Différences entre les versions de « La neutralité du Net, c'est l'absence de censure - Usbek & Rica »

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'''Titre :''' « La neutralité du Net, c'est l'absence de censure »
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Publié [https://www.april.org/la-neutralite-du-net-c-est-l-absence-de-censure-usbek-rica ici] - Décembre 2017
 
 
'''Intervenants :''' Sébastien Soriano - Guillaume Ledit - Annabelle Laurent
 
 
 
'''Lieu :''' Usbek & Rica, podcast#4
 
 
 
'''Date :''' décembre 2017
 
 
 
'''Durée :''' 22 min 37
 
 
 
'''[https://usbeketrica.com/article/usbek-rica-podcast-neutralite-du-net-sebastien-soriano Écouter le podcast] '''
 
 
 
'''Licence de la transcription :''' [http://www.gnu.org/licenses/licenses.html#VerbatimCopying Verbatim]
 
 
 
'''Statut :''' Transcrit MO
 
 
 
==Description==
 
 
 
Contrairement aux apparences, la neutralité du Net, c'est plutôt simple à comprendre : c'est le principe qui exclut toute forme de discrimination à l’égard de la source, de la destination ou du contenu de l’information transmise sur le réseau. En clair, ça veut dire que vous, votre voisin ou Emmanuel Macron avez potentiellement accès au même Internet.
 
 
 
==Transcription==
 
 
 
Usbek & Rica. Le podcast qui explore le futur.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Salut les ??? et merci à toutes et à tous qui êtes toujours plus nombreux à nous écouter. Ça fait très chaud au cœur. Pour cet épisode un peu particulier on va se focaliser sur le futur d’Internet. Un futur aujourd’hui menacé par l’atteinte à un principe essentiel à son bon fonctionnement, la neutralité du Net. Ne partez pas tout de suite, la neutralité du Net c’est plutôt simple à comprendre. C’est le principe qui exclut toute forme de discrimination à l’égard de la source, de la destination, du contenu de l’information transmise sur le réseau. En clair, ça veut dire que moi, mon voisin, vous, Emmanuel Macron, avons potentiellement accès au même Internet, qu’on y traîne depuis un bon vieil ordi, un mobile ou un machin connecté. On peut tous créer du contenu, le mettre en ligne ou simplement en profiter. La neutralité du Net c’est ce qui permet notamment ça : [musique].
 
 
 
C’est difficile d’enchaîner sur des canards qui couinent. Bon bref ! Pour parler de ce sujet un petit peu sérieux, on reçoit Sébastien Soriano. Bonsoir Sébastien
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>Bonsoir.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Vous êtes depuis 2015 le patron de l’Autorité de régulation des communications et des postes, plus connu sous le nom de l’ARCEP, voire de gendarme des télécoms, vous nous direz si vous appréciez ce surnom. Avant de rentrer dans le vif du sujet avec vous, on a eu la chance, on a la chance d’avoir notre envoyée spéciale dans le futur, Annabelle Laurent. Annabelle tu me reçois ?
 
 
 
<b>Annabelle Laurent : </b>Oui Guillaume, je te reçois. Je suis en direct de la Place de la République où les militants pour la défense de la neutralité du Net sont réunis depuis plusieurs jours. Tous réclament le respect de leurs libertés sur Internet. J’entends beaucoup de nostalgie, beaucoup font référence au signal d’alerte que l’on aurait dû entendre dès 2017 avec ce qui se passait aux États-Unis. Bref, il y a une atmosphère de Nuit debout version 2025 et rapidement je vais vous raconter ma journée pour qu’on comprenne bien ce qui est en train de changer. J’allais me rendre sur Usbek & Rica ce matin pour lire un article sur le parti platiste, sauf que j’avais oublié que j’étais sur SFR et SFR fait partie d’Altis qui détient <em>Libération</em>, <em>l’Express</em> ou BFM.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Ils existent encore ceux-là.
 
 
 
<b>Annabelle Laurent : </b>Qui existent encore. Ils ont tout intérêt à ce que je consulte leurs sites pour m’informer plutôt Usbek & Rica. Donc je reçois un message qui m’invite à ajouter quelques euros supplémentaires à mon abonnement si je veux avoir accès à l’intégralité de la presse donc à mon propre site. Je rentre chez moi désespérée. Chez moi j’ai Internet grâce à Orange et Orange a lancé une nouvelle heure de SVoD. Je voulais regarder la saison 12 de <em>Black Mirror</em> sur Netflix, mais Orange s’est dit « et si on lui ralentissait Netflix ! ». Du coup ma série j’ai l’impression de la regarder comme si on était dans les années 90. Fin de mes exploits, je voulais passer un appel sur Skype, mais impossible puisque, bien évidemment, mon opérateur m’en a bloqué l’accès puisque c’est aussi une concurrence sur lui. Me revoilà donc à République pour rejoindre le combat pour défendre la neutralité du Net.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Voilà. Alors c’est assez clair, à Usbek & Rica on prend le parti de défendre la neutralité du Net. Pour vous Sébastien Soriano, la meilleure définition de la neutralité c’est quoi ?
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>C’est l’absence de censure. C’est le fait que les contenus qui sont sur Internet y sont postés librement ; que les applications et les services qui sont lancés sur Internet, toutes les start-ups, toute PME qui veut se lancer sur Internet, peut le faire sans demander l’autorisation à personne. C’est cette liberté fondamentale que garantit la neutralité du Net. Sur un plan technique, ça signifie que l’architecture de ce qui est Internet est respectée. Internet ça veut dire <em>inter networks</em>, c’est-à-dire c’est un réseau de réseaux et tout le monde peut arriver avec son petit bout de réseau, son ordinateur personnel, l’ordinateur d’une entreprise, et se connecter au grand réseau sans avoir à demander l’autorisation de quinconque. C’est vraiment la nature même d’Internet cette interconnexion libre dans laquelle chacun peut consulter, regarder et poster librement.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Justement, ce principe est menacé notamment aux États-Unis. On va revenir un peu sur ce qui s’est passé depuis mars, puisque le Congrès américain est revenu sur la régulation votée sous Obama qui protégeait la neutralité et empêchait les opérateurs donc de privilégier ou de ralentir le trafic. Votre homologue américain Ajit Pai, un ancien d’ailleurs du FAI Verizon, a pris la tête de la Federal Communications Commission, la FCC, et a fait savoir récemment qu’il comptait remettre en cause la protection de la neutralité aux États-Unis. Est-ce que ça revient, pour vous, à la mort de la neutralité du Net ?
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>Non. Non ! Contrairement aux intuitions qu’on peut avoir, Internet est certes mondial, mais Internet fonctionne sur des réseaux qui eux sont nationaux. Et donc vous pouvez avoir un Internet qui n’est pas neutre aux États-Unis et qui est neutre en Europe. Ça peut paraître paradoxal, mais c’est ainsi. Vous avez des régimes juridiques qui sont vraiment totalement indépendants et donc, quel que soit le choix qui est fait aux États-Unis, l’Europe pourra faire le choix de conserver un Internet neutre. Et je rappelle que c’est le choix qu’a fait l’Europe, un choix très fort en 2015, à travers un règlement qui a été adopté et donc qui engage toutes les institutions politiques européennes, donc les États membres, les 28 États membres à travers le Conseil, tous les députés européens à travers le Parlement et la Commission elle-même, qui se sont engagés avec un texte qui donc n’est pas réversible du jour au lendemain.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>D’accord.
 
 
 
<b>Annabelle Laurent : </b>La question qu’on se posait, je suis de retour en 2017, excusez-moi, c’est est-ce qu’il peut y avoir un retournement avant le 14 décembre, ou là la situation paraît condamnée, donc le 14 décembre étant la date à laquelle la FCC doit se prononcer ?
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>Il peut toujours y avoir des, comment dire, des petits bugs juridiques, des interrogations qui font que ça peut prendre un tout petit plus de temps, mais je crois qu’en opportunité sur le choix de fond, je ne vois pas ce qui pourrait changer. Contrairement au régulateur en Europe, le patron de la FCC change quand le patron de la Maison-Blanche change. Donc c’est une autorité qui a beaucoup de pouvoirs mais qui n’est pas aussi indépendante que les régulateurs en Europe et à partir du moment où il y a ce changement de patron de la FCC que vous avez mentionné avec l’arrivée d’Ajit Pai, qui a remplacé Tom Wheeler.
 
 
 
<b>Annabelle Laurent : </b>Sous l’impulsion de Trump, c’est lui qui l’a nommé.
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>Voilà, qui est vraiment quelqu’un de proche de Trump. La majorité est passée, au sein du collège des commissaires de la FFC donc de trois républicains avec deux démocrates. Du coup l’équilibre est clairement dans le sens de retirer les règles de neutralité du Net.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Et ça vous inspire un régulateur qui dérégule ?
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>La première chose, ce que ça m’inspire c’est qu’il est malsain de changer d’avis trop souvent. Le secteur des télécoms et le numérique en général a besoin de long terme, d’installer des règles qui durent longtemps, de manière à ce que les opérateurs d’abord qui subissent un certain nombre de contraintes et c’est normal, puissent savoir quand ces contraintes vont arriver, de quelle nature elles vont être et qu’elles soient suffisamment dans du long terme, dans de la durée, de manière à ce qu’ils puissent investir en connaissance de cause. Et évidemment, pour l’ensemble de l’écosystème du numérique, qu’ils puissent savoir également comment est-ce qu’ils vont pouvoir utiliser les réseaux. Et la première chose qui me frappe aux États-Unis c’est que cette neutralité du Net fait débat depuis plus de dix ans et on est dans un permanent aller-retour entre des règles, pas de règles, parfois pour des raisons juridiques : il y a eu des règles qui ont été définies précédemment qui avaient été annulées parce que la base légale n’était pas suffisamment solide. Et puis cette fois ce n’est pas ou des raisons légales, c’est pour des raisons politiques que la neutralité du Net sera certainement retirée à la fin de l’année. Et donc c’est d’abord cette instabilité qui me paraît vraiment étonnante quand on la compare au cadre européen de régulation qui lui est quand même beaucoup plus stable.
 
 
 
<b>Annabelle Laurent : </b>Est-ce qu’on peut imaginer que ce cadre européen finisse par être touché par ce qui se passe aux États-Unis ? Est-ce qu’on peut imaginer qu’il y ait des conséquences en France ? Donc là on a imaginé un scénario catastrophe.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Que ça donne quelques idées !
 
 
 
<b>Annabelle Laurent : </b>Est-ce que ça pourrait donner des idées à nos FAI français ?
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>Comme je l’ai dit tout à l’heure, aujourd’hui il y a un règlement. Donc il y a un règlement, il existe, il est extrêmement clair sur le fait que toute discrimination est parfaitement bannie. Il y a des règles qui sont un peu différentes sur les tarifs avec les fameuses pratiques de <em>zero-rating</em> sur lesquelles on pourra revenir où c’est un petit peu plus compliqué, il y a une espèce de zone grise. Mais en tout cas sur tout ce qui est les pratiques techniques, les opérateurs en Europe n’ont pas le droit de différencier les flux sur Internet en fonction de leur nature ; ils doivent les traiter parfaitement de la même manière, de manière homogène. Donc ça c’est très clair et ce règlement est là pour longtemps. Alors comme tous les textes européens, il y a des clauses de revue, donc il y aura un rendez-vous pour faire le bilan sur ce texte qui commencera en 2019. Le BEREC, qui est l’organe des régulateurs européens que je préside par ailleurs cette année, aura son mot à dire et de là où je suis, vous pouvez compter sur moi pour militer pour maintenir de ce texte. Donc encore une fois, parce qu’on a besoin de stabilité et que ce texte paraît donner satisfaction sur bien des plans et qu’on a besoin de temps pour pouvoir évaluer, pour bien le mettre en œuvre. Et donc, de mon point de vue en tout cas, il n’y a pas de légitimité à remettre en cause ce texte.
 
 
 
<b>Guillaume Ledit : </b>Vous avez mentionné, vous avez évoqué le <em>zero-rating</em> et tant qu’à faire autant revenir dessus maintenant. En quoi ça consiste et en quoi ça peut porter atteinte au principe de neutralité ?
 
 
 
==10’ 30==
 
 
 
<b>Sébastien Soriano : </b>Le <em>zero-rating</em> ça consiste à donner gratuitement certains services sur Internet.
 

Dernière version du 19 décembre 2017 à 13:49


Publié ici - Décembre 2017