Différences entre les versions de « Émission Libre à vous ! du 11 janvier 2022 sur radio Cause Commune »

De April MediaWiki
Aller à la navigationAller à la recherche
Ligne 45 : Ligne 45 :
  
 
==Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs » (rediffusion de la chronique du 12 octobre 2021)==
 
==Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs » (rediffusion de la chronique du 12 octobre 2021)==
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Nous allons commencer par la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs ». Il s’agit d’une rediffusion d’une chronique qui a été diffusée en direct le 12 octobre 2021.<br/>
 +
Je vous propose d’écouter ce sujet et on se retrouve juste après.
  
<b>Isabella Vanni : </b>Nous allons commencer par la chronique
+
[Virgule sonore]
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>« Que libérer d'autre que du logiciel », la chronique d’Antanak. Isabelle Carrère et d’autres personnes actives de l’association Antanak se proposent de partager des situations très concrètes et/ou des pensées, mises en actes et en pratique au sein du collectif – le reconditionnement, la baisse des déchets, l’entraide sur les logiciels libres, l’appropriation du numérique par toutes et tous. Le sujet du jour : l'écrasement des données sur les disques durs.<br/>
 +
Bonjour Isabelle.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Bonjour Fred. Bonjour à tous et toutes.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Vous écrasez les données, c’est ça ?
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Justement, c’est un vrai problème. Je suis contente parce que je suis sur la droite ligne de ce qu’on vient d’entendre avec tes invités précédents, je ne suis pas trop décalée puisque vous parliez de droit à la réparation. Quand on dit droit à la réparation, à l’intérieur de ce droit, on devrait pouvoir parler aussi de droit à la réutilisation.<br/>
 +
Pourquoi parle-t-on là de la question de l’écrasement des données ? Pourquoi utilise-t-on ce terme ?<br/>
 +
Tout le monde sait bien que quand on veut simplement se débarrasser d’informations sur son disque, il ne suffit pas tout à fait de les mettre à la corbeille et de vider la corbeille, évidemment les données restent là. En fait, on n’efface jamais un disque dur, on n’efface pas les données. Il y a quatre façons de faire.<br/>
 +
Soit on écrase, effectivement, et écraser des données ça veut dire qu’on va réécrire sur tous les secteurs d’un disque dur et on utilise des outils qui sont faits pour ça. Nous en avons certains, des outils libres, mais qui n’ont absolument pas de certificat. C’est-à-dire qu’on fait des passes, plusieurs passes d’écriture de 1, 0, 0 1, de manière aléatoire. La logique veut qu’on en fasse trois a minima, sept quand ce sont vraiment des choses un peu lourdes ou des données archi-confidentielles, etc., mais tout ceci sans certificat.<br/>
 +
Il y a d'autres façons de faire : nous voyons des gens qui font de la destruction physique ou du déchiquetage, là ça veut dire qu’on détruit le matériel, on détruit les disques durs. Plusieurs entreprises proposent de donner à Antanak des ordinateurs, mais sans disque dur, parce qu’elles disent « nous n’avons pas le temps de nous occuper des données, on ne veut pas vous les donner, donc on va détruire physiquement nos disques durs ». Ce n’est pas génial pour la réutilisation parce que, après, il faut trouver d’autres disques durs à mettre dessus, ce qui pousse, là aussi, favorise la production, surproduction permanente de nouveaux matériels, l’extraction des matériaux qu’il faut réaliser, etc., bref une catastrophe <br/>
 +
L’autre façon de faire c’est du formatage, mais là c’est pareil, avec le formatage, en fait, on sait qu’on cache les données quand on formate le disque dur, on ne les écrase pas vraiment.<br/>
 +
Il y a aussi un procédé de démagnétisation qui demande un matériel un peu plus sophistiqué que nous n’avons pas à Antanak et qui, en plus, fonctionne pour les disques durs mais pas pour les SSD qu’on commence à retrouver quand même de plus en plus souvent dans les ordinateurs.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>On va préciser que les SSD sont des disques durs de technologie récente, beaucoup plus rapides, mais aussi beaucoup plus fragiles.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Voilà, beaucoup plus fragiles, beaucoup plus petits, du coup cette question d’effacement des données est encore plus compliquée.<br/>
 +
Du coup, ça fait un petit moment qu’on se pose cette question-là puisque des entreprises, à chaque fois, nous demandent d’effacer leurs données. Certaines entreprises qui nous donnent du matériel font elles-mêmes le travail d’effacer, d’écraser, de purger – chacun dit avec les termes qu’il a – les données que les disques durs contiennent. Nous nous sommes amusés plusieurs fois à faire un petit test avec des outils spécifiques. On a fait un test sur des disques durs qui nous étaient donnés pour être sûrs que les gens avaient réellement fait le travail. En fait, très souvent, on retrouve des fichiers. C’est-à-dire que même des DSI dans des entreprises – les directions des systèmes d’information ou directions des services informatiques –, qui pensent avoir fait le travail, eh bien parfois ce n’est pas complet. C’est pour ça qu’on le refait de toute façon, du coup on a regardé ça. Par contre, quand nous utilisons notre petit outil, Eraser Disk, que nous avons sur une clef, dans la boîte à outils UBCD [Ultimate Boot CD] on constate qu’on a beau aller chercher sur les disques, on n‘arrive pas à retrouver les fichiers en question.<br/>
 +
Donc ce qu’on fait est bien fait. Quand on a une entreprise qui nous dit « OK très bien, je vous fais confiance », ça marche, très bien, on garantit qu’on le fait et on le fait.<br/>
 +
Mais si une entreprise nous dit « moi j’ai besoin d’un certificat, j’ai besoin de quelque chose par lequel vous m’apportez une preuve matérielle ou, en tout cas, une preuve certifiante », eh bien là on n’a pas. Les seuls outils « sur le marché », entre guillemets, qui donnent une certification de ce type-là sont des outils privateurs, propriétaires, tel que Blancco, UrCube qui fait aussi un partenariat avec Blancco, et on ne va pas utiliser ceux-là, ce ne sont pas des outils libres, en plus ils sont hyper-chers, c’est payant. Tu payes à la fois une licence et après, à chaque fois que tu passes un disque dur dans la machine, tu repayes quelque chose. Il n’en est pas question, donc on est fort embêtés.<br/>
 +
Ma chronique d’aujourd’hui avait pour but à la fois de sensibiliser sur ce sujet-là et, en même temps, de faire une espèce d’appel. Quand on a voulu se préoccuper de ce sujet-là, on s’est dit « voyons, vers qui pourrait-on se tourner et quelle serait la bonne façon de faire ? » Les produits en question, par définition, appartiennent à tout le monde puisque ce sont des communautés de libristes qui les ont mis en place, on s’est dit comment pourrait-on faire pour que tout le monde obtienne une certification ? Qu’est-ce que ça signifierait dans le monde du Libre que d’obtenir une certification ?<br/>
 +
On s’est aperçu, qu’en fait, il y avait quand même des logiciels libres qui obtiennent des certificats, en tout cas de résultat ou de sécurité ou de choses comme ça. On s’est dit on va s’adresser à l’ANSSI.<br/>
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>L’Agence nationale de sécurité des systèmes...
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>J’allais le dire, j’avais prévu de le dire parce que je savais que tu allais réagir !, Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information. On s’est dit on va leur poser la question, tout bêtement. On est des citoyens, des citoyennes, on va poser la question.<br/>
 +
Donc en novembre on a écrit un petit courriel à l’ANSSI : « Bonjour, petite association du 18e arrondissement de Paris, nous menons, entre autres, des activités de reconditionnement de matériels informatiques pour soutenir solidairement la réappropriation numérique et contribuer à la baisse des D3E [Déchets d'équipements électriques et électroniques] via la réutilisation ». On leur explique notre affaire : « Nous sommes confrontés à cette question de l’effacement des données, donc voilà ce qu’on fait, on les écrase, mais on n’a pas de certificat. Qu’est-ce que vous en pensez ? On vient vers vous. Quelle est votre position sur le sujet ? On n’a rien trouvé sur le site — on a vraiment essayé, on a tourné partout dans leur site qui est assez complet, il y a énormément de choses mais rien sur la question de l’écrasement des données —, donc on voulait avoir des informations ». On a envoyé ça à trois adresses courriels différentes qu’on avait trouvées et on a mis un petit mouchard. Hum ! Une des personnes a lu le mail et l’a supprimé immédiatement. On s’est dit bon !, ce n’est pas elle qui va nous répondre ! Une autre a lu le mail puis, silence !, on n’a rien eu. Et l’autre on ne sait pas, elle ne l’a toujours pas ouvert, elle ne devait plus être là.<br/>
 +
À part le côté amusant de la chose, on se retrouve avec un vrai problème. Une entreprise nous dit : « J’ai 100 ordinateurs portables pour vous, mais c’est à vous de faire le boulot ». C’est énorme, ils ne se rendent pas compte en fait, ou si, ils se rendent compte, mais ils ne veulent pas le payer, le faire faire, payer la « main-d’œuvre », entre guillemets, pour le faire ou bien ils ne s’en sentent pas les compétences techniques, je n’en sais rien, mais ça nous pose vraiment des soucis.<br/>
 +
Du coup on s’est dit que les CESTI, les Centres, ça je ne sais plus, par contre, ce que signifie le sigle.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Elle me regarde, alors qu’en fait je ne sais pas du tout ce que ce sont les CESTI.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Tu ne sais pas non plus ? Les CESTI ce sont les centres qui sont agréés par l’ANSSI, par le gouvernement, etc., pour faire ces évaluations de logiciels ou d’équipements, équipements réseau aussi. Par exemple on a une structure comme Oppida ou une autre qui s’appelle Amossys. Bref ! Les CESTI sont des centres qui font ça, qui font, en fait, les évaluations.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Je l’ai : Centres d’évaluation de la sécurité des technologies de l’information.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Voilà. Merci ! Donc on s’est dit qu’on peut, peut-être, aller voir vers eux et leur demander comment est-ce qu’on pourrait faire ? Est-ce que ça existe ? Quelle serait la procédure ? Est-ce qu’il y aurait une façon de faire ?<br/>
 +
Aujourd’hui ma chronique a pour but d’appeler les auditeurs, les auditrices, les membres de l’April, la foule, que sais-je, tous les gens qui sont autour de ces sujets-là et qui pourraient être intéressés, pour nous aider à monter, je ne sais pas, un groupe de travail, à faire quelque chose là-dessus pour arriver à un résultat. On doit, là aussi à mon avis, saisir les pouvoirs publics sur ce genre de chose. On ne peut parler de réemploi, de réutilisation, si on continue à laisser les entreprises scratcher complètement leurs disques durs sans avoir de possibilité de les réutiliser correctement. C’est un appel.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>C’est un appel qui est lancé. J’espère que tes auditrices et auditeurs pourront y répondre. À notre petit niveau, je peux te proposer de nous transférer ton courriel qu’on va envoyer au directeur de l’ANSSI vu que le directeur de l’ANSSI est venu dans l’émission, donc on a son adresse. C’est quelqu’un de tout à fait sympathique qui saura peut-être le réorienter en interne à l’ANSSI. Par contre, je ne mettrai pas de mouchard pour savoir si le directeur de l’ANSSI a lu le courriel !<br/>
 +
Effectivement, les gens qui n’ont jamais fait d’écrasement de données peuvent peut-être penser que c’est très facile, mais, en fait c’est très long, en fonction des outils qu’on utilise ça peut-être très long, il peut y avoir plusieurs phases, donc ça demande aussi de la ressource humaine.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Ça demande de la ressource humaine pour lancer le processus, après ça tourne tout seul. C’est long parce que selon que ton disque dur a 160 gigas ou un téra, eh bien oui ça peut durer plusieurs heures. Du coup, quand tu en as 100, c’est quand même toute une affaire. Il faut avoir une table énorme. Tu lances toutes tes petites clés UBCD sur tous tes portables, c’est très long. Mais ça, à la limite, on veut bien le faire, ce n’est pas la question. Si derrière l’entreprise dit « et je veux avoir la preuve que », eh bien qu’est-ce que je fais ?
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>D’accord. Appel lancé. Transmets-moi le courriel, je l’enverrai au directeur de l’ANSSI sans garantie de résultat, mais au moins j’enverrai le courriel.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Bien sûr. Très bien. Merci.
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>C’était la chronique d’Antanak par Isabelle Carrère sur l’écrasement des données sur les disques durs.<br/>
 +
Bonne fin de journée Isabelle et au mois prochain.
 +
 
 +
<b>Isabelle Carrère : </b>Merci beaucoup.
 +
 
 +
[Virgule sonore]
 +
 
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Nous voilà de retour en direct après cette première chronique. Pour la précision, Fred a vraiment envoyé le courriel à l’ANSSI, comme promis, mais je crois qu’on n’a toujours pas eu de réponse. C’est ça Fred ?
 +
 
 +
<b>Frédéric Couchet : </b>Je te confirme. J’ai envoyé un courriel à Guillaume Poupard, mais je n’ai pas eu de réponse. On fera une petite relance en ce début d’année 2022.
 +
 
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Très bonne idée.<rbr/>
 +
Nous allons maintenant faire une pause musicale.
 +
 
 +
[Virgule musicale]
 +
 
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Après la pause musicale nous aborderons notre sujet principal qui est consacré aujourd’hui au thème « Contribuer au libre »<br/>
 +
Pour la première pause musicale, nous allons écouter une chanson hommage à Aaron Swartz qui était militant des libertés informatiques et de la culture libre, convaincu que l’accès à la connaissance est un moyen d’émancipation et de justice. Il s’est suicidé le 11 janvier 2013 à l’âge de 26 ans. Dans l’émission <em>Libre à vous !</em> 49, de janvier 2020, nous avions consacré une note de lecture du livre de Flore Vasseur <em>Ce qui reste de nos reves</em> consacrée à Aaron Swartz que vous pouvez retrouver sur libreavous.org/49.<br/>
 +
Nous allons donc écouter une chanson hommage à Aaron Swartz, d’ailleurs vous écoutez déjà les premières notes, qui date de 2016. Elle s’appelle <em>Aaron</em> par Simon « Gee » Giraudot. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
 +
 
 +
<b>Pause musicale : </b><em>Aaron</em> par Simon « Gee » Giraudot.
 +
 
 +
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.
 +
 
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Nous venons d’écouter une chanson hommage à Aaron Swartz qui date de 2016, <em>Aaron</em> par Simon « Gee » Giraudot, disponible sous licence libre Creative Commnons CC By SA 2.0 qui permet la réutilisation, la modification, la diffusion, le partage de cette musique pour toute utilisation y compris commerciale, à condition de créditer l’artiste, d’indiquer la licence et d’indiquer si des modifications ont été effectuées. Dans le cas où vous effectuez un remix, que vous transformez ou que vous créez du matériel à partir de cette musique, vous rediffusez votre œuvre modifiée dans les mêmes conditions, c’est-à-dire avec la même licence
 +
 
 +
[Jingle]
 +
 
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Passons maintenant au sujet suivant.
 +
 
 +
[Virgule musicale]
 +
 
 +
==Contribuer au Libre, avec Maiwann pour les Contribateliers et LLAQ pour Contribulle==
 +
 
 +
<b>Isabella Vanni : </b>Nous allons poursuivre avec

Version du 11 janvier 2022 à 19:01


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 11 janvier 2022 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : - Isabella Vanni - - - Marie-Odile Morandi - à la régie

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 11 janvier 2021

Durée : 1 h 30 min

Podcast PROVISOIRE de l'émission

Références concernant l'émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : Déjà prévue

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Isabella Vanni : Bonjour à toutes. Bonjour à tous. J’espère que vous avez passé de belles fêtes de fin d’année malgré le contexte sanitaire. Libre à vous ! est de retour sur la radio Cause Commune.
Notre sujet principal porte aujourd’hui sur le thème « Contribuer au Libre », avec également au programme la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak, consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques », et la chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture » de Marie-Odile Morandi sur le thème « Le numérique que nous voulons ».
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 11 janvier 2022, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
À la réalisation de l’émission aujourd’hui mon collègue Frédéric Couchet. Bonjour Fred.

Bonjour Frédéric  : Bonjour Isa. C’est un plaisir de réaliser ma première émission pour toi et j’espère être à la hauteur. Bonne émission à toutes et tous.

Isabella Vanni : Je l’espère moi aussi, bien évidemment. Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs » (rediffusion de la chronique du 12 octobre 2021)

Isabella Vanni : Nous allons commencer par la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs ». Il s’agit d’une rediffusion d’une chronique qui a été diffusée en direct le 12 octobre 2021.
Je vous propose d’écouter ce sujet et on se retrouve juste après.

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : « Que libérer d'autre que du logiciel », la chronique d’Antanak. Isabelle Carrère et d’autres personnes actives de l’association Antanak se proposent de partager des situations très concrètes et/ou des pensées, mises en actes et en pratique au sein du collectif – le reconditionnement, la baisse des déchets, l’entraide sur les logiciels libres, l’appropriation du numérique par toutes et tous. Le sujet du jour : l'écrasement des données sur les disques durs.
Bonjour Isabelle.

Isabelle Carrère : Bonjour Fred. Bonjour à tous et toutes.

Frédéric Couchet : Vous écrasez les données, c’est ça ?

Isabelle Carrère : Justement, c’est un vrai problème. Je suis contente parce que je suis sur la droite ligne de ce qu’on vient d’entendre avec tes invités précédents, je ne suis pas trop décalée puisque vous parliez de droit à la réparation. Quand on dit droit à la réparation, à l’intérieur de ce droit, on devrait pouvoir parler aussi de droit à la réutilisation.
Pourquoi parle-t-on là de la question de l’écrasement des données ? Pourquoi utilise-t-on ce terme ?
Tout le monde sait bien que quand on veut simplement se débarrasser d’informations sur son disque, il ne suffit pas tout à fait de les mettre à la corbeille et de vider la corbeille, évidemment les données restent là. En fait, on n’efface jamais un disque dur, on n’efface pas les données. Il y a quatre façons de faire.
Soit on écrase, effectivement, et écraser des données ça veut dire qu’on va réécrire sur tous les secteurs d’un disque dur et on utilise des outils qui sont faits pour ça. Nous en avons certains, des outils libres, mais qui n’ont absolument pas de certificat. C’est-à-dire qu’on fait des passes, plusieurs passes d’écriture de 1, 0, 0 1, de manière aléatoire. La logique veut qu’on en fasse trois a minima, sept quand ce sont vraiment des choses un peu lourdes ou des données archi-confidentielles, etc., mais tout ceci sans certificat.
Il y a d'autres façons de faire : nous voyons des gens qui font de la destruction physique ou du déchiquetage, là ça veut dire qu’on détruit le matériel, on détruit les disques durs. Plusieurs entreprises proposent de donner à Antanak des ordinateurs, mais sans disque dur, parce qu’elles disent « nous n’avons pas le temps de nous occuper des données, on ne veut pas vous les donner, donc on va détruire physiquement nos disques durs ». Ce n’est pas génial pour la réutilisation parce que, après, il faut trouver d’autres disques durs à mettre dessus, ce qui pousse, là aussi, favorise la production, surproduction permanente de nouveaux matériels, l’extraction des matériaux qu’il faut réaliser, etc., bref une catastrophe
L’autre façon de faire c’est du formatage, mais là c’est pareil, avec le formatage, en fait, on sait qu’on cache les données quand on formate le disque dur, on ne les écrase pas vraiment.
Il y a aussi un procédé de démagnétisation qui demande un matériel un peu plus sophistiqué que nous n’avons pas à Antanak et qui, en plus, fonctionne pour les disques durs mais pas pour les SSD qu’on commence à retrouver quand même de plus en plus souvent dans les ordinateurs.

Frédéric Couchet : On va préciser que les SSD sont des disques durs de technologie récente, beaucoup plus rapides, mais aussi beaucoup plus fragiles.

Isabelle Carrère : Voilà, beaucoup plus fragiles, beaucoup plus petits, du coup cette question d’effacement des données est encore plus compliquée.
Du coup, ça fait un petit moment qu’on se pose cette question-là puisque des entreprises, à chaque fois, nous demandent d’effacer leurs données. Certaines entreprises qui nous donnent du matériel font elles-mêmes le travail d’effacer, d’écraser, de purger – chacun dit avec les termes qu’il a – les données que les disques durs contiennent. Nous nous sommes amusés plusieurs fois à faire un petit test avec des outils spécifiques. On a fait un test sur des disques durs qui nous étaient donnés pour être sûrs que les gens avaient réellement fait le travail. En fait, très souvent, on retrouve des fichiers. C’est-à-dire que même des DSI dans des entreprises – les directions des systèmes d’information ou directions des services informatiques –, qui pensent avoir fait le travail, eh bien parfois ce n’est pas complet. C’est pour ça qu’on le refait de toute façon, du coup on a regardé ça. Par contre, quand nous utilisons notre petit outil, Eraser Disk, que nous avons sur une clef, dans la boîte à outils UBCD [Ultimate Boot CD] on constate qu’on a beau aller chercher sur les disques, on n‘arrive pas à retrouver les fichiers en question.
Donc ce qu’on fait est bien fait. Quand on a une entreprise qui nous dit « OK très bien, je vous fais confiance », ça marche, très bien, on garantit qu’on le fait et on le fait.
Mais si une entreprise nous dit « moi j’ai besoin d’un certificat, j’ai besoin de quelque chose par lequel vous m’apportez une preuve matérielle ou, en tout cas, une preuve certifiante », eh bien là on n’a pas. Les seuls outils « sur le marché », entre guillemets, qui donnent une certification de ce type-là sont des outils privateurs, propriétaires, tel que Blancco, UrCube qui fait aussi un partenariat avec Blancco, et on ne va pas utiliser ceux-là, ce ne sont pas des outils libres, en plus ils sont hyper-chers, c’est payant. Tu payes à la fois une licence et après, à chaque fois que tu passes un disque dur dans la machine, tu repayes quelque chose. Il n’en est pas question, donc on est fort embêtés.
Ma chronique d’aujourd’hui avait pour but à la fois de sensibiliser sur ce sujet-là et, en même temps, de faire une espèce d’appel. Quand on a voulu se préoccuper de ce sujet-là, on s’est dit « voyons, vers qui pourrait-on se tourner et quelle serait la bonne façon de faire ? » Les produits en question, par définition, appartiennent à tout le monde puisque ce sont des communautés de libristes qui les ont mis en place, on s’est dit comment pourrait-on faire pour que tout le monde obtienne une certification ? Qu’est-ce que ça signifierait dans le monde du Libre que d’obtenir une certification ?
On s’est aperçu, qu’en fait, il y avait quand même des logiciels libres qui obtiennent des certificats, en tout cas de résultat ou de sécurité ou de choses comme ça. On s’est dit on va s’adresser à l’ANSSI.

Frédéric Couchet : L’Agence nationale de sécurité des systèmes...

Isabelle Carrère : J’allais le dire, j’avais prévu de le dire parce que je savais que tu allais réagir !, Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information. On s’est dit on va leur poser la question, tout bêtement. On est des citoyens, des citoyennes, on va poser la question.
Donc en novembre on a écrit un petit courriel à l’ANSSI : « Bonjour, petite association du 18e arrondissement de Paris, nous menons, entre autres, des activités de reconditionnement de matériels informatiques pour soutenir solidairement la réappropriation numérique et contribuer à la baisse des D3E [Déchets d'équipements électriques et électroniques] via la réutilisation ». On leur explique notre affaire : « Nous sommes confrontés à cette question de l’effacement des données, donc voilà ce qu’on fait, on les écrase, mais on n’a pas de certificat. Qu’est-ce que vous en pensez ? On vient vers vous. Quelle est votre position sur le sujet ? On n’a rien trouvé sur le site — on a vraiment essayé, on a tourné partout dans leur site qui est assez complet, il y a énormément de choses mais rien sur la question de l’écrasement des données —, donc on voulait avoir des informations ». On a envoyé ça à trois adresses courriels différentes qu’on avait trouvées et on a mis un petit mouchard. Hum ! Une des personnes a lu le mail et l’a supprimé immédiatement. On s’est dit bon !, ce n’est pas elle qui va nous répondre ! Une autre a lu le mail puis, silence !, on n’a rien eu. Et l’autre on ne sait pas, elle ne l’a toujours pas ouvert, elle ne devait plus être là.
À part le côté amusant de la chose, on se retrouve avec un vrai problème. Une entreprise nous dit : « J’ai 100 ordinateurs portables pour vous, mais c’est à vous de faire le boulot ». C’est énorme, ils ne se rendent pas compte en fait, ou si, ils se rendent compte, mais ils ne veulent pas le payer, le faire faire, payer la « main-d’œuvre », entre guillemets, pour le faire ou bien ils ne s’en sentent pas les compétences techniques, je n’en sais rien, mais ça nous pose vraiment des soucis.
Du coup on s’est dit que les CESTI, les Centres, ça je ne sais plus, par contre, ce que signifie le sigle.

Frédéric Couchet : Elle me regarde, alors qu’en fait je ne sais pas du tout ce que ce sont les CESTI.

Isabelle Carrère : Tu ne sais pas non plus ? Les CESTI ce sont les centres qui sont agréés par l’ANSSI, par le gouvernement, etc., pour faire ces évaluations de logiciels ou d’équipements, équipements réseau aussi. Par exemple on a une structure comme Oppida ou une autre qui s’appelle Amossys. Bref ! Les CESTI sont des centres qui font ça, qui font, en fait, les évaluations.

Frédéric Couchet : Je l’ai : Centres d’évaluation de la sécurité des technologies de l’information.

Isabelle Carrère : Voilà. Merci ! Donc on s’est dit qu’on peut, peut-être, aller voir vers eux et leur demander comment est-ce qu’on pourrait faire ? Est-ce que ça existe ? Quelle serait la procédure ? Est-ce qu’il y aurait une façon de faire ?
Aujourd’hui ma chronique a pour but d’appeler les auditeurs, les auditrices, les membres de l’April, la foule, que sais-je, tous les gens qui sont autour de ces sujets-là et qui pourraient être intéressés, pour nous aider à monter, je ne sais pas, un groupe de travail, à faire quelque chose là-dessus pour arriver à un résultat. On doit, là aussi à mon avis, saisir les pouvoirs publics sur ce genre de chose. On ne peut parler de réemploi, de réutilisation, si on continue à laisser les entreprises scratcher complètement leurs disques durs sans avoir de possibilité de les réutiliser correctement. C’est un appel.

Frédéric Couchet : C’est un appel qui est lancé. J’espère que tes auditrices et auditeurs pourront y répondre. À notre petit niveau, je peux te proposer de nous transférer ton courriel qu’on va envoyer au directeur de l’ANSSI vu que le directeur de l’ANSSI est venu dans l’émission, donc on a son adresse. C’est quelqu’un de tout à fait sympathique qui saura peut-être le réorienter en interne à l’ANSSI. Par contre, je ne mettrai pas de mouchard pour savoir si le directeur de l’ANSSI a lu le courriel !
Effectivement, les gens qui n’ont jamais fait d’écrasement de données peuvent peut-être penser que c’est très facile, mais, en fait c’est très long, en fonction des outils qu’on utilise ça peut-être très long, il peut y avoir plusieurs phases, donc ça demande aussi de la ressource humaine.

Isabelle Carrère : Ça demande de la ressource humaine pour lancer le processus, après ça tourne tout seul. C’est long parce que selon que ton disque dur a 160 gigas ou un téra, eh bien oui ça peut durer plusieurs heures. Du coup, quand tu en as 100, c’est quand même toute une affaire. Il faut avoir une table énorme. Tu lances toutes tes petites clés UBCD sur tous tes portables, c’est très long. Mais ça, à la limite, on veut bien le faire, ce n’est pas la question. Si derrière l’entreprise dit « et je veux avoir la preuve que », eh bien qu’est-ce que je fais ?

Frédéric Couchet : D’accord. Appel lancé. Transmets-moi le courriel, je l’enverrai au directeur de l’ANSSI sans garantie de résultat, mais au moins j’enverrai le courriel.

Isabelle Carrère : Bien sûr. Très bien. Merci.

Frédéric Couchet : C’était la chronique d’Antanak par Isabelle Carrère sur l’écrasement des données sur les disques durs.
Bonne fin de journée Isabelle et au mois prochain.

Isabelle Carrère : Merci beaucoup.

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Nous voilà de retour en direct après cette première chronique. Pour la précision, Fred a vraiment envoyé le courriel à l’ANSSI, comme promis, mais je crois qu’on n’a toujours pas eu de réponse. C’est ça Fred ?

Frédéric Couchet : Je te confirme. J’ai envoyé un courriel à Guillaume Poupard, mais je n’ai pas eu de réponse. On fera une petite relance en ce début d’année 2022.

Isabella Vanni : Très bonne idée.<rbr/> Nous allons maintenant faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Après la pause musicale nous aborderons notre sujet principal qui est consacré aujourd’hui au thème « Contribuer au libre »
Pour la première pause musicale, nous allons écouter une chanson hommage à Aaron Swartz qui était militant des libertés informatiques et de la culture libre, convaincu que l’accès à la connaissance est un moyen d’émancipation et de justice. Il s’est suicidé le 11 janvier 2013 à l’âge de 26 ans. Dans l’émission Libre à vous ! 49, de janvier 2020, nous avions consacré une note de lecture du livre de Flore Vasseur Ce qui reste de nos reves consacrée à Aaron Swartz que vous pouvez retrouver sur libreavous.org/49.
Nous allons donc écouter une chanson hommage à Aaron Swartz, d’ailleurs vous écoutez déjà les premières notes, qui date de 2016. Elle s’appelle Aaron par Simon « Gee » Giraudot. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Aaron par Simon « Gee » Giraudot.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter une chanson hommage à Aaron Swartz qui date de 2016, Aaron par Simon « Gee » Giraudot, disponible sous licence libre Creative Commnons CC By SA 2.0 qui permet la réutilisation, la modification, la diffusion, le partage de cette musique pour toute utilisation y compris commerciale, à condition de créditer l’artiste, d’indiquer la licence et d’indiquer si des modifications ont été effectuées. Dans le cas où vous effectuez un remix, que vous transformez ou que vous créez du matériel à partir de cette musique, vous rediffusez votre œuvre modifiée dans les mêmes conditions, c’est-à-dire avec la même licence

[Jingle]

Isabella Vanni : Passons maintenant au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Contribuer au Libre, avec Maiwann pour les Contribateliers et LLAQ pour Contribulle

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre avec