Émission Libre à vous ! sur Cause Commune du 5 mars 2024

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Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 5 mars 2024 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : Marie-Odile Morandi - Laure-Élise Déniel - Sébastien Soriano - Étienne Gonnu - Jean-Christophe Becquet - Frédéric Couchet - Julie Chaumard à la régie

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 5 mars 2024

Durée : 1 h 30 min

Podcast PROVISOIRE

Page de présentation de l'émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : Déjà prévue

NB : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous dans Libre à vous !. C’est le moment que vous avez choisi pour vous offrir 1 heure 30 d’informations et d’échanges sur les libertés informatiques et également de la musique libre.
L’Institut national de l’information géographique et forestière, ou IGN, et les géocommuns, nous en discuterons, peut-être, avec Sébastien Soriano, directeur général de l’IGN, car nous attendons toujours Sébastien. Ce sera le sujet principal de l’émission du jour.
Également au programme les données géographiques libres pour les territoires et, en fin d’émission, « Critiquer le numérique », la deuxième conférence du triptyque de Louis Derrac.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 5 mars 2024, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast

À la réalisation de l’émission du jour, Julie Chaumard. Bonjour Julie.

Julie Chaumard : Bonjour à tous. Bonne émission.

Frédéric Couchet : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Pépites libres » de Jean-Christophe Becquet, vice-président de l’April, sur le thème des données géographiques libres pour les territoires (rediffusion)

Frédéric Couchet : Nous allons commencer par une pépite libre de Jean-Christophe Becquet. Jean-Christophe est exceptionnellement avec nous au studio. Nous allons d’abord la rediffusion de sa chronique du 23 mars 2021, qui n’est pas sans lien avec le sujet principal de l’émission du jour, puisqu’elle est consacrée aux données géographies libres pour les territoires.
On se retrouve dans moins d’une dizaine de minutes avec Jean-Christophe et son invité, Sébastien Soriano, qui vient d’arriver, directeur général de l’IGN, pour poursuivre la réflexion sur les géocommuns.

[Virgule sonore]

Étienne Gonnu : La chronique « Pépites libres » de Jean-Christophe Becquet, vice-président de l’April.
Salut Jean-Christophe, est-ce que tu es avec nous ?

Jean-Christophe Becquet : Je suis là. Bonjour à tous. Bonjour à toutes.

Étienne Gonnu : Salut. Je crois bien qu’aujourd’hui tu vas nous parler de données géographiques libres.

Jean-Christophe Becquet : Absolument. Le 9 mars dernier, j'ai eu le plaisir d'animer le sujet principal de Libre à vous ! consacré au système d’information géographique libre QGIS. Pour profiter librement d'un tel logiciel, il faut des données ouvertes.
Je voudrais saluer aujourd'hui l'ouverture au premier trimestre 2021 de plusieurs jeux de données par un établissement public qui fêtait récemment ses 80 ans, j'ai nommé l'Institut national de l'information géographique et forestière, plus connu sous l’acronyme IGN. Cela représente plusieurs téraoctets de données sous Licence Ouverte Etalab parmi lesquelles :
la BD TOPO, une base de données vectorielles qui contient notamment la description des contours administratifs, des bâtiments, des réseaux de transport, des lacs, fleuves et rivières ;
la BD ORTHO, qui donne une couverture photo aérienne de tout le territoire avec une précision de 20 cm par pixel ;
ou encore le RGE ALTI, pour Référentiel Grande Échelle, un modèle numérique de terrain qui renseigne l'altitude de chaque point du territoire.
On peut signaler au passage que l’IGN s'appuie sur du logiciel libre, notamment PostgreSQL/PostGIS pour produire la BD TOPO.

Il me semble intéressant de reparcourir quelques-uns des jalons qui ont permis d'aboutir à une décision que les défenseurs de l'open data appelaient de leurs vœux depuis de nombreuses années, le partage sous licence libre des données de l'IGN.
Dans son rapport publié en 2018, la députée Valéria Faure-Muntian préconisait de « diffuser à terme l’ensemble des données géographiques souveraines sous licence libre de type Etalab ». Elle expliquait fort à propos que « l’économie de la donnée n’est pas régie pas les mêmes règles que l’économie réelle. On constate que la richesse de la donnée est établie à partir de l’utilisation qui en est faite, donc de l’accès qui lui est donné. Ainsi, "ce n’est pas la vente de données qui crée de la valeur, mais sa circulation" ».
Quelques mois plus tard, la Cour des comptes adressait au Premier ministre un référé sur l’enjeu de l’ouverture des données publiques de l’IGN, de Météo-France et du Cerema [Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement]. Elle posait alors très clairement le problème : « Pour mettre fin à l'injonction paradoxale qui menace l'équilibre économique de ces établissements, auxquels il est demandé de développer leurs ressources propres grâce à la vente de leurs données tout en procédant à la diffusion libre et gratuite de celles-ci, il est indispensable que l'État clarifie la réglementation relative à l'ouverture des données et accompagne la redéfinition des modèles économiques de ses opérateurs. »
Dans sa réponse à l’interpellation de la Cour des comptes, Édouard Philippe, en mars 2019, annonçait sa décision « de généraliser la gratuité de la réutilisation des données notamment à l’IGN ». Il ajoutait : « Enfin, je partage le constat de la Cour que les services de l’État eux-mêmes n’utilisent pas systématiquement les données ouvertes en open data produites par d’autres acteurs publics. J’ai donc demandé que ces efforts d’ouverture soient soutenus par les services de l’État que j’ai invités à utiliser préférentiellement ces données ouvertes. »
Daniel Bursaux, le directeur général de l’IGN, déclarait à travers une tribune dans le journal Les Échos : « Désormais, la production des données géographiques doit donc s'organiser autour de trois concepts : mutualisation, collaboratif et libre accès. » ; il faudra encore deux ans pour que cette décision devienne effective.

J'aimerais prendre un moment pour analyser cette ouverture des données de l'IGN par rapport à la base de données libre OpenStreetMap. Nous avions consacré notre émission du 11 juin 2019 à ce projet collaboratif mondial que l'on désigne souvent comme le Wikipédia de la cartographie. On pourrait penser que ces initiatives sont concurrentes. Je dirais que c'est absolument le contraire. OpenStreetMap reste un projet absolument remarquable par sa diversité et sa réactivité. La communauté OpenStreetMap, qui compte plus de sept millions de personnes, jardine chaque jour la base de données pour l'enrichir, la compléter, la corriger, la mettre à jour. Les contributeurs expérimentent, ils innovent et la dimension mondiale du projet permet de produire des cartes qui ne s'arrêtent pas aux frontières. Les données de l'IGN, quant à elles, ont l’avantage d'offrir une couverture homogène et standardisée, de grande qualité sur l'ensemble du territoire national.

Les contributeurs OpenStreetMap vont pouvoir s'appuyer sur les données ouvertes par l'IGN pour aller encore plus vite et plus loin. Les collectivités et les administrations doivent apprendre à contribuer sur OpenStreetMap qui fait aujourd'hui référence pour de nombreux usages comme le vélo ou l'accessibilité par exemple. Les réutilisateurs, qu'ils soient services publics, entreprises, associations, écoles, universités et laboratoires de recherche, élus et citoyens, bénéficieront du meilleur des deux mondes. C'est pourquoi il est indispensable que nos décideurs politiques pérennisent le financement de l'IGN pour entretenir les données de référence, renforcer leur diffusion et traduire dans les faits la recommandation n° 7 du rapport Bothorel : « engager la puissance publique sur la voie d'une participation plus active aux communs numériques ». Jean Castex saluait d'ailleurs récemment « l’utilisation des données qui peut contribuer très significativement à l’amélioration des politiques publiques ».

Je voudrais conclure sur un jeu de mots emprunté à Sébastien Soriano, haut fonctionnaire, nommé directeur général de l'IGN au début de l'année 2021. Pour bien comprendre, il faut se souvenir qu'OSM est le raccourci d'OpenStreetMap et SIG l'acronyme de Système d’Information Géographique. Sébastien Soriano s’amusait de constater : « OSM IGN » est une anagramme de « MON SIG ».

Étienne Gonnu : Pas mal ! Une petite question : est-ce que les cartes de randonnée SCAN 25, et tu pourras peut-être nous préciser en deux mots ce que c’est, basculent aussi sous licence libre ?

Jean-Christophe Becquet : Non. Les cartes SCAN 25 sont les cartes bleues de l’IGN, très connues des randonneurs. Elles ne sont pas concernées par l’ouverture des données de l’IGN en open data parce qu’elles intègrent des données qui n’appartiennent à l’IGN, qui sont gérées par d’autres détenteurs de droits, notamment la FFRP, la Fédération française de randonnée pédestre, pour tout ce qui a trait aux itinéraires de grande randonnée et de petite randonnée, donc l’IGN n’a pas les droits pour ouvrir ces cartes.

Étienne Gonnu : Entendu. On voit bien toute la complexité juridique qu’il y a autour de ce sujet.
Merci beaucoup pour ces chroniques et en plus, pour les personnes qui s’intéressent à la question de l’ouverture des données, on sait que l’IGN était un peu emblématique et résistante à l’ouverture, donc c’est intéressant de voir qu’on progresse enfin. J’ai trouvé très intéressant comment, justement, tu montres qu’à la fois les communautés peuvent s’appuyer et profiter de ces ouvertures, mais que les administrations elles-mêmes peuvent aussi en profiter. Une sorte de modèle gagnant-gagnant, même si je n’aime pas particulièrement l’expression.

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : Nous sommes de retour en direct dans Libre à vous ! en 2024. Il s’agissait d’une chronique « Pépites libres » proposée par Christophe Becquet, enregistrée en mars 2021. L’autre voix que vous entendiez, c’était celle de mon collègue Étienne Gonnu qui parlait, à l’époque, « des résistances de l’IGN ». Je crois que les résistances ont été levées, on va en parler après la pause musicale. Au passage, je remercie Étienne pour la préparation de l’émission. Aujourd’hui, en fait, je me contente un peu de suivre le séquentiel.
On va donc faire une petite pause musicale.

[Virgule musicale]

Frédéric Couchet : Après la pause musicale nous, poursuivrons la réflexion de la chronique, puisque nous parlerons de géocommuns avec Sébastien Soriano, directeur général de l’IGN.
En attendant nous allons écouter Nakturnal par Kellee Maize. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Nakturnal par Kellee Maize.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Nakturnal par Kellee Maize, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By 3.0.

[Jingle]

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par le sujet principal.

[Virgule musicale]

L'IGN et les géocommuns, avec Sébastien Soriano, sujet animé par Jean-Christophe Becquet

Frédéric Couchet : Jean-Christophe Becquet, chroniqueur dans Libre à vous !, vice-président de l'April et membre du bureau de la Fédération des professionnels d'OpenStreetMap, reçoit aujourd'hui Sébastien Soriano, directeur général de l'Institut national de l'information géographique et forestière, pour un échange qui s'annonce passionnant. Je vous laisse donc la parole.

Jean-Christophe Becquet : Merci Fred. Bonjour à tous. Bonjour à toutes. Bonjour Sébastien.

Sébastien Soriano : Bonjour.

Jean-Christophe Becquet : Sébastien Soriano, vous êtes, depuis janvier 2021, le directeur général de l’IGN, l'Institut national de l'information géographique et forestière en version longue.
Janvier 2021, c'est précisément à ce moment-là que l’IGN partage sous licence libre d'importantes bases de données référentielles, notamment la BD TOPO, la BD ORTHO et le RGE ALTI®. Nous en reparlerons et nous expliquerons tout cela, bien entendu, dans cette émission.
Dans votre poste précédent, à la présidence de l'Arcep, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, vous voyez Internet comme un bien commun qu'il convient de réguler pour le prémunir de la position dominante des GAFAM. Vous encouragez notamment la régulation par la donnée, à travers les outils développés par l'Arcep, pour recueillir des retours utilisateurs sur les atteintes au réseau.
Aujourd'hui, vous portez au sein de l'IGN, la notion de géocommuns qui se traduit par un rapprochement avec la communauté OpenStreetMap, notamment à travers le projet Panoramax, une pépite libre comme j'aime à le dire.
Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Nous sommes ensemble pour une petite heure. Nous allons parler de données ouvertes ou open data, du Libre dans le secteur public et des géocommuns. Cela vous convient-il comme présentation ?

Sébastien Soriano : Avec plaisir.

Jean-Christophe Becquet : Pour commencer sur les données ouvertes de l'IGN, je voulais recueillir votre avis sur un constat. Ce n'est pas du tout scientifique, c'est une observation personnelle, une observation que j'ai faite à plusieurs titres, que ce soit dans des échanges informels, en famille ou entre amis, ou dans des interventions d'enseignement que je peux réaliser à l'université, notamment dans des formations de master en géographie et urbanisme, ou encore avec des collectivités que j'accompagne à titre professionnel. Je constate, pour ma part, que les données ouvertes de l'IGN sont mal connues. Est-ce que vous partagez ce constat ?

Sébastien Soriano : Oui, sans doute. Je dirais que nous sommes un service public et, comme tous les services publics, nous sommes face à des enjeux qu'on appelle de transformation, de modernisation, appelez ça comme vous voulez. Parmi ces enjeux, il y a effectivement le défi numérique qui nous oblige à nous immerger dans un espace différent.
L'IGN, historiquement, publiait des cartes en papier qui étaient distribuées dans des papeteries ou Au vieux campeur, dans tout un tas d'institutions de ce type et, être présent dans un écosystème numérique, ce n'est pas pareil parce que, en fait, ce ne sont pas les mêmes intermédiaires qui vont porter vos données, qui vont accéder à vos données. Il faut donc un peu refaire son trou, exister dans cet écosystème et montrer l'intérêt de ces données pour des acteurs qui, ou bien font appel à d'autres données, donc, il faut convaincre, parfois, des utilisateurs de Google Maps d'aller utiliser des fonds de plan de l'IGN. Dans la chronique il était question du SCAN 25 qui est l'impression de la carte papier en fait, mais nous fournissons un plan qui lui est libre, qui s'appelle Plan IGN. Aujourd'hui, on trouve encore des mairies ou des acteurs publics, quand ce n'est pas Doctolib, qui vont utiliser des fonds Google plutôt que des fonds gratuits, en accès libre, tel que celui de l’GN.
Il y a donc ce travail de conviction et, ensuite, il y a des acteurs qui ne sont pas forcément conscients de l'intérêt des données. On a des données de tout type, ça foisonne, on a les données de descriptif du territoire : on va avoir, par exemple, des données qui décrivent les bases agricoles, qui vont dire « autour de vous, voilà quelles sont les prairies de plus de cinq ans », on a des bases de données qui vont décrire la forêt, où sont les hêtraies, où sont les chênaies, et il faut aller chercher ces données, il y a donc un chemin à faire.
Il y a parfois, un peu, une pensée magique de l'open data, c’est-à-dire qu’on va ouvrir les données et, tout d'un coup, les usages vont se déployer d’eux-mêmes. Non ! Il y a une espèce de vallée de la Mort, en fait, entre la donnée et son usage, c'est donc un effort d'aller vers les acteurs pour qu'ils se saisissent des données. C’est aussi, je pense, un effort d’éducation, de culture de tous, c'est-à-dire qu’il y a un réflexe de l'ensemble des acteurs de se saisir des données et ça prend aussi un peu de temps de créer ces nouveaux réflexes.

Jean-Christophe Becquet : Vous avez tout à fait raison. Cette démarche open data s'accompagne si on veut qu'elle soit suivie de succès. En tout cas, je trouve ça assez déconcertant. Il y a eu une quinzaine, une vingtaine d'années, j'ai vu dans des administrations, dans des collectivités, des projets nécessitant les données de l’IGN ne pas se faire parce qu’il n'y avait pas le budget pour acheter, à l'époque, les données de l’IGN. Aujourd'hui, ces données sont disponibles, librement accessibles, gratuitement accessibles et, pour autant, effectivement, un grand nombre d'acteurs soit n'a pas connaissance de la disponibilité de ces données, soit fait appel à d'autres fournisseurs de données. Du coup, basculer sur les données de l’IGN exigerait un effort, un effort d'information et de formation, un effort éventuellement d'adaptation de leurs outils et de leurs procédures, donc ça demande du temps.
Un des objectifs de notre émission Libre à vous !, c’est aussi, justement, de participer à faire connaître cette opportunité que constituent les données ouvertes de l'IGN.
Est-ce qu'on peut revenir peut-être par type de public ou par thématique, comme vous avez commencé à le faire en parlant d'agriculture ? Si on voulait dresser un peu un catalogue des données disponibles, qu'est-ce que qu'est-ce qu'on pourrait dire ?

Sébastien Soriano : Il y a d'abord des données qu'on appelle des données sources. Typiquement, notre donnée source la plus connue, ce sont les orthophotographies. En fait, ce sont des photographies aériennes qui sont réalisées à angle droit, d'où « ortho », qui permettent de donner une vue aérienne qui est totalement en licence ouverte.
Aujourd'hui, si vous allez, par exemple, sur votre Google Maps ou sur votre application Apple Plans, vous avez une petite indication qui s'appelle « Satellite » pour avoir une vue d’en haut et, en fait, ce n'est pas du satellite. Non ! Tout ça, c'est de la vue aérienne ; ça s'appelle « Satellite » parce qu'il y a des endroits où la définition est plus faible, où ils n’ont pas les moyens d'aller en avion, donc ils appellent ça « Satellite » pour se couvrir, mais, sur le territoire français, c'est essentiellement de l'avion.
On fournit cette donnée de vues du ciel du territoire français, avec une précision qui est quand même très forte. Une image numérique, vous le savez, est constituée de pixels et un pixel représente 25 cm sur 25 cm au sol, c'est donc vraiment une image extrêmement précise qui permet de voir, y compris, des détails. Par ailleurs, on fournit ces informations ce qu'on appelle en stéréoscopie, excusez-moi du terme, cela veut dire que c'est comme l'œil humain, les yeux, qui ont besoin d'avoir deux angles pour restituer la 3 D. On produit ces données avec cette dimension-là, qui permet notamment de restituer des reliefs.
C'est une première donnée source qui peut être exploitée en licence ouverte.

Ensuite, il y a toutes les bases de données de description, je dirais génériques, du territoire, donc la base topographique qui va donner le relief, les toponymes, c'est-à-dire les noms de lieux, le mont Aigoual, la ville de Paris, le chemin de l'Église, tout ça, donc la toponymie.
Ensuite vous avez les grands thèmes qui vont arriver : vous avez le thème bâti, c'est-à-dire qu’on va donner les différents bâtiments en relief avec le nombre d'étages, leur emprise au sol ; on va donner le filaire routier, c'est-à-dire les routes, leur sens de circulation qui est vrai à 95 %, ce qui est à la fois bien et pas bien, puisque, si on s'en sert comme un navigateur GPS, ce n'est pas forcément suffisant, mais, pour des usages d'aménagement du territoire, c'est largement utile. Et puis, tout ce qui est description de l'occupation des sols naturels, par exemple tout ce qui est cours d'eau, plans d'eau, les reliefs, la forêt bien sûr, et, comme je le disais, les zones agricoles.
Ce sont vraiment toutes les descriptions génériques du territoire.

Et puis, « au-dessus de ça », entre guillemets, on va travailler un peu au cas par cas au service des ministères, ce qu'on appelle l'appui aux politiques publiques.
Aujourd'hui, j'ai envie de dire que la donnée un peu générique de description du territoire, c'est fait. Évidemment, il faut la mettre à jour, mais aujourd'hui le vrai enjeu de la data, de la donnée, c'est qu'elle est utilisée par les acteurs publics, elle est activée pour des besoins particuliers. Par exemple, le ministère de l'Agriculture, qui est en charge de la forêt en France, va avoir besoin des statistiques forestières précises pour pouvoir suivre l'état de santé général des forêts : est-ce que la forêt est en train de croître ou pas ? On sait qu'il y a des problèmes de sécheresse, de maladies, de tout un tas de choses. Vous avez le ministère de l'Écologie, qui lui, par exemple, veut suivre ce qu'on appelle la bétonisation ou, en mots plus techniques, l'artificialisation des sols qui est ce phénomène par lequel les communes ont bâti des zones commerciales, des lotissements, parfois sur des emprises anciennes agricoles et qui conduisent à un mauvais écoulement de l'eau, comme on l'a vu récemment avec les inondations dans le Nord de la France. Cet excès d’artificialisation des sols est aujourd'hui combattu par une politique de sobriété foncière qui est portée au Gouvernement par le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu ,avec un principe qui s'appelle le ZAN, zéro artificialisation nette, qui vise à ce que, à terme, les communes rendent à la nature autant de mètres carrés qu'elles en bétonnent, je simplifie. Nous fournissons donc cette carte d'occupation des sols qui va permettre cette discussion.

Donc voilà un peu les trois étages :
des données sources qui sont des données brutes essentiellement d'imagerie, on y reviendra sans doute, il y a aussi d'autres technologiques qu’on mobilise comme le lidar ;
les données génériques de description du territoire ;
et puis des données plus thématiques qu'on produit pour le compte des ministères, mais qui sont aussi en open data.

Jean-Christophe Becquet : Effectivement. J'ai le souvenir, il y a une dizaine, une douzaine d'années en arrière, que ces orthophotos étaient un cadeau qu'on pouvait faire à nos grands-parents, leur offrir la vue aérienne de leur maison encadrée en format A4. Aujourd'hui, n'importe qui peut, en allant sur le site de l’IGN, télécharger la photo aérienne avec, comme vous l'avez dit, une précision impressionnante 25 cm par pixel. On voit les containers de tri sélectif et on peut reconnaître la couleur du couvercle pour savoir si c'est un container à verre, à emballage ou à déchets ultimes. C'est donc effectivement une donnée extrêmement précise, extrêmement qualitative et accessible sous licence libre pour tout un chacun, chacune, réutilisable pour quelque usage que ce soit, sans restriction aucune, y compris à des fins commerciales.

Sébastien Soriano : Tout à fait.

Jean-Christophe Becquet : Vous avez parlé de la nécessité, pour certaines de ces données, d'entretenir la donnée, de la mettre à jour, de la faire vivre. Ce que vous évoquez sur le lidar m'intéresse, on y reviendra plus tard pour expliquer à nos auditeurs et auditrices ce dont il s'agit. Cette nécessité de mise à jour des données soulève une autre question que j'avais envie de vous poser, un sujet que je voulais aborder avec vous, qui est, du coup, le modèle économique de l'IGN. comment finance-t-on la mise à jour de ces données ?

Sébastien Soriano : C'est compliqué, comme on dit sur les internets. C'est un défi, c'est-à-dire que nous sommes un service public, donc nous recevons ce qu'on appelle une subvention de l'État qui permet de couvrir nos coûts. Sauf que le système, tel qu'il est pensé aujourd'hui, le modèle économique de l'IGN, fait que nous devons compléter cette subvention par ce qu'on appelle des ressources propres, c’est-à-dire des revenus que nous allons tirer ailleurs.
Une partie de ces revenus, qui est de plus en plus faible, sont des revenus commerciaux. On a un certain nombre de contrats historiques dans le domaine du spatial avec des grands acteurs et nos activités commerciales c'était surtout la vente de cartes papier. On continue à en vendre, n'hésitez pas à acheter des cartes papier IGN, nous avons changé la gamme, notamment du 100 millième qui est en train d'arriver, donc n'hésitez pas ! Mais je ne cacherais pas que la carte papier est quand même globalement en déclin, ça ne vous étonnera pas.
La plupart de nos recettes vient, en fait, de ces acteurs publics. Quand je vous disais qu'on est en appui aux politiques publiques, en fait ces acteurs publics, le ministère de l'Écologie, ministère de l'Agriculture vont nous financer la production de ces données.
C'est un système qui est relativement vertueux puisque, finalement, cette donnée c'est un peu comme une levée de fonds. C'est-à-dire qu'on préfinance la donnée, elle est payée par celui qui l'a commanditée, mais, ensuite, c'est ouvert à tous. C’est comme si, au moment de construire une route, quelqu'un avait accepté de construire une petite bretelle supplémentaire de la route et, qu'après, il n’y ait pas de péage, tout le monde peut s'en servir. C'est ça le modèle, c’est un peu un modèle de construction d'une infrastructure informationnelle, excusez-moi de cette terminologie, qu'on construit en fonction des personnes qui sont prêtes à la financer, mais, ensuite on l’ouvre. C'est assez vertueux, mais c’est assez exigeant, puisque ça suppose qu'on reçoive effectivement des commandes de ces différents acteurs publics, d'où la nécessité que vous mentionniez tout à l'heure, que les acteurs publics soient conscients de ce qu'on peut faire avec la donnée. C'est-à-dire que si nous étions face à une administration qui n'ait pas l'habitude de se saisir de la donnée, eh bien nous n'aurions pas de commandes. Cela suppose qu'il y ait une marche générale de l'État vers la donnée, qu’on appelle la politique publique de la donnée, qui aille dans cette direction et qui nous tire pour que ça puisse fonctionner.
Par ailleurs, pour être complet, je dois quand même mentionner que notre principal commanditaire public aujourd'hui est le ministère des Armées, puisque nous sommes un institut dual. En fait, jusque dans les années 90, le ministère des Armées avait des services de géographie propres, il en a encore, mais, à cette époque, ils étaient, entre guillemets, un peu « en miroir » des compétences de l'IGN. Le choix a donc été fait de s'appuyer sur l'IGN qui produit des référentiels pour les Armées, à la fois sur le territoire national mais aussi sur les théâtres d'opérations à partir de vues satellites – on ne va pas voler en avion sur des théâtres d'opérations. C'est un commanditaire important. Notre décret prévoit que c'est un commanditaire qui a une priorité, c'est-à-dire dire que s'il y a une urgence, une crise, eh bien on se met en quatre pour répondre à sa demande, en priorité, par rapport au reste. Ça permet, je dirais, à la fois d'équilibrer notre budget, parce que ça nous fait un commanditaire, et puis il y a une vraie synergie, finalement on est dual comme on dit. Quand on développe des technologies, on travaille beaucoup sur l'intelligence artificielle, la 3D, les sujets de jumeau numérique, on y reviendra, on peut en faire bénéficier à la fois des besoins des politiques publiques, écologiques ou agro-environnementales, et, d'autre part, des applications militaires.

Jean-Christophe Becquet : Il me semble qu’il y a également un aspect intéressant à souligner, on l'évoque aussi quand on parle des modèles économiques du Libre, du logiciel libre en particulier quand on parle au sein de l'April, qui est cette notion de mutualisation des coûts.
Il me semble en effet que dans l'ancien modèle, lorsque les communes notamment, les collectivités achetaient leurs données à l'IGN, en fait l'argent des collectivités, c'est l'argent de nos impôts, on peut donc penser que l'argent de nos impôts était dépensé plusieurs fois pour acheter une donnée produite et vendue, commercialisée par l'IGN.
Aujourd'hui, le modèle c'est plutôt : on affecte une dotation issue de nos impôts au fonctionnement de l'IGN, l'IGN produit et entretient cette donnée et la met à disposition gratuitement des collectivités, mais pas que.

Sébastien Soriano : Tout à fait. C'est effectivement beaucoup plus vertueux pour favoriser l'usage de ces données qui, du coup, se diffusent plus largement.
Un exemple qui a été assez marquant ces derniers temps, si vous voulez bien qu'on évoque la question du lidar. L’IGN conduit à un programme inédit d'acquisition de technologie lidar. Le lidar, c'est de l'impulsion laser. En fait, quand l'avion est en vol, au lieu de prendre des photos, on envoie des impulsions laser au sol qui répondent, comme un écho, et ça nous permet, du coup, d'avoir ce qu'on appelle un nuage de points, un nuage d'impacts qui nous permet d'avoir une modélisation 3D. C'est-à-dire qu'on peut naviguer en 3D dans une description du territoire avec un nuage de points extrêmement dense puisqu’on parle d’environ dix impacts de laser au sol au mètre carré, ce qui fait à peu près une vingtaine de points de retour. C'est donc un nuage de points d'une densité vraiment exceptionnelle. Ce nuage de points va nous permettre de répondre à des applications sur la prévention des risques en modélisant beaucoup mieux les bassins versants pour éviter les risques d'inondation, va permettre de modéliser la forêt, notamment pour le compte de l'Office national des forêts, l'ONF, pour pouvoir beaucoup mieux piloter la forêt publique et puis pour, également, mieux modéliser les surfaces agricoles par rapport au contrôle de la PAC, la politique agricole commune et des subventions qui sont amenées aux agriculteurs.
Ce lidar avait donc ces trois commanditaires, que j'ai mentionnés. Quand on a réalisé ce recensement, on l'a mis en open data et, là, on a vraiment vu le petit miracle de l'open data, c'est-à-dire des gens qui s’en sont saisis, pour des usages complètement inattendus, avec un appétit complètement étonnant. On a, par exemple, une des grandes entreprises de SIG de notre secteur, dont je ne mentionnerai pas le nom pour ne pas lui faire de publicité, qui est bien connue, qui a développé un tutoriel en dix épisodes sur comment se saisir de la donnée lidar de l'IGN quand on a un SIG, pour pouvoir naviguer à l'intérieur de cette donnée, typiquement pour des collectivités locales qui vont s'en servir pour caler d'autres modèles de bâti, de représentation du territoire ou de tout type d'usage. On a vu aussi un usage bien connu du lidar, l'archéologie. La politique publique d'archéologie ne finance pas le lidar, mais elle s'en sert. On a vu des relevés qui ont pu être utilisés à cette fin et bien d'autres modèles qui peuvent être faits.
C'est aussi un peu un enjeu de démocratie : que chacun puisse se saisir de données extrêmement précises pour développer des modèles, pour avoir une connaissance des enjeux de connaissance du territoire, de la forêt, de la végétation de la dimension urbaine.
Ce sont un peu les petits miracles de l'open data où des usages, parfois inattendus, se développent en plus de ceux qu'on avait anticipés et qui avaient amené à financer cette production de données.

Jean-Christophe Becquet : Avec le lidar, on voit à la fois la forme du sol, c'est-à-dire une information très précise du relief, mais également ce qui se trouve sur le sol : la forme et la hauteur des bâtiments, le type d'arbre, la présence ou absence de feuillage, on a un niveau vraiment très précis de détails. Je confirme ce que vous venez de dire parce que dans la communauté QJIS, qui est le logiciel libre de SIG, Système d'information géographique libre, c'est aussi très dans le vent et très demandé d'organiser des ateliers sur la façon dont on manipule les données 3D dans QJIS, notamment les données lidar de l'IGN. Je vous rejoins dans le fait de dire que c'est un véritable trésor.
Du coup cette couverture intégrale du territoire national, avec un très haut niveau de précision en données lidar, est-elle achevée aujourd’hui ? Est-elle livrée ou c'est en train d'être finalisé département par département ?

Sébastien Soriano : On a réalisé à peu près les deux tiers de la France et là on est en train de caler avec les partenaires comment est-ce qu'on termine, parce que, aujourd'hui, le financement n'est pas complètement bouclé. On est en train de voir notamment si on termine la couverture en été ou en hiver. Ça peut paraître technique, mais, en gros, si vous le faites en été, vous avez une très belle modélisation des arbres puisque vous avez des feuilles, en revanche vous ne voyez pas très bien sol et, si vous le faites en hiver, c'est le contraire. Donc, si vous voulez plutôt décrire la forêt et l'agriculture, faites-le en été ; si vous voulez plutôt prévenir les risques d'inondation, faites-le en hiver.
On est encore en train de caler, avec les partenaires, la façon dont on termine. Par ailleurs, on a des partenariats qui éclosent avec des collectivités locales, justement pour terminer la couverture lidar en fonction de différents besoins qu'elles peuvent rencontrer sur le territoire.
J’ai bon espoir qu'on puisse achever cette couverture en fonction des choix, hiver ou été, ou bien dès cette année ou bien l'année prochaine.

Jean-Christophe Becquet : À vous entendre parler de la saisonnalité de cette donnée, j'ai l'impression que c’est un petit peu comme ce qu'on évoquait tout à l'heure, c'est, en fait, une donnée qui va nécessiter des millésimes, des mises à jour, c'est-à-dire qu’on est presque dans une course sans fin : dès qu'on aura fini la couverture du territoire, va-t-il falloir faire la nouvelle édition des premières zones qu'on a capturées il y a deux ou trois ans ?

Sébastien Soriano : Oui et non. En fait, la donnée lidar est utile même en one-shot, si vous me permettez cette expression, parce qu'elle permet de caler des modèles. Quand vous avez plusieurs sources de données, si vous avez, par exemple, une vue aérienne ou une vue satellite pas très précise et une vue lidar très précise de la même description du sol, vous pouvez faire des corrélations. Donc, à partir de la donnée lidar très précise, vous pouvez mieux faire parler la donnée qui était moins précise, parce que vous avez créé cette corrélation, donc cette capacité de la donnée moins précise à être plus riche – excusez-moi, ce que je raconte est un peu abstrait – eh bien elle est acquise, parce que vous avez permis de caler des modèles prédictifs, des modèles de détection, donc ça a une valeur en soi. Néanmoins, on pressent que la donnée lidar va quand même avoir un intérêt sur ce qu'on appelle des zones à enjeu, notamment typiquement sur la forêt ; il y a quand même des tensions particulièrement fortes sur la forêt française, je le mentionnais tout à l'heure avec des maladies, avec les scolytes, avec des sécheresses et le changement climatique qui fait que les essences qui sont plantées à un endroit donné ne sont plus forcément adaptées par rapport au nouveau climat. Avoir un suivi très fin de cette forêt c'est quelque chose qui va certainement s'imposer dans la durée, donc, une mise à jour du lidar sera certainement utile.

Jean-Christophe Becquet : Pour finir sur cette première partie, on parlait tout à l'heure de la nécessaire médiation autour de ces données ouvertes. Avec ce que vous venez d'expliquer sur le lidar, on comprend bien que c'est très technique, c’est une donnée qui s'adresse à des spécialistes. Est-ce que l'IGN fournira, à un moment donné, une version, une interprétation de cette donnée ou une manière d'accéder à ces données grand public ? Je zoome sur mon quartier, ma rue, et je vois, non pas le nuage de points, mais un rendu en 3D de mon environnement ?

Sébastien Soriano : On va regarder ça. Je dirais que la trajectoire dans laquelle on est, c'est de développer un site internet qui va s'appeler cartes.gouv.fr, cartes au pluriel, qui va être la nouvelle interface pour, à la fois, les citoyens et tous les acteurs qui souhaitent se saisir de la donnée géographique et où on aura à cœur de mettre des interfaces qui soient extrêmement faciles d'utilisation, de développer des outils, comme on dit, no-code, c'est-à-dire qui permettent simplement, en déplaçant des fichiers ou de manière très intuitive, de pouvoir générer sa propre carte, sa propre data visualisation. Ce dispositif prévoit bien un visualiseur de données lidar, plutôt pour les experts, mais j'entends votre suggestion d'en faire aussi un outil pour le grand public.

Jean-Christophe Becquet : Merci.

Frédéric Couchet : Nous allons faire une pause musicale avant la deuxième partie. Qu'est-ce que nous a choisi Étienne ? Nous allons écouter Intención par Sapajou. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l'écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Intención par Sapajou.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Intención par Sapajou, disponible sous licence libre Creative Commons, CC By SA 3.0.

[Jingle]

Deuxième partie 45’ 16

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre notre discussion