Back to the Moon… Or not ! - CyberPouvoirs

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Titre : Back to the Moon… Or not !

Intervenant·e·s : Arnaud saint-Martin - Asma Mhalla

Lieu : CyberPouvoirs - France Inter

Date : 20 août 2023

Durée : 37 min

[URL Podcast]

Page de présentation du podcast

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Description

Asma Mhalla s'envole aujourd'hui pour l’espace, objet de fascination et de passions, techniques, idéologiques, géopolitiques. Avec Arnaud Saint-Martin, elle sonde les raisons de sa conquête, vecteur de puissance pour les États ou de nouveaux acteurs privés comme Elon Musk.

Transcription

Asma Mhalla : Aujourd’hui dans CyberPouvoirs la reconquête de l’espace avec mon invité Arnaud Saint-Martin, chercheur au CNRS et spécialiste d’astronautique.

Arnaud Saint-Martin, voix off : Depuis le début, en fait, l’espace est militaire, il est militarisé depuis le début de l’âge spatial. Là on vit, finalement, une nouvelle étape de cette militarisation.

Asma Mhalla : Bonjour. Je suis Asma Mhalla et mon job, c’est de décrypter les nouvelles formes de pouvoir et de puissance qui sont en train de se recomposer autour de la tech. Chaque semaine, nous nous plongeons dans une grande affaire technologique pour ensuite tirer ensemble, méticuleusement, le fil de l’histoire, lever le voile sur ce qui se joue en coulisses, déchiffrer ensemble les enjeux politiques, géopolitiques qui s’affrontent et qui nouent le cœur des jeux de pouvoir et de puissance de ce début de 21e siècle.
Aujourd’hui, nous poursuivons notre exploration du futur en partant à la conquête de l’espace, ultime extension du domaine de la lutte.
CyberPouvoirs sur Inter, c’est parti.

John Kennedy, voix off, 1962 : We choose to go to the Moon.

Voix off : France Inter. Asma Mhalla. CyberPouvoirs

Asma Mhalla : We choose to go to the Moon. John Fitzgerald Kennedy donnera ce très célèbre discours en septembre 1962 à Houston. Il va y promettre à son peuple que les États-Unis vont envoyer un Américain sur la Lune avant la fin de la décennie. Le plus intéressant, au-delà de la promesse, c’est que dans ce discours Kennedy va poser exactement tous le salons de la conquête de l’espace : leadership américain qui était pris alors dans la guerre froide avec l’URSS., militarisation de l’espace, c’est-à-dire espace comme extension du domaine de la guerre, nécessité, surtout, de fédérer l’Amérique derrière lui.
Mais, pourquoi est-ce que l’espace cristallise autant les passions ? Parce que plus les jolies fantaisies littéraires, et là je pense évidemment à Jules Vernes et son Voyage de la Terre à la Lune, l’espace est surtout un enjeu géostratégique et de rivalités, comme toujours, entre nations. La conquête de l’espace, de la Lune ou même maintenant, d’ailleurs, de Mars, permet de démontrer la supériorité technologique mais aussi idéologique d’une puissance sur une autre, de tout simplement, en fait, les départager définitivement. Plus le défi est haut, plus la puissance est démontrable.
Le 21 juin 1969, Kennedy n’est plus là le pour voir, vous savez qu’il aura été assassiné malheureusement entre-temps, Neil Armstrong et Buzz Aldrin vont en effet planter le drapeau américain sur la Lune et marquer l’histoire, « Le petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’humanité », mais surtout, un succès éclatant pour les États-Unis qui battent en brèche et en beauté l’URSS de l’époque. Et depuis, je ne vous le cache pas, plus grand-chose d’aussi spectaculaire, vraiment rien de comparable à l’émulation des années 60, ni la maestria, ni la dramaturgie, ni même l’ambiance. L’espace, en fait, va se banaliser, jusqu’au retour de la rivalité sino-américaine. La Chine n’a pas caché ses ambitions astrales, elle prévoit même s’envoyer un homme sur la Lune d’ici à 2030. Et, comme Kennedy en son temps, voilà les Américains confrontés de nouveau aux mêmes enjeux un demi-siècle plus tard. Obama, d’ailleurs, va adopter à son tour la même rhétorique que Kennedy et le 15 avril 2010 il va donner son grand discours sur la politique spatiale étasunienne, avec trois objectifs en tête : d’abord remobiliser les Américains autour du fameux American Dream, autour, en fait, d’un projet commun d’une nation qui se polarise et qui se déchire. Et là, son idée n’est pas idiote. Il va remplacer la Lune par Mars. Il annonce alors un programme d’envoi de satellites sur Mars d’ici le début des années 2030. Vous l’avez compris, Mars remplace donc la Lune pour mobiliser les imaginaires. Le deuxième objectif d’Obama c’est aussi de sortir la NSA, disons, de son combat parce que, il faut bien le dire, elle n’est pas très en forme à ce moment-là. Et enfin, le troisième but c’est de repositionner les États-Unis vis-à-vis de la Chine en développant une véritable industrie spatiale qui permettrait de donner du souffle à la NASA. Et c’est sur ce dernier point que va se passer la chose qui est, en fait, m’a décidé à vous en parler aujourd’hui, c’est-à-dire la chose la plus intéressante d’après moi : la véritable différence entre Kennedy et Obama, d‘ailleurs entre les deux époques, était symptomatique du 21e siècle qu’on décrypte dans CyberPouvoirs, c’est l’apparition des entrepreneurs de la Silicon Valley, Musk en tête évidemment, qui vont intervenir dans l’Histoire avec un grand « H ».

Et en effet, aux côtés des industriels classiques de l’industrie spatiale américaine comme Lockheed Martin, vont maintenant désormais cohabiter de nouveaux acteurs technologiques comme SpaceX, l’entreprise spatiale d’Elon Musk ou même, son concurrent direct, Blue Origin, qui appartient à Jeff Bezos, ancien patron d’Amazon. Bref ! Le old space se refait une jeunesse.
Musk est d’ailleurs sans doute le héros de cette nouvelle ère de l’exploration spatiale américaine. Il va, il faut bien le reconnaître, revivifier une NASA pas très en forme et lui donner du sang neuf. Il va surtout participer à en faire la porte d’entrée vers l’espace, parce que, d’après moi, c’est surtout cela l’objectif de la vision américaine version Obama. Il ne s’agit plus simplement d’aller dans l’espace ou de le conquérir, mais plus encore, c’est-à-dire d’en contrôler l’accès. Et SpaceX, donc indirectement les États-Unis, se transforment en contrôleur d’accès pour tout un tas de pays qui en sont désormais de plus en plus dépendants, notamment pour les lancements de satellites ou les missions des vols habités, l’Europe d’ailleurs en premier lieu.
Elon Musk, si on se détache du personnage, et c’est vraiment toujours ce que je m’attache personnellement à faire, est peut-être le symbole de cette nouvelle stratégie américaine qui hybride public et privé, civil et militaire.
La conquête de l’espace nous donne à voir une facette encore différente et inédite de ces nouvelles formes de cyberpouvoirs. Mais si la forme et les modalités changent, je serais aussi tentée de vous dire que le but ultime reste toujours le même, celui de la domination et de la puissance.
Pour boucler la boucle, j’aimerais redonner la parole à JFK qui avait si justement résumé la situation dans les années 60. Oui, l’espace reste bien, 50 ans plus tard, l’une des prochaines frontières à conquérir.

John Kennedy, voix off : Because that challenge is one that we are willing to accept, one we are unwilling to postpone, and one we intend to win, and the others, too.

Voix off : Les enjeux technologiques d’aujourd’hui, les enjeux politiques de demain. CyberPouvoirs sur France Inter.

Asma Mhalla : Dans un instant sur Inter, on poursuit notre exploration astrale avec mon invité du jour, Arnaud Saint-Martin, chercheur au CNRS et spécialiste d’astronautique et du New Space.

Pause musicale : Wait par M83.

Asma Mhalla : À l’instant c’était M83 avec Wait sur Inter. Vous écoutez CyberPouvoirs et on continue d’explorer la Lune.

Voix off : CyberPouvoirs Asma Mhlalla sur France Inter.

13’ 30

Asma Mhalla :