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'''Questionnaire candidats.fr Cahier n°4 : MTP/DRM'''
'''Questionnaire candidats.fr Cahier n°4 : MTP/DRM'''
{{Travail En Cours|contenu=un texte de synthèse}}


=En bref...=
=En bref...=


==Définition et historique==
==Définition==
''Les DRM sont des dispositifs qui ont pour but de contrôler l'accès aux œuvres numériques et l'usage qui en est fait, notamment en limitant la copie.  C'est un système de gestion des droits numériques. En d'autres termes, un DRM est un dispositif de contrôle d'usage, des menottes numériques qui enferment les utilisateurs. Face à l'inévitable inefficacité des dispositifs de contrôle d'usage, une législation a été élaborée pour interdire toute tentative de contournement des DRM.''


==Analyse critique des mesures techniques de protection==
''Les DRM « ''Digital Rights Management'' », également appelés MTP « Mesures techniques de protection », sont des dispositifs qui ont pour but de contrôler l'accès aux œuvres numériques et l'usage qui en est fait, notamment en limitant la copie. Dispositifs de contrôle d'usage, les DRM sont en d'autres termes des « menottes numériques » qui enferment les utilisateurs. Face à leur inévitable inefficacité, une législation a été élaborée pour interdire toute tentative de contournement des DRM.''
''La mise en place de DRM a pour fondement la préservation des droits sur l’œuvre. Or, des études démontrent que, plutôt que d'éradiquer le piratage, les DRM découragent les usages légaux, en raison des contraintes pesant sur l'utilisateur. De nouvelles références liées à la problématique des DRM pourraient être ajoutées chaque jour. L'actualité relative aux effets des mesures techniques et de la protection juridique associée est en effet très riche, et largement relayée dans les médias. Nous invitons le lecteur à taper, par exemple, ''"DRM problème"'' dans un moteur de recherche pour s'en convaincre.''


==Analyse critique de la protection juridique des mesures technique==
==Le régime juridique des DRM==


''Le 3 août 2006, la loi dite DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) était promulguée<ref>http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MCCX0300082L</ref>. La loi DADVSI transpose en droit français la directive 2001/29CE<ref>http://europa.eu.int/eur-lex/lex/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:32001L0029:FR:HTML</ref> sur le droit d'auteur et les droits voisins dans la société de l'information. Cette directive adoptée en mai 2001 doit permettre à l'Europe de se conformer aux obligations prévues dans les traités WCT et WPPT rédigés en 1996 sous l'égide de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle. Ces dispositions, instaurant un dispositif de répression, sacralise les DRM au mépris de l'intérêt général. Les textes à venir, loin de revenir sur la protection juridique des DRM, tendent à en étendre son champ d'application.
''Le 3 août 2006, la loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) était promulguée<ref>http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MCCX0300082L.</ref>. Elle transpose en droit français la directive 2001/29CE<ref>http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.</ref> (dite EUCD pour ''European Union Copyright Directive''), qui va plus loin que les obligations prévues dans les traités de l'OMPI sur le droit d'auteur (WCT en anglais, pour WIPO Copyright Treaty) et sur les droits des producteurs (''World Intellectual Property Organization Performances and Phonograms Treaty'', Traité de l'organisation mondiale du commerce sur les spectacles et les phonogrammes) rédigés en 1996. L'ensemble de ces textes s'inscrit dans une démarche plus large de restriction des libertés numériques et de sacralisation des DRM, sous prétexte de lutte contre la contrefaçon, et au détriment des droits du public et des auteurs.''
''


==Informatique dite ''"de confiance"''==
==Analyse critique des DRM==
En mars 2006, des députés UMP ont proposé un amendement à la loi DADVSI imposant aux distributeurs de « mesures techniques permettant le contrôle à distance direct ou indirect d’une ou plusieurs fonctionnalités, ou l’accès à des données personnelles » de fournir au Secrétariat Général de la Défense Nationale les élements permettant de s'assurer « que la gestion de droits d’auteur ne compromette de facto la sécurité des utilisateurs individuels, des entreprises, des administrations » (amendement 273<ref>http://www.assemblee-nationale.fr/12/amendements/1206/120600273.asp</ref>). L'objectif de cet amendement dit « SGDN » était de prendre en compte le fait que les mesures techniques nouvelle génération utilisent des technologies présentant des risques pour la sécurité économique nationale et la vie privée des utilisateurs, comme l'ont relevé plusieurs rapports parlementaires. L'amendement SGDN en question a été voté par les députés UMP mais a provoqué une vive discussion sur les bancs de l'Hémicycle.
 
''La mise en place de DRM a pour prétexte la préservation des droits sur l’œuvre. Or, des études démontrent que les DRM  découragent avant tout les usages légaux, en raison des contraintes pesant sur l'utilisateur<ref>http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422.</ref><ref>http://mktsci.journal.informs.org/search?fulltext=drm&submit=yes&x=21&y=10/.</ref>. L'actualité relative aux effets pervers des mesures techniques et du régime juridique associé est très riche, et largement relayée dans les médias. Nous invitons le lecteur à taper, par exemple, ''« DRM problème »'' dans un moteur de recherche pour s'en convaincre. La loi ne crée pas les conditions de mise en œuvre des principes qu'elle pose. Le nombre d'exceptions au contournement est trop restreint. La sécurité de développement du logiciel libre n'est pas garantie.''
 
==Informatique déloyale==
 
''L'informatique déloyale (''Treacherous Computing'') consiste à verrouiller les possibilités d'usage d'un ordinateur directement par le matériel. Elle empêche l'utilisateur de contrôler son propre ordinateur. Sous couvert de lutte contre la contrefaçon et de sécurité informatique, ces compagnies, par le biais de l'informatique dite « de confiance », s'assurent le contrôle du marché par une sélection des objets utilisables sur leur système. Ils peuvent également surveiller les utilisateurs, par un suivi de leurs pratiques et un régime d'enregistrement préalable par exemple<ref>Trusted Computing le film http://www.april.org/fr/trusted-computing-le-film.</ref>. ''


=Questions=
=Questions=


==Principe des mesures techniques et de la protection juridique associée==
==Principe des DRM==
Question 4a : Depuis 1995, la Commission Européenne encourage l'utilisation des mesures techniques de protection comme facteur de développement d'une économie de la culture à l'ère du numérique. Pensez-vous que cette stratégie soit pertinente ?
'''Question 4.a ''': Depuis 1995, la Commission européenne encourage l'utilisation des DRM comme facteur de développement d'une économie de la culture à l'ère du numérique. Pensez-vous que cette stratégie soit pertinente ?
Question 4b : En signant les traités WCT et WPPT en 1996, l'Europe a fait il y a 10 ans le choix de la protection juridique des mesures techniques de protection. Pensez-vous que ce choix était judicieux ?
 
==Directive 2001/29CE et loi DADVSI==
'''Question 4.b''' : En signant les traités WCT et WPPT en 1996, l'Europe a fait le choix d'un régime juridique encadrant le contournement des DRM. Pensez-vous que ce choix était judicieux ?
Question 7a : Partagez-vous le constat que la directive 2001/29CE pose plus de problèmes qu'elle n'en résout ? Si oui, quelle solution proposer à nos partenaires pour sortir de l'ornière ?
 
Question 7b : Pensez-vous que, quoi qu'il en soit, il faut abroger rapidement le titre Ier de la loi DADVSI ? Si oui, au regard des termes actuels du débat, quels seraient selon vous les axes majeurs qui devraient guider une nouvelle transposition ? Partagez-vous notamment l'idée que les dispositions existantes en droit français avant la loi DADVSI, telles que celles relatives à la contrefaçon, à la fraude informatique, à la concurrence déloyale et au parasitisme, offrait déjà un arsenal répressif suffisant et conforme aux obligations fixées par la directive<ref>http://eucd.info/documents/transposition-eucd-2003-06-20.pdf</ref> ?
==Régime juridique des DRM==
Question 7c : Pensez-vous qu'il faille abroger les articles issus des amendements dits Vivendi qui n'étaient pas requis par la directive et ne plus y revenir ?
==Informatique dite "de confiance"==
Question 11 : De plus en plus, l'abandon du contrôle de son ordinateur personnel, et notamment de son droit au contrôle de l'accès à ses données personnelles, devient un pré-requis pour pouvoir accéder à des données numériques protégées par le droit d'auteur. Un tel principe est-il selon vous acceptable et quelle doit être la réponse du législateur face à cette "tendance du marché" ?


=Développements=
'''Question 4.c ''': Partagez-vous le constat que la directive 2001/29CE pose plus de problèmes qu'elle n'en résout ? Si oui, quelle solution proposer à nos partenaires pour sortir de l'ornière ?
 
'''Question 4.d ''': Pensez-vous que, quoi qu'il en soit, il faut abroger rapidement le titre premier de la loi DADVSI ? Si oui, au regard des termes actuels du débat, quels seraient, selon vous, les axes majeurs qui devraient guider une nouvelle transposition ? Partagez-vous notamment l'idée que les dispositions existantes en droit français avant la loi DADVSI, telles que celles relatives à la contrefaçon, à la fraude informatique, à la concurrence déloyale et au parasitisme, offraient déjà un arsenal répressif suffisant et conforme aux obligations fixées par la directive<ref>http://eucd.info/documents/transposition-eucd-2003-06-20.pdf.</ref> ?
 
'''Question 4.e''' : Pensez-vous qu'il faille abroger les articles issus des amendements dits Vivendi qui n'étaient pas requis par la directive et ne plus y revenir ?
 
'''Question 4.f''' : Quelle position comptez-vous adopter sur la réforme des directives IPRED au niveau européen ?
 
==Analyse critique des DRM==
 
'''Question 4.f''' : Pensez- vous que la mention d'une condition de licéité de la source de la copie effectuée à titre privé doit être supprimée ? 
 
'''Question 4.g''' : Envisagez-vous des solutions alternatives sur la question de l'accès aux œuvres et à leur financement ? Si oui, lesquelles ?
 
==Informatique déloyale==


''« Le livre, comme livre, appartient à l'auteur, mais comme pensée, il appartient - le mot n'est pas trop vaste - au genre humain. Toutes les intelligences y ont droit. Si l'un des deux droits, le droit de l'écrivain et le droit de l'esprit humain, devait être sacrifié, ce serait, certes, le droit de l'écrivain, car l'intérêt public est notre préoccupation unique, et tous, je le déclare, doivent passer avant nous. »'' Victor Hugo, 1878 – Discours d'ouverture du congrès littéraire international.
'''Question 4.h''' : De plus en plus, l'abandon du contrôle de son ordinateur personnel, et notamment de son droit au contrôle de l'accès à ses données personnelles, devient un pré-requis pour pouvoir accéder à des données numériques protégées par le droit d'auteur. Un tel principe est-il selon vous acceptable et quelle doit être la réponse du législateur face à cette "tendance du marché" ?


==Préambule : le droit d'auteur n'est pas remis en question==
=Développements=


Les auteurs de ce document et les soutiens de l'initiative EUCD.info<ref>http://eucd.info/</ref>, croient fermement que les droits moraux et les intérêts économiques des auteurs doivent être préservés dans l'environnement numérique. Il n'est pas dans leurs intentions de légitimer des pratiques illicites ni de léser les intérêts économiques des auteurs. Bien au contraire. D'un point de vue légal, ils pensent qu'il est socialement dommageable de criminaliser les pratiques honnêtes et légitimes de toute une population sous pretexte de punir une minorité de contrevenants. D'un point de vue économique, ils défendent fermement une saine concurrence et une rémunération équitable des auteurs mais sont hostiles aux monopoles, aux abus de position dominante et aux ententes illicites.
''« Le livre, comme livre, appartient à l'auteur, mais comme pensée, il appartient – le mot n'est pas trop vaste – au genre humain. Toutes les intelligences y ont droit. Si l'un des deux droits, le droit de l'écrivain et le droit de l'esprit humain, devait être sacrifié, ce serait, certes, le droit de l'écrivain, car l'intérêt public est notre préoccupation unique, et tous, je le déclare, doivent passer avant nous. »'' Victor Hugo, 1878 – Discours d'ouverture du congrès littéraire international.


== Définition==  
== Définition==  
''Les DRM « ''Digital Rights Management'' », également appelés MTP « Mesures techniques de protection », sont des dispositifs qui ont pour but de contrôler l'accès aux œuvres numériques et l'usage qui en est fait, notamment en limitant la copie. Dispositifs de contrôle d'usage, les DRM sont, en d'autres termes, des « menottes numériques » qui enferment les utilisateurs. Face à leur inévitable inefficacité, une législation a été élaborée pour interdire toute tentative de contournement des DRM.''
Sur les supports traditionnels des œuvres de l'esprit — un livre par exemple — il n'y a pas de restriction d'usage : je peux lire mon livre n'importe où, ne lire que certains passages, le relire autant de fois que je veux, faire des annotations dans la marge, le prêter à qui je veux et autant de fois que je le veux et le revendre<ref>À ce sujet, voir notamment Les droits imprescriptibles du lecteur de Daniel Pennac : http://fr.wikipedia.org/wiki/Comme_un_roman#Le_qu.27en-lira-t-on_.28ou_les_droits_imprescriptibles_du_lecteur.29.</ref> ; je suis donc libre de l'usage de mon livre. Pour une œuvre DRMisée en revanche, bien souvent je ne peux faire aucune de ces actions : les outils de lecture me sont imposés (lecteur, voire matériel particulier), je ne peux pas le prêter, je peux me voir retirer mon droit de lecture à n'importe quel moment<ref>Le cas s'est déjà produit pour les livres électroniques, notamment avec le Kindle d'Amazon, exemple : http://www.numerama.com/magazine/13484-kindle-amazon-efface-a-distance-des-centaines-de-livres-achetes-legalement-maj.html.</ref>  et je ne peux pas le revendre. On peut même exiger que j'utilise des outils particuliers pour pouvoir lire l'œuvre que j'ai pourtant achetée : par exemple, on pourrait exiger que j'achète une certaine marque de lunettes de déchiffrement pour lire mon livre, et tant pis pour moi si je ne peux pas les porter en même temps que mes lunettes de vue ! Et si ces lunettes de déchiffrement ne sont plus produites, je n'ai plus qu'à jeter tous mes livres et abandonner toutes les annotations que j'y ai faites, et à racheter les mêmes œuvres – en espérant qu'elles existent dans le nouveau format<ref>A titre d'illustration : http://bradcolbow.com/archive/view/the_brads_why_drm_doesnt_work/.</ref>...


===Menottes numériques===
===Menottes numériques===


'''''Les DRM<ref> Littéralement « Digital Rights Management », aussi appelé MTP « Mesures Techniques de Protection » ou «  Digital Restrictions Management »</ref> sont des dispositifs qui ont pour but de contrôler l'accès aux œuvres numériques et l'usage qui en est fait, notamment en limitant la copie. C'est un système de gestion des droits numériques. En d'autres termes, un DRM est un dispositif de contrôle d'usage, des menottes numériques qui enferment les utilisateurs. '''''  
Selon le code de la propriété intellectuelle, un DRM ou MTP est une technologie, un dispositif ou un composant ''« qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, accomplit la fonction »'' d'interdiction ou de limitation des ''« utilisations non autorisées par les titulaires d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin du droit d'auteur d'une œuvre, autre qu'un logiciel, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme »''<ref>Art. L331-5 CPI http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=3B6E7C0F8278B6D125C827B342B41966.tpdjo12v_1?idArticle=LEGIARTI000021212283&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111107.</ref>.


Par exemple, les DRM peuvent imposer :  
Par exemple, les DRM peuvent imposer :  
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Les DRM sont présentés comme des mesures visant à empêcher que des copies soient échangées, par exemple sur Internet, et à « sécuriser » les modes de diffusion des œuvres numériques (achat de contenus en ligne, location, etc.). Cette limitation de la diffusion est en réalité faible et repose sur le secret ; elle peut donc être facilement contournée. C'est pourquoi les promoteurs des mesures de contrôle d'usage se sont assurés de l'interdiction par la loi de tout contournement en leur appliquant des sanctions pénales.
Les DRM sont présentés comme des mesures visant à empêcher que des copies soient échangées, par exemple sur Internet, et à « sécuriser » les modes de diffusion des œuvres numériques (achat de contenus en ligne, location, etc.). Cette limitation de la diffusion est en réalité faible et repose sur le secret ; elle peut donc être facilement contournée. C'est pourquoi les promoteurs des mesures de contrôle d'usage se sont assurés de l'interdiction par la loi de tout contournement en leur appliquant des sanctions pénales.
Les DRM imposent à l'utilisateur un contrôle contraire à la philosophie du Logiciel Libre : l'idée même de l'existence d'un « DRM libre » est une impasse. En particulier, le régime juridique des DRM a précisément été mis en place pour interdire la publication du code source, publication qui est une des caractéristiques essentielles du Logiciel Libre.


===Dangers===
===Dangers===
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Il y a donc une différence importante entre l'objectif affiché — le contrôle des copies — et les conséquences des moyens utilisés — un contrôle de plus en plus fin et complet des usages. Ces contrôles présentent donc de multiples dangers :
Il y a donc une différence importante entre l'objectif affiché — le contrôle des copies — et les conséquences des moyens utilisés — un contrôle de plus en plus fin et complet des usages. Ces contrôles présentent donc de multiples dangers :


- '''un danger technique''', car les DRM sont intrusifs. Leur fonctionnement, lié à un format fermé et propriétaire, menace la pérennité des œuvres numériques. Leur opacité conduit également à affaiblir le niveau de sécurité des systèmes<ref>Voir notamment le Rapport parlementaire de Pierre Lasbordes sur la sécurité des systèmes d'information remis au Premier Ministre (page 80) : http://www.lasbordes.fr/IMG/pdf/26_novembre_doc_definitif.pdf%20.</ref> ;
- '''un danger technique''', car les DRM sont intrusifs. Leur fonctionnement, lié à un format fermé et propriétaire, menace la pérennité des œuvres numériques. Leur opacité conduit également à affaiblir le niveau de sécurité des systèmes ;


- '''un danger économique''', car ils favorisent la constitution de monopoles dans le cadre desquels on constate des abus de position dominante et le développement de la vente liée. Ils perturbent également le marché de l'occasion et sont particulièrement couteux ;
- '''un danger économique''', car ils favorisent la constitution de monopoles dans le cadre desquels on constate des abus de position dominante et le développement de la vente liée. Ils perturbent également le marché de l'occasion et sont particulièrement coûteux ;


- '''un danger sociétal''', car ils induisent la perte de contrôle par l'utilisateur de son propre équipement et de ses données personnelles, menacent le domaine public, interdisent des usages légaux ;
- '''un danger sociétal''', car ils induisent la perte de contrôle par l'utilisateur de son propre équipement et de ses données personnelles, menacent le domaine public, interdisent des usages légitimes et légaux ;


- '''un danger culturel''', car ils déséquilibrent le droit d'auteur, dépossédant les auteurs de leurs droits sur leurs œuvres au profit des éditeurs de DRM, empêchant ou limitant divers actes créatifs (citation, remix, etc.) et opposant le public aux œuvres et donc aux auteurs via une expérience utilisateur désastreuse ;
- '''un danger culturel''', car ils déséquilibrent le droit d'auteur, dépossédant les auteurs de leurs droits sur leurs œuvres au profit des éditeurs de DRM, empêchant ou limitant divers actes créatifs (citation, remix, etc.) et opposant le public aux œuvres et donc aux auteurs via une expérience utilisateur désastreuse ;
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- '''un danger patrimonial''', car les DRM font courir des risques à la conservation des œuvres numériques pour les générations futures.
- '''un danger patrimonial''', car les DRM font courir des risques à la conservation des œuvres numériques pour les générations futures.


===Le leurre du DRM " interopérable " ou " libre " ===
==Le régime juridique des DRM==
''Le 3 août 2006, la loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) était promulguée<ref>http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MCCX0300082L.</ref>. Elle transpose en droit français la directive 2001/29CE<ref>http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.</ref> (dite EUCD pour ''European Union Copyright Directive''), qui va plus loin que les obligations prévues dans les traités de l'OMPI sur le droit d'auteur (WCT en anglais, pour WIPO Copyright Treaty) et sur les droits des producteurs (''World Intellectual Property Organization Performances and Phonograms Treaty'', Traité de l'organisation mondiale du commerce sur les spectacles et les phonogrammes) rédigés en 1996. L'ensemble de ces textes s'inscrit dans une démarche plus large de restriction des libertés numériques et de sacralisation des DRM, sous prétexte de lutte contre la contrefaçon, et au détriment des droits du public et des auteurs.''
 
===Historique de l'instauration d'un régime juridique des DRM===
 
L'évolution récente du régime juridique des DRM témoigne d'une démarche d'ensemble sur la restriction des libertés numériques et la sacralisation des DRM, sous prétexte de lutte contre la contrefaçon, en réalité une attaque au service des puissants et au détriment du public et des auteurs. Des traités de l'OMPI à la directive EUCD, mais aussi aux directives IPRED, les droits des éditeurs, auteurs, utilisateurs de logiciels libres sont constamment menacés.


Le mode de fonctionnement et la reconnaissance des DRM accordent un monopole de gestion et d'accès aux contenus à certaines entreprises. Les DRM sont gérés par un ensemble de logiciels souvent fournis par un seul et même éditeur. Celui-ci  est chargé de verrouiller les contenus et de proposer son lecteur de fichiers numériques. Étant à l'origine de son format fermé, il est souvent le seul capable a priori de lire les fichiers comportant un DRM. Les clients sont donc fortement incités à utiliser le lecteur de l'éditeur au détriment de la concurrence, de leurs propres droits et de leur liberté de choix. L'idée même d'un « DRM interopérable » est donc un leurre, malgré les nombreuses annonces faites à ce sujet.<ref>Voir par exemple les promesses du rapport Olivennes sur http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/074000726/index.shtml, ou l'échec du logiciel DReaM de Sun promettant un DRM universel sur https://dream.dev.java.net/. Ce logiciel n'a jamais été réalisé, malgré de nombreux effets d'annonces (ce type de logiciel est appelé vaporware ou fumiciel).</ref>
====Des traités de l'OMPI à la directive EUCD====


De plus, les DRM imposent à l'utilisateur un contrôle contraire à la philosophie du Logiciel Libre : l'idée même de l'existence d'un « DRM libre » est une impasse. En particulier, la protection juridique des DRM a précisément été mise en place pour interdire la publication de code source, cette publication rendant le verrou trivial à supprimer. Le Logiciel Libre publiant par définition son code source, l'idée d'un « DRM libre » est un oxymore, à la fois sur le plan technique et sur le plan ontologique. La raison d'être du Logiciel Libre étant de donner le maximum de contrôle à l'utilisateur.
Au milieu des années 90, le gouvernement américain a proposé d'intégrer un régime juridique d'encadrement des contournements des DRM aux projets de traités WCT (traité sur le droit d'auteur)<ref>http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/wct/trtdocs_wo033.html.</ref> et WPPT (traité sur les droits des producteurs)<ref>http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/wppt/trtdocs_wo034.html.</ref>, alors en cours de rédaction à l'OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle). L'idée, fondée sur la pratique, était qu'aucun DRM ne résiste au génie humain, et que tous seront donc contournés. Par conséquent, pour le gouvernement américain, les actes de contournement devaient être interdits juridiquement, ainsi que les outils conçus ou spécialement adaptés pour réaliser de tels actes. Cette proposition fut retenue et intégrée en 1996 aux traités, malgré les réserves exprimées par de nombreux États. Aux États- Unis, le traité OMPI sur le droit d'auteur a conduit au DMCA (''Digital Millenium Copyright Act'', loi sur le droit d'auteur au millénaire numérique)<ref>http://fr.wikipedia.org/wiki/Digital_Millennium_Copyright_Act.</ref>.  


===Illustration===
Les États membres de l'Union européenne se sont engagés à sanctionner le contournement des mesures techniques et les activités préparatoires qui y sont associées  comme le développement d'un logiciel de contournement. Allant plus loin encore dans les restrictions de liberté, la directive 2001/29CE, dite directive EUCD (''European Union Copyright Directive'')<ref>http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.</ref> est adoptée en 2001<ref> Pour une chronologie complète (jusqu'en juin 2005) avec références, lire « Petite histoire de la protection juridique des mesures techniques et des informations électroniques » http://eucd.info/documents/petite-histoire.pdf.</ref>. Le 14 décembre 2009, l'Union européenne a ratifié les deux traités de l'OMPI<ref>http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/09/1916&type=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en.</ref>.


Sur les supports traditionnels des œuvres de l'esprit — un livre par exemple — il n'y a pas de restriction d'usage : je peux lire mon livre n'importe où, ne lire que certains passages, le relire autant de fois que je veux, faire des annotations dans la marge, le prêter à qui je veux et autant de fois que je le veux et le revendre<ref>À ce sujet, voir notamment Les droits imprescriptibles du lecteur de Daniel Pennac : http://fr.wikipedia.org/wiki/Comme_un_roman#Le_qu.27en-lira-t-on_.28ou_les_droits_imprescriptibles_du_lecteur.29</ref> ; je suis donc libre de l'usage de mon livre.  
Cette directive, dénoncée par l'initiative EUCD.info<ref>http://eucd.info/.</ref> notamment, est obsolète car elle se base sur des traités rédigés en 1996, à une époque où l'Internet grand public n'en était encore qu'à ses balbutiements. Il est indispensable de remettre en question la pertinence de dispositions législatives dont les fondements sont d'une autre époque.


Pour une œuvre DRMisée en revanche, bien souvent je ne peux faire aucune de ces actions : les outils de lecture me sont imposés (lecteur, voire matériel particulier), je ne peux pas le prêter, je peux me voir retirer mon droit de lecture à n'importe quel moment<ref>Le cas s'est déjà produit pour les livres électroniques, notamment avec le Kindle d'Amazon, exemple : http://www.numerama.com/magazine/13484-kindle-amazon-efface-a-distance-des-centaines-de-livres-achetes-legalement-maj.html.</ref>  et je ne peux pas le revendre. On peut même exiger que je j'utilise des outils particuliers pour pouvoir lire l'œuvre que j'ai pourtant achetée : par exemple, on pourrait exiger que j'achète une certaine marque de lunettes de déchiffrement pour lire mon livre, et tant pis pour moi si je ne peux pas les porter en même temps que mes lunettes de vue ! Et si ces lunettes de décryptage ne sont plus produites, je n'ai plus qu'à jeter tous mes livres et abandonner toutes les annotations que j'y ai fait, et à racheter les mêmes œuvres – en espérant qu'elles existent dans le nouveau format...
====Loi DADVSI====


==Historique de la protection des DRM==
En 2006, la loi de transposition, dite loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information)<ref>http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000266350.</ref>, est promulguée.


''Face à l'inévitable inefficacité des dispositifs de contrôle d'usage, une législation a été élaborée pour interdire toute tentative de contournement des DRM.''
Le projet de loi a été examiné dans le cadre d'une procédure d'urgence fin 2005, sans travail de concertation préalable par le ministère de la Culture ou par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA). Les dysfonctionnements du CSPLA – tenu par une poignée de représentants d'industriels et d'ayants droit ne s'intéressant quleurs seuls intérêts – et leur pouvoir d'orientation de la politique gouvernementale, sont d'ailleurs apparus au grand jour à l'occasion de ce débat.


===Des traités de l'OMPI à la directive EUCD===
Tout comme le gouvernement et l'opinion publique, des députés ont découvert les effets du texte pour les citoyens et certains acteurs – notamment pour les acteurs du logiciel libre, les personnes handicapées et les bibliothécaires – le jour de l'ouverture des débats, dans la presse ou quand certains de leurs collègues, sensibilisés, sont montés à la tribune (et ce alors même que des associations alertaient le ministère de la Culture et le CSPLA depuis plus de trois ans).
Résultat : le texte initial de transposition, rédigé par le CSPLA et proposé par le gouvernement, a été rejeté par une coalition de députés de tous bords qui l'ont jugé trop répressif et contraire à l’intérêt général. Le gouvernement et les parlementaires ont alors exploré différentes voies, pour tenter de limiter les effets indésirables connus des mesures techniques et du régime juridique associé, tout en se conformant aux obligations communautaires et internationales de la France. Cependant, l'absence de navette parlementaire, d'étude d'impact et de concertation, n'ont pas permis d'aboutir à un texte équilibré. Bien au contraire. La décision du Conseil constitutionnel a encore aggravé la situation en supprimant des exceptions<ref>http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2006/2006540/2006540dc.htm.</ref>.


Au milieu des années 90, le gouvernement américain a proposé d'intégrer une protection juridique des mesures techniques de protection aux projets de traités WCT et WPPT<ref>voir infra : « Analyse critique des mesures techniques et de la protection juridique associée »</ref> sur le droit d'auteur et les droits voisins, alors en cours de rédaction à l'OMPI.L'idée, fondée sur la pratique, était qu'aucune mesure technique de protection ne résiste au génie humain, et que toutes seront donc contournées. Par conséquent, pour le gouvernement américain, les actes de contournement devaient être interdits juridiquement, ainsi que les outils conçus ou spécialement adaptés pour réaliser de tels actes.
===Un régime empêchant tout contournement d'une mesure technique « efficace »===


Cette proposition des États-Unis fut retenue et intégrée en 1996 aux traités WCT (traité sur le droit d'auteur) et WPPT (traité sur les droits des producteurs), bien que de nombreux États aient exprimé leurs craintes de voir de telles dispositions entrer en conflit avec certaines dispositions protégeant les droits du public ou la libre concurrence.
L'article 6 de la directive EUCD<ref>http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.</ref> dispose que : ''« les États membres prévoient une protection juridique appropriée contre le contournement de toute mesure technique efficace, que la personne effectue en sachant, ou en ayant des raisons valables de penser, qu'elle poursuit cet objectif »''. Cette disposition est source d'insécurité juridique car les termes ''« mesure technique »'', ''« efficace »'' ou''« contournement »'', ne sont pas définis. De ce fait, l'objectif de la directive EUCD, l'harmonisation des législations des États membres, ne peut être pleinement atteint<ref>L'articulation des exceptions au droit d'auteur et des mesures techniques face à l'harmonisation (page 19 et 63) www.droit-ntic.com/pdf/dir_da.pdf.</ref>.


Un engagement des États et de l'Union européenne est pris pour sanctionner les actes de contournement des mesures techniques et les activités préparatoires dans leur droit national. Pour atteindre cet objectif, une directive européenne – la directive 2001/29CE ( surnommée EUCD pour European Union Copyright Directive ) - a été rédigée et adoptée en 2001<ref> Pour une chronologie complète (jusqu'en juin 2005) avec références, lire « Petite histoire de la protection juridique des mesures techniques et des informations électroniques » http://eucd.info/documents/petite-histoire.pdf</ref>. Le 14 décembre 2009, l'Union européenne a ratifié les deux traités de l'OMPI<ref>http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/09/1916&type=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en</ref>.
En application de l’article L331-5 al 1 CPI, transposant l'article 6 de la directive EUCD, sont donc éligibles au régime juridique spécifique les seules''« mesures techniques efficaces »''. Par une application littérale de la notion d’efficacité, ne seraient donc pas protégées les DRM qui peuvent être contournées, ce qui est le cas de la plupart des DRM. Dès lors, les titulaires de droits sur les DRM ne pourraient pas se prévaloir d’une quelconque protection. Cette interprétation neutralisant le régime juridique des DRM a été écartée par une présomption d'efficacité des mesures techniques<ref>Art.L335-5 al.2 CPI :'' « Ces mesures techniques sont réputées efficaces lorsqu'une utilisation visée au même alinéa est contrôlée par les titulaires de droits grâce à l'application d'un code d'accès, d'un procédé de protection tel que le cryptage, le brouillage ou toute autre transformation de l'objet de la protection ou d'un mécanisme de contrôle de la copie qui atteint cet objectif de protection. »''.</ref><ref>L'Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT) a considéré que doit être qualifiée d'efficace ''« toute mesure technique de protection qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, c’est-à-dire hors de tout usage détourné ou manœuvre visant à en neutraliser l’action, restreint l’accomplissement d’actes non autorisés par les ayants droit »''ARMT- rapport annuel 2008 p. 27 http://www.numerama.com/magazine/11577-l-armt-constate-son-inutilite-avant-de-devenir-l-hadopi-maj.html.</ref>.


Cette directive est obsolète car elle se base sur des traités rédigés en 1996, à une époque où l'Internet grand public n'en était encore qu'à ses balbutiements. Mais le législateur d'aujourd'hui vit dans un monde radicalement différent et ne peut l'ignorer. il est alors indispensable de remettre en question la pertinence de dispositions législatives dont les fondements économiques sont d'une autre époque.
Cette notion d'efficacité de la mesure est inutile car tous les DRM sont réputés efficaces et que cette notion ne permet pas d'opérer des distinctions entre les différents niveaux de protection mis en place. Pire encore, elle est source d'insécurité juridique car le peu de jurisprudence<ref>Une décision du tribunal de 1ère instance d’Helsinki du 25 mai 2007 (Helsingin käräjäoikeus, aff R 07/1004, 25 mai 2007) a suscité de nombreuses réactions. Les juges suédois avaient en effet décidé que les protections du DVD n’étaient pas efficaces en raison de l’existence sur le web d’outils de neutralisation, ce qui avait pour conséquence d’exclure toute protection juridique pour les DRM du DVD et de légaliser les techniques de contournement. Par un arrêt du 22 mai 2008, la Cour d’appel d’Helsinki (Helsingin hovioikeus, 22 mai 2008, Diaarinumero R 07/2622) a infirmé ce jugement en affirmant que l’efficacité d’un DRM ne peut pas être réfutée du fait de l’existence d’outils de neutralisation.</ref> sur ce sujet en Europe n'a pas abouti à une définition constante et unanime du terme ''« efficace »''.


===Loi DADVSI===
===Nouvelles remises en cause des droits : IPRED 1 et 2===


====Une loi adoptée dans l'urgence et en l'absence de concertation====
La première directive IPRED (''Intellectual Property Rights Enforcement Directive'', Directive sur l'application des droits de propriété intellectuelle) a été adoptée en 2004, et la version 2 en 2007. Cette « super EUCD » participe à la remise en cause des droits du public, en mettant en place de nouvelles mesures répressives, notamment en posant le principe de l'ingérence des ayants droit dans les enquêtes pour contrefaçon, ainsi que la responsabilité civile des intermédiaires techniques.


En 2006, la loi de transposition, dite loi DADVSI (droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information)<ref>http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000266350</ref>, est promulguée.
La directive IPRED doit de nouveau être révisée en 2012, suite à la consultation publique de 2011 de la Commission européenne<ref>http://www.april.org/reponse-de-lapril-la-consultation-ipred</ref>. Une fois de plus, les modifications suggérées serviraient les puissants au détriment du grand public et des auteurs<ref>Information Rights and Intellectual Freedom, Julie E. Cohen, 2011 (pages 8, 9 et 11). http://www.law.georgetown.edu/faculty/jec/intellfreedom.pdf </ref>. Il est nécessaire dès maintenant d'enrayer cette logique, qui passe également par des textes internationaux comme l'accord commercial anti-contrefaçon (ACTA)<ref>Voir le cahier international</ref> afin de ne pas affecter les générations futures.


La rédaction et l'adoption de loi DADVSI ont été difficiles, sans doute car le texte transpose une directive dont beaucoup constatent qu'elle est obsolète et n'atteint pas son objectif d'harmonisation.
==Analyse critique des DRM==


Le projet de loi a par ailleurs été examiné dans le cadre d'une procédure d'urgence fin 2005, mais aucun travail de concertation préalable, pourtant indispensable, n'avait été mené par le ministère de la culture et le Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique (CSPLA). Les dysfonctionnements du CSPLA – tenu par une poignée de représentants d'industriels ne s'intéressant qu'à leurs seuls interêts – et leur pouvoir d'orientation de la politique gouvernementale, sont d'ailleurs apparus au grand jour à l'occasion de ce débat.
''La mise en place de DRM a pour prétexte la préservation des droits sur l’œuvre. Or, des études démontrent que les DRM  découragent avant tout les usages légaux, en raison des contraintes pesant sur l'utilisateur<ref>http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422.</ref><ref>http://mktsci.journal.informs.org/search?fulltext=drm&submit=yes&x=21&y=10/.</ref>. L'actualité relative aux effets pervers des mesures techniques et du régime juridique associé est très riche, et largement relayée dans les médias. Nous invitons le lecteur à taper, par exemple, ''« DRM problème »'' dans un moteur de recherche pour s'en convaincre. La loi ne crée pas les conditions de mise en œuvre des principes qu'elle pose. Le nombre d'exceptions au contournement est trop restreint. La sécurité de développement du logiciel libre n'est pas garantie.''


Tout comme le gouvernement et l'opinion publique, des députés ont donc découvert les effets du texte pour les citoyens et certains acteurs – notamment pour les acteurs du logiciel libre, les personnes handicapées et les bibliothécaires – le jour de l'ouverture des débats, dans la presse ou quand certains de leurs collègues, sensibilisés, sont montés à la tribune (et ce alors même que des associations alertaient le ministère de la culture et le CSPLA depuis plus de trois ans).
===Les DRM portent atteinte aux droits et libertés des individus===
Résultat : le texte initial de transposition, rédigé par le CSPLA et proposé par le gouvernement, a été rejeté par une coalition de députés de tous bords qui l'ont jugé trop répressif et contraire à l'interêt général. Le gouvernement et les parlementaires ont alors exploré différentes voies, pour tenter de limiter les effets indésirables connus des mesures techniques et de la protection juridique associée, tout en se conformant aux obligations communautaires et internationales de la France.


L'absence de navette parlementaire, les conditions d'examen de certains amendements, et les pressions évidentes exercées sur les élus de la majorité pour introduire des dispositions n'ayant fait l'objet d'aucune étude d'impact ou de concertation, comme les amendements Vivendi, n'ont cependant pas permis d'aboutir à un texte équilibré. Bien au contraire. La décision du Conseil Constitutionnel a encore aggravé la situation en supprimant des exceptions<ref>http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2006/2006540/2006540dc.htm</ref>.
====Atteinte au droit au respect de la vie privée====
Le Groupe de travail Article 29, qui regroupe les représentants des autorités nationales chargées de la protection des données (dont la CNIL – Commission nationale informatique et libertés – en France)  s'est dit «'' préoccupé par le fait que l’utilisation légitime de technologies en vue de protéger les œuvres pourrait se faire au détriment de la protection des données à caractère personnel des individus »'' et a constaté ''« un écart croissant entre la protection des personnes dans les mondes hors ligne et en ligne »''<ref>http://www.pcinpact.com/news/Les_CNIL_europeennes_et_le_marquage_des_fichiers.htm.</ref><ref>ec.europa.eu/justice/policies/privacy/docs/wpdocs/.../wp104_fr.pdf.</ref>, inquiétude d'ailleurs partagée par de nombreuses associations représentant la société civile<ref>http://www.zdnet.fr/actualites/drm-quand-le-copyright-menace-les-droits-des-consommateurs-39175030.html.</ref>.


====La nécessité d'une révision des dispositions====
En effet, certains DRM exigent que le logiciel demande la permission à un serveur distant pour lire les fichiers protégés. Cela se traduit par l'envoi, sans aucun contrôle possible, par un logiciel propriétaire — c'est-à-dire une boite noire — de données de l'équipement de l'utilisateur vers les serveurs du gestionnaire de DRM. Au mépris du respect de la vie privée des utilisateurs, certains DRM font donc courir le risque d'un contrôle à distance des équipements par un soi-disant ''« tiers de confiance »'', une société privée qui n'a à cœur que ses propres intérêts.


Nombreux sont aujourd'hui les responsables politiques, les juristes, les représentants d'artistes, d'auteurs, de consommateurs, d'industriels, qui déclarent qu'il faut revoir cette loi.
La loi ne peut que renforcer ces inquiétudes : à cause des sanctions infligées en cas de contournement des DRM, il est impossible de contrôle leur impact sur le respect de la vie privée. Des affaires comme celles du root-kit Sony<ref>http://en.wikipedia.org/wiki/2005_Sony_BMG_CD_copy_protection_scandal.</ref> ont mis en évidence le fait que la frontière entre mesures techniques et logiciels espions est poreuse, et que leur déploiement sur des marchés grand public met en danger la souveraineté de l'État et la vie privée des utilisateurs.


Les principales critiques reposent sur le fait que la loi ne crée pas les conditions de mise en oeuvre des principes qu'elle pose ; que le nombre d'exceptions au contournement est trop restreint ; que la sécurité de développement du logiciel libre n'est pas garantie ; et que, plus largement, en lieu et place de règles claires, justes et équilibrées, inscrites dans la loi et permettant à chacun de connaître et de faire valoir ses droits devant l'autorité judiciaire, le législateur a rédigé un texte inintelligible, et créé une usine à gaz administrative pour l'interpréter et le faire appliquer.
====Atteintes au niveau culturel====


Ainsi, L'ARMT ( Autorité de régulation des mesures techniques ), crée dans le cadre de la loi DADVSI  pour la régulation du domaine des mesures techniques de protection, et fusionnée avec l'Hadopi (Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet ) en 2009<ref> Loi n°2009-1311 relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet, art L331-31 et suivants Code de propriété intellectuelle</ref>, n'a jamais été saisie, la procédure étant des plus floues. A titre d'illustration, il y a une réelle incertitude quant à la portée de la possibilité pour le titulaire des droits sur la mesure technique d'imposer au bénéficiaire d'informations essentielles de renoncer à la publication du code source et de la documentation technique de son logiciel indépendant et interopérant en cas de preuve d'un risque d' atteinte grave à la sécurité et à l'efficacité de la mesure technique en question<ref>art. L331-32 al.3 CPI http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=27CAA15334E43B81F37A56DEA116279D.tpdjo14v_2?idSectionTA=LEGISCTA000020740341&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111026</ref>.
=====Atteinte au droit de lire et au droit d'usage=====
Si l'utilisateur ne dispose pas des logiciels autorisés à lire les DRM, il lui est de fait interdit de lire l’œuvre pour laquelle il s'est déjà acquitté des droits. Il ne pourra utiliser un autre logiciel pour exercer son droit de lire l’œuvre. Ainsi, si une personne télécharge légalement un film mais qu'elle n'a pas sur son ordinateur le logiciel lui permettant de le lire, la loi lui interdit d'utiliser un logiciel permettant le contournement des mesures techniques. Une personne peut aussi télécharger légalement de la musique protégée par des DRM ne permettant la lecture que sur le matériel ayant servi au téléchargement. Dans ce cas, la personne sera dans l'impossibilité de transférer les morceaux sur son lecteur de musique, sauf à contourner les DRM. De même, si une personne achète un Blu-Ray mais qu'elle ne dispose pas du lecteur Blu-Ray approprié, sa seule alternative légale est le rachat d'un matériel adapté et souvent onéreux.


==Analyse critique des mesures techniques de protection==
=====Restriction de l'accès à la culture et atteinte à la pérennité de l’œuvre=====


''La mise en place de DRM a pour fondement la préservation des droits sur l’œuvre. Or, des études démontrent que, plutôt que d'éradiquer le piratage, les DRM  découragent les usages légaux, en raison des contraintes pensant sur l'utilisateur<ref>http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422</ref><ref>http://mktsci.journal.informs.org/search?fulltext=drm&submit=yes&x=21&y=10/</ref>. De nouvelles références liées à la problématique des DRM pourraient être ajoutées chaque jour. L'actualité relative aux effets des mesures techniques et de la protection juridique associée est en effet très riche, et largement relayée dans les média. Nous invitons le lecteur à taper, par exemple, ''"DRM problème"'' dans un moteur de recherche pour s'en convaincre.''
Alors que la diffusion et l'épanouissement de la culture numérique reposent sur la liberté des usages, les menottes numériques la réduisent à néant en la transformant en un simple droit d'utilisation limité, révocable, sous conditions financières dans un contexte déterminé et soumis aux aléas que pourrait rencontrer l'éditeur et à ses décisions. En conséquence, l'avenir des contenus est soumis au bon vouloir et à la bonne santé d'une société privée. Il dépend également de ses capacités techniques de préservation et de conversion de l'œuvre vers les nouveaux supports matériels<ref>L'expérience montre l'obsolescence de tels systèmes en quelques années. Voir par exemple l'ATRAC de Sony, http://www.zdnet.fr/actualites/musique-sony-abandonne-son-format-atrac-pour-le-mp3-wma-et-aac-39372539.htm.</ref>. Ainsi, rien ne garantit que les fichiers disponibles sur la boutique en ligne iTunes et protégés par des DRM Apple soient encore accessibles si l'entreprise Apple venait à disparaître.


===Non-interopérabilité et atteinte à la pérennité de l’œuvre===
Dans le cas d’œuvres tombées dans le domaine public et archivées, il est fait interdiction aux bibliothèques et archives de contourner les mesures techniques qui les protègent, alors même qu'elles y sont autorisées en théorie. De plus, si le logiciel permettant d'accéder à l’œuvre n'existe plus ou que l'éditeur a disparu, il est impossible de copier le livre sous une forme non protégée par la mesure technique afin de le mettre à disposition du public. Au mieux, il faudra procéder à l'acquisition d'un autre exemplaire, non protégé par une mesure technique. Au pire, la possibilité d'accéder à ce livre est perdue. Par ailleurs, alors que le droit d'auteur est limité dans le temps, les mesures techniques n'ont pas, d'après la directive EUCD, obligation de se déverrouiller dans le même délai.


L'interopérabilité étant définie comme'' « la capacité d'échanger des informations et d'utiliser mutuellement les informations échangées »''<ref>↑ Directive ç1/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur. http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:31991L0250:FR:HTML</ref>, les DRM, par leur fonction de contrôle de l'accès, ne peuvent être interopérables. Affirmer que les DRM ou MTP ne devraient ''« pas avoir pour effet d'empêcher la mise en œuvre effective de l'interopérabilité dans le respect du droit d'auteur »''<ref>Art. L331-5 CPI http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=67627D45600A35DA40A197CF740CA444.tpdjo11v_2?idSectionTA=LEGISCTA000006179045&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111014</ref> n'a donc pas de sens.
Pour reprendre les termes d'A. Jacquesson, ancien directeur de la bibliothèque de Genève et spécialiste des bibliothèques numériques, ''« aucune pérennité n’est assurée quant à la validité à long terme des différents DRM. Que le vendeur change de technologie ou d’orientation commerciale, voire fasse faillite ou soit racheté, rien n’assure le consommateur que les documents acquis contre rémunération pourront encore être lus. Les DRM ne permettent qu’une consultation à très court terme, quelques années au mieux. Il est illusoire de bâtir une bibliothèque numérique pérenne, qu’elle soit personnelle ou publique, sur un si court terme. »''<ref> A. Jacquesson, « Du livre enchaîné aux DRM, Les freins à la diffusion du savoir au temps des livres électroniques » http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2011-03-0036-007.</ref>


Les DRM, en contrôlant l'accès à l’œuvre, créent souvent une incompatibilité des fichiers protégés avec certains systèmes, logiciels ou matériels. Ainsi, un fichier en WMA protégé par DRM n'est pas lisible sur un ipod. Inversement, un fichier AAC protégé par DRM Apple n'est pas lisible sur un lecteur étranger à la marque. En conséquence, les DRM constituent une atteinte à la liberté des utilisateurs par leur mise sous dépendance technologique.  
Pour assurer l'ensemble de ces usages légitimes et essentiels, seul l'usage d'un standard ouvert<ref>Les standards ouverts sont définition par l'article 4 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000801164&dateTexte= : « On entend par standard ouvert tout protocole de communication, d'interconnexion ou d'échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d'accès ni de mise en œuvre. »</ref> peut permettre de garantir la pérennité d'une œuvre et son libre accès.


De plus, Les DRM ne permettent pas d'assurer la pérennité de l’œuvre protégée. En effet, rien ne garantit qu'une œuvre, protégée par les DRM développés par une entreprise déterminée, demeure accessible si la dite entreprise venait à disparaître. A titre d'illustration, rien ne garantit que les fichiers disponibles sur itunes et protégés par des DRM Apple soient encore accessibles si l'entreprise Apple disparaît. Seul l'usage de standards ouverts et interopérables sont à même de garantir la pérennité d'une œuvre numérique.
===Les DRM sont un non-sens économique===


===Non-sens économique et inefficacité dans la lutte contre le piratage===
====Inefficacité dans la lutte contre la contrefaçon====


Les DRM ont un impact négatif sur les utilisateurs légaux car ils sont les seuls à souffrir des restrictions imposées par les DRM. Afin de se simplifier la gestion de musiques ou de films (transferts, sauvegardes ...) par exemple, les utilisateurs se tournent vers des œuvres non protégés par des DRM. Les DRM sont en réalité l'une des causes du piratage, décourageant les usages légaux et ne dissuadant pas ceux qui ont décidé de pirater. Ainsi, en 2010, certains utilisateurs légaux n'ont pu lire le Blu-Ray d'Avatar en raison de la surcouche de DRM bloquant certains lecteurs<ref>http://www.numerama.com/magazine/15582-avatar-en-blu-ray-illisible-sur-certains-lecteurs-a-cause-des-drm.html</ref> poussant au téléchargement illégal du film.
Les majors de l'industrie de la musique et de l'image disent que leurs difficultés économiques sont dues aux téléchargements (via le ''peer to peer'' notamment) et ont fortement influencé la rédaction du traité OMPI et de l'EUCD. S'il est exact de dire que les ventes des œuvres sur support physique sont en baisse, il est en revanche erroné d'affirmer que les revenus des majors sont en chute libre, les reversements des droits étant en hausse, comme l'a d'ailleurs souligné un article paru en 2011 dans ''La Tribune''<ref>http://www.latribune.fr/technos-medias/medias/20110622trib000631344/musique-les-bons-chiffres-que-cache-la-chute-des-ventes-de-cd.html.</ref> :


Une étude de deux universités américaines, Rice et Duke<ref>http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422</ref><ref>http://www.clubic.com/antivirus-securite-informatique/actualite-451724-etude-suppression-drm-baisser-piratage.html</ref> affirme clairement que :
''« Mais non, tous les autres clignotants ne sont pas dans le rouge, et sont – étrangement – moins mis en avant. Car le marché de la musique ne comprend pas que la vente de disques, qui est désormais passée derrière le spectacle vivant qui, lui, progresse régulièrement [...]. Les droits reversés aux auteurs-compositeurs (Sacem), aux artistes interprètes (Adami et Spedidam) et aux producteurs (SCPP et SPPF) ont tous largement augmenté depuis 2000. Certes, tous ont été impactés par l'effondrement des ventes de disques, lesquelles sont, par exemple, passées de 21 % à 12 % des recettes de la Sacem depuis 2003. Si le total des droits engrangés a continué à augmenter, c'est que l'essentiel vient d'ailleurs : des concerts, de la diffusion de musique (radio, télévision, lieux publics...), et aussi de la taxe pour la copie privée (prélevée sur les ventes de supports vierges comme les DVD, clés USB, cartes mémoires, etc). » ''


''« en fait, supprimer les DRM peut être plus efficace pour diminuer le piratage que mettre en place des DRM plus sévère. »''
Les DRM ont un impact négatif sur les utilisateurs ayant légalement accès à une œuvre car ils sont les seuls à souffrir des restrictions imposées par ces DRM<ref>Pour un exemple de l'absurdité de l'usage de DRM dans la lutte contre le partage : http://www.numerama.com/magazine/20409-l-absurdite-des-drm-en-une-image.html.</ref>. Afin de simplifier la gestion de leurs musiques ou films (transferts, sauvegardes...), les utilisateurs se tournent donc vers des œuvres non verrouillées par des DRM. Ainsi, en 2010, certains utilisateurs n'ont pu lire le Blu-Ray d'''Avatar'' en raison de la surcouche de DRM bloquant certains lecteurs<ref>http://www.numerama.com/magazine/15582-avatar-en-blu-ray-illisible-sur-certains-lecteurs-a-cause-des-drm.html.</ref> poussant au téléchargement illégal du film. Une étude de deux universités américaines, Rice et Duke<ref>http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422.</ref><ref>http://www.clubic.com/antivirus-securite-informatique/actualite-451724-etude-suppression-drm-baisser-piratage.html.</ref> souligne ainsi que ''« en fait, supprimer les DRM peut être plus efficace pour diminuer le piratage que mettre en place des DRM plus sévères. »''


Les distributeurs de contenus culturels reconnaissent progressivement le non-sens économique des DRM<ref>http://www.lemonde.fr/web/recherche_breve/1,13-0,37-1066885,0.html</ref> :
====Menace sur la copie privée====


''« Très critiqués, notamment par les associations de consommateurs, les DRM ont notamment le défaut de bloquer l'interopérabilité entre différents appareils. Certains CD équipés de verrous anticopies ne peuvent par exemple être lus sur ordinateur ou dans certains autoradios. Depuis plusieurs années, l'industrie musicale a d'ailleurs cessé progressivement d'utiliser des DRM sur les disques en Europe, constatant que l'impact sur le téléchargement illégal était très relatif tandis que ces protections mécontentaient les acheteurs. »''<ref>http://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/07/21/cinema-musique-jeux-bientot-des-verrous-numeriques-communs_1390785_651865.html</ref>
Les menottes numériques rendent enfin pratiquement impossible le droit à la copie privée<ref>En France, l'exception de copie privée a été insérée dans la loi en 1957 (art. L122-5 2° CPI) http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=9121218EB86E3A7C238B5EA0449E907E.tpdjo02v_3?idArticle=LEGIARTI000024423362&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111102. La rémunération pour copie privée a été insérée en 1985 ( art. L311-1 et s. CPI ) http://www.legifrance.gouv.fr.</ref>. Plus précisément, si des DRM empêchent la copie privée, l'utilisateur n'a pas le droit de les contourner pour effectuer sa copie<ref>Voir notamment à ce sujet les affaires ''" Mulholland Drive "'' Cass. 1ère civ., 19 juin 2008, n° 07-14277 http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000019034711&fastReqId=1288840549&fastPos=1 et " Phil Collins " Cass. 1ère civ., 27 novembre 2008, n° 07-18778 http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000019842464&fastReqId=1585090484&fastPos=1.</ref>.


Partant de ce constat, les fabricants de matériels se sont engagés à supprimer progressivement les DRM par les les Accords Élysée du 23 novembre 2007<ref>http://www.senat.fr/rap/l08-053/l08-0536.html#fnref35</ref>. Cependant, beaucoup de chemin reste encore à accomplir, particulièrement dans les domaines des jeux vidéos, des films ou encore des livres numériques.  
La copie privée étant ''de facto'' interdite par l'interdiction de contournement des mesures techniques, la rémunération pour copie privée, lorsqu'elle existe en droit national, n'a plus lieu d'être. Pourtant, Le gouvernement français n'y a pas renoncé, malgré des arrêts récents de la Cour de justice européenne qui l'ont conduit à réviser le cadre juridique de la  copie privée<ref> Sur le projet de loi n°3875 relatif à la rémunération pour copie privée http://www.assemblee-nationale.fr/13/projets/pl3875.asp</ref><ref>http://www.pcinpact.com/actu/news/66762-copie-privee-projet-loi-ministere-culture.htm.</ref> en raison de son incompatibilité avec les DRM. La loi du 20 décembre 2011 relative à la rémunération pour copie privée<ref>Loi n° 2011-1898 du 20 décembre 2011 relative à la rémunération pour copie privée http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000025001493&dateTexte=&categorieLien=id.</ref> exige du consommateur qu'il s'assure de la licéité de la source qu'il copie, ce qui est en pratique souvent impossible<ref>http://www.pcinpact.com/news/67666-quadrature-copie-privee-liceite-source.htm.</ref>. Ce sont donc de nombreux obstacles à la copie privée.


Les entreprises n'ont pas renoncé aux menottes numériques et élaborent de nouveaux DRM, comme Ultraviolet<ref>http://www.pcinpact.com/actu/news/58417-drm-ultraviolet-interoperable-cloud-consortium-dece.htm</ref>, permettant la lecture sur divers supports mais davantage attentatoires à la liberté des utilisateurs, contraints de s'enregistrer sur un service ''"en nuages"''.   
====Des acteurs économiques qui refusent d'évoluer====


L'abandon de ces restrictions permettrait pourtant accroître la concurrence et abaisser les prix d'acquisition de l’œuvre, une baisse autrement plus efficace pour encourager les usages légaux.Ainsi, dans le cas des livres numériques, la suppression des DRM représenterait une économie non négligeable pour les distributeurs ne pouvant développer leur propre solution de marquage et recourant aux services d'une entreprise comme Adobe.
Les distributeurs de contenus culturels, comme par exemple EMI<ref>http://www.lemonde.fr/web/recherche_breve/1,13-0,37-1066885,0.html.</ref>, ont reconnu que les DRM étaient un non-sens économique car ''« les DRM ont notamment le défaut de bloquer l'interopérabilité entre différents appareils. Certains CD équipés de verrous anticopies ne peuvent pas, par exemple, être lus sur ordinateur ou dans certains autoradios. »''<ref>http://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/07/21/cinema-musique-jeux-bientot-des-verrous-numeriques-communs_1390785_651865.html.</ref>


''« Le coût d’un tel marquage est de 0,40€ par exemplaire à l’heure actuelle, un coût fixe qui a une influence non négligeable pour des livres proposés à des prix réduits (3% sur un prix de vente à 12€ par exemple). Ce coût est assumé par les distributeurs de livres numériques et fait l’objet d’une refacturation aux
Malgré des effets d'annonce sur la suppression des DRM lors des Accords de l'Elysée en 2007<ref>Les Accords Élysée du 23 novembre 2007, disponibles sur http://www.senat.fr/rap/l08-053/l08-0536.html#fnref35.</ref>, l'exact inverse s'est produit avec un recours aux DRM toujours plus important et dans des domaines de plus en plus variés : jeux vidéos<ref>Pour exemple : http://www.numerama.com/magazine/15224-drm-sur-assassin-s-creed-2-ubisoft-n-a-rien-appris-du-passe-en-fait.html.</ref>, films, ou encore livres numériques<ref>Le problème des DRM : frein aux usages et incitation au piratage - Joël Faucilhon, http://www.dailymotion.com/video/xikgl1_le-probleme-des-drm-frein-aux-usages-et-incitation-au-piratage-joel-faucilhon-responsable-de-la-stru_school.</ref>. De nouveaux systèmes de gestion des droits numériques comme Ultraviolet<ref>http://www.pcinpact.com/actu/news/58417-drm-ultraviolet-interoperable-cloud-consortium-dece.htm.</ref>, sous prétexte de permettre la lecture sur différents supports, sont encore plus attentatoires à la liberté des utilisateurs qui sont alors contraints de s'enregistrer en ligne pour pouvoir profiter de l’œuvre qu'ils ont acheté, les obligeant ainsi à voir leur activité enregistrée et à être connectés en permanence sur internet.
éditeurs. A noter également qu’Adobe demande un droit d’entrée à ces mêmes distributeurs de 75 000$/annuel pour disposer de cette solution. C’est un ticket d’entrée inaccessible à des distributeurs petits ou moyens.»''<ref> « Combien coûte un livre numérique», étude du MOTif, p. 29 http://www.lemotif.fr/fr/etudes-et-analyses/etudes-du-motif/cout-d-un-livre-numerique/</ref>


===Impact négatif du verrouillage des œuvres sur certains professionnels===
Le non-sens économique des DRM est portant reconnu depuis 2002 : la fin des DRM permettrait ainsi :
* d’accroître la concurrence et de baisser les prix, ce qui encouragerait les usages légaux ;
* une économie importante pour les distributeurs ne pouvant développer leur propre solution de marquage<ref> Voir par exemple à ce sujet l'étude du MOTif, l'observatoire du livre et de l’écrit associé à la Région Île- de-France : '« Le coût d’un tel marquage est de 0,40€ par exemplaire à l’heure actuelle, un coût fixe qui a une influence non négligeable pour des livres proposés à des prix réduits (3% sur un prix de vente à 12€ par exemple). Ce coût est assumé par les distributeurs de livres numériques et fait l’objet d’une refacturation aux éditeurs. A noter également qu’Adobe demande un droit d’entrée à ces mêmes distributeurs de 75 000$/annuel pour disposer de cette solution. C’est un ticket d’entrée inaccessible à des distributeurs petits ou moyens.»''« Combien coûte un livre numérique», étude du MOTif, p. 29 http://www.lemotif.fr/fr/etudes-et-analyses/etudes-du-motif/cout-d-un-livre-numerique/.</ref>.


Les dangers liés au verrouillage des œuvres ne se limitent pas à l'impact sur les particuliers. Il peut même être encore plus fort dans le cadre de certaines professions, au premier rang desquelles les industries de l'image et de la musique. Ainsi, le passage au film numérique dans les salles de cinéma s'accompagne de mesures de contrôle et de verrouillage inédites : les majors du secteur, sous prétexte d'interopérabilité, s'assurent d'un contrôle quasi-absolu sur les œuvres.
====Le verrouillage des œuvres pèse sur la concurrence====


Ainsi, le Digital Cinema Initiative (Initiative pour le cinéma numérique, ou DCI)<ref>http://www.dcimovies.com/</ref> qui regroupe les principales majors de l'industrie du cinéma américain<ref>Selon leur site, prennent notamment part au projet Disney, Fox, MGM, Paramount, Sony, Universal et Warner Bros.</ref> s'affiche en héraut de l'interopérabilité, mais intègre dans ses schémas explicatifs des dispositifs de contrôle d'usage qu'il souhaite voir pour imposés à toutes les œuvres.
=====Encouragement des ententes illicites, des monopoles et des abus de position dominante=====


Ces verrous permettent notamment de choisir les fenêtres de projection, d'imposer la projection de messages ou de publicités avant le film ou de limiter le nombre de projections. En d'autres termes, les majors peuvent décider de tout, et les salles de cinémas deviennent de simples lieux de projection dépersonnalisés et sans aucun contrôle de leur propre offre. Pire encore, les salles sont contraintes d'accepter ces restrictions de leur liberté : bientôt, la plupart des films seront exclusivement proposés sous cette forme. À terme, c'est donc la fin d'une liberté de choix et de gestion qui est programmée, avec des DRM qui permettent de donner le contrôle à quelques grandes entreprises sur la totalité des œuvres diffusées. S'ajoutent une complexité du système ingérable pour les petites salles et un coût du matériel très important, ce qui ne permet qu'aux plus grosses structures de tirer leur épingle du jeu<ref>Les cinémas Utopia ont souligné ces difficultés notamment lors d'une conférence aux Rencontres Mondiales du Logiciel Libre 2010 http://2010.rmll.info/Le-logiciel-libre-au-secours-de-la-diversite-culturelle.html.</ref>
Il peut y avoir entente illicite si les titulaires de droits et les auteurs de mesures techniques passent entre eux des accords aboutissant à une situation monopolistique. Un acteur indépendant qui voudrait s'affranchir de ces accords tout en continuant à utiliser la même mesure technique serait en situation de contrefaçon. De plus, l'ajout d'une mesure technique dans un logiciel étant suffisant pour obtenir un monopole de fait, la concurrence ne régule pas les prix en fonction de l'offre et de la demande. Le fournisseur du logiciel aura donc naturellement tendance à le proposer à un prix supérieur à sa valeur théorique en situation de concurrence.


===Atteinte à la vie privée des utilisateurs par les éditeurs des DRM===
L'ajout d'une mesure technique sur une œuvre est aussi utilisé pour empêcher l'apparition de concurrents. Un concurrent potentiel ne peut en effet distribuer ou concevoir un produit de substitution compatible car pour ce faire il doit nécessairement contourner la mesure technique. S'agissant des formats de fichier, il suffit à l'auteur d'un format de fichier d'inclure dans celui-ci une mesure technique pour détenir un monopole de fait sur l'exploitation de ce format.


Alors que la diffusion et l'épanouissement de la culture numérique reposent sur la liberté des usages, les menottes numériques la réduisent à néant en la transformant en un simple droit d'utilisation limité, révocable, dans un contexte déterminé et soumis aux aléas que pourrait rencontrer l'éditeur et à ses décisions.
=====Contrôle des industries de l'image et de la musique par les majors=====


Comme pour tout droit d'utilisation, l'avenir de ces contenus est soumis au bon vouloir d'une société privée et à sa capacité technique de préservation et de conversion de l'œuvre vers les nouveaux supports matériels et les nouveaux logiciels dans les décennies suivant la création d'un système de DRM. Or l'expérience montre l'obsolescence de tels systèmes en quelques années maximum<ref>Voir par exemple l'ATRAC de Sony, http://www.zdnet.fr/actualites/musique-sony-abandonne-son-format-atrac-pour-le-mp3-wma-et-aac-39372539.htm.</ref>. De plus, certains DRM nécessitent un accès distant, ce qui implique le maintien du service en ligne – l'accès aux œuvres est donc tributaire de la bonne santé d'une entreprise privée ainsi que de sa bonne gestion du contenu.  
Les conséquences négatives du verrouillage des œuvres peuvent être fortes dans le cadre de certaines professions, au premier rang desquelles les industries de l'image et de la musique. Ainsi, le passage au film numérique dans les salles de cinéma s'accompagne de mesures inédites de contrôle et de verrouillage : les majors du secteur, sous prétexte d'interopérabilité, s'assurent d'un contrôle quasi absolu sur les œuvres. Ainsi, le ''Digital Cinema Initiative'' (Initiative pour le cinéma numérique, ou DCI)<ref>http://www.dcimovies.com/.</ref> qui regroupe les principales majors de l'industrie du cinéma américain<ref>Selon leur site, prennent notamment part au projet Disney, Fox, MGM, Paramount, Sony, Universal et Warner Bros.</ref> s'affiche en héraut de l'interopérabilité, mais intègre dans ses schémas explicatifs des dispositifs de contrôle d'usage.  


Ces DRM exigent que le logiciel demande la permission à un serveur distant pour lire les fichiers protégés. Cela se traduit par l'envoi, par un logiciel propriétaire — c'est-à-dire une boite noire — de données de l'équipement de l'utilisateur vers les serveurs du gestionnaire de DRM. Le tout est fait sans aucun contrôle possible par l'utilisateur du type et de la quantité d'informations envoyées.
Ces verrous permettent notamment de choisir les fenêtres de projection, d'imposer la projection de messages ou de publicités avant le film ou de limiter le nombre de projections. En d'autres termes, les majors peuvent décider de tout, et les salles de cinémas deviennent de simples lieux de projection dépersonnalisés et sans aucun contrôle de leur offre. À terme, c'est la fin d'une liberté de choix et de gestion qui est programmée, avec des DRM qui permettent de donner le contrôle à quelques grandes entreprises de la quasi-intégralité des œuvres diffusées. S'ajoutent une complexité du système ingérable pour les petites salles et un coût du matériel très important, ce qui ne permet qu'aux plus grosses structures de tirer leur épingle du jeu<ref>Les cinémas Utopia ont souligné ces difficultés notamment lors d'une conférence aux Rencontres Mondiales du Logiciel Libre 2010 http://2010.rmll.info/Le-logiciel-libre-au-secours-de-la-diversite-culturelle.html.</ref>.


Au mépris du respect de la vie privée des utilisateurs, certains DRM font courir le risque d'un contrôle à distance de leurs équipements par un soi-disant « tiers de confiance », en réalité une société privée qui n'aura à cœur que ses propres intérêts. Par ailleurs ce type de DRM est discriminant et pénalise ceux qui n'ont pas un accès facile à Internet, ainsi que les usages nomades en dehors du réseau, tout en posant la question de la pérennité du service.
===Les DRM empêchent l'interopérabilité===


Si les utilisateurs souhaitent éviter le traçage de leurs usages ou que les DRM rendent l'œuvre illisible ou inutilisable, il n'est pas possible pour autant de s'en débarrasser pour profiter de son achat, la loi sanctionnant par des mesures pénales le contournement.
====Le leurre du DRM « interopérable »====


==Analyse critique de la protection juridique des mesures techniques==
Les DRM sont gérés par un ensemble de logiciels souvent fournis par un seul et même éditeur, qui verrouille les contenus et propose son propre lecteur de fichiers numériques, souvent le seul capable de lire les fichiers comportant un DRM. Les clients sont donc fortement incités à utiliser le lecteur de l'éditeur au détriment de la concurrence, de leurs propres droits et de leur liberté de choix. Les DRM, en contrôlant l'accès à l’œuvre, créent donc souvent une incompatibilité des fichiers protégés avec certains systèmes, logiciels ou matériels. Ainsi, un fichier au format WMA, verrouillé par DRM, n'est pas lisible sur un lecteur audio Ipod d'Apple, par exemple. Inversement, un fichier AAC protégé par DRM Apple n'est pas lisible sur un lecteur étranger à la marque. Parler de ''« l’interopérabilité des mesures techniques »'' comme l'avait fait l'ARMT en 2008 (avant de devenir l'Hadopi)<ref>« l’échange entre systèmes hétérogènes de contenus protégés, dans le respect des droits des créateurs » et qui passe par « une interopérabilité des métadonnées (données structurées qui décrivent et identifient le contenu auquel elles sont associées) associées au contenu et par un respect des conditions de protection et des niveaux de sécurisation établis par les titulaires de droits »''ARMT- rapport annuel 2008 p. 28 http://www.numerama.com/magazine/11577-l-armt-constate-son-inutilite-avant-de-devenir-l-hadopi-maj.html.</ref> n'a donc pas de sens, malgré les annonces faites à ce sujet.<ref>Voir par exemple les promesses du rapport Olivennes sur http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/074000726/index.shtml, ou l'échec du logiciel DReaM de Sun promettant un DRM universel. Ce logiciel n'a jamais été réalisé, malgré de nombreux effets d'annonces (ce type de logiciel est appelé vaporware ou fumiciel).</ref>


''Le 3 août 2006, la loi dite DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) était promulguée<ref>http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MCCX0300082L</ref>. La loi DADVSI transpose en droit français la directive 2001/29CE<ref>http://europa.eu.int/eur-lex/lex/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:32001L0029:FR:HTML</ref> sur le droit d'auteur et les droits voisins dans la société de l'information. Cette directive adoptée en mai 2001 doit permettre à l'Europe de se conformer aux obligations prévues dans les traités WCT et WPPT rédigés en 1996 sous l'égide de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle. Ces dispositions, instaurant un dispositif de répression, sacralise les DRM au mépris de l'intérêt général. Les textes à venir, loin de revenir sur la protection juridique des DRM, tendent à en étendre son champ d'application.  ''
====L'interopérabilité menacée====


===Un corpus juridique répressif===
Les dispositions issues de la loi DADVSI<ref>Art. L331-5 et suivants CPI http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=FE7F072E9627136B9A4DC1359127D079.tpdjo13v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006179045&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111102.</ref><ref>Décret 2006-1763 du 23 décembre 2006, relatif à la répression pénale de certaines atteintes portées au droit d'auteur et aux droits voisins http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000817096&fastPos=1&fastReqId=1940515751&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte.</ref> interdisent le contournement ou la mise à disposition d'outils de contournement des mesures techniques de protection<ref>Le contournement des DRM est ainsi un délit punissable d'une amende de quatrième classe pouvant aller jusqu'à 750 €. La création, la distribution, ou l'incitation à l'usage d'un outil manifestement destiné au contournement des mesures de contrôle d'usage font encourir une peine d'un maximum de 6 mois d'emprisonnement et 30 000€ d'amende.</ref>. Pourtant, le législateur, au moment de la transposition de la directive de 2001, avait souhaité que les actes de contournement des DRM accomplis aux fins d'interopérabilité soient exonérés de responsabilité pénale, ce que le Conseil constitutionnel<ref> Conseil constitutionnel, 27 juillet 2006, décision 2006-540 DC loi relative au droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information (DADVSI) http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2006/2006-540-dc/decision-n-2006-540-dc-du-27-juillet-2006.1011.html.</ref> a refusé en l'absence de définition précise de la notion d'''« interopérabilité »''. En interdisant le contournement des DRM, le législateur a menacé d'une part la mise en œuvre de l'interopérabilité, et d'autre part l'exception de décompilation et la sécurité juridique des auteurs et/ou utilisateurs de logiciels libres. Face à ces menaces, l'April a déposé une requête en annulation<ref>http://www.april.org/fr/articles/communiques/pr-20070221.html.</ref> devant le Conseil d'État du décret du 23 novembre 2006.  Le Conseil d'État n'a pas annulé le décret en question, mais il en a précisé le sens, en affirmant qu'un Logiciel Libre peut lire un contenu sous DRM sans être considéré comme un moyen ''« spécialement conçu ou adapté pour contourner une mesure technique »'',<ref>Pour plus d'informations, voir l'analyse de l'arrêt du Conseil d'État par l'April : http://www.april.org/fr/groupes/dadvsi/analyse-arret-conseil-etat-decret-dadvsi.html%20.</ref> ce qui a permis de sécuriser juridiquement les auteurs et utilisateurs de logiciels libres sur ce point<ref>Sur ce point, on peut citer l'exemple de VideoLan, qui a lancé récemment un projet pour comprendre le fonctionnement de l'AACS (disponible sur http://www.videolan.org/developers/libaacs.html). Un tel projet s'inscrit pleinement dans les exceptions de recherche et dans le droit à l'interopérabilité.</ref>.


Pour utiliser un contenu sous DRM, mettre en œuvre la plupart des formats fermés ou interopérer avec un logiciel propriétaire, les auteurs de logiciels libres procèdent à des travaux de décompilation et d'ingénierie inverse qui font l'objet d'une exception au droit d'auteur à des fins d'interopérabilité<ref>Article L122–6-1 du code de la propriété intellectuelle : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006278920.</ref>. Pour lire un contenu DRMisé, les auteurs ou éditeurs de logiciels libres sont contraints de contourner la mesure technique car ils ne disposent généralement pas des informations nécessaires à l'interopérabilité. Permettre cette dernière implique donc des travaux très complexes de rétro-ingénierie.  
Cette sécurisation juridique partielle ne rend pas pour autant la loi DADVSI plus acceptable : elle instaure un régime d'exception inapproprié pour les dispositifs logiciels que sont les DRM, et elle a introduit en droit français la possibilité inédite d'interdire la publication du code source d'un logiciel indépendant interopérant avec une mesure technique<ref>Article L331-32 du code de la propriété intellectuelle.</ref>. Une première décision relative au contournement des DRM<ref>CA Paris Pole 5, chambre 12, 26 septembre 2011 http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3238.</ref>, par les confusions qu'elle opère, démontre l'inadéquation du corpus protecteur des DRM aux exigences d'interopérabilité.


Les dispositions issues de la loi DADVSI<ref>art. L331-5 et suivants CPI http://www.legifrance.gouv./affichCode.do;jsessionid=B411E9E8D4FF4B39897076FE6F7C7C96.tpdjo14v_2?idSectionTA=LEGISCTA000006179045&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111026</ref> et de son décret d'application<ref>Décret 2006-1763 du 23 décembre 2006, relatif à la répression pénale de certaines atteintes portées au droit d'auteur et aux droits voisins http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000817096&fastPos=1&fastReqId=1940515751&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte</ref> interdisent cependant le contournement des mesures techniques de protection. Le contournement des DRM est ainsi un délit punissable d'une amende de quatrième classe pouvant aller jusqu'à 750 €. La création, la distribution, ou l'incitation à l'usage d'un outil manifestement destiné au contournement des mesures de contrôle d'usage font encourir une peine  d'un maximum de 6 mois d'emprisonnement et 30 000€ d'amende.
==Informatique déloyale==
''L'informatique déloyale (''Treacherous Computing'') consiste à verrouiller les possibilités d'usage d'un ordinateur directement par le matériel. Elle empêche l'utilisateur de contrôler son propre ordinateur. Sous couvert de lutte contre la contrefaçon et de sécurité informatique, ces compagnies, par le biais de l'informatique dite « de confiance », s'assurent le contrôle du marché par une sélection des objets utilisables sur leur système. Ils peuvent également surveiller les utilisateurs, par un suivi de leurs pratiques et un régime d'enregistrement préalable, par exemple<ref>Trusted Computing le film http://www.april.org/fr/trusted-computing-le-film.</ref>. ''


Pourtant, le législateur, au moment de la transposition de la directive de 2001, avait souhaité que les actes de contournement des DRM accomplis aux fins d'interopérabilité soient exonérés de responsabilité pénale, ce que le Conseil constitutionnel<ref> Conseil constitutionnel, 27 juillet 2006, décision 2006-540 DC loi relative au droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information (DADVSI) http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2006/2006-540-dc/decision-n-2006-540-dc-du-27-juillet-2006.1011.html</ref> a refusé pour violation du principe de légalité des délits et des peines en raison de l'absence de définition précise de la notion d''' " interopérabilité "''.  
L'informatique dite « de confiance » permet de bloquer le fonctionnement des programmes qui ne sont pas autorisés par le fabricant de l'ordinateur sous prétexte de sécurité informatique et de la lutte contre les virus. L'informatique de confiance est vendue par ses promoteurs comme un moyen de sécurisation, par le contrôle à chaque démarrage de l'ensemble des processus et/ou matériels présents et la neutralisation de ce qui n'est pas considéré comme étant « de confiance ». Cela entraîne la suppression de la liberté des utilisateurs par les fabricants qui peuvent ainsi poser toutes les restrictions qu'ils souhaitent, incluant par exemple l'interdiction d’utiliser des logiciels libres au profit des seuls logiciels choisis par eux.  


En interdisant le contournement des DRM, le législateur a menacé d'une part la mise en œuvre de l'interopérabilité et d'autre part l'exception de décompilation et la sécurité juridique des auteurs et utilisateurs de logiciels libres.
Les députés, en 2006, ont adopté un amendement « SGDN »<ref> Art. 15 Loi n° 2006-961 du 1 août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information ( DADVSI ) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000266350&fastPos=1&fastReqId=2016417894&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte.</ref> à la loi DADVSI imposant aux distributeurs de ''« mesures techniques permettant le contrôle à distance direct ou indirect d’une ou plusieurs fonctionnalités, ou l’accès à des données personnelles »'' de fournir au Secrétariat général de la défense nationale les éléments permettant de s'assurer ''« que la gestion de droits d’auteur ne compromette ''de facto'' la sécurité des utilisateurs individuels, des entreprises, des administrations »'' (amendement 273). Cette disposition menace les libertés individuelles par la reconnaissance de la validité des DRM après une simple déclaration, malgré une dangerosité avérée et dénoncée.  


Face à cette menace, l'April a déposé une requête en annulation<ref>http://www.april.org/fr/articles/communiques/pr-20070221.html</ref> devant le Conseil d'État du décret du 23 novembre 2006, qui précisait les mesures applicables au contournement de DRM protégés par la loi, et menaçait donc d'interdire l'utilisation d'un Logiciel Libre pour lire des contenus sous DRM.  Le Conseil d'État n'a pas annulé le décret en question, il en a précisé le sens, en affirmant qu'un Logiciel Libre peut lire un contenu sous DRM sans être considéré comme un moyen « spécialement conçu ou adapté pour contourner une mesure technique »,<ref>Pour plus d'informations, voir l'analyse de l'arrêt du Conseil d'État par l'April : http://www.april.org/fr/groupes/dadvsi/analyse-arret-conseil-etat-decret-dadvsi.html%20.</ref> ce qui a permis de sécuriser juridiquement les auteurs et utilisateurs de logiciels libres sur ce point précis<ref>Sur ce point, on peut citer l'exemple de VideoLan, qui a lancé récemment un projet pour comprendre le fonctionnement de l'AACS (disponible sur http://www.videolan.org/developers/libaacs.html%20). Un tel projet s'inscrit pleinement dans les exceptions de recherche et dans le droit à l'interopérabilité</ref>.
===Références===


Cette sécurisation juridique partielle ne rend pas pour autant la loi DADVSI plus acceptable : elle instaure un régime d'exception inapproprié pour les dispositifs logiciels que sont les DRM, et elle a introduit en droit français la possibilité inédite d'interdire la publication du code source d'un logiciel indépendant interopérant avec une mesure technique<ref>Article L331-32 du code de la propriété intellectuelle</ref>. Une première décision relative au contournement des DRM<ref>CA Paris Pole 5, chambre 12, 26 septembre 2011 http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3238</ref>, par les confusions qu'elle opère, démontre l'inadéquation du corpus protecteur des DRM aux exigences d'interopérabilité.
Richard Stallman, fondateur de la Free Software Fondation:  


===Un corpus juridique contraire aux droits et libertés des individus===
''« Naturellement, Hollywood et l'industrie du disque se proposent d'employer l'informatique déloyale dans le "DRM" (''Digital Restrictions Management'' – gestion de restrictions numériques), de sorte que les vidéos ou la musique téléchargées ne puissent être lues que sur un ordinateur déterminé. Vous ne pourrez absolument pas les partager, du moins si vous utilisez les fichiers à droit de lecture nominatif obtenus auprès de ces sociétés. Vous, le public, devriez avoir la liberté et la possibilité de partager ces contenus. Je suis sûr que quelqu'un trouvera moyen d'en produire des versions non chiffrées, de les mettre en ligne et de les partager, de sorte que le DRM n'atteigne pas complètement son but, mais cela ne justifie pas ce système. C'est déjà mal de rendre le partage impossible, mais la situation est en train d'empirer. Il est question de généraliser le DRM aux messages électroniques et aux documents – avec pour résultat de faire disparaître un courriel au bout de deux semaines, ou de ne pouvoir lire certains documents que sur les ordinateurs d'une société déterminée. »''<ref>http://www.gnu.org/philosophy/can-you-trust.fr.html.</ref>


===Le spectre de l'informatique dite « de confiance »===


L'informatique dite «de confiance», aussi appelée Informatique déloyale, permet de bloquer le fonctionnement des programmes qui ne sont pas autorisés par le fabricant de l'ordinateur sous prétexte de sécurité informatique et de la lutte contre les virus. Par l'usage des DRM, est alors établi un contrôle à distance de l'usage de chaque ordinateur, par exemple pour taxer la simple écoute d'une chanson, ou même la lecture d'un texte. Cependant, ces technologies peuvent aussi être conçues pour supprimer la liberté de chacun de choisir ses logiciels, et donc en particulier interdire d'adopter des logiciels libres. Des conséquences bien plus sombres sont malheureusement aussi possibles comme la censure politique et des menaces sur les libertés individuelles.
Extrait du rapport du député Pierre Lasbordes (UMP) sur la sécurité des systèmes d'information : <ref>http://www.lasbordes.fr/IMG/pdf/26_novembre_doc_definitif.pdf.</ref>


===La menace Acta===
''« Pour certains, ces limitations d'usage sont justifiées par le développement du commerce électronique et la gestion sûre des droits de propriété intellectuelle. Mais en restreignant les droits des utilisateurs, NGSCB [''Next Generation Secure Computing Base''], donne un droit de regard aux constructeurs de matériels et de logiciels, de l'usage fait des ordinateurs personnels. Cette émergence d'une informatique de confiance conduirait un nombre très limité de sociétés à imposer leur modèle de sécurité à la planète, en autorisant ou non, par la délivrance de certificats numériques, des applications à s’exécuter sur des PC donnés. Il en résulterait une mise en cause de l'autonomie des individus et des organisations (restriction des droits de l'utilisateur sur sa propre machine). Cela constitue une menace évidente à la souveraineté des États. »''


=Références=
=Références=
<references/>
<references/>

Dernière version du 24 février 2012 à 10:05

Questionnaire candidats.fr Cahier n°4 : MTP/DRM


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/!\ Travail en cours /!\

Cette page présente un texte de synthèse en cours de réalisation.

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En bref...[modifier]

Définition[modifier]

Les DRM « Digital Rights Management », également appelés MTP « Mesures techniques de protection », sont des dispositifs qui ont pour but de contrôler l'accès aux œuvres numériques et l'usage qui en est fait, notamment en limitant la copie. Dispositifs de contrôle d'usage, les DRM sont en d'autres termes des « menottes numériques » qui enferment les utilisateurs. Face à leur inévitable inefficacité, une législation a été élaborée pour interdire toute tentative de contournement des DRM.

Le régime juridique des DRM[modifier]

Le 3 août 2006, la loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) était promulguée[1]. Elle transpose en droit français la directive 2001/29CE[2] (dite EUCD pour European Union Copyright Directive), qui va plus loin que les obligations prévues dans les traités de l'OMPI sur le droit d'auteur (WCT en anglais, pour WIPO Copyright Treaty) et sur les droits des producteurs (World Intellectual Property Organization Performances and Phonograms Treaty, Traité de l'organisation mondiale du commerce sur les spectacles et les phonogrammes) rédigés en 1996. L'ensemble de ces textes s'inscrit dans une démarche plus large de restriction des libertés numériques et de sacralisation des DRM, sous prétexte de lutte contre la contrefaçon, et au détriment des droits du public et des auteurs.

Analyse critique des DRM[modifier]

La mise en place de DRM a pour prétexte la préservation des droits sur l’œuvre. Or, des études démontrent que les DRM découragent avant tout les usages légaux, en raison des contraintes pesant sur l'utilisateur[3][4]. L'actualité relative aux effets pervers des mesures techniques et du régime juridique associé est très riche, et largement relayée dans les médias. Nous invitons le lecteur à taper, par exemple, « DRM problème » dans un moteur de recherche pour s'en convaincre. La loi ne crée pas les conditions de mise en œuvre des principes qu'elle pose. Le nombre d'exceptions au contournement est trop restreint. La sécurité de développement du logiciel libre n'est pas garantie.

Informatique déloyale[modifier]

L'informatique déloyale (Treacherous Computing) consiste à verrouiller les possibilités d'usage d'un ordinateur directement par le matériel. Elle empêche l'utilisateur de contrôler son propre ordinateur. Sous couvert de lutte contre la contrefaçon et de sécurité informatique, ces compagnies, par le biais de l'informatique dite « de confiance », s'assurent le contrôle du marché par une sélection des objets utilisables sur leur système. Ils peuvent également surveiller les utilisateurs, par un suivi de leurs pratiques et un régime d'enregistrement préalable par exemple[5].

Questions[modifier]

Principe des DRM[modifier]

Question 4.a : Depuis 1995, la Commission européenne encourage l'utilisation des DRM comme facteur de développement d'une économie de la culture à l'ère du numérique. Pensez-vous que cette stratégie soit pertinente ?

Question 4.b : En signant les traités WCT et WPPT en 1996, l'Europe a fait le choix d'un régime juridique encadrant le contournement des DRM. Pensez-vous que ce choix était judicieux ?

Régime juridique des DRM[modifier]

Question 4.c : Partagez-vous le constat que la directive 2001/29CE pose plus de problèmes qu'elle n'en résout ? Si oui, quelle solution proposer à nos partenaires pour sortir de l'ornière ?

Question 4.d : Pensez-vous que, quoi qu'il en soit, il faut abroger rapidement le titre premier de la loi DADVSI ? Si oui, au regard des termes actuels du débat, quels seraient, selon vous, les axes majeurs qui devraient guider une nouvelle transposition ? Partagez-vous notamment l'idée que les dispositions existantes en droit français avant la loi DADVSI, telles que celles relatives à la contrefaçon, à la fraude informatique, à la concurrence déloyale et au parasitisme, offraient déjà un arsenal répressif suffisant et conforme aux obligations fixées par la directive[6] ?

Question 4.e : Pensez-vous qu'il faille abroger les articles issus des amendements dits Vivendi qui n'étaient pas requis par la directive et ne plus y revenir ?

Question 4.f : Quelle position comptez-vous adopter sur la réforme des directives IPRED au niveau européen ?

Analyse critique des DRM[modifier]

Question 4.f : Pensez- vous que la mention d'une condition de licéité de la source de la copie effectuée à titre privé doit être supprimée ?

Question 4.g : Envisagez-vous des solutions alternatives sur la question de l'accès aux œuvres et à leur financement ? Si oui, lesquelles ?

Informatique déloyale[modifier]

Question 4.h : De plus en plus, l'abandon du contrôle de son ordinateur personnel, et notamment de son droit au contrôle de l'accès à ses données personnelles, devient un pré-requis pour pouvoir accéder à des données numériques protégées par le droit d'auteur. Un tel principe est-il selon vous acceptable et quelle doit être la réponse du législateur face à cette "tendance du marché" ?

Développements[modifier]

« Le livre, comme livre, appartient à l'auteur, mais comme pensée, il appartient – le mot n'est pas trop vaste – au genre humain. Toutes les intelligences y ont droit. Si l'un des deux droits, le droit de l'écrivain et le droit de l'esprit humain, devait être sacrifié, ce serait, certes, le droit de l'écrivain, car l'intérêt public est notre préoccupation unique, et tous, je le déclare, doivent passer avant nous. » Victor Hugo, 1878 – Discours d'ouverture du congrès littéraire international.

Définition[modifier]

Les DRM « Digital Rights Management », également appelés MTP « Mesures techniques de protection », sont des dispositifs qui ont pour but de contrôler l'accès aux œuvres numériques et l'usage qui en est fait, notamment en limitant la copie. Dispositifs de contrôle d'usage, les DRM sont, en d'autres termes, des « menottes numériques » qui enferment les utilisateurs. Face à leur inévitable inefficacité, une législation a été élaborée pour interdire toute tentative de contournement des DRM.

Sur les supports traditionnels des œuvres de l'esprit — un livre par exemple — il n'y a pas de restriction d'usage : je peux lire mon livre n'importe où, ne lire que certains passages, le relire autant de fois que je veux, faire des annotations dans la marge, le prêter à qui je veux et autant de fois que je le veux et le revendre[7] ; je suis donc libre de l'usage de mon livre. Pour une œuvre DRMisée en revanche, bien souvent je ne peux faire aucune de ces actions : les outils de lecture me sont imposés (lecteur, voire matériel particulier), je ne peux pas le prêter, je peux me voir retirer mon droit de lecture à n'importe quel moment[8] et je ne peux pas le revendre. On peut même exiger que j'utilise des outils particuliers pour pouvoir lire l'œuvre que j'ai pourtant achetée : par exemple, on pourrait exiger que j'achète une certaine marque de lunettes de déchiffrement pour lire mon livre, et tant pis pour moi si je ne peux pas les porter en même temps que mes lunettes de vue ! Et si ces lunettes de déchiffrement ne sont plus produites, je n'ai plus qu'à jeter tous mes livres et abandonner toutes les annotations que j'y ai faites, et à racheter les mêmes œuvres – en espérant qu'elles existent dans le nouveau format[9]...

Menottes numériques[modifier]

Selon le code de la propriété intellectuelle, un DRM ou MTP est une technologie, un dispositif ou un composant « qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, accomplit la fonction » d'interdiction ou de limitation des « utilisations non autorisées par les titulaires d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin du droit d'auteur d'une œuvre, autre qu'un logiciel, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme »[10].

Par exemple, les DRM peuvent imposer :

- des restrictions de la lecture du support à une zone géographique ;

- des restrictions ou l'interdiction de la copie privée ;

- des restrictions ou le verrouillage de certaines fonctions de lecture du support ;

- l'identification ou le tatouage numérique des œuvres, équipements de lecture ou d'enregistrement ;

- des limitations d'impression du document, de citation/copier-coller, d'annotation, de synthèse vocale pour les malvoyants, etc.

Les DRM peuvent concerner tout type d'œuvre numérique (musique, vidéo/film, livre, jeu vidéo, logiciel en général, etc.) sur tout type d'équipement (ordinateur, téléphone mobile, baladeur numérique, station multimédia, etc.).

Les DRM sont présentés comme des mesures visant à empêcher que des copies soient échangées, par exemple sur Internet, et à « sécuriser » les modes de diffusion des œuvres numériques (achat de contenus en ligne, location, etc.). Cette limitation de la diffusion est en réalité faible et repose sur le secret ; elle peut donc être facilement contournée. C'est pourquoi les promoteurs des mesures de contrôle d'usage se sont assurés de l'interdiction par la loi de tout contournement en leur appliquant des sanctions pénales.

Les DRM imposent à l'utilisateur un contrôle contraire à la philosophie du Logiciel Libre : l'idée même de l'existence d'un « DRM libre » est une impasse. En particulier, le régime juridique des DRM a précisément été mis en place pour interdire la publication du code source, publication qui est une des caractéristiques essentielles du Logiciel Libre.

Dangers[modifier]

Il y a donc une différence importante entre l'objectif affiché — le contrôle des copies — et les conséquences des moyens utilisés — un contrôle de plus en plus fin et complet des usages. Ces contrôles présentent donc de multiples dangers :

- un danger technique, car les DRM sont intrusifs. Leur fonctionnement, lié à un format fermé et propriétaire, menace la pérennité des œuvres numériques. Leur opacité conduit également à affaiblir le niveau de sécurité des systèmes ;

- un danger économique, car ils favorisent la constitution de monopoles dans le cadre desquels on constate des abus de position dominante et le développement de la vente liée. Ils perturbent également le marché de l'occasion et sont particulièrement coûteux ;

- un danger sociétal, car ils induisent la perte de contrôle par l'utilisateur de son propre équipement et de ses données personnelles, menacent le domaine public, interdisent des usages légitimes et légaux ;

- un danger culturel, car ils déséquilibrent le droit d'auteur, dépossédant les auteurs de leurs droits sur leurs œuvres au profit des éditeurs de DRM, empêchant ou limitant divers actes créatifs (citation, remix, etc.) et opposant le public aux œuvres et donc aux auteurs via une expérience utilisateur désastreuse ;

- un danger patrimonial, car les DRM font courir des risques à la conservation des œuvres numériques pour les générations futures.

Le régime juridique des DRM[modifier]

Le 3 août 2006, la loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information) était promulguée[11]. Elle transpose en droit français la directive 2001/29CE[12] (dite EUCD pour European Union Copyright Directive), qui va plus loin que les obligations prévues dans les traités de l'OMPI sur le droit d'auteur (WCT en anglais, pour WIPO Copyright Treaty) et sur les droits des producteurs (World Intellectual Property Organization Performances and Phonograms Treaty, Traité de l'organisation mondiale du commerce sur les spectacles et les phonogrammes) rédigés en 1996. L'ensemble de ces textes s'inscrit dans une démarche plus large de restriction des libertés numériques et de sacralisation des DRM, sous prétexte de lutte contre la contrefaçon, et au détriment des droits du public et des auteurs.

Historique de l'instauration d'un régime juridique des DRM[modifier]

L'évolution récente du régime juridique des DRM témoigne d'une démarche d'ensemble sur la restriction des libertés numériques et la sacralisation des DRM, sous prétexte de lutte contre la contrefaçon, en réalité une attaque au service des puissants et au détriment du public et des auteurs. Des traités de l'OMPI à la directive EUCD, mais aussi aux directives IPRED, les droits des éditeurs, auteurs, utilisateurs de logiciels libres sont constamment menacés.

Des traités de l'OMPI à la directive EUCD[modifier]

Au milieu des années 90, le gouvernement américain a proposé d'intégrer un régime juridique d'encadrement des contournements des DRM aux projets de traités WCT (traité sur le droit d'auteur)[13] et WPPT (traité sur les droits des producteurs)[14], alors en cours de rédaction à l'OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle). L'idée, fondée sur la pratique, était qu'aucun DRM ne résiste au génie humain, et que tous seront donc contournés. Par conséquent, pour le gouvernement américain, les actes de contournement devaient être interdits juridiquement, ainsi que les outils conçus ou spécialement adaptés pour réaliser de tels actes. Cette proposition fut retenue et intégrée en 1996 aux traités, malgré les réserves exprimées par de nombreux États. Aux États- Unis, le traité OMPI sur le droit d'auteur a conduit au DMCA (Digital Millenium Copyright Act, loi sur le droit d'auteur au millénaire numérique)[15].

Les États membres de l'Union européenne se sont engagés à sanctionner le contournement des mesures techniques et les activités préparatoires qui y sont associées comme le développement d'un logiciel de contournement. Allant plus loin encore dans les restrictions de liberté, la directive 2001/29CE, dite directive EUCD (European Union Copyright Directive)[16] est adoptée en 2001[17]. Le 14 décembre 2009, l'Union européenne a ratifié les deux traités de l'OMPI[18].

Cette directive, dénoncée par l'initiative EUCD.info[19] notamment, est obsolète car elle se base sur des traités rédigés en 1996, à une époque où l'Internet grand public n'en était encore qu'à ses balbutiements. Il est indispensable de remettre en question la pertinence de dispositions législatives dont les fondements sont d'une autre époque.

Loi DADVSI[modifier]

En 2006, la loi de transposition, dite loi DADVSI (Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information)[20], est promulguée.

Le projet de loi a été examiné dans le cadre d'une procédure d'urgence fin 2005, sans travail de concertation préalable par le ministère de la Culture ou par le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA). Les dysfonctionnements du CSPLA – tenu par une poignée de représentants d'industriels et d'ayants droit ne s'intéressant qu'à leurs seuls intérêts – et leur pouvoir d'orientation de la politique gouvernementale, sont d'ailleurs apparus au grand jour à l'occasion de ce débat.

Tout comme le gouvernement et l'opinion publique, des députés ont découvert les effets du texte pour les citoyens et certains acteurs – notamment pour les acteurs du logiciel libre, les personnes handicapées et les bibliothécaires – le jour de l'ouverture des débats, dans la presse ou quand certains de leurs collègues, sensibilisés, sont montés à la tribune (et ce alors même que des associations alertaient le ministère de la Culture et le CSPLA depuis plus de trois ans). Résultat : le texte initial de transposition, rédigé par le CSPLA et proposé par le gouvernement, a été rejeté par une coalition de députés de tous bords qui l'ont jugé trop répressif et contraire à l’intérêt général. Le gouvernement et les parlementaires ont alors exploré différentes voies, pour tenter de limiter les effets indésirables connus des mesures techniques et du régime juridique associé, tout en se conformant aux obligations communautaires et internationales de la France. Cependant, l'absence de navette parlementaire, d'étude d'impact et de concertation, n'ont pas permis d'aboutir à un texte équilibré. Bien au contraire. La décision du Conseil constitutionnel a encore aggravé la situation en supprimant des exceptions[21].

Un régime empêchant tout contournement d'une mesure technique « efficace »[modifier]

L'article 6 de la directive EUCD[22] dispose que : « les États membres prévoient une protection juridique appropriée contre le contournement de toute mesure technique efficace, que la personne effectue en sachant, ou en ayant des raisons valables de penser, qu'elle poursuit cet objectif ». Cette disposition est source d'insécurité juridique car les termes « mesure technique », « efficace » ou« contournement », ne sont pas définis. De ce fait, l'objectif de la directive EUCD, l'harmonisation des législations des États membres, ne peut être pleinement atteint[23].

En application de l’article L331-5 al 1 CPI, transposant l'article 6 de la directive EUCD, sont donc éligibles au régime juridique spécifique les seules« mesures techniques efficaces ». Par une application littérale de la notion d’efficacité, ne seraient donc pas protégées les DRM qui peuvent être contournées, ce qui est le cas de la plupart des DRM. Dès lors, les titulaires de droits sur les DRM ne pourraient pas se prévaloir d’une quelconque protection. Cette interprétation neutralisant le régime juridique des DRM a été écartée par une présomption d'efficacité des mesures techniques[24][25].

Cette notion d'efficacité de la mesure est inutile car tous les DRM sont réputés efficaces et que cette notion ne permet pas d'opérer des distinctions entre les différents niveaux de protection mis en place. Pire encore, elle est source d'insécurité juridique car le peu de jurisprudence[26] sur ce sujet en Europe n'a pas abouti à une définition constante et unanime du terme « efficace ».

Nouvelles remises en cause des droits : IPRED 1 et 2[modifier]

La première directive IPRED (Intellectual Property Rights Enforcement Directive, Directive sur l'application des droits de propriété intellectuelle) a été adoptée en 2004, et la version 2 en 2007. Cette « super EUCD » participe à la remise en cause des droits du public, en mettant en place de nouvelles mesures répressives, notamment en posant le principe de l'ingérence des ayants droit dans les enquêtes pour contrefaçon, ainsi que la responsabilité civile des intermédiaires techniques.

La directive IPRED doit de nouveau être révisée en 2012, suite à la consultation publique de 2011 de la Commission européenne[27]. Une fois de plus, les modifications suggérées serviraient les puissants au détriment du grand public et des auteurs[28]. Il est nécessaire dès maintenant d'enrayer cette logique, qui passe également par des textes internationaux comme l'accord commercial anti-contrefaçon (ACTA)[29] afin de ne pas affecter les générations futures.

Analyse critique des DRM[modifier]

La mise en place de DRM a pour prétexte la préservation des droits sur l’œuvre. Or, des études démontrent que les DRM découragent avant tout les usages légaux, en raison des contraintes pesant sur l'utilisateur[30][31]. L'actualité relative aux effets pervers des mesures techniques et du régime juridique associé est très riche, et largement relayée dans les médias. Nous invitons le lecteur à taper, par exemple, « DRM problème » dans un moteur de recherche pour s'en convaincre. La loi ne crée pas les conditions de mise en œuvre des principes qu'elle pose. Le nombre d'exceptions au contournement est trop restreint. La sécurité de développement du logiciel libre n'est pas garantie.

Les DRM portent atteinte aux droits et libertés des individus[modifier]

Atteinte au droit au respect de la vie privée[modifier]

Le Groupe de travail Article 29, qui regroupe les représentants des autorités nationales chargées de la protection des données (dont la CNIL – Commission nationale informatique et libertés – en France) s'est dit « préoccupé par le fait que l’utilisation légitime de technologies en vue de protéger les œuvres pourrait se faire au détriment de la protection des données à caractère personnel des individus » et a constaté « un écart croissant entre la protection des personnes dans les mondes hors ligne et en ligne »[32][33], inquiétude d'ailleurs partagée par de nombreuses associations représentant la société civile[34].

En effet, certains DRM exigent que le logiciel demande la permission à un serveur distant pour lire les fichiers protégés. Cela se traduit par l'envoi, sans aucun contrôle possible, par un logiciel propriétaire — c'est-à-dire une boite noire — de données de l'équipement de l'utilisateur vers les serveurs du gestionnaire de DRM. Au mépris du respect de la vie privée des utilisateurs, certains DRM font donc courir le risque d'un contrôle à distance des équipements par un soi-disant « tiers de confiance », une société privée qui n'a à cœur que ses propres intérêts.

La loi ne peut que renforcer ces inquiétudes : à cause des sanctions infligées en cas de contournement des DRM, il est impossible de contrôle leur impact sur le respect de la vie privée. Des affaires comme celles du root-kit Sony[35] ont mis en évidence le fait que la frontière entre mesures techniques et logiciels espions est poreuse, et que leur déploiement sur des marchés grand public met en danger la souveraineté de l'État et la vie privée des utilisateurs.

Atteintes au niveau culturel[modifier]

Atteinte au droit de lire et au droit d'usage[modifier]

Si l'utilisateur ne dispose pas des logiciels autorisés à lire les DRM, il lui est de fait interdit de lire l’œuvre pour laquelle il s'est déjà acquitté des droits. Il ne pourra utiliser un autre logiciel pour exercer son droit de lire l’œuvre. Ainsi, si une personne télécharge légalement un film mais qu'elle n'a pas sur son ordinateur le logiciel lui permettant de le lire, la loi lui interdit d'utiliser un logiciel permettant le contournement des mesures techniques. Une personne peut aussi télécharger légalement de la musique protégée par des DRM ne permettant la lecture que sur le matériel ayant servi au téléchargement. Dans ce cas, la personne sera dans l'impossibilité de transférer les morceaux sur son lecteur de musique, sauf à contourner les DRM. De même, si une personne achète un Blu-Ray mais qu'elle ne dispose pas du lecteur Blu-Ray approprié, sa seule alternative légale est le rachat d'un matériel adapté et souvent onéreux.

Restriction de l'accès à la culture et atteinte à la pérennité de l’œuvre[modifier]

Alors que la diffusion et l'épanouissement de la culture numérique reposent sur la liberté des usages, les menottes numériques la réduisent à néant en la transformant en un simple droit d'utilisation limité, révocable, sous conditions financières dans un contexte déterminé et soumis aux aléas que pourrait rencontrer l'éditeur et à ses décisions. En conséquence, l'avenir des contenus est soumis au bon vouloir et à la bonne santé d'une société privée. Il dépend également de ses capacités techniques de préservation et de conversion de l'œuvre vers les nouveaux supports matériels[36]. Ainsi, rien ne garantit que les fichiers disponibles sur la boutique en ligne iTunes et protégés par des DRM Apple soient encore accessibles si l'entreprise Apple venait à disparaître.

Dans le cas d’œuvres tombées dans le domaine public et archivées, il est fait interdiction aux bibliothèques et archives de contourner les mesures techniques qui les protègent, alors même qu'elles y sont autorisées en théorie. De plus, si le logiciel permettant d'accéder à l’œuvre n'existe plus ou que l'éditeur a disparu, il est impossible de copier le livre sous une forme non protégée par la mesure technique afin de le mettre à disposition du public. Au mieux, il faudra procéder à l'acquisition d'un autre exemplaire, non protégé par une mesure technique. Au pire, la possibilité d'accéder à ce livre est perdue. Par ailleurs, alors que le droit d'auteur est limité dans le temps, les mesures techniques n'ont pas, d'après la directive EUCD, obligation de se déverrouiller dans le même délai.

Pour reprendre les termes d'A. Jacquesson, ancien directeur de la bibliothèque de Genève et spécialiste des bibliothèques numériques, « aucune pérennité n’est assurée quant à la validité à long terme des différents DRM. Que le vendeur change de technologie ou d’orientation commerciale, voire fasse faillite ou soit racheté, rien n’assure le consommateur que les documents acquis contre rémunération pourront encore être lus. Les DRM ne permettent qu’une consultation à très court terme, quelques années au mieux. Il est illusoire de bâtir une bibliothèque numérique pérenne, qu’elle soit personnelle ou publique, sur un si court terme. »[37]

Pour assurer l'ensemble de ces usages légitimes et essentiels, seul l'usage d'un standard ouvert[38] peut permettre de garantir la pérennité d'une œuvre et son libre accès.

Les DRM sont un non-sens économique[modifier]

Inefficacité dans la lutte contre la contrefaçon[modifier]

Les majors de l'industrie de la musique et de l'image disent que leurs difficultés économiques sont dues aux téléchargements (via le peer to peer notamment) et ont fortement influencé la rédaction du traité OMPI et de l'EUCD. S'il est exact de dire que les ventes des œuvres sur support physique sont en baisse, il est en revanche erroné d'affirmer que les revenus des majors sont en chute libre, les reversements des droits étant en hausse, comme l'a d'ailleurs souligné un article paru en 2011 dans La Tribune[39] :

« Mais non, tous les autres clignotants ne sont pas dans le rouge, et sont – étrangement – moins mis en avant. Car le marché de la musique ne comprend pas que la vente de disques, qui est désormais passée derrière le spectacle vivant qui, lui, progresse régulièrement [...]. Les droits reversés aux auteurs-compositeurs (Sacem), aux artistes interprètes (Adami et Spedidam) et aux producteurs (SCPP et SPPF) ont tous largement augmenté depuis 2000. Certes, tous ont été impactés par l'effondrement des ventes de disques, lesquelles sont, par exemple, passées de 21 % à 12 % des recettes de la Sacem depuis 2003. Si le total des droits engrangés a continué à augmenter, c'est que l'essentiel vient d'ailleurs : des concerts, de la diffusion de musique (radio, télévision, lieux publics...), et aussi de la taxe pour la copie privée (prélevée sur les ventes de supports vierges comme les DVD, clés USB, cartes mémoires, etc). »

Les DRM ont un impact négatif sur les utilisateurs ayant légalement accès à une œuvre car ils sont les seuls à souffrir des restrictions imposées par ces DRM[40]. Afin de simplifier la gestion de leurs musiques ou films (transferts, sauvegardes...), les utilisateurs se tournent donc vers des œuvres non verrouillées par des DRM. Ainsi, en 2010, certains utilisateurs n'ont pu lire le Blu-Ray d'Avatar en raison de la surcouche de DRM bloquant certains lecteurs[41] poussant au téléchargement illégal du film. Une étude de deux universités américaines, Rice et Duke[42][43] souligne ainsi que « en fait, supprimer les DRM peut être plus efficace pour diminuer le piratage que mettre en place des DRM plus sévères. »

Menace sur la copie privée[modifier]

Les menottes numériques rendent enfin pratiquement impossible le droit à la copie privée[44]. Plus précisément, si des DRM empêchent la copie privée, l'utilisateur n'a pas le droit de les contourner pour effectuer sa copie[45].

La copie privée étant de facto interdite par l'interdiction de contournement des mesures techniques, la rémunération pour copie privée, lorsqu'elle existe en droit national, n'a plus lieu d'être. Pourtant, Le gouvernement français n'y a pas renoncé, malgré des arrêts récents de la Cour de justice européenne qui l'ont conduit à réviser le cadre juridique de la copie privée[46][47] en raison de son incompatibilité avec les DRM. La loi du 20 décembre 2011 relative à la rémunération pour copie privée[48] exige du consommateur qu'il s'assure de la licéité de la source qu'il copie, ce qui est en pratique souvent impossible[49]. Ce sont donc de nombreux obstacles à la copie privée.

Des acteurs économiques qui refusent d'évoluer[modifier]

Les distributeurs de contenus culturels, comme par exemple EMI[50], ont reconnu que les DRM étaient un non-sens économique car « les DRM ont notamment le défaut de bloquer l'interopérabilité entre différents appareils. Certains CD équipés de verrous anticopies ne peuvent pas, par exemple, être lus sur ordinateur ou dans certains autoradios. »[51]

Malgré des effets d'annonce sur la suppression des DRM lors des Accords de l'Elysée en 2007[52], l'exact inverse s'est produit avec un recours aux DRM toujours plus important et dans des domaines de plus en plus variés : jeux vidéos[53], films, ou encore livres numériques[54]. De nouveaux systèmes de gestion des droits numériques comme Ultraviolet[55], sous prétexte de permettre la lecture sur différents supports, sont encore plus attentatoires à la liberté des utilisateurs qui sont alors contraints de s'enregistrer en ligne pour pouvoir profiter de l’œuvre qu'ils ont acheté, les obligeant ainsi à voir leur activité enregistrée et à être connectés en permanence sur internet.

Le non-sens économique des DRM est portant reconnu depuis 2002 : la fin des DRM permettrait ainsi :

  • d’accroître la concurrence et de baisser les prix, ce qui encouragerait les usages légaux ;
  • une économie importante pour les distributeurs ne pouvant développer leur propre solution de marquage[56].

Le verrouillage des œuvres pèse sur la concurrence[modifier]

Encouragement des ententes illicites, des monopoles et des abus de position dominante[modifier]

Il peut y avoir entente illicite si les titulaires de droits et les auteurs de mesures techniques passent entre eux des accords aboutissant à une situation monopolistique. Un acteur indépendant qui voudrait s'affranchir de ces accords tout en continuant à utiliser la même mesure technique serait en situation de contrefaçon. De plus, l'ajout d'une mesure technique dans un logiciel étant suffisant pour obtenir un monopole de fait, la concurrence ne régule pas les prix en fonction de l'offre et de la demande. Le fournisseur du logiciel aura donc naturellement tendance à le proposer à un prix supérieur à sa valeur théorique en situation de concurrence.

L'ajout d'une mesure technique sur une œuvre est aussi utilisé pour empêcher l'apparition de concurrents. Un concurrent potentiel ne peut en effet distribuer ou concevoir un produit de substitution compatible car pour ce faire il doit nécessairement contourner la mesure technique. S'agissant des formats de fichier, il suffit à l'auteur d'un format de fichier d'inclure dans celui-ci une mesure technique pour détenir un monopole de fait sur l'exploitation de ce format.

Contrôle des industries de l'image et de la musique par les majors[modifier]

Les conséquences négatives du verrouillage des œuvres peuvent être fortes dans le cadre de certaines professions, au premier rang desquelles les industries de l'image et de la musique. Ainsi, le passage au film numérique dans les salles de cinéma s'accompagne de mesures inédites de contrôle et de verrouillage : les majors du secteur, sous prétexte d'interopérabilité, s'assurent d'un contrôle quasi absolu sur les œuvres. Ainsi, le Digital Cinema Initiative (Initiative pour le cinéma numérique, ou DCI)[57] qui regroupe les principales majors de l'industrie du cinéma américain[58] s'affiche en héraut de l'interopérabilité, mais intègre dans ses schémas explicatifs des dispositifs de contrôle d'usage.

Ces verrous permettent notamment de choisir les fenêtres de projection, d'imposer la projection de messages ou de publicités avant le film ou de limiter le nombre de projections. En d'autres termes, les majors peuvent décider de tout, et les salles de cinémas deviennent de simples lieux de projection dépersonnalisés et sans aucun contrôle de leur offre. À terme, c'est la fin d'une liberté de choix et de gestion qui est programmée, avec des DRM qui permettent de donner le contrôle à quelques grandes entreprises de la quasi-intégralité des œuvres diffusées. S'ajoutent une complexité du système ingérable pour les petites salles et un coût du matériel très important, ce qui ne permet qu'aux plus grosses structures de tirer leur épingle du jeu[59].

Les DRM empêchent l'interopérabilité[modifier]

Le leurre du DRM « interopérable »[modifier]

Les DRM sont gérés par un ensemble de logiciels souvent fournis par un seul et même éditeur, qui verrouille les contenus et propose son propre lecteur de fichiers numériques, souvent le seul capable de lire les fichiers comportant un DRM. Les clients sont donc fortement incités à utiliser le lecteur de l'éditeur au détriment de la concurrence, de leurs propres droits et de leur liberté de choix. Les DRM, en contrôlant l'accès à l’œuvre, créent donc souvent une incompatibilité des fichiers protégés avec certains systèmes, logiciels ou matériels. Ainsi, un fichier au format WMA, verrouillé par DRM, n'est pas lisible sur un lecteur audio Ipod d'Apple, par exemple. Inversement, un fichier AAC protégé par DRM Apple n'est pas lisible sur un lecteur étranger à la marque. Parler de « l’interopérabilité des mesures techniques » comme l'avait fait l'ARMT en 2008 (avant de devenir l'Hadopi)[60] n'a donc pas de sens, malgré les annonces faites à ce sujet.[61]

L'interopérabilité menacée[modifier]

Les dispositions issues de la loi DADVSI[62][63] interdisent le contournement ou la mise à disposition d'outils de contournement des mesures techniques de protection[64]. Pourtant, le législateur, au moment de la transposition de la directive de 2001, avait souhaité que les actes de contournement des DRM accomplis aux fins d'interopérabilité soient exonérés de responsabilité pénale, ce que le Conseil constitutionnel[65] a refusé en l'absence de définition précise de la notion d'« interopérabilité ». En interdisant le contournement des DRM, le législateur a menacé d'une part la mise en œuvre de l'interopérabilité, et d'autre part l'exception de décompilation et la sécurité juridique des auteurs et/ou utilisateurs de logiciels libres. Face à ces menaces, l'April a déposé une requête en annulation[66] devant le Conseil d'État du décret du 23 novembre 2006. Le Conseil d'État n'a pas annulé le décret en question, mais il en a précisé le sens, en affirmant qu'un Logiciel Libre peut lire un contenu sous DRM sans être considéré comme un moyen « spécialement conçu ou adapté pour contourner une mesure technique »,[67] ce qui a permis de sécuriser juridiquement les auteurs et utilisateurs de logiciels libres sur ce point[68].

Cette sécurisation juridique partielle ne rend pas pour autant la loi DADVSI plus acceptable : elle instaure un régime d'exception inapproprié pour les dispositifs logiciels que sont les DRM, et elle a introduit en droit français la possibilité inédite d'interdire la publication du code source d'un logiciel indépendant interopérant avec une mesure technique[69]. Une première décision relative au contournement des DRM[70], par les confusions qu'elle opère, démontre l'inadéquation du corpus protecteur des DRM aux exigences d'interopérabilité.

Informatique déloyale[modifier]

L'informatique déloyale (Treacherous Computing) consiste à verrouiller les possibilités d'usage d'un ordinateur directement par le matériel. Elle empêche l'utilisateur de contrôler son propre ordinateur. Sous couvert de lutte contre la contrefaçon et de sécurité informatique, ces compagnies, par le biais de l'informatique dite « de confiance », s'assurent le contrôle du marché par une sélection des objets utilisables sur leur système. Ils peuvent également surveiller les utilisateurs, par un suivi de leurs pratiques et un régime d'enregistrement préalable, par exemple[71].

L'informatique dite « de confiance » permet de bloquer le fonctionnement des programmes qui ne sont pas autorisés par le fabricant de l'ordinateur sous prétexte de sécurité informatique et de la lutte contre les virus. L'informatique de confiance est vendue par ses promoteurs comme un moyen de sécurisation, par le contrôle à chaque démarrage de l'ensemble des processus et/ou matériels présents et la neutralisation de ce qui n'est pas considéré comme étant « de confiance ». Cela entraîne la suppression de la liberté des utilisateurs par les fabricants qui peuvent ainsi poser toutes les restrictions qu'ils souhaitent, incluant par exemple l'interdiction d’utiliser des logiciels libres au profit des seuls logiciels choisis par eux.

Les députés, en 2006, ont adopté un amendement « SGDN »[72] à la loi DADVSI imposant aux distributeurs de « mesures techniques permettant le contrôle à distance direct ou indirect d’une ou plusieurs fonctionnalités, ou l’accès à des données personnelles » de fournir au Secrétariat général de la défense nationale les éléments permettant de s'assurer « que la gestion de droits d’auteur ne compromette de facto la sécurité des utilisateurs individuels, des entreprises, des administrations » (amendement 273). Cette disposition menace les libertés individuelles par la reconnaissance de la validité des DRM après une simple déclaration, malgré une dangerosité avérée et dénoncée.

Références[modifier]

Richard Stallman, fondateur de la Free Software Fondation:

« Naturellement, Hollywood et l'industrie du disque se proposent d'employer l'informatique déloyale dans le "DRM" (Digital Restrictions Management – gestion de restrictions numériques), de sorte que les vidéos ou la musique téléchargées ne puissent être lues que sur un ordinateur déterminé. Vous ne pourrez absolument pas les partager, du moins si vous utilisez les fichiers à droit de lecture nominatif obtenus auprès de ces sociétés. Vous, le public, devriez avoir la liberté et la possibilité de partager ces contenus. Je suis sûr que quelqu'un trouvera moyen d'en produire des versions non chiffrées, de les mettre en ligne et de les partager, de sorte que le DRM n'atteigne pas complètement son but, mais cela ne justifie pas ce système. C'est déjà mal de rendre le partage impossible, mais la situation est en train d'empirer. Il est question de généraliser le DRM aux messages électroniques et aux documents – avec pour résultat de faire disparaître un courriel au bout de deux semaines, ou de ne pouvoir lire certains documents que sur les ordinateurs d'une société déterminée. »[73]


Extrait du rapport du député Pierre Lasbordes (UMP) sur la sécurité des systèmes d'information : [74]

« Pour certains, ces limitations d'usage sont justifiées par le développement du commerce électronique et la gestion sûre des droits de propriété intellectuelle. Mais en restreignant les droits des utilisateurs, NGSCB [Next Generation Secure Computing Base], donne un droit de regard aux constructeurs de matériels et de logiciels, de l'usage fait des ordinateurs personnels. Cette émergence d'une informatique de confiance conduirait un nombre très limité de sociétés à imposer leur modèle de sécurité à la planète, en autorisant ou non, par la délivrance de certificats numériques, des applications à s’exécuter sur des PC donnés. Il en résulterait une mise en cause de l'autonomie des individus et des organisations (restriction des droits de l'utilisateur sur sa propre machine). Cela constitue une menace évidente à la souveraineté des États. »

Références[modifier]

  1. http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MCCX0300082L.
  2. http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.
  3. http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422.
  4. http://mktsci.journal.informs.org/search?fulltext=drm&submit=yes&x=21&y=10/.
  5. Trusted Computing le film http://www.april.org/fr/trusted-computing-le-film.
  6. http://eucd.info/documents/transposition-eucd-2003-06-20.pdf.
  7. À ce sujet, voir notamment Les droits imprescriptibles du lecteur de Daniel Pennac : http://fr.wikipedia.org/wiki/Comme_un_roman#Le_qu.27en-lira-t-on_.28ou_les_droits_imprescriptibles_du_lecteur.29.
  8. Le cas s'est déjà produit pour les livres électroniques, notamment avec le Kindle d'Amazon, exemple : http://www.numerama.com/magazine/13484-kindle-amazon-efface-a-distance-des-centaines-de-livres-achetes-legalement-maj.html.
  9. A titre d'illustration : http://bradcolbow.com/archive/view/the_brads_why_drm_doesnt_work/.
  10. Art. L331-5 CPI http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=3B6E7C0F8278B6D125C827B342B41966.tpdjo12v_1?idArticle=LEGIARTI000021212283&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111107.
  11. http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=MCCX0300082L.
  12. http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.
  13. http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/wct/trtdocs_wo033.html.
  14. http://www.wipo.int/treaties/fr/ip/wppt/trtdocs_wo034.html.
  15. http://fr.wikipedia.org/wiki/Digital_Millennium_Copyright_Act.
  16. http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.
  17. Pour une chronologie complète (jusqu'en juin 2005) avec références, lire « Petite histoire de la protection juridique des mesures techniques et des informations électroniques » http://eucd.info/documents/petite-histoire.pdf.
  18. http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/09/1916&type=HTML&aged=0&language=FR&guiLanguage=en.
  19. http://eucd.info/.
  20. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000266350.
  21. http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2006/2006540/2006540dc.htm.
  22. http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/data_protection/l26053_fr.htm.
  23. L'articulation des exceptions au droit d'auteur et des mesures techniques face à l'harmonisation (page 19 et 63) www.droit-ntic.com/pdf/dir_da.pdf.
  24. Art.L335-5 al.2 CPI : « Ces mesures techniques sont réputées efficaces lorsqu'une utilisation visée au même alinéa est contrôlée par les titulaires de droits grâce à l'application d'un code d'accès, d'un procédé de protection tel que le cryptage, le brouillage ou toute autre transformation de l'objet de la protection ou d'un mécanisme de contrôle de la copie qui atteint cet objectif de protection. ».
  25. L'Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT) a considéré que doit être qualifiée d'efficace « toute mesure technique de protection qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, c’est-à-dire hors de tout usage détourné ou manœuvre visant à en neutraliser l’action, restreint l’accomplissement d’actes non autorisés par les ayants droit »ARMT- rapport annuel 2008 p. 27 http://www.numerama.com/magazine/11577-l-armt-constate-son-inutilite-avant-de-devenir-l-hadopi-maj.html.
  26. Une décision du tribunal de 1ère instance d’Helsinki du 25 mai 2007 (Helsingin käräjäoikeus, aff R 07/1004, 25 mai 2007) a suscité de nombreuses réactions. Les juges suédois avaient en effet décidé que les protections du DVD n’étaient pas efficaces en raison de l’existence sur le web d’outils de neutralisation, ce qui avait pour conséquence d’exclure toute protection juridique pour les DRM du DVD et de légaliser les techniques de contournement. Par un arrêt du 22 mai 2008, la Cour d’appel d’Helsinki (Helsingin hovioikeus, 22 mai 2008, Diaarinumero R 07/2622) a infirmé ce jugement en affirmant que l’efficacité d’un DRM ne peut pas être réfutée du fait de l’existence d’outils de neutralisation.
  27. http://www.april.org/reponse-de-lapril-la-consultation-ipred
  28. Information Rights and Intellectual Freedom, Julie E. Cohen, 2011 (pages 8, 9 et 11). http://www.law.georgetown.edu/faculty/jec/intellfreedom.pdf
  29. Voir le cahier international
  30. http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422.
  31. http://mktsci.journal.informs.org/search?fulltext=drm&submit=yes&x=21&y=10/.
  32. http://www.pcinpact.com/news/Les_CNIL_europeennes_et_le_marquage_des_fichiers.htm.
  33. ec.europa.eu/justice/policies/privacy/docs/wpdocs/.../wp104_fr.pdf.
  34. http://www.zdnet.fr/actualites/drm-quand-le-copyright-menace-les-droits-des-consommateurs-39175030.html.
  35. http://en.wikipedia.org/wiki/2005_Sony_BMG_CD_copy_protection_scandal.
  36. L'expérience montre l'obsolescence de tels systèmes en quelques années. Voir par exemple l'ATRAC de Sony, http://www.zdnet.fr/actualites/musique-sony-abandonne-son-format-atrac-pour-le-mp3-wma-et-aac-39372539.htm.
  37. A. Jacquesson, « Du livre enchaîné aux DRM, Les freins à la diffusion du savoir au temps des livres électroniques » http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2011-03-0036-007.
  38. Les standards ouverts sont définition par l'article 4 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000801164&dateTexte= : « On entend par standard ouvert tout protocole de communication, d'interconnexion ou d'échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d'accès ni de mise en œuvre. »
  39. http://www.latribune.fr/technos-medias/medias/20110622trib000631344/musique-les-bons-chiffres-que-cache-la-chute-des-ventes-de-cd.html.
  40. Pour un exemple de l'absurdité de l'usage de DRM dans la lutte contre le partage : http://www.numerama.com/magazine/20409-l-absurdite-des-drm-en-une-image.html.
  41. http://www.numerama.com/magazine/15582-avatar-en-blu-ray-illisible-sur-certains-lecteurs-a-cause-des-drm.html.
  42. http://www.rue89.com/2011/10/10/musique-moins-de-contraintes-sur-le-telechargement-legal-moins-de-pirates-225422.
  43. http://www.clubic.com/antivirus-securite-informatique/actualite-451724-etude-suppression-drm-baisser-piratage.html.
  44. En France, l'exception de copie privée a été insérée dans la loi en 1957 (art. L122-5 2° CPI) http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=9121218EB86E3A7C238B5EA0449E907E.tpdjo02v_3?idArticle=LEGIARTI000024423362&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111102. La rémunération pour copie privée a été insérée en 1985 ( art. L311-1 et s. CPI ) http://www.legifrance.gouv.fr.
  45. Voir notamment à ce sujet les affaires " Mulholland Drive " Cass. 1ère civ., 19 juin 2008, n° 07-14277 http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000019034711&fastReqId=1288840549&fastPos=1 et " Phil Collins " Cass. 1ère civ., 27 novembre 2008, n° 07-18778 http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000019842464&fastReqId=1585090484&fastPos=1.
  46. Sur le projet de loi n°3875 relatif à la rémunération pour copie privée http://www.assemblee-nationale.fr/13/projets/pl3875.asp
  47. http://www.pcinpact.com/actu/news/66762-copie-privee-projet-loi-ministere-culture.htm.
  48. Loi n° 2011-1898 du 20 décembre 2011 relative à la rémunération pour copie privée http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000025001493&dateTexte=&categorieLien=id.
  49. http://www.pcinpact.com/news/67666-quadrature-copie-privee-liceite-source.htm.
  50. http://www.lemonde.fr/web/recherche_breve/1,13-0,37-1066885,0.html.
  51. http://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/07/21/cinema-musique-jeux-bientot-des-verrous-numeriques-communs_1390785_651865.html.
  52. Les Accords Élysée du 23 novembre 2007, disponibles sur http://www.senat.fr/rap/l08-053/l08-0536.html#fnref35.
  53. Pour exemple : http://www.numerama.com/magazine/15224-drm-sur-assassin-s-creed-2-ubisoft-n-a-rien-appris-du-passe-en-fait.html.
  54. Le problème des DRM : frein aux usages et incitation au piratage - Joël Faucilhon, http://www.dailymotion.com/video/xikgl1_le-probleme-des-drm-frein-aux-usages-et-incitation-au-piratage-joel-faucilhon-responsable-de-la-stru_school.
  55. http://www.pcinpact.com/actu/news/58417-drm-ultraviolet-interoperable-cloud-consortium-dece.htm.
  56. Voir par exemple à ce sujet l'étude du MOTif, l'observatoire du livre et de l’écrit associé à la Région Île- de-France : '« Le coût d’un tel marquage est de 0,40€ par exemplaire à l’heure actuelle, un coût fixe qui a une influence non négligeable pour des livres proposés à des prix réduits (3% sur un prix de vente à 12€ par exemple). Ce coût est assumé par les distributeurs de livres numériques et fait l’objet d’une refacturation aux éditeurs. A noter également qu’Adobe demande un droit d’entrée à ces mêmes distributeurs de 75 000$/annuel pour disposer de cette solution. C’est un ticket d’entrée inaccessible à des distributeurs petits ou moyens.»« Combien coûte un livre numérique», étude du MOTif, p. 29 http://www.lemotif.fr/fr/etudes-et-analyses/etudes-du-motif/cout-d-un-livre-numerique/.
  57. http://www.dcimovies.com/.
  58. Selon leur site, prennent notamment part au projet Disney, Fox, MGM, Paramount, Sony, Universal et Warner Bros.
  59. Les cinémas Utopia ont souligné ces difficultés notamment lors d'une conférence aux Rencontres Mondiales du Logiciel Libre 2010 http://2010.rmll.info/Le-logiciel-libre-au-secours-de-la-diversite-culturelle.html.
  60. « l’échange entre systèmes hétérogènes de contenus protégés, dans le respect des droits des créateurs » et qui passe par « une interopérabilité des métadonnées (données structurées qui décrivent et identifient le contenu auquel elles sont associées) associées au contenu et par un respect des conditions de protection et des niveaux de sécurisation établis par les titulaires de droits »ARMT- rapport annuel 2008 p. 28 http://www.numerama.com/magazine/11577-l-armt-constate-son-inutilite-avant-de-devenir-l-hadopi-maj.html.
  61. Voir par exemple les promesses du rapport Olivennes sur http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/074000726/index.shtml, ou l'échec du logiciel DReaM de Sun promettant un DRM universel. Ce logiciel n'a jamais été réalisé, malgré de nombreux effets d'annonces (ce type de logiciel est appelé vaporware ou fumiciel).
  62. Art. L331-5 et suivants CPI http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=FE7F072E9627136B9A4DC1359127D079.tpdjo13v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006179045&cidTexte=LEGITEXT000006069414&dateTexte=20111102.
  63. Décret 2006-1763 du 23 décembre 2006, relatif à la répression pénale de certaines atteintes portées au droit d'auteur et aux droits voisins http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000817096&fastPos=1&fastReqId=1940515751&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte.
  64. Le contournement des DRM est ainsi un délit punissable d'une amende de quatrième classe pouvant aller jusqu'à 750 €. La création, la distribution, ou l'incitation à l'usage d'un outil manifestement destiné au contournement des mesures de contrôle d'usage font encourir une peine d'un maximum de 6 mois d'emprisonnement et 30 000€ d'amende.
  65. Conseil constitutionnel, 27 juillet 2006, décision 2006-540 DC loi relative au droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information (DADVSI) http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2006/2006-540-dc/decision-n-2006-540-dc-du-27-juillet-2006.1011.html.
  66. http://www.april.org/fr/articles/communiques/pr-20070221.html.
  67. Pour plus d'informations, voir l'analyse de l'arrêt du Conseil d'État par l'April : http://www.april.org/fr/groupes/dadvsi/analyse-arret-conseil-etat-decret-dadvsi.html%20.
  68. Sur ce point, on peut citer l'exemple de VideoLan, qui a lancé récemment un projet pour comprendre le fonctionnement de l'AACS (disponible sur http://www.videolan.org/developers/libaacs.html). Un tel projet s'inscrit pleinement dans les exceptions de recherche et dans le droit à l'interopérabilité.
  69. Article L331-32 du code de la propriété intellectuelle.
  70. CA Paris Pole 5, chambre 12, 26 septembre 2011 http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3238.
  71. Trusted Computing le film http://www.april.org/fr/trusted-computing-le-film.
  72. Art. 15 Loi n° 2006-961 du 1 août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information ( DADVSI ) http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000266350&fastPos=1&fastReqId=2016417894&categorieLien=cid&oldAction=rechTexte.
  73. http://www.gnu.org/philosophy/can-you-trust.fr.html.
  74. http://www.lasbordes.fr/IMG/pdf/26_novembre_doc_definitif.pdf.