. Nous voulons comprendre. Nous voulons écouter, lire, qu'on nous donne de l'information sur les politiques publiques, sur l'état de la société, mais pour mieux comprendre et pour mieux évoluer. Nous recherchons l’intégrité. Je suis absolument convaincu que la plupart d'entre nous sommes des gens intègres, honnêtes, et nous recherchons, nous attendons de nos dirigeants et de nos institutions la même intégrité et cette intégrité doit être démontrée au quotidien. Et enfin je pense que nous voulons tous participer. On a la vocation, cette envie de s'impliquer dans la société et c'est aussi grâce à internet qu'on retrouve des outils à l'heure actuelle qui permettent de participer, qui permettent de prendre part au débat public, qui permettent de proposer des pétitions et de changer des lois, de faire évoluer les institutions.
 
Je dis nous depuis tout à l'heure, mais soyons clairs c'est vous, moi, c'est tout le monde, c'est au fond toute cette foule d'anonymes qui ne sont forcément représentants, représentés parfois, mais qui ne sont pas mandatés pour être représentants de la Nation mais qui ont envie de prendre part et de participer à l'évolution des institutions. Ce sont des citoyens, comme je disais, c'est l'ensemble de la salle a priori, mais c'est plein de gens à l'extérieur. Il y a des gens que vous croisez dans la rue, au supermarché, nous sommes encore une fois aux trois quarts intéressés par ce qui se passe, par l'évolution et on avait l'exemple même, évidemment ça ne concerne pas que la France, tout à l’heure Yassir et Abderahman nous expliquaient comment ça se passait au Maroc et au fond on a les mêmes caractéristiques, les mêmes intérêts, les mêmes volontés de faire bouger les lignes.
 
Ce sont évidemment des associations, des ONG, je n'en ai pris qu'une mais on pourrait en prendre plein d'autres, et [http://transparency.org/ Transparency International] qui travaille sur les sujets de corruption et de transparence mais une association comme [http://www.regardscitoyens.org/ Regards Citoyens] en France fait un travail absolument fabuleux sur l'activité parlementaire et sur la circulation de l'information et des données. Ce sont évidemment des entrepreneurs connus, mais il y en a plein d'autres qui ne sont pas connus, j'y reviendrai sur l’impact économique que l'Open Data peut avoir. Là c'est évidemment Zuckerberg , mais il y a plein d'autres entrepreneurs qui ne sont pas du tout dans cette lumière et qui ont besoin d'informations, qui ont besoin de données, pour arriver à créer des services, créer des applications, échanger, partager de l'information, co-construire de nouveaux services.
 
Évidemment les journalistes, dans une démocratie moderne, dans une démocratie dynamique, les journalistes et notamment les journalistes de données ont de plus en plus d'importance, de plus en plus de place. C'est un exemple encore une fois pas très français, pardonnez-moi mais on aurait pu aussi en trouver en France, le Guardian qui refait une data visualisation des résultats électoraux aux États-Unis lors de la dernière élection présidentielle il y a maintenant quelques mois.
 
J'aime bien cette tribune de Michel Serres, vous l'avez peut-être lue pour certains d'entre vous, il nous appelle, nous, notamment moins de trente ans, puisque c’était un peu le point commun de tous les speakers de ce matin, il nous appelle les mutants, dans son essai qui s'appelle « La petite Poucette ». Vous l'avez peut-être vu passer il y a deux ans. Je trouvais ça intéressant de nous comparer à des mutants, une génération que finalement nos aînés ne comprennent plus. Nous sommes un peu les mutants des institutions, les mutants de la transparence parce que parfois effectivement nous avons des aînés qui ne nous comprennent pas, y compris, je pense au grand Lyon, y compris au sein de l'état, y compris dans d'autres collectivités territoriales où on nous dit mais pourquoi vous voulez faire de l'open data, pourquoi vous voulez partager de l'information et c'est sans doute cela que je vais vous expliquer.
 
Voila on est une société colorée. On est divergents, on est différents, on habite à Paris, on habite à Strasbourg, on habite à Lyon, on habite à Brest, mais ce n'est pas grave on est tous différents, on vient du Maroc, on échange, on discute, on n'a plus de barrières, on n'a plus de frontières. C'est un des traits caractéristiques sans doute de notre génération c'est qu'on ne se limite pas aux frontières territoriales et aux barrières artificielles. On ne les comprend pas ces barrières artificielles. Quand on nous dit vous ne pouvez pas accéder à telle information parce que vous n'avez pas tel ou tel statut ou que vous n'appartenez pas à telle ou telle catégorie socio-professionnelle, c'est très certainement quelque chose que notre génération ne comprend pas, ne comprend plus.
 
Il y a une autre revendication, elle est extrêmement claire, c'est de déverrouiller un certain nombre d'obstacles dans la société, de déverrouiller un peu cette démocratie, de l'oxygéner, de la renouveler, pour arriver à insuffler plus de transparence, plus d'information, plus d'intelligence.
 
Un des éléments de réponse, je vous l'ai dit, je suis convaincu que pour oxygéner la démocratie on a besoin à la fois d'un certain nombre d'autres actions sur le cumul des mandats par exemple, mais aussi sur le partage et la liberté d'information, le partage de ces données publiques. On l'a entrepris au sein de l'état. Ça fait à peu près trois ans qu'Étalab a été créé au sein du Secrétariat général du Gouvernement, puis au sein du Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique, donc à Matignon, avec un rôle interministériel pour partager, pour mettre l'ensemble des citoyens, l'ensemble des ré-utilisateurs, au cœur aussi de la machine gouvernementale, comprendre comment fonctionnent les administrations et puis évidemment inciter et inviter voire parfois contraindre, il est vrai, certains ministères ou certaines administrations à ouvrir, à partager les informations.
 
J’entendais tout à l'heure, il me semble que c’était Yassir qui parlait de silo, je ne suis pas sûr peut-être tu me corrigeras, mais on a trop souffert d'un fonctionnement en silo, hermétique, totalement vertical où finalement même les administrations entre elles ne partageaient plus l’information. Nous avions eu le cas, je le cite souvent mais c'est tellement symptomatique, du Ministère de l'Écologie, du Ministère de l'Agriculture, chacun conservant l'information sur des mesures de qualité de l'air, de pollution de rivières et de pollution des champs, chacun ayant fait ses mesures mais ne partageant pas avec l'autre.
 
Il y a quelques règles, quelques standards, quelques fondamentaux quand on s'engage dans l'Open Data. Je l'ai dit, on a essayé effectivement de favoriser le plus possible la liberté de réutilisation, de faire en sorte que cette liberté soit la plus large possible, que la simplicité de réutilisation soit la plus favorisée, la plus engagée possible. Évidemment la gratuité de la réutilisation est pour nous un des points clef, une des pierres angulaires de la politique d'Open Data conduite par l’État pour une raison excessivement simple puisqu'on parle de l'Open Data appliquée aux données publiques, des données produites dans le cadre d'une mission de service public, par le service public, pour une finalité d’intérêt général. Ces données appartiennent à tout le monde, elles appartiennent à tous les gens qu'on pouvait citer tout à l'heure, elles vous appartiennent, elles m'appartiennent. Au fond il n'y a peut-être même pas d'appartenance. La réalité est que ces informations sont produites dans le cadre d'une mission de service publique et donc elles ont vocation à être partagées avec le plus grand nombre. Le service public ne peut pas être opaque, doit être transparent et ne peut être opaque et il doit être dans une ouverture la plus totale. C'est effectivement au soutien d'une stratégie d'Open Goverment qu'on essaye aussi d'engager la politique d'Open Data.
 
 
 
==09'11 ==
 
Donc effectivement pour nous c'est très clair il n'y a pas de droits de propriété sur les données publiques. Si on reconnaît des droits de propriété intellectuelle sur les données publiques, soyons totalement transparents entre nous-mêmes, ça voudrait dire par exemple que la direction du budget aurait la propriété intellectuelle des dépenses ou des comptes détaillés de l'État. Ça voudrait dire que la direction générale de la Police nationale aurait la propriété intellectuelle des faits de délinquance ou de criminalité sur le territoire. Donc ça n'aurait aucun sens et ce sont ces données publiques qui sont engagées dans la stratégie d'Open Data et que l'on va chercher avec les communautés de ré-utilisateurs aussi diverses et variées qu’elles soient parce que parfois, nous-mêmes, à Matignon, nous ne connaissons pas tout ce qui existe dans les silos informatiques des ministères.
 
 
 
Alors concrètement aussi, ça impose une autre règle, c'est, pas de données personnelles. Nous ne sommes pas dans la volonté de faire la transparence sur vos données fiscales par exemple ou sur vos déclarations de revenus, bien entendu. C'est la complémentarité, puisque nous sommes sur des sujets de liberté publique, liberté d'information de notre côté respect de la vie privée de l'autre. Nous sommes extrêmement vigilants à ne pas publier de données à caractère personnel, ce qui est parfois sans doute avec quelques zones grises, où les données personnelles sont mélangées à des données publiques et il y a des débats, il y a des discussions qui auront encore lieu et je pense qu'elles ne s’arrêteront pas si facilement. Parfois il faut effectivement avoir des discussions les plus ouvertes possibles pour essayer de trancher les sujets.
 
 
 
L'objectif c'est clairement permettre à tout le monde d'accéder et de réutiliser l'information, publique, c'est-à-dire celle qui est produite dans le cadre d'une mission de service public. Des exemples, j'en ai donné quelques-uns sur le résumé mais ils ne sont peut-être pas tous en Open Data. La réserve parlementaire récemment, la réserve parlementaire c'est la possibilité pour des parlementaires d'avoir des budgets, des subventions, alloués soit à des collectivités territoriales soit à des associations. Le problème c'est que ça se faisait jusque-là en totale opacité. Donc on a lutté et en l’occurrence c'est un citoyen qui a obtenu et c'est regrettable d'ailleurs qu'il ait dû attendre trois ans pour l'avoir puisqu'il a d'abord demandé à la [http://www.cada.fr/ CADA] et la CADA lui avait rendu un avis favorable en disant « eh bien oui le ministère de l'Intérieur devrait vous ouvrir les données de la réserve parlementaire et vous les partager ». Mais le ministère de l'Intérieur s'est braqué et on s'est retrouvés devant le tribunal administratif et ce citoyen a obtenu gain de cause devant la justice où le tribunal administratif de Paris a fini par lui dire « oui effectivement ce sont bien des données publiques.  Les subventions qui sont allouées par les parlementaires aux collectivités doivent être ouvertes et surtout ouvertes à la réutilisation de tout le monde ».
 
 
 
Voila c’était quelques exemples. On parle souvent des cabinets ministériels ou des notes de frais des ministres. Ça existe, ce n'est pas forcément des notes de frais, mais en tout état de cause, les budgets, les dépenses qui sont alloués pour chaque cabinet ministériel et pour chaque ministre c'est ce qu'on appelle un jeûne budgétaire. C'est un document annexé à la loi de finances chaque année. ce sont des documents qui sont aussi mis en Open Data sur [http://www.data.gouv.fr/ data.gouv.fr] qui est la plate-forme qu'on a créée au sein d'Etalab.
 
 
 
Je reviens juste sur les raisons profondes qui nous ont motivés à engager cette démarche et qui nous motivent surtout au quotidien à la poursuivre et à essayer de convaincre le plus grand nombre de personnes au sein de l'État ou ailleurs pour s'engager dans ces démarches d'Open Data. C'est évidemment une logique de transparence pour garantir,  pour maximiser la liberté d’information. La liberté d'information c'est la liberté d'expression des uns et des autres, ce sont les libertés publiques, donc on est sur des sujets de droit fondamentaux et on est convaincus qu’effectivement plus on garantit les libertés fondamentales des individus plus la démocratie se renouvelle, s'oxygène et donc mieux on se porte.
 
 
 
C'est évidemment rendre des comptes aux citoyens. On est dans les textes fondateurs là de notre démocratie. L'article 15 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789, ça paraît très désuet et en même temps quand on se plonge dans ce document c'est extrêmement d'actualité. L'article 6 vous parle de démocratie directe. L'article 15 vous parle de rendre des comptes sur l'action publique : la société a le droit de demander compte a tout agent public de son administration donc c'est exactement au cœur du projet, de la motivation de l'Open Data. C'est une façon d'interpeller les élus évidemment totalement différente. Plus besoin d’être vous-même élu ou mandaté pour pouvoir discuter avec vos élus, c'est une façon d'avoir accès aux informations qu’eux-mêmes parfois n'ont pas, c'est plus compliqué que ça, mais en tout cas de pouvoir leur dire je ne comprends pas, ces données sont en ligne, que veut dire dette donnée, pourquoi vous avez dépensé ou alloué cette subvention à telle ou telle association, etc, par exemple, c'est un exemple. Au fond c'est accepter le débat contradictoire.
 
 
 
C'est aussi permettre à la démocratie de se grandir et aux institutions, aux administrations, aux agents publics  aussi eux-mêmes rentrer dans un dialogue et un débat avec la société civile qui, en accédant et en réutilisant ces informations peut avoir une approche et un point de vue différent du ministère, différent de l'administration ou différent de la collectivité territoriale. C'est permettre aussi d'avoir des débats qui sont contradictoires et au fond rechercher la vérité, mais avec les prismes et les approches des uns et des autres plutôt que d'avoir une vérité unique, incontestable et incontestée.
 
 
 
Bien entendu c'est permettre l'innovation avec la donnée. C'est aussi comme ça que la démocratie peut se grandir, avec des nouveaux services, innovants, des nouvelles applications mobiles, on en a déjà parlé tout à l'heure, je vais en dire un mot, mais on a lancé en février 2012 une initiative, une série de concours invitant les ré-utilisateurs à prendre des données publiques qui sont mises en ligne sur la plate-forme de l'État, mais aussi celles des collectivités territoriales ou au fond toute donnée pour créer des services, créer des applications mobiles intéressantes, et on a, pour vous donner un ordre d'idées, en trois concours, on vient de lancer le quatrième qui se termine en décembre et on espère qu'on aura d'aussi beaux projets, mais sur les trois premiers concours on a déjà eu cent projets candidats, une vingtaine de lauréats, avec des applications, des services qui fonctionnent très bien, qui apportent une vraie valeur ajoutée évidemment soit économique, soit sociale, soit citoyenne, soit associative. Donc on est extrêmement contents, nous, d'apporter une petite pierre à l'édifice pour essayer effectivement de favoriser, d'engager, de faciliter la réutilisation de ces données et de ces projets innovants.
 
 
 
==15' 47 ==
 
Enfin pour terminer c'est un enjeu de souveraineté extrêmement fort sur le plan économique comme sur le plan politique.
 

Dernière version du 30 mars 2016 à 08:24


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