« Émission Libre à vous ! sur cause Commune du 13 septembre 2023 » : différence entre les versions

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==14 min 25 - Le SITIV avec Stéphane Vangheluwe (DG) et Pierre-Alain Millet (Président)==
==Le SITIV avec Stéphane Vangheluwe, DG, et Pierre-Alain Millet, président==
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous allons poursuivre par notre sujet principal, un échange avec le SITIV le Syndicat Intercommunal des Technologies de l’Information pour les Villes, un Opérateur Public de Services Numériques qui met en œuvre des compétences et des moyens techniques au service des communes adhérentes.<br/>
Je reçois pour cela à distance, par téléphone, le président, Pierre-Alain Millet, président du SITIV, conseiller de la métropole de Lyon et adjoint au maire de Vénissieux. Bonjour Pierre-Alain, je crois que vous êtes avec nous.


<b>Étienne Gonnu : </b>Nous allons poursuivre par notre sujet principal,
<b>Pierre-Alain Millet : </b>Bonjour.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Et Stéphane Vangheluwe, directeur du SITIV, membre du bureau de Déclic et membre du CA de l’ADULLACT, dont on attend l’appel, qui devrait nous rejoindre, je l’espère, d’un moment à l’autre.<br/>
Comme d’habitude, n’hésitez pas à participer à notre conversation. Vous pouvez nous rejoindre sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat », et si vous avez des questions je les relaierai du mieux que je peux.<br/>
Pierre-Alain, vous êtes toujours avec nous ?
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>Je suis toujours là.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Je vous ai présenté très sommairement. Vous êtes président du SITIV. Vous pouvez peut-être vous présenter de manière un peu plus complète et nous préciser également quel est votre rapport au logiciel libre, comment vous l’avez découvert et quels liens vous entretenez avec cette question.
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>En fait je suis informaticien de métier, par ailleurs jeune retraité. J’ai donc travaillé dans l’informatique, dans le développement, dans les systèmes d’information en entreprise privée, puis comme enseignant à l’INSA de Lyon. Dans cette longue histoire, j’ai fait comme plein de gens, j’ai essayé de toucher un peu à tout, ouvrir un ordinateur, essayer de comprendre, faire des expériences de Linux et puis essayer de se débarrasser des outils Microsoft, ce qui n’est jamais simple, et surtout, dans mes activités militantes, essayer d’accompagner, d’entraîner autour de moi la vie associative et militante ce qui n’est pas simple du tout parce que, comme le disait d’ailleurs l’intervenante avant la pause musicale, dans les milieux populaires, des fois ce n’est pas forcément ce qu’on fait le plus vite. La pression marketing des grands éditeurs est parfois très forte.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Entendu. Vous nous parlez de votre parcours militant par rapport au logiciel libre et ça nous expliquera sans doute aussi, ça éclairera le parcours du SITIV par rapport au logiciel libre.<br/>
La régie me fait signe, je crois que Stéphane Vangheluwe nous a rejoints. Bonjour Stéphane, vous êtes bien avec nous ?
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Bonjour. La technique a réussi à me brancher.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Je vais lever un petit peu le voile. On a que quelques difficultés, en amont de l’émission, à bien se coordonner. J’ai le plaisir de recevoir à la fois Stéphane et Pierre-Alain.<br/>
Stéphane, je vous ai présenté comme président du SITIV. Vous êtes également membre du bureau de Déclic, que vous pourrez nous présenter rapidement ainsi que membre du CA de l’ADULLACT. Vous teniez à le préciser, je le comprends bien. Est-ce que vous souhaitez développer un peu cette présentation et, vous aussi, peut-être, nous préciser quel lien vous entretenez avec le logiciel libre et comment vous avez découvert cette question.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Je suis d’abord un fonctionnaire territorial, dans la fonction publique depuis les années 80, en ayant eu un certain nombre d’expériences privées au milieu de ma carrière. Dès le début de ma carrière, j’ai travaillé dans la mutualisation des systèmes numériques pour le compte des habitants, dans une communauté urbaine à l’époque. Je commence donc à avoir un petit peu de boutique, on va dire, dans l’informatique ou les systèmes d’information des collectivités territoriales.<br/>
Le logiciel libre. Dans les années 2000, j’ai la chance de découvrir une jolie région qui est la Drôme, la ville de Romans-sur-Isère où je prends la direction informatique en même temps qu’un certain nombre d’élus démarrent leurs nouveaux mandats et souhaitent développer, politiquement, un certain nombre de solutions libres.<br/>
Dès ces années-là, la découverte d’une association importante, l’association ADULLACT, l’association pour le développement des logiciels libres dans les collectivités territoriales. On fait connaissance. Très vite la ville de Romans-sur-Isère devient adhérente. Très vite nous déployons, déjà à l’époque, des solutions de bureautique libres pour la totalité des agents de la collectivité, donc très tôt.<br/>
Différents détours dans ma carrière professionnelle pour arriver à la mutualisation de services numériques plus structurés au sein d’opérateurs publics de services numériques. Qu’est-ce que c’est que cette terminologie ? C’est une terminologie pour dire que nos sommes des acteurs publics, nous œuvrons pour le compte de collectivités locales et uniquement sur une seule action, le numérique, et nous sommes là pour opérer la mutualisation de ces services qui demandent de plus en plus de moyens, coûtent de plus en plus cher et surtout, requièrent de plus en plus de compétences technologiques.<br/>
Peut-être le dernier élément, l’association Déclic qui est une fédération d’opérateurs publics de services numériques, comme le SITIV, au niveau national. Vous pouvez trouver de l’information sur cette association sur asso-declic.fr. Nous sommes une soixantaine d’opérateurs publics en France. Nous représentons plus de 50 % de la population française, beaucoup plus de 50 % des communes françaises, plutôt des acteurs créés par des agences techniques départementales, des centres de gestion ou même à l’initiative de communes, des syndicats intercommunaux. Nous œuvrons uniquement pour les collectivités territoriales, donc des mairies.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Entendu. Je crois qu’on entend bien, et je l’ai annoncé en introduction, que le mot clé de notre échange sera la mutualisation, c’est revenu régulièrement dans votre propos, à juste titre.<br/>
Vous avez commencé à préciser et à dessiner ce qu’est un syndicat intercommunal ou un Opérateur Public de Services Numériques, un OPSN pour les intimes. Je vous laisserai peut-être compléter, si vous le jugez utile, sur ce qu’est un syndicat intercommunal, mais je pense que c’est déjà clair. Peut-être qu’on peut s’intéresser plus précisément à ce qu’est le SITIV, que ce soit en termes d’historique, quels en sont les membres, quelle est son assise territoriale, quelle est sa gouvernance, etc. Qui souhaite ouvrir ce sujet ? Pierre-Alain.
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>Peut-être parce que c’est moi qui ai la plus longue histoire du SITIV.<br/>
Le SITIV a commencé comme un centre de calcul, mutualisé justement, entre des communes à l’origine sur la base de couleurs politiques, il faut être clair. Les choses ont évolué et on a élargi progressivement le champ de la mutualisation. Dans les années 90, c’était un sujet de tension entre le développement de la micro-informatique et l’idée que peut-être tout le monde pouvait en faire, donc chacun faisait de son côté, et puis, très vite, le fait qu’il y avait des enjeux qui poussaient à la mutualisation. C’est la mutualisation qui a gagné dans l’histoire au fil des années. On est d’ailleurs arrivé à une situation très positive pour tous les acteurs de l’agglomération lyonnaise : la création d’une entente. Au-delà des huit communes du SITIV dont les plus grandes sont Vénissieux. Vaulx-en-Velin, on a construit une entente avec la métropole Grand Lyon, quand même un 1 500 000 habitants et la Ville de Lyon pour développer une plateforme commune qui était le résultat d’un appel à projet du plan de relance numérique, un projet significatif qui nous permet aujourd’hui de mutualiser à une très large échelle une plateforme sur les outils collaboratifs – messagerie, bureautique –, basée uniquement sur des logiciels libres.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Super. Stéphane, vous souhaitez compléter ?
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Si je devais compléter et sortir de l’aspect purement local : au vu du nombre de collectivités présentes en France et de leurs différences de taille, de population, de moyens, de richesses, il a semblé important, même à l’État, de favoriser une homogénéité ou une accélération du développement du numérique, dans les collectivités de plus petite taille, en essayant de favoriser ce mouvement de la mutualisation. Les enjeux d’accélération des calendriers de la transformation numérique nous obligent à être hyper-réactifs, donc à concentrer nos moyens.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>J’aimerais peut-être qu’on ouvre une très légère parenthèse, je pense que le sujet va intervenir, mais on en parlera plus précisément en fin d’émission. Vous avez précisé votre assise géographique, là où est le cœur de métier du SITIV, on va développer là-dessus, mais vous avez également développé ce que vous appelez une entente avec Lyon et la métropole Grand Lyon, qui sont vraiment des collectivités importantes, qui partagent votre territoire. Il y a un notamment un projet Territoire Numérique Ouvert, dans lequel on rentrera en détail en fin d’émission, mais comme je pense qu’on va y revenir, que ce sera peut-être évoqué assez régulièrement pendant notre échange, en une minute ou deux, pouvez-vous peut-être nous présenter cette entente et ce qu’est ce projet TNO, Territoire Numérique Ouvert, je pense que ça pourrait être utile et intéressant. Pierre-Alain, nous vous écoutons.
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>Je l’évoquais tout à l’heure, effectivement. L’entente est à l’origine un appel à projet France Relance, plan numérique, auquel le SITIV a souhaité être candidat. Comme on avait conscience qu’à l’échelle nationale, l’échelle d’une mutualisation comme fait le SITIV, avec huit communes de 100 000 habitants, ce n’était pas énorme, on a cherché à rentrer en contact avec la métropole de Lyon pour être à une échelle de mutualisation bien plus large. On a donc répondu à cet appel à projet pour développer une plateforme, un portail d’outils collaboratifs mis à disposition des agents et des élus de l’ensemble des collectivités. On visait, en gros, 30 000 utilisateurs de la messagerie, d’outils collaboratifs, de messagerie instantanée, de bureautique collaborative, etc. Nous avons eu la chance d’être retenus sur un projet de plus de deux millions de financements publics, donc de pouvoir développer très rapidement une plateforme à une grande échelle, avec des conditions de robustesse très élevées, de sécurité très élevées et qui est en cours de déploiement dans l’ensemble des collectivités.<br/>
Nous appelons le projet Territoire Numérique Ouvert. Le nom ne précise pas que c’est lyonnais parce que, potentiellement, cette plateforme doit pouvoir être réplicable et même étendue ailleurs. On peut donc accueillir de nouveaux acteurs autour de cette plateforme.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>C’est le but de la mutualisation et c’est aussi tout l’intérêt d’utiliser des logiciels libres que de permettre justement cette multiplication et cet essaimage technique.<br/>
Je parle de mutualisation, c'est un peu le cœur du sujet, on l’a dit, lorsqu’on parle d’un syndicat intercommunal comme le SITIV. Il serait sans doute intéressant et utile de s’arrêter un peu sur cette notion : qu’est-ce que la mutualisation et pourquoi cette question est-elle aussi importante quand on parle des pouvoirs publics, des personnes publiques ? Ça englobe énormément d’aspects, dans un premier la question est très large et après on va rentrer dans le détail des sujets. Comment présentez-vous, de manière un peu concise, cette question de la mutualisation ? Pourquoi est-ce si important ? Stéphane, allez-y.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Je vais commencer et je laisserai Pierre-Alain compléter.<br/>
Dans notre domaine particulier du numérique, les compétences techniques sont un enjeu de plus en plus important, un enjeu qui est difficilement accessible aux collectivités petites et moyennes. Il devient donc essentiel, pour les collectivités concernées, de pouvoir accéder facilement à toutes ces compétences et en confiance.<br/>
Ce qu’attendent nos adhérents, ou les membres de notre mutualisation, du rôle du SITIV, c’est la mise à disposition essentiellement de ressources humaines qui permettent une mise à disposition sécurisée, facilitée, accélérée des services à la fois aux agents des collectivités territoriales, mais aussi aux citoyens, donc de ne pas se faire distancer, de pouvoir suivre l’accélération permanente de ce mouvement numérique qu’on peut d’ailleurs contester ou ne pas ne pas contester, le cas échéant.<br/>
Peut-être que la mutualisation c’est aussi, et c’est peut-être important de le noter dans le monde du numérique, une mutualisation neutre. Nous sommes des spécialistes du numérique, nous ne faisons pas de politique, nous ne cherchons pas du tout à mutualiser une politique du système d’information, mais bien plutôt des moyens.<br/>
Peut-être le dernier élément : la mutualisation c'est compliqué. Ça se fait mieux et ça se fait beaucoup plus facilement avec des structures d’expérience identique, de taille identique. Ce qui est peut-être original dans ce projet d’entente intercommunale Territoire Numérique Ouvert c’est que c’est la première fois que ça se fait à cette échelle-là entre une ville de très grande importance, la ville de Lyon, entre une métropole et un syndicat intercommunal de collectivités, un OPSN. Nous sommes donc en train d’essayer d’inventer, avec des fois des difficultés, une gouvernance qui permet de faire agir des gens avec beaucoup de moyens, des gens avec moins de moyens et des gens dont c’est le métier de faire du numérique au quotidien.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Je vais juste me permettre une remarque avent de laisser Pierre-Alain réagir. Vous avez dit que c’est neutre, j’entends très bien et je comprends très bien la distinction que vous faites. C’est vrai qu’à l’April on aime justement beaucoup rappeler que les questions relatives au technique sont éminemment politiques par elles-mêmes et le choix de s’appuyer aussi sur des structures de mutualisation ce sont des vraies questions politiques, mais je comprends que ce n’est pas la question spécifique et la mission spécifique du SITIV qui répond, finalement, aux choix politiques faits par les communes qui adhèrent, si je ne déforme pas votre propos.<br/>
Pierre-Alain, je vous laisse réagir à cette question, l’importance de l’enjeu.
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>Bien évidemment, l’enjeu de la mutualisation est un enjeu politique. Après, concrètement, même si le SITIV a une origine d’une couleur politique, aujourd’hui je fais voter un budget avec des villes de plein de couleurs politiques différentes qui se mettent d’accord sur le budget du ITIV. C’est en sens-là, de ce point de vue-là, je pense, que Stéphane disait que le SITIV est un outil neutre politiquement. C’est d’abord un outil technique et de moyens. Mais évidemment que l’enjeu de la mutualisation est politique.<br/>
Pour être un peu brutal, peut-être, pour une collectivité locale il n’y a que deux manières de s’affronter à l’enjeu des compétences qui sont mobilisées dans le numérique. La première c’est de faire appel au privé avec effectivement une dépendance très forte à des acteurs privés qui eux, parfois, vont mutualiser à très large. J’ai connu l’infogérance dans le privé, donc ils vont mutualiser à une large échelle en rendant la collectivité dépendante et avec tous les risques d’interopérabilité. On ne peut pas, non plus, avoir un seul fournisseur privé de tous les services numériques, en réalité on en a plusieurs et les enjeux d’interopérabilité, de choix de normes, vont peser et rendre difficile l’évolution et la maîtrise des systèmes. Au contraire, la mutualisation entre acteurs publics joue un rôle qui est effectivement très politique. Elle permet de construire une compétence numérique capable de « rivaliser », ente guillemets, avec les plus gros acteurs privés, rivaliser n’est peut-être pas le mot puisqu’en fait on les utilise ce sont nos partenaires – évidemment qu’on travaille avec plein d’acteurs privés –, mais on travaille en construisant une capacité de maîtriser les plateformes, les outils, les choix techniques et surtout de les mettre au service de leur déploiement. J’utilisais un proverbe comme enseignant, je ne sais pas s’il a beaucoup de valeur : il n’y a pas de valeur dans le code, il n’y en a que dans les usages du code. Les usages, les pratiques, le travail concret de l’ensemble des agents des collectivités, c’est ça le véritable enjeu, donc déployer ces plateformes, l’ensemble des services numériques pour qu’ils créent de la valeur dans le travail des agents, dans leur relation agents/usagers, ça suppose effectivement de maîtriser ces outils et c’est ce que la mutualisation entre collectivités peut permettre de construire. On a évidemment des compétences, au SITIV, qu’aucune des communes du SITIV ne pourrait acquérir seule et la collaboration avec la métropole, dans l’entente intercommunale, est évidemment un accélérateur de ce point de vue.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Super. On va peut-être se poser la question plus concrètement de comment le SITIV met en œuvre cette mutualisation.<br/>
Vous avez parlé d’interopérabilité qui est une autre notion absolument essentielle, indissociable, à mon sens, de la question de la mutualisation, je vous laisserai peut-être préciser. En somme, l’interopérabilité c’est la capacité des systèmes d’information à pouvoir communiquer sans difficulté entre eux et ça se base sur des normes, des standards ouverts dont on connaît les spécifications techniques. Peut-être que vous pourriez nous apporter votre éclairage sur cette notion d’interopérabilité. Stéphane.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Peut-être que je vais donner un premier point de vue un peu décalé.<br/>
Le premier sujet, l’interopérabilité, c’est un souhait du client, ça n’est pas forcément un souhait du fournisseur qui lui, bien au contraire, va préférer enfermer ses différents clients dans des standards plus ou moins fermés qui vont permettre de monopoliser le chiffre d’affaires et rendre le client, collectivité territoriale, beaucoup plus captif.
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>Stéphane, à la décharge du fournisseur privé, il faut dire aussi que c’est aussi une manière de réduire les coûts, parce qu’on sécurise, on réduit quand même des risques, du point de l’acteur privé.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Je partage et très vite on se rend compte que dans le cadre du public, on est amené à faire des consultations, des appels d’offre, pour choisir nos fournisseurs, donc on est fatalement amené à faire jouer le jeu de la concurrence. Pour faire jouer le jeu de la concurrence, il faut garantir la capacité à avoir une interopérabilité entre l’ensemble des systèmes d’information. Pour moi, c'est le premier enjeu opérationnel d’interopérabilité.<br/>
Le second, c’est que quand on construit un système d’information, on rajoute progressivement des morceaux, des pièces, des compléments et fatalement, pour rendre tout cela utilisable à la fois par l’habitant ou par l’agent, il faut assurer une certaine cohérence de bout en bout, il faut assurer une certaine dématérialisation de bout en bout, il faut assurer une transversabilité. Pour assurer tout cela, chacun d’entre nous a très certainement choisi une stratégie qui doit être au centre et cette stratégie qui doit être au centre, c’est la capacité de l’ensemble des solutions de pouvoir communiquer entre elles, ne serait-ce que pour, à la fin, nous soyons maîtres de nos données, qui est très certainement le pétrole de nos activités, la valeur ajoutée et ce sur quoi nous sommes tous en train de construire la gouvernance à venir de nos collectivités. On parle d’intelligence artificielle, mais dans les collectivités, sans maîtrise de la donnée, on ne pourra rien faire.<br/>
Pour moi mutualisation, interopérabilité, gouvernance de la donnée, transversalité, tous ces sujets-là sont des sujets qui doivent être gérés en même temps. Peut-être que je rajouterais un dernier gros mot qui serait tout simplement souveraineté.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Effectivement qui regroupe, qui est maintenant le terme valise pour intégrer tous ces sujets, la question de la souveraineté numérique qui va varier en fonction de qui parle. Si on parle de maîtrise des systèmes d’information, dans cette idée-là on voit bien comment mutualisation, interopérabilité, transversabilité, comme vous l’avez très bien dit, s’intègrent et deviennent des critères essentiels pour garantir cette maîtrise.<br/>
Je vais me permettre, et vous n’avez pas dit le contraire, mais je vais préciser. Vous avez parlé d’acteurs privés qui, pour sécuriser, pour chercher à enfermer, on va dire, leurs clients, du moins les contraindre à utiliser un certain standard, on peut rappeler qu’il y a un tissu économique vibrant et très fort d’entreprises qui font du logiciel libre, qui s’appuient sur l’interopérabilité, qui n’utilisent que des standards ouverts. Il y a des modèles économiques basés là-dessus qui sont tout à fait viables, qui fonctionnent, qui répondent du coup aussi aux impératifs pour les pouvoirs publics, à certains impératifs d’intérêt général.<br/>
Du coup je parle de logiciel libre, je fais cette transition. On sait qu’au SITIV le logiciel libre fait partie de votre stratégie, c’est pour cela qu’on échange aujourd’hui, d’ailleurs vous avez été récompensé, à ce sujet, dans le cadre du label Territoire Numérique Libre, vous avez obtenu le plus haut niveau, on va y revenir rapidement plus tard. Quelle place occupe, pour vous, le logiciel libre dans l’objectif de mutualisation et d’interopérabilité ? Stéphane.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Une place stratégique. Tout d’abord, peut-être une petite incartade. Effectivement, éditeur privé n’est pas antagoniste avec respect des standards, bien heureusement, et, de temps en temps respect de standards ouverts. D’autant plus que, dans certains cas, la réglementation ou les lois nationales imposent un certain nombre de standards et peut-être que c’est un mouvement dans lequel il faut que l’État français, de plus en plus, se positionne pour légiférer et imposer des réglementations et des standards ouverts, je crois que le législateur est à la manœuvre et qu’il le fait de plus en plus.<br/>
Le logiciel libre nous permet d’avoir une relation tout à fait différente dans la gouvernance et dans le tissu économique qui gère ce logiciel libre, qui repose effectivement, pour la plupart, sur la vente de prestations humaines, d’études, de recherche et la coconstruction de solutions pour un plus grand nombre.<br/>
La gouvernance des solutions libres n’est pas forcément toujours plus simple, d’autant plus que les modèles sont très variés.<br/>
En tout cas, pour ce qui concerne le SITIV, et sur un certain nombre de solutions stratégiques, toutes les solutions qui sont au cœur du processus de dématérialisation des documents, pour une part, toutes les solutions qui sont aujourd’hui au cœur du processus de collaboration avec notre projet de Territoire Numérique Ouvert, mais aussi sur un certain nombre d’outils métiers – et là je peux quand même faire apparaître que malheureusement la concurrence sur les outils métiers des collectivités territoriales n’est pas toujours très présente, que les solutions libres ne sont pas toujours très présentes, il en existe très peu en gestion financière et en gestion des ressources humaines des collectivités territoriales par exemple – en tout cas pour le choix du SITIV c'est à chaque fois la meilleure solution qui permettra, en plus d’avoir une gouvernance dans le long terme, avec une petite préférence pour les solutions libres à partir du moment où leur gouvernance n’est pas compliquée, nous avons opté pour des solutions libres de manière proactive. J’allais dire que parfois ce sont des choix difficiles à expliquer à nos propres adhérents, ce sont des choix volontaires qui ne sont pas toujours simples à mettre en œuvre.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Vous parlez de choix proactif. C’est vrai que c’est important de rappeler que le Conseil d’État, déjà en 2011, validait le fait qu’on peut faire des appels pour des commandes publiques portant spécifiquement sur un logiciel libre parce que les qualités intrinsèques du logiciel libre garantissent l’égalité d’accès au marché public en cause, ce qui permet à des collectivités et aux syndicats intercommunaux comme le SITIV de faire un choix proactif pour utiliser certains logiciels libres parce que ça répond, en fait, au cœur de leur mission.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Vous pouvez rajouter à cela le fait que l’État, la Direction du numérique, le service de l’État qui s’occupe de coordonner la stratégie numérique au niveau national, en coordination avec les collectivités territoriales, favorise l’utilisation de ces solutions mutualisées, développe un certain nombre de solutions libres à l’initiative de l’État ou de collectivités territoriales. Le catalogue des solutions commence à être vraiment fourni.<br/>
Peut-être une petite remarque sur le tissu des PME ou PME à taille un peu plus importante présentes sur ces marchés : il existe, il est présent, il est de plus en plus organisé, il a encore un peu de mal à rivaliser avec les grandes multinationales, je pense que tout le monde en conviendra, mais c’est aussi le rôle de la puissance publique d’aider ce tissu à se mettre en place, à se coordonner et à proposer des solutions dédiées aux collectivités territoriales.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Très bien. Avant la pause musicale, je vous propose peut-être de préciser ce que vous entendez par gouvernance et les difficultés potentielles de gouvernance, les questions de gouvernance autour du logiciel libre. C’est vrai qu’on a l’habitude de ces sujets, la réponse paraît évidente, mais je pense qu’elle ne l’est pas pour tout le monde, et si vous souhaitez préciser, je vous invite à le faire.
 
<b>Stéphane Vangheluwe : </b>Dans les environnements logiciel libre, peut-être en termes de gouvernance opérationnelle, pas de gouvernance politique, on se retrouve, en fonction des solutions libres, avec des modèles qui sont le logiciel libre a été créé à l’initiative d’un éditeur privé qui a donc une économie à gérer autour de cette solution libre, qui propose des services ; ensuite, assez souvent, on trouve des modèles où il y a une forme de cogestion d’acteurs privés ; on peut trouver des modèles où le logiciel est complètement libre avec des acteurs qui coproduisent de façon plus ou moins gratuite, plus ou moins volontaire sur ces projets. En fait, les modèles sont vraiment très différents dans la capacité à influer sur la stratégie d’évolution, de la <em>roadmap</em> du produit proposé.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Je pense que vous avez mis le doigt sur la question centrale. Je vous ai posé une question difficile. Je comprends le point de vue d’un opérateur comme le SITIV. Cette pluralité, cette multiplicité des profils des communautés qui existent autour des logiciels libres peut être effectivement une difficulté lorsqu’on fait ce choix volontaire du logiciel libre dans la manière dont les décisions sont prises <br/>
Pierre-Alain, je crois que vous souhaitiez réagir avant qu’on fasse la pause musicale.
 
<b>Pierre-Alain Millet : </b>J’entends ces difficultés. Dans le cas d’un syndicat intercommunal qui est au service de communes, donc les communes restent maître d’ouvrage de leur stratégie numérique et de leur choix. On travaille pour favoriser la mutualisation.<br/>
Aujourd’hui, si le SITIV a clairement fait le choix du logiciel libre, qu’il le développe partout où il peut, notamment dans ses infrastructures, on n’a jamais dit à nos communes « dorénavant nous ne ferons plus que du logiciel libre ». Sur chaque projet, notamment sur certains projets métiers où il y a peu, il n’y a pas d’acteurs, il n’y a pas de solutions en logiciel libre, ce n’est évidemment pas possible. De manière générale, on travaille avec les communes et c’est bien l’expression des attentes et des besoins d’abord métiers qui construit la décision de mutualisation. Et le Libre vient après en disant « dans les critères d’évaluation des offres, il y a des offres libres ». Le point de départ reste quand même la réponse aux besoins métiers qui sont portés par les communes. Dans ce contexte, le SITIV n’est pas le décideur seul, il est le décideur qui coordonne la décision commune des communes.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Très bien, ça me paraît clair. Justement, après la pause musicale, on va parler plus concrètement des services, des usages que vous proposez aux collectivités membres.<br/>
Je vous propose de faire une pause musicale. Restez bien en ligne avec nous Stéphane, Pierre-Alain, on se retrouve juste après dans à peu près trois minutes. Nous allons écouter <em>You’ll Never Walk Alone</em> par RMSTM. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de cause Commune, la voix des possibles.
 
<b>Pause musicale : </b><em>You’ll Never Walk Alone</em> par RMSTM.
 
<b>Voix off : </b>Cause Commune, 93.1.
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Nous venons d’écouter <em>You’ll Never Walk Alone</em> par RMSTM, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC BY. Merci encore au site Au bout du fil pour cette belle découverte, d’ailleurs je vous invite à découvrir la présentation de l’artiste et du morceau sur leur site. Vous trouverez, comme d’habitude, le lien sur la page de l’émission. Je vous en lis un extrait, je cite : « Qui se cache derrière ce mystérieux pseudonyme RMSTM ? L’auteur de <em>You’ll Never Walk Alone</em> s’appelle Thomas Chary, il vient d’Annecy. Pour lui, la musique n’est pas un métier mais une passion. […] <em>You’ll Never Walk Alone</em> est une musique tellement originale, tellement unique qu’il me semble difficile de la classer dans un style musical. Quoi qu’il en soit, on ne peut que reconnaître qu’elle est fortement inspirée de l’univers de la musique country. On retrouve la guitare acoustique, la voix grave et profonde des chanteurs de country et surtout, la thématique de la conquête de l’Ouest et de la ruée vers l’or. »
 
[Jingle]
 
==Deuxième partie==
 
<b>Étienne Gonnu : </b>Je suis Étienne Gonnu


==1 h 17 min 15 - Chronique « Lectures buissonnières » de Vincent Calame intitulée « Politique et de semences »==
==1 h 17 min 15 - Chronique « Lectures buissonnières » de Vincent Calame intitulée « Politique et de semences »==

Version du 13 septembre 2023 à 14:24


Titre : Émission Libre à vous ! diffusée mardi 13 septembre 2023 sur radio Cause Commune

Intervenant·e·s : Isabelle Carrère - Stéphane Vangheluwe - Pierre-Alain Millet - Vincent Calame - Étienne Gonnu - Frédéric Couchet à la régie

Lieu : Radio Cause Commune

Date : 13 septembre 2023

Durée : 1 h 30 min

Podcast PROVISOIRE

Page de présentation de l'émission

Licence de la transcription : Verbatim

Illustration : À prévoir

NB : transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.

Transcription

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Étienne Gonnu : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
Quand on parle de logiciel libre et de collectivités, un enjeu clé est la mutualisation. Nous recevrons aujourd’hui le Syndicat Intercommunal des Technologies de l’Information pour les Villes, SITIV en plus court, un opérateur public de mutualisation qui met en œuvre des compétences et des moyens techniques au service des communes adhérentes. Ce sera le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme la chronique d’Antanak, « Que libérer d’autre que du logiciel », et aussi une toute nouvelle chronique de Vincent Calame, « Lectures buissonnières », il nous parlera aujourd’hui de « Politique et de semences ».
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Soyez les bienvenu·es pour cette nouvelle saison de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Étienne Gonnu, chargé de mission affaires publiques pour l’April.

Nous sommes très fiers de démarrer avec vous cette septième saison avec de nouvelles chroniques à découvrir, des musiques libres bien sûr et toujours plus de sujets autour de libertés informatiques.
N’hésitez surtout pas à partager avec nous ce qui vous plaît, ou pas, à nous dire si vous aimeriez que nous traitions certains sujets, par exemple, ou à nous poser toute question. Nous sommes à votre écoute. Si nous continuons cette aventure depuis tout ce temps, c’est en bonne partie grâce aux super retours et encouragements de vous, nos auditrices et auditeurs.

Le site web de l’émission c’est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter.

Nous sommes mardi 12 septembre 2023, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

À la réalisation de l’émission, mon collègue Frédéric Couchet et Magali Garrnero dite Bookynette.

Frédéric Couchet : Bonjour vous.

Magali Garnero : Salut.

Étienne Gonnu : bienvenue à Bookynette qui se forme à la régie.
Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

3 min 22 - Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel », d’Antanak

Étienne Gonnu : Que libérer d’autre que du logiciel









[Virgule musicale]

Le SITIV avec Stéphane Vangheluwe, DG, et Pierre-Alain Millet, président

Étienne Gonnu : Nous allons poursuivre par notre sujet principal, un échange avec le SITIV le Syndicat Intercommunal des Technologies de l’Information pour les Villes, un Opérateur Public de Services Numériques qui met en œuvre des compétences et des moyens techniques au service des communes adhérentes.
Je reçois pour cela à distance, par téléphone, le président, Pierre-Alain Millet, président du SITIV, conseiller de la métropole de Lyon et adjoint au maire de Vénissieux. Bonjour Pierre-Alain, je crois que vous êtes avec nous.

Pierre-Alain Millet : Bonjour.

Étienne Gonnu : Et Stéphane Vangheluwe, directeur du SITIV, membre du bureau de Déclic et membre du CA de l’ADULLACT, dont on attend l’appel, qui devrait nous rejoindre, je l’espère, d’un moment à l’autre.
Comme d’habitude, n’hésitez pas à participer à notre conversation. Vous pouvez nous rejoindre sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat », et si vous avez des questions je les relaierai du mieux que je peux.
Pierre-Alain, vous êtes toujours avec nous ?

Pierre-Alain Millet : Je suis toujours là.

Étienne Gonnu : Je vous ai présenté très sommairement. Vous êtes président du SITIV. Vous pouvez peut-être vous présenter de manière un peu plus complète et nous préciser également quel est votre rapport au logiciel libre, comment vous l’avez découvert et quels liens vous entretenez avec cette question.

Pierre-Alain Millet : En fait je suis informaticien de métier, par ailleurs jeune retraité. J’ai donc travaillé dans l’informatique, dans le développement, dans les systèmes d’information en entreprise privée, puis comme enseignant à l’INSA de Lyon. Dans cette longue histoire, j’ai fait comme plein de gens, j’ai essayé de toucher un peu à tout, ouvrir un ordinateur, essayer de comprendre, faire des expériences de Linux et puis essayer de se débarrasser des outils Microsoft, ce qui n’est jamais simple, et surtout, dans mes activités militantes, essayer d’accompagner, d’entraîner autour de moi la vie associative et militante ce qui n’est pas simple du tout parce que, comme le disait d’ailleurs l’intervenante avant la pause musicale, dans les milieux populaires, des fois ce n’est pas forcément ce qu’on fait le plus vite. La pression marketing des grands éditeurs est parfois très forte.

Étienne Gonnu : Entendu. Vous nous parlez de votre parcours militant par rapport au logiciel libre et ça nous expliquera sans doute aussi, ça éclairera le parcours du SITIV par rapport au logiciel libre.
La régie me fait signe, je crois que Stéphane Vangheluwe nous a rejoints. Bonjour Stéphane, vous êtes bien avec nous ?

Stéphane Vangheluwe : Bonjour. La technique a réussi à me brancher.

Étienne Gonnu : Je vais lever un petit peu le voile. On a que quelques difficultés, en amont de l’émission, à bien se coordonner. J’ai le plaisir de recevoir à la fois Stéphane et Pierre-Alain.
Stéphane, je vous ai présenté comme président du SITIV. Vous êtes également membre du bureau de Déclic, que vous pourrez nous présenter rapidement ainsi que membre du CA de l’ADULLACT. Vous teniez à le préciser, je le comprends bien. Est-ce que vous souhaitez développer un peu cette présentation et, vous aussi, peut-être, nous préciser quel lien vous entretenez avec le logiciel libre et comment vous avez découvert cette question.

Stéphane Vangheluwe : Je suis d’abord un fonctionnaire territorial, dans la fonction publique depuis les années 80, en ayant eu un certain nombre d’expériences privées au milieu de ma carrière. Dès le début de ma carrière, j’ai travaillé dans la mutualisation des systèmes numériques pour le compte des habitants, dans une communauté urbaine à l’époque. Je commence donc à avoir un petit peu de boutique, on va dire, dans l’informatique ou les systèmes d’information des collectivités territoriales.
Le logiciel libre. Dans les années 2000, j’ai la chance de découvrir une jolie région qui est la Drôme, la ville de Romans-sur-Isère où je prends la direction informatique en même temps qu’un certain nombre d’élus démarrent leurs nouveaux mandats et souhaitent développer, politiquement, un certain nombre de solutions libres.
Dès ces années-là, la découverte d’une association importante, l’association ADULLACT, l’association pour le développement des logiciels libres dans les collectivités territoriales. On fait connaissance. Très vite la ville de Romans-sur-Isère devient adhérente. Très vite nous déployons, déjà à l’époque, des solutions de bureautique libres pour la totalité des agents de la collectivité, donc très tôt.
Différents détours dans ma carrière professionnelle pour arriver à la mutualisation de services numériques plus structurés au sein d’opérateurs publics de services numériques. Qu’est-ce que c’est que cette terminologie ? C’est une terminologie pour dire que nos sommes des acteurs publics, nous œuvrons pour le compte de collectivités locales et uniquement sur une seule action, le numérique, et nous sommes là pour opérer la mutualisation de ces services qui demandent de plus en plus de moyens, coûtent de plus en plus cher et surtout, requièrent de plus en plus de compétences technologiques.
Peut-être le dernier élément, l’association Déclic qui est une fédération d’opérateurs publics de services numériques, comme le SITIV, au niveau national. Vous pouvez trouver de l’information sur cette association sur asso-declic.fr. Nous sommes une soixantaine d’opérateurs publics en France. Nous représentons plus de 50 % de la population française, beaucoup plus de 50 % des communes françaises, plutôt des acteurs créés par des agences techniques départementales, des centres de gestion ou même à l’initiative de communes, des syndicats intercommunaux. Nous œuvrons uniquement pour les collectivités territoriales, donc des mairies.

Étienne Gonnu : Entendu. Je crois qu’on entend bien, et je l’ai annoncé en introduction, que le mot clé de notre échange sera la mutualisation, c’est revenu régulièrement dans votre propos, à juste titre.
Vous avez commencé à préciser et à dessiner ce qu’est un syndicat intercommunal ou un Opérateur Public de Services Numériques, un OPSN pour les intimes. Je vous laisserai peut-être compléter, si vous le jugez utile, sur ce qu’est un syndicat intercommunal, mais je pense que c’est déjà clair. Peut-être qu’on peut s’intéresser plus précisément à ce qu’est le SITIV, que ce soit en termes d’historique, quels en sont les membres, quelle est son assise territoriale, quelle est sa gouvernance, etc. Qui souhaite ouvrir ce sujet ? Pierre-Alain.

Pierre-Alain Millet : Peut-être parce que c’est moi qui ai la plus longue histoire du SITIV.
Le SITIV a commencé comme un centre de calcul, mutualisé justement, entre des communes à l’origine sur la base de couleurs politiques, il faut être clair. Les choses ont évolué et on a élargi progressivement le champ de la mutualisation. Dans les années 90, c’était un sujet de tension entre le développement de la micro-informatique et l’idée que peut-être tout le monde pouvait en faire, donc chacun faisait de son côté, et puis, très vite, le fait qu’il y avait des enjeux qui poussaient à la mutualisation. C’est la mutualisation qui a gagné dans l’histoire au fil des années. On est d’ailleurs arrivé à une situation très positive pour tous les acteurs de l’agglomération lyonnaise : la création d’une entente. Au-delà des huit communes du SITIV dont les plus grandes sont Vénissieux. Vaulx-en-Velin, on a construit une entente avec la métropole Grand Lyon, quand même un 1 500 000 habitants et la Ville de Lyon pour développer une plateforme commune qui était le résultat d’un appel à projet du plan de relance numérique, un projet significatif qui nous permet aujourd’hui de mutualiser à une très large échelle une plateforme sur les outils collaboratifs – messagerie, bureautique –, basée uniquement sur des logiciels libres.

Étienne Gonnu : Super. Stéphane, vous souhaitez compléter ?

Stéphane Vangheluwe : Si je devais compléter et sortir de l’aspect purement local : au vu du nombre de collectivités présentes en France et de leurs différences de taille, de population, de moyens, de richesses, il a semblé important, même à l’État, de favoriser une homogénéité ou une accélération du développement du numérique, dans les collectivités de plus petite taille, en essayant de favoriser ce mouvement de la mutualisation. Les enjeux d’accélération des calendriers de la transformation numérique nous obligent à être hyper-réactifs, donc à concentrer nos moyens.

Étienne Gonnu : J’aimerais peut-être qu’on ouvre une très légère parenthèse, je pense que le sujet va intervenir, mais on en parlera plus précisément en fin d’émission. Vous avez précisé votre assise géographique, là où est le cœur de métier du SITIV, on va développer là-dessus, mais vous avez également développé ce que vous appelez une entente avec Lyon et la métropole Grand Lyon, qui sont vraiment des collectivités importantes, qui partagent votre territoire. Il y a un notamment un projet Territoire Numérique Ouvert, dans lequel on rentrera en détail en fin d’émission, mais comme je pense qu’on va y revenir, que ce sera peut-être évoqué assez régulièrement pendant notre échange, en une minute ou deux, pouvez-vous peut-être nous présenter cette entente et ce qu’est ce projet TNO, Territoire Numérique Ouvert, je pense que ça pourrait être utile et intéressant. Pierre-Alain, nous vous écoutons.

Pierre-Alain Millet : Je l’évoquais tout à l’heure, effectivement. L’entente est à l’origine un appel à projet France Relance, plan numérique, auquel le SITIV a souhaité être candidat. Comme on avait conscience qu’à l’échelle nationale, l’échelle d’une mutualisation comme fait le SITIV, avec huit communes de 100 000 habitants, ce n’était pas énorme, on a cherché à rentrer en contact avec la métropole de Lyon pour être à une échelle de mutualisation bien plus large. On a donc répondu à cet appel à projet pour développer une plateforme, un portail d’outils collaboratifs mis à disposition des agents et des élus de l’ensemble des collectivités. On visait, en gros, 30 000 utilisateurs de la messagerie, d’outils collaboratifs, de messagerie instantanée, de bureautique collaborative, etc. Nous avons eu la chance d’être retenus sur un projet de plus de deux millions de financements publics, donc de pouvoir développer très rapidement une plateforme à une grande échelle, avec des conditions de robustesse très élevées, de sécurité très élevées et qui est en cours de déploiement dans l’ensemble des collectivités.
Nous appelons le projet Territoire Numérique Ouvert. Le nom ne précise pas que c’est lyonnais parce que, potentiellement, cette plateforme doit pouvoir être réplicable et même étendue ailleurs. On peut donc accueillir de nouveaux acteurs autour de cette plateforme.

Étienne Gonnu : C’est le but de la mutualisation et c’est aussi tout l’intérêt d’utiliser des logiciels libres que de permettre justement cette multiplication et cet essaimage technique.
Je parle de mutualisation, c'est un peu le cœur du sujet, on l’a dit, lorsqu’on parle d’un syndicat intercommunal comme le SITIV. Il serait sans doute intéressant et utile de s’arrêter un peu sur cette notion : qu’est-ce que la mutualisation et pourquoi cette question est-elle aussi importante quand on parle des pouvoirs publics, des personnes publiques ? Ça englobe énormément d’aspects, dans un premier la question est très large et après on va rentrer dans le détail des sujets. Comment présentez-vous, de manière un peu concise, cette question de la mutualisation ? Pourquoi est-ce si important ? Stéphane, allez-y.

Stéphane Vangheluwe : Je vais commencer et je laisserai Pierre-Alain compléter.
Dans notre domaine particulier du numérique, les compétences techniques sont un enjeu de plus en plus important, un enjeu qui est difficilement accessible aux collectivités petites et moyennes. Il devient donc essentiel, pour les collectivités concernées, de pouvoir accéder facilement à toutes ces compétences et en confiance.
Ce qu’attendent nos adhérents, ou les membres de notre mutualisation, du rôle du SITIV, c’est la mise à disposition essentiellement de ressources humaines qui permettent une mise à disposition sécurisée, facilitée, accélérée des services à la fois aux agents des collectivités territoriales, mais aussi aux citoyens, donc de ne pas se faire distancer, de pouvoir suivre l’accélération permanente de ce mouvement numérique qu’on peut d’ailleurs contester ou ne pas ne pas contester, le cas échéant.
Peut-être que la mutualisation c’est aussi, et c’est peut-être important de le noter dans le monde du numérique, une mutualisation neutre. Nous sommes des spécialistes du numérique, nous ne faisons pas de politique, nous ne cherchons pas du tout à mutualiser une politique du système d’information, mais bien plutôt des moyens.
Peut-être le dernier élément : la mutualisation c'est compliqué. Ça se fait mieux et ça se fait beaucoup plus facilement avec des structures d’expérience identique, de taille identique. Ce qui est peut-être original dans ce projet d’entente intercommunale Territoire Numérique Ouvert c’est que c’est la première fois que ça se fait à cette échelle-là entre une ville de très grande importance, la ville de Lyon, entre une métropole et un syndicat intercommunal de collectivités, un OPSN. Nous sommes donc en train d’essayer d’inventer, avec des fois des difficultés, une gouvernance qui permet de faire agir des gens avec beaucoup de moyens, des gens avec moins de moyens et des gens dont c’est le métier de faire du numérique au quotidien.

Étienne Gonnu : Je vais juste me permettre une remarque avent de laisser Pierre-Alain réagir. Vous avez dit que c’est neutre, j’entends très bien et je comprends très bien la distinction que vous faites. C’est vrai qu’à l’April on aime justement beaucoup rappeler que les questions relatives au technique sont éminemment politiques par elles-mêmes et le choix de s’appuyer aussi sur des structures de mutualisation ce sont des vraies questions politiques, mais je comprends que ce n’est pas la question spécifique et la mission spécifique du SITIV qui répond, finalement, aux choix politiques faits par les communes qui adhèrent, si je ne déforme pas votre propos.
Pierre-Alain, je vous laisse réagir à cette question, l’importance de l’enjeu.

Pierre-Alain Millet : Bien évidemment, l’enjeu de la mutualisation est un enjeu politique. Après, concrètement, même si le SITIV a une origine d’une couleur politique, aujourd’hui je fais voter un budget avec des villes de plein de couleurs politiques différentes qui se mettent d’accord sur le budget du ITIV. C’est en sens-là, de ce point de vue-là, je pense, que Stéphane disait que le SITIV est un outil neutre politiquement. C’est d’abord un outil technique et de moyens. Mais évidemment que l’enjeu de la mutualisation est politique.
Pour être un peu brutal, peut-être, pour une collectivité locale il n’y a que deux manières de s’affronter à l’enjeu des compétences qui sont mobilisées dans le numérique. La première c’est de faire appel au privé avec effectivement une dépendance très forte à des acteurs privés qui eux, parfois, vont mutualiser à très large. J’ai connu l’infogérance dans le privé, donc ils vont mutualiser à une large échelle en rendant la collectivité dépendante et avec tous les risques d’interopérabilité. On ne peut pas, non plus, avoir un seul fournisseur privé de tous les services numériques, en réalité on en a plusieurs et les enjeux d’interopérabilité, de choix de normes, vont peser et rendre difficile l’évolution et la maîtrise des systèmes. Au contraire, la mutualisation entre acteurs publics joue un rôle qui est effectivement très politique. Elle permet de construire une compétence numérique capable de « rivaliser », ente guillemets, avec les plus gros acteurs privés, rivaliser n’est peut-être pas le mot puisqu’en fait on les utilise ce sont nos partenaires – évidemment qu’on travaille avec plein d’acteurs privés –, mais on travaille en construisant une capacité de maîtriser les plateformes, les outils, les choix techniques et surtout de les mettre au service de leur déploiement. J’utilisais un proverbe comme enseignant, je ne sais pas s’il a beaucoup de valeur : il n’y a pas de valeur dans le code, il n’y en a que dans les usages du code. Les usages, les pratiques, le travail concret de l’ensemble des agents des collectivités, c’est ça le véritable enjeu, donc déployer ces plateformes, l’ensemble des services numériques pour qu’ils créent de la valeur dans le travail des agents, dans leur relation agents/usagers, ça suppose effectivement de maîtriser ces outils et c’est ce que la mutualisation entre collectivités peut permettre de construire. On a évidemment des compétences, au SITIV, qu’aucune des communes du SITIV ne pourrait acquérir seule et la collaboration avec la métropole, dans l’entente intercommunale, est évidemment un accélérateur de ce point de vue.

Étienne Gonnu : Super. On va peut-être se poser la question plus concrètement de comment le SITIV met en œuvre cette mutualisation.
Vous avez parlé d’interopérabilité qui est une autre notion absolument essentielle, indissociable, à mon sens, de la question de la mutualisation, je vous laisserai peut-être préciser. En somme, l’interopérabilité c’est la capacité des systèmes d’information à pouvoir communiquer sans difficulté entre eux et ça se base sur des normes, des standards ouverts dont on connaît les spécifications techniques. Peut-être que vous pourriez nous apporter votre éclairage sur cette notion d’interopérabilité. Stéphane.

Stéphane Vangheluwe : Peut-être que je vais donner un premier point de vue un peu décalé.
Le premier sujet, l’interopérabilité, c’est un souhait du client, ça n’est pas forcément un souhait du fournisseur qui lui, bien au contraire, va préférer enfermer ses différents clients dans des standards plus ou moins fermés qui vont permettre de monopoliser le chiffre d’affaires et rendre le client, collectivité territoriale, beaucoup plus captif.

Pierre-Alain Millet : Stéphane, à la décharge du fournisseur privé, il faut dire aussi que c’est aussi une manière de réduire les coûts, parce qu’on sécurise, on réduit quand même des risques, du point de l’acteur privé.

Stéphane Vangheluwe : Je partage et très vite on se rend compte que dans le cadre du public, on est amené à faire des consultations, des appels d’offre, pour choisir nos fournisseurs, donc on est fatalement amené à faire jouer le jeu de la concurrence. Pour faire jouer le jeu de la concurrence, il faut garantir la capacité à avoir une interopérabilité entre l’ensemble des systèmes d’information. Pour moi, c'est le premier enjeu opérationnel d’interopérabilité.
Le second, c’est que quand on construit un système d’information, on rajoute progressivement des morceaux, des pièces, des compléments et fatalement, pour rendre tout cela utilisable à la fois par l’habitant ou par l’agent, il faut assurer une certaine cohérence de bout en bout, il faut assurer une certaine dématérialisation de bout en bout, il faut assurer une transversabilité. Pour assurer tout cela, chacun d’entre nous a très certainement choisi une stratégie qui doit être au centre et cette stratégie qui doit être au centre, c’est la capacité de l’ensemble des solutions de pouvoir communiquer entre elles, ne serait-ce que pour, à la fin, nous soyons maîtres de nos données, qui est très certainement le pétrole de nos activités, la valeur ajoutée et ce sur quoi nous sommes tous en train de construire la gouvernance à venir de nos collectivités. On parle d’intelligence artificielle, mais dans les collectivités, sans maîtrise de la donnée, on ne pourra rien faire.
Pour moi mutualisation, interopérabilité, gouvernance de la donnée, transversalité, tous ces sujets-là sont des sujets qui doivent être gérés en même temps. Peut-être que je rajouterais un dernier gros mot qui serait tout simplement souveraineté.

Étienne Gonnu : Effectivement qui regroupe, qui est maintenant le terme valise pour intégrer tous ces sujets, la question de la souveraineté numérique qui va varier en fonction de qui parle. Si on parle de maîtrise des systèmes d’information, dans cette idée-là on voit bien comment mutualisation, interopérabilité, transversabilité, comme vous l’avez très bien dit, s’intègrent et deviennent des critères essentiels pour garantir cette maîtrise.
Je vais me permettre, et vous n’avez pas dit le contraire, mais je vais préciser. Vous avez parlé d’acteurs privés qui, pour sécuriser, pour chercher à enfermer, on va dire, leurs clients, du moins les contraindre à utiliser un certain standard, on peut rappeler qu’il y a un tissu économique vibrant et très fort d’entreprises qui font du logiciel libre, qui s’appuient sur l’interopérabilité, qui n’utilisent que des standards ouverts. Il y a des modèles économiques basés là-dessus qui sont tout à fait viables, qui fonctionnent, qui répondent du coup aussi aux impératifs pour les pouvoirs publics, à certains impératifs d’intérêt général.
Du coup je parle de logiciel libre, je fais cette transition. On sait qu’au SITIV le logiciel libre fait partie de votre stratégie, c’est pour cela qu’on échange aujourd’hui, d’ailleurs vous avez été récompensé, à ce sujet, dans le cadre du label Territoire Numérique Libre, vous avez obtenu le plus haut niveau, on va y revenir rapidement plus tard. Quelle place occupe, pour vous, le logiciel libre dans l’objectif de mutualisation et d’interopérabilité ? Stéphane.

Stéphane Vangheluwe : Une place stratégique. Tout d’abord, peut-être une petite incartade. Effectivement, éditeur privé n’est pas antagoniste avec respect des standards, bien heureusement, et, de temps en temps respect de standards ouverts. D’autant plus que, dans certains cas, la réglementation ou les lois nationales imposent un certain nombre de standards et peut-être que c’est un mouvement dans lequel il faut que l’État français, de plus en plus, se positionne pour légiférer et imposer des réglementations et des standards ouverts, je crois que le législateur est à la manœuvre et qu’il le fait de plus en plus.
Le logiciel libre nous permet d’avoir une relation tout à fait différente dans la gouvernance et dans le tissu économique qui gère ce logiciel libre, qui repose effectivement, pour la plupart, sur la vente de prestations humaines, d’études, de recherche et la coconstruction de solutions pour un plus grand nombre.
La gouvernance des solutions libres n’est pas forcément toujours plus simple, d’autant plus que les modèles sont très variés.
En tout cas, pour ce qui concerne le SITIV, et sur un certain nombre de solutions stratégiques, toutes les solutions qui sont au cœur du processus de dématérialisation des documents, pour une part, toutes les solutions qui sont aujourd’hui au cœur du processus de collaboration avec notre projet de Territoire Numérique Ouvert, mais aussi sur un certain nombre d’outils métiers – et là je peux quand même faire apparaître que malheureusement la concurrence sur les outils métiers des collectivités territoriales n’est pas toujours très présente, que les solutions libres ne sont pas toujours très présentes, il en existe très peu en gestion financière et en gestion des ressources humaines des collectivités territoriales par exemple – en tout cas pour le choix du SITIV c'est à chaque fois la meilleure solution qui permettra, en plus d’avoir une gouvernance dans le long terme, avec une petite préférence pour les solutions libres à partir du moment où leur gouvernance n’est pas compliquée, nous avons opté pour des solutions libres de manière proactive. J’allais dire que parfois ce sont des choix difficiles à expliquer à nos propres adhérents, ce sont des choix volontaires qui ne sont pas toujours simples à mettre en œuvre.

Étienne Gonnu : Vous parlez de choix proactif. C’est vrai que c’est important de rappeler que le Conseil d’État, déjà en 2011, validait le fait qu’on peut faire des appels pour des commandes publiques portant spécifiquement sur un logiciel libre parce que les qualités intrinsèques du logiciel libre garantissent l’égalité d’accès au marché public en cause, ce qui permet à des collectivités et aux syndicats intercommunaux comme le SITIV de faire un choix proactif pour utiliser certains logiciels libres parce que ça répond, en fait, au cœur de leur mission.

Stéphane Vangheluwe : Vous pouvez rajouter à cela le fait que l’État, la Direction du numérique, le service de l’État qui s’occupe de coordonner la stratégie numérique au niveau national, en coordination avec les collectivités territoriales, favorise l’utilisation de ces solutions mutualisées, développe un certain nombre de solutions libres à l’initiative de l’État ou de collectivités territoriales. Le catalogue des solutions commence à être vraiment fourni.
Peut-être une petite remarque sur le tissu des PME ou PME à taille un peu plus importante présentes sur ces marchés : il existe, il est présent, il est de plus en plus organisé, il a encore un peu de mal à rivaliser avec les grandes multinationales, je pense que tout le monde en conviendra, mais c’est aussi le rôle de la puissance publique d’aider ce tissu à se mettre en place, à se coordonner et à proposer des solutions dédiées aux collectivités territoriales.

Étienne Gonnu : Très bien. Avant la pause musicale, je vous propose peut-être de préciser ce que vous entendez par gouvernance et les difficultés potentielles de gouvernance, les questions de gouvernance autour du logiciel libre. C’est vrai qu’on a l’habitude de ces sujets, la réponse paraît évidente, mais je pense qu’elle ne l’est pas pour tout le monde, et si vous souhaitez préciser, je vous invite à le faire.

Stéphane Vangheluwe : Dans les environnements logiciel libre, peut-être en termes de gouvernance opérationnelle, pas de gouvernance politique, on se retrouve, en fonction des solutions libres, avec des modèles qui sont le logiciel libre a été créé à l’initiative d’un éditeur privé qui a donc une économie à gérer autour de cette solution libre, qui propose des services ; ensuite, assez souvent, on trouve des modèles où il y a une forme de cogestion d’acteurs privés ; on peut trouver des modèles où le logiciel est complètement libre avec des acteurs qui coproduisent de façon plus ou moins gratuite, plus ou moins volontaire sur ces projets. En fait, les modèles sont vraiment très différents dans la capacité à influer sur la stratégie d’évolution, de la roadmap du produit proposé.

Étienne Gonnu : Je pense que vous avez mis le doigt sur la question centrale. Je vous ai posé une question difficile. Je comprends le point de vue d’un opérateur comme le SITIV. Cette pluralité, cette multiplicité des profils des communautés qui existent autour des logiciels libres peut être effectivement une difficulté lorsqu’on fait ce choix volontaire du logiciel libre dans la manière dont les décisions sont prises
Pierre-Alain, je crois que vous souhaitiez réagir avant qu’on fasse la pause musicale.

Pierre-Alain Millet : J’entends ces difficultés. Dans le cas d’un syndicat intercommunal qui est au service de communes, donc les communes restent maître d’ouvrage de leur stratégie numérique et de leur choix. On travaille pour favoriser la mutualisation.
Aujourd’hui, si le SITIV a clairement fait le choix du logiciel libre, qu’il le développe partout où il peut, notamment dans ses infrastructures, on n’a jamais dit à nos communes « dorénavant nous ne ferons plus que du logiciel libre ». Sur chaque projet, notamment sur certains projets métiers où il y a peu, il n’y a pas d’acteurs, il n’y a pas de solutions en logiciel libre, ce n’est évidemment pas possible. De manière générale, on travaille avec les communes et c’est bien l’expression des attentes et des besoins d’abord métiers qui construit la décision de mutualisation. Et le Libre vient après en disant « dans les critères d’évaluation des offres, il y a des offres libres ». Le point de départ reste quand même la réponse aux besoins métiers qui sont portés par les communes. Dans ce contexte, le SITIV n’est pas le décideur seul, il est le décideur qui coordonne la décision commune des communes.

Étienne Gonnu : Très bien, ça me paraît clair. Justement, après la pause musicale, on va parler plus concrètement des services, des usages que vous proposez aux collectivités membres.
Je vous propose de faire une pause musicale. Restez bien en ligne avec nous Stéphane, Pierre-Alain, on se retrouve juste après dans à peu près trois minutes. Nous allons écouter You’ll Never Walk Alone par RMSTM. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : You’ll Never Walk Alone par RMSTM.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Étienne Gonnu : Nous venons d’écouter You’ll Never Walk Alone par RMSTM, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC BY. Merci encore au site Au bout du fil pour cette belle découverte, d’ailleurs je vous invite à découvrir la présentation de l’artiste et du morceau sur leur site. Vous trouverez, comme d’habitude, le lien sur la page de l’émission. Je vous en lis un extrait, je cite : « Qui se cache derrière ce mystérieux pseudonyme RMSTM ? L’auteur de You’ll Never Walk Alone s’appelle Thomas Chary, il vient d’Annecy. Pour lui, la musique n’est pas un métier mais une passion. […] You’ll Never Walk Alone est une musique tellement originale, tellement unique qu’il me semble difficile de la classer dans un style musical. Quoi qu’il en soit, on ne peut que reconnaître qu’elle est fortement inspirée de l’univers de la musique country. On retrouve la guitare acoustique, la voix grave et profonde des chanteurs de country et surtout, la thématique de la conquête de l’Ouest et de la ruée vers l’or. »

[Jingle]

Deuxième partie

Étienne Gonnu : Je suis Étienne Gonnu

1 h 17 min 15 - Chronique « Lectures buissonnières » de Vincent Calame intitulée « Politique et de semences »

Étienne Gonnu : Vincent Calame s’est installé avec moi. Vincent, est-ce que tu as passé un bel été ?









[Virgule musicale]

1 h 23 min 15 - Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l'April et le monde du Libre