Le CECIL - Radio Alto

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Titre : Le CECIL

Intervenant : Sylvain Steer - Héloïse Pierre, etikya.fr - Marion Bourget, journaliste pour Radio Alto

Lieu : Émission TIC éthique #14 - Radio Alto

Date : Juillet 2017

Durée : 53 min 30

Écouter l'émission

Licence de la transcription : Verbatim

Statut : Transcrit MO


Description

Le CECIL, Centre d’Étude sur la Citoyenneté, l'Informatisation et les Libertés vise à donner une assise solide et permanente à l'étude critique de l'informatisation de la société et aux interventions citoyennes dans ce domaine, rencontre avec l'un des salariés du CECIL.


Transcription

Coton tige FM – Coton tige FM sur Alto

Voix Off – Frédéric Couchet : Accordons-nous juste une petite pause pour expliquer l’importance de l’informatique aujourd’hui.

Marion : Frédéric Couchet, délégué général et fondateur de l’April.

Voix Off – Frédéric Couchet : Vous serez d’accord avec moi que les ordinateurs sont omniprésents dans note quotidien : réseaux sociaux, services bancaires, services publics ; il est donc essentiel que nous gardions le contrôle sur nos outils.

Marion : Garder le contrôle sur nos outils informatiques. C’est la raison de la création de l’émission Tic éthique. Pas pour faire de chacun de vous quelqu’un capable de cracker n’importe quel logiciel. Non ! Mais parce que nous sommes intimement convaincus que le lien entre la compréhension de l’outil informatique et la défense de nos libertés est étroit. Et nous ne sommes pas les seuls penser ça. Pour preuve l’existence du CECIL, le Centre d’Études sur la Citoyenneté, l’Informatisation et les Libertés. Et pour mieux vous expliquer ce lien, pas forcément évident au premier abord, le lien entre l’usage des technologies et vos libertés, Héloïse a rencontré un membre du CECIL.

Sylvain : Je m’appelle Sylvain Steer, j’ai fait une formation juridique et puis j’ai dévié dans les travaux de recherche sur d’autres disciplines, disciplines sciences sociales et ce qu’on appelle les études sur les sciences et les techniques. Et en travaillant sur les interactions entre les libertés fondamentales et l’informatique, je me suis retrouvé à travailler pour une association qui s’appelle le CECIL, donc le Centre d’Études sur la Citoyenneté, l’Informatisation et les Libertés où j’ai travaillé deux ans en tant que chargé de mission, où là j’ai vraiment fait de l’opérationnel sur ces questions-là, très loin au-delà du droit, vraiment sur de la formation même à l’utilisation de l’informatique, aux bonnes pratiques de choses et aussi du lobbying citoyen, enfin de l’influence citoyenne, avec d’autres association sur ces questions-là.

Marion : D’accord. Est-ce que vous pourriez justement nous en dire un peu plus sur le CECIL ?

Sylvain : Le CECIL est une association qui date de 2008 et qui, en fait, s’est construite dans la continuité d’un mouvement qui a débuté un peu avec la loi de 78, donc la loi informatique et libertés, qui est la première pierre de la protection des libertés face à l’informatique en France et qui a développé tout un mouvement d’enseignants, notamment dans les IUT mais pas que, qui ont créé la doctrine, enfin qui ont posé les bases de ce régime et notamment autour de deux revues scientifiques, notamment la revue CREIS et la revue Terminal qui sont maintenant dans une même association qui édite, du coup, une revue s’appelle CREIS-Terminal et le CECIL a un peu été créé pour aller plus loin, justement, de la seule recherche, enfin la seule recherche adressée au législateur, à la technique, enfin voilà pour poser les bases. Mais le CECIL a pour vocation d’aller au-delà que ça et d’aller vers l’éducation populaire, d’impliquer aussi des journalistes, des citoyens, enfin de dépasser vraiment le cadre très recherche, très académique, pour entrer dans des enjeux du quotidien et des enjeux d’éducation.

Marion : D’accord. Votre but c’est un peu de sensibiliser, je dirais, les citoyens lambda ou en tout cas le grand public à ces questions et ces en jeux liés à la technologie ?

Sylvain : C’est ça. Ce n’est pas que sensibiliser même si en pratique c’est quand même beaucoup ça. On fait des cinés-débats, des interventions, on tient des tables pour informer, on intervient à différentes occasions ou sur les débats de société, ce type de choses. C’est aussi essayer, mais alors ça c’est quelque chose qui est peut-être plus à développer, essayer d’impliquer directement les personnes pour se réapproprier la réflexion sur les sciences et les techniques et principalement l’informatique, notamment face aux libertés fondamentales.

Marion : D’accord. Pourquoi est-ce que c’est important pour vous d’impliquer les gens sur ces questions-là ?

Sylvain : Parce que ce sont des sujets qui sont extrêmement importants. On touche vraiment à des enjeux qui sont colossaux dans la société. Ça rejoint un peu mon parcours. Je me suis intéressé à toutes ces questions à partir d’un livre qui est un petit peu connu, qui s’appelle Code is law, On Liberty in Cyberspace, de Lawrence Lessig donc le code fait loi et les autres lois du cyberespace ; qui montre, en fait, qu’il y a différentes forces ??? dans la société, mais je veux rentrer dans le détail là-dessus, mais notamment que les personnes qui vont déterminer la technique, qui vont être les personnes qui vont gérer le code, qui vont gérer les services ont, en fait, une possibilité d’influence majeure dans la société et vont conditionner les lois. Ce qu’on constate au quotidien avec le fait que si Google considère que l’algorithme du moteur de recherche va privilégier, par exemple, les contenus récents, eh bien ça va privilégier éventuellement un article de presse un peu sensationnaliste sur quelque chose qui vient de se passer dans un conflit, par exemple le conflit israélo-palestinien. On va avoir un article de presse plutôt récent qui va ressortir plutôt qu’un article d’analyse de fond qui pourrait donner plus les enjeux, plus ce type de choses et, par ce biais-là, influencer éventuellement la pensée des personnes qui pensent faire une recherche objective, alors qu’en réalité il y a quelqu’un derrière qui fait des choix qui sont les siens.

Donc en ça et pour plein d’autres raisons, en fait, la technique et l’informatique conditionnent quand même très largement la vie de tout le monde à l’heure actuelle et sans forcément que tout le monde en ait bien conscience et, en tout cas, sans forcément que tout le monde ait les armes pour comprendre les enjeux et pour éventuellement s’opposer à ce à quoi ils peuvent s’opposer et agir pour défendre toujours plus les libertés.

Marion : D’accord. C’est vrai que vous avez participé grandement à l’écriture du livre Guide de survie à destination des aventuriers d’Internet qui a été coédité justement par le CECIL mais également la Ligue des droits de l’homme.

Sylvain : Oui. En fait à la base le Guide de survie c’est un document dont on avait plus ou moins besoin en interne. On réalisait ce qu’on appelle des ateliers d’autodéfense numérique, donc de formation directe auprès des personnes pour leur dire eh bien voilà, il y a des enjeux politiques, il y a des enjeux qui se jouent au niveau de la société dans son ensemble et sur lesquels on agit, pour en parler on risque de ??? autrement, mais on agit sur ces terrains-là avec un groupement d’associations qui s’appelle l’Observatoire des Libertés du Numérique où on essaye d’éviter que les nouveaux textes, les nouvelles lois, soient toujours plus attentatoires aux libertés. On a notamment pas mal travaillé sur la loi sur le renseignement. Mais du côté du CECIL, du coup, on fait aussi des ateliers d’auto-défense numérique pour, au-delà de la question politique générale sur laquelle les réponses sont globales, il y a aussi une possibilité pour chaque citoyen de limiter un peu la surveillance au quotidien, de s’opposer, dans une certaine mesure, à des opérations de surveillance qui ont lieu en ligne. Et du coup, le but de l’atelier d’auto-défense numérique c’est d’appendre les premières méthodes pour limiter ces possibilités-là.

Donc on fait des choses ???. Moi, ce sont des questions sur lesquelles j’étais compétent, mais ne serait-ce que pour transmettre, pour que d’autres personnes puissent le faire, on avait besoin d’un document en interne donc j’avais réalisé des petites fiches sur les premiers à faire sur différents sujets. Et ça a bien plu. La Ligue des droits de l’homme avec laquelle on avait l’habitude de travailler ça leur a bien plu et ils ont voulu le transmettre du numérique au papier et, du coup, ils ont participé à l’édition de ce petit guide qui fonctionne bien depuis et qui a l’air de trouver son public.

Marion : Oui, parce que vos fiches, les fiches pratiques sont accessibles sur votre site internet, donc tout le monde peut les trouver.

Sylvain : Tout le monde peut les trouver librement. Elles sont sous licence Creative Commons donc elles sont librement réutilisables et modifiables sauf ce qu’on appelle la paternité, mais tout le monde peut se les approprier et les rediffuser sans aucune contrainte.

Marion : La rédaction de ces fiches pratiques c’est une des actions très concrètes que vous menez pour donner, on va dire, des armes de résistance presque aux gens !

Sylvain : C’est ça, c’est l’objectif de ces fiches. De la même façon qu’il y a besoin d’autodéfense intellectuelle pour ne pas subir des manipulations de personnes avec qui on va débattre ou de subir donc des manipulations des médias qui pourraient transmettre de l’information qui serait mauvaise, qui serait mensongère, qui viserait à influencer le lecteur. L’autodéfense numérique c’est aussi se protéger contre les agresseurs sur Internet et, effectivement, il y a des personnes qui ne veulent pas forcément que notre bien. Alors elles ne veulent pas forcément notre mal, nous faire du mal physiquement, mais s’approprier nos données, influer nos comportements, réaliser du profilage pour changer nos habitudes de consommation ou, dans le cadre des États ou d’autres puissances nous surveiller directement, avoir nos habitudes de vie pour éventuellement nous faire chanter. Ce type de choses c’est aussi possible ou nous envoyer en prison dans certaines circonstances, c’est aussi possible. Donc c’est pour s’opposer à ça, c’est limiter les intrusions sur Internet et en matière d’informatique en général.

Marion : Oui. C’est vrai que la technologie en général, on y fait face au quotidien, mais on la trouve plutôt utile et puis normale aussi dans notre monde moderne. Mais du coup, ce que vous vous dites c’est que cette technologie ne nous facilite pas seulement la vie, mais a un impact, en fait, à plein de niveaux et c’est ça peut-être dont les gens n’ont pas vraiment conscience. À un niveau, vous disiez politique, ça peut influencer même ce qu’on pense sur un sujet. Là vous donniez l’exemple des moteurs de recherche.

Sylvain : Oui, effectivement. Pour y revenir, quand même, on est très loin d’être des néo-luddistes même si on a une approche critique sur l’évolution des techniques. On accepte tous, au sein de CECIL, les apports positifs de l’informatique et d’Internet. On n’est pas du tout dans une approche « ah non surtout il ne faut plus qu’il y ait d’informatique ! »

Marion : C’est bien !

Sylvain : Mais justement, il faut essayer d’en tirer les meilleurs aspects en limitant les pires, en limitant les possibilités de surveillance notamment. Effectivement, parler de dangers c’est toujours un peu problématique. Mais oui, il y a des choses qui ne vont pas dans le sens des intérêts de la personne quand elle fait la plupart des comportements qu’on va considérer comme normaux sur Internet. Ça veut dire qu’une personne qui va avoir un compte Gmail, c’est le cas de nombreuses personnes,, c’est un service qui effectivement fonctionne bien, il faut qu’elle comprenne que tous ses e-mails, Google les « possède » entre guillemets, peut y accéder, va les scanner pour faire de la publicité ciblée ; va s’en servir pour savoir ce qui intéresse la personne et, éventuellement, lui proposer la bonne publicité au bon moment et du coup en fait, clairement manipuler la personne dans un acte d’achat qu’elle n’aurait peut-être pas fait autrement. Ça c’est pour le cas de Google. De l’autre côté il y a le problème de la surveillance étatique ou, en tout cas, par des acteurs du niveau étatique qui eux sont intéressés, qui ont été révélés notamment par les révélations Snowden, qui montrent que les renseignements américains et les renseignements des autres pays amis des Américains et très probablement de la France, on le sait depuis le renseignement, mais de la France et des autres pays européens, s’intéressent à la vie privée de tous leurs citoyens. Dans certains cas pour des motifs légitimes de lutte contre le terrorisme mais avec des méthodes qui, elles, dépassent largement ces questions-là et qui permettent de faire de la surveillance de tout un chacun dans plein de situations. Voilà !

Quand l’Amérique de Trump demande désormais à toutes les personnes qui viennent sur le sol américain de lui confier les comptes qu’elles utilisent sur les réseaux sociaux et même, potentiellement, les mots de passe pour pouvoir examiner ; qu’il y ait des possibilités d’examen, aussi, de tous les matériels informatiques qui vont être amenés sur le territoire de à peu près tout le monde, on peut vraiment se poser la question de la légitimité de l’action de l’État sur ces questions-là.

Un double problème : d’un côté une surveillance des acteurs privés essentiellement à des fins de manipulation commerciale, à des fins d’établir du profilage pour aller toujours plus loin. On peut parler de publicité, mais ça peut aussi être en matière d’assurances pour savoir que telle ou telle personne on a plutôt intérêt à lui donner le prêt ou, à l’inverse, ne pas du tout l’aider parce qu’elle ne sera pas solvable. Dans le cadre de la surveillance publique, ça peut être de la surveillance plus diffuse et moins lointaine que la surveillance étatique. L’université, par exemple, qui propose déjà, alors pas en France mais aux États-Unis, aux étudiants de porter des bracelets connectés qui vont jouer dans leur note de sport : au final, si vous avez bien vos tant de pas pendant la semaine, eh bien dans ce cas-là vous allez avoir une bonne note. Oui. Sauf que derrière un bracelet connecté qui va recueillir ce type de données, il peut éventuellement révéler beaucoup plus sur la personne que seulement son nombre de pas. Donc ce sont des choses sur lesquelles il faut rester vigilant et essayer de voir ce qu’on peut accepter ou ce qui, effectivement, doit plutôt être rejeté.

13’ 03

Marion : Vous disiez que vous faisiez du lobbying/em> citoyen.